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Enquête exclusive

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Test - Quel

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Enquête exclusive : les plats les plus chaotiques de ta région

C’est avec une pensée émue pour Philippe Etchebest qu’une véritable enquête d’investigation est lancée par le Louvr’boîte (enfin par moi) pour découvrir et comprendre les plats les plus chaotiques de nos cuisines. Lire cet article, c’est embarquer pour un aller simple pour les montagnes russes des plats les moins cohérents, déjà que l’expression « montagnes russes » est assez expressive en termes de chaos et de manque de cohérence.

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Commençons par poser les bases: qu’est-ce qu’un plat chaotique ? Un plat chaotique c’est quelque chose qui n’a pas de sens, pas de logique propre. Le résultat peut être plus ou moins bon (on ne juge pas) mais le plus important c’est que tout est possible. Je ne citerai pas l’abominable sandwich à la moutarde cuit au micro-ondes que mon frère a pu réaliser fut un temps, matisme est encore trop présent pour que je sois capable d’en parler. A la place, parlons du riz cantonais. Oui, le riz cantonais. Désolée, mais personne ne mélange du riz, de l’omelette, des lamelles de porc, des carottes, des petits pois et autres légumes en se disant « mmmh ça va être super bon ! ».

Certes c’est bon mais là n’est pas la question, ce que l’on doit se demander c’est : pourquoi ce vous n’êtes pas prêt et le trau-

plat dont les premières traces remontent au VIe siècle en Chine et en Asie du Sud-Est a-t-il connu autant de succès ? Tout simplement parce qu’il s’agit d’un plat très économique. En prenant les restes de la veille et en les mélangeant avec du riz, il est possible de constituer un plat très nourrissant à moindre coût. Je vous avais promis de l’enquête d’investigation, non ?

Le chaos c’est aussi partir de quelque chose de bon et en faire quelque chose d’infâme. Oui, je parle bien de la moussaka. Sur le papier on a clairement affaire à un copié-collé de lasagnes où la pâte est remplacée par des 6

tranches d’aubergine. Que des gens puissent aimer un légume dont la texture ressemble plus à une éponge que celle de mon évier, certes je peux comprendre, mais qu’on choisisse de mélanger ça avec de la tomate et du mouton, ça me dépasse complètement. En recherche de clarification sur le sujet, je découvre à mon plus grand étonnement qu’il n’y a pas une mais des moussakas. La version la plus connue en France est la moussaka grecque mais la recette de la moussaka s’étend sur tout le pourtour Est de la Méditerranée. Mon cœur penche pour la version que l’on trouve au Nord de la Grèce, en Macédoine ou en Roumanie par exemple, où l’aubergine est remplacée par des pommes de terre ou des courgettes. Oui, je n’aime pas les aubergines mais je n’ai jamais dit que cette enquête serait objective (et puis c’est quoi l’objectivité en 2020 ?).

Véritable retour aux sources, je m’attaque maintenant à un problème qui divise la région de mon cœur, la Bretagne. Il est en effet temps de parler de la galette saucisse, véritable trahison au bon goût de cette région où la crêpe se mange à toute heure. Pour comprendre ce débat, il faut commencer par un petit point d’étymologie : en Bretagne du Nord, la « galette » désigne une crêpe salée et ce que l’on appelle « crêpe » est forcément sucré. Alors qu’en Bretagne du Sud (les vrais), la « crêpe de blé noir » ou « de sarrazin » désigne la crêpe salée et la « crêpe de froment » désigne la crêpe sucrée. Déjà, on ne part pas sur quelque chose de stable, mais voilà que ces Bretons du Nord décident de mettre une saucisse dans leur crêpe ! Certes on élève des porcs en Bretagne, mais est-ce que vous voyez des gens mettre un pied de porc dans leur crêpe ? Non ! Bon, après il

faut quand même lui reconnaître, à cette galette saucisse, qu’elle est rapide à préparer et n’est pas très coûteuse. Déjà, ça lui fait un point commun avec le riz cantonais et en plus c’est très pratique pendant des festivals ou autres évènements bretons.

Arrivé là, mes détracteurs m’avanceront que mes choix de plats sont dictés par mes goûts ou encore pire par des revendications intra-régionales. C’est pourquoi j’ai décidé d’avancer un exemple dont l’aspect chaotique ne peut être débattu : la tarte tatin. On ne parle plus de goût mais de méthode. En effet, quoi de plus chaotique qu’une tarte inventée par accident ? Sauf que non, l’invention de la tarte tatin n’est absolument pas accidentelle : c’est un critique culinaire qui au début du XXe siècle lance cette légende d’une maladresse d’une des sœurs Tatin, sœurs qui tenaient une auberge en Sologne. En quête de chaos de la méthode, il ne me reste plus qu’à me rabattre sur l’artichaut. On n’ajoute rien à un artichaut, on le cuit, on le mange et c’est fini. Oui mais que fait-on de tout ce qui reste après le repas ? Comme dirait Coluche « c’est le seul plat que quand t’as fini de manger, t’en as plus dans ton assiette que quand t’as commencé », et si ça n’est pas la définition même d’un plat chaotique, alors je peux considérer cette enquête comme un échec.

Tyfenn Le Roux

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