Toulouse, identité et partage du centre-ville. Réaménagement des espaces

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Joan Busquets Pieter-Jan Versluys I d e n t i t é e t p a r t a g e d u c e n t re - v i l l e Ré a m é n a g e m e n t d e s e s p a c e s

Joan Busquets dirige l’agence BAU-B fondée en 1990 qui compte aujourd’hui une vingtaine de collaborateurs. Son parcours se singularise par une double carrière d’architecte-urbaniste indépendant et de professeur d’université. Pendant toute la décennie 1980, il fut à la tête de la Direction de l’Urbanisme de Barcelone. Avec la commande initiale d’accueillir et de rendre possible les Jeux Olympiques de 1992, ses travaux sur les espaces publics ont permis de transformer durablement Barcelone. En Espagne, il a également permis la renaissance de centres historiques emblématiques tels que Tolède ou Palma de Mallorca. Hors des frontières ibériques, il a pris part à de grands projets urbains à La Haye, Lisbonne, Rotterdam, Singapour ou Sao Paulo.

ISBN 978-2-86266-793-5

23 € 9 782862 667935

www.loubatieres.fr

Pieter-Jan Versluys est passionné par les villes et la manière dont l'environnement bâti peut favoriser des domaines publics diversifiés et dynamiques. Il s’est formé comme architecte à Anvers et, en cherchant plus de connaissances, il a obtenu un master en dessin urbain à Barcelone. Pieter-Jan a rejoint BAU en 2003. Au sein de l’agence il est responsable de nombreuses études d’aménagements, de projets urbains et d’architecture à travers l’Europe. Son travail est basé sur une approche à la fois pragmatique et idéaliste, reliant une recherche analytique à la conception avec un fort accent humain. Depuis 2010 il dirige le projet du centre-ville de Toulouse.

Toulouse

Joan Busquets mène en parallèle une carrière de professeur d’urbanisme, activité qu’il développe dans les plus grandes universités du monde. Il fut professeur à l’Université Polytechnique de Barcelone de 1979 à 2002, puis professeur invité à Londres, Rotterdam, Rome, Lausanne et Genève. Depuis 2002, il enseigne au sein de la faculté de design de l’Université de Harvard (Boston, Etats-Unis). En 2011, Joan Busquets a reçu le Prix Spécial Europe du Grand Prix de l’urbanisme attribué par le ministère français de l’Écologie, du Développement durable et du Logement ; ainsi que le prestigieux Prix Erasmus, remis des mains de la reine Béatrix des Pays-Bas, en reconnaissance à la dimension culturelle de ses interventions d’urbanisme. Lauréat du concours pour le réaménagement du centre-ville de Toulouse, Joan Busquets travaille avec une équipe pluridisciplinaire pour permettre au centre-ville de devenir le cœur de la métropole naissante.

Joan Busquets Pieter-Jan Versluys

To u l o u s e

Identité et partage du centre-vil le

Réaménagement des espaces

Toulouse, ville historique fondée sur un coude de la Garonne, est aujourd’hui le centre d’une aire urbaine de plus d’un million d’habitants et qui ne cesse de croître. Pour que le centre-ville de Toulouse demeure le lieu emblématique de toute la métropole, ce qui est son « destin » historique, il est devenu indispensable de proposer un nouveau projet urbain : réhabiliter le passé, certes, mais aussi le maintenir vivant, attractif et agréable pour le préparer à demain. Ainsi, recréer le lien entre la ville et son fleuve est l’un des axes majeurs du travail de Joan Busquets. Mais il n’est pas le seul : apaiser les flux de circulation, ouvrir de nouvelles perspectives sur le patrimoine, équilibrer le minéral par le végétal sont d’autres axes.

2 loubati ères

C’est l’ensemble de ce travail – l’état des lieux, la stratégie et le projet urbain – que Joan Busquets nous présente dans ce livre.


