FERTILISER UNE VILLE INSULAIRE
R apport de PFE_Septembre 2020_ ENSAPVS
M a r g a u x PAU M E L L E
Encadré par Léa MOSCONI Arnaud SOMPAIRAC Hervé DUBOIS
Ré - introduire l a b iodive rsité s u r l ’ I l e Saint- De nis Rapport de PFE_Septembre 2020
École Nationale Supérieure de ParisVa l - D e - S e i n e
DE Écologies _ Architecture, culture et espaces publics
Encadré par Léa Mosconi, Sompairac et Her vé Dubois
Arnaud
M a r g a u x PAU M E L L E
Couverture_ Document personnel 1_ [Page suivante] Document personnel, image extraite du site Google Maps
48°57’02.6’’N 2°18’15.0’’E
4
6
/ REM ERC I EMENTS
Ce projet de fin d’étude a pu voir le jour grâce à la contribution de nombreuses personnes à qui je souhaite témoigner de ma profonde reconnaissance ; de mon respect et ma gratitude. D’abord, je souhaite remercier mes professeurs et encadrants de projet, Léa Mosconi, Arnaud Sompairac et Hervé Dubois, pour leurs conseils et leurs références, mais surtout leur implication, qui m’a permise de rester motivée tout au long du semestre, même lors des phases les plus difficiles. Aussi, je souhaite remercier les nombreux intervenants qui ont pris de leur temps pour me transmettre des renseignements précieux concernant mon territoire d’intervention : Nadine Roudil, l’encadrante de mon carnet d’itinerance qui m’a permis d’enrichir mes connaissances sur les questions sociales et environnementales du site mais aussi Guillaume Gaudry, chef de service adjoint dans le service des parcs urbains de l’Ile Saint-Denis, Delphine Despres, directrice du développement social et de la citoyenneté à la Mairie de l’Ile Saint-Denis et Gwenaëlle Bordet, chef de projets et directrice de l’aménagement dans le secteur Ouest de la Plaine Commune, entre autres. Je souhaite remercier aussi mes amis et ma famille pour leur soutien et leurs encouragements ; leurs avis et leur écoute ; leur patience et leurs conseils ; et cela, depuis ma première année d’étude en architecture. Tout particulièrement, j’aimerais remercier Thomas Deschodt, pour sa bienveillance ainsi que nos nombreuses discussions constructives notamment au sujet de ce projet. Aussi, je souhaite remercier l’ENSA Paris Val-de-Seine, et l’ensemble des professeurs de mon cursus pour m’avoir permis de mener à bien ces études et notamment ce projet de fin d’étude.
S O M M A I R E AVANT-PROPOS
10
INTRODUCTION
12
I.
ÉTATS DES LIEUX, REPÉRAGES ET PROBLÉMATIQUES 1. A l’échelle de la métropole 2. A l’échelle de la ville 3. A l’échelle du site
II.
LA PROPOSITION URBAINE, QUELLE AVENIR POUR CETTE PARCELLE ? 1. 2. 3. 4.
III.
Un programme adapté et diversifié Cultures et matérialité des sols
14 16 25 36 48
Aménagements urbains et espaces publics
50 63 74 78
LE PROJET ARCHITECTURAL, VERS UN MODÈLE DE VILLE ALTERNATIVE
84
Accéssibilité et flux
1. Implantation et volumétrie
2. Des dispositifs architecturaux au service du projet 3. Architecture et matérialité CONCLUSION
86 92 102
106
/ AVANT-PROPOS
Le projet de fin d’étude est à la fois le résultat d’un travail personnel reflétant la dernière année de master mais c’est aussi l’aboutissement de cinq années d’études, riches en découvertes et en apprentissages.
10
Durant mes trois premières années en école d’architecture, j’ai saisi l’importance de la rigueur, la responsabilité, l’organisation et l’investissement. J’ai appris à travailler la lumière et les matériaux, à manipuler les formes et les espaces afin de servir l’humain et d’assurer son bien-être au sein même de cet art qu’est l’architecture. Mes études ont aussi été ponctuées de nombreuses expériences personnelles ; j’ai notamment eu la chance de partir un an en échange dans l’Université Fédéral de Nitéroi dans la région de Rio de Janeiro au Brésil pour ma première année de master. J’ai alors observé de nouveaux horizons, appris une nouvelle langue, fut confrontée à de nouvelles problématiques environnementales, sociales ou encore politiques et cela m’a finalement permis de me forger une tout autre manière d’appréhender l’espace et de le penser. Être immergée dans une autre culture a été une expérience individuelle épanouissante et professionnellement constructive.
