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DANS LES ENTREPRISES
Défis et mise en pratique au quotidien
Que ce soit par des petits gestes ou des changements importants, toutes les entreprises mettent en place des actions qui permettent de se rapprocher au mieux des objectifs ESG. Exemples concrets d’actions et de défis rencontrés dans cinq secteurs différents.
Auteurs M.P., S.L., Q.D., M.J.
INCIDENCES MONDIALES RÉPARTIES PAR TYPE DE RESSOURCE MATÉRIELLE
Source Leading the way to a global circular economy: state of play and outlook (mars 2020)
Impact sur le changement climatique
Impact des particules sur la santé Stress hydrique Perte de biodiversité due à l’utilisation des terres
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Couvrant l’ensemble du territoire luxembourgeois, les transports publics du Grand-Duché assurent le transport de passagers sur des lignes express, régionales – qu’elles soient primaires ou secondaires –, transversales, ainsi que sur des lignes locales. Depuis 2017, de plus en plus de bus électriques circulent sur ces lignes qui sillonnent le pays jusque dans ses moindres recoins. « Les projets pilotes de lignes de bus électriques seront poursuivis avec comme objectif d’aboutir à zéro émission sur le réseau des bus régionaux du Régime général des transports routiers (RGTR) en 2030 », partage Murielle Simon, coordinatrice CSR au sein de WEmobility, société du groupe Emile Weber dédiée au transport des personnes par route.
L’entreprise dispose de 285 bus qui circulent sur les lignes publiques, mais qui permettent aussi d’assurer d’autres missions, comme le ramassage scolaire ou le transfert de personnes à mobilité réduite. « Fin 2022, 15 % de notre flotte sera déjà électrifiée, ce qui représente pour nous de nouveaux défis au niveau du dispatching et des ateliers, poursuit Murielle Simon. Notre site de Diekirch-Fridhaff dispose actuellement de 26 places de charge et sera agrandi jusqu’en 2025. De plus, nous finalisons actuellement l’électrification de notre site d’Echternach, avec 24 emplacements destinés à la charge. D’autres entrepôts vont suivre. Le principal challenge rencontré est de gérer la charge des véhicules au bon moment et au bon endroit, en disposant du temps nécessaire pour cela. »
L’écoconduite en mode électrique En tant qu’acteur majeur dans le secteur du transport de personnes, WEmobility s’est engagée à créer de la valeur pour la communauté qu’elle sert, et pour la société en général. « C’est pour cela que nous avons créé un système de gouvernance RSE, constitué d’un comité dédié qui travaille suivant une stratégie de développement durable. Nos programmes d’engagement se basent sur trois axes-clés, à commencer par la fourniture d’un service de mobilité équitable pour tous, peu importe les capacités physiques de chacun. Ensuite, nous voulons être une entreprise responsable, à la recherche constante de nouveaux moyens de réduire notre consommation d’énergie à travers l’utilisation de nouvelles technologies. Enfin, nous souhaitons encourager la pratique des achats durables, garantir un service de qualité à nos passagers et participer au développement
Secteur des transports
Entièrement gratuits depuis le 1er mars 2020, les transports publics luxembourgeois seront 100 % électriques en 2030.
CHIFFRES-CLÉS DU RÉSEAU DE TRANSPORTS PUBLICS
35
Un montant de 35 millions d’euros va être destiné à subventionner l’électrification du réseau de bus du Régime général des transports routiers (RGTR) au Luxembourg.
500
Le réseau de bus RGTR pourrait atteindre une flotte de 500 bus électriques d’ici la fin de l’année 2023 pour permettre d’assurer un réseau électrifié sur 77 lignes publiques d’autobus en 2024 et 23.800.000 kilomètres planifiés.