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Préface : Jean-Luc MOUDENC, Maire de Toulouse, Président de Toulouse Métropole

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Introduction : Une réflexion durable. Interview

10 UN ÉTAT DES LIEUX PROMETTEUR 12 Le centre-ville, cœur d’une métropole en croissance Cohérence et concurrence du centre-ville avec la métropole Relation entre le centre-ville et le territoire métropolitain Évolution des grandes infrastructures Centralités Le fleuve comme articulation de la métropole

20 Un centre vivant Les villes dans la ville. Une mixité acquise Secteurs clés

28 Le lieu historique – Évolution urbaine La transformation de Toulouse selon 12 cartes historiques : 1772–2011 Projets urbains : canaux, quais, allées, promenades, places et carrefours, réalignements, percées, faubourgs et pièces de transformation

64 Le bâti : recherche morphologique Collage de morphologies urbaines Les récentes transformations résidentielles

76 STRATÉGIE 78 Articulation des espaces urbains La découverte des espaces urbains Les éléments majeurs Tissu urbain historique Revêtements existants et proposés Une structure végétale identitaire. La stratégie proposée Un plan lumière en cohérence Itinéraires possibles

1201 Un centre-ville accessible à tous, une nouvelle culture de mobilité Réseau viaire : hiérarchie et fonctions Stationnement Transport en commun Les modes doux

136 LE PROJET URBAIN PAR ÉTAPES

Accès place du Capitole et rue de la Pomme Quai Lombard Rue de la Pomme Place de Saint-Pierre Place de la Daurade : un espace ouvert, à vivre ensemble Rues Romiguières - Pargaminières Rues Jean-Suau - Gambetta Réaménagement des boulevards : l'Octogone Parvis Saint-Pierre-des-Cuisines Canal de Brienne Canal du Midi Place de Belfort et liaisons entre quartiers Allées Jean-Jaurès Rue de Metz - rue de la République Parvis Saint-Sernin - place Arnaud-Bernard La Garonne

184 Réaménagement des espaces 185 Aménagements des espaces au bord de la Garonne Guinguette flottante au quai de Tounis Restauration globale des quais historiques Débouché de la Garonnette Quais du cours Dillon Port Viguerie Place Saint-Pierre Port de la Daurade Rues Jean-Suau - Gambetta

210 Aménagement des espaces publics le long de l'axe nord-sud Rue des Lois Victor-Hugo Place Saint-Sernin Place du Salin

228 Les liaisons du centre-ville avec Matabiau Rue Bayard Allées Jean-Jaurès


Joan Busquets, vous êtes un spécialiste des centres urbains anciens. À travers l’histoire des villes, on peut lire l’histoire d’une civilisation et d’une culture. Que disent les centres-villes sur la civilisation européenne ?

L’important ce n’est pas seulement de respecter et réhabiliter le passé ; il faut savoir le maintenir vivant, attractif et agréable pour, en définitive, le préparer à demain. C’est le défi actuel et nous ne pouvons pas échouer.

Oui, le centre-ville résume l’histoire et les étapes importantes dans la formation d’une ville. L’Europe a d’ailleurs été pionnière dans le fait d’accompagner la modernisation progressive des centres-villes tout en respectant et en mettant en valeur l’histoire culturelle de nombreuses villes. C’est ce que Toulouse doit faire aujourd’hui avec son centre-ville. La récupération et la transformation de nombreux bâtiments ont été faites au cours des récentes décennies ; ce qui est en train d’être entrepris maintenant, c’est la requalification systématique de ses espaces urbains. Ces actions transformeront l’image et l’usage du centre-ville à moyen terme.

Dans ce sens, on essaye comme méthode à Toulouse la définition d’une structure claire pour l’aménagement des espaces publics du centre-ville tout en développant quelques actions pilotes qui servent à vérifier l’impact et comprendre le résultat des propositions globales sur le centre-ville : elles agissent comme des opérations de vérification.

Quel avenir pour les centres-villes anciens à l’aune des exigences urbanistiques et environnementales du xxie siècle ? Sont-ils adaptés à ce que sera la ville demain ? Je crois qu’en Europe, dans le futur, le centre-ville continuera d’être le référent symbolique et la composante essentielle de l’image synthétique d’une ville, parce qu’il a une valeur de propédeutique à notre propre culture, que nous ne pouvons pas oublier. Je suis sûr que les personnes qui vivent au centre-ville de Toulouse découvrent encore de nouvelles dimensions intéressantes à ses espaces et ses bâtiments. La valeur de ces secteurs de la ville nous oblige à garantir que le piéton soit l’usager principal, et non la voiture comme cela a été le cas jusqu’à maintenant, bien que nous soyons convaincus que d’autres formes de mobilité doivent aussi coexister avec le piéton.

Quels sont vos axes de travail pour que s’opère la mue urbanistique au centre des grandes villes européennes ? Le travail dans le centre-ville doit mettre en valeur les couches historiques visibles à travers ses bâtiments et ses espaces publics, mais aussi comprendre comment l’on peut introduire les demandes spécifiques de notre culture urbanistique actuelle. Il est vrai qu’actuellement nous avons des exigences différentes, quant à notre mobilité urbaine, de celles que nous avions il y a seulement vingt ans. Souvenez-vous qu’après-guerre il y avait une tendance à démolir les villes historiques parce qu’elles étaient incompatibles avec l’automobile. Sur la base de ce critère, on a détruit certains centres-villes en Europe.