Après avoir passé un an en Amérique du Sud, j’étais consciente d’avoir été sensiblement touchée par une nature luxuriante, des paysages contrastés et des villes fragmentées ; thématique qui m’a d’ailleurs amené à mon sujet de mémoire de fin d’étude. Ce travail de recherche m’a beaucoup enrichi et m’a permis de prendre réellement conscience de notre rôle en tant qu’architectes : nous avons, d’une certaine manière, le pouvoir de « changer les choses ». Effectivement, à travers ce que nous construisons, nous sommes quelque part, responsables de la manière dont les gens vivent, agissent. En France, la pédagogie que j’avais suivie jusqu’ici, durant ma licence, ne prenait pas assez en compte, pour moi, le milieu dans lequel on se trouve. Pour ma dernière année de master, il m’est donc apparu essentiel de m’ouvrir à un enseignement différent, sensible de ce qui nous entoure et conscient des problématiques actuelles, écologiques et durables notamment. C’est donc pour cela que j’ai choisi le domaine d’étude Écologies, et particulièrement le groupe de projet « Architecture, culture et espaces publics » qui aurait comme thème, la ville alternative. En effet, ici, on prendrait en compte l’environnement à plusieurs échelles : à l’échelle de la métropole, de la ville mais aussi du territoire lui-même. Je suis heureuse d’avoir pu suivre cet enseignement où j’ai découvert des notions paysagères et urbaines qui m’ont beaucoup touchées et qui sont en cohérence avec le monde de demain.
J’espère vivement pouvoir expérimenter de nouveau ces notions dans la suite de mon parcours, car elles m’ont convaincues de leur force et de leur légitimité par rapport au monde dans lequel on vit aujourd’hui, soit un monde en continuel changement et fortement touché par l’activité humaine. Ce projet de fin d’étude est le fruit d’un travail qui s’est déroulé sur deux semestres. Au S9, j’ai d’abord pris le temps d’analyser le territoire afin d’établir un programme puis de proposer une organisation spatiale, urbaine et paysagère cohérente, adapté au milieu et à la population. Le S10, lui, m’a permis de développer cette proposition urbaine ainsi que le projet architectural. Ce rapport de projet de fin d’étude permet à la fois de comprendre le fonctionnement de mon projet et ma méthode de travail; des premières analyses jusqu’aux détails architecturaux et paysagers, mais aussi de prendre du recul par rapport à ces cinq années qui viennent de s’écouler. En effet, ce rapport de PFE apparait aussi, pour moi, comme un moyen de mettre des mots sur ce qui me touche dans l’architecture et de la raison pour laquelle j’en fais.
12
/ INTRODUCTION Ce projet de fin d’étude va permettre de développer un certain nombre de notions acquises durant toutes ces années d’études mais aussi d’en présenter d’autres, qui sont, spécifiques au site choisi. La transition postindustrielle a amené les villes à repenser leurs politiques urbaines. Aujourd’hui, plus que jamais, les collectivités doivent renouveler leurs tissus urbains et économiques afin de s’inscrire dans une directive responsable et durable, capable de répondre aux problématiques actuelles et futures.
Ici, il est question de prendre en compte les questions environnementales et sociétales du 21e siècle en fabriquant un lieu tourné vers une production alternative en milieu urbain, plus précisément sur une ancienne friche industrielle, situé au cœur de la zone Natura 2000 de l’Île-Saint-Denis. Composée à l’Est du Parc Départemental et à l’Ouest, de la pointe de l’île, un espace en cours de renaturation spontanée, actuellement fermé au public pour la tranquillité des oiseaux, il s’agit finalement de développer une production associant biodiversité, agriculture urbaine et éco-activités, tout cela sur un site de 3,6 hectares à proximité de la capitale. Utilisé pendant longtemps comme lieu de stockage de remblais et de matériaux, cette parcelle atypique est aujourd’hui un territoire en friche. Depuis 2019, la parcelle est en pleine reconversion écologique : effectivement, la ville a pris la décision de prêter le terrain à l’association Halage pour 10 ans dans le but de faire revivre le territoire. Le site accueille aujourd’hui un projet s’intitulant Lil’Ô mise en place par cette association. On y trouve notamment une culture de fleurs bio, locales et vendues en circuit court, des laboratoires scientifiques expérimentant la dépollution et la fertilisation des sols, un espace de compost et une guinguette, espace de convivialité. Il est question de réhabiliter les sols pour faire place à un espace naturel dédié à la biodiversité mais aussi à la science et l’éducation populaire.1
Ce projet apparait comme la première étape vers une réinsertion de ce site au territoire mais aussi comme une première réponse à ce que pourrait devenir la ville de demain. En tant qu’étudiant en architecture, notre rôle est ici d’apporter d’autres idées, des solutions innovantes, nouvelles, tout en restant en cohérence avec la proposition d’Halage, les contraintes posées par la ville et l’idée de construire un modèle de ville alternative. Concevoir un projet durable et responsable dans une ville insulaire à proximité de la capitale, demande de fournir une analyse approfondie du territoire d’étude. Dans une première partie, j’étudierais le contexte global, du territoire jusqu’au site où s’inscrit mon projet, afin de faire ressortir les enjeux et problématiques à considérer. Dans un second temps, la proposition urbaine sera amenée en expliquant comment celle-ci répond aux attentes et aux contraintes du site et de son environnement. Enfin, j’exposerai le projet architectural dans une troisième partie. 1
1 Notre Île 193- été 2019, journal d’information locale, p. 9 à 13
I. ÉTATS DES LIEUX, REPÉRAGES ET PROBLÉMATIQUES
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Dans cette première partie, je vais présenter l’état des lieux, c’est-à-dire le contexte mais aussi les enjeux dans lesquels s’inscrit mon projet de fin d’étude. Il est essentiel de comprendre comment le territoire sur lequel je travaille à évolué au cours du temps, mais aussi comment il se positionne aujourd’hui par rapport aux villes environnantes, et tout cela d’un point de vue géographique, mais aussi historique et démographique. Afin de s’inscrire dans une démarche responsable et durable, il s’agit aussi de comprendre quels sont les atouts et les richesses de ce site mais aussi les contraintes qu’il pose. Afin de mener à bien cette analyse, il m’a semblé évident de travailler à plusieurs échelles : premièrement à l’échelle de la métropole puis à celle de la ville et du site lui-même.
