LXXV #4

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ATUIT LTURE GR U C & E U IQ ZINE POLIT LE MAGA

FRANCE

Le PS en primaire

MODE

Retronomy

SOCIÉTÉ TENDANCES

ENFANCE L’enfance au service du style

#4 (JUIN/JUIL./AOUT)

Playboy



edito

PAR LAURE WAGNER

I� ����� ��� ���� Lies Hebbadj. Ou celui que personne ne connaissait jusqu’à ce que sa femme se fasse verbaliser, début avril, pour avoir conduit une voiture en Niqab (voile intégral ne laissant de visibles que les yeux). Pourquoi les projecteurs se sont-ils ensuite tournés vers lui ? Il a été accusé de polygamie par notre ministre de l’Intérieur, Brice Hortefeux, qui a demandé au ministre de l’Immigration, Eric Besson, d’ouvrir une enquête afin de déchoir le désormais célèbre Liès Hebbadj de la nationalité française, si preuve de polygamie il y avait. Quand on pense que toute cette histoire a commencé par un simple contrôle routier… I� ����� ��� ���� Eyjafjöll. Le 14 avril dernier, un volcan islandais est entré en éruption. En recrachant près de 150 000 tonnes de C02 par jour, à une hauteur moyenne de 6 km, il a bloqué la quasi-totalité du trafic aérien sur le continent européen pendant une semaine. Eyjafjöll est donc devenu le pire cauchemar des vacanciers qui attendaient leur départ avec impatience… Et des compagnies aériennes qui ont perdu des centaines de millions d’euros. Un volcan capable de paralyser la circulation aérienne de tout un continent: qui l’eut cru ? I� ����� ��� ���� Deepwater Horizon. Une plate-forme pétrolière qui sombra dans le golfe du Mexique, au large des côtes de la Louisiane, il y a deux mois, et provoqua une marée noire aux conséquences désastreuses sur le plan écologique, comme sur le plan économique : des centaines d’espèces animales touchées et la mise à mal du secteur pétrolier. Mais, Deepwater Horizon ne s’est pas arrêtée là. Elle a également fragilisé (un peu plus encore) un président américain déjà mal en point, en constituant un nouveau prétexte de critique pour ses détracteurs qui n’ont pas hésité à comparer sa gestion de la crise à celle de George W. Bush lors du cyclone Katrina… - Encore une histoire ! Encore une histoire ! - Pas ce soir, il est déjà tard… Bonne nuit les enfants ! 3


sommaire

4 edito

Il était une fois (P.3)

point de vue Où sont les hommes ? (P.6)

international Obama ou la fracture de l’Amérique (P.8) Canada : Welcome home (P.10) Norvège : Du bon temps qui a son prix (P.12)

mode

Retronomy (P.14)

europe Mariage d’amour ou de raison (P.20) Crash présidentiel polonais sur fond de nuage volcanique... (P.21) L’Europe est-elle en danger? (P.22)

en vogue Les Lalanne : le design au quotidien (P.24)

litterature Ainsi parlait Michel Onfray (P.26) The Brooklyn Follies & Un Très Grand Amour (P.28) Les livres de l’été (P.29)

france Le PS en primaire (P.30) Fin 2010 on ne fera que de la politique (P.31)

photos Souvenirs d’une enfance passée (P.32)

Suite du sommaire sur la page suivante...

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sommaire

societe Playboy : Que pense le meilleur ami de l’homme? (P.38) Qui de l’oeuf ou de la poule...? (P.39) To be or not to be : végétarien (P.40) Dialogue Transatlantique (P.41)

cinema Hollywood et la main invisible du marché (P.42) En DVD & En direct de Cannes (P.44)

musique Le rock des États-Unis au Royaume-Uni (P.46) Db & Bpm (P.48)

tendances L’enfance au service du style (P.49)

sorties La flèche d’or & Le truskel (P.50)

LXXV M������� 4, rue du Dragon 75006 Paris, France www.wearelxxv.fr

lxxvmagazine.blogspot.com

R��������� �� ���� Laure Wagner D�������� A��������� Dorian Dawance R���������� ��� ������� Caroline Tixier

OURS

A��������������/������� Laure Wagner, Caroline Tixier, Dorian Dawance

C����� �� ������� ��������� Catherine Dawance, Danièle Carpentier, Aude Aït Kaci Ali

J����������� Laure Wagner, Cécile Carpentier, Christelle Sipolis, Lerna Sahincik, Marion Degeorges, Alice Gergonne, Alexandra Gudicelli, Karen Hazan, Olivier Abessolo, Jean du Sartel, Constantin Yvert, Eléonore Lecointe, Aurélien Hubert, Thibaut Bauer-Grandjean, Louis Lebris, Hortense Foillard, Lucie L’Hôpital, Christina Bézès, Alexander Barclay, Stan Coppin, Marie Blanche Paumier, Edina Ettig.

� ��������� ��������� � �� ������ Juliette Neiman

I������������ � ������������ Coline Brun-Naujalis, Dorian Dawance, Camille Yvert, Christelle Sipolis

�� �������� ���� ��� ����� ��� �’����������� ��� 1901 ���� ��������-������, ����� ������ : 34 ��� �����-������� 75006 P����, �� �������� ������� ����� �������������� ����� ��� ������ �� ������ ��� ��� ���� �������. ��� �������� ������� �’�������� ��� �� �������������� �� ����� �������. ������������ ���������

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point de vue

PAR CÉCILE CARPENTIER & CHRISTELLE SIPOLIS Question existentielle ? Débat sociétal? Inquiétude de la gente féminine? Tout porte à croire que la révolution des sexes est allée bien au delà de l’imaginaire collectif. En 2010, les femmes ont pris le pouvoir dans de nombreux domaines, et ce pour longtemps. Cependant, la société peine encore à admettre cette valeur ajoutée qui se traduit ni par des égalités de salaires, ni par une reconnaissance pleinement assumée au sein du foyer. Retour sur un phénomène qui chamboule les mœurs du XXIème siècle et fait le bonheur -autant que le désarroi- du sexe faible.

LA RÉVOLUTION DES SEXES « L�� ������ ��� ���������, les femmes au boulot » : scandale nous direz-vous ! Mais cela pourrait tout à fait être un slogan dans les années 2030, au grand dam de la société toute entière. L’histoire commence, en fait, à la création quand, après avoir touché au fruit défendu, Dieu condamne l’homme à gagner son pain à la sueur de son front et la femme à enfanter dans la douleur. Depuis, rien n’a changé, tout a continué : les femmes n’ont jamais été considérées comme étant égales aux hommes… Du moins jusqu’au 20ème siècle. E� �����, au sortir de la seconde guerre mondiale, les femmes réclament la reconnaissance et le droit de vote, qu’elles obtiennent en avril 1945. Mais, pour la reconnaissance d’un statut plus juste, il s’agissait d’opérer une réelle révolution des mœurs. C’est dans les années 60 que les mouvements féministes gagnent en influence, à la fois héritiers de mai 68 et du mouvement féministe américain, Women’s Lib. Les premières victoires viennent en 1972 et en 1975, avec les lois Neuwirth et Veil, qui légalisent la contraception et dépénalisent l’avortement. 6


D�� ����, la condition des femmes s’améliore, elles s’épanouissent dans leur foyer et cherchent à s’élever dans la société. L’activité des femmes progresse donc (de 60% en 1975 à 82% en 2006), mais au prix d’une grande précarité. En effet, pour la première fois depuis 1970, le taux de chômage féminin a atteint celui des hommes en 2009, selon l’observatoire des inégalités, et 4 femmes actives sur 5 ont un emploi à temps partiel. De même, le salaire des femmes, à poste égal et compétences égales, est de 10% inférieur à celui des hommes (chiffres INSEE). Et enfin, il n’y a que 8% de femmes dans les conseils d’administration des 500 plus grandes entreprises françaises et que 10,5% dans ceux des entreprises du CAC 40. D’����� ����, avec cette accession à la vie professionnelle, la femme se trouve confrontée à une « double journée de travail » puisqu’elle doit, dans la plupart des cas, quitter le bureau pour son foyer, où elle doit encore assumer les tâches domestiques et l’éducation des enfants. D’ailleurs, la HALDE (haute autorité pour la lutte contre les discriminations) souligne que cette accumulation de tâches leur est reprochée, puisqu’après un congé de maternité les cas de CDD non renouvelés, d’absence de promotion et de périodes d’essai brutalement interrompues sont fréquents… C��� ��� ���� à comprendre quand on sait que les femmes assument près de 80% des tâches domestiques (selon l’Institution nationale d’études démographiques). Ah ! Il n’est pas encore venu le temps où les hommes assumeront le rôle d’homme au foyer… Mais c’est bien ce schéma qui semble s’esquisser pour les années à venir, car la révolution est en marche ! Les femmes s’affirment et les hommes s’évaporent. Les nouveaux mouvements se font entendre à l’image de « Ni pute, ni soumise » (création en 2003), des Chiennes de garde (création en 2000) et de la journée de la femme (instaurée depuis 1982). A quand une journée de l’homme ? Pas de si tôt, vu la tournure que prennent les choses. Fort de son slogan préféré, « Courage, fuyons ! », la gente masculine tente de maintenir la tête hors de l’eau. Désormais, les femmes élevant un enfant seules sont nombreuses, les crèches d’entreprises fleurissent et des lois incitent à une parité homme/femme en politique, ainsi que dans les entreprises. L� ����� serait donc supérieure à l’homme ? Pas encore, mais cela ne saurait tarder, les superhéros n’ont qu’à bien se tenir ! C.C.

point de vue MERCI MOULINEX ! D� ���� �� ����� ������, les femmes ont acquis, siècle après siècle, une assurance croissante. A la maison comme au travail, elles assurent et assument les tâches quotidiennes ; un emploi souvent à temps plein, un mari, des enfants... Pour faire face à ces nombreuses tâches, un allié de taille : la révolution de l'électroménager (datant des Trente Glorieuses) et des nouvelles technologies, mettant aujourd'hui un point d'honneur à aider la femme moderne à réaliser tous ses fantasmes. Se trouvant parfaite en tout point -parce qu’avant de partir au boulot, elle n'a pas oublié le smoothie du chéri qui-ne-mange-pas-assez-defruits, ni de préparer le gaspacho pour le beau-frère qui s'incruste à dîner ce soir-, la femme des années 2000 sait tout faire et veut tout faire : merci Moulinex! L� ��������, c'est que cela ne marche pas comme ça. A vouloir tout contrôler, elle ne contrôle plus rien. A vouloir trop prendre le pouvoir, la femme se rend moins accessible, plus froide, voire maniaco-dépressive... En surévaluant ses capacités, elle dévalorise l'homme et n'apprend à compter que sur elle-même, et ce, dans une société qui prend alors sa revanche en lui renvoyant à la figure la moindre de ses erreurs. Eh oui ! La femme -contrairement à l'homme- n'a pas droit à l'échec… D'����� ����, l'homme, en se laissant spolier sa place -au début par amusement, puis par galanterie, pour laisser faire un peu et voir s'il n'y a pas du bon à en tirer-, s'en mord les doigts. En se retrouvant quasiment l'égal de l'homme, la femme en vient même à assurer le rôle masculin, au point de remplir parfaitement la fonction de mère célibataire, puisque « mieux vaut être seule que mal accompagnée » : le prince charmant est passé par la guillotine depuis longtemps. Désormais, la serial-dragueuse, pressée par une certaine horloge, à l'œil acéré, sait repérer à 3 km à la ronde le gentil minet débonnaire qui ne prendra pas trop de place sur le canapé du salon. En évinçant les hommes et en devenant à leur tour chasseuses, puis chefs de famille, les femmes inversent les rôles, finalement plus qu'elles ne l'auraient souhaité. Aussi, l'immense privilège du port du caleçon ne se fait pas sans le sacrifice de quelques traditions auxquelles tiennent pourtant les femmes ; à vouloir le beurre, l'argent du beurre et le cul du patron, on y perd de sa crédibilité ! U�� ������������� effleure alors l'esprit, Mesdames, serez-vous capables d'assumer, un jour, la fatidique question posée à votre conjoint émasculé : « Chéri, as-tu bien pris ta pilule » ? C.S. 7


international PAR LERNA SAHINCIK

Premier président issu d‘une minorité ethnique, le président Obama doit faire face à une violente vague d’hostilité contre sa politique.