158
Pour cette année 2022, la flotte RGTR se compose de 1.396 bus, dont 158 bus électriques, soit 11 % de la flotte. En 2021, le réseau de bus RGTR au Luxembourg comptait 465 lignes publiques et scolaires, avec plus de 9.000 courses journalières en semaine et une prestation de 81,5 millions de kilomètres parcourus. Pendant l’année 2022, le nombre de passagers a augmenté de 26 % par rapport à 2021. local de la culture et des sports », explique Murielle Simon. WEmobility n’a pas attendu l’arrivée des véhicules électriques pour mener des actions concrètes sur le terrain, à commencer par la formation à l’écoconduite. « Cette matière prend encore un sens plus fort avec le bus électrique, qui demande une conduite adaptée pour permettre le trajet le plus long possible entre deux recharges. Mais nous avons déjà beaucoup travaillé sur ce thème par le passé avec nos véhicules diesel, avec de nombreuses améliorations à la clé, constate la coordinatrice du comité RSE. Nous travaillons notamment avec un logiciel qui évalue le style de conduite du chauffeur, ce qui mène ensuite à des corrections, voire à des formations. Le carburant représente un poste de coût très important pour une entreprise comme la nôtre, et il était évident de prendre le sujet à bras-le-corps. »
Pour répondre au mieux à cette réduction des coûts et des émissions de CO2, WEmobility s’est également dotée de voitures électriques pour assurer le transfert des chauffeurs qui commencent ou terminent leur service. « En 2021, l’entreprise a également réalisé son premier bilan carbone et est désormais prête à répondre aux nouvelles exigences qui font suite à la mise en place de la taxonomie européenne. Nous serons dans l’obligation de livrer un premier rapport en 2024 sur notre activité 2023. De manière générale, nous essayons de profiter de toutes les synergies possibles au sein du groupe Emile Weber, que ce soit au niveau des dépôts ou dans l’optimisation de notre fonctionnement au quotidien. L’électrification de nos bus implique de grands changements pour tout le monde, les chauffeurs et le dispatching, mais aussi les équipes techniques. La mécanique cède le pas à l’informatique, et, surtout compte tenu du temps de recharge, il faut plus de véhicules pour assurer un même service, et ces véhicules électriques sont beaucoup plus chers… »
En avril dernier, le gouvernement luxembourgeois a présenté son Plan national de mobilité, le défi identifié étant de devoir gérer, d’ici 2035, une augmentation de 40 % des demandes de mobilité à travers l’ensemble du pays.
Le rôle de l’industrie, caractérisée par sa capacité à répondre à large échelle à des besoins du marché, est évidemment prépondérant dans l’adoption d’un modèle de développement durable. Si l’effet de levier d’un industriel en faveur du changement est considérable, sa transformation est aussi plus complexe à appréhender, tant la production de ces acteurs dépend de nombreux facteurs. Toutefois, au Luxembourg notamment, de nombreux industriels n’ont pas attendu d’être contraints par l’urgence sociétale pour mettre en œuvre des approches vertueuses. L’un des fleurons de l’industrie agroalimentaire grand-ducale, les Moulins de Kleinbettingen, a ainsi mis en place une approche originale dès le milieu des années 90. « En tant que meunier, en collaboration avec les agriculteurs et la Chambre d’agriculture, nous avons contribué à la création du label Produit du terroir – Lëtzebuerger Wees (blé luxembourgeois), explique Jean Muller, CEO des Moulins de Kleinbettingen. À l’époque, tout le blé nécessaire à la production de nos farines était importé d’Allemagne ou même des États-Unis, sans garantie de qualité. Or, au Luxembourg, nous disposions de bons agriculteurs et de bonnes terres. Nous avons alors envisagé ensemble la meilleure façon de mettre en œuvre une filière, permettant de cultiver du blé de qualité. »
Secteur de l’industrie
Les acteurs agroalimentaires misent sur les circuits courts au service de la valorisation des ressources locales.
CHIFFRES
Depuis le milieu des années 90, une nouvelle filière qualitative a vu le jour pour développer la production d’un blé de qualité au Luxembourg.
Nouvelle filière Aujourd’hui, autour de ce label sont rassemblés quelque 250 agriculteurs, auprès desquels s’approvisionne le célèbre meunier luxembourgeois. Chaque année, 18.000 tonnes de blé sont produites et valorisées par cette filière. Cela représente 50 % de la production de blé panifiable au Luxembourg. « C’est unique en Europe. Non seulement cette initiative est à l’origine d’une nouvelle filière, mais elle se développe dans un esprit de durabilité, dans le respect des terroirs, de l’environnement et de l’ensemble des parties prenantes à la filière, du cultivateur au consommateur », explique Jean Muller.