2_ [Ci-contre] Photographie de Soukni Myriam, retouche personnelle, vue sur le pont et la commune d’Epinay depuis l’Ile-Saint-Denis
1. À l’échelle de la métropole 1.1. Un territoire au cœur des projets pour la ville de demain
95
75
92
78
93 94 77
91
3
16
ARRONDISSMENT DE RAINCY
ARRONDISSMENT DE SEINE SAINT-DENIS
ARRONDISSMENT DE BOBIGNY
PARIS
4
Située à 10 kilomètres au Nord de Paris, l’Île-Saint-Denis se place au centre du Grand Paris, projet d’aménagement à l’échelle de la métropole qui a pour vocation d’améliorer le cadre de vie des habitants, de corriger les inégalités territoriales et de construire durablement. L’Île fait aussi partie d’une communauté d’agglomération, la Plaine Commune, qui regroupe neuf villes au Nord de Paris et plus de 429 000 habitants. En plus de l’Ile-Saint-Denis, on y trouve Aubervilliers, Épinay-sur-Seine, La Courneuve, Pierrefitte-sur-Seine, Saint-Denis, Saint-Ouen-sur-Seine, Stains et Villetaneuse. Ce projet s’est développée en Janvier 2000 autour d’un projet commun : construire, sur le territoire de ces neuf villes, un projet solidaire de développement économique, urbain, social et culturel, soit mettre en avant des secteurs d’activités essentiels comme l’aménagement urbain, le développement économique et les services à la population. Cette organisation cherche aussi à mettre en œuvre des actions d’amélioration de la qualité environnementale du territoire. Dans le Grand Paris, il apparait comme le « Territoire de la Culture et de la Création ».1 1 Plaine Commune 9 villes 1 projet commun, 2014, p.5-10-28
PIERREFITTE-SURSEINE
ÉPINAY-SUR-SEINE 54 700 hab
VILLETANEUSE
28 500 hab
Ligne 17
13 000 hab STAINS 34 200 hab
L’ILE-SAINT-DENIS 7 100 hab
T8
Ligne 16
SAINT-DENIS 107 000 hab LA COURNEUVE Ligne 15
38 100 hab
Ligne 14
SAINT-OUEN 47 0000 hab
AUBERVILLIERS 76 000 hab
T3
5
Futurs Villages Olympiques
Futures lignes de transports
3 _Document personnel, plan de situation du département 4 _Document personnel, plan de situation de la Plaine Commune aussi appelé Arrondissement de Seine-Saint-Denis 5_ Document personnel, plan de situation de l’Ile-Saint-Denis et des aménagements futurs au sein de la Plaine Commune
Enfin, la Plaine Commune et l’Ile-Saint-Denis tout particulièrement, se trouve au cœur des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024. Les nombreux logements, équipements et transports qui sont actuellement en construction, laisseront un héritage culturel et économique important qui représente une opportunité de développement qu’il faut considérer dès à présent. Le Village Olympique se tiendra dans deux projets en cours de réalisation : l’Écoquartier fluvial de l’Ile-Saint-Denis et Universeine à Saint-Denis. La construction du Village s’accompagnera du réaménagement des berges de Seine et d’une passerelle réservée aux bus et mobilités douces reliant l’Ile à Saint-Denis. De part sa situation géographique, au carrefour de nombreux projets et organisations territoriales, on comprend bien que le site est à appréhender sous différentes échelles. De plus, cela nous invite à nous poser des questions assez large dans un premier temps : Qu’est-ce que la ville durable de demain ? Comment se manifestera-t-elle ? Comment cela va modifier notre manière de vivre, d’agir, d’habiter ? Quelle sera la place des habitants dans tout cela ? Comment se positionnera-t-on par rapport à la ville, l’architecture, le paysage ?
