LES TERROIRS SANCERROIS
UN HÉRITAGE GÉOLOGIQUE, CULTUREL ET IMMATÉRIEL
Préface de Pascaline Lepeltier
Master Sommelier, Meilleur Sommelier de France 2018, Meilleur Ouvrier de France
Loubatières
PRÉFACE DE PASCALINE LEPELTIER
Master Sommelier, Meilleur Sommelier de France 2018, Meilleur Ouvrier de France
La nature est un livre ouvert, à qui veut la lire… Il fallait sans nul doute le regard croisé d’un enfant du pays ayant grandi entre vignes et chai devenu probe historien pour nous o rir une lecture des paysages sancerrois à la hauteur de la remarquable complexité, palimpseste oublié, de ce territoire. Il fallait cet amour exigeant et profond de sa terre pour remonter aux sources de cet héritage patrimonial unique, telles les racines d’un cep au biotope préservé remontent à ses grappes d’in mes traces de marnes de Saint-Doulchard ou de calcaires de Buzançais, permettant au vigneron respectueux de sa terre de capturer en bouteille son terroir. Ou devrais-je dire son climat ? Car parmi les milliers de choses que j’ai apprises à la lecture de ce fascinant petit livre, l’une des plus sensationnelles et qui m’était totalement inconnue, est la préséance de Sancerre sur la Côte d’Or bourguignonne en termes de singularisation et de reconnaissance de leurs terres viticoles : en 1482 les Bois Ra ns de Chavignol étaient mentionnés comme « climat » par les religieuses bénédictines de Saint-Laurent de Bourges, un siècle plus tôt que la première utilisation par les chanoines de Saint-Mamet de Langres
au sujet du Clos du ChamptBerthin (1584). Non seulement ce concept a été employé, mais il s’est aussi incarné et a créé le nage sancerrois, trouvant ses origines dès le xie siècle et vivant encore aujourd’hui, sensible dans l’intrication du cadastre parcellaire mais insoupçonné de la majorité des amateurs, sommeliers, critiques, journalistes du vin, et peut-être même vignerons. Comment cela est-il possible ? Pourquoi l’appellation sancerroise, à l’instar de la Bourgogne, ne s’est-elle pas appropriée cette incroyable complexité, la reconnaissant, l’utilisant pour valoriser un patrimoine unique dont la valeur est justi ée par l’équilibre dynamique entre le matériel (géologique, pédologique, climatologique, physiologique, etc.) et l’immatériel (le savoirfaire viti-vinicole, les traditions, le goût, le marché, etc.), le naturel et le culturel – pour reprendre la très belle expression de M. Aubert de Villaine, porteur passionné de l’inscription des Climats du vignoble de Bourgogne au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’Unesco : une « alchimie entre un lieu, une nature, des hommes et des siècles » ?
Sancerre. Mondialement le nom résonne, et l’appellation peut
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Les hémérobes sont de précieux auxiliaires de la vigne contre les vers de la grappe. Ils sont en particulier hébergés par l’amandier commun, hôte également des chrysopes. Dans la vallée de la Loire, l’amandier était fréquemment associé à la vigne sous l’Ancien Régime. Il a aujourd’hui disparu, chassé des vignobles monoculturaux. Pascaline Lepeltier est aujourd’hui l’une des ambassadrices d’une permaculture tirant le meilleur parti de la biodiversité des écosystèmes viticoles.
se targuer d’un succès commercial comme peu d’autres, à tel point qu’elle est devenue nom commun pour beaucoup. Quand des client·e·s me demandent du « sancerre » au restaurant, je sais ce qu’ils ou elles veulent, mais rarement savent-ils eux qu’il s’agit d’un vin de Loire de tradition séculaire façonné par un lointain passé océanique, né de pitons et de vallons, pouvant se décliner en trois couleurs, ou encore que les cépages sont le sauvignon et le pinot noir. Que cherchentils ? Un vin blanc claquant, propre
et sec, non boisé, citronné, aux notes d’infusion d’herbes, avec une pointe fumée de réduction soufrée. Ils sont étonnés de découvrir notre soixantaine de références à la carte, certaines d’une dizaine d’années d’âge avec une multitude de cuvées par vignerons de styles, terroirs, parcelles identitaires. Il y a certes des amateurs avertis qui connaissent et collectionnent quelques crus fameux : on vous nommera les Monts Damnés et les Culs de Beaujeu de Chavignol, la Côte d’Amigny, le Chêne-Mar-
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PRÉFACE
AVANT-PROPOS
Cet ouvrage propose une découverte approfondie des terroirs viticoles du Sancerrois croisant une approche historique (histoire du vignoble, délimitation des parcelles selon leur potentiel viticole) et géologique. Il est l’un des fruits de la candidature annoncée du vignoble au patrimoine mondial de l’Unesco le 31 octobre 2015 par l’ensemble de ses représentants (Union viticole sancerroise, maires, élus et acteurs du tourisme), amorcée par le classement des paysages sancerrois au titre de la loi de 1930 sur les monuments et sites naturels. Le Comité Sancerrois patrimoine mondial que préside Pascal Fontanille a été créé pour porter cette initiative vertueuse et instruire cette longue démarche. On trouvera ici des éléments de ré exion pour l’orienter et la justi er. Huit itinéraires de randonnée doivent par ailleurs permettre très concrètement de prendre la mesure de cet héritage géologique et historique et de l’exceptionnelle géodiversité du vignoble.
À bien des titres, le Sancerrois peut prétendre inscrire son nom sur la liste du patrimoine mondial
de l’Unesco. Si les candidats sont nombreux, tous ne peuvent avancer autant d’arguments irréfutables. Au titre des paysages culturels, tout d’abord, le paysage du vignoble sancerrois compte indubitablement parmi les plus éloquentes des œuvres « mêlant la nature et l’empreinte qu’y a laissée l’être humain, (…) exprimant la longue et intime relation des peuples avec leur environnement ». Dès l’époque romaine, les coteaux sancerrois se sont couverts de vignes. Sans discontinuer, une viticulture exigeante tournée vers la qualité a façonné le paysage sancerrois et son parcellaire, avec un e ort constant pour singulariser et di érencier les terroirs du nage, en élaborant une nomenclature complexe et originale – on pourrait ici arguer que ce patient travail, génération après génération, pour distinguer et discriminer les terroirs viticoles, relève aussi du patrimoine culturel immatériel. La singularisation de terroirs par des conditions naturelles et géologiques spéci ques y apparaît même plus précoce qu’en Côtes de Nuits et de Beaune. Les terroirs de ce parcellaire minutieux composé au
Le coteau des Cheneaux, à Chavignol (au premier plan), présente un parcellaire très morcelé qui n’a que très peu évolué depuis le Moyen Âge. Ce paysage culturel offre par ailleurs aux vignerons un contexte très favorable avec des multiples zones écologiques réservoir refuges d’une biodiversité utile pour lutter contre les insectes ravageurs de la vigne.
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l des siècles sont à proprement parler les actifs immatériels des vignerons qui en sont les dépositaires, et il convient de les protéger pour les générations futures.
Le paysage sancerrois est également un paysage culturel vivant, ininterrompu, associé à une activité traditionnelle, la viticulture, qui y conserve un rôle social et économique actif. Dynamique, ce paysage a cependant su conserver des signes tangibles de son passé multiséculaire. Son parcellaire, sa toponymie et sa microtoponymie préservent par ailleurs un paysage viticole médiéval hérité des époques romaine et carolingienne. Le paysage du vignoble sancerrois
se distingue en n comme l’un des plus harmonieux paysages viticoles d’Europe par les qualités esthétiques d’un panorama collinaire doux, où la trame cadastrale donne à lire la multitude des terroirs patiemment di érenciés depuis le Moyen Âge. Trois critères justi ant une inscription au patrimoine mondial apparaissent pleinement remplis quand un seul su rait.
(1) Le vignoble sancerrois est un témoignage exceptionnel sur cette tradition culturelle bien vivante qu’est la viticulture. Il produit du vin de manière continue depuis près de deux mille ans, quand les premières vignes furent plantées sur le territoire des Bituriges Cubes, connus pour avoir élaboré la Vitis Biturica. Son paysage, qui a su conserver son intégrité, est le re et remarquable d’une activité humaine pérenne et authentique transmise de génération en génération (critère III). (2) Le vignoble est aussi un exemple éminent d’un paysage « illustrant une ou des périodes signi cative(s) de l’histoire humaine ». Les composantes du paysage du Sancerrois sont une illustration exceptionnelle du lent travail, depuis les xiie-xiiie siècles, de di érenciation des terroirs, avec, au sein d’un nage préservé, son maillage parcellaire, son réseau viaire et ses microtoponymes, à la nomenclature complexe. Cette construction historique, dont les grandes lignes remontent au Moyen Âge, a été parachevée aux époques
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Dès la n du XIXe s. et l’essor du tourisme, le Sancerrois apparaît comme une excursion de choix.
moderne et contemporaine, et préservée par les générations (critère IV). (3) Le vignoble sancerrois est en n un exemple éminent de vignoble européen traditionnel, de par son ancienneté et sa remarquable stabilité spatiale au cours du temps, malgré les aléas du climat. Celui-ci conserve partout les traces de l’évolution séculaire de cette activité humaine en interaction avec son environnement (critère V).
Le Comité Sancerrois Patrimoine Mondial s’attache à bâtir cette candidature portée par tous les acteurs du vignoble, à l’unisson. Il a pour cela reçu le soutien actif de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) Centre-Val de Loire.
