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Interview Studio Marshall

Interview Studio Marshall À la croisée des arts, des sciences et des techniques d’imagerie et grâce à de sublimes expériences en réalité virtuelle, le studio Marshmallow Laser Feast chamboule notre vision anthrpocentrique du monde.

Vos créations nous proposent de pénétrer dans « l’envers » du vivant.

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Pourquoi avoir fait ce choix dès le départ ?

peut pas être vécue avec nos seuls sens humains. Sans cela, nous considérons qu’il n’y a aucun intérêt à utiliser toutes ces technologies !

Ici, vous montrez le monde vu par les yeux d’animaux. Cette création a-t-elle été structurante pour vous ? C’est le premier de nos projets qui a reçu autant de retours positifs. Au départ, il s’agissait de répondre à une consigne imposée par le Festival Abandon Normal Devices : Comment faire comprendre la vue d’animaux ou d’insectes de la forêt à des yeux humains ? Tout a été tellement enrichissant, et nous avons appris notre façon de travailler. D’abord, se documenter en lisant des tas de recherches et parler avec les scientifiques. Puis métaboliser ces connaissances pour enfin les traduire en expériences. Les concepts scientifiques auxquels on se frotte sont souvent complexes, mais, pour nous, ils sont une formidable opportunité d’exploration. Depuis, l’essentiel de notre travail porte sur la science du vivant, les projets plus commerciaux sont là pour faire tourner le studio.

Ersin Han Ersin : Nous voulions raconter des histoires en portant un regard singulier sur le réel. On voulait voir ce que cela faisait de se mettre dans la peau d’un animal, voir à travers des objets ou observer des entités invisibles qui évoluent autour de nous comme l’oxygène… Toutes ces représentations ne sont possibles qu’en utilisant la réalité virtuelle. Dès le début, nous avons établi quelques règles. La principale était d’utiliser la réalité virtuelle uniquement quand l’expérience ne

Comment avez-vous vécu la période de pandémie, au studio ?

Ce fut l’une des années les plus chargées pour nous, car certains de nos projets sont entrés en phase de production. On a vraiment eu de la chance, car on a pu lire de nouveaux livres et tester des choses. On a tout un arsenal d’idées et de projets à concrétiser pour les années à venir.

Les animaux avec In the Eyes of the Animal, les arbres avec Treehugger, la photosynthèse avec We Live in an Ocean of Air… , votre travail semble dessiner une saga encyclopédique. Chaque chapitre semble être relié aux autres.

La littérature scientifique autour de la nature et des nouvelles façons d’interagir avec elle est un champ immense. À chacun de nos travaux, nous sommes obligés de laisser de côté beaucoup d’idées. Souvent, elles formeront l’essence du projet suivant. C’est ce qu’il s’est passé entre Treehugger et Ocean of Air. Mais si nous avions des ressources illimitées, nous pourrions tout arrêter et avoir suffisamment de matière pour les vingt prochaines années !

Vous représentez le vivant au micropixel près. Pour cela vous utilisez des techniques d’imagerie réservées à certains experts : des ingénieurs, des architectes. Comment mettez-vous la main dessus ?

Là encore, on suit de très près toutes les recherches en cours. Souvent, il faut attendre dix ans avant que des technologies présentées en conférences et dans les laboratoires des universités ne soient accessibles au public. À titre d’exemple, on utilise beaucoup la technologie LiDAR, une sorte de radar laser qui permet de créer facilement une représentation 3D d’un espace. Elle n’est que peu utilisée dans le monde de l’art, car elle est gourmande en temps et en coût, mais elle est ultra-précise pour capter le réel, car elle dépasse de loin l’acuité visuelle humaine ! On l’a utilisée pour scanner la forêt que l’on voit dans In the Eyes of the Animal, mais aussi dans la forêt amazonienne et dans les White Mountains (New Hampshire) l’année dernière.

Le futur de MLF, vous le voyez comment ?

À terme, on espère pouvoir connecter tous nos projets, et pourquoi pas imaginer une expérience plus holistique à laquelle le public pourrait accéder à partir de n’importe quel écran. Avec les progrès de la réalité augmentée, je pense que dans les dix prochaines années, nos appareils vont totalement changer de format. Ils vont devenir presque invisibles. On accèdera à du contenu via des casques, des lentilles ou des lunettes. La vraie question qui reste, celle que nous ne devons jamais cesser de nous poser, est celle du sens. Qu’est-ce que ça fait de voir l’intérieur d’un arbre ? Qu’est-ce que ça fait d’identifier une plante en la regardant à travers des lunettes, de comprendre son fonctionnement et de voir la quantité d’oxygène qu’elle produit ? Qu’est-ce que cela aura comme impact de visualiser des phénomènes naturels qui étaient jusqu’à présent invisibles ? Est-ce que cela favorisera notre compréhension du monde, notre sensibilité au beau ?

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