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LE DICTIONNAIRE VAVASSORI

dessins de

Per tuzé

Dictionnaire des mots et expressions de la langue française parlée dans le Sud-Ouest, et de leurs rapprochements avec l’occitan, le catalan, l’espagnol, l’italien et l’argot méridional. LOUBATIÈRES


© Nouvelles Éditions Loubatières, 2002 10e édition, 2008 10 bis, boulevard de l’Europe, BP 27 31122 Portet-sur-Garonne Cedex contact@loubatieres.fr www.loubatieres.fr ISBN 978-2-86266-543-6


Bernard VAVASSORI

Dictionnaire des mots et expressions de la langue française parlée dans le Sud-Ouest, et de leurs rapprochements avec l’occitan, le catalan, l’espagnol, l’italien et l’argot méridional.

dessins de Pertuzé

LOUBATIÈRES



Introduction La région de Toulouse souffre de n’avoir aucun nom qui lui aille. Languedoc lui aurait peut-être plu (mais il n’y a pas que du Languedoc du côté de Toulouse, et puis on a préféré appeler ainsi la région de Montpellier). Ou bien Languedoc - Gascogne, (pour ne pas oublier la rive gauche de la Garonne). Ou Midi toulousain (pour parler comme les météorologues). Ou bien, pourquoi pas, Occitanie centrale… Les énarques parisiens lui ont préféré Midi-Pyrénées, ce qui ne veut rien dire pour un Aveyronnais qui vit dans le Massif Central, ou un Lotois du nord qui est presque aussi près des Pyrénées que des Alpes ! Bref, Midi-Pyrénées, comme la plupart des régions françaises, est une région artificielle. Elle a été faite de morceaux : un peu de Languedoc, un peu de Gascogne, un peu de Rouergue et un peu de comté de Foix… Donc, et malgré les efforts du conseil régional dans ce domaine, l’idée d’appartenir à une même entité historique, géographique ou politique est extrêmement peu répandue dans la population. On dira extrêmement rarement que l’on est Midi-pyrénéen. On préférera dire que l’on est de la Haute-Garonne, du Gers, de l’Ariège, des Hautes-Pyrénées, du Lot, de l’Aveyron, du Tarn ou du Tarn et Garonne. Cela dit, notre terre, celle dont Toulouse est capitale, étant toute entière en pays occitan, chacun des départements qui la composent a en commun avec tous les autres, la langue d’Oc. C’est en effet l’occitan qui a donné toutes ses particularités au français parlé dans cette région. À commencer par l’accent. Ainsi, n’y a-t-il aucun village du Sud-Ouest où l’on ne parle pas le français avec l’accent du Midi. Aucun non plus où l’on n’y roule pas le r, peu ou prou, même si cette particularité disparaît 7


peu à peu. Bien que les progrès de la scolarisation et l’omniprésence de la télévision (parisienne, régionale ou même toulousaine) tendent à uniformiser la manière de parler le français, du nord au sud de la France, l’occitan (languedocien ou gascon) a profondément marqué la phrase française de notre région et laissé des traces dans le rythme, l’accent, la syntaxe et le vocabulaire quotidiens. La récente industrialisation de la région toulousaine et plus particulièrement de sa capitale, a attiré de nombreuses personnes natives du Nord de la France. Celles-ci ont contribué, avec les médias cités plus haut, à la disparition progressive des caractères trop marqués du parler méridional, comme les R fortement roulés, les voyelles très ouvertes, etc. Le brassage de la population a progressivement conduit les méridionaux à prendre conscience des particularités du français qu’ils parlent et à se « corriger », c’est-à-dire à imiter le parler du Nord. Ainsi, lorsqu’un Aveyronnais demande à une personne récemment installée dans la région, s’il a trouvé du roulage pour rentrer à Toulouse, celle-ci comprendra, certes, de quoi on lui parle, mais peut-être finira-t-elle par lui faire remarquer que ce mot ne figure pas dans le Larousse ! Et, si on lui dit que ça boulègue un peu ici quand le vent d’autan buffe, elle demandera probablement des explications ! Même si sa région est la plus belle du monde, le Toulousain va quelquefois voir ailleurs si l’air est bon. Et, si par hasard il vient à demander une chocolatine dans une boulangerie des Champs-Élysées ou une poche dans une grande surface de l’Île-de-France, il se peut qu’il ne soit pas compris… Comme il est fier, il honnira le Parisien ignare. Une fois rentré chez lui, il racontera sa mésaventure à tout le quartier ou à tout le village, puis il injuriera de nouveau et à distance les gens du nord de la Garonne. Mais, en cachette, il vérifiera son vocabulaire, pour que la fois prochaine, lorsque son travail ou ses loisirs le renverront vers les brumes septentrionales il ne soit pas pris au dépourvu. Ainsi aura-t-il appris que « là-haut » on ne dit pas chocolatine mais pain au chocolat, qu’on ne dit pas poche mais sac plastique, qu’on ne dit pas cueillère mais cuillère… Et, impressionné par le trafic parisien, il évitera de dire au chauffeur de taxi qui le ramènera vers l’aéroport, « Et oh, con ! Y en a du roulage par chez vous ! ». Cela ne fait aucun doute !

