le Mag' fr@ncophone #18

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NumÉro 18 - AVRIL 2021

LE MAG' FR@NCOPHONE Art & Culture I poRTRaitS I Langue

inspiration

AFRIQUE

Crédit photo : Franck Aubry

ISSN 2680-9532


LE MAG' FR@NCOPHONE ÉDITO Envie de rêver. Envie de voyager. Dans notre actualité Made in France : tout juste terminé, un

mois

marathon

littérature

consacré

jeunesse

avec

le

à

la

francophonie

premier

salon

et

à

la

francophone

du Nord-Ouest américain LITT. JEUNESSE. Plus de 1.300 visiteurs, essentiellement de jeunes visiteurs, venus à la rencontre

d'une

dizaine

d'auteurs

et

d'illustrateurs

francophones. Vous avez manqué le salon ? Il est encore temps d'assister à la dernière e-rencontre avec l'éditrice et auteure française Christine Féret-Fleury.

Et

maintenant,

cette

envie

incontrôlable

d'évasion

:

par

bonheur,

le

fil

rouge

du

numéro dix-huit du Mag' fr@ncophone nous, et vous, emènera en voyage grâce à des articles variés et originaux proposés par nos rédactrices et rédacteurs : départ à la découverte de facettes culturelles insolites, inspiration Afrique... Un brin de soleil, une touche de chaleur dont nous avons tant besoin en ce printemps encore un peu morose.

Dans ce numéro du Mag' fr@ncophone, la part belle est également faite aux articles écrits

à

l'occasion

des

Portraits

francophones,

une

émission

en

ligne

qui

propose

deux fois par mois des interviews publiques de personnalités francophones du monde des arts et de la culture réalisées par l'équipe Made in France. Après cette lecture, n'hésitez

pas

d'ailleurs

bientôt

à

vous

inscrire

en

visionner

aux des

prochains extraits

Portraits

sur

notre

francophones. chaine

Vous

YouTube

en

pourrez

cours

de

préparation.

Pour

continuer

France

aux

à

voyager

États-Unis,

et en

toujours France

rêver, et

en

suivez

tous

Espagne

les

sur

événements notre

site

Made

internet

in :

www.madeinfrance-usa.org

Bonne lecture à tous et à très bientôt !

◼ Sylvie Joseph-Julien Co-fondatrice et Directrice Made in France


Directrice de la publication

ART & CULTURE

Sylvie Joseph-Julien

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Directrice de la rédaction Pénélope Smith

Webmestre Romain Joseph

Rédactrices et Rédacteurs Maëla Barçon, Aline Bloch, Anaïs Boulard, Marion Bouscarle, Virginie Cabot, Sofian Cayot, Madeleine Cosson-Flanagan,

PORTRAITS

Juliette Deny Twaroch, Audrey Denoyers, Emmanuelle Franks, Élisabeth Le Meur-Dahmoune, Caroline Perrier, Oswaldo Villar

MADE IN FRANCE USA www.madeinfrance-usa.org contact@madeinfrance-usa.org

LANGUE

Co-fondatrice & Directrice

26

Sylvie Joseph-Julien

Comité Directeur Présidente Pénélope Smith Vice-Présidente Julie Luc Di Salvo

PLANÈTE VERTE

33

Trésorier Frédéric Joseph

Le Mag’ fr@ncophone est une publication trimestrielle de l’association à but non lucratif Made in France 2621 169th Avenue NE Bellevue, WA 98008 - États-Unis

ISSN : 2680-9532

Imprimeur : Peecho, Amsterdam – Pays-Bas

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ART & CULTURE A F R O - B O R D E A U X

M R S

A V E Z - V O U S

R O O T S

D É J À

À

L A

S E A T T L E ' S

E N T E N D U

P A R L E R

F R E N C H

D U

F E S T

N Z A N G O

?


x u a e d r o B o r f A

Virginie Cabot

ART & CULTURE

Entre Black Lives Matter aux États-Unis et les faits de violence policières envers des Noirs en France, n’ayons pas peur de dire que le racisme existe encore bel et bien. Il est ancré dans les mentalités depuis des siècles, et si la science démontre aujourd’hui que le concept de race humaine n’a pas de fondement, il reste encore du chemin à parcourir pour déconstruire les préjugés. Rien ne vaut l’étude de l’histoire pour comprendre les faits passés et pour mieux appréhender les questions d’aujourd’hui. J’ai grandi à La Rochelle, une ville portuaire qui, à l’instar de Nantes ou Bordeaux, a eu une activité commerciale florissante entre les XVIe et XVIIIe siècles, avec le commerce dit triangulaire entre la France, l’Afrique et l’Amérique. À l’école, au musée, j’ai été sensibilisée à la « traite des Noirs ». Les films de Hollywood ont fini de compléter mes connaissances générales sur cette histoire.

Maintenant que j’enseigne le français aux étrangers et que je leur fais visiter Bordeaux, je continue à me documenter sur ce qui a permis l’âge d’or de ma ville au XVIIIe siècle, à savoir notamment la culture du sucre aux Antilles. J’apprends maintenant que la société bordelaise de l’époque n’était pas complètement blanche, comme je me l’étais imaginée, mais que des hommes et des femmes noires arpentaient déjà les rues que je connais si bien. Ils étaient le plus souvent domestiques, ouvriers sur le port, artisans, et ils appartenaient à des familles riches qui les avaient ramenés, tantôt d’Afrique, tantôt des Caraïbes. Depuis le 10 mai 2019, Bordeaux rend hommage à une femme en particulier, Modeste Testas, de son vrai nom Al Pouessi : après avoir servi d’esclave sexuelle à son propriétaire bordelais et lui avoir donné 6 enfants, celuici lui a rendu sa liberté et légué ses terres à Saint-Domingue, où elle mourra en 1870 à l’âge de 105 ans.

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sanguinaire ? Faut-il en faire tomber les statues ? Ma conviction profonde est que l’école et la culture ont ici un rôle crucial à jouer pour raconter ces histoires aux jeunes et aux moins jeunes, pour que la connaissance éclaire le chemin que nous avons encore à parcourir pour nous accepter tous autant que nous sommes, quelle que soit la couleur de notre peau et notre origine, avec nos parts d’ombre et de lumière. Des associations bordelaises comme l'association PourQuoiPas nous permettent de parler de ce passé colonial pour qu’il ne soit simplement plus tabou, et d’autres viennent en aide aux migrants, jeunes et moins jeunes, comme la Fédération des Associations de Solidarité avec Tout.e.s les Immigré.e.s et France terre d’asile. Aujourd’hui, l’immigration d’Afrique vers l’Europe notamment, et Bordeaux en particulier, doit se vivre comme une opportunité pour l’accueilli et pour l’accueillant. Malgré les difficultés politiques, économiques, sociales, il faut y voir la chance de nous enrichir et construire une culture commune de tolérance, ensemble.◼ Virginie Cabot Professeure de français (FLE) et guide touristique Langue et terroirs

Pour en savoir plus... Bordeaux, le commerce atlantique et l'esclavage de François Hubert, Christian Block et Jacques de Cauna Décolonisations françaises, la chute d'un empire de Pascal Blanchard, Nicolas Bancel et Sandrine Lemaire Guide du Bordeaux colonial et de la métropole bordelaise du collectif Sortir du colonialisme Gironde « Blond » chanson de Philippe Katerine Visiter Bordeaux avec Langue et terroirs

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ART & CULTURE

La société française fait donc un pas en avant depuis plusieurs années et manifeste un repentir envers les victimes de l’esclavage et du colonialisme. Les historiens publient des ouvrages qui viennent bouleverser les mentalités, réveillant des démons qu’on aurait bien voulu laisser tranquilles. En effet, n’importe quelle famille française porte en elle des traces de ces histoires violentes, injustes et douloureuses, qu’elle ait en son sein des bourreaux et/ou des victimes : ce sont des zones grises. On retrouve souvent dans les maisons de famille le portrait et les médailles d’un aïeul qui a servi la France dans le Maghreb, des objets ramenés de ces voyages, et, parfois, on raconte et transmet les souvenirs d’une vie ailleurs aux générations suivantes, mais encore trop peu : les récits individuels se perdent alors que ce sont ceux qui permettent d’incarner ces pages d’histoire que les adolescents subissent en classe sans en comprendre bien les résonances aujourd’hui. Des polémiques surgissent aussi : faut-il renommer une place parce qu’elle porte le nom d’un général sanguinaire ?



