Champavère Manon - Rapport d'études architecture

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SOMMAIRE

INTRODUCTION __________________________________________________2

I.

FABRIQUER LA VILLE : FRICHE, ARTISTE, HABITANT _____________4 1. Rencontre entre la friche et l’artiste ______________________4 2. Un nouvel acteur : l’habitant ____________________________8

II.

INTERVENTION DANS LA VILLE : DE LA DEMARCHE A UNE IDENTITE _ 11 1. Une démarche diversifiée _______________________________11 2. Le politique : frein ou moteur ? __________________________13 3. En quête d’identité ___________________________________16

III.

UN NOUVEL OUTIL : L’EXEMPLE STEPHANOIS.________________19 1. Une ville de design et de développement durable ____________19 2. L’émergence de collectif d’architectes : La place du Géant _____21 3. Observation participante : La Cartonnerie __________________24

CONCLUSION___________________________________________________29

ANNEXES ______________________________________________________31 BIBLIOGRAPHIE – SITOGRAPHIE ____________________________________40

RETOUR SUR ENSEIGNEMENT______________________________________42

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INTRODUCTION Il n’est pas rare aujourd’hui de découvrir au coin d’une rue ou entre deux maisons, des lieux où art et construction se mêlent à la ville. Ces espaces en marge sont de plus en plus souvent investis par des actions artistiques mais aussi participatives. Ces évènements qui sont devenues courantes font naitre une nouvelle pratique de la ville qui engage les artistes, mais aussi et surtout les habitants dans la fabrication de leur lieu de vie. Qui se cache derrière ces évènements ? Pourquoi sont-ils de plus en plus nombreux ? Les friches urbaines sont devenues un véritable potentiel aux villes qui se projettent de plus en plus vers l’avenir. C’est pourquoi nous allons nous demander en quoi les chantiers participatifs et artistiques en friches urbaines, sont un nouvel outil de fabrication de la ville. Cette problématique engage des notions qu’il est conseillé de définir. Par définition, le chantier est un espace de construction ou de démolition. L’aspect participatif du chantier engage la démarche de plusieurs individus dans une création commune. Quant à l’aspect artistique, celui-ci développe l’élaboration d’objets ou même d’idées influencés par notre propre personnalité (émotions et sensations). Ainsi, la notion de chantiers participatifs et artistiques évoque une activité de construction élaborée à partir de l’implication d’individus divers, engageant leurs imaginaires et leurs convictions. Une friche urbaine est une zone, un terrain sans occupation humaine. Elle appartient le plus souvent aux quartiers industriels ou très anciens, abandonnés pour cause de faillite ou de dépeuplement. Cet espace est un terrain propice à des activités créatives et a une occupation libre. L’outil est un objet permettant de construire. De plus, la « fabrication » est empruntée du mot fabrica qui veut dire « atelier de l’artiste et/ou de l’artisan », et de defrabicare, qui veut dire « construire ». Ainsi, la notion d’ « outil de fabrication de la ville » implique l’utilisation d’un objet permettant de construire la ville. Les différentes notions abordées dans la problématique engagent une hypothèse : le chantier qui est un lieu de construction serait un outil créatif et collectif s’intégrant dans le processus de développement des villes Afin de répondre à cette question, j’ai engagé différents moyens et outils qui m’ont permis de construire ma recherche. Tout d’abord, j’ai commencé mon enquête par la lecture de livres et d’articles. La lecture d’articles sur le réseau internet m’a permis rapidement d’établir des thématiques, mais aussi, grâce à leurs bibliographies, de trouver des ouvrages de référence. On peut noter notamment deux livres qui m’ont particulièrement guidée : L’Art Contextuel de Paul Ardenne, mais aussi l’article de Charles Ambrosino et Lauren Andres, nommé « Friches en ville : du temps de veille aux politiques de l'espace ».

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Mes différentes lectures ont permis de mettre en lien des disciplines diverses comme la sociologie, l’anthropologie, l’urbanisme, mais aussi l’histoire et la philosophie. Cette diversité permet de me questionner sur un plan large de recherche et avoir un regard plu ouvert. Dans un second temps, j’ai réalisé des entretiens avec des personnalités importantes dans ma ligne d’étude. En effet, j’ai rencontré Nathalie Arnould, Design Manager de St Etienne, dans le but d’en apprendre davantage sur les chantiers participatifs et artistiques dans la ville de St Etienne ; mais aussi Sandra Trigano, sociologue, qui s’intéresse particulièrement aux interventions des artistes stéphanois ayant un rapport étroit avec leur ville d’origine. En complément de ces entretiens, j’ai aussi écouté une émission de radio France Culture où différents acteurs de la ville, comme Nathalie Arnould, s’interrogent sur la recherche d’une nouvelle image en ville. De plus, les sites internet m’ont été aussi d’une grande utilité, particulièrement dans la recherche d’informations concernant quelques exemples stéphanois de chantiers participatifs. Pour compléter mon investigation, j’ai utilisé la méthode de l’observation participante dans le cadre de la création d’un jardin partagé à St Etienne. Celle-ci m’a permis de me confronter moi-même en tant qu’acteur dans un chantier participatif. Le principe de l’observation participante est d’étudier avec objectivité les comportements et les interactions entre des individus dans un milieu donné. L’observateur est un membre initial du groupe observé ou rentre dans le groupe pour participer totalement à sa vie et ses activités. Il s'agit donc d'une immersion dans la vie du groupe qui nécessite de grandes capacités de prise de distance, notamment affective.1 Ainsi, on constate une diversité des méthodes qui sont la lecture, l’entretien, l’émission radio, mais aussi la recherche de terrain par l’observation participante. Dans l’hypothèse que les chantiers participatifs et artistiques en friches urbains sont un nouvel outil de la fabrication de la ville, nous pouvons établir différents axes de réponses. Dans un premier temps, nous étudierons la place de la friche dans la fabrique urbaine par sa rencontre avec le domaine artistique mais aussi par l’apparition de l’habitant comme outil de fabrication de la ville. Ensuite, nous nous intéresserons à la démarche des chantiers participatifs et artistiques que ce soit dans leurs limites ou bien leurs forces. Enfin, nous utiliserons le cas de St Etienne afin d’étudier des exemples de projets et d’initiatives dans la ville.

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AUBERT-LOTARSKI Angéline, « Etudes et conseils : démarches et outils », Outils pour agir, 2007, www.esen.education.fr

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I.

Fabriquer la ville : friche, artiste, habitant.

La friche est un espace à fort potentiel dans la ville. Hors les murs des musées, les artistes ont été les premiers à s’intéresser à cet espace libre de toute contrainte. Aujourd’hui, un nouvel acteur prend possession de ces interstices urbains : l’habitant.

1. Rencontre entre la friche et l’artiste 

La ville comme potentiel

« La ville : un structure avec des espaces interstitiels. »2. La ville est un espace informel et hétérogène. Bâtis, places, jardins constituent ce territoire, mais celui-ci présente aussi des espaces vides, indéterminés et vagues. Souvent en rupture avec l’ordonnance classique de la ville, ces interstices, ces creux, sont propices à être réinvestis par le champ artistique et culturel en lien direct avec la notion de territoire, d’histoire et de mémoire. Généralement, ces lieux de déshérence sont nommés friche. La friche est un lieu qui évoque pour la plupart des villes, un passé industrielle. On y retrouve souvent de vieux hangars, des lieux de déconstruction ou bien même des espaces abandonnés à la nature. Ce qui caractérise ces lieux, c’est leur qualité de mémoire. Traces du passé, elles nous rappellent les anciennes industries qui on fait grandir nos villes mais qui ont aussi marqué la population qui y vit. On peut dire ainsi que la friche est véritablement « un territoire emblématique des mutations des villes »3. Aujourd’hui, la friche est devenue une véritable ressource pour les villes. Elles permettent un nouveau développement qui engage le territoire en une relecture du passé, et une projection vers le futur. En effet, les acteurs du renouvellement urbain s’intéressent depuis quelques années à ces lieux qui juxtaposent des enjeux économiques, politiques, environnementaux, patrimoniaux mais aussi culturels. La réinsertion et le réinvestissement de la friche en milieu urbain participent ainsi des dynamiques de la ville. On peut ainsi citer Ambrosino Charles et Andres Lauren : « La friche est devenue une ressource pour une ville qui se reconstruit sur ellemême. »4 Pour aller plus loin, elle peut être aussi un laboratoire urbain, un terrain d’expérience sous diverses formes (lieux conventionnées ou squats). Ces réinvestissements informels ou formels peuvent permettre de revaloriser positivement ces espaces abandonnées

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HOSSARD Nicolas et JARVIN Magdalena, « C'est ma ville ! » : de l'appropriation et du détournement de l'espace public, Paris, l'harmattan, 2005, 284 pages. (Page 10) 3 COLLIN Michèle, « Nouvelles urbanités des friches », Multitudes, 2001/3 n° 6, p. 148-155. 4 AMBROSINO Charles et ANDRES Lauren, « Friches en ville : du temps de veille aux politiques de l'espace », Espaces et sociétés, 2008/3 n° 134, p. 37-51.

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La friche est un morceau de ville où toute chose est possible. D’après Anne Raulin dans Anthropologie Urbaine, la ville est un espace de représentation, elle est notre propre miroir car c’est un lieu où l’on s’exprime. La spécificité de l’environnement urbain c’est que l’usager aime entretenir une relation proprement singulière avec « sa » ville. D’après la sociologie de la forme de Georges Simmel, nous avons besoin d’apparence et donc d’identification pour appartenir à la ville. Les friches sont ainsi un lieu d’appropriation de l’habitant. En effet, il peut s’identifier, mais aussi donner son identité en intervenant lui-même dans ces espaces. Dans cette idée, on peut ainsi citer Michel de Certeau : « C’est ainsi que la ville en tant qu’ « espace » - ouvert à tous et n’appartenant à priori à personne – se transforme peu à peu en « lieu » - c’est-à-dire en un espace vécu, reconnaissable et familier.»5 Cette appropriation possède plusieurs caractéristiques. Elle ne peut être que passagère et séquentielle car malgré ce processus d’identification, l’espace urbain est un espace commun et disponible à tous et à chacun. Elle peut aussi impliquer une réalisation collective ou bien individuelle des individus. Ainsi, la friche est un espace propice aux habitants de s’investir afin de lui donner leur identité, ou bien plus largement, l’identité de leur ville. On peut alors, d’après les propos d’Anne Raulin, considérer la vile comme un théâtre urbain. En effet, le théâtre urbain qui se joue dans la ville est un jeu d’acteurs entre les usagers, les habitants. L’appropriation de cette scène ouverte est aujourd’hui un nouvel enjeu qui peut être réalisé par la prise en considération de l’espace de la friche urbaine. « Le théâtre urbain est un spectacle gratuit joué par les citadins ou bien destinés, dans ce lieu irrémédiablement urbain qu’est la rue déclinée sous toutes ces formes » Anne Raulin, Anthropologie Urbaine.6 

Un attrait pour l’artiste

L’apparition de l’art d’intervention est née au début du XXème siècle. Elle est due à la prise de conscience des artistes que leurs ateliers sont petits et que les musées sont réservés à une élite d’artistes. Ils préfèrent échapper aux structures instituées des salles d’expositions et des musées pour présenter leurs œuvres dans la rue, les espaces publics, ou les friches – un certain retour à la liberté. De plus, l’artiste est aussi attiré par l’effervescence de la ville industrielle car elle est active et reste en perpétuelle mouvement. Lors de ma conversation avec Sandra Trigano, sociologue, elle m’a exprimée le désir des artistes de retrouver un patrimoine, une histoire. Les friches industrielles sont des lieux de mémoire qui peuvent nous interpeller et nous questionner sur notre propre histoire. Par exemple, la ville de St Etienne est caractérisée par son passé industriel minier qui inspire beaucoup d’artistes locaux. 5

de CERTEAU Michel, GIARD Luce, MAYOL Pierre, L'invention du quotidien. Arts de faire, Paris, Folio « Essais », 1990. 6 RAULIN Anne, Anthropologie urbaine, Paris, A. Colin, 2007, 211 pages.