18
6_ Document personnel, plan de situation de l’Ile-Saint-Denis dans la trame végétale de la métropole
0
1
2
5 km
1.2.Trame verte et paysages fluviaux : des intérêts écologiques pour la région Malgré la présence de l’agglomération parisienne à une dizaine de kilomètres et donc d’un territoire dense fortement marqué par l’activité humaine, la région est composée de nombreuses zones naturelles ou semi-naturelles formant ainsi des trames vertes qui présentent des intérêts écologiques importants à prendre en compte. L’Ile-Saint-Denis se trouve elle-même au centre d’une trame verte qui compose le territoire. Cette continuité verte est constituée du Parc des Sports et du Parc des Sévines à Gennevilliers, du Parc des Chanteraines et d’un aménagement des berges à Villeneuve-la-Garenne et du Parc Départemental sur l’Ile-Saint-Denis. Cet espace vert de 23 hectares en fait une des communes les plus verte du département. Il s’étend sur une longueur de 1,5 km et occupe quasiment toute la largeur de l’île ; seule une route, le quai de la Marine, le longe à l’est. Bordant le site et représentant un tiers du territoire de la commune, il apparait donc comme une caractéristique évidente à prendre en compte notamment dans la conception d’une continuité verte. Dans l’ensemble de la région, la Seine, le fleuve luimême et les canaux qui en découlent, apparait comme un atout paysager majeur. Il constitue un paysage fluvial attrayant aussi bien dans la capitale que dans les villes en périphérie.
À Paris, le projet des Rives de Seine, mis en place au printemps 2018 a permis d’aménager 10 hectares de bord de Seine afin de les dédier à la détente, aux loisirs et aux activités sportives. Dans le projet de l’Écoquartier, le fleuve est mis en valeur grâce à des pontons aménagés sur les berges. Le site d’étude, bordé de part et d’autre de la Seine, est constitué d’environ 700 m de berges. Il m’apparait donc essentiel de les placer au cœur de ma recherche pour les reconsidérer tout en préservant leur biodiversité. À l’image du Grand Paris, préserver les territoires naturels ou semi-naturels apparait comme un des enjeux principaux. Il est donc important de considérer cette caractéristique afin de mettre en avant le paysage fluvial et attrayant de cette ville insulaire. On se pose ainsi la question de la place et du rôle de la nature dans notre projet urbain et architectural mais aussi du rapport qu’entretient le Parc Départemental avec notre site. Aussi, les berges représentent un territoire riche et original qu’il me semble important de reconsidérer et de mettre en avant ; on se demande alors quelle est leur place et leur rôle dans le paysage ? Comment les aborder, les aménager, sans abîmer leur végétation florissante et préservée ?
Terrains de sport Parcs et jardins publics
ENGHIENLES-BAINS
SAINT-GRATIEN
Végétation sauvage
DEUIL-LABARRE
ARGENTEUIL
ÉPINAY-SURSEINE
20
VILLETANEUSE
VILLENEUVE-LAGARENNE
GENNEVILLIERS
SAINTDENIS
ASNIÈRES-SURSEINE SAINT-OUEN
CLICHY
7
0
0.5
1
2 km
8
9 7 _ Document personnel, plan des espaces verts à proximité de l’Île Saint-Denis 8 _ L’Ile-Saint-Denis, Huile sur toile, Alfred Sisley, 1872, Collection du Musée d’Orsay 9_ Photographie personnelle, vue sur le pont d’Epinay depuis les berges du site
1.3. Accessibilités et centralités urbaines
22
L’Île-Saint-Denis est reliée aux rives Est et Ouest grâce à trois ponts. Au Sud, le Pont de Saint-Ouen où passe la D 20 permet de relier Saint-Denis/L’Île-Saint-Denis/Gennevilliers et d’accéder à la capitale par le biais de la Porte de Saint-Ouen et de la Porte de Clignancourt notamment. Au centre, le Pont de l’Île Saint-Denis accueillant la N 186 et coupant l’île en deux, relie Saint-Denis/L’Île-SaintDenis/Villeneuve-la-Garenne. C’est un axe très fréquenté : depuis Genneviliers et Villeneuve-La-Garenne, il permet, en effet, de traverser la Seine rapidement afin de rejoindre Saint-Denis, plus grande ville du département et centre urbain limitrophe de Paris. Le Pont d’Epinay, au Nord, où passe la N 310 longeant notre site, relie Epinay-sur-Seine-L’Île-SaintDenis-Gennevilliers et permet de rattacher l’île à l’aéroport de Paris-Charles-de-Gaulle et des villes telles que Sannois, Franconville, Cergy. L’île est également traversée par l’A 86 dans sa moitié sud. Dans le cadre des Jeux Olympiques, celle-ci sera aménagée de protections phoniques pour préserver le calme qui règne sur l’île. L’autoroute A 86, parfois désignée comme le super-périphérique parisien, forme
une boucle complète autour de Paris et permet de relier des préfectures de la petite couronne parisienne : Antony, Créteil, Nogent-sur-Marne, Bobigny, Saint-Denis, Nanterre et Versailles. Au Nord, entre la N 310 et l’extrémité de l’île, un pont enjambant la Seine accueille une voie ferrée sur lequel passe le RER C, qui relie des communes telles que Pontoise et Eaubonne au cœur de Paris et à des gares comme Paris Austerlitz. Le quai de la Marine longe la Seine et relie, face à la rive droite du fleuve, le Pont de l’île Saint-Denis au Pont d’Épinay. Avec une longueur de 3,2 km, cette route est la plus longue voie de la commune et accueille un transit important. Malgré sa caractéristique insulaire, la commune est rattachée à la terre ferme par de nombreux ponts et accès très fréquentés. Ils assurent son rattachement à la capitale et aux centres urbains environnants et son rayonnement à l’échelle départementale et régionale. Deux des ponts qui enjambent l’Île et la rattachent aux rives Est et Ouest, bordent le site d’étude et nous invitent donc à nous questionner sur le rapport de notre site aux villes environnantes.