ART & CULTURE

Mrs ROOTS

À LA FRENCH FEST DE SEATTLE Maëla Barçon

C’est à l’occasion de la French Fest de Seattle, organisée en mars 2021 sous le thème « Là où le monde se rassemble » que nous avons rencontré l’auteure et bloggeuse Laura Nsafou. Les jeunes collaborateurs de Made in France ont eu l’honneur d’animer cette table ronde aux côtés du maître de cérémonie Frédéric Choinière. Audrey Denoyers, Sofian Cayot, Coraline Joseph et Natalie Muller se sont intéressés à son parcours, son blog, son admiration pour Toni Morrison et sa vision de l’industrie de la littérature jeunesse.

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ART & CULTURE

L’auteure et bloggeuse Laura Nsafou est née en

pour elle mais aussi pour son pays.

France en 1992 d’un père congolais et d’une mère

Qu’est-ce

martiniquaise. La native d’Orléans a éprouvé le

française actuelle ? Cette conversation qu’elle a

besoin d’écrire très jeune, après avoir constaté

lancée a touché de nombreuses personnes qui se

qu’elle

était

laissée

de

côté

par

la

littérature.

Enfant, elle ne se reconnaissait qu'en Pocahontas, malgré le fait qu'elles ne soient pas de la même origine. L’écriture était un moyen de créer des personnages tomber

noirs

dans

qui

les

lui

ressemblent,

stéréotypes

sans

qui

les

accompagnent souvent. Cette activité était alors une

passion,

sans

qu’elle

pense

faire

carrière

sont

qu’être

senties

français

concernées

et

pour

la

société

confrontées

à

la

même réalité, peu — voire pas du tout — abordée à la télévision et dans la sphère publique. Mrs Roots prône aussi l’afroféminisme. Ce mouvement n’est pas une réponse au féminisme qui n’inclurait pas

les

femmes

noires,

comme

communément

compris, mais s'inscrit dans l’extensionalité, c'està-dire la volonté de considérer tous les éléments

dans ce domaine.

ensemble. Comme elle l’explique, elle ne peut pas choisir entre être noire ou être une femme : elle

Son voyage en Finlande, un déclic

est

les

deux

et

ces

deux

caractéristiques

sont

liées. L’extensionalité est un sujet très actuel qui Son

voyage

en

Finlande

pour

ses

études

l’a

correspond

aux

expériences

vécues

par

les

profondément marqué et l’a conduit à créer le

minorités. Plus qu’un concept, il doit être abordé

blog

comme le fait Laura Nsafou dans son blog.

Mrs

comme

«

Roots. juste

»

Là-bas,

elle

était

considérée

française, sans que personne ne

lui demande quelles étaient vraiment ses origines, comme

cela

arrive

régulièrement

en

France.

À

son retour dans l’Hexagone, elle s’est interrogée sur son identité et s’est demandée pourquoi son propre pays l’associait souvent avec une forme d’étrangeté

ou

d’exotisme.

considérée

comme

Au

Congo,

française

d’une

elle

est

certaine

classe sociale et en Martinique, elle est vu comme

Elle a utilisé son blog pour faire entendre sa voix et attirer l’attention sur des problèmes de société, comme le manque de diversité dans la littérature jeunesse française. Son article sur l’industrie de la publication, alors incapable de représenter toute la société française, a eu de l’écho auprès d’une éditrice. Cette dernière lui a proposé d’écrire un livre à partir d’une citation d’un roman de Toni

métropolitaine. Son identité est la somme de tous

Morrison, la romancière noire américaine qui a

ces

reçu le prix Nobel de littérature en 1993.

aspects

mais

elle

avait

le

sentiment

que

personne ne l’autorisait à être complexe. Laura

Cette

Nsafou

grande

a

ressenti

le

besoin

de

l’écrire,

seulement

1 0

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non

qualifie

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proposition admiratrice

«

d'auteure

a de

séduit

Laura

Toni

Morrison,

Nsafou, qu'elle


qualifie

«

d'auteure incroyable

».

Elle s’est alors

Grâce

à

des

romans

comme

ceux

de

Laura

penchée sur l’écriture du livre Comme un million

Nsafou, il y a une prise de conscience progressive

de papillons noirs, publié en 2018, qui porte sur le

du

thème de la discrimination autour des cheveux

notamment chez les lecteurs. Malgré tout, il reste

noirs. Elle explique :

«

manque

de

diversité

dans

la

littérature,

La façon dont j’ai utilisé

difficile de convaincre les éditeurs de publier ce

mes expériences et souvenirs dans le livre en tant

genre d’histoires, considérées comme risquées. Le

que jeune femme noire française est la raison

système éducatif a un rôle important à jouer et se

pour laquelle je suis devenue auteure

Que ce

doit de prendre part à cette conversation. L’école

soit dans son blog ou dans ses romans, Laura

est un espace de liberté, où des sujets comme le

Nsafou

racisme et la discrimination doivent être abordés

souhaite

attirer

».

l’attention

sur

l’importance d’avoir une littérature diversifiée. La

pour

littérature

progresser

jeunesse

est

en

effet

le

premier

permettre et

aux

devenir

enfants de

de

meilleurs

comprendre, adultes.

Un

medium accessible aux enfants et contribue à la

enfant n’est pas imperméable au monde extérieur.

construction

Il sent et sait quand une conversation, pourtant

de

l’estime

de

soi.

Comment

un

enfant peut-il se sentir inclus dans une société s’il

nécessaire,

en est exclu de tous les ouvrages ?

conversation doit être menée collectivement.

est

passée

sous

silence.

Cette

◼◼

POUR EN SAVOIR PLUS... RETROUVEZ MRS ROOTS EN LIGNE,

ART & CULTURE

MRSROOTS.FR

Couverture du livre Comme un million de papillons noirs de Laura Nsafou

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ART & CULTURE

AVEZ-VOUS DÉJÀ ENTENDU PARLER DU

NZANGO ?

Ce sport au nom un peu insolite est en fait très populaire en République démocratique du Congo (RDC). Il s’agit d’une discipline sportive officielle réservée aux femmes et dont le nom signifie littéralement « jeu de pied » en lingala, langue parlée en RDC, en République du Congo, en Angola et en République Centrafricaine.

Crédit photo : Hermas kadianga ONGA

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NOMADIC

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Pour en savoir plus... regardez une partie de Nzango sur YouTube

Le déroulé Le terrain mesure 16 mètres sur 8 et est

délimité

à

l’aide

de

lignes

de

couleur qu’il ne faut pas dépasser au risque d’être pénalisé.

Comment marquer des points ?