C’est avant tout une réelle démarche de partenariat qui rassemble les acteurs de la filière. Le meunier travaille main dans la main avec les agriculteurs. Ensemble, ils sont notamment particulièrement attentifs au choix des semences et variétés de blé cultivées localement. « Une approche durable implique de prendre en considération les dimensions économiques, environnementales et sociales, poursuit Jean Muller. Cela commence par
18.000
tonnes de blé
C’est la production annuelle de la filière durable Produit du terroir – Lëtzebuerger Wees. Cela représente 50 % de la production de blé panifiable au Luxembourg.
250
agriculteurs
Ils prennent part à cette filière, contribuant à une culture respectueuse de la terre, veillant à la qualité du produit, contre une juste rémunération. garantir une récolte de qualité, avec des variétés adaptées à nos terres agricoles et notre climat. Dans une démarche d’amélioration continue, nous essayons, saison après saison, d’améliorer la culture en cherchant à minimiser le recours à des engrais azotés ou à des produits phytosanitaires. Le label proscrit aussi l’usage d’insecticides de stockage. »
Ces exigences sont autant de garanties de qualité pour le consommateur, plus que jamais soucieux de manger des produits naturels et respectueux de l’environnement. La démarche, en plus de répondre aux attentes actuelles des consommateurs, assure aux cultivateurs une rémunération juste. « Si cet engagement pour la qualité et le respect de l’environnement a un coût, la démarche a de nombreuses vertus. La logique de circuit court est à la fois économique et écologique, permettant d’épargner les impacts du transport. Plus on achète proche de chez soi, moins on paie l’acheminement des matières premières, commente encore Jean Muller. L’adhésion des agriculteurs au label est assortie de primes, de qualité, ou encore est en faveur de la biodiversité. In fine, le blé produit dans le contexte de cette filière est payé 15 à 20 % au-dessus des prix du marché. En fin de compte, tout le monde en sort gagnant. »
Préserver les ressources Mettre en place une telle démarche ne se fait pas du jour au lendemain. « Il faut du temps pour convaincre les acteurs de rejoindre un tel projet, pour développer les bons partenariats et parvenir à un résultat, confie Jean Muller. Il faut de la patience, et une réelle volonté, pour aligner les éléments au service d’un objectif commun. »
À l’instar des Moulins de Kleinbettingen, Sources Rosport a fait du respect de l’environnement un engagement-clé. Sa ressource principale étant l’eau minérale naturelle, que l’entreprise capte dans les profondeurs de la Terre, la préservation de l’environnement est un enjeu-clé pour sa pérennité, mais aussi pour la satisfaction de ses consommateurs. L’entreprise, dans le choix de ses partenaires et fournisseurs, privilégie les circuits courts. Elle s’est aussi engagée dans une démarche de circularité. Par exemple, ses bouteilles en plastique, recyclables, sont désormais entièrement fabriquées à partir de matériaux recyclés. Les bouteilles en verre, consignées, peuvent être réutilisées jusqu’à une trentaine de fois avant d’être recyclées en fin de vie.
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Le monde dans lequel nous vivons depuis plusieurs décennies est caractérisé par une production importante d’objets manufacturés, dont un certain nombre possède des composants électriques ou électroniques. S’il fut un temps où la nécessité de réparer ou de recycler ces objets plutôt que de les jeter n’apparaissait pas comme une évidence, c’est désormais de plus en plus le cas dans nos régions. Depuis plusieurs années, les pays européens ont en effet mis en place des filières dédiées au recyclage des appareils électriques et électroniques. Au Luxembourg, c’est l’asbl Ecotrel qui effectue ce travail. « Nous sommes nés en 2004, dans le sillage de deux directives européennes qui visaient à responsabiliser les producteurs d’équipements électriques et électroniques. Le but de cette réglementation était de faire en sorte que ces acteurs financent la collecte et le recyclage de ces appareils », explique Andy Maxant, CEO d’Ecotrel et d’Ecobatterien.