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En effet, Sandra Trigano m’a expliqué la rencontre avec un artiste- petit-fils de mineur- qui n’avait jamais pris conscience de son passé familial. Un jour, en allant sur une friche industrielle, il a été déboussolé émotionnellement par le lieu. La friche l’a interpellé sur sa propre histoire et lui a permis de retrouver une certaine « mémoire familiale » qu’il n’avait jamais prise en considération. Ainsi, on s’aperçoit que la mémoire d’un lieu et le passé industriel propre aux friches peuvent être des révélateurs de l’histoire de la ville mais aussi de sa propre histoire. On comprend ainsi l’attrait de l’artiste pour ces lieux emprunts de souvenirs. Comme le dit Michel de Certeau7, l’artiste écrit le texte de la ville, il prend possession de ses espaces vierges. En effet, l’artiste à un véritable rôle dans la création de cette nouvelle urbanité en la remettant en question par de nouvelles formes de réappropriation de l’espace urbain. Cet art doit toujours rester en relation étroite avec son contexte qu’il soit passé, présent, ou futur. Comme le signifie Pau Ardenne par rapport au propos de l’artiste Daniel Buren : « La vile est une réalité donnée mais malléable, un chantier où l’artiste installe une œuvre qui y prend rang d’ « outil visuel» ».8 L’artiste est attiré par la ville en de nombreux points : sa grande liberté, sa malléabilité et, son histoire. Apparait ainsi le terme d’ Ardenne dans Un Art Contextuel.

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art contextuel » abordé et explicité par Paul

Sous la formule d'art « contextuel », on entend l'ensemble des formes d'expression artistique qui diffèrent de l’œuvre d'art au sens traditionnel : art d'intervention et art engagé de caractère activiste, art investissant l’espace urbain ou le paysage, esthétiques dites participatives ou actives dans le camp de l'économie, des médias ou du spectacle. On peut noter que « le contexte », étymologiquement, c'est « l 'assemblage », du bas latin contextus, et de contextere, « tisser avec ». L’œuvre est donc insérée dans le tissu du monde concret avec des conditions matérielles définies, mais elle tisse avec le citadin et l’usager. De plus, L’art contextuel est aussi défini par la nonpérennité, et sa non-programmation des formes d’arts : il est souvent de courte durée et fait appel à l’expérience. L' « expérience » - à l’origine, l'experientia latine - -dérive du terme experiri, « faire essai de », un essai accompli de manière volontaire et dans une perspective exploratoire, visant à un « élargissement ou un enrichissement de la connaissance, du savoir, des aptitudes ». L’expérience en lien avec le contexte permet de rendre compte d’un véritable lien entre l’œuvre et les usagers dans le but de les interpeller, voir les convoquer dans l’œuvre elle-même. Ainsi, ’art contextuel définit par Paul Ardenne correspond à l’intervention des artistes dans l’espace urbain comme les friches. La principale caractéristique de cette intervention est une prise en considération du contexte matériel et humain et la réalisation d’expériences amenant, à une réflexion sur la mémoire et l’histoire du lieu. 7

de CERTEAU Michel, op. cit. ARDENNE Paul, Un art contextuel : création artistique en milieu urbain, en situation, d'intervention, de participation, Paris, Flammarion (page 99) 8

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Un artiste médiateur

Comme le signifie l’artiste Lygia Clark, « l’artiste n’est plus le démiurge, il est dorénavant désinvestit de tout pouvoir surhumain »9. L’art contextuel dans l’espace public amène voir contraint l’artiste à communiquer avec les autres par le biais de son œuvre ou bien par communications directe avec l’usager. Comme le signifie Paul Ardenne : « L'artiste descend alors dans l'arène : il investit la rue, l'usine, le bureau. Un art du paysage ? L'artiste lui-même se glisse dans le paysage, physiquement pour le travailler et le modifier. Un art en relation avec l'économie ? L'artiste se fait businessman. Un art habité par un souci d'animation sociale ? L'artiste devient un producteur d'événements. »10 L’artiste devient dorénavant une figure impliquée, un acteur qui dans l’action créative est activiste ou/et critique. Son engagement social est mis en valeur par rapport à un travail en atelier. Ainsi, les espace de friche sont créatrices de nouveaux rapports sociaux qui peuvent permettre de donner des solutions de l’ordre sociale que les acteurs institutionnels n’arrivent pas à atteindre. Ces interventions culturels et artistiques peuvent « aussi passer pour des actions « thérapeutiques » ou « réparatrices du lien social ». »11 La présence importante de la friche en milieu urbain et la réappropriation de cet espace conduisent à une nouvelle considération de ces lieux. La collaboration entre la friche et l’artiste amène à une œuvre qui interpelle la mémoire du lieu, son contexte mais aussi les gens qui y vivent. Au-delà d’une réappropriation, il peut devenir un véritable médiateur entre la ville et son habitant. Il apporte aux usagers un moyen de s’exprimer mais aussi de s’identifier à leur ville- au point même de résoudre des problèmes d’ordre social.

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ARDENNE Paul, op. cit. p. 99 Ibid., p.12 11 DRAC Rhône-Alpes, Agir sur la ville : habitants & transformations urbaines en Rhône-Alpes, La passe du vent, 2004, 136 pages. 10

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Musée des Beaux-Arts de Rennes, mouvement - lumière - participation GRAV 1960-1968, 2013.

GRAV : une journée dans la rue. 1966 ARDENNE Paul, op. cit. Annexe


1. Un nouvel acteur : l’habitant

Aujourd’hui, la place de l’habitant dans la pratique artistique est indispensable. Le spectateur est un acteur, il devient la matière vivante de l’œuvre. L’art contextuel serait-il aujourd’hui un « art contactuel » ? « Si l’art est expérience, s’expérimenter soi, en tant que sujet, c’est-à-dire en tant qu’être se confrontant à l’espace et au temps est un geste primordial » Paul Ardenne, Un Art Contextuel. 

Un acteur, un partenaire

La loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) de 2000 offre désormais aux citoyens une occasion de mieux participer et d’être mieux informés grâce à une concertation continue et plus explicite de la part des élus. La prise en considération de la population dans l’aménagement urbain de leur ville par la loi SRU permet une promotion et un élargissement de l’action des institutions des villes. Elle amène à un nouveau dialogue – « il s’agit en effet désormais de faire « avec » la population et non « pour » la population »12. L’idée de la participation artistique des habitants aux projets urbains, est que les habitants deviennent des co-acteurs des transformations sociales de leur quartier, et retrouvent leur rôle de citoyen. « VOULOIR QUE LES HABITANTS, PLUS QUE DES CITADINS, SOIENT CONSIDERES COMME DES CITOYENS »13 On peut considérer aujourd’hui que l’évolution des quartiers ne peut s’obtenir que par la contribution effective des habitants. Lors de mon entretien avec Nathalie Arnould, Design Manager de la ville de St Etienne, j’ai pu prendre conscience de l’investissement des institutions à faire participer les habitants à leurs vies de quartiers par des actions artistiques. Elle a pu m’expliquer l’intervention de Designers dans les conseils de quartier qui permettent un dialogue entre les idées des habitants et les propositions données par les designers. La sollicitation des habitants dans une intervention réalisée dans leur quartier, est une véritable nouveauté, mais aussi, une nécessité dans la compréhension de l’espace urbain. Plus que des acteurs, les citadins sont devenus des partenaires dans la réalisation de leur ville en exploitant leur rôle de citoyen. On peut donner comme premier exemple de participation interactive entre les artistes et les habitants, la « Journée dans la rue » des artistes GRAV en 1966 à Paris. Les artistes ont mis en, à travers la ville de Paris, avec un parcours composé d’objets ou des situations différentes. 12

AUCLAIR Elizabeth, « Comment les arts et la culture peuvent-ils participer à la lutte contre les phénomènes de ségrégation dans les quartiers en crise ? », Hérodote, 2006/3 n° 122, p. 212-220. 13 DRAC Rhône-Alpes, op. cit. p. 126

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Le but est d’interpeller les passants, les « bombarder » de situations nouvelles afin de briser la routine et la passivité des citadins. Les artistes ont attendus ensuite une réponse des participants. L’exemple de cette expérience permet de connaitre les prémices de la participation des habitants en les mettant dans une situation de découverte dans leur parcours routinier. Les habitants sont à la fois les acteurs de cette œuvre artistique par leurs mouvements et leurs interactivités, mais aussi, des partenaires car sans eux, l’œuvre n’aurait pu être. 

Un habitant/ un objectif.

Au-delà de la participation de l’habitant, celui-ci est aussi un objectif. En effet, le rôle médiateur de l’artiste permet de donner des réponses à des problèmes sociaux. Ce type d’interventions artistiques est composé de plusieurs principes : la sensibilisation à l’art, l’ouverture des quartiers, la lutte contre la ségrégation et la solitude des personnes âgées. D’après Paul Ardenne14, le rôle de l’artiste contextuel est de modifier la vie sociale, de contribuer à son amélioration mais aussi de démasquer des conventions sociales discriminantes. Il amène les habitants à parler « pareil », ce qui veut dire le droit à la parole que tout citoyen possède; mais aussi parler « autrement » en utilisant des moyens de l’ordre artistique qui interpellent notre créativité propre. En effet, l’expression artistique permet aux individus de parler d’eux-mêmes, de formuler leurs propres idées et leurs sentiments et de les partager – ce qui est souvent difficile à faire. L’art dans l’espace public d’ouvrir les quartiers vers l’extérieur. En passant au-delà de l’origine des personnes, ces actions favorisent le cycle de passage dans les quartiers : les habitants sortent du quartier pour voir à l’extérieur quand d’autres individus viennent dans le quartier. L’artiste contextuel amène aussi l’habitant à se sensibiliser à l’art et l’amener à fréquenter d’autres lieux comme les musées, et de développer leurs pratiques culturelles comme jouer dans une pièce de théâtre. Enfin, la participation habitant doit mettre en avant la mixité : celle des publics, de l’âge, de sexe, de nationalités et de la diversité des origines. Celle-ci permet de lutter contre la ségrégation, l’individualisme et le rejet, par exemple, des personnes âgées en mettant en relation la diversité des habitants sans préjugées. 

La participation, un risque ?

D’après la concertation du RAMAU, en novembre 2012 15, la participation de l’habitant peut se révéler être en danger dans une réalisation collective. En effet, le but de l’art contextuel est de l’ordre d’un désir social mais il est souvent confronté à la réalité collective. L’hétérogénéité des participants est un principe fondateur, mais cette diversité est souvent source de problème et de désaccord.

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ARDENNE Paul, op. cit. p.34 FOUCAULT Thierry, LASIDA Elena et PINHEIRO-CROISEL Rebecca, « Démarches participatives en urbanisme, que faire des contradictions ? », RAMAU, Concertation et contradictions, 2012, 9 pages. 15

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La participation citoyenne dans la conception des projets urbains permet ainsi d’observer et d’expérimenter les interactions multiples entre les différents acteurs d’un territoire. En effet, engager les habitants dans un procédé participatif, c’est mettre en avant et essayer de concilier des exigences comme le développement durable, la stratégie urbaine et les multiples aspirations des habitants et des usagers de la ville. Le problème est que les acteurs institutionnels ne pas toujours prêts à accepter l’opposition. Le rôle participatif de l’habitant est contradictoire, on leur demande une implication qui se retrouve souvent en confrontation aux aménageurs. Les institutions souvent ne prennent pas en considération l’usage d’un lieu et sa pratique par rapport à des considérations purement techniques. De plus, « La participation des simples citoyens dans la durée échouent, faute de combattants, par désertion pure et simple de leur public. » 16 Lorsque l’habitant s’exprime un peu trop, le droit de parole lui est retiré. La réflexion du projet doit être aussi adaptée au lieu et au contexte envisagé. En effet, la réaction des habitants n’est jamais la même en fonction des lieux. « Il ne faut pas céder à la démagogie participative. » 17 Chaque lieu a un objectif, un problème à résoudre, un projet à améliorer. Si le dialogue ne se réalise pas dans ce sens, il devient contre-productif, empêche à l’habitant de s’investir et discrédite la démarche. On ne peut pas appliquer un principe de projet de manière globale. La solution est de rechercher une vision partagée plutôt qu’un consensus qui ne finit jamais. En conclusion, on peut dire que l’habitant est devenu un véritable outil dans la réalisation d’œuvres artistiques en friches urbaines. C’est un outil qui est vivant, donc qui nous confronte à ces limites. De plus, l’habitant révèle une diversité de position. Il est à la fois acteur et source de problèmes. Il peut être aussi un objectif car l’art peut se révéler « thérapeutique »18 face à la discrimination sociale.

