ttention, édito (con)sensuel. Nous vivons dans une époque où la tiédeur est de mise pour ne pas choquer, ou du moins froisser, quiconque, masquant nos convictions les plus (in)avouables sous le voile du politiquement correct. Si la conviction était une femme, elle pourrait bien se dissimuler sous une nuisette en voile, et ça serait alors beaucoup plus amusant… Mais ne suscitons surtout pas de mauvaises pensées ! Molière faisait bien déjà dire dans Le Tartuffe en 1664 « Couvrez ce sein que je ne saurais voir. Par de pareils objets les âmes sont blessées, et cela fait venir de coupables pensées ». Vous serez donc déçus en lisant plus en avant ce nouveau numéro du magazine Peel, car vous verrez des seins, ceux des modèles posant dénudés pour Clémence Veilhan. Evidemment, vous comprendrez bien le second degré ici. Vous, lecteurs éclairés, à l’esprit libre, saurez comprendre les questionnements ouverts par cet artiste et tous les autres que nous vous proposons de découvrir. Et de la liberté, vous en trouverez plus loin, avec le travail que réalise TVK, ce studio d’architectes qui a redessiné la place de la République à Paris, un lieu qui, ayant oublié les assauts de la Grosse Bertha, est devenu désormais agora citoyenne contre l’obscurantisme et spot de skate… freestyle. De la liberté vous en trouverez aussi dans les paroles du rappeur rémois Gavin Meidhu, donnant raison à la maxime selon laquelle « il ne faut jamais dire : Fontaine je ne boirai pas de ton eau » pour ceux qui seraient encore hermétiques au hip hop. Et puis, comme c’est le printemps, on peut imaginer ici une certaine Dolce Vita à la rémoise, sans baignade dans la fontaine de Trevi ni naïade aujourd’hui défunte, mais avec quelques curiosités au détour des rues, même si un lieu qui a particulièrement marqué ces deux dernières années la vie culturelle rémoise, le Carreau des Halles, vient de fermer… Merci à Edouard Duntze et à l’équipe du Carreau pour les moments culturels et les rencontres inoubliables, une coupe de Champagne, une bière ou plus sagement un café à la main, vécus en ce lieu ! Après ce court prologue, nous perçevons votre impatience et terminons ici notre bavardage. Bonne lecture !
Le magazine Peel est édité par Diabolus SARL. Tous droits réservés. Toute reproduction, même partielle est interdite, sans autorisation. Le magazine Peel décline toute responsabilité pour les documents remis. Les textes, illustrations et photographies publiés engagent la seule responsabilité de leurs auteurs et leur présence dans le magazine implique leur libre publication. Le magazine Peel est disponible gratuitement dans plus de 100 points de dépot à Reims. Magazine à parution bimestrielle. Prochain numéro en mai 2015.
COFONDATEURS
Benoit Pelletier Alexis Jama Bieri Julien Jacquot ÉDITEUR / DIR. DE PUBLICATION
Benoît Pelletier
RÉDACTEUR EN CHEF ARTS / MUSIQUE / ÉDITO
Alexis Jama-Bieri
RÉDACTEUR EN CHEF ARCHITECTURE / DESIGN / ACTUS
Julien Jacquot
DIRECTEUR CRÉATIF
Benoît Pelletier
RÉALISATION GRAPHIQUE
www.pelletier-diabolus .com
WWW.MAGAZINEPEEL.COM
NOUS CONTACTER : 03 26 36 29 39
HELLO@MAGAZINEPEEL.COM
POUR DEVENIR ANNONCEUR, DIFFUSEUR OU PARTENAIRE : 03 26 36 29 39
BP@MAGAZINEPEEL.COM
14 PLACE DU CHAPITRE BP 2146 51081 REIMS CEDEX
05 / FEEL
PEEL
PLAYLIST / PEEL EAT / OBJET DU MOIS / PEELBOARD
09 / MOODOÏD 10 / GAVIN
HEIHDU
12 / MANUFACTURE
PASCAL
16 / TVK / PIERRE
TREVELO
ALAIN
22 / LA NUIT NUMÉRIQUE #12 28 / CARTE
À
BLANCHE
NICOLAS ANDRÉ, DESSINATEUR
30 / CLÉMENCE 34 / ELLE
PAR
BRÛLE
CAROLINE GUIELA NGUYEN
36 / LAUREN
CONTRIBUTEURS
44 /
VEIHLAN
MARSOLIER
ÉRIC CHARPENTIER
46 / VILLA 48 / PAGES ALEXIS JAMA-BIERI
JULIEN JACQUOT
Reims
Paris & Reims
dirigeant culturel
PRIEUR DE LA MARNE
tendresse & musique Reims
architecte
CAROLINE GUIELA NGUYEN
metteur en scène Paris
BENOÎT PELLETIER
directeur créatif photographe Reims
JEAN DELESTRADE
souplesse & décontraction Reims
50 / UN
& IMAGES
CONNU DU MOIS
ALAIN, L’ACCORDÉONISTE
LE TIMIDE INSISTANT UNE PLAYLIST SUGGÉRÉE PAR PRIEUR DE LA MARNE Serge Gainsbourg
Ariel Pink’s Haunted Graffiti
10CC featuring Bernard Dimey
DAYZED INN DAYDREAMS
LA NUIT I’M NOT IN LOVE
Vous allez me dire que ce n’est pas très original d’inclure Gainsbourg à une playlist. Et vous aurez raison. Seulement voilà… Gainsbourg est l’incarnation de la figure du timide insistant, spécialement dans sa période rive gauche. Car il est tout à fait possible d’être à la fois timide et insistant… Discret et très présent. Sur la réserve tout en étant très impertinent. Derrière un poème des Fleurs du Mal, onduler sur un fond de bossa nova. Préciser avec les vers d’un autre, l’exact cheminement de sa pensée pour te parler des âcres parfums de ta chevelure profonde…
Découvert dans un bar de la rue Emile Zola il y a quelques années maintenant, cette créature d’Ariel Pink est aujourd’hui devenue l’un des sex symbols de notre époque. Ses chansons ont toujours ce parfum d’insouciance que j’aime tant. Celui des années où nous allions au ciné l’après-midi, et que nous rencontrions dans la file d’attente des filles du lycée tout bonnement inaccessibles. Il m’arrive encore de me retourner (un air d’Ariel Pink en tête) quand je fais la queue, me demandant si je ne vais pas recroiser son regard.
Comme dans le précédent numéro de Peel, je recommande, non, je décrète qu’il est désormais d’usage de se lancer dans un projet de déclaration amoureuse en s’appropriant sans vergogne les mots de deux artistes. Cette fois-ci j’ai choisi de vous conseiller vivement les divagations nocturnes sur les couleuvres à collier et les crapauds de Bernard Dimey associées au tube planétaire de 10CC. Messieurs, adressez donc vos requêtes et vos plus fines observations au courrier des lecteurs de Peel. Votre avis quant à la pertinence d’une telle entreprise m’intéresse !
Koudlam
Melody’s Echo Chamber
Divine Comedy
STONED
SHIRIM
A LADY OF A CERTAIN AGE
LA CHEVELURE
Dans cette playlist #2, Prieur de la Marne invite à une promenade mémorielle, pop, romantique, une échappée toute en tendresse et musique.
© JULIEN JACQUOT
soundcloud.com/ prieurdelamarne
La postérité retiendra de 2014 la débâcle du Brésil face à l’Allemagne, ou le « Happy » de Pharrell Williams… Prieur de la Marne retiendra ce merveilleux titre. Damon Albarn et Tony Allen ont réinventé une couleur et un taux d’humidité. Une sensation entre l’engouement et le malaise amoureux. Cette sensation ne peut être ressentie intensément qu’au cours des 5 minutes 38 secondes de l’écoute intégrale de cette chanson… Qu’on soit amoureux ou non.
(Prieur de la Marne rework)
En parlant d’oiseau, la revoilà… Cette belle colombe de Melody Prochet prépare son retour telle une hirondelle. « Shirim » est le premier titre d’un nouvel album qui s’annonce comme une superbe embardée psyché, m’évoquant les bulles de lampes à lave de nos parents.
Cette chanson de Neil Hannon traite des affres du temps qui passe et tend à démontrer qu’ils peuvent ne plus avoir aucune prise sur la trajectoire d’une femme… Tant qu’elle est convoitée comme aux premiers jours. Entendez messieurs par convoitise, l’idée de rester dans la séduction permanente. Le désir, nous savons tous qu’il disparait fatalement !
QUOI CHÉRI CHARLOT TYPE Casse-Croutier OÙ 33 Rue Richer 75009 Paris PLAT LE « RAY DE CHARLES » INGREDIENTS Du Raifort, Jambon Serrano, Comté 18 mois, Pousse d’épinards, oignons nouveau, cornichons et petit piment vert Guindillas au vinaigre dans un Pain Toasté. BOISSON NAIVE NEW BEER. La bière ambrée créée par Distrikt et le groupe électro les Naïve New Beaters PRIX 11 €
LE
JAMBON DE REIMS
DE LA BOUCHERIE DU FORUM
18 place du Forum à Reims
8 ÉVÈNEMENTS À NE PAS RATER EN MARS - AVRIL
QUOI DISAPPEAR PLASTIC WORLD QUAND 16 MARS QUI Highlife Recordings. : Compilation du label rémois. www.highliferecordings.com
© Charlélie Marangé
www.lesbains-paris.com
www.cartonnerie.fr
© Émilie Vast
QUOI PORTES OUVERTES QUAND JUSQU’AU 28 MARS OÙ Médiathèque de Cormontreuil. Place de la République 51350 Cormontreuil. : Exposition de la plasticienne native d’Épernay Emilie Vast dans laquelle est présenté une série d’illustrations d’oiseaux ; personnages clés de son dernier livre paru en octobre dernier : « le chant de Colombine ». www.emilievast.com
QUOI LES NOCES FELINES QUAND LE 18 AVRIL 2015 OÙ Au Palais du Tau de 20h à 3h. : Concerts Afrobeat& Electronic (Jungle by Night, Daedelus, Umémé…) + Marché de créateurs & Disquaire Day. Ancien C.I.O. (de 11h à 19h).