10_ Document personnel, plan du réseau des transports et des voiries à proximité de l’Île Saint-Denis
Voie ferrée Voie de tram Autoroute Nationale/Départementale Gare RER/Métro/Transilien
ENGHIENLES-BAINS SAINT-GRATIEN DEUIL-LABARRE
VILLETANEUSE
ARGENTEUIL ÉPINAY-SURSEINE
N310 VILLNEUVE-LA -GARENNE
SAINTDENIS
A86 GENNEVILLIERS
SAINT-OUEN CLICHY
10
0
0.5
1
2 km
SAINT-GRATIEN
95
MONTMAGNY
ENGHIENLES-BAINS DEUIL-LABARRE
PIERREFITTESUR-SEINE
ÉPINAY-SURSEINE
ARGENTEUIL
VILLETANEUSE
VILLENEUVE-LAGARENNE
92
SAINTDENIS
GENNEVILLIERS
COLOMBES
93
24
ASNIÈRES-SUR-SEINE SAINT-OUEN CLICHY
75
LEVALLOIS-PERRET PARIS
11
0
0.5
1
2 km
11_ Document personnel, plan de situation de l’Île-Saint-Denis 12_ [Ci-contre] Photographie personnelle, vue depuis le pont d’Epinay vers le Sud de l’île
2. À l’échelle de la ville 2.1. Situation géographique et forme urbaine L’Île-Saint-Denis est la commune la plus à l’Ouest du département de la Seine-Saint-Denis (93) appartenant à la petite couronne de la région Île-de-France. De par sa taille et sa population, il s’agit d’une des plus petites communes du département. Contrairement aux communes limitrophes, elle se distingue par sa forme longue et étroite. En effet, celle-ci fait environ 7 kilomètres de long alors qu’elle ne fait que 150 mètres de large, en moyenne. En forme de grand croissant ouvert vers l’Ouest et qui joint les deux départements de SeineSaint-Denis et des Hauts-de-Seine (92), l’Île-Saint-Denis est une des rares communes de France métropolitaine exclusivement insulaire. Elle se trouve dans uns des nombreux méandres de la Seine. Sa forme atypique permet d’apercevoir les bâtis au Sud de l’Île lorsque l’on se trouve à l’extrémité Nord. Cette caractéristique originale est un point qui m’a touchée. Je me suis très rapidement posée certaines questions qui me sont apparues comme évidentes quand je me promenais pour la première fois sur l’île. Comment se déplace t-on sur un territoire linéaire ? Comment est-il rattaché au reste du territoire ? Quel est son rapport à l’eau, aux villes environnantes ?
13_ L’Île-Saint-Denis, jeune fille jouant dans une prairie ; au loin, les cheminées des usines de la banlieue parisienne, 1954, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis 26
2.2. Un passé industriel lourd, un avenir prometteur Au Xe siècle, l’Île était divisée en sept îlots et c’est Bouchard Le Barbu qui possédait l’île centrale appelée alors l’Île de Chatêlet, sur laquelle il construisit une forteresse. Durant les siècles qui ont suivis, de nombreux seigneurs se sont délégués les différents îlots. Au 14e, l’Île de Chatêlet était occupée par les moines et l’abbaye de Saint-Denis, qui donnera plus tard le nom de la commune actuelle.