Ainsi, l’artiste a été le premier à s’intéresser aux friches urbaines. Afin de sortir du cadre réglementé des salles d’expositions, il utilise cet espace empreint de mémoire pour réaliser ses œuvres. Par ailleurs, sa proximité directe au contexte urbain l’a conduit à changer de rôle, il est devenu un artiste médiateur entre la ville et ses habitants. En effet, aujourd’hui l’implication des citoyens dans la fabrication de la ville est devenue indispensable et incontournable.

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FOUCAULT Thierry, LASIDA Elena et PINHEIRO-CROISEL Rebecca, op. cit. Ibid. 18 DRAC Rhône-Alpes, op. cit. 17

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II.

Intervention dans la ville : de la démarche à une identité

Fabriquer la ville est un processus d’intervention nouveau. C’est par l’étude de cette démarche innovante que nous allons pouvoir étudier ce phénomène face à ses limites, mais aussi, comprendre que la friche peut être vectrice d’une image positive et identifiable par les habitants.

1. Une nouvelle démarche 

Une typologie

La culture ayant la particularité de pouvoir être un laboratoire permanant d’inventions, il semble ainsi nécessaire d’inventer de nouveaux modes d’intervention dans le territoire urbain. La friche en milieu urbain semble alors un bon compromis dans l’appropriation de la ville et la création de nouvelles formes d’urbanités. On peut donner des caractéristiques globales aux projets artistiques et participatifs en friche urbaine que l’on nomme aussi chantier. En effet, le chantier propose une idée d’action commune et une implication de l’acteur dans le geste de construction du projet - ceci correspond parfaitement au principe de participation et d’actions impliquant des acteurs. L’espace de la friche étant un espace commun à tous, le caractère éphémère de l’art contextuel est une base à ce type de projet. La durée, en effet, ferait rentrer l’œuvre dans un registre dépassant le contexte. Pérennisé, les projets ne seraient plus passage dans le temps mais monumentalisation. Une pérennisation qui induirait une perte de l’attractivité pour les habitants, et donc l’abandon du projet. La condition donc de la réalisation d’un chantier participatif et artistique est la notion de micro-projet se développant dans une faible temporalité. « L’art est l’une des formes de cette langue que parle le corps social »19, elle est donc vectrice de dialogue. La création qui se développe dans un caractère sociale de proximité peut se matérialiser de différentes manières. En effet, la friche est un espace d’expérimentations accessible à tous. L’art peut donc devenir un outil créatif et festif que ce soit dans le domaine social ou artistique. On peut donner, comme exemple de chantiers, les jardins collectifs. En effet, le jardin est un moyen de mettre une cohésion une vie de quartier et de créer une activité autour de lui : petits évènements comme des barbecues, des conseils autour de l’avenir du jardin, des journées de créations d’objets nécessaire pour cultiver. On se rend compte qu’au-delà de la création, le chantier peut apporter beaucoup de joie et de vie dans des quartiers parfois délaissés par l’urbanisme global.

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ARDENNE Paul, op. cit. p.32

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Les chantiers participatifs et artistiques ont aussi la caractéristique d’interroger la pluridisciplinarité des acteurs. Au-delà de séparer les acteurs formels et informels de la ville, ils interrogent les capacités et les compétences de chacun que ce soit habitant ou professionnel. On peut donc rencontrer sur un chantier des paysagistes ou bien même des architectes qui par leurs professions, apportent leurs connaissance. Connaissances qui sont aussitôt complétées par les savoir d’une habitante sur le jardinage ou les capacités de bricoler d’une autre personne. Bien plus qu’un échange social, le chantier amène le partage du savoir et une prise en considération des compétences personnelles de tous et à chacun. On peut donc dire que la réussite d’un chantier participatif est due au caractère éphémère du micro-projet qui permet de créer des actions festives et créatrices. Au-delà de l’outil expérimental, il amène un dialogue social mais aussi un partage de savoir et de connaissance entre divers acteurs.

Des initiatives diverses

L’espace public est un espace disputé, il met en concurrence divers pouvoirs et autant d’énergie. Les acteurs de cet espace sont donc diversifiés et leurs intentions différentes. Aujourd’hui, les friches « représentent un enjeu particulièrement intéressant et un défi pour les responsables du développement urbain, les architectes, les urbanistes, les artistes, les habitants. »20 On peut ainsi donc définir plusieurs types de démarches qui suggèrent un autre type de consultation, de débat public et de production de la ville. La démarche peut appartenir, tout d’abord aux acteurs formels, ce qui signifie la politique de la ville. La ville demande une consultation par des professionnels comme les urbanistes, puis font un appel à projet. La réponse peut être donnée par des architectes, des urbanistes mais aussi des artistes ou des collectifs d’architectes - plus alternatifs. Nous pouvons ainsi entendre par « alternatif », la vocation de l’espace en friche d’être « détournée, temporairement ou de manière plus pérenne par des acteurs sortant des cadres traditionnels de la planification urbaine (artistes, acteurs culturels, etc.) »21. Depuis la loi SRU, l’implication d’acteurs informels dans l’animation d’espaces intermédiaires, est capable de se saisir du débat public. Les habitants sont informés, consultés, voir mobilisés. On voit apparaitre par exemple, la consultation dans le débat public des riverains mais aussi des associations d’habitants ou des centres sociales. L’initiative même du projet peut appartenir elle-même aux habitants qui ont une conscience plus aigüe des problèmes à résoudre dans le quartier.

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GUILLAUD Clara, « Interstices urbains et pratiques culturelles », Implications philosophiques, Dossier 2009 – L'Habitat, un monde à l'échelle humaine. 21

AMBROSINO Charles et ANDRES Lauren, op. cit.

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Par ailleurs, les projets en friches urbaines sont, de manière régulière, confrontés à la réglementation. En effet, l’occupation des friches n’est pas toujours autorisée et la démarche devient alors plus activiste. Celle-ci peut appartenir aux artistes mais aussi aux collectifs d’architectes qui ne répondent pas qu’à des commandes. Le principe de leur action est d’être fugace et imprévisible, car leur objectif reste l’expérimentation et l’interpellation du citadin à sortir de sa routine. Ainsi, la démarche des chantiers participatifs et artistiques peut avoir différentes sources : Elle peut appartenir à la ville qui de ce fait, intervient avec des acteurs formels comme les urbanistes, les architectes, les paysagistes. Elle peut aussi appartenir aux habitants, qui ont de plus en plus de place dans le débat politique et qui peuvent aujourd’hui prendre eux-mêmes des initiatives. Enfin, la démarche peut appartenir aux artistes et aux collectifs d’architectes, qui souvent sous un cadre non légal, essayent d’interpeller l’habitant de manière innovatrice et imprévisible.

2. Le politique : frein ou moteur ? La récupération effective et officielle à partir des années 1970-80 de l’art non programmé en dit long sur l’attrait qu’il suscite. La friche étant devenue une véritable ressource pour une ville qui se reconstruit, elle devient un moyen pour « activer » la ville et ses habitants. En effet, une circulaire a été signée par le ministère de la Culture et le ministère de la Ville en 2000, intitulée « Culture pour la ville, cultures de la ville », dont l’objectif est notamment de développer la démocratie culturelle. De plus, en mai 2001, le rapport Lextrait 22 destiné au Secrétaire d’Etat au Patrimoine et à la Décentralisation Culturelle, prend position sur ce type d’intervention. Premièrement, il analyse différents exemples de chantiers participatifs et artistiques par rapport à de multiples thèmes comme l’économie, la gestion, la participation, la réussite du projet, etc. Puis dans un second volume, Mr Lextrait développe trois parties qui sont les fondements de ces actions (institutionnels, locaux, contexte), la typologie de la problématique artiste/citadin, et enfin l’ébauche d’un programme axé sur ce type de projet. On constate ainsi que la production de chantiers participatifs et artistiques est définitivement inclut dans le programme culturel de l’Etat. Par ailleurs, le programme gouvernemental soulève des problèmes comme la caricaturalisation de cet art dit « non-programmé », qui devient alors une procédure d’animations urbaines comme les feux d’artifices, les fêtes foraines, les défilés ou même les festivals.

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LEXTRAIT Fabrice, « Une nouvelle époque de l’action culturelle », Rapport à Michel Duffour, Mai 2001.

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Frein ou moteur ?

La principale problématique de ce type de projet est que « l’artiste et l'ordre politique, peuvent au gré de circonstances se révéler d'authentiques amis, de faux amis ou d'authentiques ennemis. »23 L’espace de la friche oblige les autorités locales à se poser la question de son rôle dans la mutation de la ville, et surtout dans le positionnement à adopter. En effet, les municipalités et autres institutions sont bien d’accord, voir encouragent l’occupation de ces lieux, mais elles sont peu enclines à laisser développer ces chantiers sur le long terme. La politique de la ville peut être un moteur pour les projets participatifs et artistiques, elle peut en être même l’initiatrice. Les municipalités peuvent demander, voir proposer des espaces vides ou de démolition, à des associations ou des collectifs, afin d’occuper de manière intelligente l’espace durant le temps de veille de la friche ; ce qui veut dire jusqu’à la construction d’un nouveau bâtiment par la ville. L’occupation des espaces vacants, parfois de propriétaires privés, peut être tolérée, voire soutenue via des loyers bon marché ou une convention d’occupation précaire. Les propriétaires rendent ainsi légitimes des occupations et des initiatives informelles permettant la construction de « l’épaisseur artistique »24 d’un quartier. Avec de telles conventions, les squats par exemple appartiennent ainsi à un cadre légal et une reconnaissance par le quartier. Par ailleurs, les autorités locales et les acteurs informels peuvent avoir de nombreux désaccord mettant en péril le projet. En effet, le chantier, qui est un projet urbain, peut être contre le projet de la ville, d’urbanisme. On retrouve alors une difficulté de structuration et de communication qui relève d’une scission trop grande entre le monde de la création et le monde politique. Les enjeux économiques et juridiques de la municipalité sont remis en cause par l’action créative et contraignent les autorités à évacuer les occupants des friches. On comprend ainsi que la politique de la ville peut à la fois être un moteur voir un porteur d’initiative en ce qui concerne les projets artistiques et participatifs. Mais il peut être aussi un véritable ennemi quand ce type de projet va à l’encontre de son projet de ville. Nous allons donc utiliser l’exemple grenoblois du quartier Berriat comme exemple de relation entre une politique urbain et une prise de position par des artistes. 

Quartier Berriat

Nous nous basons sur les propos de Charles AMBROSINO et Lauren Andren dans l’article, Friches en ville : du temps de veille aux politiques de l’espace. Le quartier Berriat est un ancien faubourg ouvrier grenoblois du XIXème siècle. Depuis les années 1972, il subit la désindustrialisation et apparait aujourd’hui comme un révélateur de la tension entre production d’espaces informels ou planifiés engageant des acteurs très divers. En effet, depuis la désindustrialisation, les aménagements de renouvellement urbain sur le quartier ont été très faibles et ont permis une occupation de nombreuses expériences culturelles et artistiques. 23

ARDENNE Paul, op. cit. p 31

24

AMBROSINO Charles et ANDRES Lauren, op. cit.

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Le 102, rue d’Alembert

Le site de la SDEM du collectif Brise-Glace

Source : AMBROSINO Charles et ANDRES Lauren, « Friches en ville : du temps de veille aux politiques de l'espace », Espaces et sociétés, 2008/3 n° 134.