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Et ainsi, de voyages en voyages, de rencontres en rencontres, d’ouvertures au monde en ouvertures… il finira par parler… comme tout le monde ! Ainsi m’a-t-il paru urgent de rassembler ces mots, ces « incorrections »… qu’on n’entendra bientôt plus. Juste pour que l’on se souvienne de la couleur de cette langue, lorsque dans quelques années d’ici, au xxiie siècle, on parlera, depuis les Ardennes jusqu’à la frontière espagnole, le même langage standard…


Avertissement Ce recueil ne se veut aucunement exhaustif. Les mots et expressions rassemblés ici ont été entendus au moins une fois par l’auteur. La plupart l’ont été souvent ou très souvent. Beaucoup sont des réminiscences plus ou moins lointaines. Les plus anciens des lecteurs les reconnaîtront toutes ou presque, suivant le département. Les plus jeunes n’en connaîtront peut-être qu’un petit tiers. Certains les orthographieront différemment… Et que ceux qui n’y retrouvent pas leur vocabulaire préféré me pardonnent et prennent un carnet, afin de noter, noter, noter…, comme le photographe inquiet de voir disparaître les images de sa jeunesse, et les sauver ainsi de l’oubli.

Notes et abréviations Lorsqu’un mot, une expression ou une manière de parler est propre à une région du Sud-Ouest, cela a été signalé en petites capitales : – languedoc : est de la zone. – midi toulousain : région de Toulouse et zones limitrophes des départements environnants. – rouergue : Aveyron et zones limitrophes. – gascogne : Gers, nord des Hautes-Pyrénées, etc. – sud-ouest : Aquitaine, Midi-Pyrénées et Aude. En cas d’incertitude, rien n’est signalé. Tant il est vrai qu’un mot ou une expression peuvent voyager avec les personnes qui les utilisent et s’installer progressivement dans le parler local. 10


D’autre part, il nous a parut intéressant de souligner les nombreuses similitudes lexicales ou syntaxiques entre la phrase et les mots méridionaux, d’influence occitane, et la phrase et les mots catalans, espagnols ou italiens. Lorsque cela sera le cas, l’on trouvera en petites capitales la correspondance dans chacune de ces trois langues. Toutefois, pour ne pas surcharger la présentation, nous avons choisi dans le chapitre « Syntaxe » de ne faire de comparaisons qu’avec la langue espagnole.