Grâce à ce financement – qui est répercuté sur les consommateurs, qui paient désormais une « cotisation de recyclage » à l’achat de tout appareil électrique ou électronique –, la structure Ecotrel s’est développée au fil des années. En 2021, elle a collecté et traité, via les resources centres du pays, 6.659 tonnes d’appareils. La plus grosse partie de cet ensemble est constituée de petits appareils électroménagers, de matériel informatique, audio, d’outillage, de jouets… Certains objets, en raison de la dangerosité des liquides ou gaz qu’ils contiennent, sont traités à part. C’est le cas des frigos ou des radiateurs à bain d’huile, par exemple. « La plupart des appareils sont démontés à Bettembourg, mais recyclés à l’étranger, dans un rayon maximum de 300 km, car nous ne disposons pas de structure dédiée dans le pays, poursuit Andy Maxant. Nous veillons toutefois à la traçabilité de chaque élément envoyé dans ces installations de traitement. »
Au-delà de ce rôle fondamental permettant d’assurer le recyclage des appareils électriques et électroniques dans le pays, Ecotrel a également développé, en 2019, un projet appelé « Social ReUse ». Son objectif est de donner une seconde vie aux objets, avant même de les recycler. « Dans différents resources centres, nous avons ouvert un diagnostic point, qui permet aux particuliers de déposer des objets qu’ils considèrent comme étant encore fonctionnels. Sur place, nous réalisons un prédiagnostic de ces appareils. Puis, s’ils nous paraissent en état, nous les donnons à deux associations : Digital Inclusion, qui met le
Secteur des services
Réutiliser plutôt que jeter et racheter. Au Luxembourg, différents acteurs adoptent cette démarche.
L’UE ECOLABEL, UNE INITIATIVE EUROPÉENNE
L’EU Ecolabel est le label écologique officiel de l’Union européenne. Il a été créé en 1992 par la Commission européenne. Depuis sa création, la liste des produits qui peuvent obtenir ce label s’est considérablement agrandie et comprend, entre autres, des produits d’entretien, du papier, des cosmétiques, de la peinture, des télévisions, des matelas, etc.
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021 ÉVOLUTION DU NOMBRE DE PRODUITS PORTEURS DE L’ECOLABEL
Source Commission européenne
21.301
22.483
13.593
37.306
43.287
44.713
38.755
54.115
72.227
77.358
75.795
83.590
matériel IT réparé à disposition des personnes qui en ont besoin, et Nei Aarbecht, qui remet des chômeurs de longue durée au travail en leur faisant réparer ces objets. Les appareils sont ensuite revendus à un prix abordable », détaille
Andy Maxant. Depuis le début de l’année 2022, 400 appareils ont ainsi été remis sur le marché chaque mois.
Réparer pour favoriser l’économie circulaire Cet attrait pour le réemploi, qui s’exprime au sein de la population, est aussi devenu un impératif légal au début du mois de juin 2022, avec la loi relative aux déchets d’équipements électriques et électroniques. Celle-ci consacre désormais un volet à la réutilisation des objets. Ce n’est donc pas étonnant qu’un nombre croissant d’acteurs investissent le secteur. C’est notamment le cas de The Happy Cyclist, une structure dédiée à la réparation de vélos – conventionnels comme électriques – qui a vu le jour au printemps 2022. Pour Emmanuel Plattard, son fondateur, la décision de lancer cette activité constituait d’abord une réponse à une situation vécue. « Je travaillais pour Cargolux et faisais les trajets aller-retour tous les jours à vélo. À chaque fois que je devais faire réparer mon vélo, le temps d’attente était long, le prix n’était pas connu à l’avance et il fallait apporter le vélo dans l’atelier de réparation. Je me suis dit qu’il était sans doute possible de mettre au point un système plus efficace. »
Après avoir réalisé un sondage auprès d’une centaine de personnes et constaté l’intérêt pour son projet, Emmanuel Plattard a donc lancé son entreprise de réparation de vélos à domicile, partout au Luxembourg. « Ce qui est unique, c’est que nous proposons un système d’abonnement, à partir de 21,90 € par mois, afin de rendre la réparation plus abordable que l’achat d’un nouveau vélo, ce qui n’est pas toujours le cas dans la filière classique, poursuit le fondateur de The Happy Cyclist. Avec l’abonnement, tous les frais de main-d’œuvre sont couverts, en dehors du coût des pièces de rechange. » 650 réparations ont déjà été effectuées depuis le lancement de l’entreprise, qui a séduit de nombreux particuliers, mais aussi des entreprises, comme la Banque de Luxembourg et le Luxembourg Stock Exchange.