L’héritage géologique et le Paléoparc du Sancerrois
Le label Unesco n’est toutefois pas un horizon indépassable. C’est pourquoi une démarche soutenue par la Maison des sancerre et le Bureau Interprofessionnel des Vins du Centre (BIVC) a été entreprise pour ériger le vignoble sancerrois en un Paléoparc valorisant un patrimoine géologique et paléontologique remarquables, avec l’aménagement de parcours de découverte. La création de ce Paléoparc accompagne tout un ensemble de mesures prises par ailleurs pour
Panorama du paysage sancerrois depuis les vignes de Belle-Chaume, à Bué.
protéger et valoriser ce patrimoine exceptionnel. Dans le même temps, une ré exion s’est ouverte à l’échelle des appellations des vins du CentreLoire sur l’opportunité de créer un Géoparc pionnier dans le domaine des interactions entre un héritage géologique complexe et le travail de la vigne.
En suivant la voie initiée par le Global Geopark Network, le Paléoparc du Sancerrois a pour principal objectif d’explorer plus avant
À l’initiative des vignerons sancerrois, un Paléoparc valorisera désormais l’héritage géologique dont ils sont les promoteurs et les dépositaires.
et de développer – mais aussi de célébrer, par le géotourisme et un œnotourisme durable – les liens entre cet héritage géologique et tous les autres aspects du patrimoine naturel, culturel et immatériel. Par exemple mieux comprendre le rôle économique, social et paysager des pelouses sèches calcicoles complémentaires des coteaux viticoles, qui ont donné naissance à une autre Appellation d’origine contrôlée de réputation mondiale sur le territoire
sancerrois, le Crottin de Chavignol. L’Unesco s’est donné pour objectif, avec le réseau des Géoparks « de reconnecter l’humanité à tous les niveaux de la planète » et de « mettre en relief » la façon dont la géologie a, « durant 4 600 millions d’années, façonné les aspects de nos vies et de nos sociétés ». Enjeux éducationnels et environnementaux sont ici intimement liés, puisque l’Unesco invite à gérer les géoparcs selon « un concept global de protection, d’éducation et de développement durable ». C’est-à-dire associer conservation et développement durable tout en impliquant les communautés locales. Le Paléoparc du Sancerrois apportera une contribution originale, avec ses terroirs viticoles diserts sur les soubresauts climatiques connus par notre planète et modelés par les cycles astronomiques. Des mers peuplées de massifs coralliens luxuriants ou de gigantesques reptiles marins des derniers temps du Jurassique, des forêts tropicales humides de l’Éocène jusqu’aux traces de glaciations du Quaternaire, les vignes du Sancerrois proposent ainsi un voyage riche et varié à travers les 160 derniers millions d’années de notre maison commune.
ibaut Boulay et Rosalinde Jaarsma directrice du BIVC
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L’ancienneté du vignoble sancerrois est jusqu’à présent passée relativement inaperçue. Présente dès l’Antiquité, la viticulture s’y maintient aux temps mérovingiens avant de s’épanouir sur les coteaux sancerrois à l’époque carolingienne. Dès le xie s., le Sancerrois est dépeint comme un pays regorgeant de vin (Raoul Tortaire), avant même que ne se développent les vignobles de Champagne. L’ancienneté du vignoble est remarquable et le Sancerrois compte parmi les premiers vignobles encore vivants du monde. Songeons que les premières traces du vignoble du Chianti, en Toscane, ne remontent qu’au xiiie s. Le vignoble de Lavaux, en Suisse, n’apparaît réellement qu’au xiie s., avec la concession, par l’évêque de
Lausanne aux ordres cisterciens d’Hauterive (1138), Hautcrêt (1141) et Montheron (1142). Le Sancerrois est ainsi un exemple exceptionnel de l’interaction pluriséculaire entre les hommes et leur environnement, développé pour optimiser les ressources locales a n de produire un vin apprécié et reconnu qui a toujours été important pour l’économie locale. Ses grands traits sont xés dès le xiiie s., et la stabilité de cet espace est remarquable sur huit siècles.
Situé aux con ns de la Champagne berrichonne et du Pays-Fort, le pays appelé Sancerrois est donc historiquement dévolu à la culture de la vigne. Le Sancerrois est un « pays de vin » qui se distingue du
13 INTRODUCTION
INTRODUCTION
L’atlas de la France viticole de Louis Larmat ne manque pas de signaler nombre de lieux dits xés pour la plupart dès la n du Moyen Âge. Le volume consacré à la Loire est publié en 1946.
S’il n’est aujourd’hui pas encore possible de dater la naissance du cépage sauvignon, il est assuré qu’il est bien originaire du Centre de la France et l’héritier des pratiques viticoles déployées sur l’ancien territoire des Bituriges
Pays-Fort, « pays de cidre », et les ancs des coteaux sancerrois « n’appartiennent qu’à la vigne » (Vacher 1908, p. 485). Dans un mémoire adressé à l’Assemblée provinciale du Berry tenue à Bourges en octobre 1786, dressant un état de l’agriculture dans leur canton, les autorités de l’arrondissement de Sancerre indiquaient ainsi que « les vignerons du Sancerrois qui n’en ont point à faire (i. e. des moissons) pour eux se répandent dans les paroisses à bled »
(AD du Cher, C1317). Au début du xxe s., les vignerons du Sancerrois migraient toujours, au début de l’été, pour faire les moissons en Champagne berrichonne. Les cartographes ont pris l’habitude, depuis la n du xixe s., après l’étude pionnière du géologue Victor Raulin (l’« inventeur » du Sancerrois géologique) sur la constitution géologique du Sancerrois, de désigner sous le nom de collines du Sancerrois le talus crétacé situé entre Saint-Mar-
Cubes qui s’étendait jusqu’au Sancerrois.
tin-d’Auxigny et Sancerre (Raulin 1847). Fort prudemment, Antoine Vacher reconnaissait la di culté d’isoler géographiquement le Sancerrois : « le Sancerrois est un canton restreint ; il est limité à la banlieue même de Sancerre ; et d’autre part, il est impossible de lui assigner, du côté de l’ouest ou du nord, des limites précises : progressivement, au milieu des vignes les autres cultures font invasion. Quant au mot Sancerrois, il est d’origine toute politique ; on l’a dérivé de Sancerre qui fut, à l’époque féodale, la capitale d’un comté » (ibid.).
Les limites géographiques du Sancerrois évoluent donc au gré des phases d’expansion et de rétractation du vignoble, de Groises, au sud, à Savigny-en-Sancerre, au nord. Le présent ouvrage se propose ainsi d’étudier la construction politique de l’entité sancerroise sur le temps long tout en analysant, sur la même période, les dynamiques spatiales du vignoble sancerrois au travers des aléas historiques et climatiques. Il en résulte une remarquable stabilité spatiale du vignoble historique, malgré la variabilité du climat.
15 INTRODUCTION
La publication sur la constitution géologique du Sancerrois par Victor Raulin, en 1847, marque la naissance d’une entité géographique sancerroise étendue très largement au-delà du vignoble.
HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
L’histoire invisible : le socle paléozoïque
En 1986, un ambitieux forage scienti que, dans le cadre du programme Géologie Profonde de la France, a été initié à Couy au sud du vignoble sancerrois pour tenter de résoudre une énigme géologique majeure : l’Anomalie Magnétique du Bassin de Paris, qui suit la faille de Sancerre, une zone tectonique d’importance qui sépare deux grands blocs du socle varisque (ou
hercynien, selon la terminologie traditionnelle), le bloc armoricain et le bloc bourguignon. Si le sondage de Sancerre-Couy a atteint, en 1987, 3 500 m de profondeur, il n’a pas permis de trancher entre les di érentes hypothèses émises et l’énigme demeure. Toutefois, les travaux importants qui ont accompagné ce sondage permettent de restituer précisément les premiers temps de l’histoire géologique du Sancerrois qui n’o rent aucun a eurement.
Le Sancerrois (ici en rouge) occupe le sommet le plus méridional de l’Anomalie
Magnétique du Bassin de Paris (AMBP), un élément structural essentiel de l’histoire géologique de la France, à la limite orientale du bloc cadomien (d’après Van Ngoc Pham et al. 2000, g. 1, p. 445).
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Ex-océan Iapetus
La fermeture de l’Océan Galice-Massif central (GMC) et la collision entre le continent armoricain, au nord, et le Gondwana, au sud, qui donne naissance à la Pangée, constitue ce que l’on nomme la suture éovarisque en aplomb de laquelle se trouve le Sancerrois (d’après Couzinié et al. 2017, g. 1, p. 17).