Aujourd’hui, le souci de l’environnement nous incite à mettre en pratique les économies d’énergie, la réduction de la pollution et le recyclage dans la ville historique. Et nous voyons qu’en fait, c’est parfois plus facile de le faire là que dans une ville moderne ou un quartier récent, car les constructions anciennes prenaient déjà en compte la plupart de ces préoccupations. Cependant, il faut faire Je crois que si nous réussissons à ce que le centre-ville un effort pour que la réhabilitation des bâtiments et la soit facilement accessible depuis les différents points création de nouveaux espaces publics se penchent sur du territoire, il continuera d’être le lieu emblématique ces questions de façon prioritaire. de toute la métropole, et il continuera aussi d’offrir de nouvelles dimensions à découvrir par les nouvelles Avec cette idée, le travail que nous menons à bien générations. avec Michel Desvigne et le reste de l’équipe, cherche


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à réconcilier la ville historique avec les systèmes natu- Par exemple, le quartier Saint-Cyprien offre de grandes rels. En effet, bien que cela paraisse contradictoire, on opportunités pour les équipements centraux et culturels peut clarifier la lecture des systèmes végétaux dans à moyen terme. un centre urbain qui pourtant par définition est minéral et construit. Le quartier Matabiau et l’arrivée de la ligne LGV : le défi En ce sens, le fait de permettre à Toulouse de renouer urbanistique que représente la mutation d’un quartier avec la Garonne est une pièce fondamentale dans la ancien, populaire et déjà saturé et qui, demain, sera transformation à moyen terme. À l’origine, le fleuve est au carrefour d’un des grands centres névralgiques des la raison pour laquelle la ville se trouve où elle est, au déplacements du Sud de l’Europe ? croisement stratégique du flux des eaux ; mais les inondations ont écarté la ville de son fleuve et c’est mainte- La gare Matabiau se trouve près du centre-ville et près nant le moment de réconcilier ces deux entités qui, ainsi, d’une série de quartiers traditionnels. Mais c’est surtout vont redevenir bénéfiques l’une à l’autre. La Garonne est un espace ferroviaire de très grandes dimensions, ce l’épine dorsale d’un parcours nord-sud avec des spé- qui rend possible la mise en œuvre des changements cificités différentes sur chacune des rives – gauche et qui sont devenus nécessaires à l’intérieur de ses limites droite –, et le rapprochement avec l’eau permettra que de conventionnelles. nouvelles activités civiques et récréatives tirent avantage de ce grand espace fondateur et merveilleux de la ville. Aujourd’hui, la gare Matabiau fonctionne en fait comme L’eau peut retrouver des usages et ouvrir de nouvelles une somme de plusieurs gares quelque peu autonomes et déconnectées, et il faut faire un effort pour favoriser les perspectives à la ville. échanges entre les formes de transports pour qu’ils soient plus pratiques et fonctionnels pour les usagers. Le centre-ville de Toulouse aujourd’hui et dans 20 ans : quels atouts ? Quelles difficultés ? Quelles solutions ? Cette meilleure rationalité dans les mouvements permettra que les quartiers à proximité de la gare bénéficient de nouJe crois que l’architecture au centre-ville de Toulouse tire velles connexions en modes doux et de nouveaux espaces sa grande force d’un collage historique unique, qui nous urbains de meilleure qualité, dus à la rénovation ferroviaire permet encore de reconnaître les différentes périodes de et aux activités que la gare va induire. sa formation, mais aussi la superposition d’autres épisodes de transformation réalisés en général avec beau- D’un autre côté, le bâtiment de la gare Matabiau est un coup d’harmonie. C’est là la clef qu’il faut utiliser pour la excellent « landmark » dans la ville, près du canal du requalification de ses espaces publics majeurs. Midi, qui doit continuer à assurer des fonctions d’accès des passagers. Une nouvelle organisation des différents D’un autre côté, ce centre-ville est l’un des plus grands modes de transport est à construire, dans laquelle le parmi les grands centres européens et il a une diversité secteur Marengo et les allées Jean-Jaurès sont une noude fonctions qui est la clef pour le maintien de son rôle velle carte à jouer tout en les combinant avec le maintien important comme centre actif et directionnel de la métro- de l’accès traditionnel par la rue Bayard naturellement pole : l’habitat, le commerce, les activités institutionnelles, prolongée par la rue d’Alsace-Lorraine. la culture, l’université, les équipements en général, sont des fonctions qui ne doivent pas seulement être mainte- Toulouse est une ville qui a eu des périodes dynamiques nues mais qui peuvent évoluer et probablement s’intensi- et d’autres périodes plus stables, ce qui s’est traduit dans fier. Il y a encore de l’espace pour permettre de construire la forme urbaine par la production de créations urbaines des lieux de vie et d’autres activités symboliques. fortes et claires, mais pas toujours continues.