Listes des abréviations

adj. : adjectif adv. : adverbe art. : article conj. : conjonction dem. : démonstratif exclam. : exclamatif expr. : expression f. : féminin fig. : figuré ind. : indépendant interj. : interjection loc. : locution m. : masculin m. à m. : mot à mot n. : nom N.B. : nota bene num. : numéral onomat. : onomatopée

part. pass. : participe passé péjor. : péjorativenent pl. : pluriel pr. : pronominal préf. : préfixe prép. : préposition pron. : prononciation sing. : singulier v. réf. : verbe réfléchi cat. : catalan esp. : espagnol fr. : français gasc. : gascon ital. : italien mér. : méridional occ. : occitan


Lectures des mots occitans L’accent écrit : barricòt, indique la place de l’accent tonique et si la voyelle est fermée ou ouverte. lettres a-à à l’intérieur d’un mot ou accentué

a final atone

o ò on ai ei oi au eu ou ch nh lh u n en fin de mot ne se prononce pas toujours

r en fin de mot ne se prononce pas

s en fin de mot est sonore

t en fin de mot est sonore

exemples

prononciation

bartàs

[a]

[bartass]

Tolosa

[o]

[Toulouso]

Tolosa quicòm bon, pichon mai rei boira autan benlèu nòu chaupinar castanha pelha una

[ou] [Toulouso] [o] [quicom] [ou] [bou, pitchou] [ay] [may] [èy] [rèy] [oy] [boyro] [a-ou] [a-outà] [è-ou] [belè-ou] [o-ou] [no-ou] [tch] [tchaoupinà] [gn] [castàgno] [ill] [peillo] comme dans million [u] [uno]

poton, Tarn

[poutou, Tar]

parlar

[parla]

bartàs

[ss]

[bartass]

canhòt

[tt]

[cagnott]


Particularités de prononciation ai ais ait et

Comme dans poulet, mulet, parlerais, lait, parfait, etc. se prononce [ê] en Gascogne et se prononce [é] dans le reste de Midi-Pyrénées. Les patronymes et toponymes en -et, se prononce [ét], avec un t très sonore, Muret, Portet, Aubiet, Fenouillet, Brunet, Bouget, Bouxet, Coupet… dans tout Midi-Pyrénées. (N.B. : se prononce ouvert [ê] en français du Nord).

an en in on

En Aveyron en particulier, les mots terminés par in, em, en, ent, ant, on, ont… se prononcent avec un n dental sonore chaque fois que cette lettre est nasale en français : matin [matènn], Aveyron [avéronn], temps [tann], avant [avann], comment [comann]… Les Toulousains qui se moquent des aveyronnais disent : Il est de l’ [Aveyronn], il aime le [bonn] [jambonn] et le [saucisonn]. Notons que cette tendance s’estompe et que seules les personnes de la campagne ou les plus âgées prononcent ainsi aujourd’hui. De même à l’intérieur des mots : ancien peut se prononcer [antsienn], conserve [contserve]…

au o

Dans chaude, rose, chose,… le [o] se prononce ouvert comme dans cor. (En français du Nord, le o de rose, chose, hôte, côte… est prononcé comme dans haut.) De même pas de différence entre hôte, hotte et haute, côte et cote…

e

Classique dans tout le Midi, le e final se prononce, mais en Midi-Pyrénées, il est plus proche du son [eu] que du son [a] caractéristique du parler provençal : pour Nadine ou Janine, on dira [Nadíneu] ou [Janíneu], par13


fois presque [Nadíné] ou [Janíné] plutôt que [Nadína] ou [Janína] comme à Nîmes ou à Marseille. Entre deux consonnes, le e se prononce également : On dira carrefour quand les Parisiens diront [carfour], pâquerette quand les Français du Nord diront [pakrèt], déjeuner quand ils diront [déjner], etc. eu

Comme dans Creuse, Meuse…, prononcé très ouvert, avec un son proche du [a], alors qu’en français du Nord, ce son est très fermé, plus proche du [u]. Par exemple, dans heureuse, le premier [eu] est fermé, le second est ouvert, alors qu’en français du Nord, les deux [eu] se prononcent fermés.