Des hautes latitudes antarctiques à
l’Équateur
Le sondage a atteint le socle varisque à 941 m. Les formations traversées, de nature leptyno-amphibolique (alternance complexe de roches métamorphiques acides et basiques), con rment que le Sancerrois se trouve en aplomb d’une suture majeure de la chaîne varisque, à la rencontre entre le
Massif nord armoricain cadomien et un bloc sud constituant le soubassement du Massif central. Avant cela, à la n du Dévonien supérieur (382,7-358,9 millions d’années [Ma]), le Sancerrois fut a ecté par l’ouverture d’un ri intracontinental et d’une mer marginale (océan Galice-Massif central). La fermeture de cet océan avorté et la collision entre Armorica et Gondwana (pour former la Pangée), vers 345-335 Ma, constituent ce que l’on nomme la suture éovarisque
19 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Front alpin Sutures océaniques RHÉNAN BOHEMIEN MASSIF MASSIF CENTRAL ARMORICAIN MASSIF Avalonia Armorica Gondwana & autres terranes peri-Gondwana 0 200 400 600 800
1000 km
Laurentia
Ex-océan Rhéique Ex-océanTornquist
Sillon Houiller GMC N BLOCS CRUSTAUX IMPLIQUÉS DANS L’OROGÉNÈSE VARISQUE MASSIF IBÉRIQUE Microcontinents (terranes) : MASSIF Sancerrois
(un épisode mylonitique dû à une intense déformation qui a redressé les formations métamorphiques observées grâce au forage est quant à lui daté vers 330 Ma). Ces événements successifs forment la petite enfance de la faille de Sancerre et des failles transcurrentes associées d’échelle crustale (prolongées par le célèbre Sillon houiller), qui ne cessèrent d’être mobiles. L’ampleur
du cisaillement serait de plusieurs dizaines de km. La mise en place de granodiorites, diorites et granites à l’origine de l’Anomalie Magnétique du Bassin de Paris dans cette faille née d’une zone de faiblesse d’échelle crustale pourrait être contemporaine (au Viséen, dans les premiers temps du Carbonifère), précédant la montée magmatique qui a donné naissance au granite de Blancafort,
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Une série de failles crustales dites transcurrentes est associée à la faille de Sancerre, qui traverse le piton (données du BRGM mises en ligne sur Google Earth).
daté de 324 ±6 Ma (Baptiste 2016), connu par un autre forage. Quoi qu’il en soit de ce dernier point, cette période est marquée par d’importants événements magmatiques et une activité volcanique soutenue. Entre 325 et 310 Ma, des intrusions de leucogranites se sont également mises en place.
Les roches les plus anciennes remontées à l’occasion de ce forage furent des orthogneiss granitiques cambriens datés de 495 Ma environ. Ces orthogneiss sont associés à l’évolution de la chaîne cadomienne et témoignent d’une phase de distension intracontinentale.
À cette époque le Sancerrois atteignit les 60° de latitude sud, proche du pôle Sud. Des métabasites (ici des roches résultant du métamorphisme de laves basaltiques) plus récentes (440 à 400 Ma) suggèrent une évolution de cette zone en milieu océanique. Un contexte d’arc primitif ou bassin d’arrière-arc en domaine de subduction a été avancé, avec des phases d’anatexie (fusion partielle de roches de la croûte terrestre).
Le Sancerrois a alors entamé sa remontée vers la zone tropicale de l’hémisphère sud.
Après la suture éovarisque (vers 345-335 Ma), le Sancerrois appartient aux contreforts de la chaîne varisque (hercynienne), qui culmine au-delà des 8 000 m, et commence alors à s’éroder et s’araser.
Les premières strates sédimentaires identi ées grâce au forage de Sancerre-Couy sont datées de la toute n du Carbonifère (du Stéphanien, 303,9-299 Ma). Il s’agit de dépôts détritiques dans un contexte uvio-lacustre, fortement tectonisés et redressés. On y trouve des coulées et sills (intrusions) volcaniques (301 Ma), dernières manifestations du magmatisme tardi-hercynien à la faveur de mouvements tectoniques et de l’amincissement de la croûte. Le Sancerrois se trouve alors à une paléolatitude équatoriale. Au-dessus de ces dépôts et en discordance avec eux reposent les sédiments accumulés presque continûment au Permien supérieur, au Trias et au Jurassique.
21 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Coupe géologique depuis Bué jusqu’à Saint-Andelain (données cartographiques du BRGM).
Charte chronostatigraphique (Commission internationale de Stratigraphie, K.M. Cohen, D.A.T. Harper, P.L. Gibbard, 2019 ICS International Chronostratigraphic Chart 2019/05. International Commission on Stratigraphy, IUGS. www.stratigraphy.org).
Le Sancerrois au Permien supérieur et au Trias
Les argilites et grès rouges du Permien supérieur retrouvés entre 925 et 809 m de profondeur
indiquent que le Sancerrois était alors un milieu émergé sous un climat semi-aride à tropical sec avec de brèves saisons humides, une plaine alluviale à la topographie relativement plane, régulièrement inondée et parcourue par des réseaux de chenaux (dépôts uviatiles), avec par
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période la formation plus durable de lacs (séquences argileuses pélitiques). Des crustacés microscopiques d’eau douce (ostracodes), des fougères (Pécoptéridés) et des Cordaites ont été identi és dans ces dépôts.
Les formations triasiques rencontrées (de 809 à 559 m) montrent la succession de trois phases : une plaine alluviale avec des dépôts uviaux (grès argileux – la présence de gymnospermes arbustifs indique un milieu plutôt sec), puis un milieu laguno-marin soumis à l’in uence de marées (grès infra-anhydritique), et en n des dépôts évaporitiques (argile à anhydrite, grès argileux supra-anhydritiques et Argile bariolée de Châlain), au Trias moyen et au Trias supérieur. Les dépôts alluviaux du Trias inférieur ont disparu. Le milieu laguno-marin correspondrait à un bref maximum transgressif au Landinien supérieur, avant la dislocation de la Pangée et la formation d’évaporites sous un climat chaud et aride.
Les mers du Jurassique
Au Jurassique (de 201,3 à 145 Ma), une mer épicontinentale s’installe et occupe une grande partie de l’Europe, entre la mer boréale, au nord, et la Téthys, au sud. Le Sancerrois poursuit sa route vers le nord et les latitudes tropicales. Au cours de cette longue période de sédimentation marine, des cen-
taines de mètres de débris coquilliers et coralliens vont s’accumuler, le rejeu de la faille hercynienne de Sancerre ayant alors une incidence sur la subsidence tectonique et les rythmes de sédimentation. Les séries du Jurassique commencent, dans le forage de Sancerre-Couy, à 559 m de profondeur. Se succèdent des séries de l’Hettangien (calcaires, grès et conglomérats à la base), du Sinémurien (marnes noires puis calcaires à Gryphées), du Carixien (marnes noires), du Domérien (marnes à bélémnites), du Toarcien (argiles et marnes micacées), de l’Aalénien (marnes et calcaires), du Bajocien (marnes, calcaires argileux puis calcaires), du Callovien et du Bathonien (marnes et calcaires argileux).
À l’Hettangien (201,3 à 199,3 Ma), une transgression marine s’amorce et recouvre la région sancerroise, avec une succession de séries détritiques (Lorenz 1992). Les carottes du sondage ont livré une faune abondante, avec de nombreuses ammonites et bélemnites qui ont permis d’établir une chronologie ne des strates successives, jusqu’au Callovien. La récurrence d’événements carbonatés tous les 40 000 ans environ a en particulier été remarquée : elle pourrait être liée aux cycles de l’obliquité de la Terre et signer leur in uence sur le climat (voir infra).
23 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Position des continents à la n du Jurassique. Une grande partie des terres émergées forment encore un super continent appelé la Pangée. L’ouverture de l’Océan Atlantique est alors amorcée, accompagnant la migration des continents africain, sud-américain, eurasien et nordaméricain.
Dans les sédiments du Callovien basal (marnes et calcaires), des sphérules de magnétites ont été découvertes en quantités signi catives (Lorenz-Blanc 1988), souvent creuses et constituée essentiellement de fer, avec des traces de manganèse et de nickel. Ces sphérules pourraient être d’origine cosmique et témoigner de la chute d’une météo-
rite dans les premiers temps du Callovien (166,1 à 163,5 Ma).
Au Jurassique supérieur (163,5 -145 Ma), l’Europe de l’Ouest est alors un archipel où n’émergent que les principaux reliefs d’alors, le Massif central, le Massif armoricain et le massif dit de Londres-Brabant. Ce n’est en revanche pas le cas du Sancerrois, recouvert d’une mer tropicale peu profonde, in uencée tantôt par des eaux froides sub-boréales, tantôt des eaux plus chaudes. En fonction des conditions du milieu (climat, profondeur des mers), les dépôts de sédiments présentent des faciès variés (Debrand-Passard 1992).
L’histoire géologique du Sancerrois accessible directement grâce aux observations de surface commence à l’Oxfordien supérieur (vers
Dans les calcaires crayeux de Bourges, une grande variété de coraux, isolés ou coloniaux, témoignent de la grande biodiversité qui s’est épanouie à l’Oxfordien Supérieur, dans un environnement périrécifal.
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Équateur Tropique du Cancer Latitude correspondant à la position actuelle de la France Emplacement du Sancerrois
Tropique du Capricorne
160-157 Ma). Le vignoble présente alors le visage d’une mer chaude et bien oxygénée où s’épanouit une vie luxuriante dans un environnement périrécifal (les Calcaires crayeux de Bourges, focus p. 213). Le niveau des mers baissant encore, des lagons se forment, protégés par des barrières récifales. Dans des eaux moins oxygénées, la biodiversité recule. Les sédiments témoignant de cette période (les Calcaires lités supérieurs, focus p. 187) sont des bancs (de 10 à 20 cm) de calcaire à grain n et alternent avec des marnes. Très peu profond, ce lagon est en e et soumis à l’action des vagues de beau temps ; les tempêtes remobilisent et redistribuent les sédiments déposés.
Au Kimméridgien (entre 157 et 152 Ma), le Sancerrois se situe entre les 26° et 27° nord, la latitude actuelle du Sahara occidental. La mer, toujours chaude et peu profonde, connaît le début d’un épisode
Une autre huître naine très présente dans les marnes kimméridgiennes du Sancerrois, Nanogyra nana (J. Sowerby, 1822). Elle se xait de préférence sur des substrats durs biogéniques (organismes vivants ou récemment morts).
Marnes de Saint-Doulchard riches en huîtres naines (Nanogyra virgula). Les lumachelles indiquent des environnements de dépôts soumis à des mouvements des eaux permettant l’accumulation de coquilles (on parle parfois de tempestites, générées par des vagues de tempête).
