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CONNECTIVITÉ

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Photos GUY WOLFF

Le Luxembourg comme terre de succès

Auteur IOANNA SCHIMIZZI

Que le Luxembourg soit la terre de leur naissance, de leur enfance, ou de leurs amours, les quelque 94.335 Portugais du pays représentent autant d’histoires que de chemins de vie. Zoom sur neuf représentants de la première communauté « étrangère » du Luxembourg, qui y ont trouvé une terre d’épanouissement et de réussite professionnelle.

Jean-Paul Da Cunha Tombé dans le bain du carrelage

« L’école n’était pas mon point fort, mais je me suis accroché, et j’ai fait les Arts et Métiers. J’ai commencé ma carrière chez Stugalux, et c’est là que je suis tombé dans le bain du carrelage », raconte Jean-Paul Da Cunha, 43 ans, qui a créé son entreprise, JP Home Concept, à Ingeldorf, en 2015. « L’architecture intérieure me fascine, et je trouve cela passionnant de réaliser, par exemple, une salle de bains de A à Z pour un client. J’ai la chance que les clients, et même les collaborateurs avec lesquels je travaille depuis plusieurs années, m’aient toujours suivi dans mes différents postes », confie celui qui a également évolué en première division de football dans le championnat luxembourgeois. Et s’il concède qu’il enchaîne les journées de 12 heures, « je suis fier du parcours de mon entreprise, qui emploie aujourd’hui 39 personnes, et réalise un chiffre d’affaires de 5 millions d’euros ».

Nuno Fernandes L’occasion fait le patron

Depuis plus de 20 ans, Nuno Fernandes occupe une place importante dans le marché de l’automobile d’occasion avec Occasiounsmaart. « J’ai créé ma société en 2001 pour ma famille, parce qu’auparavant, j’étais chef de vente dans l’automobile déjà, mais cela me prenait beaucoup de temps. En ayant notre propre affaire, nous pouvions alors, avec mon épouse Fanny, qui est mon associée, travailler ensemble et gérer le quotidien de la famille. » Nuno Fernandes est né au Luxembourg dans les années 70. « Mes parents sont la première génération de Portugais à avoir émigré ici. Au début, à l’école, c’était compliqué pour nous, mais j’avais envie d’y arriver, et mes parents m’ont donné beaucoup de force et de valeurs pour réussir. » Son entreprise basée dans le Nord emploie aujourd’hui 19 personnes, « et, tous les jours, je fais les choses comme si c’était le premier jour ».

Bruno Silva Cunha L’autodidacte

« J’ai arrêté l’école à 15 ans, et j’ai rejoint l’entreprise que mon père avait créée deux ans plus tôt, au début des années 1990. J’y ai exercé tous les métiers : livreur, chef de dépôt, vendeur, et j’ai racheté les parts de mon père en 2016. Je crois que j’ai toujours eu la fibre entrepreneuriale, j’aime le commerce », explique Bruno Silva Cunha, administrateur délégué de Bexeb à Bascharage. Et depuis la création de l’entreprise par son père, la société familiale a bien grandi, puisqu’elle compte désormais 43 salariés, « et notre chiffre d’affaires est de 16 millions d’euros. Nous sommes passés de société dépositaire commercialisant des bières, des vins luxembourgeois et des soft drinks à une société importatrice de produits majoritairement portugais (à hauteur de 80 %, ndlr) à destination de l’horeca et des supermarchés », se réjouit ce patron de 41 ans.

À 36 ans, Remy Manso est déjà un entrepreneur chevronné. Il est à la tête de 12 restaurants – parmi lesquels le Batucada, le Piri Piri, ou encore El Barrio –, et avec plusieurs associés, il est aussi présent dans le secteur de l’immobilier. « Je suis né au Luxembourg, mais j’ai vécu jusqu’à mes 18 ans au Portugal. Je suis ensuite revenu au Grand-Duché pour travailler avec mon père, qui était dans la restauration. Il est malheureusement décédé jeune, à l’âge de 48 ans, seulement 10 jours après l’ouverture de mon premier business. Quand j’ai commencé, les gens pensaient que j’avais simplement de la chance, mais à présent, ils comprennent que ça marche vraiment », se réjouit celui qui emploie environ 350 personnes. Et même si le Covid-19 est « un coup dur, comme pour tout le secteur de l’horeca, nous continuons à nous développer, et j’aime les défis, donc cela ne va pas m’arrêter ».