© Niark1
www.weezevent.com
© Jean-Louis Fernandez
QUOI ELLE BRÛLE QUAND DU 9 AU 17 AVRIL QUI Écriture au plateau Les Hommes approximatifs, textes Mariette Navarro, mise en scène Caroline Guiela Nguyen. OÙ À l’Atelier de la Comédie. : Inspiré d’un fait divers, Elle brûle raconte l’histoire d’une Emma Bovary d’aujourd’hui, dans un conte cruel de la folie ordinaire. www.lacomediedereims.fr
QUOI BOWIE QUAND JUSQU’AU 31 MAI OÙ Philharmonie de Paris. 221 Avenue Jean Jaurès, 75019 Paris. : Apres avoir fait un carton à Londres, l’exposition « Bowie » s’installe dans le nouveau temple de la musique classique récemment inauguré « sans » l’architecte Jean Nouvel. philharmoniedeparis.fr
© Masayoshi Sukita
QUOI BAINS DOUCHES QUAND FIN MARS OÙ Rue du Bourgl’Abbé, 75003 Paris. : Renaissance d’un lieu mythique de la nuit parisienne au mois de Mars, sous forme d’hôtel restaurant 5 étoiles, re-décorés par le designer Denis Montel dans un esprit chic « à la française ».
QUOI BENJAMIN CLÉMENTINE QUAND LE 27 MARS OÙ La Cartonnerie. : Concert de l’artiste lauréat du prix “ Révélation Scène ” aux 30ème victoires de la musique.
© FOC KAN
bromancerecords.com
© NC
© LE CREATIVE SWEATSHOP
QUOI BRAVA QUAND DEPUIS LE 2 MARS QUI Brodinski : 1er album de la star rémoise mêlant subtilement les codes de l’électro et du hip hop.
MUSIQUE POP
Moodoïd crée un univers hétéro-
Tu viens d’une famille de musiciens,
Pourquoi le nom Moodoïd ?
clite mais cohérent, alliant pop, langue de Molière et références glam 70’s. Le public rémois a eu le plaisir de voir Moodoïd en live à la Cartonnerie il y a presque un an, plusieurs mois avant la sortie de son premier album « Le monde Möö » immédiatement salué par la critique. Rencontre avec Pablo Padovani, auteur, compositeur, chanteur et guitariste du groupe parisien de pop psychédélique et progressive.
c’est ce qui t’a donné envie de faire
Lors de mon séjour en Suisse, je vivais plein d’histoires émotionnelles et chaque chanson, représente un souvenir, une émotion particulière. Le mood représente cet état d’esprit, auquel j’ai ajouté oïd parce que ces chansons sont étranges. Moodoïd signifie donc « sentiment étrange »… et en plus, je trouve le mot Moodoïd joli !
PROPOS RECUEILLIS PAR
Svenja-Michell Baur Alexis Jama-Bieri
de la musique ?
Dès mon enfance, j’ai grandi dans l’univers de la scène. J’étais souvent backstage à attendre mon père (le saxophoniste de Jazz Jean-Marc Padovani, ndlr). Mais l’événement déclencheur date de mes 8 ans. Je vivais alors à la campagne dans le Lot et j’allais dans une école de musique où il y avait un prof qui avait monté un groupe de percussions d’enfants et nous emmenait faire des tournées avec une dizaine de xylophones. Ce professeur nous a appris à aimer la scène. À mon adolescence, j’ai donc voulu faire des spectacles, ce qui m’a conduit à créer des chansons et des déguisements et je n’ai jamais cessé depuis.
MOODOID
TEXTE
Quelles sont tes influences ?
J’aime les groupes de musique progressive qui ont fait des rapprochements entre le jazz et le rock, j’aime le krautrock, le rock expérimental… Je trouve également qu’il y a des gens qui font des choses très bien en ce moment. Parmi mes influences, il y a notamment Kevin Ayers, Robert Wyatt, Neu, Mgmt et Tame Impala. Qu’est-ce qui t’a donné envie de créer Moodoïd en 2011 ?
En sortant du lycée à 18 ans, je suis allé faire des études de cinéma à Paris. À la fin de mes études, je suis parti 6 mois en Suisse sur le tournage d’un film. Je me suis retrouvé seul le soir dans une petite ville et j’écrivais des chansons avec ma guitare pour passer le temps. Quand je suis rentré à Paris, j’avais tout un stock de chansons. J’ai alors maquetté mes chansons et cherché des musiciens, puis le label Entreprise m’a contacté après avoir entendu mes maquettes sur internet. Moodoïd était né.
_© Fiona Torre
Alexis Jama-Bieri
Quel est le concept de ton album ?
Il s’agit d’une histoire qui se passe sur une planète molle, inspirée par le surréalisme en général et Dali en particulier. Tu es guitariste à l’origine, tu joues notamment sur une 12 cordes, mais n’astu jamais eu envie d’étendre ton jeu à d’autres instruments à cordes ?
J’aimerais en effet beaucoup apprendre à jouer du Saz car je suis passionné de musique orientale. Sur disque, je fais d’ailleurs toujours doubler mes guitares par des instruments traditionnels turcs pour obtenir la texture que je recherche.
moodoid.com
M U S I Q U E RA P
En ce début d’après-midi ensoleillé préfigurant le printemps, je déguste un espresso dans un café du quartier des halles avant de débuter l’interview de Gavin Meidhu. Je reconnais rapidement le jeune rappeur né dans les 90’s qui vient de sortir son 1er EP intitulé « En attendant de danser sous un décor sombre ». Il s’installe au bar et je lance l’enregistrement au milieu des conversations animées du lieu. Gavin Meidhu c’est une mystérieuse anagramme.
GAVIN MEIDHU
Peux-tu nous parler de tes débuts dans le rap ?
J’ai débuté le rap vers l’âge de 13 ans. Un de mes amis avait un home studio avec un micro, une carte son et plusieurs trucs permettant de faire de la musique. Un jour, pour s’amuser, on a fait un morceau de rap en utilisant une instrumentation de Wu-Tang clan. J’ai alors continué à faire du rap de plus en plus régulièrement, en y apportant une réelle écriture et de la technique. Mais à l’origine, ton univers était-il uniquement rap ?
Mon 1er souvenir de disque date de l’époque de l’école primaire, j’étais en cm1 et j’écoutais Smack my bitch up de The Prodigy avec un ami. Mes 1ères réelles influences musicales me sont venues de ma mère, qui écoutait beaucoup de Baschung et de Miossec dont j’adorais les textes. Le 1er disque que ma mère m’a donné c’est Nevermind de Nivarna, la veille de mon entrée au collège. J’ai été fasciné par cette musique pendant au moins 1 an, si bien que je connaissais l’album par cœur. Le rap est
arrivé un peu plus tard par l’entremise des grands frères de mes amis d’enfance qui avaient environ 5 ans de plus qu’eux et par mon père qui a été le premier à me faire écouter NTM. Je trouvais qu’NTM faisait une bonne synthèse entre le côté rock énervé et engagé et le côté rap avec le flow, les textes et l’attitude. Ils faisaient un constat sans obliger les auditeurs à faire quoi que ce soit et j’appréciais ce regard non moralisateur (je ne supporte pas ceux qui essaient de véhiculer leur bonne conscience). Comment décrirais-tu ton rap ?
C’est la vision d’un mec né en 90 qui n’a pas forcément de repères et qui pense qu’il n’y a plus d’icônes, ni politiques, ni musicales.
Comment procèdes-tu pour créer un morceau ?
Je travaille avec Slivanoë mon beatmaker depuis 2 ans. Il m’envoie une boucle qu’il a produite de son côté et j’écris dessus, puis on travaille à deux en studio pour faire évoluer la production en fonction du texte et le texte en fonction du morceau. Mon 1er EP est notre 1er travail qui a une véritable couleur qui préfigure ce qu’on va faire ensuite. Qui a conçu la photo de la cover de ton 1er EP?
C’est Mokhtar Gordon. Il m’a enterré durant 1 heure, ne laissant sortir du sol que mon visage, avant d’effectuer le cliché imaginé ensemble. Cette expérience particulière donne un résultat très réussi ! Quels sont tes projets ?
Quand on écoute les 5 titres de ton EP, notamment « Brigitte Fontaine », on ressent une part importante d’humour et de second degré dans ton travail…
On dit souvent que je suis cynique. C’est ma façon d’écrire et de voir les choses, mais ce n’est pas un cynisme complet. J’essaie surtout d’avoir un regard critique sur la société d’aujourd’hui. Je trouve que les choses sont déjà assez noires comme ça, alors s’il fallait tout le temps en parler en ayant la larme à l’œil, ce serait vite lassant !
Je travaille en studio sur l’album qui devrait idéalement sortir fin 2015. Pour cet album, je travaille toujours en duo avec Slivanoë, mais nous ferons également appel à des musiciens extérieurs qui pourraient amener une sensibilité complémentaire. D’ici cette sortie, il y aura peut-être un 2e EP.
h t t p s : // f r - f r . f a c e b o o k . c o m / g av i n m e i d h u
Oui, c’est un peu un regard d’ethnologue qui observe ses contemporains…
Je cherche toujours à prendre du recul vis-à-vis de ce que je vois, et l’humour arrive très vite car il y a tellement de choses qui paraissent grotesques qu’elles en deviennent naturellement drôles.
TEXTE
Alexis Jama-Bieri
MILAMARINA POUR HERMANN&FISCHER PAR SUBLIME FRACTURE INC.
© Mokhtar Gordon
M U S I Q U E RA P
63, RUE DE CHATIVESLE / REIMS
+33 (0) 326 501 708
MODE
MODE
M A N U FAC T U R E PA S C A L
elle venue ?
Une très forte envie de travailler ensemble et un indescriptible besoin de travailler le cuir. Son odeur son touché. Nous nous sommes intéressées aux traitements, aux qualités, à la façon, à la technique. Les possibilités sont infinies c’est une matière vraiment passionnante. (Même si le plastique c’est fantastique). Et puis étant toutes les deux mamans de deux garçons montés sur ressors, nous avons eu l’idée de sacs SOLIDES, des sacs “ boucliers ” pour contenir nos vies et nous aider nous femmes libérées à vivre nos aventures urbaines. Habitant à Brooklyn, impossible de faire autrement que de se mettre à son compte pour faire parties de ce tourbillon créatif. Et puis ayant toutes les deux trente ans et +, nous nous sommes dit “ it’s now or never ”, comme disait Elvis. Si vous avez grandi dans les mêmes villes, vos parcours sont toutefois très différents. De quelle manière travaillezvous ensemble ?