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OBAMA OU LA FRACTURE DE L’AMÉRIQUE « C� ��� �� �’���� ��� ���� O����, ce sont ses objectifs, ses idées, sa politique, ses convictions et ce qu’il a fait […]. Je n’aime pas Obama parce qu’il fait du mal à l’Amérique ». Ces propos de contestation de la politique d’Obama, prononcés par le conservateur, Jonathan Krohn, auteur du livre, Redéfinir le Conservatisme, est révélateur du rejet total du projet politique d’Obama par la droite conservatrice aux Etats-Unis. A���� ��� �������� historique à la majorité des suffrages, le 4 novembre 2008, le président Barack Obama est aujourd’hui dans une situation complexe. Il doit faire face aux manifestations et critiques extrêmement violentes des conservateurs quant à sa politique qualifiée de «socialiste», de «communiste», voire même de «marxiste». C�� ����, censés être insultants aux Etats-Unis, sont sans arrêt prononcés par les adversaires à la politique du 44ème président américain. De nombreux groupes et lobbies conservateurs, qui mènent une politique ultra-active, se fédèrent autour de quelques idées phares du patriotisme américain, tels que la protection de la liberté et des libertés individuelles pour lesquelles le peuple américain s’est battu. L� ������� �� �� ����� préconisée par Barack Obama et visant à offrir une couverture sociale aux plus démunis a fait l’objet d’une très forte opposition, car de nombreux américains y voient une restriction de leurs libertés. E� ��� 2009, « Americans For Prosperity », un lobby conservateur basé à Washington D.C, a lancé un site internet au nom de «Patients United Now». Ce site se décrit comme « un projet d’information destiné aux opposants de la prise de contrôle du gouvernement sur le système de santé ». D�� ������� comme celui des « Tea Parties », en référence à la « Boston Tea Party » de 1773 qui libéra le peuple américain, appellent à la révolte contre ce qu’ils désignent comme « la tyrannie du gouvernement dur et oppressant » qui est au pouvoir. Cette mouvance qui réunit les déçus -ainsi que les fervents opposants à la politique d’Obama-, a lancé le « Tea Party Express National Bus Tour ». Ce tour de bus des Etats-Unis en 47 arrêts a eu pour point de chute, le 15 avril 2010, la ville de Washington D.C, cœur de la vie politique fédérale. C�� ��������� considèrent que la politique du gouvernement actuel ne reflète pas les valeurs de l’Amérique et défendent un système politique libéral, dans lequel l’état a des pouvoirs limités.


« L’�������������� O���� s’en prend à nos libertés (…), Obama n’a aucune limite morale(…), cela nous fait peur à nous Américains de perdre nos libertés(…) On en a marre! », affirme une farouche adversaire à la politique de Barack Obama, lors de l’un des rassemblements organisés devant le Capitole à Washington D.C. D�� ����� et sites contestent vigoureusement la politique d’un Barack Obama « qui n’aime pas l’Amérique », et «n’est pas attaché à ses valeurs». Beaucoup l’accusent d’être tout sauf américain dans ses idées. Certains, comme les « Birthers », sont même allés plus loin, remettant en cause sa nationalité. Ces « illuminés » soutiennent que « Barack Obama n’est pas un citoyen américain (…) mais un sujet britannique » ! C���� ��������� autour de la nationalité américaine du président des Etats-Unis d‘Amérique, a été relayée par les médias, notamment la chaîne Fox News, qui est ouvertement conservatrice. Les propos mettant en doute sa nationalité ont été d’une virulence telle, que le président a été obligé de rendre publique son certificat de naissance. Mais, ce document n’a pas suffi à faire taire les rumeurs. C������� A��������� n’hésitent pas à affirmer que s’appelant Hussein et ayant été identifié comme musulman dans le formulaire d’inscription de l’école catholique qu’il a fréquentée en Indonésie (l’école inscrivait les enfants en se référant à la religion de leurs parents), le chef de l’état sert d’autres intérêts que ceux de son pays. L’����������� de sa politique étrangère, tournée vers un dialogue, notamment avec Téhéran qu’il a retiré de « l’axe du mal », en mars 2009, en serait une démonstration. D’������ ������, comme les évangélistes intégristes, accusent Obama d’être l’antéchrist. Dans cette branche fondamentaliste chrétienne, la gauche est associée au diable. L’inconnu Obama qui électrise les foules et promet le changement ne serait autre que cet imposteur charmant qui, dans la Bible, apparaît avant l’Apocalypse pour instaurer une nouvelle religion. D��� �� ��� ���� ����������� et extrêmement dangereux, le très conservateur Glenn Beck, commentateur politique de l’une des émissions à plus forte audience de Fox News, mène une réelle propagande idéologique. Co-auteur d‘un documentaire « inédit » relatant « la vraie histoire des révolutionnaires de l‘holocauste », celui-ci tente d’y démontrer le lien entre Karl Marx, Hitler, Staline, Mao et Obama. A������� ��� �������� et manipulant les esprits, Glenn Beck est à l’origine de plusieurs polémiques : il a même affirmé que Barack Obama était un « raciste qui avait une haine profonde pour la race et la culture blanche ». C� ������ ��������� a eu des conséquences inquiétantes. Le nombre de milices armées a beaucoup augmenté. L’extrême droite est montée en puissance. Dans un pays où quatre présidents sur quarante quatre ont été victimes d’extrémistes pendant l’exercice de leurs fonctions, la protection de Barack Obama est à son paroxysme. A ce jour, il a fait l’objet de plus de menaces de mort que tous les anciens présidents réunis. F��� � « l’augmentation des taxes », « l’adoption de la réforme de la santé », ainsi que la politique de « privation des libertés », les détracteurs du président américain sont convaincus que le peuple américain ne peut que se soulever. M���, les affiches le caricaturant en Hitler, Mao ou Staline n’ont pas réussi à le discréditer. Et malgré tout cela, il reste la figure la plus populaire aux Etats-Unis.

international

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international PAR MARION DEGEORGES

CCANADA: ANADA:

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UNE TERRE D'ACCUEIL EN QUÊTE DE SON IDENTITÉ NATIONALE

N��� ������ au Canada, dans un petit appartement moderne et confortable. Premier plan : un homme africain d’une trentaine d’années parcourt des yeux les photos de sa famille, tout en étant au téléphone : « I’ll see you tomorrow », dit-il. Deuxième plan, on le voit dans un magasin de vêtements d’occasion : il achète des gros manteaux, des bonnets, des gants et des écharpes qu’il met dans des « cabas Barbès ». Dernier plan : il est à l’aéroport avec ses sacs. Il s’arrête dans une enseigne Tim Hortons -le Starbucks à la canadienne, véritable emblème national- et il commande deux cafés. Plus loin, on aperçoit une femme africaine d’une trentaine d’années, accompagnée de deux enfants, elle pousse un caddie, ils viennent d’atterrir... Les retrouvailles sont émouvantes. L’homme prend ses enfants dans ses bras, puis regarde sa femme avec émotion. Il essuie quelques larmes, il l’embrasse, lui tend un café et lui dit : « Welcome to Canada, welcome home » 10


international

L� ������������ ��������. C’est le thème de la campagne de publicité qu’a lancé Tim Hortons pendant les Jeux Olympiques d’hiver, afin de promouvoir son café, véritable fleuron de la nation. Osons d’ores et déjà la question : pourrait-on imaginer que le café Grand-Mère surfe sur la vague de l’immigration et du regroupement familial pour vendre son produit ? Notre vieux pays qui a récemment été chamboulé par la tournée nationale des débats sur l’identité nationale, est-il prêt à cela ? La question reste ouverte… L� C����� l’est en tout cas. Et pour cause, il pointe très souvent à la première place du classement des pays accueillant le plus d’immigrants et compte, à ce jour, environ 20% d’immigrants parmi sa population. C’est un pays qui, dès les premiers pas de sa courte histoire, a dû se construire sur les fondements de plusieurs nations : les « First Nations » (ceux qui occupaient la terre en premier), les Anglais, les Français, etc. Mais qu’est-ce qui a poussé le Canada à perpétuer sa réputation de terre d’accueil ? Car si, dans un premier temps, il s’agissait d’une cohabitation sous forme d’entente cordiale, c’est maintenant un réel choix, confirmé en 2009, dans le Rapport annuel au Parlement sur l’immigration par le ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme. Les deux points à retenir de ce rapport sont les prévisions en termes d’immigration pour l’année 2010 et la raison pour laquelle le Canada tient tant à ouvrir ses frontières. D� 240 000 � 265 000. C’est le nombre de résidents permanents que le pays prévoit de recevoir en 2010. Un chiffre impressionnant, quand on sait que le Canada ne compte pas loin de 34 millions d’habitants. Et le phénomène ne s’arrêtera pas là. D’ici 2031, environ 28% de la population du Canada sera née à l’étranger. Tout cela grâce au financement de plans d’action mis en place pour accélérer l’immigration. Mais pourquoi ? D’abord parce qu’il y a suffisamment de place. Le Canada est le second pays le plus important par sa superficie dans le monde, après la Russie. Ensuite, parce que le gouvernement y trouve un intérêt économique. E� 2010 : l’immigration pour combattre la récession. C’est ce qui est développé dans le rapport 2009, présenté au parlement. Ainsi, d’ici la fin de la prochaine décennie, le gouvernement prévoit que toute la croissance de la population active soit attribuée à l’immigration. U� ����� et une volonté de sortir de la crise, c’est ce qui pousse aujourd’hui le Canada à maintenir et à encourager l’ouverture de ses frontières. Seulement, tout cela est allé et va encore très vite. Si vite que les Canadiens eux-mêmes éprouvent des difficultés à se définir en tant que nation. De plus, il s’agit d’un pays relativement jeune. De ce fait, beaucoup de ses coutumes restent encore à définir. Le défi consiste donc maintenant à forger les rites et la culture canadienne de demain, tout en prenant en compte l’incroyable diversité dont le pays regorge. Au quotidien, les Canadiens sont déchirés entre mettre en place des valeurs qui les unifient en tant que nation et célébrer leur multiplicité. T��������, il existe déjà un dénominateur commun qui rassemble tous les Canadiens : leur terre. Il s’agit, en effet, d’une population résolument attachée à son patrimoine géographique qu’ils qualifient euxmêmes comme « the best backyard in the world » (le meilleur terrain de jeu au monde). Les Canadiens sont des citoyens « verts » qui chérissent leur nature, s’engagent à la protéger et s’appliquent à en tirer le meilleur, en termes de sports et de loisirs. C’est ce qu’a bien compris Molson Canadian -une autre institution nationale, une grande marque de bière Canadienne- car la nature est l’élément principal autour duquel ses campagnes de publicité sont développées. On la retrouve notamment dans les pubs «Made From Canada» et « I Am Canadian » qui célèbrent respectivement la terre et la culture canadienne. L� ���� �’����������� en faveur de l’économie montre une certaine ingéniosité de la part du gouvernement canadien à trouver des ressources. À noter que cela reste possible grâce à la faible démographie du pays et à la jeunesse de son histoire. Toutefois, si cette croissance complique davantage la question de l’identité nationale, à laquelle se confrontent les Canadiens au jour le jour, elle leur permet d’avancer vers une terre plutôt stable. En effet, s’ils n’ont pas l’histoire, les coutumes et l’unité culturelle pour les guider, ils ont leur terre. Et en pleine mouvance écologique, la nature semble être une noble cause autour de laquelle une nation peut chercher son identité. 11


international Nuit polaire en hiver et soleil de minuit en été, aurores boréales, lacs et fjords magnifiques ; la Norvège est un pays aux multiples ressources pour les touristes… Mais, pour les étudiants français exilés à Oslo le temps d’un semestre ou d’une année, il s’agit également d’y apprendre une nouvelle manière d’appréhender ses finances, et de revoir sa définition de « faire la fête »…