Par exemple, le canal du Midi, construit sous la tutelle de Pierre-Paul Riquet au XVIIe siècle, est l’une de ces grandes interventions. Avec l’ambition de relier la Méditerranée à l’Atlantique, il a conféré à Toulouse une nouvelle centralité, qui pouvait désormais se connecter facilement aux deux mers et augmenter ainsi l’espace de son commerce. Aujourd’hui, le canal nécessite d’être réhabilité pour devenir un espace urbain majeur de la métropole. De la même manière, la LGV va donner à Toulouse une nouvelle accessibilité à un niveau européen, dont il est difficile aujourd’hui de modéliser et prévoir l’impact, mais qui va sans nul doute être positif pour son économie et ses échanges. Grâce à la forte implantation du TGV partout en Europe, cette nouvelle connexion va permettre d’entrer dans un circuit de grande puissance. En même temps, le fait que la gare soit située dans un secteur central et bien relié, signifie qu’avec un effort relativement limité on pourra multiplier les potentialités des autres modes de transports déjà installés à Matabiau (train national et régional, métro, bus).

des entités importantes qui composent un de nos atouts majeurs et que nous ne pouvons pas perdre. Dans les villes, les centres anciens sont peut-être les structures culturelles les plus précieuses à long terme. Je crois qu’il faut comprendre les tensions que la compétitivité à l’échelle globale fait peser sur l’Europe, et comment les villes doivent y répondre. Peut-être qu’il y a cent ans le « Projet » ou le « Plan » à grande échelle pour une ville devait d’abord répondre aux besoins et aux opportunités locales ; aujourd’hui, et même s’il ne faut pas oublier ces demandes, il faut comprendre le rôle de chaque ville d’abord à l’échelle européenne et non locale, pour pouvoir trouver un cadre fort sur lequel appuyer la durabilité économique des villes à moyen terme. Pour moi, dans ce XXIe siècle naissant, l’Europe doit jouer la carte de son patrimoine culturel et historique. Cette question, qui la limitait autrefois dans son maintien et sa revitalisation, est aujourd’hui un atout pour être bien préparée et parier sur les innovations et la créativité que la nouvelle économie de la connaissance exige.

Je pense que c’est la stratégie à adopter prioritairement et c’est là que Toulouse - qui compte parmi les villes les plus dynamiques en Europe – se présente avec de forts potentiels. Les nouvelles activités de recherche et de développement, ainsi que certains de ses secteurs industriels de pointe, permettent de dessiner un panorama intéresIl est vrai que la dynamique de croissance est aujourd’hui sant, dans lequel il faut creuser et persévérer. ailleurs, en Asie, en Inde, entre autres, où sont en cours des processus d’urbanisation qui, s’il est vrai qu’ils ont des Je crois que Toulouse est en train de faire émerger une similitudes avec ceux que nous avons connus en Europe nouvelle modernité qui s’exprime dans les secteurs de après-guerre, suivent aussi des modèles urbanistiques pointe, qui vont au-delà des formes traditionnelles de différents – si l’on prend en compte la densité, la mise en production du passé, et je crois que c’est une grande œuvre de transports publics puissants, le contrôle du sol, perspective d’espoir. À cela il faut ajouter la valeur du etc. Tout cela va nécessairement obliger à repenser cer- centre-ville qui, comme je le disais auparavant, est tains paradigmes. Et cette discussion, quelque peu théo- le nœud symbolique et le point de référence pour la rique, peut inspirer dans le futur de nouveaux modèles que construction de la métropole à long terme. tant de fois la culture européenne avait rejetés. Vous voyagez dans le monde entier : quels modèles urbanistiques mis en œuvre dans d’autres pays, d’autres continents, pourraient inspirer de nouvelles solutions en Europe et donner un nouveau souffle au Vieux Continent ?

