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Définition

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Afin de pouvoir entrer dans le sujet, il faut d’abord comprendre qu’il existe une différence entre la réhabilitation et la reconversion.

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Dans ma première interprétation de ces mots j’ai perçu la réhabilitation comme un moyen de rénover à l’identique un bâti qui tombe en ruine, se dégrade et se retrouve dans un état critique. Tandis que la reconversion se basait sur l’ancien pour créer le nouveau. Mais après m’être plongée dans les livres et avoir effectué de nombreuses recherches il m’est apparu de nombreuses nuances dans ces deux définitions... En effet, beaucoup d’architectes ayant travaillé dans le domaine de la réhabilitation exposent leurs idées sur la manière de rénover un bâtiment : faut-il reproduire à l’identique ? Quand et comment le nouveau programme peut se démarquer de son hôte ? Faut-il conserver les mêmes matérialités mais opter pour une mise en œuvre plus moderne pour se dissocier du bâtiment d’origine ? Après avoir fait le tri dans les nombreuses définitions que l’on peut trouver, j’ai décidé de donner des définitions plutôt générales où le parti pris de l’architecte ne se fait pas ressentir. Pour ce faire je vais m’appuyer sur les propos d’Emmanuelle Real et du Conseil d’architecture, d’urbanisme et de l’environnement (CAUE) pour donner une définition de ces mots.

La première définition donnée est celle de la réhabilitation : « La réhabilitation, en architecture, consiste à améliorer l’état d’un bâtiment dégradé ou simplement ancien afin qu’il puisse conserver sa vocation initiale. Cette opération de remise en état s’accompagne d’une mise en conformité du lieu selon les normes en vigueur, que ce soit en matière de sécurité, d’hygiène, de confort ou d’environnement. »5

Après quelques lectures sur le sujet, j’ai découvert sur le blog de CRATerre-ENSAG, AE&CC que l’engouement pour la réhabilitation s’est opéré dans les années 70 à une échelle plus réduite que celle du monument historique. En effet, depuis les années 70 la réhabilitation est un moyen de protéger un habitat, des matériaux, des savoir-faire en milieu rural et ce à l’aide d’institutions telle que les Conseils d’Architecture, d’Environnement et d’Urbanisme (CAUE) ou encore les Opérations d’Amélioration de l’Habitat. Ici la réhabilitation est un moyen d’accompagner les propriétaires et les professionnels dans leurs démarches de protection du patrimoine. Par ailleurs, la réhabilitation du bâti est un moyen d’agir en faveur de l’économie de l’énergie consommée par le bâti ancien.6

La deuxième définition est donc celle de la reconversion : « La reconversion affecte un bâtiment à un autre usage que celui pour lequel il a été conçu. Un bâtiment est toujours construit pour une fonction précise –habitat, production industrielle, équipement public, commerce, etc. – tout en correspondant à une intention architecturale et au site sur lequel il prend place. L’évolution des usages étant plus rapide que l’usure des murs, de nombreux édifices trouvent une nouvelle destination. (…) Si la qualité patrimoniale du bâtiment détermine sa reconversion – plutôt que sa destruction –, elle est une contrainte supplémentaire pour le maître d’ouvrage, initiateur, financeur de l’opération qui en définit la fonction nouvelle et pour le maître d’œuvre qui le transforme et l’adapte pour elle. »7

Toujours basée sur le propos de la CAUE, il ne faut pas oublier que lorsque l’on parle de reconversion on remet en question la totalité du patrimoine ainsi que son devenir. Pour ce faire il faut choisir une conversion logique du lieu en fonction du site qu’il occupe, des qualités architecturales déjà présentes dans le bâti mais aussi sur le classement patrimonial. Interroger la valeur patrimoniale fait aussi partie du processus puisqu’il s’agit du moyen de choisir ce que l’on garde ou ce que l’on détruit au moment de l’étude de la reconversion. Après ces deux étapes de recherche et de première prise de décision basée sur l’ancien, il faut penser au nouveau. En effet, il faut analyser l’existant, les contraintes et le lieu dans lequel on s’installe afin de définir une fonction pour le nouveau bâti, mais aussi définir son parti prix architectural du point de vue de la maitrise d’œuvre, de la réalisation et des usages.