Au début des années 80, la colonisation artistique dans le quartier Berriat va s’intensifier. Dès 1982, des artistes prennent possession du 102, rue d’Alembert. Cette période est propice à l’installation car le marché immobilier est clément, et l’espace libre est peu cher. Par ailleurs, dès 1984, le changement de maire va conduire la municipalité à changer l’image du quartier Berriat afin qu’il s’intègre mieux au centre-ville. Malgré les réaménagements urbains et la pression foncière, les initiatives artistiques continuent au cours des années 1990. En 1993, les élèves des beaux-arts mettent en place un lieu à la disposition des artistes sur une friche et, alors qu’en 1995, la ville veut racheter le site de la SDEM, le collectif Brise-Glace se forme. Ce collectif étant relativement visible, celui-ci tend à susciter une reconnaissance par la ville. Plus tardivement, la municipalité mettra à leur disposition des locaux. Par ailleurs, sous la pression de ce réaménagement urbain, les expériences sur les friches sont petit à petit abandonnées. On peut ainsi constater que le quartier Berriat se retrouve prisonnier de deux processus simultanés : le projet urbanistique de la ville, mais aussi la mise en valeur d’un potentiel artistique. Les négociations et les conflits avec les politiques mais aussi les riverains, amènent aux artistes à ouvrir un débat sur la réalisation de ces nouvelles formes d’urbanités. Nous pouvons prendre pour exemple le « 102 », qui a subi de nombreuses menaces d’expulsions, mais qui parallèlement a acquis une notoriété artistique nationale et internationale. Il est devenu ainsi un haut lieu de la culture expérimentale française, un référent artistique dans le monde de l’art. Par ailleurs, en 1991, suite à deux plaintes, le « 102 » doit être vidé. C’est le soutien de la population et d’acteurs culturels lors d’une manifestation qui va contraindre la procédure judiciaire de s’arrêter. L’exemple du « 102 » révèle donc la possibilité du monde politique a rejeter cette forme d’innovation, mais aussi, à contrario, soutenue par des acteurs comme les habitants ou bien les universitaires. L’exemple du collectif Brise-Glace est aussi informateur de cette dichotomie. En effet, la DRAC Rhône-Alpes s’est intéressée à cette période à la question de la reconversion culturelle des friches industrielles et au cas du quartier Berriat. Par ailleurs, au même moment, la ville a voulu prendre possession du site où squatte le Brise-Glace. Une polémique va s’installer entre les politiques et les artistes sous forte couverture médiatique. Mais en 2001, le lieu est reconnu officiellement par le rapport Lextrait en tant que nouveaux lieux culturels et artistiques. Le quartier grenoblois Berriat est un très bon exemple de la relation conflictuelle que peut avoir les acteurs formels et les acteurs informels du renouvellement urbain. On peut relever qualitativement le mécanisme de réappropriation des espaces indéterminés par des collectifs et des associations qui comme le « 102 » et le Brise-Glace, ont acquis une visibilité urbaine. Ces deux exemples sont très différents mais permettent de comprendre que l’action opportune des habitants ou de personnes cultuelles peut avoir un véritable impact dans la réalisation urbanistique.

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3. En quête d’identité Le terme « exposito » (XIème siècle) désigne la « mise en vue ». Laquelle sousentend le caractère politique de l'exposition, qui dans l’art urbain, n’est pas sans intérêt. Les chantiers participatifs et artistiques en friches urbaines impliquent une notion d’exposition à la vue de tous de notre création. Au-delà de la rencontre entre habitants, le projet artistique est devenu un révélateur de la vie du quartier. En effet, l’art est « messager d’une convivialité », « un multiplicateur de démocratie »25 qui permet de consolider l’ordre social et de développer une démocratie culturelle liée à la lutte contre la discrimination.

Appropriation de la friche par l’habitant

D’après Michel de Certeau26, le lieu se définit comme un ordre de rapport de coexistence, il aurait des vertus anthropologiques que n’aurait pas l’espace. Il propose un lieu existentiel dont les qualités premières seraient l’identité, la spécificité et la nomination. L’appropriation d’une friche urbaine par des habitants est une manière pour ceux-ci de donner leur identité et de s’identifier à ce lieu. En effet, d’après Paul Ardenne, l’appropriation c’est l’acte de faire sien par l’attribution d’un sens. Ainsi, la pratique artistique qui est mis en commun dans les chantiers participatifs permet à l’usager de s’exprimer, de parler d’eux-mêmes, de formuler des sentiments qui sont difficiles à exprimer. La rencontre entre les habitants et l’artiste permet d’exécuter « un geste en commun jusqu’à même, qu’il ne soit plus artistique »27. L’habitant est revaloriser par ce genre de pratique, il y apporte sa touche personnelle, afin de donner à son quartier un « bout de soi » ; ce qui a contrario permet à l’habitant de donner une identité à son quartier auquel il s’identifie. L’art mis à contribution dans les rapports sociaux donne la possibilité de lutter contre toute discrimination. Les associations diverses se conjuguent avec d’autres associations en supprimant tous aprioris discriminatoires. En effet, plus on est de corps, plus on crée. Plus on crée, plus il y a de vie. Au-delà de l’apparence physique du quartier donnée par l’art, celui-ci permet de passer outre les différences, et de donner une bonne image sociale. L’action culturelle permet ainsi de valoriser ses lieux, mais aussi de requalifier l’image du quartier par l’émergence d’une nouvelle image plus positive. Positive pour les habitants mais aussi pour les personnes extérieures au quartier, amenant ainsi une nouvelle attractivité.

25

ARDENNE Paul, op. cit. p. 185

26

de CERTEAU Michel, op. cit. 27 ARDENNE Paul, op. cit. p. 212

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Appropriation de la friche par la ville

« La personnification de la ville n’est possible que parce qu’elle-même symbolise la multiplicité des êtres qui y vivent et la font vivre. »28 Marc Augé, L'impossible voyage, Le tourisme et ses images L’art contextuel en milieu urbain, comme nous avons pu voir précédemment permet de revaloriser les quartiers, mais son impact peut aller au-delà de cette zone et s’inscrire dans la globalité de la ville. Dans la mesure où elles détournent les usages, les friches, espaces en marge, recréent un nouvel espace et permettent de retrouver du sens dans les villes fragmentée. La prise en considération de ces nouveaux outils par la politique nous amène peut être bien à une identité plus large. En effet, promouvoir l’identité et les images des quartiers en luttant contre les aprioris de leurs modes de vie permet de favoriser l’attractivité et plus largement, le rayonnement de la ville.

D’après Elizabeth Auclair29, la culture peut donc être un levier efficace pour la reconstruction d’identités individuelles et collectives, pour la restauration du lien social, et pour la revalorisation des quartiers. On la retrouve fréquemment dans le processus de transformation sociale et de revalorisation des quartiers. L’art et la culture seraient donc des outils politiques qui permettent une revalorisation de l’identité des quartiers et qui plus globalement, revalorisent l’image et le rayonnement de la ville. Nous allons utiliser l’exemple de la cité lyonnaise de Vaulx-en-Velin qui a expérimentée une politique de reconnaissance au-delà d’une ghettoïsation. Nous nous basons sur les propos de Virginie Millot dans l’article, Cultures en ville, ou de l'art et du citadin 30. La cité de Vaulx-en-Velin est caractérisée par une grande diversité de populations (46 nationalités) où vieux bourg, quartiers industriels et quartiers d‘immigration se mélangent. Cette cité porte un passé lourd par ses problèmes d’immigrations, des grandes émeutes en 1990 et de la mort publique du jeune Khaled Kelkal. Elle est considérée comme l’exemple d’insécurité urbaine française. La stratégie de la ville est de faire de Vaulx-en-Velin un haut lieu de création afin d’effacer l’image lourde de son passé et, en parallèle, d’apporter une meilleure approche culturel à la population. Cet aspect est perçut négativement par la population. Les habitants voient la démocratisation de la culture comme une négation de leur propre culture. 28

AUGE Marc, L'impossible voyage, Le tourisme et ses images, Paris, Payot, Rivages poche, coll. « Petite

bibliothèque », 1997. 29

AUCLAIR Elizabeth, « Comment les arts et la culture peuvent-ils participer à la lutte contre les phénomènes de ségrégation dans les quartiers en crise ? », Hérodote, 2006/3 n° 122, p. 212-220. 30 MILLOT Virginie, Cultures en ville, ou de l'art et du citadin, Métral J. (dir.), 2000), p. 143-168.

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Le centre culturel Charlie Chaplin Source : http://www.culture.lyon.fr/


Vaulx-en-Velin a la grande qualité d’avoir un développement culturel très dynamique apporté par le multiples associations. De manière autonome, ou en lien avec des artistes, les habitants expriment leurs vécus et leurs diversités par divers pratiques artistiques. Ces groupes « d’expression culturel » sont situés dans les centres sociaux, les MJC, les associations locales comme dans des cadres plus formels. Par exemple, le collectif « Paroles de femmes » qui est en lien avec la compagnie de théâtre NAJE se rassemble régulièrement pour jouer des pièces de théâtres lors de forums publics où sont invités habitants et personnes institutionnelles. Elles mettent en scène par le jeu théâtral leurs histoires personnelles et douloureuses souvent stigmatisées socialement. La plupart des associations dites communautaires organisent des ateliers artistiques comme des ateliers d’écriture, de peinture, de danse et de théâtre. Ceux-ci permettent aux habitants souvent de cultures différentes de se réapproprier leurs cultures, de la partager avec autrui et de prendre conscience de manière positive de la diversité de ses voisins. Comme le dit un habitant de Vaulx-en-Velin, il faut « montrer les richesses de Vaulx-en-Velin … et sa principale richesse, ce sont ses habitants.» Par ailleurs, la politique de la ville veut imposer et généraliser les lieux culturels de la cité. Elle veut inviter les associations locales à réaliser des représentations dans ces lieux précis afin de généraliser l’accès à la culture. On peut donner comme exemple le centre culturel Charlie Chaplin. Pour les habitants, d’imposer des lieux culturels, cela nit la culture même du quartier et donc nit les habitant. On peut donc voir dans le cas de Vaulx-en-Velin, que la politique de la ville peut utiliser les activités artistiques et l’aspect participatif et social des associations pour revaloriser l’image de la cité. Elle veut faire jouer l’atout culturel de la ville afin de faire oublier le passé. L’identité artistique de Vaulx-en-Velin est, pour le coup, un moyen d’attirer les gens extérieurs. Par ailleurs, on peut nuancer le propos par l’imposition de l’espace de création par la municipalité. On voit clairement qu’imposer un lieu aux habitants qui occupent déjà l’espace public n’est pas une solution de démocratisation de la culture. Ainsi, la ville peut adopter l’art comme moyen de valorisation de son image, mais cet art doit toujours passer par l’appropriation personnelle et artistique des habitants de l’espace public. Les chantiers participatifs et artistiques en friches urbaines sont caractérisés en une démarche expérimentale et festive de micro-projets. Par son aspect alternatif, le réinvestissement de la friche est source de conflit entre les acteurs institutionnels et les acteurs informels de la ville. Au-delà de ces limites, l’appropriation et l’intervention de cet espace en marge est aussi un moyen de véhiculer une image positive de la ville au quelle les habitants s’identifient.

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Affiche Biennale 2008

Affiche Biennale 2006

Affiche Biennale 2013

Source : http://www.citedudesign.com/fr/biennale/


III.

Un nouvel outil. L’exemple stéphanois

C’est à travers l’exemple de la ville de St Etienne, que nous allons pouvoir illustrer des chantiers participatifs et artistiques en milieu urbain, mais aussi à comprendre en quoi ce sont des outils pour la fabrication de la ville.