-ent

La terminaison en -ent se prononce [eut] : – À quelle heure ils partent [parteut] les petits pour aller à l’école, eh ? de plus en plus rare.

final

ill

Dans certaines campagnes, le ill des mots paille, quille… se prononce « mouillé » comme dans le français million ou l’espagnol calle : J’ai dit à la fille qu’elle aille ramasser la vieille paille. [filiö], [ailiö], [vièliö], [paliö].

oin

Les anciens le prononcent en général [ouan] : foin [fouan], moins [mouanss]. Les plus jeunes le prononcent comme en français du Nord, [ou-in] : [fouin], [mouin]…

bl

Il arrive encore, que les consonnes bl de certains mots se transforment en [pl] : la [taple], le [saple], ce vin est [trouple], [impécaple]…

c ch, ct

On entend encore, le son [k] à la fin de mots comme estomac, almanach, broc, escroc, suspect, respect… Curieusement le mot avec a perdu son [k] final et se prononce [avé].

final

cons-

Comme dans constant, constituer, construire, cette syllabe est prononcée [cos] : [costant], [costituer], [costruire]. 14


d final

h aspiré

Le d dans : Sud, David… se prononce comme un [t] : [Sut], [Davit]… Le h aspiré devient quelquefois muet. Au lieu de [le hangar], on peut entendre encore [l’angar], [le hourdis], [l’ourdi], [la hernie], [l’erni], [les haricots], [lézarico], etc. À noter ici l’influence du languedocien qui n’a pas de mot commençant par h, donc qui ne connaît pas le h dit aspiré. Exception faite du Gascon qui transforme les f initiaux en h fortement aspirés.

l final

Le l final du suffixe est sensible dans chenil, persil, baril, gril, sourcil, mais ne se prononce guère dans fusil, gentil…

li Se prononce, dans toute la région, très souvent [ye], comme dans milieu [miyeu]. n final

Comme dans Tarn, Béarn, on note ici une influence de l’occitan où cette lettre est insensible en finale. Ainsi dit-on [Tar’] ou [Béar’] à la campagne ou chez les personnes âgées.

ni Comme dans union, fanion, manière, panier… se prononce encore très souvent [gn], [ugnion], [fagnion], [magnière], [pagnier]… nn Comme dans : année, ennemi, Anne, ennui… les deux n se prononcent très nettement : [an-née], [en-nemi], [An-ne], [en-nui], [ten-nis]… En français du Nord on prononcera [ané], [énemi], [Ane], [annui], [ténis]… Il se peut en revanche que des mots ne comprenant qu’un seul n soient prononcés comme s’il y en avait deux : dîner, [dîn-ner]. r Le r est roulé à la campagne – plus rarement à la ville –, mais seulement par les personnes les plus âgées, Dans des mots comme béret, baraque, carotte, il est prononcé très roulé comme s’il était double ou triple [bérr15


ret], [barrraque], [carrrotte]. Par contre, certains mots de deux r, comme erreur, sont prononcés comme s’il n’y avait qu’un seul r très peu roulé. Cette manière de prononcer le r a bien entendu tendance à disparaître. En Gascogne, il arrive que si un mot a deux r, le premier ne soit pas roulé et soit au contraire prononcé très pharyngal, à la manière de la jota (j) espagnole, et que l’on roule le second : [remorrque], [regarrde]…, que certaines personnes ayant eu des difficultés à se défaire du roulement du r, le prononcent par la suite très pharyngal. NB : le r roulé n’est pas considéré comme incorrect en français. Au Québec notamment. s Dans des mots comme cataplasme, catéchisme, slip, se prononce [z], [cataplazme], [catéchizme], [zlip]. s final

Le son [s] final est encore prononcé, bien que rarement, dans des mots comme gens, moins, plus, os, avis, tandis que, jus, Doubs…

t final

Comme dans nuit, lit, Portet, Aubiet, Duprat, Coupet… Se prononce sonore à la campagne ou chez les anciens. Cette tendance est de plus en plus rare de nos jours mais particulièrement fréquente il y a une vingtaine d’années.

x Dans des mots comme fax, boxe, exact, fixer… le x est encore quelquefois prononcé [ts] ou [dz], [fats], [botse], [edza], [fitser]… Dans explication, excuse, eux, ceux, six janvier, dix juin… il se prononce encore, bien que rarement, comme un [s] : [esplication], [escuse], [eus], [ceus], [sis] janvier, [dis] juin… z final

Comme dans gaz, Lopez, Fez… se prononce [s] : [gas], [Lopès], [Fès]… Occitan, italien, catalan et espagnol : gas.