Atteindre l’objectif de neutralité carbone que s’est fixé l’Union européenne exigera des efforts de tous. S’il sera nécessaire de revoir les modèles opérationnels, de repenser les circuits d’approvisionnement, la transition implique aussi de s’appuyer sur la technologie et d’investir avec ambition dans l’innovation au service d’une nouvelle économie.
« L’innovation et les nouvelles technologies sont essentielles à la transition que nous devons opérer, commente le Dr Arno Biwer, group leader Environmental Policies au sein du List, responsable de la plateforme Betriber & Emwelt. De nouvelles solutions, déjà disponibles actuellement ou à venir, doivent contribuer à soutenir la transition, et ce dans de nombreux secteurs et domaines de notre vie quotidienne. La réduction de notre empreinte carbone et environnementale ou la mise en œuvre d’une économie circulaire nécessitent de nouvelles approches et des dispositifs techniques innovants. Au-delà de la recherche et de la conception de ces solutions, il importe aussi d’en faciliter l’adoption. »
Sensibiliser et promouvoir C’est dans cette optique que la plateforme Betriber & Emwelt, gérée par le List et financée par le ministère de l’Environnement, a vu le jour. Celle-ci, à travers des événements, des formations et la diffusion de contenus, entend, d’une part, sensibiliser les acteurs vis-à-vis de leurs obligations légales – actuelles et futures – en matière de respect de l’environnement, à l’échelon national et européen, et, d’autre part, permettre à chacun d’y répondre efficacement. Elle entend aussi valoriser un ensemble de solutions disponibles et promouvoir de nouvelles opportunités d’affaires ou encore d’innovation. « C’est aussi un lieu d’échange entre les différents acteurs publics et privés qui, pour atteindre les objectifs fixés, sont appelés à travailler en étroite collaboration et à développer des partenariats », précise le responsable.
De nombreuses solutions sont d’ores et déjà disponibles sur le marché. L’un des principaux enjeux est de permettre à chaque structure, en fonction de ses contraintes, de se les approprier.
À ce niveau, l’équipe de Betriber & Emwelt partage les mêmes ambitions que la Solar Impulse Foundation (SIF), l’initiative lancée par Bertrand Piccard à la suite de son tour du monde en avion alimenté uniquement à l’énergie solaire, et dont l’ambition était d’identifier 1.000 solutions technologiques contribuant à
Secteur des technologies
L’innovation technologique et l’adoption de nouvelles solutions, deux leviers-clés de la transition vers une économie plus durable.
DES SOLUTIONS « MADE IN LUX »
Parmi les 1.425 solutions ayant obtenu le label de la Solar Impulse Foundation, 8 sont luxembourgeoises.
Clariter, par Clariter Procédé pratique et évolutif de recyclage qui vise à utiliser des déchets plastiques en fin de vie comme matériau de base pour la production.
MarinePaq, par Apateq Une solution rentable pour le traitement des eaux de lavage provenant de l’épuration des gaz d’échappement des grands navires.
Keiryo PET Solution, par Keyropackaging La solution Keiryo PET est un procédé de fabrication qui réduit l’empreinte environnementale et le coût de fabrication des bouteilles en plastique.
Thermal Storage Tank, par Cebi Il s’agit d’un dispositif de stockage de la chaleur placé sur le réservoir de lave-glace existant des véhicules électriques.
