le bon art
Texte Lou Mamalet Photo Sara Imloul
Sara Imloul La Galerie Polka fait son cirque noir Depuis le 15 mars, un cirque spécial vient de planter
et s’exerce à la calotypie* en débutant une série de
son chapiteau au sein de la galerie Polka. À la fois
photographies noir et blanc sur le thème du cirque.
ténébreux et merveilleux, fantastique et inquiétant.
De ses clichés ressort un goût certain pour la mise en
C’est le « cirque noir » de la jeune artiste photogra-
scène et le déguisement, ce qui n’est pas sans évo-
phe Sara Imloul.
quer l’univers du travestissement de Claude Cahun dont l’artiste ne cache pas puiser son inspiration.
Nichée dans une arrière cour lumineuse du troisième
« Je fais de la photographie depuis que j’ai 15 ans et
arrondissement de Paris, la galerie Polka regorge
j’ai toujours aimé la mise en scène et le théâtre. La
de trésors photographiques. Fondée en 2007 par
calotypie correspond bien à mon univers et je suis
les frères et soeurs Edouard Genestar et Adélie de
fascinée par toute la préparation qu’elle nécessite.
Ipanema, elle rend depuis hommage au photojourna-
Je me sens un peu comme un sorcier qui prépare une
lisme en exposant des photographes de renommée
potion magique. ».
internationale comme de nouveaux talents contemporains. Après avoir mis en lumière le travail du pho-
Mais son école, plutôt technique et spécialisée dans
tographe de la Nouvelle Vague Raymond Cauchetier,
la photographie publicitaire ne cautionne pas son
c’est au tour de Elliot Erwitt d’avoir la tête d’affiche
travail, trop éloigné de l’esthétique classique. « Mes
avec sa série Sequencially Yours. Celui qui a su cap-
professeurs ne comprenaient pas ma série sur le
turer la célèbre image de Marilyn en jupe virevoltante
cirque qui n’était pas assez lisse et beaucoup trop
sur une bouche de métro partagera l’espace avec
plastique pour eux. » Sa rencontre avec Dimitri Beck,
trois autres artistes contemporains. Catherine Balet
rédacteur en chef de la revue Polka, venu donner une
et sa réflexion sur la société numérique intitulée
conférence dans son école, va cependant confirmer
Strangers in the light, les natures mortes de Paulette
son style. « Lorsque j’ai présenté mon portfolio à
Tavormina mais surtout le cirque obsédant et intri-
Dimitri, il m’a immédiatement proposé de le contac-
guant de Sara Imloul. Rencontre avec cette jeune
ter à la fin de mes études et encouragé à poursuivre
artiste qui éveille les curiosités.
mon travail ».
C’est alors qu’elle est sur les bancs de l’école de
Ce dernier a eu du flair puisque Sara a remporté la
photographie de Toulouse (ETPA) que Sara s’initie
mention spéciale du jury de son école avec sa série
aux techniques de la photographie du 19 e siècle. Elle
« cirque noir ». Elle expose aujourd’hui ses photos
est immédiatement séduite par le rendu des images
chez Polka et ouvre la petite porte (des tirages en
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petit format uniquement) de son univers intimiste oscillant entre le cinéma expressionniste allemand
Sara Imloul
de Murnau et l’ambiance en demi-teinte de Patrice
Galerie Polka
Leconte dans La Fille sur le Pont. Une œuvre qui reflète
12, rue Saint Gilles, 3e
le monde intérieur de l’artiste : elle ne photographie
Du 15 mars au 19 mai 2012
que ses proches, telle sa mère, ce qui donne un résul-
*Technique de tirage argentique
tat à la fois introspectif et artistique à la Sarah Moon.
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