1. Une ville de design et de développement durable La ville de St Etienne a été désignée Ville Unesco de design en 2010. Le Réseau des villes créatives de l’UNESCO a pour objectif un développement urbain durable basé sur la créativité comme facteur essentiel à l’amélioration du cadre de vie des citoyens, mais aussi sur la créativité dans les pratiques urbaines pour promouvoir davantage un développement urbain durable et innovateur. La place du domaine artistique et du développement durable est très importante dans la ville de St Etienne. La Cité du Design est une ressource dans la valorisation du design d’espace et dans la pratique culturelle urbaine durable.31 En effet, j’ai pu rencontrer Nathalie Arnould, Design Manager de la ville de St Etienne qui m’a permis de comprendre cet intérêt pour la biodiversité. Le rôle de Mme Arnould est de valoriser le design dans l’espace de la ville, en proposant des offres à des designers afin de répondre aux besoins du citadin mais aussi du développement durable. En effet, la question de l’écologie, du design et d’un meilleur mode de vie, est un véritable enjeu pour la ville d’aujourd’hui. Fort de ces préoccupations, la Cité du Design organise souvent des forums ou expositions, ouverts à tous, sur ces questions. Par exemple, la Biennale Internationale du Design en 2006 sous le nom de « cohabitations » amène des professionnels et les habitants de la ville a trouvé de nouvelles solutions, de nouveaux concepts pour résoudre les préoccupations environnementales et la question du vivre ensemble. La Biennale Internationale du Design 2008 « City EcoLab » a mit en perspective la démarche du Design pour une évolution nécessaire de nos modes de vie dans l’optique d’un monde durable. Enfin, la Biennale Internationale du Design 2013, qui sous le nom de « Empathi/city » a amené à s’interroger sur la mouvance globale de citoyens-urbains créatifs qui lancent des initiatives spontanées, afin de rendre la ville plus durable, accueillante et solidaire. 32 On constate alors que la ville de St Étienne est novatrice car, génératrice de projets écologiques, durables, collectifs et sociaux. La notion de chantiers participatifs et artistiques en friches urbaines devient alors un enjeu pour la ville stéphanoise qui multiplie ce type d’action 31

Propos tirés de :

- ARNOULD Nathalie, FRANC Josyane (sous la dir.), Human Cities 2, Revendiquer l’espace public, St Etienne, Cité du Design, 2011, 120 pages - L’Agenda Stéphanois, Empathi/city, Making our City Together, St Etienne, Mars 2013, 4eme édition, 80 pages.

32

Propos inspirés du site de la Cité du Design. http://www.citedudesign.com/fr/biennale/

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Affiche Jardins partagĂŠs par Rues Du DĂŠveloppement Durable Source : http://www.ruesdudeveloppementdurable.fr/animatrice-jardins-partages-compostage/


Dans la typologie d’actions durables et collectives, Saint-Etienne Métropole s’est investi dans la création de jardins partagés. En effet, cette ville minière a un passé important concernant le jardin. En 1895, le premier jardin ouvrier est initié par le Père Volpette. Le jardin ouvrier et familial permet aux mineurs célibataires de s’occuper aux lieux de vaqués a des loisirs ingrats, mais aussi aux familles de subvenir à leur besoin en nourriture. Le paysage stéphanois est relativement marqué par la présence de ces anciens jardins-ouvriers. L’initiative de la ville de St Etienne de se réapproprier ces jardins pour créer des jardins partagés, a valeur de mémoire. Ainsi, différents jardins partagés ont été mis en place à St Etienne, mais aussi dans les villes environnantes. (Annexe 1) Toujours dans la perspective environnementale, la Bienne du Design de 2008 « City EcoLab » a mis en place, grâce à la rencontre d’associations locales et de professionnels, des jardins partagés avec lieux de compostage aux quartiers de Chovet, Desjoyaux et du Crêt de Roch. (Annexe 2) En effet, en ce qui concerne le Crêt de Roch, l’association Rues du Développement Durable et l’Amicale Laïque Chapelon, ont mis conjointement en place, un jardin partagé. L’association Rues du Développement Durable a été créée en juillet 2009 avec la volonté de revaloriser le quartier du Crêt de Roch, en implant de nouvelles associations et activités économiques, qui entrent dans le champ du développement durable. Leur volonté de sensibiliser les habitants à l’environnement se décline autour de la création du jardin, du composteur, mais aussi par des ateliers. «Le design se retrouve ainsi intégré au cœur du quartier et au plus près des usagers »33. La notion sociale du jardin partagée est aussi importante que la notion environnementale. Raymond Vasselon, président de l’Amicale Laïque et habitant du Crêt de Roch34 dit que c’est « un lieu d’échange », où « le bricoleur » et « l’intello » peuvent se retrouver et partager leurs connaissances. L’interactivité est nécessaire dans le jardin partagé, qui est un lieu propice à l’échange. (Annexe 3) La ville de St Etienne est un exemple frappant de la prise de conscience des villes d’améliorer la qualité de vie du citadin durablement. La notion de développement urbain durable et d’interactivité entre habitants est devenue une priorité pour une ville qui se projette dans l’avenir.

33

L’Agenda Stéphanois, Empathi/city, Making our City Together, St Etienne, Mars 2013, 4eme edition, 80 pages.

34

Propos tirés de l’émission radio : GACON Julie, GACQUET, Yvon, GAUBERT Sophie, « Sur la route… d’une ville à la recherche d’une nouvelle image : Saint-Etienne », Ville en campagne n°7, France Culture, 14 février 2014.

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2. L’émergence de collectif d’architectes : La place du Géant Depuis quelques années, une nouvelle forme de créateurs de la ville est apparue : le collectif d’architecte. Cette émergence est due à une prise de conscience de la part d’étudiants en architecture et de de jeunes architectes, et à leur manque d’actions dans la fabrication de la ville. En effet, le travail en agence ne leur permet pas, par le jeune âge, d’avoir une influence immédiate dans le développement urbain. Afin de tracer leur propre trajectoire professionnelle, ils ont choisi de ne pas travailler en agence et ont mis en place des initiatives spontanées. Ces jeunes professionnels « défrichent une pratique alternatives de l’architecture »35 qui permet de mobiliser les habitants et de créer une nouvelle approche du projet : l’expérimentation à l’échelle 1. En interpellant les riverains, ces jeunes architectes activent avec enthousiasme la création d’une nouvelle forme de pratique urbaine propice au développement positif et engagé de la ville. Par ces projets innovateurs, ils explorent les possibilités d’une nouvelle place pour l’architecte dans la fabrique de l’urbain. Les collectifs d’architectes se sont construits par une envie certaine de se frotter au réel. Ces nouveaux acteurs sont caractérisés par un besoin d’agir dans l’espace public par des initiatives spontanées et bénévoles. L’implication de ces jeunes architectes est une force majeur dans la volonté de créer de l’urbain. Seule leur présence sur le terrain peut permettre un vrai dialogue entre la population et ces professionnels. La recherche-action construit avec l’habitant permet à celui-ci de comprendre ces initiatives, mais aussi, de le faire agir, de sa propre initiative, à la fabrication de « sa » ville .En effet, « l’occupation festive d’un lieu et la coconstruction ouverte au public peuvent être des outils de préfiguration des usages et de sensibilisation de la ville. »36 La dynamique d’occupation permet aux collectifs de s’enraciner dans le territoire. Leurs projets sont souvent de courtes durées et spontanés, mais la multiplication des chantiers permet d’interpeller les initiateurs du développement urbain. De plus, l’initiative des collectifs commencent à s’institutionnaliser, permettant ainsi, par leur territorialisation, d’influer sur le long terme le projet urbain. Par ailleurs, ces jeunes architectes vont au-delà de leur profession. Souvent avides d’expériences et de conceptions, ils sont un peu touche-à-tout et aiment fabriquer de leurs propres mains ; « ils sont un peu programmistes, un peu concepteurs, un peu constructeurs »37. D’ailleurs, cette pratique collective et artistique invitent d’autres disciplines - disciplines souvent connexes à l’architecture comme l’art plastique, le graphisme, le design, le paysage ou bien même la sociologie.

35

DARRIEUX Margaux, « Dossier : Collectifs d'architectes », AMC, 2014/04 n°232, p. 63-73. Ibid. 37 Ibid. 36

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Affiche « Place au changement »

Principe du projet « Place au changement » - Collectif Etc

Source : http://www.collectifetc.com/realisation/place-au-changement-chantier-ouvert/


Les collectifs d’architectes apparaissent aujourd’hui comme un nouvel outil à la fabrication urbaine. Leurs actions directes avec les habitants permettent à leurs actions de se démocratiser mais aussi, de trouver une certaine reconnaissance de la profession. Leur volonté et leur énergie permettent à leurs chantiers de fédérer les citoyens. La pluridisciplinarité et l’aspect festif de leurs chantiers sont des valeurs importantes qui participent au bon déroulement des chantiers. 

« Défrichez-là »38

Le Collectif Etc est un collectif d’architectes qui a pour volonté d’utiliser l’énergie collective autour d’un projet créatif questionnant l’espace urbain. Celui-ci est né à Strasbourg en septembre 2009, par la volonté de plusieurs étudiants en architectures d’agir sur la ville. Ils veulent par le biais de différents médiums et le biais de différentes compétences interroger le regard des habitants sur leurs espaces de vie. Les chantiers qu’ils mettent en place, sont regroupés par une volonté d’interactions entre le domaine artistique et social. Les rencontres, les débats, sont le moteur de ce collectif qui engage le public à agir à travers la réalisation de structures, de mobilier, de conférences et d’ateliers. Enfin, « l’objet et l’intérêt de ces expérimentations n’est pas seulement dans le résultat, mais surtout dans le processus qu’il génère et dans le nouvel environnement et les nouveaux comportements qu’il engendre. »39 Au mois de mars 2011, l’EPASE (Etablissement Public d’Aménagement de Saint Etienne) a organisé le concours « Défrichez-là » afin de mettre en valeur un espace en friche situé à proximité de la gare Chateaucreux durant une période de trois ans. C’est le Collectif Etc qui a gagné le concours en proposant un aménagement représentant fictivement un bâtiment. L’idée était donc de donner l’illusion de la présence d’une construction - en dessinant au sol un plan fictif de futurs logements, mais aussi une coupe, sur le pignon d’un bâtiment mitoyen à la friche. Leur projet « Place au changement » défend deux axes de travail qui sont : l’implication des habitants du quartier dans la réalisation mais aussi, utiliser le temps du chantier pour échanger et impliquer la population dans une durée de un mois. (Annexe 4) Au préalable, un travail en amont a permis au collectif de rencontrer la population mais aussi de rencontrer différents acteurs politiques, et les services de ville afin d’optimiser l’implication des habitants à ce projet. Les architectes ont décidés de mettre en place trois ateliers différents afin de motiver l’intérêt d’un large choix d’individus : un atelier de menuiserie, un atelier de jardinage et un atelier d’illustration. (Annexe 5) Le collectif, sous le rôle de gestionnaire et de concepteur, a dirigé les habitants volontaires afin d’agir efficacement. Pour le premier atelier, « l’implication des gens dans la conception n’avait pas pu se faire, limitant la participation à la fabrication proprement dites. » 40 Un chef de chantier, habitant du quartier, a permis le bon déroulement du chantier. Pour le second atelier, la participation doit se dérouler de façon plus pérenne. En effet, après le chantier les riverains ont la 38

Les propos sur le projet « Défrichez-là » sont tirés du site du Collectif Etc : www.collectifetc.com/a-propos/ Ibid. 40 Ibid. 39

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Photographie du chantier lors de la construction