Nous sommes très complémentaires, c’est cliché mais vrai, plus on avance plus on s’en rend compte. Camille est créatrice de mode, a travaillé pour des grands designers parisiens, donc très axée sur le développement du produit.
marque de prêt-à-porter à Washington. Après avoir vécu à différents endroits et effectué de nombreux voyages, les deux sœurs décident de se retrouver en famille à Brooklyn pour lancer une marque de maroquinerie faisant hommage à leur ancêtre.
Margot travaillait dans le monde merveilleux du Champagne en marketing et communication. Mais même si nous avons chacune nos expertises, on fini toujours par tout faire ensemble. On se redécouvre et franchement c’est plutôt sympa de bosser en famille, pour l’instant…
Des artistes ou designers vous ont-ils
Qu’y a-t-il de différent dans le fait de travailler avec sa sœur ?
Tes pauses déjeuners sont tout de suite beaucoup plus sympas. Et quand ça chauffe un peu on se dit les choses rapidement, on est business partners mais on est sœurs avant tout. On s’écoute et une envie commune de voir chacune réussir.
inspiré indirectement dans votre travail ?
C’est avant tout une histoire de famille. Tout le monde est plus ou moins impliqué (les personnalités se révèlent attention !). Nous avons été inspirées par le fondateur de Manufacture Pascal (1854), notre arrière arrière grand père Louis Xavier Pascal qui a envoyé trois de ses fils en Nouvelle Zélande (trois fils sur onze…) à la recherche des plus beaux textiles, de cuir et toile de jute. Les trois frères ont finalement décidé de rester sur place et de travailler avec les communautés locales et les Maoris. Ils ont par la suite commencé leur propre élevage de moutons et de chevaux de course en 1900.
Qui serait, selon vous, la personnalité féminine la plus représentative de votre marque ?
La marque a une double face, aventurière avec une note féminine, donc ça serait la fille cachée d’Indiana Jones et d’Inès de la Fressange.
3
Comment l’idée d’un tel projet vous est-
Margot et Camille Pascal ont passé une grande partie de leur jeunesse à Reims. L’une fit ensuite ses armes dans le monde du champagne à Londres chez Veuve Clicquot puis à New York chez Ruinart. L’autre choisit la mode à Paris en passant chez Dior et Louis Vuitton puis créa sa propre
MODE
TEXTE
Julien Jacquot PHOTOGRAPHIES
Zhenia and Tanya Posternaks’
La première collection est un hommage à ces hommes et chaque sac porte le nom de leurs meilleurs chevaux de course. Aujourd’hui l’histoire continue avec deux sœurs, à Brooklyn. Vous êtes plus sac de Bernadette Chirac ou de celui de Marie Poppins ?
Tellement Marie Poppins avec une pincée de Bonnie Parker. Comment juge-t-on une femme selon son choix de sac à main ?
Il n’y a plus vraiment de règles aujourd’hui, une femme qui s’assume cela se voit tout de suite, elle porte des Stan Smith avec un sac Celine, des talons aiguilles avec un sac besace, c’est le clash des genres. Il faut se faire plaisir et se faire confiance avant tout. Ce qui est louche c’est une femme sans sac. Vous êtes entourées de garçons dans votre famille. Que pensez-vous des hommes qui portent des sacs à main ?
On aime les hommes qui portent des chaussettes à pois et des chaussures vernies, qui écoutent les Doors, qui jouent à la pétanque en buvant un pastis, qui babysittent nos enfants quand on sort entre filles pour boire nos martinis, qui assument haut et fort leur jolie banane en cuir !
Le voyage semble partie intégrante dans
Auriez vous pensé créer la même
votre processus de création. Quel pays
marque de sac en France ?
ou quel voyage vous a le plus marquée ?
C’est une question piège. Chaque voyage nous inspire pour différentes
Pour le moment non, notre but est de travailler localement avec ces artisans qui sont fantastiques.
raisons. Le Kenya pour ses saveurs et ses sourires, le Japon pour ses lignes
Vous avez vécu et voyagé dans de nom-
impeccables et ses nippons, la Polynésie
breuses villes dans le monde, vous avez
pour ses Tahitiens tatoués sur les fesses, le Mexique pour ses pierres ancestrales et ses jalapenos. Pour Margot, l’Argentine a été l’un des plus marquant, ses vins, ses hommes, ses accents, ses alfajoles au dulce de leche, ses viandes, sa culture latino-europeene, mais surtout cet accueil si franc. Pour Camille, c’est l’Inde, elle n’oubliera pas ses ablutions dans le Gange, l’anarchie des routes, les bébés aux yeux maquillés, le bonheur des gens, les couleurs, les couleurs, les couleurs, les contrastes.
aussi fait un passage à Reims ; quelle image ou anecdote garderiez de cette ville ? Quelle y serait votre madeleine de Proust ?
Reims c’est la ville de nos premiers amours, donc nous avons pas mal de madeleines dans nos sacs. L’une d’entre nous a d’ailleurs épousé sa madeleine rémoise. Reims c’est surtout nos années collèges à Jean XXIII, les huitres du Boulingrin, les skateurs de la Joke and Ride team, la place Léon Bourgeois. Et quelques bouteilles de champagne dans le jardin de l’Hôtel du Marc. Quel type de sac correspondrait le plus à la rémoise ?
Pourquoi avez vous choisi de travailler avec le cuir ?
Un défi. Des souvenirs d’enfance, un Papa qui monte à cheval, une maman
La rémoise a besoin de l’indispensable « Mascotte ». Un sac assez grand pour tenir son ordinateur, une bouteille de Champagne et sa revue Peel.
ultra coquette. Une envie furieuse d’avoir du cuir entre les mains et d’en faire un produit dont nous rêvions.
w w w . m a n u fac t u r e pa s c a l . co m
4
MODE
La Folle Journée ou le Mariage de Figaro texte Beaumarchais mise en scène Rémy Barché
19 > 28 A
R
S
Illustration Gg
M
www.lacomediedereims.fr
TVK A R C H I TE CTU R E
PIERRE ALAIN TREVELO
Les architectes Pierre Alain Trévelo et Antoine Viger Kohler ont fondé l’agence TVK en 2003. Tout deux issus de l’École de la Ville et du Territoire, ils créent en 1997 l’association TOMATO traitant de l’aménagement des infrastructures délimitant les axes périphériques de Paris. Cette recherche collective fait l’objet de nombreuses publications, de conférences et d’une exposition au Pavillon de l’Arsenal intitulée « NO LIMIT «. L’agence TVK devient lauréate au Palmarès des Jeunes Urbanistes en 2005 et aux Nouveaux Albums des Jeunes Architectes en 2006. Quelques années plus tard, ils remportent le projet de réaménagement de la Place de la République de Paris livrée en 2013, qui fut récemment classée parmi les lieux préférés des parisiens.
_Arcueil © Julien Jacquot
K
A R C H I TE CTU R E
Incontestablement la situation la moins attendue a eu lieu à la suite des attentats contre Charlie Hebdo. Dès les premiers instants, la place a naturellement joué un rôle symbolique très fort : elle a été le lieu des premiers rassemblements spontanés jusqu’à la marche républicaine qui a permis d’accueillir une foule incroyable. La grande surface continue, la quantité d’espace disponible a rempli son rôle, elle a prouvé sa capacité à rassembler. La statue a également joué un rôle central puisqu’elle a fait office de véritable mémorial.
des villes nouvelles en Europe et en France il y a quelques dizaines d’années. De nos jours, il y a en a encore qui se font à des petites échelles. Je trouverais intéressant et étonnant de faire un tel projet en Europe, dans le vieux continent. Là où le moindre centimètre carré est occupé, domestiqué, et entretenu pour essayer d’y trouver une parcelle de travail théorique. La référence qui me vient en tête est Priène, en Grèce. Une ville quadrillée de la Grèce Antique, qui est comme une sorte d’archétype grec. Il faudrait trouver une situation archétypique, avec une pente légère et continue par exemple. J’aimerais faire une ville méditerranéenne, parce qu’il s’agit d’un sujet ancestral et extraordinaire pour nous.
Le skate est également très présent, on parle beaucoup de la
Y a-t-il une part d’insouciance dans le projet d’urbanisme, qui
place comme le plus grand « spot » de Paris.
dépasse la perception urbaine. Comme votre projet pour la ville
Votre projet phare est le projet de la Place de la République à Paris, livré en 2013. Quelle a été depuis, la situation la plus surprenante arrivée sur cette place à laquelle vous avez pu assister ?
Oui, c’est surprenant que ça ait pris de telles proportions, de Bordeaux, par exemple, qui recouvre une surface immense. mais on imaginait bien que des personnes allaient y skater. Faut-il le percevoir avec une part d’insouciance ou peut-être de Nous l’avions déjà vu pendant le hasard ? chantier, les skateurs étaient assez Je ne dirais pas d’insouciance, mais innovants dans la façon de s’approil y a évidemment une part de subprier les lieux. jectif, de personnel et de sensible. Une autre chose un peu décalée Je ne fais pas trop de différence nous avait également étonnés. entre les disciplines. Il y a souvent L’été dernier, alors qu’il faisait très cette distinction entre architecte et chaud, les enfants jouaient véritaurbaniste mais pour moi, il s’agit au blement dans le miroir d’eau et la final d’architecture. Et je l’aborde fontaine, donc dans un centimètre comme un architecte. Je ne crois d’eau, c’était assez beau à observer. pas que l’échelle créée une distance Nous avions imaginé une telle utilisupérieure. En tout cas, ce n’est pas sation de la place, mais pas de cette souhaitable. ampleur. Les familles s’asseyaient, s’allongeaient directement sur les Vous avez réalisé des projets aussi dalles, avec parfois une petite serbien pour des logements individuels, _Place de la République © TVK viette de plage. notamment la Maison de Sèvres, que pour des logements collectifs. AborMaintenant que l’on vous a donné
dez-vous la question du logement en
l’opportunité de travailler sur un des plus beau monument de
fonction de votre connaissance ou non des occupants ?
