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CATHERINE BAFLAST

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Safety & Comfort

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« L’avocat traditionnel va devoir évoluer »

Catherine Baflast est la nouvelle managing partner de PwC Legal. Sa mission : déployer la stratégie 2025 du cabinet. Son credo : faire de l’avocat plus qu’un conseil, un partenaire.

Quel est le rôle de l’avocat dans le monde des affaires aujourd’hui ? Comme nous évoluons dans un contexte économique difficile, mondialisé et souvent source de tensions sociales, il n’est pas inutile de rappeler que le droit, qui apporte tant des protections que des obligations, constitue le fondement d’un pacte de vie en société. Dans ce contexte, les avocats ont un rôle premier dans la vie des affaires. Ils sont les conseillers des clients et ont vocation à donner les clés de lecture juridiques nécessaires au processus de décision. Ils aident les entrepreneurs durant le processus décisionnel et sont les garants de la bonne application des lois et règlements par ces derniers.

Vous mettez en avant le concept d’« avocat entrepreneur ». Qu’entendez-vous par là ? L’avocat d’affaires moderne doit pouvoir aller au-delà de la seule connaissance juridique. Valider la légalité d’une opération ne suffit plus. Il se doit de maîtriser la grammaire des affaires pour comprendre rapidement les enjeux stratégiques des clients, et délivrer un service à forte valeur ajoutée qui vienne s’imbriquer dans les différentes dimensions du projet du client. Il doit avoir le sens des affaires et un esprit d’entreprise assez vif qui lui permettront d’être l’interlocuteur de premier plan pour le dirigeant d’entreprise. Avec l’évolution du monde des affaires et le contexte digital, l’avocat traditionnel va devoir évoluer.

Vous faites vôtre cette citation célèbre d’Henry Ford : « Je ne paie pas un avocat pour qu’il me dise ce que je ne peux pas faire, je le paie pour qu’il m’explique comment je peux faire ce que j’ai envie de faire » ? Oui. Elle renvoie précisément à la vision que l’on a chez PwC Legal par rapport à la profession d’avocat. Notre mission est d’aider nos clients à faire tomber les barrières et de leur permettre de concrétiser leur vision entrepreneuriale dans le respect des lois et des règlements. Et cela suppose ce fameux état d’esprit et ce sens des affaires qui nous ramènent à la notion d’« avocat entrepreneur ».

Où est la frontière entre le métier d’avocat et celui de conseil tel que le proposent les cabinets d’audit et de conseil ? Ces deux métiers peuvent se retrouver dans une communauté au service d’un même client, partager certaines méthodes de travail et des valeurs comme la rigueur ou la recherche de l’excellence. Mais sur le fond, il s’agit de deux professions bien distinctes sur le plan institutionnel et sur le plan des offres de services respectives. Notre profession est fortement réglementée et son exercice encadré par le Barreau. Un certain nombre d’actes et de conseils juridiques ne peuvent être prestés que par les seuls professionnels qui sont inscrits au Barreau. À l’inverse, l’avocat n’empiète pas sur les actes accomplis par les professionnels du chiffre que sont les réviseurs d’entreprise.

Sont-ce là des activités concurrentes ou complémentaires ? Pour moi, ces deux activités doivent vraiment être perçues comme complémentaires.

C’est d’ailleurs là toute la force d’un réseau comme le nôtre de pouvoir offrir à nos clients une offre complète de services professionnels et d’élaborer des solutions intégrées qui couvriront les aspects légaux, comptables, fiscaux, financiers et sociaux sur tout un projet.

Ceci posé, quelles sont les compétences nécessaires à un avocat aujourd’hui ? Cela va au-delà de la simple expertise juridique. Aujourd’hui, les avocats d’affaires doivent disposer d’une forte prédisposition au legal project management, parce qu’ils doivent gérer des projets de bout en bout. On ne peut plus simplement se positionner comme simple expert du droit.

On est conseiller de l’entrepreneur et on doit être en mesure d’interagir de manière pragmatique non seulement avec les dirigeants, mais aussi avec les autres départements de l’entreprise. Et au-delà des compétences techniques, on doit disposer de qualités personnelles fortes comme l’intelligence relationnelle, des qualités d’écoute, l’empathie, parce qu’il faut comprendre les besoins de son client. C’est ce que l’on appelle en sociologie le quotient d’adaptation. Autrement dit la faculté de s’adapter, qui s’exprime par la flexibilité, la curiosité, le courage et la résilience des individus face à un environnement en mutation.

Les étudiants sont-ils formés à cette nouvelle réalité du terrain ? Pour ce qui est des questions de techniques juridiques et des techniques de recherche, sûrement. Pour tout ce qui relève des soft skills, cela est rarement enseigné dans les facultés de droit. Cet apprentissage doit se faire sur le terrain. Cela dit, de plus en plus de jeunes diplômés que l’on rencontre ont un double diplôme droit et business school qui intègre une dimension soft skills.

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