Photographie du chantier terminĂŠ

Source : http://www.collectifetc.com/realisation/place-au-changement-chantier-ouvert/


responsabilité du jardin et de son entretien. Pour l’atelier d’illustration, les enfants des maisons du quartier du Soleil et du Crêt de Roch ont dus imaginés, dessinées puis découpés des objets du quotidien pour ensuite les collés sur le mur pignon. Le collectif a pu se rendre compte que l’atelier menuiserie a principalement toucher les hommes, tandis que les femmes ont préféraient le jardinage. Le troisième atelier, quant à lui, a attiré les enfants. On se rend compte ici, de l’importance donnée à la diversité de la population qui habite un quartier. De plus, les travaux manuels ont permis aux habitants de « faire » mais aussi d’échanger des conseils ou des astuces sur le bricolage et le jardinage. L’exemple est que les membres du collectif avaient plus à apprendre, en matière de jardinage, des habitants que l’inverse. Le temps du chantier a été aussi un support d’évènements. En effet, le collectif a proposé une série d’évènements permettant d’attirer plus largement les riverains à ce projet. Plusieurs activités très diverses ont été mises en place comme des tournois de boule, des initiations au cirque ou des cours de danse. Un repas organisé avec l’aide de l’association « Les Dames de Côte-Chaude » a rassemblé plus de 80 personnes autour d’un repas. Des concerts ont été organisés invitant des artistes locaux comme Dawa Delux et The Architect. Des débats ont aussi été réalisés autour de la question de la participation de l’habitant dans l’espace public. Des invités comme des associations (La Cartonnerie), des élus ou des architectes locaux (Yes architectes) ont pu discuter autour de cette question qui est primordial aujourd’hui. (Annexe 6) Bien au-delà du geste créatif et participatif , le chantier du Collectif Etc a permis de donner une image positif au quartier. L’intervention des artistes stéphanois Ella & Pitr a donné un sentiment de fierté aux habitants. Reconnus nationalement, les deux artistes ont produits une fresque géante, qui se joint au travail réalisé par les enfants. Représentant un homme, la friche sera même nommée « La Place du Géant » et devient ainsi le symbole, l’image du quartier. En parallèle, deux graphistes, Bérangère Magaud et Léatitia Cordier, ont réalisés trois interventions différentes qui sont : un travail de signalétique sur les grilles du chantier, un travail sur la parole des habitants par l’affiche de leurs propos sur un bâtiment, et une anamorphose visible à partir de la friche. (Annexe 7) Ces interventions artistiques ont donnés vie à des édifices murées, qui renvoient ainsi une image positive de l’espace autour de la friche. On peut constater, d’après l’initiative du Collectif Etc, que les collectifs d’architectes sont devenus indispensables au développement de la fabrication de la ville. Leurs interventions soulèvent des débats et des réflexions autour de la participation habitante, de la remise en question des espaces en friches, et de l’identité des quartiers. Fondés sur des aménagements temporaires et festifs, les projets collectifs favorisent l’appropriation d’un lieu vague par les habitants, mais aussi à inverser le regard négatif porté sur le quartier. La qualité qui est propre à ces architectes, est l’envie de partager leur temps et leur savoir au profit de la reprise en main des villes par les plus concernés : les habitants.

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Processus de crĂŠation Ă La Cartonnerie Source : http://www.carton-plein.org/index.php/la-cartonnerie/-processus2/


3. Observation participante : La Cartonnerie L’association Carton Plein41 s’est constituée en octobre 2010 autour de la confection par épisode d’un espace public en friche de 2000m² : La Cartonnerie. C’est sous l’impulsion de l’EPASE que ce site temporaire et expérimental a été mis en place. Ce terrain de jeu est propice à imaginer de nouvelles manières de faire la ville avec des interventions expérimentales et artistiques. Forts de sa situation, La Cartonnerie permet rassembler usager, habitants mais aussi étudiants, aménageurs et associations dans une initiative novatrice. Carton Plein mets en œuvre une interactivité avec la population en proposant des dispositifs, comme des chantiers créatifs, des événements ou des jardins partagés, pour inciter le citoyen à se mobiliser dans la fabrication de son cadre de vie. L’association a ensuite progressivement investit les ateliers situés en face de la Cartonnerie, au 45 rue Etienne Boisson. Situé vers la place Carnot, ce site est proche du centre-ville et est donc facilement accessible. L’ensemble composé de La Cartonnerie, d’un immeuble de deux étages mais aussi de hangars, propose un lieu de recherche et de d’expérimentation mais aussi, un espace laboratoire où plusieurs disciplines s’entremêlent. En effet, les membres de l’équipe sont caractérisés par une forte pluridisciplinarité ; elle regroupe des architectes, des sociologues, des artistes, des designers, des jardins et toute personne volontaire à ce projet. De plus, aujourd’hui, Carton Plein qui était centré sur La Cartonnerie et St Etienne va au-delà de ses frontières. Par le projet terrain de jeu Import-Export, les membres développe leurs activités par-delà le monde comme récemment en Colombie. L’association est aussi ouverte à rencontrer d’autres collectifs, afin d’investir ensemble la question de la fabrication urbaine. Par exemple, le Collectif Etc a été invité dès septembre 2013 à intervenir dans le cadre du « Laboratoire urbain » qui dirige son idée autour du comment mieux vivre ensemble dans un quartier proche de la Cité du Design. Depuis, le Collectif X, aussi, s’est approprié les lieux de l’ancienne Amicale Laïque à Chapelon pour faire le portrait théâtral de St Etienne. Il invite les habitants de St Etienne à parler de leur vie. La Cartonnerie suit un processus qui se déroule en plusieurs épisodes, proposant aux habitants diverses activités et évènements. De novembre à décembre 2010, Carton Plein s’est donné une mission exploratoire. Elle a créé un journal mural, qui a l’occasion de la Biennale du Design, a été partagé et questionné. De janvier à juillet 2011, l’association a proposé aux habitants des expérimentations directes : grands jeux, créations d’un terrain de billes géant.etc, qui sont élaborer en co-conception lors des « Chantiers Créatifs ». Ensuite, pendant plus d’un an, La Cartonnerie a été animée, en plus des membres persistants, par des ateliers construits et imagés par des étudiants. Les élèves de l’école d’architecture se sont intéresser à la conception dans le cadre de l’atelier « Hors les Murs » et le BTS de Design Honoré D’Urfé, quant à lui, a élaboré un concept d’assise collective avec l’aide des enfants du quartier. 41

Les propos sont tirés de http://www.carton-plein.org/

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Jeudi 13 mars 2014 – Réunion de quartier

Vendredi 14 mars 2014 – Atelier couture

Source : http://lacartonnerie.blogspot.fr/


Régulièrement dans l’année, des conseils de quartiers ont été mis en place afin de de discuter des initiatives à prendre sur le site. En 2013, Carton Plein s’est enrichie d’expérimentation hors les murs de la cartonnerie. On peut des évènements comme « Viaduc fertile » ou bien même « Tous dehors » en lien avec la médiathèque de Carnot. En mars, les membres ont mis en place l’idée d’un jardin partagé sur le site. Du 16 au 19 avril, « Les Nouveaux Jardins Urbains » ont été conçus et plantés. Enfin, récemment, l’association accueille tous les jeudis les gens du quartier à venir boire un verre dans les locaux de l’association pour apporter un lieu de convivialité et d’animation dans le quartier. 

« Les Nouveaux Jardins Urbains » (Annexe 8)

Suite aux recherches mise en place pour mon rapport d’étude, j’ai décidé de participer aux activités de l’association Carton Plein afin de prendre la place de l’habitant et comprendre la démarche d’un chantier participatif. Participer à un tel projet se rapporte à une recherche par observation participante me permettant d’approfondir mon raisonnement, mais aussi de rencontrer et d’interagir avec les acteurs du projet : les membres de l’association mais aussi les habitants volontaires. C’est sous la forme d’un journal de bord, que je présente les différentes rencontres et activités que j’ai pu faire.

« Jeudi 13 mars 2014 - 18H Aujourd’hui, je vais à une réunion à La Cartonnerie avec Justine et Clémence. C’est, en effet, quelques jours plus tôt, que j’ai été informée par ma page Facebook de cet évènement. L’association Carton Plein présente leur nouveau projet de jardins partagés. Au premier abord, nous n’osons pas parler avec les personnes déjà sur place. On remarque que la plupart des gens ne nous sont pas inconnus : il y a de nombreux élèves de l’école d’architecture, mais aussi de l’école de Design. Quelques bancs sont installés sur une estrade en bois au fond du site. Trois personnes de l’association présentent le projet. Ils demandent à l’assemblée de prendre des craies mise à disposition afin d’écrire sur le mur même derrière eux. On peut y lire des questions comme « Comment se mettre à l’ombre ? » ou bien « Quelles sont vos plantes préférées ? ». On retrouve aussi sur le mur, un plan dessiné de La Cartonnerie. On peut y dessiner les différents endroits où on aimerait retrouver les bacs des jardins. Avec Justine, nous avons répondu à quelques questions sur le mur. Enfin, avant de partir, on nous a proposé de laisser notre mail sur une feuille afin que nous soyons informés des évènements de l’association Carton Plein.

Vendredi 14 mars – 18H Ce soir, nous sommes allées avec Clémence à un atelier de couture monté occasionnellement dans les locaux de Carton Plein. Plusieurs couturières étaient installées avec leurs propres machines et du tissu au premier étage. Nous avons rencontré dès les premiers instants, Guillaume dit « Perruche » qui est un des principaux

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Vendredi 19 avril 2014 – Construction bacs Source personnelle

Samedi 20 avril 2014 – Plantation Source : http://lacartonnerie.blogspot.fr/


membres de l’association. Je me suis présentée à lui en lui demandant s’il avait déjà reçu mon mail par rapport à mon rapport d’études. Très enthousiasme, il m’a présenté rapidement les différents événements à venir Ensuite, j’ai commencé avec Clémence à confectionner un « Tote Bag ». Il y avait beaucoup de monde et peu de machines. L’atmosphère était très convivial et les gens présents très chaleureux. C’est deux heures plus tard que nous sommes sorties de l’atelier avec notre confection en main et quelques rencontres de plus.

Vendredi 19 avril – 18H Aujourd’hui, je vais à La Cartonnerie car « Les Nouveaux Jardins Urbains » sont en train de se mettre en place. Les journées du jeudi et du vendredi sont destinés à la confection des différents bacs et au nettoyage des plates-bandes déjà présentes sur le site. A mon arrivée, je vois Perruche et quelques personnes. Il n’y a vraiment pas beaucoup de monde, surement à cause du temps maussade. Plusieurs ateliers sont mis en place : la construction du grand bac, le nettoyage de la terre des bacs déjà confectionnée et d’un atelier peinture. On retrouve dans ces ateliers un aspect artistique dans la réalisation de décorations murales, mais aussi dans la forme des bacs de plantations. D’ailleurs, sur l’un d’entre eux, les différentes personnes qui ont participés à sa construction ont inscrits leurs noms. Je rencontre Guillaume qui me présente à Fanny, elle aussi membre principale de l’association. Je ne l’avais pas vu auparavant car elle était partie avec le projet « Import/Export » en Colombie. Il me montre les différents ateliers et m’explique que son rôle est de gérer et vérifier que tout se passe bien. Je n’ose pas vraiment faire quelques choses. Je remarque qu’il y a des habitants mais aussi des étudiants. Une jeune fille japonaise m’aborde. Le dialogue est compliqué mais j’apprends qu’elle vit à St Etienne car elle veut venir étudier à l’école d’arts. Elle n’habite pas très loin et c’est, donc, pour cette raison là qu’elle est présente. Je me propose ensuite d’aider quelqu’un à enlever les mauvaises herbes et à aérer le sol d’un des bacs. En plein effort, nous rigolons et faisons connaissance. J’apprends qu’elle vient de Paris, qu’elle est venue avec une amie qui habite en Bretagne et qui elle-même est venue avec une amie étudiante à t Etienne dans le master Espace-Public. Nous sympathisons. Je lui ai demandé comment et pourquoi elle était venue participer aux jardins partagés : elle m’a expliqué que c’est son amie étudiant à St Etienne qui leur a proposé de faire un « truc sympa » avait d’aller à une soirée. Elle m’a assurée prendre plaisir à jardiner car elle est étudiante en paysage. Il commence à se faire tard. Je pars en même temps que les trois filles, puis les quitte sur mon chemin.