L’huître naine emblématique des marnes kimméridgiennes communes aux crus de Chavignol et de Chablis. On l’appelait Nanogyra striata ou Exogyra virgula, il faut désormais la nommer Nanogyra (Palaeogyra) virgula (Deshayes, 1831).
transgressif (Lefort 2011). À cette nouvelle période correspondent les Calcaires gris de Buzançais (focus p. 136), qui se brisent en éléments rognonneux et se distinguent facilement des calcaires sous-jacents qui se débitent en plaquettes. Le milieu évolue et la vie est plus présente, comme l’atteste la bioturbation des calcaires de Buzançais (mélange actif des couches de sédiments marins par les espèces vivantes, animales principalement). Les eaux à nouveau mieux oxygénées sont plus troubles. Les Marnes de
25 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Saint-Doulchard (focus p. 118), du Kimméridgien supérieur, succèdent aux calcaires de Buzançais et témoignent d’un nouvel approfondissement de la mer, avec la présence plus importante d’ammonites. Elles correspondent à la sédi-
Le Crétacé en pointillé
mentation de dépôts de vasières. La n de cette période est semble-t-il marquée par une dernière transgression marine.
La période qui conclut le Jurassique supérieur, le Tithonien, est au contraire marquée dans le Sancerrois par une régression marine très importante. En témoigne surtout une formation à pâte ne, micritique (issue de boues) en bancs épais appelés Calcaires de Saint-Martin-d’Auxigny (Tithonien inférieur, focus p. 163), datant du début de cet épisode régressif. Les sédiments déposés révèlent un milieu en cours de comblement, avant le fort recul de la n de cette période.
La mer s’est complètement retirée, et sous un climat chaud, l’érosion et la dissolution sont, aux débuts du Crétacé inférieur, intenses, entamant la partie supérieure des dépôts du Tithonien. Le vignoble sancerrois n’o re pas de séquences continues pour cette période, et le Berriasien (145-139,8 Ma) n’est pas du tout représenté. Il en est de même pour le Valanginien (139,8-132,9 Ma), au cours duquel la région connaît des perturbations climatiques et océaniques majeures. Des calottes polaires réapparaissent quelque temps, avant de disparaître à nouveau au début de l’Hauterivien (132,9-129,4 Ma) marqué par un réchau ement et une transgression marine. De rares dépôts (Calcaires à oolithes ferrugineuses, focus p. 92) datent de cette époque. Les soubresauts climatiques du Crétacé inférieur semblent en partie liés à des phases volcaniques importantes, augmentant l’e et de serre, et des phases de grande croissance de la végétation, le diminuant.
Les dépôts de la période qui suit, le Barrémien (129,4-125 Ma), se présentent, en Sancerrois, sous deux faciès, l’un continental, l’autre marin. Les dépôts continentaux sont parfois des sédiments de type uvio-lacustre ou lagunaires, avec des Argiles bariolées et des grès ferrugineux, qui témoignent d’un
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Le quartier de vignes des Gardes, sur le coteau kimméridgien du Cul (clos) de Beaujeu.
climat semi-aride (focus p. 227). Le Barrémien apparaît également, dans le vignoble sancerrois, sous un faciès marin. Sur la commune de Crézancy, aux Épinières, un banc gréseux a en e et livré des faunes marines et témoigne donc d’un bref épisode de transgression, qui annonce la grande transgression du Crétacé supérieur (focus p. 213).
Si, dans le vignoble Sancerrois, l’Aptien (125-113 Ma) n’est pas du tout représenté, l’Albien (113-100,5 Ma) est bien présent au cours duquel des formations alternant dépôts sableux et argileux résultent d’une sédimentation de type deltaïque.
Au cours de cette période, un bras de mer pérenne se remet en place reliant la Téthys à la mer boréale. On distingue dans le vignoble sancerrois trois niveaux distincts pour l’Albien : les Sables ns (focus p.
227) à passées gréseuses, les Argiles de Myennes (focus p. 93) et en n les Sables de la Puisaye (focus p. 94). Les dépôts du premier niveau indiquent un milieu lagunaire à margino-littoral. Les macrofossiles abondants, spores et pollens contenus dans le niveau suivant, les argiles de Myennes, montrent le maintien d’un milieu plutôt littoral mais qui s’est peut-être approfondi. Les Sables de la Puisaye, en n, sont une formation détritique née d’un milieu marin, peut-être à nouveau moins profond. Ils s’étagent jusqu’au Cénomanien basal.
Le Crétacé supérieur
La n de la formation des Sables de la Puisaye est parfois marquée par la présence d’un niveau de glauconite pouvant atteindre 2 à
27 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Un parcours dans le vignoble de Saint-Satur, ici au second plan, permet notamment d’observer des af eurements de marnes à outragées et de sables de Vierzon (Cénomanien). Les craies à silex qui les recouvraient ont été altérées au Tertiaire. Au premier plan, le vignoble des Chassaignes.
3 m d’épaisseur, mais celui-ci n’afeure pas en Sancerrois. Le Cénomanien, premier étage du Crétacé supérieur, débute avec une formation argilo-sableuse, dite Gaize argilo-sableuse (focus p. 95). Cette formation détritique renferme des débris de lamellibranches, des spicules et fragments de spongiaires à squelettes siliceux, qui témoignent d’une certaine continuité avec l’Albien terminal. La Gaize fait progressivement place aux Sables de Vierzon (focus p. 59) qui semblent o rir les caractères d’un dépôt de milieu marin encore peu profond, voire littoral, travaillé par des courants importants ayant remanié les matériaux déposés entre la n du Cénomanien inférieur et le début du Cénomanien moyen. Ces conditions de sédimentation pourraient expliquer la relative rareté de la macrofaune dans ces dépôts. Débute alors ce qui semble être la période la plus chaude des 600 derniers millions d’années de la Terre, quali ée de hothouse. Les paléo-océanologues estiment la température de l’océan Atlantique tropical naissant entre 33 et 42 °C, très largement au-dessus des températures océaniques actuelles au niveau de l’équateur. Bientôt le niveau des mers connaît par ailleurs une élévation remarquable, peut-être la plus élevée des temps géologiques. Au Cénomanien moyen, les Sables de Vierzon font place aux Marnes à Ostracées
(focus p. 59), avec une accumulation remarquable d’huîtres fossiles.
Avec la grande transgression du Crétacé supérieur, la sédimentation crayeuse amorcée au Cénomanien se poursuit jusqu’au Campanien supérieur. Le Sancerrois fait alors un adieu à la mer après la régression de la n du Campanien. En maints endroits du Sancerrois, les formations du Crétacé évoquées ci-dessus, qui parfois se succèdent en quelques dizaines de mètres, sont recouvertes par les argiles à silex soli uées sur les pentes, en particulier à l’est du piton de Sancerre ou de l’Orme-au-Loup. L’observation de ces a eurements nécessite donc patience et attention.
L’ère tertiaire
À l’ère tertiaire, sous un climat chaud et encore tropical, ces assises crayeuses du Crétacé supérieur vont subir une importante érosion entraînant la formation de complexes résiduels à silex (colluvions, focus p. 61) au cours de l’Éocène. Les dépôts calcaires peu à peu se dissolvent, en abandonnant des résidus plus ou moins argileux (on parle d’argiles à silex ou chailles). Les sables à silex qui en résultent vont alimenter les alluvions des principales rivières solognotes, le Cosson, le Beuvron et la Sauldre. Un important euve éocène, une pré-Loire emprunte alors l’actuel cours de la Loire en amont de San-
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Les différents af eurements crétacés des versants de l’Orme-au-Loup et de Sancerre sont eux aussi couverts de débris ou colluvions à silex provenant des conglomérats à ciment siliceux sommitaux.
À gauche du chemin, le vignoble des Implicaux, à droite, les quartiers des Baconets, des Palots et des Belles Dames.
cerre et poursuit son chemin vers la Manche (en attestent notamment des dépôts du côté de Cosne-surLoire). Si plusieurs phases de cuirassement peuvent être distinguées, la plus importante s’est incontestablement produite à la n de l’Éocène, sous un climat tropical (vers 35 Ma), comme en témoignent les poudingues ou conglomérats de silex très résistants qui couronnent Sancerre et l’Orme-au-Loup. Au cours de l’Oligocène (33,9-23 Ma), l’orogenèse alpine a pour conséquence l’amorce de la formation de tout un système de fossés d’effondrement (grabens) traversant l’Europe occidentale, depuis la Méditerranée jusqu’à la mer du Nord (Ri ouest-européen), notamment le graben de la pré-Loire.
Un dernier rejeu de la faille de Sancerre
Un dernier épisode majeur de l’histoire géologique du vignoble sancerrois intervient tardivement. Au Miocène supérieur (11 à 5,3 Ma), une nouvelle compression alpine s’exerce sur l’ensemble de
29 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Les principaux fossés d’effondrement du rift Ouest-Européen ouvert sur le pourtour de l’arc alpin (Nehlig et al., 2001).
Plus d’une dizaine de molaires de mammouth datant de ces périodes de glaciation ont été découvertes à la drague Weldin à Ménétréol-en-Sancerre, contemporaines des premières populations préhistoriques de chasseurs-cueilleurs ayant parcouru le Sancerrois.
un substrat cryoturbé. Le litage des dépôts semble con rmer le caractère cyclique – sans doute saisonnier – de ces phénomènes dits de soli uxion. Plus d’une dizaine de molaires de mammouth datant de ces périodes de glaciation ont été
découvertes à la drague Weldin à Ménétréol, contemporaines des premières populations préhistoriques de chasseurs-cueilleurs ayant parcouru le Sancerrois. D’autres molaires ont été recensées, l’une découverte lors de travaux sur les digues de Sort (Boulleret), et trois autres molaires à la drague de Boisgibault (commune de Tracy-surLoire).