Le jeu se compose de deux équipes de onze femmes qui s’opposent en face

de

Durant la partie, les femmes sautent, claquent dans leurs

longueur. Il y a environ 2 mètres de

mains et chantent des comptines. Elles vont chacune leur

distance entre les 2 équipes.

tour affronter les joueuses de l’équipe adverse. Le jeu peut

À

à

cela

face

sur

les

s’ajoutent

terrain, appelées

«

16

six

mètres

femmes

réservistes

hors

»,

qui

être

présenté

ciseaux

»

comme

une

partie

de

«

pierre,

feuille,

mais pour les pieds. Ainsi, les joueuses sautent

alimentent les deux équipent en cas

en l’air et lancent en même temps un pied en avant vers la

de

ligne centrale. Une joueuse ne marque des points qu’en

sortie

de

jeu

ou

de

blessure

d’une joueuse. Une

partie

fonction de la position de ses pieds par rapport à celle de 50

son adversaire. Ainsi, les sautillements qui précèdent le

minutes, divisée en deux mi-temps

lancer de pied permettent à chaque joueuse de tromper

de

l’adversaire sur ses intentions.

25

de

Nzango

minutes.

On

dure

retrouve

4

De plus, la femme doit sauter en respectant le rythme des

les minimes, les cadets, les juniors et

chansons. Plus les comptines chantées sont rapides plus le

les seniors. On compte également 6

jeu l’est aussi.

arbitres

Tous les sauts, danses ou encore figures acrobatiques qui

sur

le

commissaires, deux

arbitres

terrain, un de

dont

arbitre couloir

deux

central, et

un

marqueur.

accompagnent

le

jeu

ne

constituent

aucun

point.

Ces

éléments permettent simplement de rendre l’action encore plus agréable à regarder.

PLUS QU’UN SPORT ! Le Nzango est une réelle identité sociale pour la communauté. Il se pratique partout, dans la rue, les écoles, les associations sportives ou encore les entreprises. C’est évidemment une façon de garder une forme physique mais c’est également une bonne raison de quitter le foyer le temps de quelques heures. Ainsi les femmes peuvent se rencontrer, partager et se distraire. Il était d’abord pratiqué dans les cours d’école puis s’est popularisé avec le temps pour devenir un véritable sport national. Le Nzango s’est répandu en Centrafrique, au Gabon et au Cameroun. C’est d’ailleurs une discipline présente aux Jeux africains. Le rêve des joueuses serait d’étendre ce sport à l’international pour

pouvoir, un jour, participer aux Jeux olympiques.

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ART & CULTURE

catégories au niveau professionnel :


PORTRAITS A U

PORTRAITS

T H E

P E T I T

P A Y S

D E

C L O V E N

S I M O N

B O U L E R I C E

G A Ë L

F A Y E


PORTRAITS

C «

Né en 1982 à Bujumbura, au Burundi, d’un père

C’est en 2015 qu’il sort son premier album solo,

français et d’une mère rwandaise, Gaël Faye a

Pili Pili sur un croissant de beurre

vécu une enfance joyeuse dans ce petit pays au

entre Bujumbura et Paris, un album au carrefour

goût

d’influences musicales plurielles, de rap teinté

de

paradis

jusqu’à

la

guerre

civile

et

le

génocide rwandais. Exilé en France en 1995, il

de

s’est adapté à la région parisienne, au béton, au

congolaise

froid et au regard des autres. Adolescent, Gaël

croissant de beurre

Faye

découvre

le

hip

hop

et

cherche

à

soul

et

de et

jazz,

de

de

sébène.

»

»,

samba,

«

Pili

enregistré

de Pili

rumba sur

un

est un titre d’album qui à

se

lui seul raconte une histoire, celle d’un enfant et

reconstruire par la musique pour faire face à sa

de ses origines, pili pili piment rouge africain

solitude. Il forme alors le groupe Milk Coffee and

représentant sa mère et le croissant de beurre

Sugar avec Edgar Sekloka.

représentant son père.

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Il

explore

thèmes

à

travers

de

sa

l’origine

musique

culturelle,

les de

l’amour et de l’humanité. Son métissage a donné lieu à un titre, Métis

»,

«

illustrant sa quête permanente

« Y avait le blanc y avait le noir, j’étais celui qui hésitait » et ajoute « j’ai le cul entre deux chaises, j’ai décidé de m’asseoir par terre ! ». d’identité. Il chante :

Il engage sa voix au service de sa cause et

réussit

à

lever

questionnements culturels,

trop

le

voile

sur

identitaires souvent

ignorés.

des et Cet

album, c’est aussi un hommage rendu à son

pays

d’enfance,

il

y

dévoile

son

histoire et ses souvenirs avec pudeur et conviction. Dans son titre

PORTRAITS

se

définit

mots

«

A-France

comme

pleins

un

«

d’amertume

»,

Gaël Faye

virevolteur

»

et

de

exprime

son attachement infaillible au Burundi, au lac Tanganyika et à ses amis de làbas. Dans

«

Petit Pays

partiellement constate

que

»,

sa chanson

autobiographique, l’écriture

l’a

soigné.

il Ce

témoignage nostalgique d’une enfance

Les paroles de Petit Pays :

au Burundi au parfum amer laissé par la

Une feuille et un stylo apaisent mes délires d'insomniaque

guerre et le génocide des Tutsis par les

Loin dans mon exil, petit pays d'Afrique des Grands Lacs Remémorer ma vie naguère avant la guerre

Hutus est une véritable ode à la vie, à

Trimant pour me rappeler mes sensations sans rapatriement

son petit pays.

Petit pays je t'envoie cette carte postale Ma rose, mon pétale, mon cristal, ma terre natale

Ça fait longtemps les jardins de bougainvilliers Souvenirs renfermés dans la poussière d'un bouquin plié Sous le soleil, les toits de tôles scintillent Les paysans défrichent la terre en mettant l'feu sur des brindilles Voyez mon existence avait bien commencé J'aimerais recommencer depuis l'début, mais tu sais comment c'est

Et nous voilà perdus dans les rues de Saint-Denis Avant qu'on soit séniles on ira vivre à Gisenyi On fera trembler le sol comme les grondements de nos volcans Alors petit pays, loin de la guerre on s'envole quand ?

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Petit bout d'Afrique perché en altitude Je doute de mes amours, tu resteras ma certitude Réputation recouverte d'un linceul Petit pays, pendant trois mois, tout l'monde t'a laissé seul J'avoue j'ai plaidé coupable de vous haïr Quand tous les projecteurs étaient tournés vers le Zaïre Il fallait reconstruire mon p'tit pays sur des ossements Des fosses communes et puis nos cauchemars incessants

Petit pays : te faire sourire sera ma rédemption Je t'offrirai ma vie, à commencer par cette chanson L'écriture m'a soigné quand je partais en vrille Seulement laisse-moi pleurer quand arrivera ce maudit mois d'avril Tu m'as appris le pardon pour que je fasse peau neuve Petit pays dans l'ombre le diable continue ses manœuvres Tu veux vivre malgré les cauchemars qui te hantent Je suis semence d'exil d'un résidu d'étoile filante

Un soir d'amertume, entre le suicide et le meurtre J'ai gribouillé ces quelques phrases de la pointe neutre de mon feutre J'ai passé l'âge des pamphlets quand on s'encanaille J'connais qu'l'amour et la crainte que celui-ci s'en aille J'ai rêvé trop longtemps d'silence et d'aurore boréale À force d'être trop sage j'me suis pendu avec mon auréole

Bujumbura, t'es ma luciole dans mon errance européenne Je suis né y'a longtemps un mois d'août Et depuis dans ma tête c'est tous les jours la saison des doutes Je me navre et je cherche un havre de paix Quand l'Afrique se transforme en cadavre Petit pays Quand tu pleures, je pleure Quand tu ris, je ris Quand tu meurs, je meurs Quand tu vis, je vis Petit pays, je saigne de tes blessures Petit pays, je t'aime, ça j'en suis sûr

Les époques ça meurt comme les amours Man j'ai plus de sommeil et je veille comme un zamu Laissez-moi vivre, parole de misanthrope Citez m'en un seul de rêve qui soit allé jusqu'au bout du sien propre

PORTRAITS

J'ai gribouillé des textes pour m'expliquer mes peines


De

cette

chanson,

il

écrit

un

roman,

Petit

Pays, qui reçoit un accueil exceptionnel et est couronné

de

remporte

plusieurs

notamment

prix

le

prix

littéraires. Goncourt

Il

des

lycéens en 2016 et a été traduit en près de 40 langues.