Jusqu’à la fin du 18e, l’île était un territoire agricole mais pendant la Révolution, un port d’amarrage est construit pour permettre d’entreposer les marchandises voyageant sur le trajet fluvial Paris-Rouen-Le Havre. La commune a vu le jour à la fin du 19e siècle. Grâce à un remblayage, on assiste au regroupement des quatre îles de l’époque soit l’île Saint-Denis, l’île du Châtelier, l’île des Vannes et l’île du Javeau. À la même époque, on assiste à la construction d’une voie ferrée rattachant l’île directement à la capitale ; sa nature et son paysage attrayant de bord de Seine attirent les Parisiens qui viennent s’y reposer et prendre du bon temps mais aussi boire dans les nombreuses guinguettes. Parmi eux, des peintres Impressionnistes comme Alfred Sisley et Edouard Manet s’y rendent pour peindre, flâner. Leur venue donnera le nom à la balade coté Seine dans le Parc Départemental, «la promenade des Impressionistes». Par la suite, des ponts suspendus vont être construits : en 1848, un pont permet de joindre l’Île à Gennevilliers, tandis qu’en 1856, un second pont permet de relier l’Île à Saint-Ouen. Dès lors, la ville va connaître un developement fulgurant, notamment autour de ces ponts. Le plan d’Haussmann, empêchant la construction d’usines de grande envergure à l’intérieur de Paris, entraîne la construction de ces dernières sur des territoires à proximité. Le caractère fluvial de l’île et sa proximité avec la capitale en font alors un lieu parfait pour le commerce.
De nombreuses usines et entrepôts vont être ainsi construits, notamment ceux du Printemps et des Galeries de Lafayette. La fermeture de ces entrepôts en 1998 et 2007 vont
laisser en héritage une friche de plus de 13 hectares.
Au début du 20e siècle, tandis que la partie Nord de l’île est encore un paysage agricole, le sud laisse place à la construction de logements sociaux pour répondre au besoin croissant d’après guerre. À partir des années 1960 cependant, un processus de désindustrialisation rapide s’enclenche. Aujourd’hui, la communauté d’agglomération Plaine Commune et la ville de L’Ile-Saint-Denis tente de transformer ce paysage de friches en accueillant notamment l’Écoquartier fluvial dont les premiers logements sont sortis de terre en 2012.1 Le passé industriel lourd de l’île et sa volonté actuelle d’aller de l’avant m’a intrigué. Effectivement, la friche laissée par les entrepôts est un poids pour le territoire qui tente de se renouveler. L’objectif aujourd’hui semble d’utiliser cette opportunité pour créer un projet global et durable. 1 Levau-Fernandez Madeleine, L’Île-Saint-Denis, au fil de l’eau, Éditions Le temps des Cerises, 2013, p.15 à 75
15_ cadastre napoléonien, 1811, extrait de la page internet Seine Saint-Denis
17_ Rue Méchin, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis
RÉUNIFICATION DES ILES, CRÉATION DE LA COMMUNE
CONSTRUCTION D’UN PORT D’AMARRAGE
1848 28
PREMIER BOURG
1700
1900
1800 PREMIER PONT SUSPENDU
14_ 1787, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis 16_ L’Ile-Saint-Denis, Huile sur toile, Alfred Sisley, 1872, Collection The Metropolitan Museum of Art
18_ Saint-Ouen illustré. Plaisirs d’été. Une joyeuse partie de canotage autour de l’île, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis
20_ Entrepôt du Printemps, photographie extraite de la page internet PhilipponKalt Architectes
DÉVELLOPEMENT DES ENTREPÔTS
1910 CRUE CENTENNALE DE LA SEINE
19_ Ile Saint Denis -Quai du Moulin, photographie extraite de la page internet PhilipponKalt Architectes
CONSTRUCTION DU VIADUC DE L’A86
1950
1970
CONSTRUCTION DE LOGEMENTS SOCIAUX
21_ photographie de la cité Marcel Cachin, extraite de la page internet Center Blog
1991
FERMETURE DES ENTREPÔTS DU PRINTEMPS
2.3. Transports, urbanisme et occupation des sols
30
La pointe Nord de l’île accueille une petite zone non aménagée où la nature est débordante ; l’accès est fermé au public. On trouve ensuite notre site d’étude bordée par le RER C et le Pont d’Épinay où passent les bus 138, 238, et 261; s’ensuit le Parc Départemental qui se termine au niveau du collège Alfred Sisley. Tout ce territoire est classé en zone Natura 2000 depuis 2006. À la suite du collège, on trouve un club de tennis, un stade puis quelques friches. Sur la partie centrale de l’île, on retrouve la majeure partie des habitations avec notamment la cité HLM Maurice Thorez, l’école maternelle Paul Langevin et la Mairie. Quelques maisons individuelles suivent et marquent la présence du quartier ancien de la commune. La rue Méchin, qui se trouve au niveau du Pont de l’Ile Saint-Denis, est le centre de l’île; c’est aussi là que se concentrent les commerces et que se trouve l’unique station de tramway où passe le T1. Elle se trouve à environ 450 m à pied de la gare de Saint-Denis. D’ici, il est possible de se rendre dans les villes voisines ou au centre de Paris en empruntant le RER D, la ligne H ou les tramways T1 et T8. De l’autre côté de la rue Méchin, on trouve quelques habitations, les cités HLM d’Allende et du Bocage, l’école maternelle publique Samira Belil et l’église SaintPierre.