Le Sancerrois paléolithique
Aucun travail de synthèse n’a encore été consacré au Sancerrois paléolithique. L’entreprise n’est pourtant pas vaine : si l’on dresse la carte de répartition des sites paléolithiques datés ou non datés, on découvre que les collines du Sancerrois comptent au nombre
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Au cours de la glaciation de Würm, des mammouths laineux ont connu le Sancerrois, laissant en souvenir quelques molaires découvertes à Saint-Satur ou à Ménétréol.
Carte de l’Europe au cours du dernier maximum glaciaire atteint il y a environ 22 000 ans, dans les derniers temps de la Glaciation de Würm. Le Sancerrois se trouvait alors à la limite méridionale du pergélisol continu (sol gelé en permanence).
des secteurs du Centre-Est où la présence humaine est bien attestée, avec le Boischaut, la vallée du Cher et la vallée de la Loire. Ce fait ne s’explique pas par des conditions de prospection plus favorables, mais par la nature des a eurements géo-
Bifaces moustériens de tradition acheuléenne découverts à la drague Weldin, à Ménétréol (Paléolithique Moyen) ; 12, 7 cm de long sur 9,7 de large (en haut) et 12,4 cm de long et 9,2 cm de large (en bas). A. Bouthier, Archéologie uviale de la Loire et de ses af uents, 1998, p. 12.
33 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
Biface moustérien découvert à Subligny par Marc Laroche (ca –80 000 –50 000 ans ?).
Éclat retouché (Paléolithique) présentant une épaisse patine blanc porcelaine, découvert au Cul de Beaujeu, à Chavignol ; longueur : 5,3 cm ; largeur : 4 cm (silex noir à serpules du Sénonien d’Assigny).
logiques : les terrains de décalci cation du Jurassique dans le Boischaut sud et les formations d’altération des dernières formations crayeuses du Crétacé en Sancerrois ont fourni aux hommes préhistoriques une matière première qui leur était indispensable, le silex. La position même du Sancerrois, un rebord de plateau dominant la Loire, constituait un autre atout.
Un tel recensement permet également de relever maints autres sites ou stations où l’utilisation de silex sancerrois est bien certaine, comme plusieurs stations reconnues par Michel Gratier à Villabon, en Champagne berrichonne, et datant du début du Paléolithique moyen. Plusieurs gîtes à silex ont par ailleurs été identi és au nord du Sancerrois. Jusqu’à présent, cependant, la présence d’artefacts
humains paléolithiques dans l’aire même du vignoble sancerrois n’a pas été relevée. De premières découvertes permettent partiellement de combler cette lacune. Familier du revers de la cuesta sancerroise, Néandertal a aussi bien connu les versants sancerrois avant qu’ils ne se couvrent de vignobles.
Une série d’éclats de silex taillés et un outil bifacial constituent de rares témoignages de la présence de l’Homme de Néandertal dans l’aire du vignoble sancerrois et de l’arrivée de son cousin Homo Sapiens, il y a 30 000 ans environ. Les découvertes fortuites ici présentées ont été faites en surface et n’o rent aucun élément de contexte stratigraphique qui permettrait une datation ne. Une analyse technique de ces artefacts permet cependant de les replacer dans une chronologie relative des industries lithiques, en attendant des études plus poussées.
Les études paléogénétiques récentes ont pu montrer que Néandertal avait eu une descendance fertile avec Homo Sapiens : 1 à 6 % du génome humain actuel proviendraient des Néandertaliens. Source : Chris Stringers, “What makes a modern human”, Nature 485 (7396), p. 33–35.
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FOCUS PALÉOPARC Sancerre, terre glacée
L es dernières glaciations (Würm, de –115 000 à –11 700 ans) ont laissé des traces visibles au bord de la route d’Épignol, entre Veaugues et la Brosse dues aux alternances régulières de gels et dégels. Le Sancerrois, qui, comme on l’a vu, était parcouru par les mammouths, présentait alors le visage d’une steppe rase connaissant de forts enneigements. Des grèzes calcaires de versant
(2), dépôts cryoclastiques (débris provenant de l’émiettement par le gel) assez ns issus de pentes faibles à regard Est (plus exposées au froid) ont glissé sur le substratum (1) gélifracté (calcaires jurassiques). L’argile présente doit provenir de lœss et paléosols. Au sommet, une coulée de soli uxion (3) formée de calcaire jurassique cryoturbé, moins n que les grèzes (donc moins gélifracté). Cliché et interprétation de Patrick Dorléans, que je remercie ici très vivement.
35 HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
FOCUS PALÉOPARC
CHAVIGNOL SURY-EN-VAUX BUÉ CRÉZANCY 4 3 AMIGNY 7 1 2 3 4 5 6 7 8 Itinéraire #1 Saint-Satur Itinéraire #2 Sancerre Itinéraire #3 Chavignol et Amigny Itinéraire #4 Bué Itinéraire #5 Sury-en-Vaux Itinéraire #6 Verdigny Itinéraire #7 Crézancy Itinéraire #8 Ménétréol et Thauvenay 1 3 4 5 7 0 2 km
PALÉOPARC DU 4 4 4 3 5 2 3 4
SANCERROIS
Focus sur les terroirs du vignoble
Calcaires crayeux de Bourges, p. 212
Calcaires lités supérieurs, p. 187
Calcaires de Buzançais, p. 136
Marnes de Saint-Doulchard, p. 118
Calcaires de Saint-Martin d’Auxigny, p. 163
Calcaires à oolithes ferrugineuses, p. 92
Grès ferrugineux, p. 213
Argiles bariolées, p. 227
Sables ns de l’Albien, p. 227
Argiles de Myennes, p. 93
Sables de la Puisaye, p. 94
Gaize argilo-siliceuse blanche, p. 95
Sables verts, p. 59
Marnes à ostracées, p. 59
Colluvions à silex, p. 61
HISTOIRE GÉOLOGIQUE DU PALÉOPARC SANCERROIS
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15
2 1 SANCERRE SAINT-SATUR CHAVIGNOL VERDIGNY MÉNÉTRÉOL THAUVENAY 5 6 8 2 6 8 9 10 11 12 13 14 15 1 3 5 15 3 15 4
LA NAISSANCE POLITIQUE DU SANCERROIS ET LES ORIGINES DU VIGNOBLE
Un oppidum boïen. Une marche éduenne à l’ouest de la Loire, sur la rive biturige
Le Sancerrois émerge dès le ier s. avant notre ère comme entité politique singulière autour de l’oppidum Gortona au moment de la guerre des Gaules (Gorgobina selon les manuscrits de la classe α du récit de César, Gortona selon ceux de la classe β, voir Fournier 1949). Jacques Soyer en a fait
la démonstration dé nitive dès 1904, con rmant les intuitions de l’archiviste Martial-Alphonse Chazaud (1861). Le nom de Gortona ou Gordona, avec adoucissement de la dentale, est par ailleurs fourni par les textes dès la n de l’Antiquité ou le début de l’époque mérovingienne : par exemple dans les leçons de saint Romble insérées dans l’ancien bréviaire de Saint-Satur. L’oppidum constituait alors une enclave tenue par le peuple des Éduens à l’ouest de la Loire, avant-poste qui jouxtait le terri-
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CHAPITRE I
La vallée de la Loire depuis le piton de Sancerre. En 58 avant notre ère, les Boiens s’installent aux con ns du territoire éduen avec l’assentiment de César, marquant l’entrée du Sancerrois dans l’Histoire.
toire du peuple des Bituriges. En 58 av. J.-C., après la bataille de Montmort, à proximité de Bibracte, César accéda à la demande des Éduens d’accueillir, in nibus suis, le peuple des Boïens venu du nord
militarisée de leur territoire éminemment stratégique.
Statère arverne en or au nom de Vercingétorix frappé en 52 av. J.-C. et réputé provenir du trésor de Pionsat, découvert en 1852 dans le Puy-de-Dôme. Don du cardinal de Bonald en 1867 au Musée des Beaux-Arts de Lyon. Les traits idéalisés du chef gaulois sont vraisemblablement inspirés de monnaies grecques.
du Danube et qui avait accompagné les Helvètes dans leur grande migration (Bellum Gallicum, I, 28, 5). César indique que les Éduens admirent même les Boïens à jouir des droits et des libertés dont ils jouissaient eux-mêmes. Mais dans le contexte de l’hiver 52 précédent le soulèvement mené par Vercingétorix, César précise que les Boïens étaient mercenaires (stipendiarii) des Éduens (BG, VII, 10) : ceux-ci avaient donc fait du Sancerrois une marche frontalière
En installant les Boïens, « peuple d’une particulière bravoure » (BG, I, 28), en Sancerrois, chez les Éduens et aux con ns du territoire biturige, César consacra donc le Sancerrois comme territoire charnière et politiquement distinct entre les Éduens et les Bituriges (les Boïens sont notamment mentionnés par Pline l’Ancien, Histoire naturelle, IV, 18). Au moment de la guerre des Gaules le Sancerrois constituait ainsi, pour les Éduens, peuple de la rive droite de la Loire, une enclave sur la rive gauche, con ée à la bonne garde des Boïens. Aujourd’hui encore, le Sancerrois reste une région viticole distincte du Berry et culturellement plus proche de la Bourgogne que du Val-de-Loire. Avant la décentralisation et la création des régions, on percevait Sancerre en Bourgogne (voir par exemple le journal de l’avocat EdmondJean-François Barbier, Chronique de la régence et du règne de Louis XV [1718-1763], tome II [1849], p. 214, janvier 1739).
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LA NAISSANCE POLITIQUE DU SANCERROIS
Lettre de 1816 adressée au maire de « Sancerre en Bourgogne ».