«

J’ai écrit ce roman pour crier à

l’univers que nous avons existé, avec nos vies simples,

notre

train-train,

notre

ennui

»

explique Gaël Faye. Ce roman, c’est l’histoire de Gabriel, dix ans, qui vit au Burundi avec sa sœur

Ana,

son

père

français

et

sa

mère

rwandaise dans un quartier de Bujumbura en 1992. Il coule des jours heureux entouré de ses

amis

avec

qui

il

fait

les

quatre

cents

coups jusqu’à ce que ce quotidien doux et paisible son

soit

petit

disloqué

pays

en

même

malmené

par

temps

que

l’histoire.

À

travers le regard de cet enfant, Gaël Faye nous

livre

les

réalités

de

la

guerre

et

du

génocide rwandais, la place de la violence, des inquiétudes et des questionnements sur l’origine. Gabriel est métis, tutsi et français. On découvre la vie d’un enfant dont la peur accompagne

le

quotidien

et

celle

d’une

famille déchirée par le conflit. Durant cette

PORTRAITS

période Gabriel lit des ouvrages que lui prête sa professeure, cherchant dans ces histoires

«

d’autres réels plus supportables

»

avant de

devoir fuir son pays à 13 ans quand son père le met dans un avion. Ce petit pays, il ne l’oubliera précieux

jamais.

Gaël

manifeste,

Faye

écrit

recueil

alors

éternel

un de

souvenirs.

« On n’écrit pas pour être beau sur scène. On écrit parce qu’il y a la vie, on écrit pour essayer de trouver les mots » raconte Gaël Faye. En partageant sa musique et ses écrits avec le public, ses expériences et ses ressentis, ce poète aux multiples casquettes a su trouver les mots justes pour témoigner. Il contribue ainsi à l’écriture de l’Histoire en nous faisant découvrir son histoire.

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Adapté ensuite au cinéma par Eric Barbier, le film Petit Pays, dont la sortie en France a été reportée par le premier confinement, a été

à

l’affiche

à

la

rentrée.

Les

images

réalistes et frontales du film ont fait mesurer à Gaël Faye toute la violence que porte son livre. Ce qui est certain, c’est que la force du livre

comme

du

film

est

de

parvenir

avec

beaucoup de justesse à mettre en lumière la tragédie qu’a connu le Burundi. Son dernier album, Lundi méchant, sorti en novembre 2020, poursuit ce partage d’une poésie multiculturelle avec le public. Album aux récits actuels et colorés, Lundi méchant a été nominé aux victoires de la musique. En cette

période

morosité,

le

particulière climat

doux

de et

stress

et

de

chaleureux

émergeant des créations de Gaël Faye est à

découvrir ou retrouver de toute urgence.


PORTRAITS

Sofian Cayot L E

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Dans le cadre du Festival de la BD BOOOM!, Made in France a réalisé une interview de l‘auteur Garth Stein et de l’illustrateur Matthew Southworth le 6 janvier 2021, concernant la parution le 28 juillet dernier de leur ouvrage The Cloven. Cet entretien a été réalisé par Anne Paper, conseillère stratégique dans le marketing, et mis par écrit par Sofian Cayot.

Tout comme Matt, Garth ne pouvait décrire une routine particulière. Tout au long de sa carrière d’écrivain, une question semble l'avoir toujours guidé : comment bien raconter une histoire ? Ayant

également

travaillé

pour

l'industrie

du

cinéma pendant un certain temps, il faisait part de

sa

frustration

d'inefficacité

à

et

écrire

de

des

son

sentiment

histoires

dans

ce

monde, reprenant ainsi les mots de Matt. Il s'est

Leur parcours et leur routine

alors

À ce sujet Matt commençait par exprimer ses hésitations, ne pensant pas forcément à une journée-type

»

dans

sa

vie

d'artiste.

«

Matthew

Southworth, de son nom complet, a emprunté un chemin

assez

inhabituel

pour

arriver

à

sa

situation actuelle en tant que dessinateur. Dès l'âge de 3 ans, Matt a commencé à dessiner et a toujours été lié à l’art sous toutes ses formes depuis. Ayant commencé à écrire des chansons avant même de savoir jouer de la guitare, Matt a notamment composé une chanson intitulée Life on The Road (Une Vie sur la Route) à l’âge de 7 ans, évoquant la vie d’un musicien itinérant.

«

PORTRAITS

C’était une chanson assez pathétique, mais je peux toujours la chanter

»,

plaisantait Matt à ce

sujet. Dès

vers

en

le

monde

quête

de

d'une

la

littérature

plus

grande

satisfaction. Il a dès lors écrit 4 romans pour la jeunesse avec l'idée de les présenter dans un événement

littéraire

à

Seattle

en

2011.

La

majorité des ouvrages incluaient des dialogues entre dieux et monstres, et parmi eux se trouvait The Cloven. L'histoire

de

remonte

à

Garth 2011

:

Stein cela

et

de

devait

son

être

œuvre un

livre

évoquant le sujet des modifications génétiques humaines

et

des

nouvelles

technologies

permettant cela. Garth expliquait avoir tenté de jouer avec cette histoire pensant que cela aurait du succès en tant que roman. Malheureusement pour

lui,

le

présenté.

succès

Lui

est

escompté alors

ne

venue

s'est

pas

l'idée

de

transformer ce roman en BD, pensant qu’illustrer

lors,

Matt

continuait

à

dessiner

tout

en

décidant d'intégrer une école d'art dramatique à Pittsburgh en Pennsylvanie, où il a pu bénéficier de

tourné

jeunesse,

cours

d’art

dramatique

et

y

a

obtenu

un

diplôme dans le but de devenir réalisateur de films. Il a donc débuté sa carrière artistique dans le monde du cinéma, ce qui fut assez frustrant et inefficace

pour

lui

en

termes

de

capacité

une telle histoire pourrait mieux fonctionner. Dès lors, Matt et Garth sont entrés en contact afin

de

travailler

un

premier

tome,

et

ils

La collaboration entre l'auteur et le dessinateur

à

écrire des histoires.

La collaboration entre Garth Stein et Matthew Southworth

a

Son premier contact avec le monde de la bande

enchaînement

dessinée

s’est

rencontre

compère

artiste

L’expérience

sur

travaillent sur un second tome actuellement.

fait

par

dans

l’intermédiaire ce

personnelle

même de

d’un

domaine.

cette

même

effet,

été

jusqu’à

les

l'importance

caractérisée

d’étapes, la

du

publication

deux

artistes

de

l'existence

par

un

moment du

ont

long

de livre.

insisté

d'une

«

leur En sur

certaine

connaissance ne pouvait faire constater à Matt

affinité entre écrivain et illustrateur :

qu’une seule chose : les histoires publiées en tant

dire que nous apprenions à nous connaître en

que bande dessinée défiaient toute concurrence

sortant

en termes de rapidité de publication et d’arrivée

téléphone afin d'en apprendre plus sur chacun,

sur les étagères des librairies. Il semblait donc

jusqu'au

naturel qu’un changement de carrière s’impose

marier" et d'écrire ce livre

dans la vie de jeune artiste de Matt, afin de

sujet. Garth n'est pas un artiste visuel, mais un

devenir

illustrateur

de

artiste verbal, tandis que Matt est un illustrateur.