La partie au Sud de l’île, laisse place aux friches industrielles laissés par les anciens entrepôts. La partie au Sud de l’A 86 est en pleine transition. Elle accueillera une partie du Village Olympique, L’Écoquartier fluvial. Actuellement, près de 300 logements sont en cours de réalisation. Nous avons eu la chance de rencontrer Delphine Despres, directrice du développement social et de la citoyenneté à la Mairie de l’Ile Saint-Denis et Gwenaëlle Bordet, chef de projets et directrice de l’aménagement dans le secteur Ouest de la Plaine Commune, qui nous ont fait visiter L’Écoquartier. J’ai pu relever de nombreuses informations qui m’ont permise de prendre réellement conscience du développement de l’Île face aux enjeux actuels. Le parking à l’entrée du quartier est une manière de favoriser le déplacement à pied dans le reste du territoire ; donner une place majeure au piéton me semble essentiel dans mon projet. Aussi, la conception des logements avec des espaces communs au rez-de-chaussée destinés entièrement aux habitants dans le but de se réunir entre eux m’a interpelé. Enfin, j’ai été sensible à la pluralité des typologies et des fonctions (sociaux, participatifs…etc) des habitats au sein du même quartier. Il est pour moi très important d’introduire les notions de partage, de rencontre et de diversité dans la conception de mon projet urbain et architectural et cet Écoquartier illustre parfaitement ces notions. Une passerelle piétonne sera construite pour relier ce quartier à Saint-Denis et particulièrement
à la Cité du Cinéma, au Carrefour Pleyel ainsi qu’à sa station de métro. À la suite de ce quartier, se trouve le centre commercial Marques Avenue. La pointe Sud, qu’on appelle l’Iledes-Vannes, abrite un centre sportif appelé la Grande Nef en référence à son architecture. Les bus 137 et 166 passent par le Pont de SaintOuen. L’île est desservie aussi par le bus 237, qui réalise un trajet Nord-Sud par les quais en bord de Seine. En raison de sa forme longue et étroite et de son passé industriel notamment, l’île s’organise en strates de territoire plus ou mois dense. Des quartiers aux typologies de bâti très disparates s’enchainent et en font un territoire diversifié mais divisé. Aujourd’hui, il me semble essentiel de proposer un projet qui s’installe dans une certaine continuité, programmatique, urbaine, paysagère, afin d’intégrer le site à son milieu et favoriser cette volonté de créer un projet global unifiant davantage le territoire.
22_ [Ci-contre] Document personnel, carte des vides et des pleins du tissu urbain de l’Île-Saint-Denis
Espaces verts Végétation sauvage Équipements publics Habitat Commerces/Friches industrielles Territoire en reconversion, Habitat
32
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0
0.5
1
2 km
24
25 23_ Document personnel, plan de l’occupartion des sols sur l’Île Saint-Denis 24 et 25 _ Photographies de Soukni Myriam, retouches personnelles, l’Écoquartier fluvial et les friches industrielles
+ de 60 ans entre 30 et 59 ans
45%
entre 0 et 29 ans
entre 0 et 29 ans
34
26
actifs ayant un emplois
30%
de chômeurs et d’inactifs
27
étudiants et retraités chômeurs et inactifs
2.4. Une population diversifiée Selon l’Insee, en Seine-Saint-Denis, la population a augmenté de 16 % contre 10 % en France métropolitaine, entre 1999 et 2016. En 2015, avec 18 % de familles nombreuses, la Seine-Saint-Denis se classe au 1er rang au classement national alors qu’elle occupait le 58e rang en 1982. Le département est aussi au 1er rang du nombre d’immigrés avec une proportion de près de 30 %. L’essor des emplois figure parmi les plus élevés du pays avec une augmentation de 15 % entre 1999 et 2010 et de 8 % entre 2010 et 2015. En revanche, SeineSaint-Denis figure aussi parmi les dix départements dont le taux de chômage est le plus élevé. La proportion d’habitants dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté est deux fois supérieure à la moyenne nationale. Dans les villes voisines de l’Île-Saint-Denis, comme Épinay-sur-Seine ou Saint-Denis par exemple, le nombre d’habitants s’élève à 55 593 et 111 135, ce qui en fait des villes très peuplée. Sur l’Ile Saint-Denis, on compte 7 981 habitants en 2017. Ce nombre croit fortement depuis plusieurs années : en 10 ans, la ville a accueilli plus de 1 000 habitants supplémentaires. Au sein de cette population, on retrouve presque 50 % d’habitants qui ont entre 0 et 29 ans. Par rapport à la moyenne française qui est de 30 %, la ville est donc considérée comme jeune.