LA NORVEGE : DU BON TEMPS QUI A SON PRIX PAR ALICE GERGONNE

B�������� � O��� ! Sans doute la seule capitale au monde qui propose à la fois la pratique du ski, des sports nautiques et des excursions sur une île ; tout cela dans les limites de la ville. Mais, l’étudiant parisien -une fois ébloui par le charme de cette ville unique au centre situé entre forêts et fjords, à l’opéra futuriste et aux ballades en chiens de traîneaux accessibles en quelques heures de trains- se consacre à des préoccupations plus pratiques… Et constate, non sans peine, que cette ville exceptionnelle est également la ville la plus chère au monde ! L�� ��������� ����������, eux, le vivent bien : tous ayant droit à une bourse conséquente, pour faire face à toutes les dépenses qui accompagnent la vie étudiante (et nous savons qu’elles sont nombreuses). C� ����, bien décidé à tirer tous les bénéfices de son or noir qui fait la richesse de l’état -et la ruine des étrangers-, ne s’est toujours pas motivé à nous rejoindre dans l’Union européenne. Comme une énigme dans le paysage européen, la Norvège n’est pas moins qu’un « quasi Etat-membre » de l’UE, dans la mesure où elle participe au marché unique, aux accords de Schengen, et au programme d’échange universitaire Erasmus. Et ceci pour le grand bonheur des étudiants français ! Car la vie nocturne à Oslo est tout sauf ennuyeuse, mais connaît certaines règles. Règles qui peuvent parfois êtres vécues comme des contraintes, lorsque l’on sait que l’autre particularité du pays du saumon est que tout y est mis en œuvre pour que l’on en revienne parfaitement assagi… A��� ������� qui cherchez un lieu pour entamer une cure de désintoxication, la Norvège est faite pour vous! Non seulement le prix du paquet (70 nok, soit 9 euros) est à vous décourager d’en allumer une, mais en plus, l’état norvégien a été parmi les premiers à promulguer une loi interdisant de fumer dans tous les lieux publics. Or, fumer à l’extérieur peut devenir problématique en hiver, lorsque la température atteint les -25°C ! De même, l’accès à l’alcool est un véritable parcours du combattant. D’abord, il est nécessaire, pour s’en procurer -légalement-, d’être âgé de 20 ans au minimum. Ensuite, toutes les variétés de breuvage sont uniquement vendues dans des magasins d’état spécialisés. Et enfin, une fois passée la douloureuse deadline de 18 h en semaine, et de 15 h le samedi, leur vente est interdite ; tous vos efforts pour vous en procurer seront donc vains ! M���, ���� �������, les autochtones savent parfaitement s’accommoder de toutes ces contraintes, et enseigner leurs techniques : il s’agit juste de s’adapter à ce « timing » particulier, et de se mettre en tête qu’on reviendra ruiné de sa soirée et de son séjour… 12



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RETRONOMY PHOTOGRAPHE: CAMILLE YVERT MODÈLE: JULIETTE NEIMAN

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Noeud : H&M Robe : Vintage 15


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Noeud : H&M Robe : Vintage


Maillot et short : Vintage Casquette : H&M

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Ensemble maillot et short : Vintage Casquette : H&M Vanity case : Lancel Vintage Appareil photo : Diana F 19


PAR ALEXANDRA GUDICELLI

MARIAGE D’AMOUR OU DE RAISON ?

europe

La surprise a été de taille : qui aurait cru, il y a deux mois de cela, que le nouveau gouvernement britannique ferait l’objet d’une coalition ? Certainement pas David Cameron, leader du parti conservateur, donné favori dans tous les sondages. Et encore moins quand il s’agit d’une union avec Nick Clegg, leader du parti libéral démocrate, europhile convaincu que Cameron surnommait alors affectueusement « sa meilleure blague ». Pourtant, un accord qualifié « d’historique » (somme de compromis) a été signé entre ces deux personnages. 20

C������ ����� ������� inenvisageable est-elle devenue réalité ? Trois protagonistes aux élections : Gordon Brown, représentant du parti travailliste (le Labour), David Cameron, du parti conservateur (les Tories) et Nick Clegg, leader du parti libéral démocrate (les Lib-dems). Si le début des élections n’était finalement qu’un duel entre les « habitués du pouvoir », soit conservateurs et travaillistes, Nick Clegg a émergé doucement dans les sondages, après s’être illustré brillamment dans un débat télévisé face à Cameron et Brown. Et le final n’a rien à envier aux scénarios compliqués du maître en la matière, le très britannique Alfred Hitchcock. Compliquées, les élections anglaises laissent quelque peu perplexes les Français adeptes du multipartisme à outrance : effectivement, là-bas, la norme est le bipartisme, un choix à faire entre parti conservateur et travailliste. Et, les tentatives pour faire émerger des forces intermédiaires semblent quasi vouées à l’échec, les Anglais, dans leur pragmatisme légendaire, préférant s’assurer des majorités stables et facilement identifiables. Effectivement, alors que le parti travailliste représente les électeurs de gauche, le parti conservateur rassemble, lui, les électeurs de droite et centre droit anglais ; et ce, de manière assez schématique. Les Lib-dems, euro-fédéralistes avant tout, se situent au centre gauche, sur l’échiquier du pouvoir. Et tout cela, par peur de voir se former un « hung Parliament » : soit un Parlement suspendu, sans majorité absolue. N��������, ce cruel scénario a pris forme au début du mois de mai dernier, et cela ne s’était pas produit depuis 1974, Outre-Manche. Cela avait alors un amer goût de crise, puisqu’en 1973, le monde est secoué par le premier choc pétrolier. Et, si le scénario se répète aujourd’hui dans un contexte difficile, il semble intéressant de relever que sur fond de crise, il y a une véritable remise en question des institutions chez nos voisins d’Outre-Manche. Mais, si ce constat ne nous étonne guère -les crises ayant toujours suscité des remises en question-, il est plus frappant de voir que les Britanniques se sont cette fois tournés vers les Lib-dems pour proposer une alternative à leurs gouvernants habituels. Parce que Clegg n’est a montré qu’il n’était pas un homme de demi-mesure, en proposant l’adoption de l’euro alors que l’Europe toute entière tremblait face au problème grec. Or, les Britanniques ont toujours affiché une méfiance certaine à l’égard de la construction européenne. Alors, s’il semble difficile de se livrer à une véritable analyse sociologique de la population britannique pour comprendre ce choix, on peut tout de même émettre quelques hypothèses. Si le peuple britannique avait voulu une alternative pure et simple au parti travailliste, il lui aurait suffit de voter Cameron en bonne et due forme. Non, il leur a fallu plus : l’émergence d’une troisième force, une véritable ouverture, et ce, vers l’Europe. Par ces temps de crise, les Britanniques ont sans doute estimé que leur bipartisme ne suffisait pas, il fallait une restructuration plus profonde de leurs institutions, passant par une intégration plus importante au sein de l’Union européenne. Ce rapprochement avec l’UE pouvant aussi suggérer une sorte de protection à l’égard des effets de la crise : effectivement les pays européens ont, sans aucun doute, moins souffert de la crise que nos voisins anglo-saxons. L’Europe a donc joué un rôle de tout premier plan, dans le compromis que Cameron et Clegg ont établi, et, de ce fait là, ils ont promis une collaboration plus étroite avec l’Europe. Ainsi, les deux hommes ont bien compris ce besoin d’une alternative aux techniques habituelles de gouvernance, faisant de leur collaboration avec l’Europe une sorte de pierre angulaire de leur entente. E�, �� �������� se plaisent déjà à rappeler que Clegg a reculé sur certaines mesures pro-européennes, comme l’adoption de l’euro, rappelons leur un principe bien français : « on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs ». Les Lib-dems doivent savoir faire des concessions sur des projets qui leur tiennent à cœur, pour créer un juste équilibre dans la majorité, cet équilibre si cher aux cœurs des anglais. De même, pour tous ceux qui estiment que cette union ne sera que de courte durée, rappelons que les Anglais sont passés maîtres dans l’art de la surprise, et laissons donc évoluer une situation qui apporte un peu de sang frais dans les artères très aristocratiques de nos voisins d’Outre-Manche.


europe PAR KAREN HAZAN

CRASH PRÉSIDENTIEL POLONAIS SUR FOND DE NUAGE VOLCANIQUE ISLANDAIS : LE MONDE DEVIENT-IL FOU ? Alors que la droite polonaise conteste la façon dont est menée l'enquête sur le crash de l'avion présidentiel, les élections se profilent, les candidats se déclarent, le tout dans l'urgence. La Pologne est encore loin de se remettre des événements qui l'ont touchée.

L� 10 ����� 2010, le Tupolev 152 s’écrasait en Russie, tuant ses 96 occupants, dont le président Kaczynski et son épouse, ainsi que de hauts responsables politiques et militaires polonais (le gouverneur de la Banque nationale de Pologne, le vice-ministre des Affaires étrangères, plusieurs parlementaires, des membres du cabinet présidentiel, des membres du clergé polonais). Ceux-ci se rendaient à Katyn pour le 70ème anniversaire du massacre de 22 000 officiers et intellectuels polonais par la police secrète soviétique de l’époque. Jaroslaw Kaczynski, le frère de l’ancien chef d’Etat, et président du conseil jusqu’en novembre 2007, remet en question la façon dont l’enquête sur les conditions de l’accident a été menée. Un député du PiS (parti de droite de Jaroslaw Kazcynski) va jusqu’à qualifier l’enquête des autorités russes de « défectueuse »*, accusations que la police russe juge sans fondement. Le 1er juin, la boîte noire de l’avion a été retrouvée, et semble confirmer la thèse de l’accident. A���� ��� ��� ���� ������ hauts dirigeants devaient se rendre aux obsèques présidentielles, le volcan islandais Eyjafjöll se mettait en éruption, empêchant Angela Merkel, Nicolas Sarkozy, et Barack Obama de s’y rendre. La moitié de l’élite politique polonaise tuée dans un accident d’avion, et leurs homologues ne peuvent leur rendre hommage en raison de l’éruption d’un volcan bloquant tout le trafic aérien. Le monde serait-il devenu fou ? L��� K�������� n’avait pas fait part de ses intentions politiques pour les élections présidentielles à venir, mais n’était exactement pas considéré comme le favori de cette course : quelques semaines après le décès de celui-ci, Jaroslaw Kazcynski se déclare candidat aux élections présidentielles, prévues le 20 juin 2010. Même si Bronislaw Komorowski, le chef d’Etat par intérim est déclaré favori avec près de 50% des intentions de vote, la côte de popularité de Jaroslaw Kazcynski semble avoir remonté, et l’issue des élections demeure plus qu’incertaine. Le volcan, la zizanie ambiante, et les récents événements peuvent, certes, laisser à penser que le monde est devenu fou. Mais le monde politique, lui, demeure bien rationnel et ne perd pas de vue ses objectifs. *lemonde.fr, 06/05/2010

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europe PAR OLIVIER ABESSOLO

L’EUROPE EST-ELLE EN DANGER?

La crise économique et financière que traverse l’Europe actuellement pose question. L’Euro semble attaqué de toute part et les situations économiques des Etats sont de plus en plus délicates. Cette crise est-elle le prélude à un nouveau modèle économique ou simplement le début de la fin pour le modèle européen ?

UNE DANGEREUSE DÉGRINGOLADE L� ������� ���������� des PIGS (Portugal, Irlande, Grèce et Espagne) a, dans un premier temps, été largement montrée du doigt ; mais, il semble désormais acquis que personne en Europe n’évitera la crise et la rigueur qui s’ensuit. Même l’Allemagne, longtemps dubitative et n’hésitant pas à dénoncer le laxisme budgétaire de ses partenaires, s’est ralliée à l’idée que la crise n’est pas l’affaire de quelques états qui tiendraient leurs trésoreries comme une porcherie, mais bien l’affaire de tous en Europe. L’Europe occidentale -comme les États-Unis- court désormais avec un sac sur le dos : l’augmentation de 20% de sa dette publique. N������������, il faut bien que quelqu’un paie l’addition des sommes astronomiques mobilisées depuis plus d’un an, pour maintenir à flot un système financier international qui continue de tanguer, sans qu’aucune mesure sérieuse de contrôle et de régulation n’ait été mise en place. Courant mai, les ministres européens de l’économie ont mobilisé 750 milliards pour sauver l’euro, au prix d’une rigueur des budgets publics qui provoque déjà des remous d’Athènes à Madrid, en passant par Lisbonne. L� ������ ������� semble devoir s’appliquer -toute proportion gardée- partout en Europe. Les finances publiques des États étant plutôt exsangues, les prochains exercices budgétaires risquent d’être douloureux pour les citoyens. Une profonde austérité semble devoir s’abattre sur l’Europe pour plusieurs années.