Ajouté à tout cela on pensera également à la cause environnementale, à l’application des normes, le tout en respectant les contraintes juridiques et patrimoniales liées à tout site classé, ce qui n’est pas chose aisée. Ce recyclage occupe de plus en plus de place dans le monde de l’architecture contemporaine car il s’agit d’une intervention sur un édifice déjà existant qui demande à être modifié selon les contraintes définies précédemment. Ces contraintes deviennent alors un support d’imagination qui offre des possibilités architecturales auxquelles on n’aurait pas pensé sans elles.

6 Grégoire Paccourd et al., Réhabiliter le bâti ancien : une architecture ordinaire qui devient « patrimoine » ?, Terres à pisé (blog), consulté le 18 mars 2019, https://terrespise.hypotheses.org/contexteet-enjeux/rehabiliter-le-bati-ancien-une-architecture-ordinaire-qui-devient-patrimoine.

7 Pôle Sensibilisation de la Fédération nationale des Conseils d’Architecture, d’Urbanisme et de l’Environnement et Institut français de l’Education, Architecture et reconversion, CAUE (blog), consulté le 18 mars 2019, http://www.fncaue.com/activites-pedagogiques/architecture-et-reconversion/. Thématique (Paris, 1989), p.6.

La reconversion demande donc un travail entre la forme et la fonction8 afin de trouver un moyen de faire ressortir de manière juste, subtile et sur un pied d’égalité, l’ancien et le nouveau. Et c’est cette jonction qui permet de créer un projet unique, singulier, qui accepte de mixer, des savoirs architecturaux témoins de plusieurs époques. Nous saisissons donc à présent, que la difficulté majeure de la reconversion est celle d’inscrire dans le présent tout en préservant des vestiges, des traces de son histoire : on parle alors d’architecture « palimpseste »9. Ce que je nomme architecture « palimpseste » est donc une architecture qui laisse apparaître les marques matérielles ou immatérielles de son passé.

Il est à présent distinct dans ma compréhension architecturale que lorsque l’on parle de réhabilitation on parle d’une remise en état d’un lieu qui se dégrade pour qu’il reprenne son usage premier. Tandis que lorsqu’on parle de reconversion on pense à conserver l’« aura » de l’édifice en lui transposant de nouveaux usages. Les nouveaux espaces ainsi créés permettent de mettre en avant l’évolution de notre société, de sublimer d’anciennes cultures constructives, le tout à l’aide de matériaux et de leur mise en œuvre technique actuelle. La reconversion s’attache donc à mettre en avant un bâti témoin du temps, avec ses cicatrices et ses qualités propres mais aussi un espace neuf, innovant, contrastant avec l’ancien. Dans les deux cas le but est de revaloriser et de renouveler l’ancien pour créer une nouvelle dynamique et lui donner un nouveau souffle. La reconversion et la réhabilitation apparaissent alors comme un des moyens de répondre à des enjeux économiques, écologiques et culturels.

Après avoir saisi le sens et les valeurs que portaient d’une part la réhabilitation et d’une autre la reconversion, j’ai pu constater que mon ambition architecturale tend plus vers la reconversion de bâtis anciens. Premièrement je suis fascinée par le lien que l’on peut créer entre le passé et le présent par le dialogue que nous sommes en mesure de créer avec le temps.

Dans un deuxième temps je m’attache beaucoup au respect de la conception ancienne (mise en œuvre, choix des matériaux). Mais ce respect j’aime le voir retranscrit par la conservation du patrimoine mais aussi par notre capacité à nous adapter à l’ancien tout en générant du neuf, en vue d’une réactualisation des fonctionnalités, des espaces et de l’image du bâti. Dans un troisième temps, je note mon attention particulière envers cette capacité qu’a la reconversion de se remettre en question sur la forme et la fonction de l’espace originel.

8 Christian Schittich, Construire dans l’existant, op.cit., p.9.

Il s’agit là d’un moyen de reconnaitre les qualités existantes d’un lieu et d’en jouer pour s’y adapter ou pour les faire évoluer vers de nouvelles fonctionnalités qui donneraient une nouvelle dynamique au bâti. La reconversion est donc une architecture attentive et à l’écoute qui propose différentes approches et reste ouverte à de nouvelles opportunités… En effet, la reconversion propose différents moyens d’action : - La méthode homogène du mimétisme où l’on retrouve le vocabulaire architectural traditionnel à l’origine du bâti, - La méthode hétérogène par la technique où on distingue l’ancien du nouveau par la mise en œuvre architecturale et les espaces nouvellement créés, - Mais aussi par la méthode hétérogène par le style qui mène à la création d’une rupture où on démarque ancien et nouveau par la rupture des codes architecturaux dans le but de créer un contraste clair et lisible de tous.10

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