ET LES ORIGINES DU VIGNOBLE
Le nom de Gortona se rattache au radical celtique kort/d ou gort/d, qui désigne le champ ou l’enclos autour de l’habitation et renvoie donc aux notions de fertilité et de clôture (ainsi Corton en Bourgogne). Il ne fait pas de doute que les ressources du lieu furent immédiatement exploitées par les Boïens, même si César souligne leur pauvreté (ils n’étaient établis à Gortona que depuis six années).
On ne peut évaluer précisément quelle fraction des 32 000 Boïens qui s’étaient joints à la migration des Helvètes (BG, I, 5 et 29) s’est établie en Sancerrois. Camille Jullian estimait à 14 000 individus la population boïenne installée sur cette excroissance du territoire éduen. La question reste ouverte sur l’emplacement exact de l’oppidum des Boii : si les commentateurs de César ont longtemps préféré le site du piton, une localisation plus proche de la Loire (Saint-Satur –
Saint- ibault) semble également possible (les oppida n’occupent pas nécessairement des positions fortes). Le siège de Vercingétorix, levé par la campagne éclair de César
Après avoir réussi à attacher les Bituriges, clients des Éduens, à la révolte gauloise, Vercingétorix fut appelé par les Arvernes pour faire face au harcèlement de la cavalerie romaine que César avait con ée au jeune Brutus (BG, VII, 8-9). Ayant appris que César avait fait mouvement à travers le pays éduen vers le territoire des Lingons pour y réunir des troupes, Vercingétorix décida de faire mouvement vers le nord et d’assiéger Gortona tenue par les Boïens (BG, VII, 9). Il s’attaquait ainsi à un symbole de la politique de César en Gaule tout en faisant pression sur les Éduens, fra-
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Mouvements de César en 52 av. J.-C.
Le siège d’Avaricum. Chromo-lithographie (collection de l’Enseignement patriotique par l’image), Impr. Murat, Paris (vers 1880).
Vue de la Champagne berrichonne qui s’ouvre au sud des coteaux viticoles de Bué depuis le hameau du Briou (Crézancy). Auteur, en 1895, d’un petit ouvrage sur le pays de Buéen-Sancerre, Lucien Gény rapporte que la tradition orale attachait alors aux « Grands Champs » le souvenir de batailles de la conquête romaine. Les troupes de César auraient été assaillies par des bandes gauloises surgies depuis le Croupon (à l’extrémité gauche du cliché). À ce jour, aucune preuve matérielle n’est cependant venue étayer cette légende.
giles alliés des Romains (BG, VII, 10). La place résista une dizaine de jours, assurée par une ambassade envoyée par César de l’arrivée prochaine de l’armée romaine, avant que Vercingétorix ne lève son siège pour aller au secours de Noviodunum (Neung-sur-Beuvron).
Entre-temps César avait quitté Agedincum (Sens) pour réduire les Senons (Vellaunodunum, Triguères dans le Loiret) et les Carnutes (Cenabum, Orléans), avant de fondre sur Noviodunum. Ces échecs successifs poussèrent Vercingétorix à adopter la politique de la terre brûlée pour contrarier l’approvisionnement et le four-
rage des troupes romaines. Dans ce contexte, on comprend l’attention particulière portée par César au ravitaillement o ert par les Boïens pendant le long siège d’Avaricum (Bourges). César précise alors que « ceux-ci manquaient de moyens, car ils ne formaient qu’un petit État de faibles ressources et ils eurent tôt fait d’épuiser ce qu’ils possédaient » (BG, VII, 17, 2).
S’ils consentent à ravitailler César au cours du siège d’Avaricum, les Boïens rejoignent, au cours de l’été 52, la coalition gauloise. Une troupe d’un millier d’hommes se joint à l’armée destinée à porter secours à Vercingétorix à Alésia (BG, VII, 75).
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LA NAISSANCE POLITIQUE DU SANCERROIS
DU VIGNOBLE
ET LES ORIGINES
l’ancienneté de la viticulture dans le Berry. À Gortona/Gordona, les jarres à vin (dolia) d’un cellier et une modeste serpe de vigneron romaine (falx vinitoria), conservée au Musée du Berry, témoignent de cette activité au Haut-Empire. Les productions locales, probablement consommées à Avaricum, étaient peut-être appréciées au-delà des territoires biturige et éduen. L’agglomération secondaire de Gortona béné ciait pour cela d’une position avantageuse au croisement de deux voies romaines importantes et d’où l’on pouvait traverser la Loire (Dumont 2010). La voie romaine menant d’Avaricum à Gortona avait dans ce contexte un rôle économique de premier ordre. Celle-ci forme aujourd’hui la limite entre les communes de Veaugues et Jalognes, depuis Marcy jusqu’aux Bréchières (sa continuité est malheureusement interrompue entre les routes de Jalognes et d’Azy, à la suite du remembrement de 1966). Construite après la conquête, elle constitua un axe important jusqu’à la n de l’Empire, avant d’être supplantée par le « Grand Chemin de Bourges à Sancerre » à une date indéterminée (elle est mentionnée dans l’Atlas de Trudaine comme le chemin menant de Sancerre à Rians).
ier s. de notre ère par Pline l’Ancien (Historia Naturalis, XIV, 27-31) et par la suite par l’agronome Columelle (De re rustica, III, 2, 19-28 ; 7,1 ; 9, 1 et 3). Ce cépage renommé, à la fois productif et o rant des vins « de garde » est, comme le rappelait déjà Isidore de Séville, assurément originaire du territoire des Bituriges Cubes où l’on produisait des amphores vinaires, et non de celui des Bituriges Vivisques du Bordelais (Chastagnol 1969 ; Ferdière et al. 2000). Ce cépage relativement précoce (pour un Italien comme Pline), fertile et peu sujet à la coulure, reste à identi er : il pourrait cependant être l’un des ancêtres du sauvignon qui est né sur le même territoire.
Le développement de Gortona
Les productions bituriges se distinguaient par le cépage biturica (ou biturigiaca), mentionné dès le
Comme on l’a vu, l’oppidum des Boïens occupait très vraisemblablement le piton de Sancerre, bien qu’une localisation à son pied ne soit pas à exclure (Krausz 2015). Quoi qu’il en soit de ce dernier point, dès le ier s. de notre ère, une agglomération perpétuant le nom de Gortona s’est épanouie dans la basse plaine alluviale de la Loire, sur l’actuel site de Saint- ibault (les vestiges repérés s’étendent sur 35 ha). C’est à cet endroit que la voie romaine venue d’Avaricum (Bourges) en passant par Rians et la Croix-Saint-Ladre traversait la
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Loire (deux ponts successifs ont été repérés, cf. Dumont et al. 2011) pour aller ensuite vers le pays des Éduens. La Loire, alors une voie navigable majeure, joua probablement un grand rôle dans le développement de Gortona (une épave antique transportant des blocs de pierres y fut retrouvée en 1962).
Des thermes (dont le caractère public allégué par les archéologues reste à prouver) sont construits dès le ier s.. L’occupation de Gortona est continue jusqu’au ive s..
La survivance de l’établissement est con rmée par le premier dialogue de Sulpice Sévère sur saint Martin. Dans ce dialogue, le moine Gallus, qui parle aux Aquitains, se dit Gurdonicus, « de Gortona », audietis me tamen ut Gurdonicum hominem, « écoutez-moi comme un homme simple » (Sulpice-Sévère, Dial., I, 27, 2, cf. Jullian 1923 ; Corto- a par deux fois été transformé par les copistes en Gobo- : Gorgobina, Gorgonicus), qui « eure le jeu de mots voulu pour rappeler gurdus » (Antin 1959).
Les origines de Reigny (Reeugneio, 1154 ; Renniacus, formé sur le gentilice Rennius ?) pourraient bien être, comme celles de Crézancy (Crisinciacum, 1086), antérieures à l’époque carolingienne. Ces villages se seraient alors développés à l’emplacement de domaines gallo-romains.
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Rûchons 4 Les Gratte-Sabots Les Vicairies Les Jeannettes
Obuses Les Bouloises Les Petits-Chevillots
Chevillots
Vinoble de Chevillot Le Roc 5
Terranges 0 200 m
Les
Les
Les
1479
Les
51 1 Les Braies 1478 Le vignoble des Brais Les Batailles 1399VineadeBataille 2 3 Les Pieds Renard LesPortesduClos LeChaillouTue-Chien1555 LeChailloTuchian 6 7 8 Jeugny 1154 Vinea de Juigni ChanteGrenouille SAINT-SATUR ITINÉRAIRE SAINT-SATUR # 1 L’enclos abbatial ou Cretaceous Park [ L’itinéraire : 5,4 km / 2 h / dénivelé 150 m ]
Curieusement, la limite entre les communes actuelles de Verdigny et Sancerre d’une part et Saint-Satur d’autre part épouse presque exactement la limite entre les a eurements calcaires du Jurassique et les formations argileuses à silex de l’Éocène (ère
tertiaire). La boucle ici proposée sur le anc sud de la colline de Saint-Satur traverse des quartiers de vigne qui dépendaient principalement de l’ancienne abbaye de Saint-Satur qui a façonné ce paysage viticole et en a singularisé les di érents terroirs. Elle permet la découverte d’une belle diversité de sédiments formés tout au long du Crétacé puisque les argiles à silex de l’Éocène ici très présentes sont issues de l’altération de la craie à silex du Crétacé supérieur par l’action des eaux de pluie.