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europe UNIS DANS LA CRISE ? L’E����� a plus que jamais besoin d’unité pour lutter, toutefois la crise grecque illustre la fragilité de la gouvernance économique de l’Europe. On pourrait paraphraser Kissinger en demandant : « L’Euro, quel numéro de téléphone ? ». On attendait, au cœur de la crise, une réaction de la part des élites économiques européennes ; mais, au lieu de cela, se sont succédées des déclarations contradictoires du président de l’Eurogroupe (Jean-Claude Juncker), du président de la Commission européenne (José-Manuel Barroso), du président de la Banque Centrale Européenne (Jean-Claude Trichet) et des dirigeants des Etats-membres, aux premiers rangs desquels, la Chancelière Angela Merkel et le Président Nicolas Sarkozy. Entre temps, le très fade Président du Conseil, Herman Von Rompuy, était passé à la trappe. Comment ne pas comprendre que les marchés s’affolent ? La première puissance économique du monde n’est dirigée par personne et par tout le monde à la fois. P������������ aux difficultés européennes, la gouvernance mondiale, via le G20, aura été une illusion de courte durée. I� ������ ���� loin le temps, où l’on annonçait, en fanfare, une véritable gouvernance mondiale ! Bien des choses ont été promises par les dirigeants des pays du G20, entre deux photos et trois conférences de presse : installer une réglementation financière pour contrôler la spéculation, faire disparaitre les paradis fiscaux, contrôler les bonus … L� G20, promettait-on, allait rendre moral le capitalisme. De tout cela, il ne reste presque plus rien. Plus personne même n’en parle. AUJOURD’HUI LA RIGUEUR ET DEMAIN ? C� ��’�� ���� �������� de cette crise, c’est ni plus ni moins qu’un délitement des institutions européennes, remettant en cause le modèle européen. Cependant, il est encore possible de l’éviter. Il est temps, pour les Européens, de comprendre l’urgence de leur unité. Première puissance économique mondiale, l’Europe peine à peser. Naturellement, l’Euro a été la victime d’attaques spéculatives, mais celles-ci sont la responsabilité des Européens qui -en maintenant une gouvernance économique faible- favorisent les attaques. D�����, il faudra que les Européens déclinent un modèle de gouvernance économique capable d’assurer une gestion efficace, tout en préservant l’originalité du modèle social démocrate. Longtemps, le concept de gouvernement économique européen a résonné comme un slogan sans que l’on sache vraiment ce qu’il recouvrait. Très concrètement -comme le suggèrent Guillaume Klossa et Jean François Jamet-, le gouvernement économique européen pourrait reposer sur quatre piliers : la création d’un Fonds monétaire européen pour gérer les risques de défaut, le renforcement du rôle du Conseil européen et de l’Eurogroupe, l’accroissement des capacités d’investissement européennes dans l’éducation, l’innovation, les infrastructures, et plus généralement les «biens communs» ; et enfin, un accord politique sur une stratégie de convergence renouvelée pour renforcer le marché intérieur et l’efficacité des politiques économiques et sociales européennes. L� ����� que traverse l’Europe aujourd’hui est loin d’être une simple crise économique. Parce que les Européens n’ont plus d’autres choix, elle sera une crise fondatrice. Nul ne doute qu’elle permettra d’approfondir le modèle européen au niveau économique, mais également au niveau politique qui, jusqu’ ici, a fait cruellement défaut.

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en vogue

PAR JEAN DU SARTEL

Les Lalanne : le design au quotidien

Claude et François-Xavier Lalanne ont fait de la nature et des animaux le support de leurs créations. Ces dernières offrent une vision artistique et fonctionnelle du réel. Leur œuvre impalpable nous plonge dans un monde où le design cohabite parfaitement avec le quotidien. « D����� � �� ��������� ��� �������� » pourrait être le résumé très succinct de l’œuvre des Lalanne. Ce couple d’artistes hors-pair, spécialisé dans les thèmes bucoliques et animaliers, marque la saison des expositions estivales parisiennes. Plus de 150 pièces hybrides, de l’objet du quotidien à la sculpture monumentale, sont mises en scènes au Musée des Arts Décoratifs par Peter Marino, architecte d’intérieur new-yorkais renommé pour la décoration intérieure de Chanel, Sotheby’s et Louis Vuitton. Une véritable ménagerie prend place dans la nef du musée : moutons, oiseaux et nénuphars cohabitent sous l’œil attentif des esthètes et autres visiteurs curieux. Les moutons, créatures que François-Xavier Lalanne a transformées en sièges ou en banquettes en 1965, marquent le début d’une exposition prometteuse : des animaux sculpturaux transformés en objets, l’hippopotame en salle de bains, les sardines en coussins pour un sofa, des murs recouverts de feuillages artificiels… S�� ������ obscures sont consacrées aux objets décoratifs, aux bijoux, aux autruches transformées en bar, aux moulages réalisés sur des pieds d’enfant, ou encore sur des corps, tel le célèbre buste du mannequin Veroushka, réalisé pour la collection haute couture 1969 d’Yves Saint Laurent. À ����, s’ajoutent les Fauteuils Oiseaux en marbre, le fameux Bar YSL et les miroirs floraux en bronze doré, réalisés par Claude, qui décoraient l’appartement parisien du couturier, ainsi qu’une table dressée avec des couverts en forme de fleurs et ornée de petites fontaines aux éléphants qui semble tout droit sortie d’un décor de film fantastique. INSPIRATION MODERNE L� ���������� chez Claude Lalanne du moulage et de l’empreinte est une référence qu’elle partage avec Yves Klein. La sensibilité artistique de Claude n’est pas étrangère au mouvement des Nouveaux Réalistes. Sa fascination de la saisie du corps dans son épiphanie, son éphémère et sa chair l’a amenée à créer le «Masque» de Daniel Spoerri, réalisé en cuivre galvanique. L�� L������ se rejoignent dans leur inspiration avec des thèmes communs qui leur sont propres : l’environnement quotidien, le goût du langage, la revendication du réel. C����� �� F������� X����� s’inspirent, avant tout, de leur siècle. Aussi, l’austérité néo-classique d’œuvres monumentales, le minimalisme des formes et le design épuré contrastent avec du mobilier-concept directement influencé des arts nouveaux et de l’art décoratif. La richesse des détails dans certains objets (des couverts en forme de fleur, des miroirs ornés de plantes sculptées) rappelle les nombreuses entrées du métro parisien, dessinées par Guimard en 1900. Musée des Arts décoratifs : 107, rue de Rivoli. 01 44 55 57 50, du 18 mars au 4 juillet ; du mardi au dimanche de 11 à 18 heures ; nocturne le jeudi jusqu'à 21 heures.

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litterature

PAR CONSTANTIN YVERT

AINSI PARLAIT Le dernier ouvrage du vulgarisateur philosophique le plus connu de France s’en prend à Sigmund Freud et à son héritage ; de quoi mettre le feu aux poudres de perlimpinpin, si l’on veut bien voir avec Onfray une charlatanerie dans la psychanalyse. Pourtant, à en croire la vague de réactions des spécialistes, le philosophe est allé trop loin cette fois-ci. I� �’� � ��� �� ��������, il n’y a pas de psychoses, il n’y a que Freud, seul responsable de ces pathologies contemporaines. Par une inversion ironique, l’existence avérée de l’inconscient serait durablement installée dans notre conscience qui, elle, a droit de cité. Notre intelligence aurait donc été trompée par Freud ? Dans ce cas, il n’est guère plus question de science, mais bien de croyance. C’est, en tout cas, la thèse soutenue par Michel Onfray -démolisseur d’idoles en tout genre, autant qu’héraut du libertarisme désoxydant-dans son dernier ouvrage : Le crépuscule d’une idole. L’affabulation freudienne, publié chez Grasset. C’est véritablement à la fin de son « biophlet » qu’il soulève la question cruciale : comment Freud, qui fut un « affabulateur », un « homme obsédé par sa propre gloire » au point de la bâtir sur les cendres de la science, un phallocrate, un obsédé, un homophobe, a-t-il pu passer si facilement les filets critiques de l’histoire ? Y aurait-il un « Docteur Sigmund », génial découvreur de l’inconscient et de ses infinies possibilités, et un « Mister Freud », icône adulée par une armée de fidèles, incapables de la moindre distanciation par rapport au gourou ? L� ��������� ������ F���� n’est pourtant pas nouvelle. Elle a commencé il y a presque un siècle, en 1915 très exactement, lorsqu’Edouard Claparède critiqua ouvertement la notion de sexualité infantile, telle que l’avait définie le père de la psychanalyse. Depuis, les préceptes freudiens ont été régulièrement débattus : Jacques Lacan, pour ne citer que lui, fut l’un des principaux contributeurs de la régénération de la doctrine psychanalytique. En cela, la psychanalyse serait une herméneutique, c’està-dire un enseignement susceptible d’évoluer avec le temps et l’évolution des mœurs : « Les pensées de Freud et leurs suites ont été le ferment subtil de l’évolution qui a ouvert aux cent années de leur parcours au cœur de la civilisation occidentale une liberté nouvelle de parole, particulièrement sur la sexualité adulte et enfantine, un chemin vers l’émancipation des femmes, une réflexion sur les motifs inconnus qui inspirent nos actes, sur la précarité de la vérité de nos souvenirs, sur d’autres façons d’écrire notre histoire... Le temps de la séance analytique en est le lieu permanent de redécouverte », explique Alain de Mijolla1. 26

Le Crépuscule d’une idole, l’affabulation freudienne, éd. Grasset, sorti le 21 avril 2010.


litterature

MICHEL ONFRAY L’������� ������������� et philosophe Jacques-Alain Miller a également reproché à Michel Onfray de pratiquer ce que Nietzsche qualifiait d’«histoire antiquaire». Par exemple, son traitement de la méthode d’attention flottante -pratique dont l’objectif pour celui qui écoute est de mettre de côté ses propres croyances pour permettre au patient de s’exprimer librement et d’assurer ainsi la liberté des associations- semble faite à l’ombre du siècle passé, et non à la lumière des décennies suivantes2. Il s’autoriserait également à dégager du général avec de l’anecdotique, et non l’inverse : Onfray s’arrête sur une dédicace de Freud à Mussolini et l’interprète comme une adhésion au césarisme fasciste de l’époque, alors que des lettres de sa correspondance prouvent que Freud était plutôt critique vis-à-vis des régimes autoritaires. Une telle approche correspondrait, peu ou prou, à la méthode Michael Moore appliquée à la psychanalyse : il voit ce qu’il veut voir, et l’affaire est dans le sac. A������’���, 8 millions de personnes sont suivies par des spécialistes qui sont directement ou indirectement liés à la psychanalyse et aux thérapies psychiques. La naissance et la survie de cette discipline malgré les critiques s’expliquent, en partie, par la réponse qu’elle offre au mal-être contemporain. Dans un monde sans repères et sans Dieu, l’homme a dû se trouver des outils inventés par lui seul et capables de le soigner existentiellement. Néanmoins, un problème demeure toujours : à la différence des psychologues (5 ans d’études en psychologie) et des psychiatres (11 ans de médecine), tout le monde peut s’installer comme psychanalyste, et ce, même s’il faut avoir pratiqué une analyse et être coopté par ses pairs (la Société Psychanalytique de Paris par exemple). C’est pour cette raisonqu’il existe de nombreux charlatans dans la profession, et l’on ne saurait être trop prudent avant de démarrer une thérapie. M����� O�����, à la suite d’une longue lignée de sceptiques, s’en prend donc au père de la psychanalyse avec une rare animosité. Si l’on peut aimer la personne et reconnaître ses bienfaits -notamment son rôle dans la transmission des savoirs à l’Université Libre de Caen-, force est de constater que la méthode employée dans cet ouvrage est très critiquable, les amalgames nombreux et l’ensemble plutôt indigeste. Il a néanmoins le mérite de relancer le débat sur la scientificité de la psychanalyse, car une véritable science ne devrait jamais être effrayée de se mesurer à la réfutabilité. Freud, qui fut l’un des trois « maîtres du soupçon » avec Nietzsche et Marx, nous prouve aujourd’hui qu’il est toujours capable d’intriguer et de déchaîner les passions. « Laissez-les me jeter la pierre », plaisantait Alexandre Dumas, « les tas de pierres, c’est le commencement du piédestal ». 1

Alain de Mijolla, « Réplique à Michel Onfray », L’Express du 01/03/2010 Michel Onfray c/ Jacques-Alain Miller, « En finir avec Freud ? », Philosophie magazine du 21/01/2010 2

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litterature

Un trop grand amour ?