Paris, quel serait le monument dans le monde qui pourrait vous
Pour une maison c’est nécessairement différent. Le fait de travailler pour une famille relève presque de la psychanalyse, et cela se retrouve au final dans le projet. Quand il n’y pas cet échange direct avec l’habitant, cette dimension n’est plus présente. Il n’y a plus de dimension d’immersion dans une intimité. Mais il reste l’idée de soi comme habitant. On travaille avec une tension émise entre ce qui vient de soi et la recherche d’une certaine neutralité. Le travail étant de construire non pas forcément quelque chose de générique mais de « neutre », ce qui est bien plus intéressant. Un peu comme une réduction de caractéristiques et de problématiques qui sont sans doute personnelles au départ. Il y a quelque chose qui nous intéresse dans le logement, qui est de savoir comment ils évoluent. Et le neutre permet de travailler aussi sur cette problématique.
inspirer pour un autre projet ?
Le palais du dioclétien à Split. C’est un palais romain qui a été refait mille fois et qui continue d’être habité aujourd’hui. Une sorte de ruine à l’intérieure de laquelle, depuis près de deux mille ans, toutes les époques et religions se sont succédées, avec notamment des églises à l’intérieur mêlées à des habitations… Un monument hybride, vivant, déconstruit, reconstruit, restant à l’état de ruines. Les ruines m’ont toujours inspiré. Si comme Oscar Niemeyer avec le projet Brasilia, on vous donnait l’opportunité de dessiner une ville complètement nouvelle. Dans quelle partie du monde aimeriez-vous la réaliser ? Sur quelle autre ville baseriez vous votre réflexion ?
Ce n’est pas comme s’il s’agissait d’une question morte. Il y a eu
A R C H I TE CTU R E
_Place de la République © Clément Guillaume
8
A R C H I TE CTU R E
A R C H I TE CTU R E
Vous êtes déjà allé voir comment évoluaient vos réalisations ?
Nos projets sont assez récents, mais par exemple à Valenton, un photographe a fait des photos dans les patios. Elles sont très intéressantes dans la façon de voir comment les habitants s’approprient un même espace dans chaque appartement. Il s’agit d’un même type de maisons accolées ayant des tailles différentes. Un locataire a par exemple mis un faux gazon pour créer l’illusion d’avoir un espace vert privatif.
intéressant n’est pas vraiment condamnable. Le problème vient aussi du fait qu’on attend des architectes qu’ils le soient. Il y a beaucoup d’architectes qui y croient, parce que c’est leur unique porte de sortie. L’architecte n’a pas le pouvoir qu’il souhaiterait avoir et cherche alors à devenir intéressant. En réalité, le projet spatial peut avoir beaucoup de pouvoir. Il change les choses, il les qualifie, il résout des problèmes. En cela l’architecte peut être « good » et utile, en étant juste sans avoir besoin de faire l’intéressant.
Que pensez-vous de l’évolution du statut d’architecte auteur devenant de plus en plus un maitre d’ouvrage ?
La notion de l’architecte créateur est sans doute une vision caricaturale et un peu ringarde, alimentée par le regard de la société, et qui renvoie au « génie créatif ». La notion d’auteur est plus intéressante, car elle a trait à la construction d’une démarche et d’une position singulière dans la discipline. Ce que nous faisons avec les différents types d’ouvrages sur lesquels nous travaillons est assez complexe et hybride. Je crois que la notion d’auteur ne se définit pas tant comme point de vue particulier sur le monde ou sensibilité personnelle. C’est bien plus dans la façon dont on l’exerce, dans la démarche elle-même, projet après _Arcueil © Julien Jacquot projet. La démarche est plus intéressante que l’auteur en lui même. L’architecture peut et doit exister en tant que discipline, indépendamment de ceux qui la pratiquent. Indépendamment de ceux qui l’incarnent. C’est un vrai appauvrissement de l’architecture quand elle n’est incarnée que par ses figures. À ce propos que pensez vous de la citation de l’architecte Ludwig Mies Van der Rohe qui disait « I don’t want to be interesting,
Pour le coup, c’est un sujet très intéressant…
Ah non, il faut que ce soit « good » ! Pourquoi l’architecte selon vous ne porte-il pas de cravate ?
À mon avis ce n’est pas très profond. C’est simplement pour être légèrement décalé par rapport aux codes et sûrement pour se simplifier la vie. Si vous deviez comparer le métier d’architecte à une autre profession ?
La comparaison serait forcement incomplète mais je dirais celui de réalisateur. Cette comparaison a néanmoins ses limites parce que le cinéaste se réduirait à la production de quelque chose d’abstrait. Ça reste une œuvre culturelle et artistique donc ça n’impacte pas en soit le réel de manière aussi concrète même si ça impacte évidemment notre imaginaire collectif. La comparaison s’appliquerait également dans la dimension collective du métier de réalisateur. Cela intègre énormément de compétences, de regards différents, tous mis en mouvement par des problématiques assez liées à la personne qui les dirige.
I want to be good » ?
Je partage assez ce point de vue étant un grand fan de Mies. Je ne sais pas si j’emploierais le terme « good » bien que je comprenne tout à fait ce qu’il veut dire. Une fois transposé dans notre époque, cela peut avoir du sens. Les architectes sont parfois amenés à devoir « faire les intéressants ». Ce qui est encore différent de « to be interesting ». Être fondamentalement
Si vous deviez faire dessiner votre maison, à quel architecte demanderiez-vous de le faire ?
À mes filles (qui sont petites).
www.tvk.fr
TEXTE
Julien Jacquot
RANGE ROVER EVOQUE landroverMfr
fffllfbII€ RPg
R@f'fWyf
lfffftff4ff bP’èIff@f@IMS Tél,fIlfè3fL9fP9f9bftff,fHreimsbritishcarsMcom
y'OV@f/f'@YON6f,ffffMf RPgffWfffIèkIPkèIP’ffff@fbfffff6’f'VMMfff, ff@fbfffff6’f'f ffffffff,f’lfLPIfM WfffW@fPLLLk L’fRLk PIIfgf,ff’pLff9p€ftfWO è Rgk kmgf,ffPèLffP€PM
N U IT N U MÉRIQU E
A N T O I N E S C H M I T • J O Ë L L E
_PAULINE SAGLIO « Rewind » Installation interactive, Suisse / France, 2013
N U IT N U MÉRIQU E
Antoine Schmitt est plasticien urbain, Joëlle Aeschlimann et Pauline Saglio sont designer d’interactions. Ces 3 artistes participent le samedi 14 mars 2015 à la 12e nuit numérique, cette année poétique, organisée par le centre culturel SaintExupéry. Antoine Schmitt présentera une installation participative dans toute la ville, Joëlle Aeschlimann et Pauline Saglio interviendront quant à elles collectivement hors les murs Quelles sont vos influences ?
Antoine Schmitt : J'ai été très influencé par l'art abstrait (Malevitch, Klee, Kandinsky), par la littérature de science-fiction (Philip K. Dick, Asimov, Egan, Iain M. Banks) et par la musique (Cage, Reich). Joëlle Aeschlimann : Mes influences sont multiples : le monde du design, de l’art, ou la vie de tous les jours. Pauline Saglio : Je suis plutôt intéressée par le processus de la création, et non son résultat, car il n’a ni début ni fin. Comment définiriez-vous votre art ?
A.S. : Mon travail aborde le mouvement, ses causes, ses formes et ses processus. Pourquoi ça bouge ? Comment ça bouge ? J.A. : J’explore le potentiel créatif qu’offrent les supports numériques (ordinateurs, tablettes, smartphones…) tout en mon-
une qualité unique, idéale pour aborder la problématique des processus du mouvement. Il est très malléable, ce qui permet de fabriquer toutes sortes de mouvements et immatériel ce qui permet de se concentrer sur le mouvement pur (sans matière). J.A. : Je ne dirais pas que j’ai un médium de prédilection, mais si je devais en nommer un ce serait l’iPad car ce support, peu ou mal exploré, a encore beaucoup à offrir au niveau créatif. P.S. : J’aime travailler avec les nouvelles technologies car elles permettent de mêler facilement imaginaire et réalités, surtout avec des techniques de projection. Dans la plupart de mes travaux, j'essaye de cacher leurs " aspects techniques " en introduisant de la poésie pour faire oublier au public que c'est un travail compliqué et effacer la frontière entre nous ! Pourquoi participez-vous à la nuit numérique 2015 ? Qu'est-ce qui vous plait particulièrement dans cet événement ?
A.S. : Cet événement à la programmation artistique de qualité permet à un large public de découvrir un art assez méconnu. J'aime son intégration dans le tissu social de la ville. J.A. : Je trouve cet événement très intéressant et j’ai toujours voulu y assister. Il permet de faire découvrir l’art digital en le rendant accessible à tous. J’aime particulièrement le thème de cette 12e édition, car on associe très souvent l’art numérique à un art froid, compliqué et peu accessible, alors qu’il peut être ludique et poétique !
A E S C H L I M A N N • PA U L I N E S A G L I O • N U I T N U M É R I Q U E # 1 2 trant leur côté magique, surprenant et insaisissable. P.S. : Mon travail est ludique, avec le côté enfantin que cela peut amener. J’aime qu’il soit accessible par le plus grand nombre de personnes, avec plusieurs niveaux de lecture et des moyens d’interagir très simples.
P.S. : Cet évènement est pour moi une belle occasion de partager mon travail dans un espace prévu à cet effet avec plusieurs personnes que les nouvelles technologies et les œuvres numériques permettent de réunir par l’émotion. Pouvez-vous nous parler de l'œuvre / installation que vous allez
Quel est votre matériau / médium de prédilection?
présenter lors de la nuit numérique ?
