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Le jardin de l’aurore

Ce matin là, plus que les autres matins, Aurore avait le coeur lourd. Il lui rappelait qu’un an auparavant, sa mère, Claire, avait péri dans un accident. Sans qu’elle ne puisse rien faire pour la sauver. Sans même la serrer dans ses bras une dernière fois. Sans même lui dire au revoir.

Assise dans le fauteuil de la véranda, celui dans lequel sa mère commençait toujours sa journée, Aurore observait le jardin incolore à travers les vitres sales. Il ne restait presque plus de fleurs, ni d’oiseaux, ou bien de couleurs. Les roses fanées attendaient en vain le retour de la main qui les arrosait, tandis que les hirondelles fuyaient ce désert pour un autre paradis éphémère. Quant aux abeilles, elles avaient toutes disparu, faute de pollen à recueillir. Seul le chat roux et squelettique du quartier continuait de dormir sous la table en bois, unique réminiscence du jardin si cher à la mère d’Aurore. Mais maintenant qu’elle n’était plus là, Aurore ne voyait plus l’intérêt d’entretenir ce vestige d’une époque révolue. Une époque qui lui évoquait tant de regrets. Quelques années auparavant, Aurore travaillait jours et nuits à Paris, bien loin du paisible village normand dans lequel vivait sa mère.

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Elle ne l’appelait jamais, pas même les soirs où Claire le lui demandait. Elle ne lui rendait pas visite non plus, et prétendait que son emploi du temps l’en empêchait. Et pourtant, du temps, elle en avait. Pour sortir le soir. Pour dormir jusqu’à midi. Pour flâner au soleil dans le jardin des Tuileries. Pour emmener Mathilde en week-end romantique. Mais jamais pour sa mère.

Pour Claire, elle avait tout juste des excuses.

Tout changea le jour où son frère l’appela. Un matin, à l’aube, avec une voix grave. C’était une voiture apparemment. Les médecins n’avaient rien pu faire. Ils auraient aimé sauver Claire, mais la violence de l’impact ne lui avait laissé aucune chance. Jamais Aurore n’avait autant pleuré. Aujourd’hui, elle se souvenait de chaque larmes versées, mais aussi des cris qu’elle avait dû étouffer, et des condoléances qui lui étaient adressées.

Mais le pire restait les regrets. Il lui aurait suffit d’une visite en Normandie, d’un appel, ou juste d’un bref message. Quelques mots adressées à sa mère pour qu’elle sache qu’Aurore pensait à elle, même si elle ne l’avait

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