PAR CÉCILE CARPENTIER

Brooklyn ou la folie new-yorkaise Les Etats-Unis, New-York, Brooklyn, une librairie de quartier. Voilà le point commun entre plusieurs Américains désenchantés, mais pleins de projets, qui se retrouvent au cœur de la ville la plus trépidante de l’Amérique à l’aube du XXIème siècle et des années Bush. Une histoire de leurs vies, charmantes et peu banales, figée dans le roman de Paul Auster : Brooklyn Follies. N����� G����, 60 ans, a une longue carrière dans les assurances derrière lui et se prépare une nouvelle vie à Brooklyn, après avoir divorcé et échappé de peu aux conséquences fatales du cancer. Tom, ancien universitaire brillant, est le neveu de Nathan. Il se trouve qu’il travaille dans une librairie dans le nouveau quartier que son oncle -qu’il n’a pas vu depuis des annéesdécouvre. Leur rencontre impromptue marquera le début d’une histoire pleine de fraicheur et d’optimisme. Nathan entame un livre qui rassemble toutes les phrases perdues, les bourdes et tous les lapsus qui l’ont marqué dans sa vie et, avec Tom, ils vont bientôt se mettre à rêver à l’Hôtel Existence, un lieu imaginaire, où les avenirs les plus beaux sont envisageables. A����� �� �� ��� familial, gravite une foule d’autres personnages tout aussi intrigants : famille, amis, voisins, nouvelles rencontres qui vont s’accrocher à une même idée du bonheur. Ainsi, de l’œuvre de Paul Auster, se dégage une certaine idée de l’Amérique -coincée entre l’élection de Bush et les attentats du 11 septembre-, une Amérique bouleversée, mais pleine de confiance dans le futur. Assurément, une œuvre revigorante et émouvante qu’on l’on dévore en quelques heures et qui surprend jusqu’au dernier paragraphe. 28

The Brooklyn Follies, de Paul Auster

Un très grand Amour, de Franz-Olivier Giesbert

Antoine Bradsock, en rémission d'un cancer, à la fois homme du monde et des médias et reclus de la société; ni mort ni vivant, se complait dans des relations multiples qui n'ont fait que creuser, un peu plus, sa tombe chaque jour, à l'image de la maladie qui le ronge. Pourtant, l'amour et les femmes c'est cela même qui le maintient en vie, lui qui ne sait pas s'aimer. Cette histoire, largement autobiographique et quelque peu sombre, écrite par le célèbre journaliste Franz-Olivier Gisbert, sonne cependant comme un hymne aux sentiments purs et au bonheur. Un très grand amour qui incite à réfléchir sur notre très grand amour à coup sûr…

D�� �’��������� du livre, le lecteur est averti par l’auteur: « Ceci est un roman et il ne faut pas le lire autrement. Tous les personnages de ce livre sont purement imaginaires, sauf l’amour, le cancer et moi-même ». Pourtant, on ne peut pas s’empêcher, à la lecture de ce roman, de s’imaginer une autobiographie entière et authentique, tant l’aventure est belle, émouvante, tragique et humaine. O� �������� que l’auteur n’ait pas remplacé son véritable nom par celui du personnage principal, on voudrait que toutes ces femmes dont il parle soient des personnes publiques vues dans Paris-Match, et enfin on voudrait -à l’occasion de cette lecture- pouvoir se plonger réellement dans les paysages du midi de la France que l’auteur décrit, tant ils sont à l’image de ce dernier: écorchés, vifs et arrondis par les épreuves du temps à la fois. U� ���� ����� A���� c’est donc l’histoire d’un homme qui fait le bilan des années passées, et de sa vie sentimentale surtout, avec une grande nostalgie. Quant à son avenir, il ne le voit tout simplement pas, se croyant déjà mort, enterré, piétiné par cette vie qui lui a causé tant de chagrins et de déceptions. Mais toutes ces femmes lui ont permis de garder goût à la vie et, alors qu’il dépérit, cet Antoine sans âge, ne cesse de courir les jupons à la recherche de celle qui le guérira de son très grand amour : Isabella.


litterature L������, de Pierre Assouline, met en scène un ancien policier, Edouard Kiefer, devenu détective privé pour le célèbre hôtel parisien du Lutetia. Kiefer, qui connait le moindre secret de cet hôtel, assiste, non sans réaction, à la réquisition du palace par les Allemands, à laquelle succèdera l'accueil progressif des déportés en 1945. La tension du lieu, l'anxiété des personnages et les cris des détenus de la prison du Cherche-Midi résument à eux seuls l'histoire de la France au cœur des années sombres. Au-delà de la fiction, il s'agit d'un roman historique qui raconte avec justesse, et sans lyrisme tragique, un passé qui ne l'est pas moins.

Lutetia, de Pierre Assouline

Kafka sur le rivage, de Haruki Murakami

Le temps d'un été... En plein cœur d'un Paris désert ou sur les plages de la Côte d'Azur « overcrowded », peu importe, profitez-en pour vous évader dans un ailleurs littéraire à travers ces quatre livres !

L� ������ �'������, de Stefan Zweig, ou comment survivre à la torture de la Gestapo. Premier coup. Un homme, M. B., est détenu par les services allemands, reclus du monde et sans autre contact humain que celui de ses persécuteurs, afin de le faire avouer plus rapidement. Grand Roque. Il trouve par hasard un livre d'échecs et le vole. Coup intermédiaire. Il joue, affine sa technique et tente d'échapper à la folie et à la brutalité du nazisme en se concentrant sur le livre providentiel. L'écriture est toute aussi prenante que le jeu, le lecteur est happé dans cette spirale narrative. Echecs et mat.

M����� ������ et philosophie, Kafka sur le rivage, de Haruki Murakami, est l'histoire d'un adolescent tokyoïte qui fuit sa famille depuis que son père a prononcé une redoutable prophétie contre lui. Dans un décor où se confondent modernisme et imaginaire japonais, son voyage devient un carrefour de rencontres avec des êtres tous en proie à la même question : quelle vérité cherche-t-on ? Plus qu'un roman d'initiation, c'est un roman sur la quête de soi qui permet aussi au lecteur de réfléchir.

Les livres de l’été PAR ÉLÉONORE LECOINTE

Le joueur d’échecs, de Stefan Zweig

Les diaboliques, de Barbey d’Aurevilly

L�� D����������, de Jules Barbey D'Aurevilly, est un recueil de six nouvelles, toutes plus scabreuses les unes que les autres. La faiblesse humaine y est peinte à travers le crime commis par chaque protagoniste. Les nouvelles sont bâties autour de différents thèmes comme le danger, le scandale, la profanation, ou la violence ; mais ont pour point commun la volonté de l'autodestruction, caractéristique de nombreuses œuvres de la fin du XIXe siècle. Barbey D'Aurevilly voulait faire réagir les gens de son temps : il réussit grâce au jeu littéraire de la provocation. 29


france

LE PS EN PRIMAIRE

PAR AURÉLIEN HUBERT

Le spectacle des régionales a redoré l’image de la turbulente classe socialiste, qui s’affaire désormais à l’élection de son délégué pour le grand conseil d’administration de 2012 ; entre ambiance mauvais enfant et rénovation timide, Arnaud Montebourg, chef de classe, est chargé de canaliser le chahut de la promo Solférino. Reportage.

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L� �������� de la Terminale PS c’est Martine, venue de Lille. Elle s’exprime très souvent au micro des médias du lycée, quitte à égratigner ses camarades autant que ceux des Terminales UMP. Velléitaire, elle entend mener son groupe à la victoire et compte sur son caractère bien trempé pour y parvenir ; en bonne élève, elle manipule des mots compliqués comme « cataplasmes » à propos du modèle libéral, « éco modulable » au sujet de la TVA sur l’énergie, et n’hésite pas à dénoncer des abus que nul ne soupçonne, tels les niches fiscales ou les profits scandaleux des banques du bureau des étudiants. Martine à Solférino, c’est aussi l’histoire d’une femme moderne, qui ose : comparer les leçons de maitrise budgétaire de Nicolas Sarkozy, actuel président du Conseil d’Administration, à des cours de compta donnés par Monsieur Madoff (ancien ponte d’université américaine récemment congédié pour attouchements sur finances), c’est chic et choc, et Martine elle le sait. A�����, c’est le chef de classe. Il vient juste d’être nommé à ce poste en vue de la Convention sur la rénovation des TPS, qui se tiendra le 3 juillet prochain. Une rencontre attendue par tous qui devrait fixer les modalités de l’élection du délégué de classe au Conseil d’Administration, sous la forme de primaires qui cette fois seraient ouvertes à tous les électeurs du lycée votant à gauche, et non plus aux seuls titulaires d’une carte du Parti. Si les noms des candidats ne seront pas connus avant l’été 2011, nul ne doute de la présence de Martine dans les rangs, celle possible de Dominique Strauss Kahn, actuellement occupé au lycée FMI, et celle probable de Ségolène. S�������, elle est difficile à approcher. On lui a beaucoup reproché de trainer dans les couloirs du journal du lycée par le passé, de jouer la carte média, alors depuis elle ne s’exprime qu’au compte goutte. On la reconnait à son style inimitable et personnel : « moi je veux un vrai référendum », « moi je demande aux parlementaires de se mobiliser » (au sujet du projet de réforme des retraites) ; si Martine est très « nous nous », Ségolène est très « moi je ». Néanmoins concernée par le devenir de sa classe, elle s’intéresse de près à l’élection du délégué et entend défendre l’idée d’un « dispositif gagnant » en lieu et place des primaires sauce 2007. Quant à savoir en quoi consiste ce « dispositif gagnant », nul ne le sait mais il est gagnant et c’est déjà pas mal. S’�� � � �� ����� sur lequel tout le monde s’accorde aux lendemains de la ratification du « Nouveau Projet de Développement Economique, Social et Ecologique » de la Terminale PS, c’est bien sur le fait que pour l’emporter en 2012, la classe devra être unie. « Fini le bal des égos » pour Martine, « préférer le sacrifice d’une ambition personnelle et voir gagner la gauche » pour Ségolène, « pas de honte d’être à gauche » comme le rappelle l’élève Moscovici : comment avoir honte d’être à gauche dans une telle valse des idées, on se le demande !


france Que cette phrase ait réellement été prononcée par le Président de la République importe, finalement, assez peu. Sa diffusion dans les médias, les réactions qu’elle a provoquées et les actuels débats autour d’une réforme nécessaire montrent que la campagne présidentielle ne commencera pas fin 2011, mais qu’elle est déjà en train de se préparer.