A.S. : Il s’agit de programmes, un matériau agissant, ce qui est
A.S. : « City lights Orchestra »* est une œuvre urbaine partici-
N U IT N U MÉRIQU E
_1
_1 & 2 ANTOINE SCHMITT « City lights Orchestra » Installation participative dans toute la ville, France, 2012 _3 & 4 JOËLLE AESCHLIMANN « Little Boxes » Installation interactive, Suisse, 2012
_3
_4
_2
N U IT N U MÉRIQU E
pative. C'est une symphonie lumineuse pour les fenêtres de la ville. Elle est activée par les habitants eux-mêmes, qui éclairent leurs fenêtres de l'intérieur avec leurs écrans d'ordinateur, euxmêmes branchés sur un site web spécial (citylightsorchestra. net), qui joue la symphonie visuelle. Chaque écran clignote, pulse, bat, palpite, selon un rythme propre et unique, mais tous les écrans sont synchronisés par un chef d'orchestra virtuel sur internet, ce qui fait que les fenêtres jouent en rythme les unes avec les autres. C'est une œuvre totalement participative, qui demande un certain engagement, mais qui procure aussi un grand plaisir : celui de transformer sa fenêtre en un élément d'un grand tableau abstrait, celui de redécouvrir sa ville sous une dimension nouvelle en se promenant dans les rues et en levant les yeux, celui de participer à un événement collectif d'envergure. D'ailleurs, nous avons organisé un concours de la façade la plus réussie, et plusieurs bâtiments municipaux vont jouer le jeu ! J.A. : « Little Boxes »* est un projet de boite à musique pour iPad. Lorsque l’on dépose la boîte sur l’iPad, celle-ci s’active. L’action de tourner la manivelle permet de découvrir un son ainsi que des animations qui vont s’animer au fil de la mélodie. Par son association avec l’iPad, la boite à musique prend vie, révélant un univers visuel et sonore qui lui est propre, permettant ainsi de retranscrire des sensations qui n’existeraient pas dans une boite à musique standard. P.S. : Quand j'étais plus jeune, j'avais l'habitude d'aller dans cette belle maison que mes grands-parents avaient et je me souviens encore de mon grand-père remontant cette grande horloge qui se trouvait dans le salon. Chaque fois que je le voyais sortir cette petite clé en or du tiroir, je savais qu’une semaine entière venait de s’écouler. Avant l’arrivée de l’ère numérique, le temps avait besoin d’attention, les horloges devaient être définies, élancées, rembobinées, elles avaient besoin de l’interaction humaine. Aujourd'hui tout a changé, l’heure est partout : sur nos ordinateurs, sur nos téléphones, dans la rue. J'ai donc créé « Rewind »*,
une série de 3 horloges numériques, pour nous aider à ralentir notre consommation de la lecture de l’heure, en fusionnant le monde numérique avec l'acte analogique de remonter une horloge. Chaque horloge fonctionne avec des mécanismes de jouets que j’ai détournés en transformant l’information mécanique en information numérique. Pour les 3 horloges, il existe une façon unique de remonter son mécanisme pour que la connexion soit plus forte et plus significative entre le physique et les propriétés numériques d'une horloge. Chaque horloge a une durée différente pour afficher l’heure, il y en a une très rapide, une intermédiaire, et une très lente (1min.30s.) et à chaque fois liée à la durée du mécanisme. Chacune propose également un visuel en rapport avec ce qu’évoque le type d’interaction. La 1ère représente une désintégration rotative des aiguilles qui reprennent leur place initiale lorsque l’on pousse la « clef ». Lorsque l’on tourne la clef de la seconde, un flot de particules est libéré et c’est seulement à la fin de la recharge qu’elles se regroupent pour former les aiguilles et afficher l’heure. Enfin, la dernière utilise un système de parallaxes qui affiche l’heure par superposition des animations.
NUIT NUMÉRIQUE #12
samedi 14 mars 2015, 18h00 – 01h00 Expo collective numérique du 17 mars au 23 mai 2015 en partenariat avec les médiathèques de la Ville de Reims
Centre culturel numérique Saint-Exupéry Chaussée Bocquaine esplanade André Malraux 51100 Reims
N U IT N U MÉRIQU E
La nuitnumérique #12 se déroule au Centre culturel numérique Saint-Ex le 14 mars 2015 de 18h à 1h ; elle est aussi, l’ouverture de l’expocollective qui se déroulera du 17 mars au 23 mai 2015. Dans cette ère du tout numérique où le futur est de plus en plus présent, on parle de machines connectées, d’outils de fabrication numérique, de domotique, de confortique, et de laboratoires d’applications numériques. On peut apprendre à coder dès le plus jeune âge et créer de nouvelles communautés où règnent l’échange et le Do It Yourself. Dans ce nouveau monde connecté aux interfaces plus digitales qu’humaines, les artistes qui interviennent lors de la nuit numérique #12 plongent le public dans un monde parallèle, poétique et ludique. L’objectif est, dans cette nouvelle dimension, de surprendre le public et susciter son émerveillement face à une œuvre numérique participative.
d’orchestre activent les différents samples, créant un orchestre digital, menant ainsi une réflexion sur la place du numérique dans la composition musicale actuelle. Un tour demain / France, 2015, de la Compagnie ALIS Cette installation participative permet de découvrir les hypothèses poétiques se cachant dans chaque mot. On y manipule à pleines mains, des mots écrits, en jouant avec leur graphisme, et en découvrant ce qui s’y cache. Les circulations se font surprenantes et réjouissantes entre la main, l’œil, la bouche, l’oreille, entre tangibilité et virtualité, écrans et papiers, codes alphabétiques et numériques. L’habillage intérieur de Saint-Ex est totalement repensé à l’occasion de la nuit numérique. Ainsi, la partie basse du bâtiment est scénographiée par le studio DSPLY afin d’offrir une sorte d’invitation constellaire au parcours d’exposition… Par ailleurs, un dj set proposé par le label Highlife Recordings mettra SaintEx en musique de 21h à minuit.
La nuit numérique #12, propose poétiquement de découvrir : Constelaction / Pologne, 2013, de panGenerator Cette installation interactive audio-visuelle est constituée de 400 tétraèdres qui réagissent à un flash de lumière en émettant elles-mêmes un flash lumineux et sonore. En illuminant une des pyramides, le visiteur produit un effet lumineux en domino. L’installation invite alors les participants à créer leurs propres constellations qui verront la lumière se propager de proche en proche. Une métaphore intelligente, esthétique et poétique du partage et de la propagation des idées.
Le magazine PEEL est partenaire de la nuit numérique #12.
www.saintex-reims.com
Computer Orchestra / Suisse, 2013, de S. de Diesbach, J. Lacôte et L. Perrenoud Ce projet ne fera pas de vous un chef d’orchestre au sens classique du terme puisqu’il propose à ses utilisateurs de s’entraîner face à un orchestre d’ordinateurs. Un son par ordinateur, le tout répertorié dans une application simple. Après avoir ajusté la zone de détection de chaque machine, le concert peut commencer. Capturé par une Kinect, les mouvements du chef
_PAULINE SAGLIO « Rewind » Installation interactive, Suisse / France, 2013
TEXTE
Alexis Jama-Bieri
VOLVO XC60
€/mois À PARTIR DE 399 *
(1)
LLD 37 mois et 46 250 km du 02/01/2015 au 31/03/2015
ENTRETIEN, GARANTIE, ASSISTANCE INCLUS
Technologies environnementales de réduction des émissions de CO2 et de la consommation.
Détection piétons & cyclistes en première mondiale et pleins phares permanents anti-éblouissement.
(2)
Centre multimédia connecté à Internet.
volvocars.com/fr * Avec un 1er loyer majoré de 7 450€ TTC. Exemple de Location Longue Durée (LLD) de 37 mois et 46 250 km pour le financement d’un Volvo XC60 D3 BM6 Momentum neuf aux conditions suivantes : apport placé en 1er loyer majoré à hauteur de 7 450€ TTC, suivi de 36 loyers mensuels de 399€ TTC. (1) Offre valable pour tout Volvo XC60 D3 Momentum commandé entre le 02/01/2015 et le 31/03/2015 dans le réseau participant, réservée aux particuliers et sous réserve d’acceptation du dossier par VOLVO CAR FINANCE, département de CGL, Compagnie Générale de Location d’Équipements - SA au capital de 58 606 156 € - 69 avenue de Flandre 59700 Marcq-en-Barœul - SIREN 303 236 186 RCS Lille Métropole. (2) Tarification comprenant le produit optionnel “Entretien VN PRO”. Le contrat de prestations de services “Entretien VN PRO” est souscrit par CGL auprès de TEMSYS - SA au capital de 66 000 000 euros - SIREN 351 867 692 RCS Nanterre, dénommée ALD AUTOMOTIVE. Modèle présenté : VOLVO XC60 D4 BM6 Summum avec options peinture métallisée Inscription, jantes alliage Titania 20” et Pack Sécurité Personnelle : un premier loyer de 8 900€ suivi de 36 loyers mensuels de 633€ TTC (hors assurances facultatives et prestations). Gamme VOLVO XC60 : consommation Euromix (l/100 km) : 4.5/10,7 - CO2 rejeté (g/km) : 117/249.
51 REIMS CITÉ DE L’AUTOMOBILE - CROIX BLANDIN - 03 26 77 50 60
www.delhorbe-automobiles.fr
51 DIZY - EPERNAY Z.A. LES BAS JARDINS - 03 26 55 07 44
51 CHALONS-EN-CHAMPAGNE RN 44 - ZAC ST MARTIN SUR LE PRÉ - 03 26 21 08 08
Delhorbe_XC60_LLD_facade_fev15_240x310_B.indd 1
05/02/2015 17:34
CA RT E B L A N C H E
U N E I L LU ST RAT I O N D E N I C O L A S A N D R É , P O U R L E M AGA Z I N E P E E L
LE VOYAGE À RHEIMS Un livre de Frédéric Chef et Nicolas André aux éditions le Pythagore. Dédicace le 21 mars à la librairie La procure et le 23 avril à l’Espace Culturel du Site de l’ÉSPÉ.
P H OTO G RA P H I E
_Je n’ai jamais été une petite fille, 2009, Courtesy the artist and Galerie Laure Roynette © Clémence Veilhan
P H OTO G RA P H I E
CLÉMENCE VEILHAN
Clémence Veilhan réalise ses photographies de manière traditionnelle, en argentique, avec un rapport physique au sujet : elle s’en approche, s’en éloigne et tourne autour afin de restituer l’humeur du modèle, ingénu, provocateur, interrogateur. Old school dans sa texture, résolument moderne dans son approche, son travail sériel s’inscrit dans une vision renouvelée de la représentation individuelle et collective, intime et publique du corps. Clémence Veilhan est représentée par la Galerie Laure Roynette, 20 rue de Thorigny (dans le 3e arrondissement) à Paris, où elle vient de présenter une partie de son récent travail dans l’exposition intitulée « Et les fruits passeront la promesse des fleurs ». Quelles sont vos influences ?