Particularités de syntaxe La plupart des différences entre le français parlé dans le Midi et langue officielle sont en général des calques occitans. Ces « incorrections » qui faisaient et font encore le charme de notre parler méridional disparaissent donc, et hélas diront certains, avec le temps. La plupart sont relevées chez les personnes les plus âgées ou originaires de la campagne, mais aussi chez ceux qui, les employant à dessein, veulent défendre un patrimoine culturel.

Accumulation de pronoms ou pronoms employés différemment

Adverbes en tête

Une des caractéristiques du parler méridional est l’accumulation des pronoms. – Si tu veux te l’emporter, tu te l’emportes ! Construction similaire en espagnol : Si quieres llevártelo, llévatelo. – Jette-moi-s’y un coup d’œil à cette voiture, avant de partir, sinon, je vais me retrouver en panne ! – Donne-moi-s-en une ! – Tu te le fais facile, toi ! – Ici, on se mange et se boit tout ce qu’on se porte. esp. : Aquí uno se come y se bebe todo lo que se trae. – Je te lui ai foutu une castagne, con ! – Le vent, il souffle par ici ! En automne, les feuilles elles tombent. – Et jamais tu viens me voir ! Tu ne viens jamais me voir ! esp. : ¡ Nunca vienes a verme ! – Et encore tu es là, toi ? Tu es encore là ? esp. : ¿ Todavía estás aquí ? – Et toujours tu parles autant ? Tu parles toujours autant ? esp. : ¿ Siempre hablas tanto ? 17


Articles en plus

Omission de l’article

Comme dans : – Je ne veux pas qu’il soit le dit que je raconte des mensonges… Ou article à la place du possessif : – Le gendre me l’a dit ce matin. (la fille, la femme, le Roger). Dans des expressions comme : – À Carnaval, à Toussaint… : Le jour du Carnaval, à la Toussaint… – Je viens te chercher dans demi-heure. : …dans une demi-heure. esp. : dentro de media hora. – Donnez-m’en demi-livre (demi-litre). : …une demilivre (un demi-litre). esp. : Póngame medio litro…

Possession La possession est marquée dans la phrase méridionale par l’emploi fréquent du pronom personnel, (Voir Accumulation de pronoms). : – Mets-toi le chapeau, que tu vas m’attraper une insolation ! : Mets ton chapeau. esp. : ponte el sombrero. – Quitte-toi les chaussures. esp. : Ote tes chaussures. –Tu ne trouves pas qu’ils me sont trop grands ces pantalons ? : …ce pantalon est trop grand pour moi. esp. : Estos pantalones me vienen muy grandes. – Monsieur, il m’a fait une tache sur le cahier ! esp. : …il a fait une tache sur mon cahier. esp. : Me ha hecho una mancha en el cuaderno. – Viens te frotter les pieds par le paillasson avant de rentrer ! : Viens frotter tes pieds… avant d’entrer. – Je t’ai lavé le pull rouge ! : J’ai lavé ton pull rouge. esp. : Te he lavado el jersey… Préposition de

Entre un nom et un adjectif, il arrive que l’on rajoute la préposition de : – Samedi il y aura dix élèves de collés. : …dix élèves collés. (Incorrection relevée aussi dans d’autres régions du Nord de la France). Pour demander un éclaircissement ou une explication on demandera : 18