Plasma Assisted Gasification, par Boson Energy Une technologie de récupération de l’énergie qui transforme les déchets non recyclables en hydrogène.
Sustainability Management Platform, par Waves La solution propose des analyses complètes permettant aux entreprises de s’engager sur la voie d’une économie plus durable.
ORCA (Optical and RF Constellations on Aircraft), par SkyfloX Transforme les flottes d’avions de ligne, équipés de capteurs, en une plateforme de services de données d’observation de la Terre.
MolecularGrip, par Molecular Plasma Group Une technologie de fonctionnalisation de surface sans solvant qui réduit le besoin en produits chimiques dangereux. la transition écologique, directement disponibles et économiquement rentables. L’objectif fixé a été atteint il y a plus d’un an et est désormais largement dépassé. La fondation, en ce début d’automne, avait labellisé quelque 1.425 solutions. À travers son département dédié aux sciences de l’environnement, le List et ses experts ont notamment été mis à contribution pour évaluer les solutions candidates au label. « Désormais, le véritable défi est de mettre la transition en pratique. Si le cadre légal est de nature à contraindre les acteurs à aller dans une direction voulue, de nombreux autres aspects doivent être considérés. L’appropriation de ces technologies implique un effort conséquent de sensibilisation, un renforcement des compétences et une évolution des perceptions et des comportements des consommateurs comme des entreprises, poursuit le Dr Biwer. À travers notre plateforme, notre volonté est de contribuer à ces enjeux tout en assurant la promotion du label. Nous cherchons aussi à valoriser les approches méthodologiques permettant aux acteurs d’opérer des choix technologiques pertinents, en vue de minimiser leur impact environnemental. »
8 solutions luxembourgeoises Parmi les 1.425 solutions labellisées, 8 sont actuellement made in Luxembourg (voir encadré). La dernière entreprise à avoir obtenu le label, en août dernier, est Molecular Plasma Group (MPG), pour sa technologie baptisée « MolecularGrip ». « Il s’agit d’une technologie de fonctionnalisation de surface sans solvant, explique le Dr Biwer. Elle permet de traiter diverses surfaces grâce à une technologie de nanorevêtement, pour créer, par exemple, des textiles et des filtres à air dotés de propriétés antivirales et antibactériennes, avec un besoin réduit en produits chimiques dangereux. »
Autre exemple, le fabricant de composants électromécaniques Cebi a reçu le label pour un dispositif de stockage de chaleur placé sur le réservoir de lave-glace existant des véhicules électriques. La technologie utilise la masse thermique du réservoir de lave-glace pour stocker la chaleur produite pendant le fonctionnement du véhicule. Celle-ci est libérée lors du redémarrage à froid du véhicule, en complément du chauffage électrique auxiliaire. Elle permet de chauffer l’habitacle au lieu d’utiliser la batterie et contribue à prolonger l’autonomie et la durée de vie de celle-ci.
Secteur
Après le pétrole, l’industrie textile est la deuxième industrie la plus polluante au monde. En raison des matières utilisées, ses déchets sont rarement recyclables. En Europe, chaque année, du commerce 4 millions de tonnes de textile sont jetées. Rien qu’au Luxembourg, en 2018, Caritas annonçait le chiffre de 7,454 tonnes de déchets textiles produits, soit 12,24 kilos par habitant.
Pour Debbie Kirsch, fondatrice de la marque Devï : « L’industrie de la mode est simplement une tragédie. Il n’y a plus d’histoire ni de valeurs derrière nos vêtements. Les gens préfèrent la Certaines marques quantité à la qualité et les grandes marques (tant celles de la fast fashion que les marques de luxe) sont incroyablement douées pour dissimuler leurs impacts négatifs. Ce qui est encore de l’industrie textile bougent pour rendre cette dernière moins pire est tout ce greenwashing en raison de l’en- polluante. Exemple gouement pour l’engagement durable. » Rien ne laissait présager que Debbie Kirsch avec la marque Devï. créerait sa propre marque de vêtements. En 2018, ses études en biologie et sciences environnementales validées, elle ambitionne d’intégrer CHIFFRE un master en économie et innovation durables. Pour ce faire, elle doit réaliser un stage. Elle 12,24intègre l’ONG Institute for Philanthropy and Annuellement, Humanitarian Development (IPHD), où elle chaque personne produit est chargée de développer un projet centré sur le coton organique avec des fermiers locaux. en moyenne 12,24 kilos de déchets textiles. Une fois en Inde, elle fait une rencontre qui changera le cours de son stage. « Une fois sur place, je suis tombée amoureuse d’un autre projet de l’ONG, Saheli Women », explique Debbie Kirsch.