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PAR THIBAUT BAUER-GRANDJEAN

FIN 2011, ON NE FERA QUE DE LA POLITIQUE

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L�� ����������� ������ politiques qui auront à s’affronter en 2012 semblent déjà plus ou moins prêtes. Le Parti Socialiste de Martine Aubry est entré dans une logique de contestation systématique de la réforme des retraites, allant même jusqu’à promettre des modifications s’il arrivait au pouvoir. Dominique Strauss Kahn, même s’il ne s’est toujours pas officiellement prononcé sur une éventuelle candidature, semble à nouveau s’intéresser à la vie politique française puisqu’il n’a pas hésité à critiquer le projet socialiste. A droite, le rouleau compresseur de l’UMP semble avoir éliminé une grande partie de ses éventuels rivaux. L’une des alternatives envisageable pourrait être le courant « villepiniste », mais celui-ci manque encore de crédibilité. F���������, même si on ne fait pas « que » de la politique, on sent que cette campagne présidentielle arrive à grands pas. La définition d’un objectif clair par chacune des forces en présence est nécessaire. Ceci semble, par ailleurs, expliquer les actuels débats. Chaque camp cherche à se montrer uni dans un même projet politique, même si des débats ont lieu en interne. Cela passe aussi par la multiplication des déclarations censées affirmer la position et la personnalité d’un candidat. Ainsi, la critique par Nicolas Sarkozy des mesures prises pendant les mandats de François Mitterrand entre dans cette logique. Les réactions à ces déclarations font aussi partie de ce jeu, dans lequel les forces en présence cherchent avant tout à se différencier. L� ����� �������� de cette stratégie, est que l’union affichée par les deux partis de gouvernement apparaît soit superficielle, soit forcée. A l’UMP, on a l’impression que le gouvernement et le chef de l’Etat se sont coupés de leur base électorale pour pouvoir librement entamer des réformes, l’union que représente l’actuel parti majoritaire doit donc, malgré tout, tenir. Cette union est très importante pour l’UMP, car si M. Strauss Kahn devait se présenter à l’élection présidentielle, ses dernières prises de position indiquent qu’il pourrait être ce que certains avaient vu en 2007 en François Bayrou : une alternative crédible aux oppositions habituelles. Une telle situation posera forcément problème au parti présidentiel car, si un tel homme se présentait à travers le parti socialiste, la victoire de l’UMP sera loin d’être assurée. E����, ce sont les élections sénatoriales de septembre 2011 qui marqueront le début de la bataille politique qui s’annonce. Les résultats des dernières élections laissent croire à un éventuel passage à gauche du Sénat. Un tel résultat inquièterait l’UMP, alors prête à s’engager pleinement dans la campagne présidentielle.

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SOUVENIRS D’UNE ENFANCE PASSÉE PHOTOGRAPHE : COLINE BRUN-NAUJALIS

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Playboy : Que pense le meilleur ami de l’homme ?

PAR LOUIS LE BRIS

La « Playmate of the year » de cette année est Hope Dworaczyk, jolie texane de 26 ans. Elle est la 51ème « Playmate of the year » à être choisie par Hugh Hefner, le créateur excentrique du magazine controversé Playboy.

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L� ������� �� P������ explique à lui seul le succès du magazine : un alliage de jeunes femmes dénudées et d’articles de fond, un concept qui laisse planer le suspense autour du mobile de l’achat. Playboy souffre aujourd’hui d’une image plutôt négative. On lui reproche notamment de faire la promotion de femmes retouchées d’abord par la chirurgie esthétique, puis par l’informatique. Le magazine réussit l’exploit de réunir contre lui des ennemis que tout oppose. Ainsi, les féministes lui reprochent de faire l’apologie de la femme-objet et la droite religieuse américaine de pervertir les mœurs. Quant à Larry Flint, milliardaire pornocrate, pornologue et pornophile, il reproche à Hugh Hefner de « faire de l’art avec des filles hors de portée pour l’homme de la rue », lui-même préférant insister sur l’importance des organes génitaux qui sont pour lui « la partie la plus érotique de l’anatomie féminine »1… On pourrait également reprocher à Hefner sa polygamie, des liens passés ambigus avec la mafia, ou encore les contrats imposés aux Playmates, stipulant qu’elles peuvent être renvoyées si elles prennent du poids. M��� H��� H����� a construit son magazine sur des bases solides. Il cherche à séduire un public cultivé. Il développe sa vision du playboy dans un éditorial de 1956 : « un playboy peut être un jeune homme d’affaire très brillant, un artiste, un professeur d’université, un architecte ou un ingénieur. En fait le métier importe peu ; ce qui compte c’est la vision du monde. Un playboy voit la vie non comme une vallée de larmes, mais comme une occasion de prendre du bon temps. Bien sûr, il aime son travail, mais ne le considère pas comme une fin en soi ». D��� �’A������� ��������� des années 50, Playboy fait figure d’ovni et dérange jusqu’au FBI qui fera une descente dans ses locaux, en 1959, pour saisir les clichés des premiers nus intégraux ! Pourtant Playboy ne se limite pas aux filles dénudées : les interviews de personnalités comme Stanley Kubrick, Joan Baez, Malcolm X, les Beatles ou Jimmy Carter sont, pour le magazine, l’occasion de dénoncer racisme, antisémitisme et de défendre des positions libérales. Et, à côté, la fondation « Playboy », créée en 1965, permet à Hefner de promouvoir la lutte contre le SIDA et la défense des droits des femmes. S����� �’�� ����������� érigeant la femme en marchandise ou provocateur au grand cœur ? Il est difficile de se faire une idée arrêtée sur Playboy et sur son créateur. L’ironie veut, cependant, que du statut de poil à gratter dans les années 50, tous les deux soient passés à celui d’icône du machisme marchand aujourd’hui… Citation de Flint : l’express du 13 02 1997

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societe La « télé-réalité », une expression paradoxale pour des émissions aux antipodes de toute rationalité.

PA R H

SE FO O RT E N

ILLARD

L� ����������-�������. Voilà une idée apparue sur nos écrans il y a déjà dix ans. D’après l‘appellation, cela semble clair : il s’agirait d’émissions conçues pour refléter la réalité, le monde qui justement se trouve normalement hors de la télévision, qui est, elle, vecteur de fiction. Il semble néanmoins intéressant de s’interroger sur la part qu’occupe la réalité dans ces jeux télévisés. Se trouve-t-elle dans le fait de filmer en permanence un groupe de personnes ? Est-ce réel que de nier toute spontanéité en confrontant des individus à des situations plus extrêmes les unes que les autres ? T��� �’����� le « casting ». Ce terme seul révèle l’aspect fictionnel de l’émission. La production choisit un panel d’individus à l’image de la société. Mais quelle est donc la triste société qu’il faut voir là ? Une société de « bimbos », de culturistes, de transsexuels et de personnes prêtes à toute impudeur pour obtenir leur heure de gloire. Au sein de cette société, l’intelligence est marginalisée comme phénomène d’exception, de l’ordre de la bête de foire -ainsi Jonathan, issu du dernier Secret Story, dont le « secret » était de posséder un quotient intellectuel équivalent à celui d’Einstein- ou hautement connotée avec l’ennui. Le stéréotype de l’« intello » sera toujours la personne un peu rasoir, celle qui provoquera le moins l’attention du public. I� �’� � ���� �’�������� à affirmer que la télé-réalité cherche avant tout à susciter le voyeurisme latent chez la plupart des gens. On observe d’autres personnes, a priori «comme nous» dans la mesure où il ne s’agit pas d’acteurs, on évalue leurs réactions et l’on s’identifie. En cela, ces émissions peuvent avoir une valeur cathartique, plutôt positive, donc. Non, là où ces émissions présentent un danger, c’est que, bien qu’entièrement scénarisées et artificielles, elles font référence à la réalité. Il n’y a, de là, qu’un pas avant de banaliser les faits. Et, sans vouloir faire de la morale de bas étage, où est alors la limite ? La réalité serait-ce l’adultère ? Serait-ce de placer l’image comme plus haut degré du mérite ? Est-ce vraiment ce vide cérébral et l’absence de stimulation intellectuelle qui règnent au sein de ces émissions ? Sans diaboliser un phénomène qui reste du domaine du divertissement, il est intéressant de réfléchir sur le modèle proposé par la télé-réalité, sur ce que les médias destinés au grand public suggèrent comme normes. S’agit-il vraiment d’un échantillon représentatif de notre société et mis en interaction ? Ou, bien au contraire, d’une sélection de stéréotypes extrêmes où l’on peut voir les dérives de la cité lorsque celle-ci ne réfléchit plus par elle-même ? L’individu, privé de son instinct et instrumentalisé telle une marionnette, n’est plus qu’un prétexte dans la quête du chiffre d’affaire. Toujours plus provocante, jusqu’où ira la « culture-TF1 » ? 39


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PAR LUCIE L’HÔPITAL

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To be or not to be : veégeétarien LA REVANCHE DE LÉGUME-MAN

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Le végétarien est une espèce sous-représentée de nos sauvages contrées : seuls 2% des français le seraient. Mark Twain disait qu'arrêter de fumer était si simple qu'il arrêtait à longueur de temps. Arrêter la viande suit le même principe : vous l'avez peut-être déjà envisagé, mais cela reste du domaine du "demain, j'arrête".

N��� ���������� déjà nos règles morales à nos assiettes, par exemple en aidant d'inconnus agriculteurs via les labels équitables. Pourquoi ne pas étendre cette éthique à la viande? Tout d'abord, parce que de nombreux végète-à-rien en ont transmis une image sectaire et moralisante. Cette revanche des tomates tueuses est des plus irritantes. Ceux-là justifient leur activisme par des réflexes émotionnels, aussi infondés qu'assommants. Être végétarien pour ne pas tuer d'animaux est stupide : cette rhétorique masque souvent une vulgaire application du précepte orwellien, selon lequel "tous les animaux sont égaux, mais certains le sont plus que d'autres". Ceux-là tuent sans vergogne les rampants et nuisibles qui hantent leurs habitations voire, souvent, mangent du poisson. Dès lors, qu'y a-t-il à sauver dans l'optique végétarienne ? T��� ����������, une éthique. Lorsque vous allez voir un film de type "Meet your meat", vous savez qu'il s'agit d'un film d'horreur. Et, si vous ne mangeriez pas de chat, vous savez pourtant que les farines animales qui ont nourri la vache de votre déjeuner provenaient d'un certain nombre d'animaux, dont il vous est préférable d'ignorer la teneur. Manger de la viande industrielle constitue un acte héroïque d'oubli, ou plutôt, d'aveuglement volontaire. Il s'agit non seulement d'oublier que l'animal a été tué, mais aussi comment il l'a été. Alors que nous découvrons aujourd'hui que de nombreux animaux sont dotés d'une sensibilité et de comportements sociaux auparavant insoupçonnés, nous autorisons qu'ils soient traités comme de vulgaires rouages de machines industrielles, vivant des vies de souffrance qui nous révulseraient si elles étaient appliquées à Fluffy, notre caniche nain. Le tout, sans mentionner le fait que cette industrie est l'une des premières causes d'émission de CO2. Et tout cela pour quoi ? Pour votre bon plaisir, Princesse ! I� ������ �������� ���� de manger un peu moins de viande industrielle, et de la remplacer par une viande dont vous, ou tout au moins votre boucher, connaissez l'origine et le traitement. Être végétarien, c'est cela : mettre le bien-être de l'animal, dans sa vie comme dans sa mort, avant un simple plaisir de bouche. D'une façon étrange, on peut donc être végétarien et continuer à manger de la viande. PETA me démentira, mais il faut reconnaître que si chacun appliquait cette éthique à son assiette, un grand pas serait fait. 40


PAR CHRISTINA BÉZÈS

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Dialogue Transatlantique L’���� de mettre sur pied cette rencontre trinationale remonte au conflit provoqué par l’intervention militaire en Irak. Ainsi, pour essayer de renouer le dialogue, en commençant à l’échelle de la société civile, l’Ofaj en coopération avec plusieurs universités allemandes, françaises et américaines lance, en 2004, le premier dialogue transatlantique à Washington, qui portait sur le thème : « l’Atlantique s’élargit-il? ». E� 2010, l’aventure continue et la quatrième édition de ce séminaire trinational a été organisée en coopération avec le « Pôle France » de l’université de Sarrebrück, l’université de Nancy II. Elle a réuni quarante étudiants et doctorants des universités de Sarrebrück, Nancy II, Paris IV-Sorbonne et Chicago/Evanston. Le thème abordait, cette fois-ci, les défis du système universitaire en Europe et en Amérique du Nord et permettait aux participants de se confronter aux différentes cultures universitaires pour, entre autres, améliorer la coopération internationale dans le contexte universitaire.