Prépositions employées différemment

Terminaisons en -ou -oune

Terminaisons en -as -asse Terminaisons en -ent

– De quoi ? : Quoi ? Quoi donc ? – Je t’ai préparé un cageot de salades pour emporter. : …à emporter. esp. : …para llevar. – Je me suis acheté une pierre pour aiguiser. : …à aiguiser. – Tu te l’ai mise à la poche ! : …dans la poche. – Tu t’es levé bien à bonne heure ce matin ! : de bonne heure. – Ca a goût à brûlé : ça a un goût de brûlé. – C’est le vélo à mon frère. : …de mon frère (incorrection non exclusive du Midi). Dans les prénoms : Guitou, Djandrou, Claudou, Jeantou, Hortensou… Diminutifs de Guy, Alexandre, Claude, Jean, Hortense… Dans les patronymes : le Pougetou : Le petit Pouget, le Clotou : le petit Clot. Dans les noms communs d’origine occitane, poutou, petitou, nénou, cabécou, carnou, barricou, ventrou, siétou, siestou… : simplement petit, mais souvent petit et mignon à la fois. Parfois employé à l’adresse des enfants. Même utilisation du suffixe diminutif -ito en espagnol. Au féminin la terminaison devient -oune : petitoune, Christoune, noune… Suffixe augmentatif, comme dans : gitanas, espèce de grand gitan, grandas, très grand, pégas, grand fou, paysanas, péquenot, counas, grand con, etc. Au féminin : gitanasse, pégasse, paysanasse, counasse, etc. Prononcées [eut] par quelques rares anciens et à la campagne seulement : – Et bé, pauvre, c’est l’automne, il faut bien que les feuilles elles tombent [tòmbeut].

Futur – Je croyais avoir mis le portefeuille sur le buffet, mais non ! Et cherche que tu chercheras… – Et tu sais pas où il était ? – Et non ! – Chez la boulangère je l’avais laissé, macarel de nom de nom qu’il me fait dire ! Verbes employés différemment

S’acheter quelque chose (conjugué avec l’auxiliaire être) : – Je me suis acheté un ordinateur. : …J’ai ache19


Verbes employés différemment

té… esp. : Me he comprado un ordenador. S’emporter quelque chose (conjugué avec l’auxiliaire être) : – Ce grand couillon il s’est emporté la clé, et maintenant on est fermés dehors ! : …il a emporté… esp. : Se ha llevado la llave. Tomber quelque chose (conjugué avec l’auxiliaire avoir) : – Tu n’as pas tombé le marteau, là ? : …laissé tomber, fait tomber. Confesser : – Je vais aller confesser. : …me confesser. Promener : – Bonjour madame ! Alors, on va promener ? : …se promener… Moucher : – Avec ce rhume, je n’arrête pas de moucher ! : …de me moucher… Suer quelque chose : – Dans un boulot comme ça, tu sais que tu as de quoi suer la chemise ! : …de quoi suer… Ressembler quelqu’un : – Et qui il ressemble ce petit ? : …à qui il ressemble… De plus en plus rare. Apprendre quelqu’un. – Qu’est ce que vous faites, les jeunes ? – Je l’apprends à jouer à la belote ! Mais tu sais qu’il apprend vite, eh ! Avoir besoin quelqu’un : – Si tu m’as besoin tu m’appelles ! : …si tu as besoin de moi… esp. : Si me necesitas… Aider à quelqu’un : - Il faudrait que j’aille lui aider à rentrer les moutons avant qu’il fasse nuit ! … que j’aille l’aider. Se changer quelque chose : – Je me change les pantalons et j’arrive ! : Je change mon pantalon… esp. : Me cambio los pantalones. Se quitter quelque chose : – Quitte-toi la veste, si tu as trop chaud ! : …enlève (ôte) ta veste… esp. : Quítate la chaqueta. Se sortir quelque chose : Sors-toi les chaussures si tu as mal aux pieds ! : …enlève, ôte tes chaussures… S’en voir : – Tu sais qu’il s’en voit avec ce drôle, eh ! : …il en voit de toutes les couleurs… – Il s’y voit les pierres. S’y voir : – Mets la lumière qu’il s’y voit rien là-dedans ! : …on n’y voit rien… Très rare. esp. : No se ve nada.