D’un autre côté, dans le panorama global, l’Europe a une tradition de villes puissantes organisées en états, aujourd’hui à travers l’Union européenne. Les villes sont

LE MOOK AUTREMENT. TOULOUSE, COSMOPOLITE, REBELLE ET SAVANTE. Entretien avec Joan Busquets mené par Laurence Audabram – Inconito, Clément Denis.



Un état des lieux prometteur Le centre-ville de Toulouse jouit d’un rare patrimoine. Un patrimoine qui, loin d’être figé, a su évoluer grâce aux bâtisseurs visionnaires qui l’ont, au fil des siècles, marqué de leur empreinte sans jamais le dénaturer. Mais, tributaire depuis les années 1970 du tout-automobile, il s’est engorgé, a tourné le dos à son fleuve comme à ses canaux et semble avoir quelque peu oublié son faste originel. Il a toutefois réussi à conserver son pouvoir attractif, tout à la fois résidentiel, économique, culturel et touristique, et à mobiliser les ambitions politiques – d’une politique non pas politicienne, mais urbaine et créative, prospective et durable.


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Commerce et activités économiques. Les différents composants du centre-ville en font le premier pôle commercial régional. On trouve également au centre-ville de nombreuses professions libérales, agences, administrations, restaurants et hôtels ainsi qu’un grand nombre de petits ateliers d’artisans. Les activités se concentrent dans le centre historique sur les principales voies radiales d’accès, tout le long des boulevards de l’Octogone et sur les rues traversant les faubourgs jusqu’au canal du Midi et vers la Gare.

Activités Restaurants Commerce Bureaux et services Hôtels

Concentration des activités dans le centre historique, sur les principales voies radiales d’accès, tout le long de l’Octogone et à proximité de la gare Restaurants

Activités de commerce

Superposition des activités : hôtels, restaurants, commerces, bureaux et services

Monuments repères et équipements culturels. L’histoire de Toulouse peut encore être perçue dans ses rues, espaces et édifices. La grande qualité du centre-ville réside dans sa capacité à « articuler » et exprimer des époques différentes d’une manière juxtaposée, tel un collage harmonieux et cohérent d’architectures. Les pièces monumentales qui parsèment le centre-ville – Saint-Sernin, les Jacobins, le Capitole, Notre-Dame de la Daurade, les Augustins sur la rive droite ; La Grave et Saint-Nicolas sur la rive gauche – qui, en s’imposant comme autant de lieux majeurs et identitaires d’un quartier, ont fait et font encore la réputation patrimoniale du centre-ville. À ce patrimoine auquel les Toulousains sont très attachés mais qui est également très prisé par les touristes se plaisant, à partir de chacun de ses éléments fédérateurs, à découvrir l’âme d’un quartier, s’ajoutent nombre d’hôtels particuliers. Au total, ce sont quelque 45 monuments historiques classés et 159 monuments inscrits au titre de la loi de 1913 qui ont été recensés en cœur de ville. Une grande partie de ce patrimoine a déjà été transformée en équipements culturels. Un grand nombre de ces installations provient de la transformation d’anciens espaces fermés à l’origine comme l’arsenal, les casernes… Ces espaces centraux apportent une grande vitalité et augmentent la demande de services dans le centre, apportant un complément à d’autres fonctions telles que le tourisme de week-end ou d’été. Formation et recherche. D’autres bâtiments repères, aux franges du centre ancien, ont émergé au XXe siècle : des bâtiments « technopolitains », comme la Cité administrative, moderne et fonctionnelle, construite dans les années 1960, ou l’université des sciences sociales érigée dix ans plus tard. Il convient d’éviter les situations d’enclave de ces secteurs. L’université de Toulouse Capitole et la Cité administrative, par exemple, pourraient devenir un grand campus au cœur du centre historique. Pour ce faire, le réaménagement des espaces publics et de la végétation doit accompagner cette vision. Tourisme et loisirs. Les valeurs du centre-ville de Toulouse en font une destination idéale pour le tourisme urbain. Cette forme de découverte de la ville représente un des secteurs du tourisme les plus appréciés dans les villes européennes pour le bénéfice qui en résulte au niveau de l’économie urbaine, son impact positif sur l’image de la ville, ainsi que sa projection culturelle au sein d’un secteur en pleine croissance.