J’ai découvert la photographie enfant grâce à deux livres qui trainaient chez mes parents : un recueil de photographies de Lewis Carroll, et Gitans de Koudelka. Les petites filles photographiées par Lewis Carroll m’ont particulièrement marquée. Il y avait quelque chose d’inquiétant et d’onirique dans ces portraits. Ça me faisait rêver et m’effrayait à la fois. Je ne comprenais pas vraiment pourquoi, plus tard, ces images ont continué de me hanter, et j’en ai mieux compris la raison : elles condensaient beaucoup de choses pour moi comme la sexualité, le regard masculin sur le corps féminin, l’innocence, les limites. Le livre Gitans a eu un impact différent. J’ai compris que la photographie était le moyen de découvrir l’autre, de s’ouvrir au monde. Je rêvais moi aussi de vivre comme les gitans que je voyais dans le livre. Plus tard, je me suis passionnée pour le travail de Cindy Sherman à ses début, de Gilian Wearin, Alix Cleo Roubaud ou encore Marina Abramovic… Je trouve aussi mes influences au cinéma avec la Nouvelle Vague, le cinéma de Gus Van Sant, Larry Clark, et Vera Chitylova. Certains philosophes comme Peter Sloterdijk, Gilles Deleuze… Je m’imprègne beaucoup de mes rencontres, de la vie quotidienne, de tout ce que je traverse. La photographie est pour moi un art dans lequel je peux tout intégrer, interpréter.
Quel est votre parcours en photographie ?
Mes premières pellicules datent de 1998. J’allais alors à la bibliothèque de la Maison Européenne de la photographie chaque semaine, et je regardais pendant des heures des livres de photographie en tous genre. J’ai donc commencé comme autodidacte. Je ne connaissais que très peu la technique, mais je faisais des photographies. Cela me servait d’exutoire. Je faisais beaucoup d’autoportraits et de photographies de mes amis. À la suite de mes études de cinéma à l’université Paris 3, j’ai décidé de me consacrer pleinement à la photographie et de m’engager dans une réflexion construite, de créer des travaux qui font sens, qui dépassent l’expression directe, chaotique. J’ai appris seule, petit à petit. J’ai aussi eu la chance de rencontrer des photographes et commissaires d’exposition qui m’ont permis d’avancer dans ma réflexion. J’ai ensuite été engagée comme assistante de la photographe Nan Goldin, et j’ai continué d’apprendre avec elle. Quel matériel utilisez-vous ?
Ma technique de travail évolue en fonction du sujet que j’aborde. Je travaille essentiellement en argentique, mais je n’utilise pas toujours le même appareil photo, ni les mêmes optiques. Le plus souvent, j’utilise du film 135, mais j’ai aussi réalisé une série à partir de films 20x25. La technique me permet de poser un cadre de travail. Je définis des règles claires : une pellicule photo pour chaque modèle, ou un seul plan-film par photographie. Je travaille toujours avec des optiques fixes afin d’engager mon corps, plutôt que de tourner une bague. J’attache beaucoup d’importance au tirage. Je travaille avec des tireurs qui font tout de manière artisanale, traditionnelle. Nous travaillons ensemble pour faire vivre la photographie et en sortir le meilleur. Comment sélectionnez-vous vos modèles / sujets ?
Parfois, je choisis mes modèles, parfois ce sont elles qui me choisissent. Cela vient souvent de mes rencontres. Je n’ai aucun critère particulier, si ce n’est une confiance réciproque qui doit s’établir pour réussir une photographie, une forme d’abandon, d’intimité.
P H OTO G RA P H I E
Quelle est votre approche des sujets en fonction du lieu de prise de vue ?
Je photographie principalement dans des endroits que je connais bien. J’ai besoin de temps pour faire une photographie, de m’approprier le lieu, de m’y sentir bien. Par exemple, dans une série récente intitulée « Un après-midi au jardin botanique de Madrid » je suis venue chaque jour m’imprégner du lieu et peu à peu j’ai eu envie d’y faire des portraits, cachée derrière des buissons. Mais souvent, je travaille chez moi, ou chez mes modèles, car j’aime prendre le temps d’écouter de la musique, de boire quelque chose, de faire des pauses, de parler… Et sortir du temps social pour entrer dans le temps de l’enfance, celui où l’on s’ennuie, rêvasse, invente. Tout mon travail est intime, introspectif. Pouvez-vous nous parler de vos séries « Chewing girls » et « Je n’ai jamais été une petite fille ». Que signifient ces séries pour vous ?
Ces deux séries photographiques ont été créées dans le même lieu, mon appartement. J’avais d’abord un sujet en tête, ou plutôt un sentiment, quelque chose que je voulais décrire mais je n’en connaissais pas encore les contours. Je savais que je voulais parler du corps, de l’identité, du monde actuel. De cette nouvelle vie que je découvrais, ce passage que je traversais, entrer dans le monde adulte. J’avais l’impression que quelque chose n’allait pas. Je me demandais : Sommes-nous seulement une succession de formes physiques ? Sans existence réelle ? Une bulle de chewing-gum ? Alors, à la façon d’un travail documentaire, je me suis tournée vers d’autres filles de mon âge. Vivaient-elles comme moi toutes ces incertitudes ? Voyaient-elles aussi la vie comme une mauvaise photographie ? J’ai finalement inventé un « jeu photographique » ou je proposais à des filles entre 20 et 30 ans de venir poser le buste nu en faisant une bulle de chewinggum. Mon appartement était devenu une sorte de salon de discussion et de photographie. Je posais la question : Est-ce que les filles exploseront lorsque les bulles éclateront ? J’ai pu découvrir comment d’autres filles se positionnaient à l’intérieur du cadre de mon questionnement. Il y avait l’idée d’une enfance perdue, de la lolita, des clichés sur le féminin, d’un corps pris dans des images enfermantes. Suite à ce travail, une nouvelle idée m’est venue. Un soir, alors que je me décidais à aller à une fête, j’ai eu envie de réessayer ma robe d’enfant. Une petite robe, de style victorien, seul objet qui me restait de mon enfance. Bien sûr, j’avais grandi, et je me suis retrouvée coincée à l’intérieur. Comme le personnage d’Alice,
j’étais redevenue toute petite. J’ai alors décidé de travailler à partir de cette étrange situation qui m’évoquait les photographies de Lewis Caroll, le passage de l’enfance au monde adulte, ces enfants qui grandissent si vite, cette innocence empêchée. J’ai proposé à 38 femmes de venir poser à l’intérieur de ma robe que j’avais au préalable découpée au dos. Un jour, l’une de ces filles m’a dit : « Je n’ai jamais été une petite fille », et cela a fait écho à une sensation personnelle, c’est pourquoi j’ai intitulé la série ainsi. Peut-on dire qu’il s’agit d’une nouvelle lecture visuelle d’un moment flottant entre le passé et le présent, mêlant l’état d’enfance et celui d’adulte, l’innocence et la désillusion, la captation d’une sorte de passage ?
Je pars de cette mélancolie qui m’habite pour fabriquer des images. Je suis hantée par cette notion de passage, d’identité instable, bouleversée, d’un monde complètement mouvant dans lequel nous vivons et en même temps rigide, arbitraire, violent. Cette idée du moléculaire, et du molaire. D’un présent toujours brisé par le passé, le nôtre, ou celui des parents. L’innocence est pour moi devenue quasi impossible. Pourquoi avoir choisi le noir & blanc pour ces séries ?
C’est une vision, ça ne s’explique pas. J’ai d’abord vu ces images en noir et blanc. Cela faisait appel pour moi à une forme de nostalgie, un rapport aussi avec la photographie ancienne, comme des questionnements éternels dont on ne peut se défaire. J’ai eu l’idée de quelque chose d’abimé, un noir et blanc avec beaucoup de grain, comme quelque chose qui disparaît, qui s’efface, tout simplement l’enfance perdue, une angoisse identitaire. Quelle est votre actualité ?
Certaines de mes photographies sont visibles à la Galerie Laure Roynette. Par ailleurs, Je continue de créer de nouvelles photographies et je prépare une exposition à partir du travail que j’ai récemment réalisé avec les femmes de la Maison d’arrêt des Baumettes, autour de leur mémoire et de leur identité. Ce projet doit être exposé prochainement à Marseille.
www.clemenceveilhan.com www . g a l e r i e - a r t - pa r i s - r oy n e t t e . co m
TEXTE
Alexis Jama-Bieri
P H OTO G RA P H I E
_Chewing-Girls, 2008, Courtesy the artist and Galerie Laure Roynette © Clémence Veilhan
B E LLE S L E T TR E S
ELLE BRÛLE U N TEX TE D E C A RO LINE GUIELA NGUY EN, POUR LE MAGA Z INE P E E L.