J’avais

l'habitude

d'écrire

littérature

jeunesse

mes

histoires

:

«

et

Il

ensemble, jour

semblait

donc

en

nous

parlant avons

naturel

»,

des

décidé

J'aime à

heures de

au

"nous

ironisait Garth à ce

qu'une

collaboration

d’essayer d'en faire des films pour ma part et

s'engage entre les 2 auteurs afin de créer une

quand

bande dessinée conforme aux

étaient

je

voyais

publiées

mon après

ami 3

décidé de changer de vie.

écrire mois

»

de

des

BD

qui

travail,

j'ai

« normes ».

Matt a ainsi passé

Dans le monde de la BD, certains standards et

plus de 15 ans à dessiner des BD et juge avec

certaines traditions sont à respecter, notamment

recul que sa meilleure expérience jusque-là, sans

en ce qui concerne les illustrations, et Garth est

nul doute, a été incarnée par sa collaboration

allé vers Matt en connaissance de cause.

avec Garth sur The Cloven.

2 0

I

L E

M A G '

F R @ N C O P H O N E

-

A V R I L

2 0 2 1


Ne

sachant

pas

réellement

quel

chemin

dessiner

m’a

permis

de

de

ce

livre

espérait ainsi trouver en Matt les réponses à ses

qu'artiste.

hésitations, mais surtout les images à ses mots.

moment du début de leur collaboration et celui

Dès lors, un grand champ de possibilités s'est

de la publication du livre, il s’est écoulé près

ouvert pour l'écrivain, et un véritable effort de

d'un an et demi, en plus des années de travail

collaboration s'est mis en place entre les deux

de

artistes, Matt dessinant et Garth écrivant. Une

ainsi

fois

produit sur The Cloven.

script

relecture

rédigé,

devait

considérant approche

alors

que sur

notamment

un

effort

être

Matt

sur

les

entamé,

avait

certains

commun

une

Garth

meilleure

aspects

redondances

de

du

texte,

que

celui-ci

»

Les

l’écrivain de

personnelle

auteurs

seul

sur

constater

estiment

le

en

une

véritable

le

expérience

faire

emprunter sur la question des illustrations, Garth

qu'entre

scénario,

tout

le

tant le

permettant

travail

minutieux

Un livre au style bien particulier Présentant

«

sa

bande

dessinée

comme

»,

une

pouvait contenir. Il y a donc également une part

œuvre

d'art scripturale chez Matt, en plus d'une part

insistait sur l'attention particulière donnée aux

d’art plutôt visuel. Garth insistait également sur

couleurs présentes dans les illustrations et à la

la quantité de travail fournie par Matt sur cet

spécificité

ouvrage

un

l'auteur, le niveau de détails large et conséquent

peux

offrent une grande richesse de contenu à la BD

une

et a su permettre au lecteur de comprendre ce

«

:

illustrateur, écrire

Je

et

autant

suis

un

en

tant

de

mots

romancier que

et

c’est

romancier

que

je

je

veux

sur

magnifique et frappante

particulière

des

Garth Stein

dessins.

Selon

centaine de pages, et personne ne se soucierait

qui se jouait, tout en ayant globalement assez

jamais

de

peu d'informations. Matt soulignait quant à lui la

tandis

que

dessiner

savoir

si

Matt

sur

ces

c’est

en

une

tant

bonne

histoire,

qu’illustrateur

centaines

de

pages,

doit

ce

qui

prend plus de temps que l’écriture de celles-ci.

»

faible

évolution

premières

auteurs

la

question

du

s'intéressent

script

alors

abordée,

les

véritablement

à

de

livre,

dessin

reliant

dans

cela

les

à

la

au

fur

et

à

mesure

que

celle-ci

progressait. Matt insistait ainsi sur le caractère inédit

des

illustrations

de

The

Cloven,

n'ayant

trouver comment compresser la ligne narrative et

pas grand-chose à voir avec ce que ce dernier

la

aurait pu dessiner dans ses précédentes œuvres,

transformer

emblématiques,

en

afin

des

que

visualisations

l'histoire

puisse

être

bien que n'ayant pas identifié véritablement un

contée beaucoup plus rapidement. Tout est donc

style

fait pour simplifier au maximum l'histoire écrite

également remarquer qu’au début du livre, le

au

regard

départ

dans

le

script,

afin

d'en

faire

des

illustrations à la fois claires et frappantes. ce

qui

concerne

les

illustrations

du

à

sa

personne.

personnage

Matt

principal

faisait

Tuck

change

radicalement, notamment entre le moment où il n’est

En

propre

en

elles-

qu’un

adulte.

bébé

Cela

et

le

moment

traduisait

alors

il

devient

le

manque

mêmes, un long processus de collaboration est

d'appropriation

également à l’œuvre. Garth expliquait utiliser un

dessinateur, qui, en temps normal, serait revenu

grand

de

fini par cerner ce premier au fil du livre, afin de

BD, afin que Matt comprenne pleinement le fond

produire

de

dessinateur

motivations

et

les

qu'ils

des

le

sur le style des précédentes pages après avoir

et

dans

par

documents

pensée

mots

personnage

visant à la description des futures vignettes de la sa

nombre

du

perçoivent

sentiments

du

ainsi

les

personnage,

un

intéressant

contenu

plus

trouvait que

le

homogène.

effectivement

lecteur

puisse

se

Le plus

rendre

chose fondamentale dans l'art dramatique. Ce

compte de la progression du travail d'illustration,

procédé

s'affinant de plus en plus sur cette centaine de

est

alors

le

seul

moyen

d'arriver

à

rédiger les différentes répliques de la BD et de

pages constituant le livre.

réussir à les illustrer selon la pensée de l'auteur. En cas de non-conformité des dessins à l'histoire

Revenant sur les propos de Garth, mentionnant

telle que l'imaginait l'écrivain, tout est alors fait

la

pour corriger cela. Il y a donc beaucoup d’allers-

l’histoire,

retours avant de parvenir à un résultat final. Les

d’ériger

deux artistes soulignaient ainsi le caractère non

évoquant comment les personnages de bandes

conventionnel travail

de

leur

d'illustration,

description

panel

collaboration

n'étant

par

pas

panel,

et

basé

mais

rapidité

de

connexion

Matt le

évoquait

héros

en

entre

le

alors

symbole

:

«

lecteur

et

l'importance Une

théorie

de

leur

dessinées sont conçus circule actuellement et

sur

une

stipule que plus on en fait des symboles plutôt

bien

sur

un

que

de

simples

illustrations,

plus

»,

on

est

script général décrivant et décryptant chacune

susceptible

des émotions et actions des personnages. Matt

Math à ce sujet.

peut ainsi se vanter d'avoir eu une grande liberté

À la manière du personnage Charlie Brown de

d'interprétation :

Peanuts (ou Snoopy), tout est ainsi fait pour que

« Avoir une telle liberté pour

L E

M A G '

de

s'identifier

F R @ N C O P H O N E

à

-

eux.

A V R I L

déclarait

2 0 2 1

I

2 1

PORTRAITS PORTRAITS

fois

style

du

familiarisation progressive du dessinateur avec l'histoire

Une

du

pages


The

Cloven

contient

et

que

soient

les

héros

d'abord

que

perçus

l'ouvrage

comme

des

symboles.

leurs

créateurs.