Stratégie Le centre-ville de Toulouse, situé au cœur d’un pôle urbain de près d’un million d’habitants, regroupant les fonctions résidentielles, commerciales, culturelles, administratives et touristiques, n’était plus en phase avec les enjeux d’une métropole du XXIe siècle. C’était un fait. Il fallait impérativement réagir – et agir. Le schéma directeur du réaménagement des espaces publics du centre-ville propose, à partir d’une analyse minutieuse de sa géographie, de son histoire urbaine et des dysfonctionnements liés à l’automobile, une nouvelle vision par étapes vers un cœur de ville apaisé. Cependant, il ne s’agissait pas de bouleverser l’identité des lieux à laquelle sont particulièrement attachés les Toulousains. L’évolution requise – et non une quelconque révolution – imposant un regard neuf mais porté par le « bon sens », un regard critique et prospectif. Un regard qui allait ainsi se porter sur la mixité socio-économique à renforcer, sur les valeurs patrimoniales à révéler, sur les usages « urbains » à partager, sur les qualités végétales à développer, sur les potentiels d’une Garonne oubliée à valoriser… Un regard apaisant pour un centre-ville plus lisible et cohérent, plus qualitatif et attractif, pour un centre-ville durable.


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La découverte des espaces urbains Deux grandes classifications caractérisent la stratégie pour le réaménagement des espaces publics du centre-ville de Toulouse : les espaces urbains peuvent être classés soit par leur type d’élément structural ou éléments majeurs (Octogone, cardo, épines vertes…), soit par leur époque de genèse (romain, médiéval…). Garonne Canal du Midi Liaison Garonne Octogone Épines vertes transversales Épines vertes Places Percée Réseaux de rues intérieures

Les éléments majeurs La structure spatiale de la ville est étroitement liée à ses composantes historiques et sa géographie. La Garonne, les canaux, les grands boulevards issus des enceintes médiévales sont quelques-uns de ces éléments majeurs dont la continuité spatiale et formelle devrait être continue. Il convient donc de renforcer ses éléments unitaires. Nous distinguons : – les grands projets : l’Octogone, Jean-Jaurès, élément important qui vient juste « piquer » le vieux centre sans pour autant le traverser, les rives du plan Saget, les canaux… ; – les épines qui traversent tout le centre-ville comme le cardo ou le decumanus, respectivement l’axe Taur – SaintRome et Metz ; – l’espace majeur de la Garonne et ses rives ; – les liaisons vers la Garonne ;

Perspective des éléments majeurs

Synthèse des éléments majeurs structurants

– le potentiel d’espaces mineurs comme les rues intérieures qui forment de petits réseaux, surtout présents dans l’ancien noyau romain ; – les placettes (archipels) et les élargissements qui parsèment l’intérieur de l’Octogone ; – un élément de relation transversal dans le faubourg capable de renforcer les connexions entre les quartiers.



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Cette seconde partie du livre se concentre sur l’explication d’une sélection de projets d’espaces publics réalisés durant la période 2015-2020. Ces projets s’intègrent dans le diagnostic et la stratégie urbaine présentés dans la première partie et s’inscrivent dans la continuité des actions pilotes déjà entamées. Cette partie s’organise sur trois différents secteurs : 185 – Aménagements des espaces au bord de la Garonne 210 – Aménagement des espaces publics le long de l’axe nord-sud 228 – Les liaisons du centre-ville avec Matabiau

Aménagements des espaces au bord de la Garonne La ville s’ouvre sur le fleuve. Le projet urbain Grand Parc Garonne vise à reconquérir les bords du fleuve sur 32 kilomètres de linéaire. Le réaménagement du Front Garonne en centre-ville s’appuie sur l’idée d’une scène ouverte aux multiples usages urbains : un plateau d’évolution disponible et appropriable. Un très grand espace polyvalent et populaire. Un lieu ouvert aux populations variées, ayant des activités très diverses. Pour ces usagers divers, le projet a pour ambition de créer un grand rééquilibrage urbain par l’alliance entre voirie et parvis. L’enjeu ici est avant tout de réunifier et d’harmoniser les dimensions métropolitaine et locale. Dans son passage par le centre-ville les composantes du projet sont : – aménagement des anciens ports de Garonne : place Saint-Pierre, place de la Daurade, port Viguerie ; – aménagement des liens avec le centre-ville (rues Pargaminières, Romiguières, Jean-Suau, Gambetta, des Lois) ; – création d’une piste cyclable sur le quai haut en rive droite tout le long de la Garonne (Empalot, Bazacle, port de l’Embouchure) ; – restauration complète du mur-digue (monument Saget) et aménagement des quais bas (Henri-Martin) ; – aménagements temporaires (événementiels) pour activer l’espace d’eau ; guinguette flottante, navette fluviale connectant les différents ports du centre-ville avec l’île du Ramier et les faubourgs de Toulouse, points d’amarrage pour les bateaux de loisirs, piscine flottante, théâtre de verdure.