Initié par l’Office franco-allemand pour la Jeunesse (Ofaj) en 2003, le « Dialogue Transatlantique » réunit tous les deux ans, alternativement en Europe et aux Etats-Unis, des jeunes Français, Allemands et Américains pour renforcer le dialogue par des échanges trilatéraux. Cette quatrième rencontre interculturelle portait, cette fois, sur le thème : « l’Université en perspective ».

C���� ��������� suivait un programme bien établi. Ainsi en amont, deux mois avant le début du séminaire, les étudiants se sont répartis en plusieurs groupes de travail, par le biais d’une plateforme Internet, pour discuter des différents aspects du thème de la rencontre. Le jour J, le 2 mai 2010, tous les participants se sont retrouvés à Sarrebrück, dans la région de la Saare, et le « dialogue », cette fois-ci réel, pouvait commencer. La journée se divisait en trois parties. Les conférences tenues par des professeurs des universités participantes offraient la possibilité de se confronter aux résultats de la recherche actuelle. Ainsi, les sujets abordés allaient de la mutation de l’université familiale à l’université de masse en Allemagne, à l’importance des classements universitaires aux Etats-Unis, en passant par la formation des élites en France. La discussion se poursuivait, au sein de séminaires de taille plus réduite, avec l’intervention de doctorants, pour approfondir certains aspects évoqués lors des conférences. L’après-midi, les étudiants se répartissaient dans leurs groupes de travail respectifs pour se pencher sur des sujets comme les formes de contestation étudiante, les représentations médiatiques de l’université ou encore les caractéristiques de la vie étudiante. A cela s’ajoutait, de nombreuses visites dans la région de la Sarre et de la Lorraine. B���� : une expérience enrichissante car interculturelle, plurilingue et interdisciplinaire ! Beau concept à suivre, à savoir : vouloir réduire la distance par le dialogue. 41


cinema PAR ALEXANDER BARCLAY

Hollywood et la main invisible du marché

D’OÙ VIENT LE DERNIER FILM QUE VOUS AYEZ VU AU CINÉMA?

Avatar, l’histoire d’êtres bleus, contée en trois dimensions, est le film le plus cher de l’histoire du cinéma. Evidemment, c’est une production hollywoodienne. Hollywood, cette banlieue de Los Angeles, réputée pour ses stars, ses studios... Mais, d’où vient l’influence de cette colline ?

A cette question, environ 40% des Français répondraient: de France ! Un pourcentage inférieur à celui de ceux qui citeraient Hollywood, mais c’est tout de même plus de produit national que dans la plupart des autres pays européens. Il est évident que, mis à part certains marchés spécifiques tels l’Inde ou la Chine, le cinéma produit par Hollywood domine. C’est une industrie qui rapporte gros : en effet, c’est le deuxième secteur de l’économie américaine, ayant le plus large bénéfice commercial, après le secteur de la défense et de l’aéronautique. D’où vient cette domination américaine, et pourquoi parle-t-on d’Hollywood ? On peut distinguer deux types d’explications qui, combinées, offrent une image crédible : la première est historique, la seconde économique. LA PREMIÈRE GUERRE MONDIALE ET LA FIN DE LA DOMINATION DU CINÉMA FRANÇAIS Ce n’est pas un secret, la première guerre mondiale a eu des effets dévastateurs sur la démographie et l’économie européennes. Au début du 20ème siècle, les Etats-Unis en étaient réduits à considérer des mesures protectionnistes -comme celles utilisées actuellement en Europepour protéger leur cinéma naissant, face aux exportations françaises. La situation change radicalement avec la décimation de la profession, notamment en France, et avec l’arrivée du parlant. En effet, le son implique des investissements considérables, tant chez les exploitants qu’au niveau de la production -investissements difficiles dans le contexte européen de l’époque. Viennent ensuite les années trente et une immigration de certains ressortissants de pays européens vers les EtatsUnis (notamment des personnalités du monde du cinéma). Los Angeles s’impose comme la capitale américaine du cinéma par ses faibles coûts de production, le bon prix des terrains et un ensoleillement quasi-constant. LA, et en particulier Hollywood, dont les fameuses lettres sur la colline ont failli être démolies et remplacées par des immeubles exclusifs, mais ont été rachetées par des investisseurs américains, elles resteront donc bien sur la colline. D’ailleurs, à l’origine, ces énormes lettres épelaient Hollywoodland, mais les quatre dernières étaient en trop mauvais état lors de la dernière réfection, alors on a préféré les raser !

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cinema ADAM SMITH À LA FOX Aujourd’hui, Hollywood est le cœur du cinéma mondial. Hollywood est aux Etats-Unis, mais les sept compagnies qui dominent le marché sont cotées en bourses. Columbia Pictures appartient au japonais, Sony Pictures ; Rupert Murdoch, australien de naissance, possède, par News Corp., la Twentieth Fox Century. Les réalisateurs à Hollywood viennent de partout : Luc Besson est producteur à Hollywood. Les acteurs aussi : pensez à notre Marion Cotillard nationale ! Il y a une explication économique à la création de Hollywood, une combinaison de plusieurs facteurs, et en premier lieu, les « clusters ». Un film coûte cher à produire, il faut du personnel qualifié dans des domaines très spécifiques pour de courtes périodes. Comment fait un ingénieur du son pour tourner, s’il n’a qu’un film de temps à autre ? La création d’un « pool » de recrutement est une caractéristique d’Hollywood, qui lui assure un avantage compétitif au niveau planétaire, en particulier dans le domaine des effets spéciaux. DE NIRO, LES SPAGHETTIS ET LA SAUCE PESTO Le multiculturalisme de la société américaine permet aussi au cinéma hollywoodien de s’adresser, dès ses débuts, à un public aux multiples origines culturelles. Pour plaire au plus grand nombre, ce cinéma se centre sur certains facteurs communs aux différentes cultures, en misant sur les effets spéciaux et sur la comédie universelle. Cette situation permet à Hollywood de dominer un marché domestique énorme et de produire des films plus coûteux, en répartissant les coûts fixes sur plus de spectateurs. Les effets spéciaux sont onéreux, mais attirent du public. L’attrait international d’un certain cinéma n’est pas le fait de chaque pays : le cinéma indien, Bollywood, par exemple, répond à une demande pour des danses et du kitsch. Hollywood répond, lui, à une demande pour de l’action, de la comédie « tarte à la crème » et des explosions dans tous les sens… Et le cinéma français, dans tout ça ? La spécialité française, n’est-ce pas ce que nous appelons le « cinéma d’auteur » ? Mais, est-ce qu’un Chinois ou un Américain va visionner un Alain Resnais, plein de subtilités du langage et des relations humaines ? Pas sûr. Surtout que le français n’est pas autant parlé et compris que l’anglais, tiens, encore un avantage pour les américains ! MADELEINE ALBRIGHT, AVOCATE DE WALT DISNEY ? Aujourd’hui, Hollywood est une industrie organisée, avec son lobby, la puissante Motion Pictures Association of America, ses études de marché et ses budgets colossaux. Le film hollywoodien moyen coûte, selon des estimations, environ 30 millions de dollars en production, plus une somme équivalente pour la promotion mondiale. Il est donc difficile pour la plupart des productions de faire face à une telle concurrence. La Corée du Sud a soutenu fortement son industrie qui se développait au cours des années 1980-90, avec des politiques puissantes, et notamment des quotas. Ces mesures ont déplu à Hollywood qui voyait, ainsi, son accès à un large marché limité. Voici le dernier élément de force de l’industrie américaine : le soutien du gouvernement américain. Lors des négociations commerciales, les Etats-Unis ont, en effet, bloqué toutes les discussions jusqu’à une diminution des quotas. Vendre des Hyundai aux Etats-Unis contre importer les amours de Jennifer Aniston ou les aventures des coûteux personnages bleus de James Cameron, c’est un dilemme auquel sont, aujourd’hui, confrontés de nombreux pays… Et vous, vous avez vu Avatar ? 43


cinema EN DVD

Le Fugitif dans l’univers de la finance suédoise La vie de Thomas est un véritable succès : une femme, une fille, une belle maison, une carrière dans le secteur du « Private equity », le tout dans une paisible Scandinavie. Paisible ? Jusqu’à l’assassinat de son associé, et aux soupçons de la police. Confronté à un maître chanteur anonyme, accusé et arrêté, Thomas s’enfuit et rétablit ses contacts avec des gens peu recommandables pour protéger sa famille et rétablir son innocence... Un excellent Mads Mikkelsen (le méchant dans Casino Royal) sert ce thriller nordique, dans un univers de finance, d’argent, de pouvoir et de crime. Les parallèles avec Kandidaten, sorti un an plus tard au Danemark, sont frappants. Le chantage, le meurtre et le pouvoir : des thèmes d’actualités en Scandinavie ? A.B.

EXIT FILM SUÉDOIS RÉALISÉ PAR PETER LINDMARK SORTIE CINÉ: 2006

EN DIRECT DE CANNES Un pneu tueur à Cannes Le DJ réalisateur Mr Oizo -alias Quentin Dupieux- revient cinq ans après Steak, son « film-concept » avec Eric et Ramzy, sur les Chivers : cette bande de mecs complètement out et stylés en même temps qui trainent toute la journée dans leur pickup en buvant du lait. Le pitch de son nouveau film n'en est pas moins loufoque. Il s'agit de l'histoire d'un pneu vengeur, Rubber, dont la famille a été assassinée par de méchants humains. Une aubaine pour les sélections parallèles du festival de Cannes qui cherchent ce genre de perle pour faire « buzzer » une sélection un peu molle. Tous les people parisiens étaient présents à la projection pour soutenir leur ami. Ils ont ri un bon coup autour de ce film divertissant, mais clairement moins abouti que Steak, son chef d'œuvre de non-film qui reste une comédie majeure, à l'écart de la production cinématographique française. Avec Rubber, Quentin Dupieux réussit le pari de nous émouvoir avec un morceau de caoutchouc roulant qui explose des oiseaux et des crânes, uniquement par la force de la pensée. On attend avec impatience d'autres films de cette trempe, jouant avec les codes et les genres cinématographiques pour offrir une expérience de divertissement nouveau. Et toutes les réponses aux questions que les gens peuvent se poser après avoir vu le film se rejoignent en une réplique prononcée au début du film : « no reason »… S.C.

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RUBBER DE QUENTIN DUPIEUX SORTIE INDÉTERMINÉE AU CINÉMA



musique

LE ROCK DES ETATS-UNIS AU ROYAUME-UNI : INFLUENCES ET ANTAGONISMES... PAR MARIE BLANCHE PAUMIER

BORN IN THE USA ?