Ils

sont

effet

laissés

à

par vivre sous le nez de la société, dans des camps de sans-abris. Cela fait écho à la réalité

Le message derrière ce livre

que

connaît

comme

actuellement

beaucoup

la

d’autres

ville

de

Seattle,

métropoles,

devant

«

The Cloven est un ouvrage de science-fiction

faire face au problème des sans-abris :

évoquant le sujet des modifications génétiques

milliers de personnes vivent sous des ponts ou

illégales et des nouvelles technologies dans un

sous des autoroutes, ou dans d’autres lieux où il y

monde

a beaucoup de criminalité et d’insécurité […] on

futuriste,

visant

à

créer

des

êtres

l’œuvre The Cloven fait d’ailleurs référence au

comme une jungle n’est pas anodin.

personnage principal, perçu comme l’organisme

Par

humain

souligner la dangerosité qu’il peut y avoir à vivre

modifié

le

plus

réussi

« Cloven », soit un être mi-

cette

dans

la

la

».

appelle

génétiquement

cela

"jungle"

métaphore,

rue

les

Garth

risques

L’auteur interroge ainsi : livre

Stein

la

ville

cherche

peuvent

surgir

à de

n’importe quel endroit à n’importe quel moment.

homme mi-chèvre. Le

Présenter

Des

humains meilleurs et plus efficaces. Le titre de

jamais créé, étant un

interroge

ainsi

modifications génétiques :

«

sur

l'utilité

des

Je pourrais tout de

problème Dénonçant

?

Quelles les

«

sont

différentes

Comment régler ce les

solutions

actions

?

».

entreprises

force

par la ville telles que la légalisation du camping

phénoménale et infinie, et je pourrais en créer

urbain, il posait alors des questions à travers son

beaucoup

œuvre :

suite

créer

un

est-ce

surhomme

d’autres

modification

PORTRAITS

en

l’abandon plutôt qu’euthanasiés et finissent alors

bon

avec

génétique ou

avec

mauvais

à ?

les ma

»,

une

moyens

disposition

imaginait

de […]

Garth.

puisse nombre

«

Est-ce la meilleure solution que l’on

proposer

?

».

Il

d’éléments

a

donc

de

certain

accompagnant

sont en jeu dans cette bande dessinée : dans

deux

l’histoire,

reste avant tout un livre pour la jeunesse, à la

certains

organismes

génétiquement

modifiés ne correspondent pas aux attentes de

2 2

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qui,

profondeur

un

sensibilisation

Mais beaucoup plus d’éléments plus profonds

artistes,

en

y

Garth

fois bon et divertissant.

Stein

l’ouvrage l’aura

des

rappelé,


SIMON BOULERICE MAËLA BARÇON

litt. jeunesse 2021

PORTRAITS

SIX DEGRÉS NOUVELLE SÉRIE TÉLÉ AU CANADA

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I

2 3


PORTRAITS

C'est à Montréal, en 1982, que Simon Boulerice a vu le jour. Auteur, comédien, dramaturge et metteur en scène, il est aujourd'hui une figure emblématique du monde artistique québécois. Retour sur le parcours de l'auteur de Florence et Léon, roman finaliste du Prix du Gouverneur général 2016, décerné par le Canada. Dès son plus jeune âge, Simon Boulerice savait qu'il souhaitait écrire et avait déjà une idée précise du type de sujets qu'il voulait aborder. Marqué par sa différence et l’impression de « passer dans le beurre » [expression québécoise signifiant passer inaperçu, NDLR], il était important pour lui que ses écrits soient inclusifs. Après des études de littérature, Simon Boulerice a intégré une école de théâtre, qui l’a poussé vers l’écriture. Il s’est naturellement tourné vers la littérature jeunesse, ému par ce public qu’il qualifie de « vif et ouvert sur le monde ». C’est ainsi qu’il a écrit des pièces de théâtre, puis des albums et des romans pour les enfants, séduit par la musicalité de la langue québécoise héritée de sa mère et qu’il aime tant.

Spontanément, il a eu envie d’écrire sur les personnes qui sont plus dans l’ombre et sortent de l’ordinaire. Il avait comme volonté de donner la parole à ceux qui se sentent lésés et laissés de côté. Inspiré par ses propres expériences, il a créé des anti-héros, uniques en leur genre mais avec l’objectif que tout le monde puisse s’y identifier. Il explique que « l’empathie s’enclenche, peu importe qu’on ait le handicap ou non ». En effet, dans plusieurs de ses romans, ses personnages principaux ont un déficit visuel.

2 4

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Ses écrits sont souvent inspirés par des rencontres avec des enfants uniques. C’est à Lille, ville qu’il porte particulièrement dans son cœur, qu’il a eu l’idée d’écrire le roman jeunesse Edgar Paillettes. Lors d’une tournée dédicacée à la promotion de sa pièce de théâtre Les mains dans la gravelle, Simon Boulerice a eu l’opportunité d’assister à une répétition de sa pièce Éric n’est pas beau par une troupe de théâtre lilloise. C’est ainsi qu’il a rencontré Edgar, jeune garçon à la personnalité flamboyante, qui jouait la fée. Ce dernier lui a demandé si lui aussi aimait les paillettes et ce qui brillait. Cette rencontre avec ce jeune comédien lillois s’est conclue par un roman lauréat du Prix jeunesse des libraires du Québec en 2014. Le succès remporté par cet écrit a poussé Simon Boulerice à l’adapter en pièce de théâtre sous la forme d’une coproduction entre la ville de Lille et la ville de Beloeil au Québec.


Florence et Léon avec l’idée que ces deux personnages se rencontrent et vivent l’expérience de l’autre — pour Florence, regarder à travers une paille pour voir ce que voit Léon et pour ce dernier, respirer par le trou de la paille pour se mettre à la place de Florence. Ce roman s’est exporté au-delà du Québec et a rencontré un succès international, comme le témoigne sa traduction en coréen. L’étincelle qui l’a poussé à écrire cet ouvrage est la même qui lui a donné envie de reprendre cette idée pour en faire une série télé. Simon Boulerice a écrit tous les épisodes de Six degrés, série aux personnages différents de l’album mais toujours avec cette idée de permettre au public de se mettre dans la peau d’autres personnes. Ceux qu’il décrit comme des « personnages boulericiens » sont des personnalités hautes en couleur, qui lui ressemblent bien et qui véhiculent un message positif. Léon, dont le spectateur peut expérimenter la vision réduite lors de certaines scènes, apparaît comme un garçon brillant, plein d’ambition et promis à un bel avenir. Son professeur de français, joué

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joué par Simon Boulerice à l’écran, est directement inspiré d’un professeur qu’il a eu plus jeune et qui lui a donné envie d’écrire. Six degrés a remporté un franc succès auprès du public et a été renouvelé pour une deuxième saison, actuellement en cours de tournage. Si Simon Boulerice porte ces différents chapeaux — auteur, comédien, dramaturge et metteur en scène — c’est pour célébrer la diversité et l’unicité. Il permet aux enfants de nommer les choses, d’apprendre à célébrer leurs particularités et de les légitimiser à prendre la parole devant les autres. Qu’ils aient un handicap, soient bègues ou dyslexiques, il leur rend hommage et les encourage à s’affirmer par sa littérature. Son album Le pelleteur de nuages, écrit à l’intention particulière d’un enfant souffrant de vitiligo, témoigne de cette volonté de promouvoir l’acceptation de soi chez les enfants. Son parcours impressionnant est la preuve du pouvoir de la littérature et de son importance dans notre société.◼ Voir la bande-annonce de Six degrés

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PORTRAITS

Simon pense qu’une bonne histoire peut prendre plusieurs formes et aime passer d’un genre à l’autre. La clé, explique-t-il, c’est de bien comprendre le médium. Une série télé, ce n’est pas la même chose qu’un album. Il apprécie particulièrement le roman, « lieu de tous les possibles » et qu’il qualifie de «terrain de jeu par excellence». À la télévision, le réalisme est important et c’est le visuel qui l’emporte. Nourri par cette conviction, il a écrit la série télévisée Six degrés, inspirée de son album Florence et Léon. Il a composé cet album à la suite de deux rencontres qui l’ont marqué. Adolescent, il avait une amie qui avait la fibrose kystique et l’a mis au défi de courir autour de l’école en respirant par le trou d’une paille pour comprendre ce que vivaient ses poumons. Il raconte que cette image a « frappé son imaginaire » et qu’il a décidé de le faire. Quelques années plus tard, son chemin a croisé celui d’un garçon malvoyant qui lui a dit voir la vie à travers le trou d’une paille. La paille est devenue un objet symbolique, permettant de se glisser dans la peau de l’autre. Il a alors construit l'album Florence


