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PATRIMOINE
Texte : Corine Tellier Illustrations et sources : Iconothèque historique de l’océan Indien Département de La Réunion.
Les belles dionysiennes
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Notre Chef-Lieu offre un patrimoine architectural créole original et hors du commun. Partons à sa découverte en visitant quelques demeures remarquables construites par la riche bourgeoisie de l’île à la fin du XIXe siècle.
Saint-Denis : Villa Ponama, rue Roland Garros Fonds privé Legros, Jean (1920-2004) 5P1.2006.JL.PL-1926
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Razafin. La Tante. La Reine. La Sœur. Résidence d’exil à Saint-Denis de La Réunion (actuelle Villa Ponama) 1897 Mathieu, Henri Fonds Privé Jean-François Hibon de Frohen 15PG19b D ès les années 1720, en vue de constituer une ville, la Compagnie des Indes distribue des « emplacements » aux premiers colons venus s’installer à Saint-Denis.
Le 15 juillet 1723, Pierre de Guigné obtient le long de la rue de Paris un immense terrain qui s’étend de cette rue au rempart de la rivière SaintDenis et de la rue Sainte-Anne à la rue Félix Guyon. En 1793, Jean-Baptiste de Lestrac, négociant et propriétaire terrien à Bourbon y fait construire sa maison. Plusieurs familles de planteurs la rachèteront successivement. En 1838, Guillaume Sylvain Robert, trésorier payeur de la colonie s’y installe avec sa famille, puis, le 15 octobre 1860, la maison et ses dépendances sont cédées à la colonie de La Réunion et affectées au logement de fonction du directeur de l’intérieur. Aujourd’hui ce bâtiment prestigieux abrite la Direction de la Communication du Département.
La Maison Ponama Rue Roland Garros à Saint-Denis
La maison Ponama est inscrite à l’inventaire supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 29 mars 1996. Cette villa exprime avec force la préciosité ornementale et le romantisme du style chalet de l’époque Napoléon III. Le rez-de-chaussée bâti par Albert de Villèle date des années 1860. La maison présente l’aspect d’un grand pavillon, avec une toiture à quatre pans percée de lucarnes. Une varangue en « L » l’agrémente le long de ses façades nord et ouest. Au début des années 1930, Marin Rivière, propriétaire du domaine de Grande-Terre à Saint-Leu, apporte des transformations radicales. La maison est surélevée d’un
étage couvert d’une toiture à deux pans ornée d’un fronton où se déploie un remarquable décor en bois découpé, unique dans l’île. Sur la façade nord, des bas-lambris décorés de moulurations complexes, de lambrequins au dessin élégant et d’impostes en bois créent un décor typique d’une architecture créole parvenue à son apogée dans les premières années du 20e siècle. La Maison Ponama fut la résidence de la Reine Ranavalona III, exilée à La Réunion avec sa famille en 1897, sur décision de Galliéni, qui avait aboli la royauté à Madagascar. La Reine fût transférée en Algérie 1898 où elle décède en 1917.
Le Château Morange Boulevard Doret à Saint-Denis
Le château, son patio, son parc, ses dépendances et ses clôtures sont inscrits en totalité au titre des Monuments Historiques depuis le 13 décembre 2010.
Construite à l’initiative de Prosper Morange par l’entrepreneur F. Chatel vers 1850, cette luxueuse demeure est située dans le quartier des Camélias. La riche bourgeoisie lors de l’apogée de la prospérité de l’île au milieu du XIXe siècle fit construire de magnifiques maisons à la périphérie du centreville. Edifié au milieu d’un immense terrain arboré, le Château Morange est de style néo-classique comme le musée Léon-Dierx, rue de Paris ou la demeure Lauratet, rue Alexis de Villeneuve. Le bâtiment a été conçu selon un plan carré avec un patio central ; il possède des galeries à colonnades sur trois de ses façades extérieures et dispose de dépendances. En 1926, le Château Morange fût réquisitionné et servit durant 3 ans de lieu d’exil à Abd el-Krim, célèbre combattant marocain du Rif vaincu par les Espagnols.
84FI2.49 Château Morange (cour intérieure). La fontaine avec un angelot Familles Morange et De Tourris 1890-1900 Photographie Archives départementales de La Réunion
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La Maison Foucque Rue Jules Auber à Saint-Denis
Cette élégante villa créole de 1869 témoigne de l’architecture Napoléon III. Elle abrite aujourd’hui les bureaux du service régional de l’Inventaire. Sa varangue avec ses colonnes ioniques et son garde-corps en bois ajouré est l’une des plus raffinées du chef-lieu.
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84FI2.47 Château Morange (façade sur le Bd Doret) Familles Morange et De Tourris 1890-1900 Photographie Archives départementales de La Réunion
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15P7.H2-G113 Hôtel du Directeur de l’Intérieur (rue de Paris) Georgi, Henri Antoine Théophile (1853-1891) 1879-1890 Photographie Fonds privé Jean-François Hibon de Frohen (1947)
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Do9-26 Maison Foucque St-Denis (anciennement Maison familiale du Dr René Barau) Créateur principal non identifié Photographie
PATRIMOINE de saint-pierre MAISON VALLÉE
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Anicet Orré (1791-1872) s’installe à la Ravine des Cabris en 1822. Sous le Second Empire, la maison d’habitation de la famille Orré devient une résidence originale dotée de tout le luxe d’une grande maison bourgeoise du milieu du 19 ème siècle. Ces modifications sont attribuées à Anicet Orré fils (1829-1879), surnommé « La Vallée ». La propriété lui doit son nom depuis la fin du 19 ème siècle.
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Blottie au pied d’une colline de pouzzolane, la demeure possède un simple rez-de-chaussée et présente un plan barlong. Derrière la profonde et large varangue de la façade se déploient deux vastes salons et une salle à manger. A l’arrière, une varangue fermée et une succession de chambres de petites dimensions, constituent des espaces plus intimes. Cette opposition affirmée entre pièces d’apparat et pièces secondaires reste unique dans l’île, principe inspiré de la distribution intérieure des châteaux ou hôtels particuliers des 17 ème ou 18 ème siècles français. Des portes amovibles, formant cloisons, séparent les pièces de réception : une fois repliées, elles donnent naissance à une vaste salle. Cette particularité architecturale unique dans l’île confirme la légende des fêtes fastueuses de Vallée.
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La demeure est surtout connue pour sa varangue. Rythmée par une succession d’arcs en accolade, ils sont soutenus par des colonnes à godrons avec des feuilles de lotus stylisées à la base. Aujourd’hui en fonte de fer, les colonnes sont à l’origine en bois. Les accolades relèvent de l’architecture moghole et laisse supposer l’intervention de menuisiers indiens, plus nombreux dans la colonie à partir des années 1860. Le style original de cette galerie atteste d’un goût pour l’éclectisme propre au 19 ème siècle. Valentin Hoarau restaure le faste de Vallée au début du 20 ème siècle. La configuration actuelle de la maison date des années 1960-1965, période correspondant à l’installation définitive de sa fille, Gabrielle Dupont, à Vallée.
La maison Vallée est classée en totalité au titre des monuments historiques. Elle ne se visite qu’exceptionnellement une ou deux fois par an avec le service culturel de la ville de Saint-Pierre avec l’autorisation des propriétaires. Texte extrait de « Monuments Historiques Pays d’art et d’histoires Les Portes du sud, 2006 ». Clichés Edgar Marsy et collection Archives Départementales de La Réunion. Renseignements : 0262 96 29 10 Saint-Pierre Patrimoine - Mail : valorisation.patrimoine@saintpierre.re