Saheli Women est une branche de l’IPHD créée en 2015, dont la mission est de rendre leur autonomie financière aux femmes en difficulté du village de Bhikamkor, dans la région du Rajasthan, en les faisant participer à la confection de vêtements éthiques et durables. Ces femmes n’ayant pas d’expérience en tant que couturières, l’association était à la recherche de partenaires voulant confectionner des pièces simples afin de développer leurs compétences. « Ayant toujours eu du mal à trouver des vêtements éthiques et respectueux de l’environnement, je me suis dit que cela pourrait être intéressant de créer quelques vêtements pour mes amis et moi », explique Debbie. Cet essai est concluant et la marque Devï est créée.
Quatre ans plus tard, Debbie collabore toujours avec Saheli Women. En 2018, l’association employait une vingtaine de femmes. Depuis, en travaillant principalement avec l’entreprise luxembourgeoise, Saheli Women a engagé une cinquantaine de personnes qui confectionnent 80 % des produits de Devï. Les 20 % restants sont réalisés par deux entreprises familiales indiennes. Réduire son empreinte écologique Dès la première collection, il était crucial pour Debbie de ne pas contribuer à la production de textile afin de réduire son impact environnemental : « Étant donné l’impact extrêmement négatif de la production de tissu, il était crucial pour moi de ne pas en produire du nouveau. » Les matières utilisées sont donc des restes de tissus, des textiles inutilisables ou d’anciens saris. L’ensemble du processus est aussi court et transparent que possible. La conception des collections se fait une fois par an, lorsque Debbie se rend en Inde, en collaboration avec Saheli Women. Lors de ce voyage, la fondatrice de la marque se rend également chez ses fournisseurs de tissu afin de faire une sélection pour les prochaines collections. Une fois ces dernières confectionnées, elles sont expédiées directement dans les deux boutiques de la marque, à Luxembourg-ville et Amsterdam. Seuls trois à quatre envois sont réalisés annuellement, afin de réduire l’empreinte carbone. L’aspect humain est aussi essentiel. Grâce à la production de vêtements, l’entreprise finance les assurances maladie ainsi que l’éduCHAÎNE DE VALEUR DES ÉMISSIONS cation des enfants des couturières de Saheli DE GAZ À EFFET DE SERRE DES HABILLEMENTS ET CHAUSSURES Women et des deux entreprises familiales avec lesquelles elle travaille. Source McKinsey & Company and Global Fashion Agenda (2020) Au Luxembourg, Debbie sensibilise la population. « Il s’agit de promouvoir une mode plus 38 % Production durable et d’informer les gens sur ce sujet. De nombreuses personnes ne sont pas au courant du de matériaux fait que l’industrie textile est l’une des industries les plus polluantes de la planète. » Chaque vêtement est accompagné d’un dessin représentant la couturière qui l’a fabriqué et de l’explication du processus de fabrication. « J’espère réellement que les gens commenceront à acheter plus consciemment, en se posant des questions sur l’origine de leurs produits. Je veux croire que nous pourrons revenir à un consumérisme plus conscient, où les gens choisissent la qualité plutôt que la quantité et achètent un article avec l’intention de le garder toute une vie plutôt que pour un seul événe6 % ment », conclut Debbie Kirsch. Préparation du tissu Production en amont Opérations sur les marques Utilisation et fin d’utilisation
15 % Procédés humides
3 % 20 % Fin de vie Utilisation du produit 3 % Transport 3 % Vente au détail 4 % Couper, fabriquer 8 % et tailler Préparation du fil