LANGUE L A

P E R T I N E N C E

L A N G U E

D E

F R A N Ç A I S E

L ' O R A L I T É

E T

D A N S

A F R I Q U E

L A

P O É S I E

F R A N C O P H O N E

D E

L É O P O L D

S É D A R


Emmanuelle Franks Léopold Sédar Senghor (1906-2001) est une figure emblématique pour le Sénégal et la France. Il a été poète, écrivain et homme politique en France puis au Sénégal. Il a été un grand grammairien, le premier africain à intégrer la très prestigieuse Académie française et il a développé avec Aimé Césaire, le mouvement politique et courant littéraire de la négritude. Amoureux de son Afrique natale, il a réussi à recréer son aura et sa noblesse à travers les techniques littéraires de ses poèmes et, en particulier, à travers l’oralité, si chère à la culture africaine. Pendant des générations et des générations, l’oralité était le seul vecteur de transmission du patrimoine culturel. Ceux qui sont chargés de cette transmission culturelle en Afrique sont les griots. Ils racontent de manière vivante des contes et des

LANGUE

poèmes, parfois pleins de magie, aux nouvelles générations. Les

griots

sont

invités

aux

grands

événements

familiaux

et

communiquent avec le public qui l’entoure. Cette interaction directe

est

fondamentale

pour

que

l’héritage

culturel

se

transmette efficacement d’une génération à l’autre. Les griots chantent leurs contes et histoires, ils dansent, ils miment et ils sont souvent accompagnés d’instruments de musique.

L’oralité a donné une dimension exotique et innovante à la littérature francophone. Elle est un véritable outil pour donner toute son ampleur aux mots utilisés par ses auteurs. C’est la rencontre de deux mondes : le monde de l’oral qui transmet de manière sonore des mémoires et le monde de l’écrit classique. L’oralité

a

apporté

un

nouveau

souffle

à

la

littérature

de

langue française et elle lui a ouvert de nouveaux horizons. Elle est

omniprésente

l’ouvrage

Œuvre

dans

Éthiopiques,

poétique,

recueil

publié

de

quatre

poèmes ans

de

avant

l’indépendance du Sénégal, pays où Léopold Sédar Senghor deviendra le premier président de la République en 1960.

Son œuvre poétique développe un style particulier qui s’inscrit dans le courant littéraire de la négritude. Si vous lisez un des poèmes de ce recueil, vous verrez que

Senghor

fait

toujours

indication

sur

les

narrateur.

Le

tam-tam

précéder

instruments est

qui

un

ses

textes

d’une

accompagnent

des

instruments

le de

prédilection mais d’autres instruments comme les kôras, les

balafongs

et

les

accompagner les poèmes Bête

», par exemple. ».

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M A G '

tabales

sont

utilisés

pour

« Congo » et « L’Homme et la

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-

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2 7


Des instruments de musique plus classiques comme la flûte, l’orgue ou d’autres instruments issus du jazz peuvent aussi accompagner des poèmes qui traitent davantage de la culture occidentale. Un orchestre de jazz et un solo de trompette sont notamment impliqués dans le poème intitulé

«

À New York

».

Le

« » noirs du monde entier. Les instruments dépendent du thème et de l’impression que l’auteur veut

jazz est un courant musical crée par les Noirs du sud des États-Unis. Ainsi, Senghor rassemble tous ses frères

mettre en valeur. Sans instrument, les poèmes perdent une partie de leur sens et de leur âme.

Senghor a affirmé qu’il était d’abord inspiré par un rythme. Il écrivait ses poèmes de manière instinctive. Il attachait beaucoup d’importance aux sonorités. Il comparait ses poèmes à une partition de jazz où tous les paramètres sont essentiels. Il faut chanter le poème. Ce dernier fait vivre la culture africaine et rend sa dignité à la population Noire, trop souvent traitée injustement ou comme des citoyens de seconde zone à cause de l’esclavage et de la colonisation. Le style est direct. Le

« je » est présent pour

montrer l’engagement du narrateur dans son combat. Senghor utilise un procédé de nomination. Il joue avec les connotations du lecteur et donne ainsi une plus grande puissance au vocabulaire qu’il utilise. La présence de répétitions, de parallélismes, de refrains montre l’aspect incantatoire et mystique de ses poèmes.

Il mélange les cultures et le vocabulaire d’origine étrangère pour créer un métissage culturel dans le but de montrer au monde qu’il n’y a pas de culture supérieure et que la culture africaine est tout aussi

LANGUE

importante que la culture gréco-latine et occidentale. Il appelle au respect de toutes les races.

Senghor utilise la langue française comme une arme pour redonner ses lettres de noblesse aux cultures indigènes et aux populations locales des territoires colonisés. Son objectif était de convaincre que toutes les cultures et toutes les races du monde sont égales. La langue française lui permet de se faire entendre plus universellement.

L’oralité donne de la couleur, de la vie, du rythme et un métissage culturel sans précédent à la littérature

francophone.

Ses

poèmes

doivent

être

lus

comme

des

partitions.

L’oralité

donne

de

l’intensité au message de Léopold Sédar Senghor, qui exprime son souhait de vivre dans un monde

meilleur, plus égalitaire, dans le respect de tous les êtres humains, peu importe leur race.

2 8

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LANGUE FRANÇAISE ET AFRIQUE FRANCOPHONE MADELEINE COSSON-FLANAGAN Quel français parler ? Le français de France ? Le français standard* ? Celui du Canada (écrit et oral) ? Celui en usage dans différents pays francophones à travers le monde ? La langue française montre sa richesse et sa facilité à s’adapter lorsqu’elle est vivante, se charge

de

nouveaux

mots

étrangers,

tels

quels

«

nouveaux mots, de nouvelles locutions. Ainsi,

ou

en

paquebot

les

»

modifiants,

ou

en

créant

de

: est-ce un mot cent pour cent

français ? Pas du tout, c'est une francisation de deux mots anglais : packet

et

boat. Ou

lorsqu'elle est utilisée comme langue officielle ou co-officielle, comme c’est le cas à travers le continent africain, de la Méditerranée à l’océan Indien, en s’étirant plus particulièrement dans

sa

partie

ouest,

dans

un

espace

composé

de

21

états

africains

et

de

deux

îles

françaises.

Lorsqu’un mot voyage, il s’exporte, il arrive sur de nouveaux territoires. Va-t-il être accepté rejeté,

modifié

ou

oublié

?

Lors

appeler un mariage linguistique : un

de

«

son

utilisation

big bang

»

il

se

crée

parfois

ce

que

l’on

peut

entre des identités diverses, multilinguisme

et interculturalité, ce qui va donner une nouvelle vie à un mot, une expression.

La langue française en Afrique francophone n’a pas échappé à ces phénomènes de diversité langagière,

culturelle,

religieuse,

historique,

qui

parcourent

l’espace

géographique

sans

frontière.

*Le français standard, ou français normé, désigne le français dénué de tout accent régional ou régionalisme, sauf bien sûr l'accent académique de la bourgeoisie parisienne, et dont la syntaxe, la morphologie et l’orthographe sont décrits dans les dictionnaires, les ouvrages de grammaire et manuels de rédaction, tels que le Bescherelle ou Le Bon Usage. (Source : Français standard — Wikipédia (wikipedia.org)

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2 9

LANGUE

ou


On

se

penche

ici

sur

quelques

mots

qui

vont

et

viennent.