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Port de la Daurade Le port de la Daurade a été aménagé pour mettre en valeur ses atouts et son patrimoine paysager et historique : l’aménagement d’un espace vert, d’un dallage en grès des Pyrénées, d’une pelouse renforcée, ainsi qu'une nouvelle aire de jeux pour enfants sur le thème de la navigation sur la Garonne. Le tout conçu pour accueillir des activités multiples : espace buvette, marchés occasionnels, pique-niques informels… L’ancienne morgue sous les escaliers cède la place à une buvette (Pêcheurs de Sable) avec une terrasse spacieuse à côté de l’aire de jeux. Aire de jeux pour enfants sur la thématique de la navigation sur la Garonne

Vue sur la place de la Daurade depuis le quai Lucien-Lombard

Projet achevé (double page suivante)

Les arbres existants ont été conservés et 24 nouveaux arbres (frênes, aulnes, saules, érables…) plantés sur la pelouse pour ajouter de l’ombre. Sous les grands arbres existants, l’aire de jeux réalisée sur mesure évoque les métiers anciens liés à la navigation sur la Garonne avec la réplique d’une gabarre. Le patrimoine est mis en valeur par : – la mise en valeur de la source naturelle de la Daurade : évocation en surface du tracé de la source, côté Garonne ; – l’évocation de la pile du pont médiéval de la Daurade : il reliait historiquement l’Hôtel-Dieu et la rive droite de la Garonne ; – la restauration des murs-digues dans le respect des matériaux traditionnels utilisés : briques anciennes, mortiers à la chaux traditionnels.



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Aménagement des espaces publics le long de l’axe nord-sud Le cardo était l’épine dorsale de la ville romaine sur laquelle se trouvait le capitole. Cet axe a été doublé avec la rue de type hausmannien d’Alsace-Lorraine. Dans cette structure de liaisons nord-sud, quatre interventions de réaménagement ont été réalisées : la rue des Lois et la place du Salin, le marché Victor-Hugo et l’espace monumental de Saint-Sernin.


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Le réaménagement de l’espace public offre également l’opportunité de créer de vrais espaces de verdure pour les riverains qui ne disposent que de très peu de zones vertes. Par ailleurs, le projet s’appuie sur les structures paysagères existantes, telles que le jardin du lycée et le joli jardin qui entoure et protège l’abside et ses chapelles absidiales. Ce jardin du xixe siècle qui entoure l’abside est agrandi et ouvert au public pour s’intégrer comme un espace urbain diurne. Le cloître et le logis abbatial au nord de la basilique sont évoqués en forme de jardin élevé. Les nouvelles plantations de la place s’organisent selon les deux structures historiques principales : le double alignement de tilleuls situé autour de la basilique et le jardin du lycée Saint-Sernin. Ces structures existantes ont été complétées en introduisant une centaine de nouveaux arbres.

Situation initiale

Projet achevé

Projet achevé

Ces nouveaux arbres reconstruiront la façade du logis abbatial vers la place Saint-Raymond et seront une extension des arbres catalogués du jardin du lycée Saint-Sernin qui, de cette manière, s’étend sur l’espace public autour de la basilique. L’intérieur de la zone levée a un sol perméable en stabilisé, dans lequel sont dessinés en pierre les plans des édifices. Les deux parvis de la basilique sont libérés de végétation pour les rendre plus lisibles. Les places historiques sont libérées de végétation, alors que sur le reste de l’espace public, les arbres sont distribués de manière aléatoire, sans céder à la tentation de compléter la plantation en demi-cercle, puisque les nouveaux sujets sont différents des sujets existants en taille et en âge. Pour améliorer l’image globale d'un site si singulier, il est proposé de réduire de manière significative la palette de matériaux utilisés comme les solutions constructives adoptées. Il est proposé un revêtement de sol unique – le porphyre pour donner cohérence à l’ensemble –, mais avec un calepinage et un traitement différents selon les zones. Une simplicité encore volontairement économe dans le choix des matériaux, mais « riche » dans le soin et la rigueur apportés à leur mise en œuvre.