Samedi 20 avril – 16H Je propose à Clémence de m’accompagner à La Cartonnerie pour le jour des plantations. A notre arrivée, il y a moins de dix personnes présentes sur le site. Nous rencontrons Perruche qui nous propose d’aider Sara, la jardinière en chef, de l’aider au niveau du compost. Sara est mandatée par la ville de St Etienne à s’occuper des différents bacs à Compost de St Etienne. Elle nous accueille très chaleureusement et nous propose de retourner avec elle le contenu d’un des bacs. Elle nous explique avec beaucoup de pédagogie comment fonctionne la mise en place d’un compost. Elle nous explique que les déchets doivent être retournés régulièrement afin d’assurer une bonne action des bactéries et des insectes à décomposer la nourriture. On apprend aussi que les déchets

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Samedi 20 avril 2014 – Plantation

Samedi 20 avril 2014 – Evènement Disco Soupr

Source : http://lacartonnerie.blogspot.fr/


doivent être régulièrement recouverts de broyat (déchets secs comme des noyaux) qui permettent de régulariser l’acidité de la matière en décomposition. Pendant que nous aidons Sara, quelques enfants sur place sont entrain de repeindre le mobilier dégradé par des tags. Après plus d’une heure, Sara nous propose de planter avec l’aide de, seulement une personne, Christophe, les différents végétaux qu’ils ont récupérés. Il est plus de 17H et des personnes se baladent avec leurs enfants sur le site et nous observent. On propose à quelques enfants présents de planter des légumes et des plantes avec nous. Clémence et moi-même aidons deux enfants à planter, on leur explique où creuser et comment bien mettre la terre. Les enfants partent mais une étudiante à l’école d’architecture arrive pour nous aider. Nous plantons des herbes artomatiques et aussi des salades. Avec Clémence, nous semons aussi des petits pois et des côtes de blettes. Nous marquons les différents légumes par des piquets et bois. Ensuite, à l’aide de râteaux nous payons les plantes pour les protéger du froid. A l’aide des enfants des membres de Carton Plein, nous arrosons la terre dans tous les bacs. Pendant que nous jardinons, à l’intérieur des locaux, plusieurs personnes sont en train de mettre en place la « Disco Soupe ». Ils découpent les légumes avant d’accueillir des habitants du quartier. Il est plus de 21H, et il fait froid. On remarque qu’il y a beaucoup de monde dans les locaux, pourtant nous sommes que cinq à jardiner. Sara nous remercie l’avoir aidé. Nous hésitons à aller à « Disco Soupe », mais trop fatigués nous décidons de partir. »42

Suite à cette expérience, j’ai pu constater que les chantiers participatifs ont de nombreuses limites. Tout d’abord, la communication réalisée par l’association n’est pas assez importante. Personnellement, c’est seulement grâce aux recherches autour de mon sujet d’études que j’ai pu connaitre les actions de l’association Carton Plein, qui pourtant est située dans mon quartier. De plus, à la vue du faible nombre de personnes présentes lors de l’événement, on peut considérer que peu de gens étaient au courant de l’évènement. Par ailleurs, l’aspect convivial est très présent grâce aux membres de l’équipe. A chaque rencontre avec les membres de l’équipe, j’ai toujours était reconnue. Dans un second temps, je dirai que l’expérience a été très enrichissante mais aussi un peu décevante pour moi. Enrichissante car j’ai rencontré des personnes très différentes et j’ai appris, à l’aide de Sara, beaucoup de choses sur le jardinage et le compost ; mais aussi décevante, car je me suis rendue compte que la participation des habitants du quartier avait été vraiment très faible et que lors de la plantation des légumes. De plus, les membres de Carton Plein ont délégués toute l’organisation à Sara, qui n’appartient pas à l’association. Notre ressenti avec Clémence a été que, sans nous, le jardin n’aurait pas pu être planté. D’ailleurs, Sara nous a remerciées chaleureusement de l’avoir aidée tout au long de l’après-midi. De plus, j’ai compris que l’un des inconvénients du chantier participatif est la difficulté des gens à venir et à participer. En effet, il faut « se jeter à l’eau » et se débrouiller seule, si on veut faire quelque chose. L’initiative vient seulement de soimême et l’équipe n’est pas forcement là pour nous mettre en confiance. 42

Ce récit est complété par des photographies en ANNEXE 9

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Enfin, à chaque visite à La Cartonnerie, j’ai remarqué que ce sont toujours les mêmes personnes qui sont présentes aux réunions et aux ateliers. Je pense que pour être au courant de ce type d’événements, il faut intégrer une sorte de « cercle de connaissance » et avoir un intérêt personnel pour ce type d’activités. Cette expérience m’a permis d’établir un constat par rapport aux limites, mais aussi aux attraits, que peut proposer un chantier participatif et artistique. Tout d’abord, la communication de ce genre d’évènements doit être très importante. Elle doit sortir du milieu marginal afin que les habitants soient au courant des chantiers sans devoir se renseigner eux même. Ensuite, l’organisation du projet doit permettre aux riverains de se sentir concernés et investis par leur quartier. En effet, on peut retrouver une certaine forme de consommation par les usagers des lieux : l’association organise et fabrique, les habitants consomment et utilisent ensuite. Par ailleurs, le chantier participatif est un événement festif et de convivialité qui propose plus que de seulement créer. L’équipe et les intervenants apportent un échange à la fois sociale mais aussi ludique. La qualité de ces ateliers est d’apprendre au contact des autres : les connaissances de l’un ou de l’autre sont partagés et mises en commun. La pluridisciplinarité des activités reste toujours présente dans ce type de chantier. Enfin, l’accueil et l’aspect sympathique créaient, autour d’un tel projet, une proximité entre tout le monde sans jugement et avec beaucoup d’envie.

A travers l’exemple stéphanois, on constate que les chantiers participatifs et artistiques se développent sous plusieurs formes. Que ce soit un jardin, ou bien une activité manuelle de construction, ils ont tous pour but de réinvestir des lieux en friche afin d’ « activer » la ville et les quartiers. Aujourd’hui, tous les acteurs qui participent et qui mettent en place les chantiers ont un seul objectif : FABRIQUER LA VILLE. FABRIQUER LA VILLE DE DEMAIN avec une prise de conscience environnementale; mais aussi, FABRIQUER LA VILLE ENSEMBLE, afin que les habitants soient des acteurs et non plus des observateurs.

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CONCLUSION La friche urbaine est un phénomène qui n’est pas ancien dans nos villes possédant un lourd passé industrielle. Par ailleurs, les artistes ont été les premiers à utiliser ses espaces vagues afin de quitter le cadre institutionnel imposé par les musées. Hors les murs des salles d’expositions, ils jouent avec le contexte des friches dans son caractère de mémoire, mais aussi de proximité directe avec l’espace public. Au-delà de son rôle de créateur, l’artiste confronté au public est devenue un artiste médiateur : il devient le lien entre les habitants et leur propre ville. Aujourd’hui, l’habitant est devenu un véritable acteur de la ville par sa prise en main de l’espace public, mais celui-ci possède des limites qui freinent parfois les artistes dans ce type d’actions. Par ailleurs, l’appropriation des friches est remarquable par une typologie de démarche. Les chantiers participatifs et artistiques sont caractérisés par une temporalité très faible, une ambition de créer des expériences, mais surtout de faire participer les habitants sans aucun a priori. De plus, cet espace expérimental directement implanté dans l’espace urbain créer des tensions entre les acteurs institutionnels, mais aussi les acteurs informels comme les collectifs, les habitants ou les associations. La relation entre ces deux types d’acteurs peut être soit un frein, soit un moteur dans la réalisation des chantiers. En effet, le politique peut inviter, voir avoir l’initiative de ce projet, mais l’aspect alternatif et l’occupation parfois sauvages des friches peut ralentir voir stopper sa concrétisation. De surcroît, on peut noter que la friche peut impacter bien au-delà de son espace physique. En effet, l’appropriation amène parfois aux habitants de s’identifier à ce lieu comme un reflet de leur identité. Mais au-delà du quartier, l’image positive de ces friches peut être utilisée bien plus largement, de l’espace du quartier à la ville elle-même. Enfin, à travers l’exemple de la ville de St Etienne, nous avons pu constater que ces incitatives participatives et artistiques se développent de plus en plus aujourd’hui et sous des formes très diverses. Par mes expériences, mais aussi dans l’étude des chantiers, j’ai pu comprendre que la participation des habitants dans l’ « activation » de leurs villes est devenue un enjeu important, utilisé de plus en plus par la politique urbaine. Tous ces initiatives reposent ainsi donc sur deux bases : fabriquer la ville de demain, par une inspiration écologique, mais aussi fabriquer la ville ensemble par l’implication directe et la prise en considération des citoyens. A travers mon enquête, je peux désormais affirmer que les chantiers participatifs et artistiques en friches urbaines sont devenus de véritable outil de la fabrication de la ville. En effet, la pluralité des acteurs, mais aussi des actions invitent les habitants à participer au développement leur propre ville.

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Par ailleurs, ce projet est confronter a des limites nombreuses, qui par la force de conviction des organisateurs et des participants peut être rapidement surpassé. Lors de mes recherches, j’ai été confronté à plusieurs barrières surtout au niveau de mes outils d’étude. J’ai pu constater que la ressource bibliographique était parfois difficile à exploiter et que seuls les ponts entre les livres permettaient de former un ensemble de documents cohérents. De plus, j’ai pu constater que réaliser un entretien était particulièrement compliqué. En effet, il est difficile malgré la préparation des questions à cadrer la réponse de l’interlocuteur sur mon sujet de recherche. Enfin, ce qui m’a plus dans cette enquête c’est aussi ma participation à un chantier participatif et artistique à La Cartonnerie de St Etienne. La réalité du projet m’a permis de comprendre le fonctionnement et l’organisation de ces événements collectifs. Mais surtout j’ai pu comprendre à travers ma place de participante observatrice que l’encadrement doit être mené avec une grande attention afin de donner envie aux habitants de s’investir.

Fabriquer la ville est devenue aujourd’hui un enjeu important pour les collectivités. Tel un outil, de plus en plus de chantiers participatifs et artistiques sont développé dans les villes. C’est, en effet, grâce à la présence de nombreuses friches que les initiatives peuvent être mise en place dans le développement urbain. De plus, fabriquer la ville va bien au-delà de l’occupation, aujourd’hui l’ambition écologique est devenue une priorité dans l’urbanisme actuel. Et c’est ainsi, grâce à l’action citoyenne de ces chantiers, que le développement durable peut s’installer dans nos villes en mal de nature. C’est ainsi, qu’on peut se demander si cette nouvelle attitude vis-à-vis du projet ne doit pas entrer dans les écoles d’architecte. En effet, il est peut être aujourd’hui nécessaire de confronter et d’initier les futurs architectes à une pratique urbaine plus festive, plus flous et plus en lien avec les perspectives d’avenir du développement urbain : FABRIQUER LA VILLE DE DEMAIN ENSEMBLE.

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ANNEXES Annexe 1 : Extrait du dossier des différents jardins partagés à St Etienne

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Annexe 2 : Affiche Jardins partagĂŠs et Compost http://www.ruesdudeveloppementdurable.fr/animatrice-jardins-partages-compostage/

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Annexe 3 : Photographies Jardins du CrĂŞt de Roch http://www.ruesdudeveloppementdurable.fr/animatrice-jardins-partages-compostage/

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Annexe 4 : Document projet « Place au changement » du Collectif ETC http://www.collectifetc.com/

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Annexe 5 : Photographies des diffĂŠrents ateliers de La Place du GĂŠant http://www.collectifetc.com/

Atelier Bricolage

Atelier jardinage

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Atelier peinture


Annexe 6 : Photographie d’une réunion de La Place du Géant http://www.collectifetc.com/

Annexe 7 : Photographie de l’œuvre des graphistes de La Place du Géant http://www.collectifetc.com/

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Annexe 8 : Affiche « Les Nouveaux Jardins Urbains » Source personnelle

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Annexe 9 : Photographies complémentaires aux jardins partagés Source personnelle

Vendredi 19 avril – Construction du grand bac

Samedi 20 avril – Sara et Clémence – Transfert entre les deux composts

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Samedi 20 avril –Clémence et les enfants – Plantations

Samedi 20 avril – les enfants – Arrosage du jardin


BIBLIOGRAPHIE – SITOGRAPHIE Art urbain et Démarches participatives AMBROSINO Charles et ANDRES Lauren, « Friches en ville : du temps de veille aux politiques de l'espace », Espaces et sociétés, 2008/3 n° 134, p. 37-51. Lien : http://www.cairn.info/revue-espaces-et-societes-2008-3-page-37.htm

ARDENNE Paul, Un art contextuel : création artistique en milieu urbain, en situation, d'intervention, de participation, Paris, Flammarion, 2002, 254 pages. AUCLAIR Elizabeth, « Comment les arts et la culture peuvent-ils participer à la lutte contre les phénomènes de ségrégation dans les quartiers en crise ? », Hérodote, 2006/3 n° 122, p. 212-220. Lien : http://www.cairn.info/revue-herodote-2006-3-page-212.htm