Sceau de l’abbaye de Saint-Satur, Eccl. Si. Satiri (Sigillum ecclesiæ Sancti-Satiri) gurant le saint portant une crosse, une eur de lys à sa gauche.
u L’itinéraire débute à l’église (abbatiale) Saint-Pierre de SaintSatur (connue également sous le vocable de saint Guinefort, patron de la paroisse). Une première collégiale,
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consacrée en 1104, fut détruite en 1361 par les Anglais.
Ce cliché pris par un photographe anonyme pour le compte de l’éditeur orléanais de cartes postales Léon-Théodule Garnon (ThG) montre l’ampleur des efforts de reconstruction du vignoble post-phylloxérique dans les premières années du XXe siècle et le maintien d’un important complantage d’arbres fruitiers.
Originaire de Saint-Satur, le physicien
Émile-Hilaire Amagat (1841-1915) qui s’est distingué dans l’étude des gaz et de la thermodynamique (il a donné le nom d’amagat à une unité de densité numérique), était propriétaire d’une parcelle de la prestigieuse Comtesse à Chavignol, où il combattit avec succès le phylloxéra.
Une reconstruction ambitieuse fut immédiatement entreprise, mais très vite interrompue (1405) par manque de ressources. Ainsi, seul le chœur et trois travées furent achevés. Bien qu’à nouveau pillé par les Anglais en 1420 et par les protestants en 1567, et dépourvu de façade, l’édi ce actuel reste imposant et mérite une visite. Remonter la rue du Commerce en direction du viaduc, et tourner à droite après celui-ci. Poursuivre sur le chemin des Conduits. L’urbanisation a grignoté de très anciens terroirs viticoles singularisés par les moines dans ce secteur (Vinolium Fontis Conductus, 1357 ; La Fontayne du Conduit, 1424 ; Le vignoble des Conduits, 1661). v Le chemin longe tout d’abord le vignoble des Braies (Le vignoble des Brais, 1478 ; Le
Cette carte postale, éditée dans les premières années du XXe siècle, montre au premier plan une vigne conservant une densité de plantation très élevée. Le viaduc courbe de la ligne menant de Cosne-sur-Loire à Bourges fut construit entre 1891 et 1893.
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SAINT-SATUR –L’ENCLOS ABBATIAL
vignoble des Brayes, 1479 ; Les Braist, 1645), assis sur les sables de Vierzon du Cénomanien inférieur (formation du Crétacé). L’abbaye n’était pas seule propriétaire de cet enclos, puisque l’abbaye de SaintLaurent de Bourges en possédait également une parcelle. w Vient ensuite le vignoble des Batailles, autre possession de l’abbaye de Saint-Satur (Vinea de Bataille, 1399 ; Vignoblium des Batailles, 1460 ; Le vinoble des Batailles, 1502), où a eurent successivement, d’est en ouest, les sables de Vierzon et les colluvions à silex. Les vignes du quartier distinct des Obuses (Les Aubuzes, 1645) sont quant à elles uniquement plantées dans ce mélange d’éboulis de silex et d’argiles ocres ou brunes.
Le chemin contourne un petit bois qui recouvre d’antiques perriers médiévaux. x Le chemin traverse ensuite le quartier de vignes de Ruchons, où a eurent les marnes à ostracées du Cénomanien moyen (Crétacé supérieur), recouvertes dans leur partie basse par les argiles à silex, auquel succède celui des Gratte-Sabots (encore en partie sur les sables de Vierzon). En contrebas, les quartiers des Vicairies et des Jeannettes sont assis sur les colluvions tertiaires. Le chemin traverse ensuite les vignes des Bouloises (Le terrouer des Bolloises, 1559), où n’a eurent plus, là aussi, que les colluvions à silex. y Le chemin se poursuit en direction du vignoble des Chevillots (Vinoble de Chevillot, 1479). Arrivé au
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L’abbatiale de Saint-Satur fut inscrite dès 1840 sur la liste des Monuments historiques. Son chœur, construit dans le dernier tiers du XIVe s., après les destructions anglaises de 1361, est remarquable.
Vue du vignoble de Saint-Satur depuis le haut du village d’Amigny. Au second plan, le vénérable vignoble des Chassaignes.
quartier des Petits-Chevillots, toujours recouverts par les colluvions de silex, prendre à droite pour ensuite s’engager dans le chemin haut qui o re de belles vues sur le vignoble de Saint-Satur et Sancerre. Après avoir contourné un petit bois, le chemin longe le vignoble du Roc, assis sur des dépôts durs à silex roulés cimentés qui coi ent la colline et dans lesquels des carrières ont été ouvertes. Ces dépôts a eurent jusqu’au vignoble des Terranges z. Le quartier de Pieds Renard qui le jouxte au sud est quant à lui assis sur les marnes à ostracées. Poursuivre le chemin qui o re une vue surplombant le vignoble des Braies. { Une fois parvenu à la route descendant depuis le
bois de Charnes, poursuivre tout droit en direction du vignoble de Chaillou-Tue-Chien (Le Chaillo Tuchian, 1515 ; Le vignoble du Chaillo Tuchein, 1555 ; Le Chaillou Tuchein, 1640), où l’on retrouve les dépôts à silex roulés (Chaillou/ Caillou). | En contrebas, le vénérable vignoble des Jeugny a été en partie épargné par l’urbanisation (Vinea de Juigni, 1154 ; Vineæ de Jumniaco, 1157 ; Vinoblium de Jugniaco, 1206 ; Territorium de Juygny, 1262 ; Juigny, 1507 ; Le vignoble de Jeuigny, 1651). Ce microtoponyme en -acus, qui ne semble pas procéder de *Juniacus, gentilice connu, compte parmi les plus anciens du vignoble. Prendre le chemin de Jeugny et revenir dans le village.
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Vue de l’ancien enclos de l’abbaye de Saint-Satur, exposé au sud. On reconnaît, depuis les dernières maisons jusqu’au bois de Charnes, en arrière-plan les terroirs des Batailles et des Braies, les Pieds Renard et en n les Terranges.
FOCUS PALÉOPARC
Hothouse
Les sables verts du Cénomanien inférieur, un milieu marin proche du littoral
Paléolatitude du Sancerrois : 29° parallèle nord (qui traverse aujourd’hui la mer Rouge et le Penjab)*
Les Sables de Vierzon se présentent comme un sable jaune à vert (ocre ou liede-vin s’ils s’oxydent), à grains moyens et très riches en glauconie, assez micacés et peu argileux. Ces dépôts semblent montrer que le Sancerrois était alors un milieu marin peu profond, proche des côtes et fortement travaillé par les courants. La transition avec les sédiments sous-jacents (la gaize argilo-siliceuse) est progressive. Chaque af eurement conte une histoire. Les Sables verts de Vierzon, datés du
glace et le niveau des mers dépassait de 80 m (estimation basse) à plus de 200 m (estimation haute) le niveau actuel et la température moyenne de surface du globe atteignait 25 °C, contre 15 °C actuellement. Les eaux marines des plates-formes continentales pourraient alors avoir abrité la plus grande biodiversité en espèces de poissons.
* Les paléolatitudes ici indiquées s’appuient sur les données paléomagnétiques établies par Besse et Courtillot 2002.
Le plus haut niveau marin des 600 derniers millions d’années. Les Marnes à Ostracées du Cénomanien moyen (vers 95 Ma).
Paléolatitude du Sancerrois : 29° parallèle nord (qui traverse aujourd’hui le golfe d’Aqaba et Lanzarote)
Bien souvent recouvertes par les argiles à silex soli uées sur les pentes, les Marnes à Ostracées sont délicates à observer. Ces marnes gris clair à blanche représentant le Cénomanien moyen présentent une base indurée (rocheuse), riche en oursins, térébratules et bivalves. C’est cependant la présence d’ Ostrea vesiculosa qui a
Cénomanien inférieur (100,5-96,5 Ma), témoignent des premiers temps ce que l’on considère comme la période la plus chaude de l’histoire de la Terre (du moins de ses 600 derniers millions d’années), une phase dite de Hothouse (que l’on distingue donc des phases Icehouse et Greenhouse ). Ainsi, à l’époque de la transgression cénomanienne, les pôles étaient entièrement dépourvus de
Sancerre
Position du Sancerrois au début du Cénomanien (vers 100 Ma).
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FOCUS PALÉOPARC
L’ammonite Mantelliceras Mantelli est relativement fréquente dans les sables verts de Vierzon.
0 50 100 200
150 250
Âge (Ma)
Mésosoïque
Crétacé Trias
Jurassique Moy. Sup.
Inf. Inf.
Moy.
L E
L M E
l’on observe présentent peu d’apports détritiques. Les marnes pourraient être contemporaines des températures les plus élevées de la phase de Hothouse. Néogène Paléogène Sup. Inf. Sup.
Ma E M
L M E L Sa Co
Be
Niveau actuel des mers niveau des mers à court terme niveau des mers à long terme
Temps géologiques Évolution du niveau des mers au cours des 250 derniers millions d’années.
He
Ca Tu Ce Al Ap Ba Ha Va Ti Ki Ox Cl Bt Bj Aa To Pl Si Rh No Cr La An Ol In
10050150200 250 (eustatisme) niveau des mers élévation
Ère Période Âge Pleistocène 100150 050 200250
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conduit à l’adoption de cette terminologie. Les Marnes à Ostracées témoignent d’un milieu marin peu profond, aux eaux faiblement agitées et les dépôts que Cénozoïque Pliocène Miocène Oligocène Éocène Paléocène
Rainforest (Éocène).
