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Edgar, l'art de la photo sans compromis
SUR LES TRACES DU PATRIMOINE ARCHITECTURAL AVEC BERNARD LEVENEUR, PASSEUR DE MÉMOIRE
Texte : Corine Tellier Illustrations : Iconothèque Historique de l'Océan Indien et collection privée de B.Leveneur
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Petit aparté en compagnie de Bernard Leveneur, l'historien de l'art qui nous parle de sa passion pour le patrimoine architectural de l'île, les belles maisons d'antan comme les constructions plus modernes, dont l'histoire s'écrit au passé comme au présent.
Maison à Saint-Denis, vers 1965 (collection privée)
Notre patrimoine nous réserve encore de très belles surprises, tel est notre sentiment en écoutant Bernard Leveneur. Le regard de l'historien nous permet de nous défaire de visions un peu trop folkloriques pour faire la mise au point sur l'essentiel. « Je n'ai pas vécu dans une de ces cases créoles qui bercent l'imaginaire collectif. Mes parents avaient fait construire une grande maison en béton, très agréable à vivre, en 1973, dans le quartier de la Colline des Camélias. C'est également une maison en béton qu'habitaient mes grands-parents », nous confie ce Dionysien de naissance. Sa passion pour le patrimoine architectural local lui vient de la période qui suit ses études : en 1987, à l'issue de sa licence d'histoire, alors qu'il ambitionne un mémoire de maîtrise sur le mobilier créole, il se plonge dans un univers qui va radicalement changer son approche, les archives notariales. « Ces documents que j'ai compulsés et que j'ai recoupés avec les données des hypothèques – une chance inouïe - m'ont permis d'entrer en contact avec une source historique de premier ordre permettant de retracer l'historique des maisons et des bâtiments emblématiques en remontant jusqu'à la date de leur livraison ; un pan de l'histoire qui restait à écrire ». En recoupant les dates de construction, une chronologie de l'architecture réunionnaise commençait à prendre sens
Terrasse de la maison où séjourna la reine Ranavalo à l'angle de la rue Roland-Garros et le boulevard Lacaussade _ Maydell-Legras, Frédéric (1848-1912), 1870-1890 (photographie, Archives départementales de La Réunion)
Une histoire qui n'a pas besoin d'artifices tapageurs pour être attirante
Maison de Saint-Denis _ Labarthe, Anna (1877-?). Photographe : Labarthe, Pierre (1870-1947), commerçant, photographe : 1902-1906 (film souple, Archives départementales de La Réunion) pour lui. Comme en écho à ce déclencheur, il se voit offrir l'un des tout premiers ouvrages de référence sur les maisons créoles, « Cases cachées, les maisons de La Réunion ». « Une très bonne amie, Nathalie Hébrard, m'a fait découvrir ce livre écrit par Christian Barat et illustré par les photos de Christian Vaisse, notamment le petit fascicule à la fin de l'ouvrage qui met l'architecture créole en perspective historique, rédigé par Yves Augeard, le premier architecte des Bâtiments de France de La Réunion ». Il complète son cursus en reprenant le chemin de l’école du Louvre avant de revenir dans l'île en 1997. « Deux ans plus tard, Serge Gélabert m'appelle et m'offre l'opportunité d'écrire un livre sur les maisons créoles à La Réunion ! ».
Le début d'une aventure littéraire qui a été suivie par de nombreuses parutions sur le patrimoine de La Réunion. Le temps qu'il passe le nez dans les documents, Bernard Leveneur va lui donner une autre dimension en allant rendre visite aux propriétaires des maisons étudiées sur papier : « je complète ainsi ce que j'ai déniché dans les archives par le témoignage recueilli en direct auprès des occupants ! ». Une occasion pour ses hôtes de ressortir l'album photos, avec ces précieux clichés qui restituent la maison dans son contexte historique. S'il ne délaisse pas les belles créoles d'antan, l'historien de l'art avoue être « aujourd'hui bien plus passionné par les constructions en béton des années 1960, comme la poste de Saint-Pierre (un magnifique bâtiment), qui ont elles aussi une valeur historique, esthétique, patrimoniale ».