à

N.B. esp. : La prép. a est présente devant le complément d’objet de personne ou d’être animé : Veo a mi padre ; la persona a quien veo. ® 4 – Je l’entends tout le temps à se plaindre ! : …tout le temps se plaindre. rare et rural. ® 5 – À carnaval, à Toussaint : Le jour du carnaval, à la Toussaint. ® 6 – À tant qu’à faire, tu aurais pu aller voir ta tante… : Tant qu’à faire… ® 7 De. – Ça a goût à brûlé. : Ça a un goût de brûlé. – Elle est en état cette voiture, eh ! En plus elle est chaussée à neuf ! : …chaussée de neuf. – Et qui c’est celui-là ? C’est pas le fils à Lucien ? : …le fils de Lucien. Notons que cette manière de parler n’est pas exclusive du Midi de la France. ® 8 – Ouh ! Mais tu t’es levé bien à bonne heure ce matin ! Tu vas aux cèpes ou quoi ? : …bien de bonne heure. ® 9 loc. Beaucoup plus employée dans le Midi que dans le parler standard. – Dimanche je vais au ski à la Mongie / – Je vais aux champignons / – Je vais aux boules : … je vais faire du ski… / …cueillir des champignons / …jouer à la pétanque.

à, au, aux Dans le parler méridional les prépositions sont employées différemment du français du nord de la France. La plupart du temps la phrase méridionale est un calque occitan. La préposition à constitue un bon exemple d’emprunt à la langue du midi. ® 1 Dans. – Mais tu habites pas à la rue Alsace, toi ? : …dans la rue Alsace (ou simplement : …rue Alsace). – Tè ! Mets-toi ces cent francs à la poche et ne dis rien à personne : Mets ces cent francs dans ta poche… ® 2 – Le voisin, il a perdu sa femme, je ne pouvais pas faire à moins que d’aller à l’enterrement… quand bien même on est fâché depuis qu’rante ans ! : …je ne pouvais pas faire moins que d’aller… ® 3 S’emploie devant le complément d’objet direct de personne ou d’être animé, en gascogne et midi toulousain. – Tu m’emmèneras à moi, à la pêche, un jour ? : Tu m’emmèneras, moi… ? – Je vous quitte en vous embrassant bien fort à tous, ainsi qu’à tatie Louisette. : …en vous embrassant bien fort tous, ainsi que tatie… – Ça te regarde à toi ? : Ça te regarde, toi ?

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abarrejadis abarrejadis n. m. Fouillis. – Viens m’aider à chercher cette satanée clé que je cherche depuis demi-heure ; j’y comprends plus rien moi dans cet abarrejadis que tu as mis sur ce bureau ! (De l’occ. abarrejar : mélanger et abarrejadis : pêlemêle, confusion, foule). cat. : barrejadissa = mélimélo, salmigondis et esp. : barajar = mélanger. Voir bouillaque, rébourdélé. abat d’eau expr. Averse. – Il vient de te tomber un abat d’eau, canaille de sort ! J’avais que les dents à l’abri ! Voir chagat, délaouatz, faysses, gouttes, liabas, plège.

abonde (porter) expr. ® 1 Faire du volume. – Bon, je vais faire des monjettes à midi, parce que ça au moins, ça porte abonde ! ® 2 Rapporter. – Oh ! lui, raï, il fait un métier qui porte abonde. (De l’occ. abondar [pron. abondà]). cat. et esp. : abundar, ital. : abbondare = abonder.

abélugué adj. Vif, éveillé, comme une

bélugue ou comme une étincelle. – Il est drôlement abélugué, le petit. (De l’occ. beluga [pron. bélugo] étincelle). Voir esbérit.

v. Renverser, verser. – Qu’est ce que tu as fait à la voiture malheureux ? – En passant le petit pont, j’ai abouqué. (De l’occ. abocar [pron. aboucà]). cat. : abocar = même sens. Voir décaniller, tomber, verser. abouquer

abracadis n. m. Côtelettes cou-

pées en morceaux. (De l’occ. abracar : couper en morceaux). v. réfl. : Déborder pour un liquide. – Attention, le lait va s’abronder. (De l’occ. abron-

abronder (s’)