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Place du Salin La place du Salin et la place du Parlement sont deux places reliées qui se trouvent en limite du centre historique de Toulouse, juste derrière la Porte narbonnaise disparue. Elles sont séparées par le palais de justice, un bâtiment du début du xxe siècle qui a été amplement rénové récemment. Cette rénovation a conduit à transformer ce qui était la porte principale des tribunaux, vers la place du Salin, en accès secondaire. Le projet a mis en avant les qualités existantes des espaces : les usages urbains, tels que les marchés et les terrasses, et bien entendu l’architecture du lieu. L’objectif : requalifier l’espace public et valoriser le patrimoine, redonner de l’attractivité à la place, du confort aux piétons et aux modes de déplacements doux. La place du Salin propose un nouvel espace public plus apaisé, plus végétal, tout en mettant en valeur le patrimoine de cette place. Dans le prolongement du cardo romain, depuis la place Saint-Sernin, la place du Salin a été semi-piétonnisée et entièrement réaménagée, avec la création d’une zone apaisée à l’entrée de cet axe historique. L’espace libre sous les arbres est adapté pour le marché de petits producteurs locaux et bouquinistes qui s’y installent trois fois par semaine. Projet achevé

Projet achevé

Vue de la place de nuit (double page suivante)

Les aménagements réalisés, avec des revêtements au sol nobles en pierre de porphyre et sable stabilisé, tiennent compte de l’intérêt patrimonial du site, haut lieu de la justice toulousaine. La statue du Toulousain Jacques Cujas, souvent considéré comme le plus grand humaniste parmi les juristes français, a été restaurée et regarde de nouveau le palais de justice alors qu’elle lui tournait le dos auparavant. Le kiosque, œuvre de l’architecte de la ville Jean Montariol daté de 1927, a également bénéficié d’une restauration complète et accueille aujourd’hui le bar-restaurant le Comptoir occitan. Cette guinguette, à proximité de la nouvelle aire de jeux, est particulièrement appréciée par les jeunes parents. Les joueurs de pétanque y ont retrouvé à l’ombre des grands platanes, et avec une lumière adaptée le soir, des terrains dignes de ce nom en plein hypercentre.



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Les liaisons du centre-ville avec Matabiau La rue Bayard est un axe urbain traditionnel qui relie la gare de Matabiau aux boulevards et à la rue d’Alsace-Lorraine. Elle a été réaménagée en espace civique et commercial avec une priorité pour les modes doux. D’autre part, les allées Jean-Jaurès, qui avaient subi une grande transformation pour répondre aux besoins de la voiture dans les années 1970, ont été réorganisées avec deux larges promenades de part et d’autre d’une grande allée centrale qui fait office de jardin pour les résidents et les passants.


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Rue Bayard Située dans les faubourgs du xixe siècle, la rue Bayard représente la connexion historique entre l’hypercentre et la gare Matabiau. Il s’agissait d’une rue désordonnée avec des stationnements et des livraisons en double file. L’espace dédié aux véhicules à moteurs était trop important et au détriment des piétons et des modes doux. L’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite était peu pratique, avec de nombreux potelets sur le chemin de déambulation, peu de traversées, etc. Les matériaux étaient peu valorisants et constitués principalement d’asphalte rouge sur les trottoirs, de bordures en granit et de caniveaux en pavés. Le parvis de la gare Matabiau et la rue Bayard ont été réaménagés pour présenter aux voyageurs une première impression inoubliable de la Ville rose et les guider vers un centre-ville rénové et apaisé. La rue Bayard devient ainsi le prolongement naturel de la rue d’Alsace-Lorraine. Une rue pavée large avec des arbres le long de la voie et des bancs pour se reposer, regarder les piétons et cyclistes passer. Un calme qui tranche avec l'ambiance trépidante du boulevard de Strasbourg au bout de la voie. Situation initiale

Projet achevé

Projet achevé

Les matériaux proposés suivent la logique de la stratégie générale énoncée dans le schéma directeur, avec de larges trottoirs et la place Schuman en granit gris clair du Tarn, une pierre naturelle de proximité, et du béton désactivé pour la chaussée. La plantation d’arbres fruitiers contribue à une amélioration notable de l’image de l’espace public. La rue a été végétalisée à l’aide de 80 arbres plantés par groupes en quinconce : essences Corylus colurna (noisetier) et Pyrus calleryana « Chanticleer » (poirier de Chine). En termes de fonctionnement, le projet est évolutif : la rue gardera sa disposition avec une voie tous modes ascendante (vers Matabiau), et une voie Bus descendante (vers l’hyper centre) à court terme. L’évolution future, notamment en lien avec la rénovation du Pôle Multimodal Grand Matabiau permetra de remplacer la voie Bus par une voie vélo bidirectionnelle.



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