Orlando Pinto Une pierre à l’édifice

Orlando Pinto est arrivé au Grand-Duché il y a tout juste 40 ans, et a commencé à travailler en tant que manœuvre dans une entreprise de construction. « C’est armé d’une pelle et d’une pioche que j’ai commencé mon aventure », explique-t-il. L’histoire de sa propre entreprise, Sopinor, commence quant à elle 20 ans plus tard, en 2002. « À cette époque, j’avais seulement quatre collaborateurs et j’étais loin d’imaginer la dimension qu’elle prendrait. » Aujourd’hui, le groupe, qui participe notamment au chantier du tram à Luxembourg-ville, compte 550 salariés et a réalisé un chiffre d’affaires de 50 millions d’euros en 2020. « Nous mettons un point d’honneur à accompagner des entreprises ou des associations au Luxembourg, mais aussi au Portugal. Je veux poursuivre cette même entraide que j’ai constatée à mon arrivée. »

Manuel de Abreu Un développement au ciseau

Manuel de Abreu, 54 ans, est arrivé avec sa famille au Luxembourg alors qu’il n’avait que 3 ans. Il rencontre son épouse, Nathalie, durant son adolescence, lors d’événements folkloriques portugais. Passionné par la coiffure, il a réalisé son apprentissage à 15 ans et passé son brevet de maîtrise. Après avoir travaillé dans différents salons de coiffure, « j’ai ouvert mon premier salon avec mon épouse en janvier 1991 à Luxembourg-ville, et nous avons ensuite poursuivi les ouvertures au fur et à mesure des années ». Aujourd’hui, NM Coiffure compte huit salons, dont certains qui proposent des prestations d’esthétique, en majorité dans les supermarchés Cactus. « Mon épouse s’occupe de la partie administrative, et moi, de la gestion du personnel (90 personnes, ndlr). Mais je coupe encore les cheveux le mercredi midi », explique Manuel de Abreu.

« J’ai fait mes premiers pas au Portugal, et ma famille est venue s’installer au Grand-Duché au milieu des années 70. » Le début du parcours de Jean-Paul Carvalho est semblable à celui de nombreux Portugais qui ont grandi au Luxembourg. Mais pour la poursuite de ses études, il décide de se lancer dans l’architecture. « C’est un domaine qui m’a très vite passionné, et j’ai décidé d’en faire mon métier. » Après des études d’architecture à l’Isa Saint-Luc, à Liège, dont il obtient un diplôme en 1999, il travaille pour le bureau d’architecture Paul Bretz Luxembourg. « Et en 2005, fort de l’expérience acquise et de mon souci du détail, j’ai fondé mon propre bureau. Et lorsque le cadre s’y prête, je n’hésite jamais à faire intervenir dans mes projets des chantiers d’insertion », ajoute celui qui est aussi passionné de dessin à main levée et d’arts martiaux.

Marco Godinho D’une idée à une œuvre

« C’est difficile pour moi de décrire exactement ce que je fais, car je dirais plutôt que je pars d’une idée ou d’un concept pour en faire une forme d’art, confie Marco Godinho, 43 ans. Ma première œuvre, d’ailleurs, c’était une petite cabane sur le balcon de l’appartement de mes parents à Echternach, où j’ai grandi, et qu’ils ont toujours. » Ses parents sont justement venus du Portugal en 1987 alors qu’il avait 9 ans, et son frère Fábio (voir ci-contre), seulement 2 ans. « Je m’inspire vraiment de mon histoire, de ma multiculturalité, pour mon travail. J’aime beaucoup explorer les questions d’exil, de mémoire, mais aussi de conventions géographiques, à travers le dessin, la vidéo, des installations ou des projets participatifs », raconte celui qui a notamment étudié à l’École des Beaux-Arts à Nancy, et a représenté le Grand-Duché à la 58e Biennale de Venise, avec son exposition Written by Water.

Fábio Godinho La scène comme leitmotiv

Fábio Godinho n’est pas un enfant de la balle. « Nos parents (il est le frère de Marco Godinho, ndlr) n’évoluaient pas dans le milieu artistique, mais notre maman est couturière, et ils ont toujours aimé l’art. » Aujourd’hui âgé de 35 ans, Fábio Godinho est acteur, metteur en scène et performeur pour le théâtre et le cinéma. « J’aime mélanger toutes les formes d’art, j’ai notamment étudié au Cours Florent à Paris, mais aussi à la Sorbonne. Ce que je remarque aussi, c’est que les choses ont évolué depuis que j’ai débuté dans le métier. Auparavant, avoir un accent rendait certains rôles plus difficiles à obtenir. Aujourd’hui, je ressens vraiment l’inverse : parler cinq langues, comme c’est mon cas, est vraiment un atout. Je peux jouer au Portugal, en France, au Luxembourg… », expose celui qui a également été le lauréat de la sélection luxembourgeoise au festival Off d’Avignon 2021 et a cofondé la Compagnie TDP, à Paris.

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