Caroline Guiela Nguyen a mis en scène Elle brûle présenté à la Comédie du 9 au 17 avril. Le 28 octobre 2006. Je suis à Hô Chi Minh-Ville avec ma mère. Comme chaque soir, nous allons manger rue Catinat une soupe pho’ pour elle, un bánh xèo pour moi. Ma mère aime retourner place Catinat, cette place qui l’a vue grandir. Les places sont des lieux si importants dans l’enfance. Je le sais, moi qui suis née à la campagne, les places sont le lieu de tous les souvenirs. Depuis le début du repas, une femme est assise à côté de nous. Elle est en débardeur, blanc. Elle a visiblement chaud, trop chaud. Son mari (j’imagine) court dans tout le restaurant pour demander dans un anglais très approximatif un ventilateur. Les femmes du restaurant le regardent, moqueuses. Sa femme lui fait signe de se rasseoir pour qu’il cesse de se ridiculiser. Sa fille, elle, rit de son père, avec sa complicité. La fille regarde peu sa mère. On dirait presque qu’elle a peur d’elle. Cette femme est brune, la peau blanche, elle est belle, très belle même. Ma mère à mi-voix se moque d’elle. Elle se moque de ces occidentaux qui n’arrivent pas à s’adapter à la chaleur, à la moiteur, à la ville. C’est une façon à elle de ne pas se sentir comme eux, de ne pas être une touriste mais bien une femme qui revient dans son pays et qui ne craint ni la chaleur, ni l’humidité. Elle est née dedans. Plus tard, ma mère et moi prenons la route pour le nord. Je veux revoir la baie d’Along. Sur le bateau dans lequel nous allons passer une nuit entière, je reconnais devant moi le sac à dos Waikiki de la jeune fille du couple au ventilateur. Ce sac avait imprimé ma rétine car j’avais le même à son âge. Un petit singe en porte clef est accroché à la poche avant. Derrière le sac, la jeune fille est bien là. Elle regarde par-dessus la rambarde du bateau un homme décrochant le panier où sont enfermés quelques poissons. Je cherche autour de moi sa mère. Elle est au ponton du bateau. Elle regarde par-dessus bord. Son mari arrive quelques minutes après. Il a un châle entre les mains. Il repart aussitôt avec. Elle n’en a peut-être plus besoin ou peut-être n’a-t-il pas pris le bon. C’est la dernière fois que je l’ai vue. Six ans plus tard, nous nous retrouvons à Lyon pour une réunion de travail. Jérémie feuillète le journal et soudain, une photo attire mon attention. C’est un portrait de femme dans la rubrique des faits divers. Je connais ce visage. J’en suis sûre. Je lis alors que cette femme s’est suicidée après avoir cumulé d’énormes dettes. Son mari et sa fille sont ruinés. Ils habitaient au moment des faits à Ry-sur-Guimand, dans la Drôme. Elle s’appelait Emma. Emma Bauchain. Le 12 novembre 2012 nous sommes à Ry-sur-Guimand. Une maison blanche, moderne. Sur la sonnette est écrit : famille Bauchain. Nous sonnons. Nous entendons du bruit. Une jeune fille vient nous ouvrir. Un homme derrière elle apparaît. Un léger frisson me parcourt. C’est bien eux. C’est bien la jeune fille au sac Waikiki. C’est bien l’homme au ventilateur. Notre histoire commence ici. Caroline Guiela Nguyen, Juin 2013, avant la création du spectacle à la Comédie de Valence – Centre dramatique national Drôme Ardèche en novembre 2013.
. Architec tur
Des
fr . jjmm . P
DA AN
G
a. nd
ign . DPL .
O HM
L
A R C H I T E C T E S
e.
NP . www. pl
a
4
P L A N D A
R E S I D E N T I E L - C O M M E R C I A L - C U LT U R E L ARCHITECTES DPLG & HMONP 31 Rue de Magneux / 51100 / Reims 28 Passage du GĂŠnie / 75012 / Paris Contact@planda.fr P L A N D A . f R
P H OTO G RA P H I E
_ View from shelter-hires Š Lauren Marsolier
P H OTO G RA P H I E
LAUREN MARSOLIER Est une photographe d’origine française qui vit à Los Angeles et crée des espaces vraisemblables à partir de photographies multiples.
_ Parking Lot2 © Lauren Marsolier
P H OTO G RA P H I E
Lauren Marsolier est une photographe d’origine française, elle vit et travaille à Los Angeles. Elle est lauréate de nombreux prix, notamment la 1ère place du Photo Center North West en 2012 et le Houston Center for Photography fellowship en 2013, où elle a fit une exposition solo. Elle fut sélectionnée parmi les ’ 31 Women in Art Photography ‘ en 2012 par la Fondation Art Humble à New York, ainsi que dans l’exposition majeure ‘ Landmark : The Fields of Photography ’ ; organisée par William Ewing à la Somerset House à Londres. Lauren Marsolier crée des espaces vraisemblables à partir de photographies multiples, fragments épars du monde extérieur provenant de lieux différents. Son livre TRANSITION fut récemment publié par Kerber Verlag à l’occasion de quelques expositions à venir à la galerie Richard à New York au printemps prochain, ainsi qu’à la Robert Koch Gallery au cours de l’hiver 2015. Comment présenteriez-vous le projet Transition que vous développez désormais depuis 10 ans ?
Je réalise des compositions photographiques à partir de prises de vue d’endroits divers, que je retouche et que je fonds ensemble numériquement. Ce qui m’intéresse dans l’élaboration de ce travail, c’est d’explorer l’expérience de la transition en lui donnant une forme visuelle. Si à première vue mes images peuvent sembler documenter un lieu particulier, il s’agit en réalité d’un lieu qui ne figure sur aucune carte. C’est en quelque sorte un paysage intérieur, une image qui exprime le sentiment d’être dérouté par les changements qui se produisent en soi ou autour de soi ; une période de flottement, durant laquelle on se sent coupé de notre environnement, voire de nous-mêmes. Pour moi notre esprit et notre environnement sont très lies. L’un influence l’autre. Nos constructions humaines sont un reflet de qui nous sommes en tant que société. Elles témoignent de la façon dont nous choisissons d’organiser notre rapport au monde. Je m’intéresse à une phase psychologique durant laquelle on se sent confus et indécis, un peu comme se retrouver dans un lieu familier qu’on ne peut toutefois identifier. C’est pourquoi mes paysages sont le plus souvent ambivalents. Est-ce un choix de ne faire apparaitre aucun être humain dans votre travail ?
Ce n’était pas un choix de départ. J’ai développé ce projet de
_ Diptych © Lauren Marsolier
façon intuitive. Je n’étais pas a priori contre l’apparition de personnages, mais finalement au fil des créations je me suis aperçue que mes paysages prenaient des caractéristiques psychologiques. Du coup l’irruption d’une forme humaine serait sans doute à la fois distrayante et redondante. Vous est-il déjà arrivé d’avoir le sentiment de découvrir que de vrais paysages semblaient complètement artificiels ?
Oui, cela m’arrive régulièrement à Los Angeles où je vis et c’est une grande source d’inspiration. Notre rapport à l’artifice me fascine et m’effraie. Même si l’artifice fait depuis longtemps parti de notre histoire, notre époque lui a donné une place prépondérante. Il devient si commun et familier qu’il nous semble souvent presque « naturel ». Tout nous pousse à prendre la copie
8
P H OTO G RA P H I E
Pour quelle raison utilisez-vous essentiellement le format carré ?
Encore une fois, ce n’est pas une décision vraiment réfléchie, mais je pense que c’est sans doute pour rendre mes paysages encore plus vastes, les entourer d’un grand vide, en accord avec leur ambiance solitaire. Comment définiriez-vous cette façon dont vous utilisez le ciel, pris de jour comme de nuit selon les sériés, semblant être un élément prédominant dans votre travail ?
C’est vrai le ciel est souvent prédominant. Caractérisé par une couleur monochrome, parfois un léger dégradé et laissant rarement entrevoir une forme nuageuse, il est l’équivalent d’un vide. Il devient quasiment abstrait. Souvent il ne s’agit pas d’un vrai ciel, mais d’une couleur choisie sur ma palette numérique. Pour ce qui est de mes paysages « de nuit », ils ne sont jamais composés à partir de prise de vue faites la nuit. J’ai choisi une couleur noire et opaque car je voulais « un ciel » sans étoile, qui puisse donner une sensation d’enfermement. Et je voulais que la lumière fasse penser à un éclairage de tournage en studio, comme si le paysage présent pourrait n’être qu’une construction pour les fins d’un film. Y a-t-il une couleur ou un matériau que vous aimez utiliser plus que d’autres ? Ou au contraire y en a-t-il que vous essayez d’éviter ?
pour l’original. Je travaille mes images de façon a ce qu’il s’en dégage une impression d’artificialité qui crée le doute quant à l’existence du lieu représenté. Avez-vous déjà essayé de faire des photomontages à la main ?
Non, j’ai tout de suite créé des photomontages numériquement, parce que l’outil numérique offre une liberté de nuances dans la retouche et la combinaison de photographies qui n’est pas possible avec le photomontage traditionnel. J’aime pouvoir bénéficier d’une liberté proche de celle du peintre. Ce procédé me permet de maîtriser la moindre ligne, la moindre couleur, et travailler l’ambivalence de mes paysages. Avant le numérique j’avais déjà une attirance vers la manipulation des images et je retravaillais souvent mes prises de vue en chambre noire.
J’ai souvent envie de mêler des zones très texturées, presque palpables, et des zones propres, sans détails, aseptisées, presque abstraites. Leur combinaison évoque pour moi notre monde hybride à la fois matériel et virtuel. Je cherche souvent à créer une tension entre opposés, entourer l’organique de structures presque abstraites ou enfermer l’émotionnel dans le géométrique. Je suis particulièrement attirée par le ciment, cette pellicule omniprésente dans nos villes. Dernièrement, le vert commence à faire son apparition sous forme de feuillage et pelouse manucurés. Ce que j’essaie d’éviter en général, ce ne sont pas des couleurs ou matériaux particuliers mais plutôt le surplus de détails. J’efface tout ce qui est distrayant pour concentrer le regard sur l’essentiel. Quels rapports essayez-vous de produire entre cette architecture définie comme « construction humaine » et son environnement naturel ?
Je pense que le rapport est souvent celui d’une tentative de maîtrise exagérée du naturel. La recherche de perfection devient menaçante et crée un malaise. Les qualités positives basculent
_ Blacksquare Š Lauren Marsolier
P H OTO G RA P H I E
vers leur contraire. Mes paysages sont le plus souvent aseptisés. L’ordre, la propreté deviennent stérilité. Le calme, la sérénité frisent une solitude angoissante. Sommes-nous réellement épanouis ou apaises dans cet environnement faussement attrayant? Lorsque je travaille une image j’essaie de trouver un point d’équilibre entre un sentiment de réalité et un sentiment d’artificialité. Formes et contenus participent à l’incertitude. Ces images peuvent vous sembler plutôt plaisantes ou plutôt angoissantes, chaque interprétation est personnelle, mais je les construis dans l’idée de susciter les deux simultanément, parce que les phases de transition nous plongent pendant un temps dans un état d’indécision, durant lequel nous allons et venons entre deux perceptions du monde.
peut-être assez différente car j’imagine que l’on me demanderait d’illustrer une vision prédéterminée. Dans la façon dont je procède, je ne sais pas vraiment ou je vais. Le fil conducteur est un état psychologique particulier, mais la forme que celui-ci va prendre en tant que paysage se révèle au fur et à mesure de la composition. J’essaie de multiples juxtapositions et ne conserve que celles qui font sens intuitivement et qui sont possibles techniquement. Le fait d’être française aux États-Unis, cela vous apporte-t-il un regard différent sur les villes que vous photographiez ?