L� ���� ��� �� aux Etats-Unis, dérivé du rhythm’n’blues, et de la country. Sous la forme du rockabilly, il fut porté par des icônes telles que Chuck Berry et Elvis. La réplique ne s’est pas fait attendre Outre-Atlantique, avec les Shadows, et des évolutions sont apportées par les Beatles quelques années plus tard. C’est à cette époque que naît l’un des symboles intemporel et universel du rock : les Rolling Stones. Depuis, dès qu’un style rock apparaît d’un côté de l’Atlantique, il est repris, critiqué et revisité par l’autre. Aucun autre pays n’a su rentrer dans cette guerre froide musicale avec autant d’intensité que ces deux protagonistes. S’ils essaient, ils ne font qu’arriver en troisième position, en adaptant à la sauce nationale un style déjà maîtrisé par nos deux géants créatifs. C������ ��������� un tel engouement pour le rock ? L’avènement et le triomphe de la langue anglaise ? Un style influencé par les grands espaces d’un côté et par des villes cosmopolites de l’autre ? Ou tout simplement le fait que les Anglo-saxons ont « ça » dans le sang ? De cette racine rock, vont naître de nombreux styles qui conservent l’appellation « rock » comme un gage de qualité : punk rock, pop rock, rock psychédélique, garage rock, glam rock… Des mouvements alimentés et sans cesse réinventés par les deux scènes. 46


musique L�� �������� font carrière d’un côté et de l’autre de l’Atlantique, espérant que le Royaume-Uni les comprendra mieux que les Etats-Unis et vice versa. Les exemples s’accumulent, quand il s’agit de ces liens et influences très fortes entre artistes américains et anglais. D��� ��� ������ ����’����, David Bowie, symbole britannique de l’épopée rock, s’intéresse à des artistes américains : Lou Reed, de New York, dont il produit l’album « Transformer », après l’expérience « Velvet Underground ». Il mixera également et produira deux albums de Iggy Pop, originaire de Détroit : « The Idiot » et « Lust for Life ». L� ����, naît à la suite d’un commun accord entre la scène anglaise et américaine de revenir à un rock plus rebelle et sauvage ; sa vocation d’origine. L’esthétique punk -née, selon la légende, entre les mains anglaises de Vivienne Westwood et de Malcolm Mc Laren, producteur des Sex Pistols- s’inspire de façon notable du style rockabilly américain des années 50 : Perfecto, jeans, cheveux gominés. Le punk naît au CBGB, -club underground mythique de Manhattan-, avec les Ramones, Blondie, Patti Smith et les NewYork Dolls, dont Malcolm Mc Laren, sera brièvement le manager. Il participera activement à la version anglaise du mouvement, en formant les Sex Pistols, entre autres. Suivent les Clash, menés par Joe Strummer, emblèmes du mouvement punk anglais, et de son aspect contestataire et dénonciateur. Ce groupe majeur de l’histoire du rock prend toute sa dimension et affirme sa personnalité lors de sa tournée américaine : le Pearl Harbour Tour, en 1979. A���� �� ����, vient et évolue dans les pays anglo-saxons, où il s’est répandu comme une mauvaise herbe. Il est parfois difficile de faire la distinction entre sa forme américaine et sa forme anglaise : certains s’amusent à semer le doute : le rock des Strokes sonne anglais et les anglais de Razorlight chantent « America » ; l’anglais Carl Barat (The Libertines) a choisi un alter égo américain, Adam Green... C��������, il y a un son reconnaissable, «made in America», un côté sauvage et authentique à la Bruce Springsteen, Dylan, ou même Kurt Cobain : des artistes qui respirent l’Amérique, les grandes étendues et l’ennui des villes de province. Face à cela, s’érige une sorte de sophistication anglaise, avec plus de recherche, d’expérimentations et d’imprévisibilité. Ainsi, des artistes majeurs comme les Beatles ou les Stones, ont un son plus compliqué, moins brut et peut être plus mélodique. Les Britanniques ont une sorte de flegme jusque dans leur musique qui transparaît dans la voix et les morceaux raffinés des Smiths ou d’Elvis Costello. B������� ��������� � ������ �� ���, chantent en anglais et reprennent les accords électrisants et les riffs endiablés de ces modèles anglo-saxons. Ainsi, le rock commercial pour ados se retrouve chez les Allemands de Tokio Hotel et le punk grand public se réinvente en suède, avec les Hives. De même, les Suédois de Mando Diao essaient de se la jouer pop rock vintage, et les Franco-finlandais de The Do se lancent dans des ballades pop expérimentales… C��������, le savoir-faire en matière de musique revient, tant pour la mainstream que pour l’underground, aux maîtres anglosaxons, et l’anglais s’illustre comme la langue sacrée du tube. Cela grâce à son universalité et à la beauté de ses sonorités, qui collent à la tête… Langue musicale qui comprend tout ce qu’il faut de brutalité et de vitalité. A���-���� ���� ������ de traduire « satisfaction » en français ? Allez-y, vous comprendrez, en partie, pourquoi le rock vient de là-bas et non d’ici… 47


musique

Le duo anglais, qui a fait sensation il y a deux ans, aime la musique minimaliste et prenante à tendance glauque, les textes brumeux et les ambiances denses. On leur pardonne un certain manque d’idées concernant le titre de ce second opus, qui porte le même nom que le premier : l’évolution est nette, l’originalité est intacte, la qualité reste au rendez vous ; ce n’est pas forcément à écouter dans toutes les soirées (quoique certains aiment l’abondance de md), ni la meilleure façon de se remonter le moral après une difficulté, mais « Baptism » suffit à convaincre du caractère indispensable de cet opus.

CRYSTAL CASTLES, CRYSTAL CASTLES II (ALTERNATIVE)

Elle est de retour : elle était une vierge glissant ses doigts sous le sable moite, une chatte sauvage maculée dans les égouts, une fille de joie des années 30 œuvrant dans un cabaret; cette fois, elle est mi-femme mi-robot. La mère et la pute. Car c’est un album conceptuel, il a fallu plusieurs années pour le réaliser, et le résultat est là. Entourée de Switch (MIA, Santogold), Le Tigre, Sia et Ladytron pour la partie alternative, de Polow (un peu tout le monde) et Tricky Stewart (un peu tout le monde) pour la partie « musique que fait tout le monde », elle vous dit tout, sans tabous, une complice confidence. Des notes que même la Castafiore n’osait pas atteindre, des sons avant-gardistes qui reprennent tout ce qui a été fait ces quatre dernières années, des textes délicats aux connotations dévoilées (ne dites plus « tu veux gouter mon vagin », dites « wanna taste my woohoo » et répétez « woohoo » jusqu’à… « yeah, han ») ; le tout dans un emballage futuriste entièrement recyclable qui ne pollue que les oreilles et éventuellement son « woohoo ». Elle seule pouvait l’offrir à son public. Elle, c’est Christina. Aguilera. Christina Aguilera. Ne boudez plus votre plaisir, boudez la !

CHRISTINA AGUILERA, BIONIC (POP)

SNOB SCRILLA, DAY ONE (HIP HOP)

THE GOLDEN FILTER, VOLUPSA (ELECTRO)

En Scandinavie, il fait froid. Cela provoque des engelures. Probablement pour y remédier, les autochtones jouent du synthé. Et comme il fait très froid, ils en jouent très souvent. Comme ils en jouent très souvent, ils jouent très bien. C’est une explication possible à la recrudescence de groupes d’électro pop venus du Nord, et si The Knife et Royksopp étaient les fers de lance de cette vague, le renouveau est assuré par les Golden Filter. La recette ne change pas : marketing avisé, mystère, clips curieux, ambiance boréale. « Thunderbird » est ce qu’il y a de mieux sur ce premier album, suivi de près par « Solid Gold », le single propulsé par l’écurie Kitsuné. Le reste est un peu moins bon (il a dû faire doux l’été dernier), mais tout autant appréciable. 48

L’Australie, c’est joli. Patrie des kangourous, des steaks d’autruche et d’une flopée de groupes allant du shoe gaze au rock indé, ils savent aussi faire du hip hop. Snob Scrilla n’est pas un vrai australien cela dit, originaire de Californie ; mais en bon expatrié il a su tirer parti de ses racines et les agrémenter de ce qu’il se fait de mieux dans son pays d’accueil. Produit par la crème de Modular, les titres couvrent un champ musical large au gré des collaborations, et les textes, soyons francs, sont bons. Un plaidoyer sur l’état des rues de Houston, des raps simples sur les relations humaines, c’est du hip hop intello -disons moins stupide que la moyenne- et c’est parfois appréciable.

db & bpm

PAR AURÉLIEN HUBERT


tendances PAR ÉDINA ETTIG

L'enfance au service du style

DE QUELLE MANIÈRE LES CODES DE L’ENFANCE S’APPLIQUENT-T-ILS À LA MODE ADULTE ET COMMENT SE SONT-ILS IMPOSÉS ? L’AMORCE PAR LES CRÉATEURS Les précurseurs de cette tendance sont les nombreux créateurs qui ont compris l’engouement de la génération X et Y pour la régression. Jean-Charles de Castelbajac, en tête du mouvement, dédiait une collection à Bambi et à Pocahontas, tout comme Nicolas Guesquière qui, pour la création des chaussures Balenciaga, s’inspire de Lego ou de Playmobil. L’AVÈNEMENT GRÂCE AUX MEDIAS Les « It-girls » anglaises ont été les premières à adopter cette tendance et à faire de celle-ci un modèle pour la jeunesse mondiale, tant celles-ci bénéficient d’un rayonnement dans la presse de tous les pays. De plus, une recrudescence de symboles enfantins a envahi le paysage médiatique et artistique. L‘exemple le plus marquant du « ridi-cool » ayant atteint son paroxysme est la collaboration de Castelbajac ou de Lady Gaga qui a donné une interview, habillée d’un manteau Kermitt (la grenouille du Muppets Show), qui portait une robe rayé bagnard dans le clip «Téléphone», ou encore qui s’affublait de lunettes en formes d’oreilles de Mickey dans la rue. LA DÉMOCRATISATION PAR LES MARQUES DE PRÊT-À-PORTER Les « tendanceurs » l’ont bien compris : la génération qui consomme le plus est celle que l’on qualifie de X. Celle qui se cherche des repères désespérément et qui ne peut en trouver que dans son enfance. Même si la génération Y (la suivante, à savoir nous) lance les tendances, la génération X les consomme. Ces générations peuvent aussi être requalifiées de « génération Disney », dans le sens où elles ont grandi avec et que Disney reste le principal repère de leur enfance.

Il y a encore très peu de temps, le vestiaire des enfants s’inspirait très fortement des collections adultes en cours. Or, depuis la sortie du film Alice au pays des merveilles, nous constatons un retour de l’univers enfantin en matière de mode.

Disney peut, en outre, se vanter d’avoir lancé la dernière « It-girl » de l’hiver, à savoir Alice… au pays des diktats marketing ! En effet, les nombreuses caractéristiques du film (le style anglais pour la décoration et l’innocence pour les vêtements) ont été mises sur un piédestal par les magazines féminins. Evidemment, celle-ci s’est aussitôt retrouvée sérigraphiée sur un tee-shirt, lancé en édition limitée par la marque de produits dérivés Disney. D’ores et déjà, nous pouvons vous prédire que Shreck est le nouveau personnage qui cartonne depuis qu’OPI a sorti un vernis à sa couleur… Mais, par pitié, ne l’adoptez pas ! 49


sorties PAR EDINA ETTIG

LA FLÈCHE D’OR : 102 BIS, RUE DE BAGNOLET, 75020 PARIS

On s’est longtemps demandé si le QG de nos dixhuit ans pouvait le rester à nos vingt ans, et surtout après une fermeture d’un an pour cause de tapage nocturne. Notre conclusion : on ne saurait trop vous conseiller que d’y faire vos « before », ne serait-ce que pour parfaire votre culture musicale. En effet, les directeurs artistiques de ce lieu sont toujours à la recherche de perles musicales. C’est pour cela que le choix des groupes et des fêtes organisées font office d’électron libre pointu sur Paris. De plus, l’entrée est a 8 euros avec une conso (cela dit, prenez une bière car le vin est imbuvable !), ce qui n’est généralement pas le prix pour assister à la performance incroyable d’une Juliette Lewis ou d’un Pete Doherty. En un mot, s’il est 20 heures un samedi ne vous posez pas de question : cap sur la Flèche d’Or !

LE TRUSKEL : 12, RUE FEYDEAU, 75002 PARIS

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Besoin d’un « after » après une folle soirée dans un bar fermant à 2 heures? Le Truskel peut s’apparenter à l’un des meilleurs choix qui s’offrent à vous. Les mauvaises langues vous diront que ce pub irlandais est le plan B des recalés du Social Club, mais nous, on vous dit que jamais tant de personnes différentes ne se sont mélangées dans un tel endroit. C'est l’une des raisons principales pour lequel le Truskel est un endroit convivial où tout le monde se parle (ce qui est plutôt rare à Paris). Les prix ne sont pas très abordables, dans le sens où la pinte est à 7 euros, mais cela reste dans le domaine du raisonnable. Cependant, nous vous le répétons : le Truskel est à choisir pour un « after », car avant 1 heure ce pub est sans intérêt.




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