Une forêt tropicale humide. Les colluvions à silex
Paléolatitude du Sancerrois : entre le 29° et le 37° parallèle nord
Au début du Tertiaire, une végétation haute et dense recouvrait le Sancerrois, sous un climat tropical et très humide. Ce milieu particulier, que l’on quali e de Rainforest, abritait une très grande diversité d’espèces, ore et faune confondues. Les pluies importantes favorisèrent une puissante action pédogénétique, altérant les sols de craie formés au Crétacé supérieur (la présence de glauconie atteste d’une origine marine de ces formations avant leur remaniement). Les argiles à silex témoignent aujourd’hui de cette pédogénèse tropicale : l’argile blanche (kaolinique) enrobe des silex gris, ocre à rouge, à patine blanche. Au Quaternaire, ces formations détritiques continentales ont souvent soli ué sur les pentes à l’est de la faille de Sancerre, recouvrant des af eurements plus anciens.
Au cours de l’Éocène, une forêt tropicale humide (Rainforest) subtropicale semblable à celle-ci (Mont Tamborine, Australie) recouvrait les sols crayeux du Sancerrois hérités de la n du Crétacé. La planète connaît alors une période chaude (dite de Greenhouse) au cours de laquelle l’augmentation du niveau de dioxyde de carbone dans l’atmosphère (600 parties par million -ppm- contre environ 410 ppm de nos jours) favorise une végétation dense.
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FOCUS
Gryphaea vesiculosa (Sowerby, 1822).
PALÉOPARC
TABLE DES MATIÈRES
Préface de Pascaline Lepeltier, 4 Master Sommelier, Meilleur Sommelier de France 2018, MOF
Avant-Propos, 8
Introduction, 13
Histoire géologique du Paléoparc sancerrois
L’histoire invisible : le socle paléozoïque, 18 – Des hautes latitudes antarctiques à l’Équateur, 19 – Le Sancerrois au Permien supérieur et au Trias, 22 –Les mers du Jurassique, 23 – Le Crétacé en pointillé, 26 – Le Crétacé supérieur, 28 – L’ère tertiaire, 28 – Un dernier rejeu de la faille de Sancerre, 30 – Le Sancerrois paléolithique, 33.
Carte des itinéraires proposés, 38-39
Chapitre 1. La naissance politique du Sancerrois et les origines du vignoble Un oppidum boïen. Une marche éduenne à l’ouest de la Loire, sur la rive biturige, 41 – Le siège de Vercingétorix, levé par la campagne éclair de César, 42 – Le rattachement de Gortona au territoire biturige : le Sancerrois galloromain, 44 – Genèse d’une viticulture sancerroise, 47 – Le développement de Gortona, 48.
Itinéraire # 1 : Saint-Satur. L’enclos abbatial ou Cretaceous Park, 50
Chapitre 2. Le Sancerrois de l’époque mérovingienne au xive s. Le Sancerrois au haut Moyen Âge, 64 –Les acteurs de l’expansion du vignoble, 67 – Émergence du comté de Sancerre et célébrité de ses crus, 74 – Le vignoble dans la guerre de Cent Ans, 75.
Itinéraire # 2 : Sancerre. Le vignoble mosaïque, 78
Chapitre 3. La production de vins ns en Sancerrois et la réputation des vins de Chavignol (xie-xvie s.) La ruée vers l’or blanc de Chavignol, 98 – Le Clos de Beaujeu, 101 – Chavignol, cru ponti cal, 102.
Itinéraire # 3 : Chavignol et Amigny. Les joyaux du chapitre cathédral de Bourges, 104
Chapitre 4. Construction et singularisation des terroirs sancerrois (xiiie-xve s.)
Un vignoble pionnier, 122 – La di érentiation des terroirs, 124.
Itinéraire # 4 : Bué. Un terroir disputé, 128
Chapitre 5. Le temps des épreuves. Les Guerres de Religion De nouvelles terres viticoles, 144 – La Réforme à Sancerre, 147 – Un vignoble théâtre de guerre (1568-1573), 149.
Itinéraire # 5 : Sury-en-Vaux. La Prévôté du chapitre cathédral, 154
Chapitre 6. L’essor du commerce des vins ns (xviie-xviiie s.)
Les marchands protestants, 166 – La hiérarchisation des crus du Sancerrois, 167 – Ut pictura poesis. Un regard pittoresque sur le beau paysage sancerrois, 171 – La Révolution française et la vente des biens nationaux : la redistribution des cartes, 174.
Itinéraire 6 : Verdigny. # Sur les terres du chapitre Saint-Pierre-le-Puellier de Bourges, 180
Chapitre 7. Le vignoble de Sancerre au xixe s.
Un succès grandissant, 190 – Sancerre dans les Expositions universelles, 193 –
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Médailles sancerroises (1886-1938), 196
– Les crus de Sancerre et Chavignol, 198
– La crise phylloxérique, 199
– Le tourisme pittoresque et paysager en Sancerrois, 102.
Itinéraire # 7 : Crézancy. Dans les vignes de Saint-Ursin, 206
Chapitre 8. Sancerre et la reconnaissance de l’Appellation d’Origine Contrôlée
Itinéraire # 8 : Ménétréol et auvenay. Le front pionnier du vignoble au xie s., 220
Annexe : Le vignoble sancerrois à travers les aléas climatiques
Cartes complémentaires
Le vignoble du bourg de Bannon, 71 – Le vignoble septentrional de Sancerre, 89 – Cadastre de Sancerre en 1824, 90 – Carte du vignoble de Montigny, 126 –Entre Fontenay et Sancerre, 145 – Carte du vignoble de Sainte-Gemme, 176 –Carte du vignoble au sud de Crézancy et au nord de Veaugues, 211 – Le vignoble de Veaugues, 219.
Figures
Charte chronostatigraphique, 22 – L’Anomalie Magnétique du Bassin de Paris, 18 – Le jeu de failles de Sancerre, 20 – La fermeture de l’Océan Galice-Massif central, 9 – Formations lithologiques du Sancerrois, 84 – Coupe géologique depuis Bué jusqu’à SaintAndelain, 20 – Coupe géologique depuis Crézancy jusqu’à la Loire, 86 – Évolution du niveau des mers au cours des 250 derniers millions d’années, 60 – Position des continents à la n du Jurassique, 24 –Le Sancerrois à la n du Kimméridgien, 118 – Fin du Tithonien, 163 –Le Barrémien (- 125 Ma), 213 – L’Albien inférieur, 93 – L’Albien supérieur, 94 – L’Hauterivien, 92 – Le début du Cénomanien (vers 100 Ma), 58 – Le Cénomanien moyen, 95 – Le ri Ouest-Européen, 29.
Le Jurassique supérieur
Un milieu périrécifal sous une mer tropicale (Oxfordien). Les Calcaires crayeux de Bourges (griottes), 212 – Le lagon sancerrois (transition Oxfordien-Kimméridgien). Les Calcaires lités supérieurs, 187 – Les Calcaires de Buzançais du Kimméridgien inférieur (caillotes), 136 – Les Marnes de Saint-Doulchard, 118 – Les marnes kimméridgiennes et l’empreinte du mouvement des astres, 118
– Predator X en Sancerrois, 136 – La régression marine du Tithonien inférieur. Les Calcaires de Saint-Martind’Auxigny, 163.
Le Crétacé inférieur
Les Calcaires à oolithes ferrugineuses de l’Hauterivien, 92 – Un épisode de transgression marine au Barrémien Inférieur (Grès ferrugineux), 213 – Terres émergées ou lagunaires du Barrémien supérieur (Argiles bariolées), 227.
Le Crétacé Supérieur
Les Sables ns de l’Albien (Albien inférieur), entre terre et mer, 227 – Les Argiles de Myennes (Albien inférieur et moyen), un milieu marin littoral, 93 – Les Sables de la Puisaye (Albien Moyen, Supérieur à Cénomanien basal), 94 – La Gaize argilo-siliceuse blanche, à glauconie, 95 – Hothouse.
Les Sables verts du Cénomanien inférieur, un milieu marin proche du littoral, 59 – Les Marnes à Ostracées du Cénomanien Moyen, 59.
L’Ère tertiaire et le Pléistocène
Rainforest. Une forêt tropicale humide. Les Colluvions à silex, 61 – Sancerre, terre glacée, 35.
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LES TERROIRS DU PALÉOPARC SANCERROIS
Thibaut Boulay
LES TERROIRS SANCERROIS UN HÉRITAGE GÉOLOGIQUE, CULTUREL ET IMMATÉRIEL
À bien des titres, le vignoble sancerrois devrait être reconnu comme l’archétype de la viticulture de terroir. La construction et la singularisation de ses terroirs viticoles débutent dès l’époque carolingienne et les grandes lignes de la trame cadastrale du vignoble, xées aux XIIe et au XIIIe siècles, demeurent aujourd’hui inchangées. La notion de « climat » viticole est même attestée en Sancerrois plus d’un siècle avant qu’on ne l’emploie dans les vignobles de la Côte de Nuits et de Beaune. Ainsi, le paysage actuel doit-il être considéré comme un conservatoire unique et vivant du travail pionnier de générations de vignerons pour différencier et hiérarchiser les terroirs selon leur potentiel viticole.
Ce paysage culturel pluriséculaire constitue également, pour les vignerons, un atout pour une gestion durable de l’écosystème viticole puisque son parcellaire morcelé recèle une riche biodiversité. Les terroirs sancerrois sont en n le fruit d’une histoire géologique remarquable qu’un Paléoparc mettra désormais en valeur. Les huit itinéraires de randonnée ici proposés doivent permettre très concrètement de prendre la mesure de cet héritage géologique et historique et de l’exceptionnelle géodiversité du vignoble.
PALÉOPARC DU
Une appli pour smartphone est disponible gratuitement sur le site de l’éditeur – www.loubatieres.fr – pour accompagner votre visite des terroirs sancerrois décrits dans cet ouvrage 20
ISBN 978-2-86266-774-4
€
SANCERROIS