AUCLAIR Elizabeth, « La culture et les quartiers populaires », diversité, 2007/3 n°148, p.53-59. Lien : http://www.revues-plurielles.org/_uploads/pdf/82/148/89319_14383_18194.pdf

AUGE Marc, L'impossible voyage, Le tourisme et ses images, Paris, Payot, Rivages poche, coll. « Petite bibliothèque », 1997 COLLIN Michèle, « Nouvelles urbanités des friches », Multitudes, 2001/3 n° 6, p. 148-155. Lien : http://www.cairn.info/revue-multitudes-2001-3-page-148.htm

De CERTEAU Michel, GIARD Luce, MAYOL Pierre, L'invention du quotidien. Arts de faire. Paris, Folio « Essais », 1990. DRAC Rhône-Alpes, Agir sur la ville : habitants & transformations urbaines en Rhône-Alpes, La passe du vent, 2004, 136 pages. DEMAILLY Kaduna-Eve, « Les délaissés urbains : supports d’une participation citoyenne constitutive de nouveaux territoires ? Le cas des jardins partagés de l’est parisien », Actes de la Journée doctorale, GIS, EHESS, 2011/10, 11 pages. Lien: http://www.participation-et-democratie.fr/sites/default/files/atelier_1-2_eve_demailly.pdf

FOUCAULT Thierry, LASIDA Elena et PINHEIRO-CROISEL Rebecca, « Démarches participatives en urbanisme, que faire des contradictions ? », RAMAU, Concertation et Contradictions, 2012, 9 pages. GUILLAUD Clara, « Interstices urbains et pratiques culturelles », Implications philosophiques, Dossier 2009 – L'Habitat, un monde à l'échelle humaine. Lien : http://www.seminar-bg.eu/spisanie-seminar-bg/broy5/item/306.html

HOSSARD Nicolas et JARVIN Magdalena, « C'est ma ville ! » : de l'appropriation et du détournement de l'espace public, Paris, l'harmattan, 2005, 284 pages.

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Musée des Beaux-Arts de Rennes, Mouvement - Lumière - Participation GRAV 1960-1968, 2013. RAULIN Anne, Anthropologie urbaine, Paris, A. Colin, 2007, 211 pages.

L’exemple stéphanois L’Agenda Stéphanois, Empathi/city, Making our City Together, St Etienne, Mars 2013, 4eme édition, 80 pages. ARNOULD Nathalie, FRANC Josyane (sous la dir.), Human Cities 2, Revendiquer l’espace public, St Etienne, Cité du Design, 2011, 120 pages DARRIEUX Margaux, « Dossier : Collectifs d'architectes », AMC, 2014/04 n°232, p. 63-73. TRIGANO Sandra (RAUTENBERG Michel, VEDRINE Corine), L'imaginaire ouvrier dans les constructions mémorielles et patrimoniales des villes industrielles : l'exemple stéphanois, 2009/5, 57 pages. http://www.carton-plein.org/ http://www.citedudesign.com/fr/biennale/ http://www.collectifetc.com/ http://lacartonnerie.blogspot.fr/ http://www.ruesdudeveloppementdurable.fr/animatrice-jardins-partagescompostage/ GACON Julie, GACQUET, Yvon, GAUBERT Sophie, « Sur la route… d’une ville à la recherche d’une nouvelle image : Saint-Etienne », Ville en campagne n°7, France Culture, 14 février 2014.

Méthodologie AUBERT-LOTARSKI Angéline, « Etudes et conseils : démarches et outils », Outils pour agir, 2007, www.esen.education.fr

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RETOUR SUR ENSEIGNEMENT Au cours de mon année de terminale, j’ai dû choisir une orientation d’étude afin de m’engager dans l’apprentissage d’un futur métier. Elève en filière scientifique, je cherchais une profession en lien avec un univers abordant les mathématiques et la physique. De plus, au niveau de mes loisirs, j’apprécie les travaux manuels et de création. La filière architecturale m’est apparue comme un bon compromis entre la réalité scientifique et mon ambition créative. C’est ainsi que je me suis lancée dans les études d’architecture à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Saint Etienne, ENSASE. 

Thématiques de projet

Ma licence d’architecture à l’ENSASE s’est développée en six semestres qui ont abordés et développés un regard large sur l’architecture. En effet, la première année a été consacrée à notre apprentissage de l’outil du dessin, mais aussi à une première approche de la ville. Des projets courts ont ponctués l’année en exploitant notre créativité dans des espaces à contextes spécifiques. Le premier semestre a été développé autour d’un cube de 5x5m. Le but étant de créer un refuge en creusant la matière. C’est à cette période que nous avons appris les premières règles du dessin architectural. Le deuxième semestre lui s’est intéressé à la ville de Firminy. Nous avons appris à lire et à concevoir des cartes (topographique, hydrologique, etc.). La création d’une maquette de plus de 2x2m nous a éveillés sur le travail de groupe et la creton de maquette de contexte à petite échelle. Notre principale projet s’est développé autour de Firminy Vert et donc de l’architecte Le Corbusier. Le but étant de concevoir un pavillon d’accueil dans un contexte architectural fort. En fin d’année, notre pratique du dessin à la main était complète. La deuxième année a été beaucoup plus hétérogène. Le troisième semestre s’est centré uniquement sur la création d’une école/gymnase en contexte urbain. C’est la première fois que nous avons amené notre projet au- delà de l’esquisse en s’intéressant plus précisément à ses matériaux, mais aussi et surtout à sa structure. Le quatrième semestre a lui par ailleurs été tourné vers la question du paysage et du monde rurale. Celui-ci s’est développer en trois parties dans vers le village de St Clément. La première partie a été l’atlas. Le but de ce projet était de nous apprendre à lire le paysage, de comprendre l’architecture rurale, mais surtout à assimiler des règles autour du respect du site en espace rurale. La fabrication de cet atlas a permis d’apprendre à créer des cartes et a savoir expliciter par de moyens iconographiques le paysage. La seconde partie a été une analyse autour de différents projets d’architectes. Mon projet était le Pavillon Nordique de la Biennale de Venise par l’architecte Sverre Fehn. L’objectif de cet exercice était de savoir analyser et décortiquer des projets sous trois aspects: l’organisation, la structure et l’enveloppe. Cette étude nous a servi dans la création d’un projet en troisième partie du semestre. Nous avions comme consigne de concevoir une étable à St Clément, en respectant le paysage, le site, mais aussi a appréhender la lumière et les jeux de matière dans un bâtiment fonctionnel.

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Enfin, la troisième année a été consacré à l’espace de la vile et son développement. Le cinquième semestre s’est axé sur la ville de Romans-sur-Isère et Bourg-de-Péage en Ardèche. Nous avons dans un premier temps établit une analyse urbaine, puis un projet autour de ces deux villes. La finalité de cette étude était de comprendre le mécanisme de la ville à une échelle globale, de comprendre ses dysfonctionnements et de chercher des solutions à ses problèmes. Le sixième quant à lui, est dirigé vers un travail dans un contexte particulier qui est la ville de St Etienne. Les projets sont tournés vers la culture n mais aussi l’habitat : une médiathèque, des logements pour jeunes travailleurs et une cité de l’immigration et du peuplement de St Etienne. Ce sont deux thèmes que nous n’avions jamais travaillé. Cette troisième années est beaucoup plus enrichissante dans l’élaboration de projet car elle s’est complexifié dans son programme et dans la réponse par rapport aux deux années précédentes. Ainsi, ma licence a été très complétée par une diversité de thématiques abordées chaque semestre, mais aussi par un regard large que je ne connaissais pas sur le travail de l’architecte. 

Une complémentarité

Par ailleurs, la licence ne s’est pas tournée autour uniquement du projet. En effet, nos cours complémentaires ont apportés une base de culture architecturale nécessaire à la conception du projet. La pluridisciplinarité de mes études m’a ouverts des voies sur des connaissances inattendues comme la philosophie, l’anthropologie ou même l’art. Les cours d’histoire de l’architecture et de sciences de l’ingénieur ont apportés des bases stables et essentielles dans la formation d’architecte. J’ai ainsi compris que l’architecte n’est pas seulement un concepteur. Il doit posséder des qualités sociales car il conçoit pour les autres. Mais aussi, une culture générale importante afin d’avoir une ouverture d’esprit dans leur vie professionnel. La part artistique des études d’architecture sont aussi très importantes notamment au cours des sessions Gaïa. En effet, nous avons été confrontés à la création à échelle 1 de la conception d’objet. En deuxième année, la création de structure en bambous avait pour but de créer un lieu protégé. Tandis qu’en troisième année, la conception a porté sur la suspension de carton afin de créer une pièce où deux personnes pouvaient se rencontrer. L’appropriation de l’espace à l’échelle un avec des matériaux particuliers a permis, pour la première fois, d’intervenir directement dans l’espace et non pas juste de le concevoir en plan. 

Les stages

Au cours de ma licence, j’ai dû faire deux stages : un stage ouvrier en entrepris et un stage de première pratique dans une agence d’architecte. Mons stage ouvrir s’est déroulé dans une entreprise de gros œuvre, M2i Fayard, à St Étienne. J’ai appris durant cette formation la complexité de la mise en œuvre d’un chantier et de la construction de bâtiment. J’ai pu observer pendant deux semaines la mise en place du béton banché, le coulage de dalle, mais aussi la collaboration entre les divers corps de métier durant le chantier.

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J‘ai aussi aperçu d’un point de vue extérieure, le rôle de l’architecte dans la mise en œuvre du projet : l’architecte est perpétuellement confronté à des problèmes de conceptions et doit tenir un calendrier lors de la phase de chantier entre les différentes entreprises. Mon stage de première pratique s’est déroulé dans le cabinet Grousson à St Étienne. Durant un mois, j’ai participais à la vie de l’agence et était confronté à la vie professionnel de l’architecte. J’ai connu les réunions de suivis de chantiers où j’ai appris le rôle de coordinateur mais aussi de superviseur des artisans. J’ai dû aussi concevoir en première esquisse, l’agrandissement des bureaux d’une usine. J’ai dû utiliser un logiciel de conception, Archicad, que j’ai dû apprendre « sur le tas ». Ce deuxième stage est révélateur de la différence entre les études d’architecture et la réalité de la profession d’architecte. Je me suis très vite aperçue que deux années d’études n’étaient pas suffisantes pour gérer le projet en contexte réel. Par ailleurs, cette approche directe du métier m’a confortée dans l’idée de devenir architecte.

Un nouveau regard

Les études d’architecture permettent d’avoir une nouvelle approche de l’espace qui nous entoure. La pluridisciplinarité de nos exercices, mais aussi de nos cours, nous amènent à avoir un regard beaucoup plus grand que soit culturellement ou bien spatialement. En effet, dès ma première année à l’école, j’ai remarqué que je prenais beaucoup plus d temps à décortiquer les bâtiments qui m’entourer ou les paysages que je regardais. J’ai souvent fait des remarques à mon entourage à des détails que je voyais autour de moi et qui m’interpellait. Cette nouvelle vison m’a permis de m’ouvrir culturellement et particulièrement au street art qui occupe systématiquement mon environnement. Au cours de mes deux dernières années, je me suis aperçue que la ville de St Etienne possédait de nombreux projets autour de l’art et des jardins. C’est en m'intéressant de plus près à ce phénomène que j’ai découvert la création de chantiers participatifs et artistiques dans l’espace de ville, et particulièrement dans les friches urbaine propre à la ville de St Etienne en plein renouvellement urbain. C’est pour cela que j’ai pris l’initiative de construire mon rapport d’étude autour de cette thématique. C’est d’ailleurs grâce à cette enquête autour de mon rapport, qui m’a conduit à connaitre un cercle de personnes qui mettent en œuvre et fabriquent l’espace public grâce à des évènements. Ces rencontres m’ont permis de me rendre compte que l’architecte pouvait avoir une action hors les bureaux des cabinets et surtout, agir dans l’espace de ville par des initiatives non conventionnelles. Aujourd’hui, en fin de licence, je me rends compte que mon avenir professionnel va peut-être se tourner dans une conception nouvelle de la ville par des projets artistiques et participatifs ; direction possible par la grande diversité culturel des études d’architectures.

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