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aganir

interj. et n. m. Mot occ. – Allez, adichatz ! À la prochaine ! : …au revoir ! (De l’occ. adieu-siatz, adessiatz, adissiàs).

adichatz

adieu interj. et n. m. ® 1 Bonjour ! salut ! S’adressant à quelqu’un que l’on tutoie, en arrivant. – Et adieu ! Tu vas bien ? ® 2 Au revoir ! S’adressant à quelqu’un que l’on tutoie, en partant. – Allez, adieu et… porte-toi bien ! ® 3 – Si je vais le voir, tu crois qu’il m’écoutera ? – Oh ! adieu ! C’est top tard, maintenant ! …n’y compte pas !… (De l’occ. adieu [pron. adíou]).

dar). Il existe à Toulouse un groupe de jazz dont le nom est Loule Sabronde (L’oule s’abronde : la marmite déborde). Article relevé sur Internet à son sujet : « Maoajit (maladroit N.D.A.) s’enrichit d’un percussionniste et devient Loule Sabronde. Ce projet chanté en occitan bénéficie d’un touché jazzy fort sympathique ». Voir asounder. accrocher (s’)

afargué (mal) Voir arranger, braguer,

débraguer, dégaillé, dégargaillé, déjarguer, despapatcher, despipadé, ensacher, fargué, jargué, marquer. afart n. m. (Mot occ. afart : gros repas). – Tu es allé au banquet des anciens combattants ? – Oui ! On s’est mis un de ces afarts, attention ! cat. : afartar-se de manjar, même sens ; esp. : hartar = gorger, rassasier. Voir assadouler, bâfras, farnac, hart, hartère, rabaner, sadoul.

Voir attraper (s’).

acheter à feu d’argent expr. Acheter à prix d’or. (De l’occ. crompar a fuòc d’argent). Voir argent, arraquer, plaindre, tant, vendanger. achever

agacis n. m. Cors au pied. – Ouh ! Je sens que le temps va changer. Mes agacis me font souffrir. (De l’occ. agacin [pron. agací]). Voir crébère, foutu, lancer, mal (avoir du), patchaque, pét de travers, pierres (souffrir les), poutingue, requinquiller, traç.

Voir finir.

acouder v. Tasser. Se dit de la pâtisserie mal levée. – Cette fouace de Villecomtal, je l’aime moins que les autres. Elle est toujours un peu acoudée. (De l’occ. acodar ou acodir [pron. acoudà ou acoudí]).

aganir v. Crever de faim, ne pas avoir assez à manger. – Dépêche-toi de servir la soupe qu’on est en train d’aganir

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LE DICTIONNAIRE VAVASSORI

C’est l’occitan qui a donné toutes ses particularités au français parlé dans le Sud-Ouest. À commencer par l’accent. Ainsi, il n’y a aucun village de cette région où l’on ne parle le français avec l’accent du Midi. Aucun où l’on n’y roule pas le r, peu ou prou. L’occitan – languedocien ou gascon – y a profondément marqué la phrase française et laissé des traces dans le rythme, l’accent, la syntaxe et le vocabulaire quotidiens. Depuis la parution de Avé plaisir, en 1999, Bernard Vavassori a poursuivi sa moisson de mots et expressions. Avec l’aide de nombreux lecteurs, le “petit précis” est ainsi devenu le “dictionnaire”, s’enrichissant au passage de 650 nouveaux articles et de plus de 100 dessins. Les mots et expressions rassemblés ici ont tous été entendus par l’auteur. Beaucoup sont des souvenirs, parfois lointains. Les anciens les reconnaîtront tous ou presque ; les plus jeunes en apprendront beaucoup, tous en apprécieront la saveur… L’auteur, Bernard Vavassori, fils d’Italiens né dans le Gers, est aujourd’hui professeur d’espagnol à Toulouse. Avant cela, son métier l’avait amené dans le Gers puis dans les HautesPyrénées et dans le Tarn-et-Garonne. Amoureux de toutes les langues latines, il s’est passionné pour leur capacité à parler de la vie et des jours.

ISBN 978-2-86266-543-6

17,50 €


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