J’ai toujours été très inspirée en vivant à l’étranger car on voit tout avec un certain recul. Ma créativité s’en trouve aiguisée. Mais mes compositions ne représentent pas un lieu particulier. Plusieurs de mes photomontages intègrent à la fois des fragments photographiques d’Europe et des États-Unis.
Dans votre manière de monter les éléments ensemble, ressentezvous parfois le sentiment de « construire » une vision à la manière d’un architecte ou un d’urbaniste ?
Comme je l’ai évoqué précédemment, je pense que les formes et caractéristiques de nos constructions humaines témoignent de notre façon d’envisager le monde. Comme en architecture et urbanisme, je modèle un environnement. Toutefois J’utilise la charge symbolique d’éléments variés, pour créer doute et ambivalence.
Y-a-t-il des régions du monde qui vous inspirent plus que d’autres ?
Los Angeles où je vis m’inspire particulièrement. La ville s’étant construite autour de l’industrie de l’image, le naturel et l’artifice y entretiennent une relation singulière. La copie s’imiscie dans l’original et les frontières entre les deux deviennent souvent floues. Cela me procure régulièrement le type de sensation que j’explore dans mon projet.
Avez-vous déjà eu l’occasion de travailler avec un architecte ou urbaniste pour illustrer leur projet ?
Non, je n’ai pas eu l’occasion. La démarche serait
_ Blacksquare © Lauren Marsolier
www.laurenmarsolier.com
TEXTE
Julien Jacquot
DESIGN
ÉRIC CHARPENTIER
RÊVES SOUS CLOCHES
DESIGN
5
Je jette ma cigarette et entre au 5 de la rue de l’Écu. Sous le porche dans l’entrebâillement d’une porte qui donne sur la cour, le chef du restaurant voisin fait une pause post coup de feu. Deux étages plus haut, Éric Charpentier ouvre et m’invite à entrer dans son appartement. Tout de suite à gauche, une petite pièce lui sert d’atelier. Éric Charpentier relie et restaure des livres anciens et contemporains. De la dorure sur cuir également. Coup d’œil circulaire dans la pièce et premières phrases échangées : quelque chose de spécial se passe ici. Des presses en bois et en fonte, des outils dont je ne soupçonne pas l’utilité. Éric Charpentier m’explique son travail. Son passage par l’École Boulle et sa passion pour les matières nobles. Son enfance troyenne, son départ à Paris et son arrivée à Reims pour plus d’espace. Ses clients prestigieux et anonymes. Il me montre quelques pièces sur lesquelles il travaille et je suis fasciné par tant de savoir-faire et de précision :
l’accomplissement d’un geste. Éric Charpentier n’est pas que relieur, il met aussi sous cloche. Il « élabore des cabinets de curiosité ». Deux boîtes sont posées sur sa table de travail. Il dénoue un nœud, soulève la partie supérieure. Apparaît alors l’objet. Fixée sur un socle de cuir ouvragé et doré, une fine tige de métal suspend un magnifique papillon, sous une cloche de verre. Il m’explique le pourquoi du comment, la technique et l’élaboration. Comment il met sous cloche des coquillages, des animaux, des chaussures d’enfants, des legos. « Tout peut se mettre sous cloche », me dit-il. Voilà presque une heure que nous discutons. Je dois partir, un rendez-vous m’attend. Il s’absente quelques instants pour préparer un café que j’aurais tout juste le temps d’avaler. Face à la porte, une fenêtre façon bow-window. À quoi pense Éric Charpentier ? À quoi pense Éric Charpentier quand il regarde par cette fenêtre et qu’il observe le ballet
continu des voitures et des piétons autour de la place Aristide Briand ? Me revient à l’esprit cette courte nouvelle de l’écrivain argentin Jorge Luis Borges, « Funès ou la mémoire ». Le jeune Irénée Funès, après un accident, perd toute faculté de locomotion mais acquiert la mémoire absolue et infaillible. Il n’oublie rien et se souvient de tout. « En effet, non seulement Funès se rappelait chaque feuille de chaque arbre de chaque bois, mais chacune des fois qu’il l’avait vue ou imaginée. » Le regard d’Éric Charpentier se pose sur une chose et il imagine comment la mettre sous cloche. Comment l’extraire de son contexte pour la rendre unique et éternelle. À quoi pense Eric Charpentier quand il regarde par la fenêtre de son atelier ? Voit-il ce mouvement continu, cette agitation éperdue et désordonnée à laquelle personne ne prête attention. Pendant que lui fige sous cloche, des rêves et des souvenirs. www.reliure-et-curiosite.fr
TEXTE
Jean Delestrade PHOTOGRAPHIES
Benoît Pelletier
M U S I Q U E P O P E L E CT R O
Comment s’est formé Villa ?
François : On se connaît depuis une dizaine d’années environ. Villa était à l’origine constitué de Thang et Frédo. Je suis arrivé après le départ de Frédo, pour produire initialement 2 remix, et je suis resté ! Villa c’est un projet qui a débuté autour des remix, et ce n’est qu’à partir de 2013 que nous avons produit nos propres titres. On souhaite plutôt poursuivre dans cette voie des créations originales.
VILLA
Pourquoi Villa ?
Thang : C’est le nom d’un village portuaire à Ibiza. Et puis, c’est un nom facile à retenir et à prononcer dans plusieurs langues, un nom classe, qui fait penser au sud et au soleil. Quelles sont vos influences ?
François : On vient de 2 univers différents. Mes influences proviennent des musiques Soul 60’s (avec Sam & Dave), Britpop et électronique avec le Trip hop (avec Massiv Attack) et le Break beat, en général, et du son des groupes belges (avec Soulwax et Das pop), en particulier. Thang : Comme je suis dj à l’origine, j’écoute beaucoup de choses et de nouveautés. Mes influences évoluent alors constamment. Vous avez, il y a quelques mois, sorti un EP et participé à la compilation anniversaire du label Partyfine. Comment est née votre collaboration avec ce label ?
François : On avait fait, il y un peu plus de 2 ans, un remix du titre de Yuksek « Always on the run ». Le remix a bien marché et on est restés en contact avec Pierre qui créait son label Partyfine. Comme de notre côté on était en phase de démo, on lui a envoyé nos morceaux et il a vite mordu à notre son ! Pour l’EP sur Partyfine, on a recherché la sobriété musicale avec seulement un beat, un vocal, et quelques petits sons qui le suppléent lorsqu’il n’y a plus de chant afin de construire un son qui soit le plus cohérent possible. Notre objectif est de faire une musique simple et efficace qui marque l’esprit, car une des grandes magies de la musique c’est qu’il n’est pas besoin que ce soit compliqué pour que ce soit bon ! Nous avons produit 2 titres, et Pierre (Yuksek, ndlr) a produit un edit qui a alors très fonctionné, intitulé « Exotic to hell », qui était au départ une démo ancienne, avec ma sœur Sophie au chant. Avec quels artistes aimeriez-vous travailler à l’avenir ?
François : Ça serait cool qu’on puisse travailler avec Chromeo, et travailler sur d’autres projets avec Pierre, que ce soit en original ou en remix.
www . pa r t y f i n e . co m
Villa est un duo de pop électronique constitué du dj Thang et du producteur instrumentiste François Demeyer. Il y a quelques mois, le duo était présent sur la 1ère compilation, anniversaire, du label Partyfine. Rencontre d’avant set. À propos de Partyfine, une soirée aura lieu à la Cartonnerie le samedi 21 mars pour fêter la sortie de la seconde compilation du label, avec sur scène Jean Tonique (DJ), Get a Room (DJ), Is Tropical (Live) et Poom (DJ).
TEXTE
Alexis Jama-Bieri
6
PAG E S & I M AG E S
FICTION MICHAËL ACKERMAN éd. Delpire, 2001
--> Petit aller et retour dans les ténèbres sensibles du photographe Michael Ackerman. Brut et poétique.
HISTOIRE DE CONSTRUIRE PATRICK BOUCHAIN éd. Actes Sud, 2012
--> Se déployer, malgré tout, sur des ambiguïtés exploitables : juridiques, constructives, administratives, sociales, culturelles. Un condensé du travail de l’architecte Patrick Bouchain.
SERPENTINE GALLERY PAVILIONS PHILIP JODIDIO éd. Taschen
--> Absolument tout sur les mythiques pavillons de la Serpentine Gallery proposés chaque année par un architecte mondialement influent.
POLAROIDS HELMUT NEWTON éd. Taschen
--> Helmut Newton, prince de la mise en scène calibrée s’est aussi livré au petit frisson de l’instantané. Les voici.
LE TROISIÈME ŒIL CLÉMENT CHÉROUX, ANDREAS FISCHER ET PIERRE APRAXINE, DENIS CANGUILHEM, SOPHIE SCHMIT éd. Gallimard, 2004 --> Photographier l’occulte, du 19e à nos jours…
© Benoit Pelletier
8
PAG E S & I M AG E S
U N CON N U
ALAIN
L’ACCORDÉONISTE
NOM
Alain TERLEGAN alias Alain Pierrepaul. PROFESSION
Accordéoniste. DEPUIS
20 ans cette année. ÂGE
53 ans. OÙ
À Reims ! (autour de la place d’Erlon) Marché des Halles le samedi. Marché Jean Jaurès le dimanche. PLUS BEAU SOUVENIR
Un déjeuner avec Cabu. VOTRE RÊVE
Monter mon groupe et faire entendre mes propres compositions. UNE PASSION
TEXTE ET PHOTOGRAPHIE
Benoit Pelletier
La musique ! (mais aussi la pêche et les champignons)… UN MAÎTRE
André Verchuren : un mythe.