Ils

font

partie

du

patrimoine

linguistique de la langue française. D’où viennent-ils ? Comment ont-ils changé de forme et parfois de sens ?

La sape et sa famille de mots au

Congo

Un sapeur sachant se saper, aime la sape griffée et parle de sapologie.

en français standard Un vrai dandy qui aime bien s’habiller avec des vêtements de marque parle de la mode branchée.

Camembérer au

«

Sénégal

J’ai un petit creux : vite, du

pain et un camembert. Quel délice ! Je vais camembérer ?

»

en français standard

LANGUE

Pas tout à fait… au Sénégal on en a fait tout un fromage ! La forte odeur du camembert a donné naissance à ce verbe qui

Un deuxième bureau

signifie : au

«

Voici mon deuxième bureau.

Congo

pieds

».

«

sentir mauvais des

» en français standard En République démocratique du Congo, on ne parle pas d’espionnage, mais d’une maîtresse.

Une Diacre au

Congo-Brazzaville

Mot religieux ? Féminin ou masculin ? Un diacre ou une diacre ? Que dit le en français standard

dictionnaire ?

Mot féminin au CongoBrazzaville, il désigne soit une jolie jeune femme, soit une petite amie.

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Un salomon au

Congo

Parle-t-on de quelqu’un plein de sagesse ?

en français standard

Détrompez-vous ! en République démocratique du Congo, un salomon est simplement une personne qui

Motamoter

dort...dans le salon. au

«

Cameroun

Mais voyons, arrête donc de

motamoter !

»

en français standard La locution bien connue du mot à mot

»

«

a donné naissance

à un verbe plutôt imagé. On parle d’une personne qui recite machinalement sans comprendre.

LANGUE

Un perdiemisé au

«

Congo

Cet homme travaille sur ce

projet municipal de construction comme perdiemisé

».

en français standard Un per diem est une indemnité reçue comme compensation de dépenses pour un travail fourni hors de son lieu de résidence. Au Congo, cette expression a donné naissance à un nom commun avec le sens d’un politicien corrompu.

Ces expressions imagées ou familières reflètent bien ce mariage entre la langue française et la culture du quotidien dans chacun de ces pays.

Pour en savoir plus... Retrouvez d'autres expressions de l'Afrique francophone : une vidéo sur YouTube,

« Un mot adopté » de TV5MONDE Afrique

un article où vous apprendrez ce que s'ambiancer et cadonner veulent dire

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PLANÈTE VERTE

PLANÈTE VERTE

Retrouvez chaque premier lundi du mois la rubrique animée par l'éco-artiste Aline Bloch sur notre site internet

ET SI ON REGARDAIT DE PLUS PRÈS DANS NOS POUBELLES ?

RUBRIQUE PLANÈTE VERTE

Nous avons tous besoin d'une bonne raison pour changer nos

habitudes.

Prenons

un

exemple

:

Pourquoi

commencez-vous un régime ? Pour perdre du poids, pour avoir plus d'énergie, pour des raisons médicales, pour la saison des maillots de bain ? Ces raisons vous motivent à

commencer

votre

régime

et

vous

gardent

motivés

jusque bout.

Lorsque

l’on

décide

de

vivre

une

vie

éco-responsable,

c’est pareil. Nous avons besoin de savoir pourquoi et de lister nos motivations. Cela peut être pour les enfants, pour

sauver

économiser

la de

planète, l'argent,

pour pour

réduire

pour faire partie d'un mouvement, etc.

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les

apprendre

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déchets, et

pour

influencer,

ALINE BLOCH


Dans notre famille de cinq, la principale raison pour laquelle nous

avons

décidé

de

commencer

notre

voyage

vers

une

vie

plus verte était de réduire nos déchets.

Jusque-là, je ne prêtais pas vraiment attention à nos poubelles. Quand j'y pensais, la poubelle c’était sale, ça sentait mauvais et elle était bien souvent surchargée. Nous avions l'habitude de simplement

acheter

et

consommer

des

choses,

puis

les

jeter

lorsque nous n’en avions plus besoin. Nous jetions sept ou huit sacs

poubelle

par

semaine

et

hop,

entassés

dans

la

grande

poubelle grise, mise sur le bord du trottoir tous les vendredis matin, ce n’était plus notre problème. Je savais que le camion poubelle emporterait les ordures et que ce serait hors de ma vue, donc hors de ma vie. Jusqu'au jour où ma fille de 4 ans m'a demandé où ce gros camion emportait toutes les ordures.

Des tonnes de déchets Selon

des

études,

le

consommateur

américain

moyen

produit

plus de 1,5 kg de déchets par jour. Le français, lui, en produit 1

et

1,5

kg.

C’est

plus

500

kg

de

déchets

par

an

par

PLANÈTE VERTE

entre

personne !

Ces déchets sont majoritairement des déchets alimentaires ou végétaux, du plastique et des déchets recyclables.

Ne

serait-il

pas

intéressant

de

comprendre

ce

que

nous

mettons dans nos poubelles ? Qu'y a-t-il dans ces 1,5 kg qui sont jetés chaque jour par personne ?

Lorsque nous prenons un moment pour regarder de près, nous constatons

que

la

plupart

de

ce

que

nous

jetons

dans

la

décharge pourrait être évité.

Notre audit des ordures ménagères J'étais curieuse de connaître les types de déchets et la quantité de déchets que notre famille produisait chaque semaine, alors nous avons effectué un audit des ordures à la maison. Tout d'abord, nous avons eu une courte réunion de famille pour discuter de l'idée, des raisons pour lesquelles nous voulions le faire et, surtout, pour nous assurer que tout le monde était d’accord et prêt à suivre le processus. Nous avons décidé de limiter l'expérience à la cuisine — la pièce où nous produisons le plus de déchets. (Je prévois de faire un audit des ordures dans chaque pièce cette année.)

Pour faire notre vérification, j'ai laissé un morceau de papier et un stylo près de la poubelle. Nous avons noté tout ce que nous avons jeté pendant une semaine, en triant ce qui va dans le recyclage, dans le compostage et dans

«

le reste

».

À la fin de la semaine, nous avons compté le nombre de sacs poubelles que nous avons utilisés comme donnée de référence.

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Ce que nous avons appris Nous avons appris davantage sur nos habitudes d'achat, y compris ce que nous achetions le plus fréquemment.

Nous

avons

réalisé

ce

que

nous

pouvions

contrôler et ce qui est plus difficile à contrôler en termes de déchets, comme les emballages et l'étiquetage des produits.

Nous

avons

nombre

de

eu

une

sacs

de

idée

précise

déchets

que

du

nous

jetions.

Nous

avons

réexaminé

notre

processus

de

PLANÈTE VERTE

triage des ordures et corrigé certaines erreurs.

QUELQUES

Nous avons enfin eu une idée de ce que

UNES DES

contiennent nos déchets ménagers et des étapes à suivre pour nous améliorer.

CRÉATIONS ALINE'S CARDBOARD

Après plusieurs semaines, nous avons demandé à

la

plus

ville

d’échanger

petites

qu'un

seul

et sac

nous

nos

poubelles

étions

poubelle

fiers

par

de

pour ne

semaine

de

jeter à

la

décharge.

Nous

sommes

encore

loin

d’avoir

quatre

ans

de

déchets

comme le font les stars du zéro déchet, mais on progresse.

Allez, à votre tour de mener l’enquête dans vos poubelles !

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dans

un

pot

à

confiture,


à SEATTLE


1ère session

FESTIVAL DE LA


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