De plus, 65 % des familles ont des enfants par rapport à une moyenne nationale de 45 %. L’Ile accueille 16,6 % de chômeurs soit presque le double de la moyenne en France et 12,6 % d’inactifs hors étudiants et retraités, malgré un chiffre du nombre d’emplois croissant. Tout comme le reste du département, il s’agit d’un territoire où la pauvreté est très présente puisque cela touche 30 % de la population.1 D’après ces chiffres, on peut qualifier la population de l’île comme jeune et familiale. En revanche, malgré un nombre d’emplois croissant, le chômage et la pauvreté sont encore bien réels. Il est important de prendre en compte ces données afin d’établir un programme adapté au profil de la population et en cohérence avec ces besoins. Malgré son caractère de « petite ville », la commune est entourée de véritables centres urbains dans le département, notamment Épinay-sur-Seine et Saint-Denis. La proximité avec ces villes est une opportunité pour l’île de se dynamiser. 1 Insee, https://www.insee.fr/ 26_ Document personnel, population par grandes tranches d’âges 27_ Document personnel, population de 15 à 64 ans par type d’activité
3. À l’échelle du site 3.1. Une parcelle linéaire et enclavée
36
La parcelle a une surface totale de 3,6 hectares. Elle a une longueur de 338 m et une largeur qui varie entre 126 et 93 m. Le site est délimité par des barrières physiques. La Seine en est une. Elle borde le site de part et d’autre. Le bras gauche, au Sud, appelé « petit bras » sert de limite entre le département de la SeineSaint-Denis (93) à l’Est et le département des Hauts-de-Seine (92) à l’Ouest. Il est réservé à la circulation de bateaux ou péniches privés et d’éventuels activités nautiques tels que l’aviron. Le bras droit, au Nord, où circulent les transporteurs, est appelé « grand bras » ; le canal Saint-Denis y débouche. La seconde barrière est le chemin de fer, à l’Ouest. En plus d’être une limite physique, c’est aussi une barrière visuelle. En effet, le pont étant large de 10,7 m et surélevé d’environ 8 m, il ne permet pas de profiter d’une vue sur la nature de la pointe Nord depuis le site. En revanche, une ouverture de chaque côté du pont permet de le traverser et de se rendre notamment à la petite station d’épuration qui approvisionne l’eau de la Seine en oxygène.
La troisième barrière est la N 310, côté Est. Elle permet de rattacher l’île aux villes de Gennevilliers et Épinaysur-Seine, en revanche, elle marque une rupture brutale entre le site et le Parc. Effectivement, l’ensemble de la chaussée et les trottoirs ont une largeur totale de 27,5 m et souligne une frontière qui n’est pas négligeable. De plus, la butte de quelques mètres de haut à l’extrémité du Parc, le long de la route, accentue cette barrière. Quant à la nuisance sonore, elle est peu élevée coté RER C, en revanche, le Pont d’Épinay étant très fréquenté, le bruit est assez présent de ce côté de la parcelle marquant davantage la rupture entre le Parc et le site. La parcelle linéaire et enclavée est un site original. Ces barrières apparaissent comme des obstacles, mais peuvent aussi être traitées comme des atouts paysagers, des qualités urbaines. Très vite, je me suis alors posé certains questionnements : comment habiter la ligne ? Comment s’y déplacer ? Comment atténuer les barrières physiques ? Comment les aborder, les modeler afin de les requalifier ?
28,29,30,31 et 32_ [Ci-contre] Photographies personnelles et de Julia Olpinska 33_ [Ci-contre] Document personnel, plan du site et des barrières physiques qui l’encadrent
1
2
4
1
2
3
3
4
5
5
42
30
36
24 31
39 33
34
38 A
38 A’
30
34
0 10 20
75 m
34_ Document personnel, plan de la topographie du site et des environs selon le niveau NGF-IGN 69 35_ [Ci-contre] Document personnel, coupe AA’
3.2. La topographie : reliefs et nature Par rapport au niveau NGF - IGN69 soit le niveau déterminé par le marégraphe de Marseille ; la Seine se trouve à un niveau moyen de 24 m, la voie ferrée, à l’Ouest a 38 m et la N310, à l’Est, a 34 m. Le pont sur lequel passe le RER C est surélevé de 6 m de haut par rapport à la parcelle : une butte de terre où la nature est venue s’installer vient combler la différence d’altimétrie entre le terrain et le niveau des voies ferrées. Au niveau du Parc Départemental, une butte de 4 m de haut vient séparer la route à l’aire de jeux. Sur le reste de la parcelle, le dénivelé est assez faible, seul une différence de 1 m existe entre la nationale et le site. Les berges sont assez pentues : au niveau de la nationale, à l’Est, elles ont un dénivelé de 9 m sur à peine 10 m de large, tandis que côté Ouest, le dénivelé est de 7 m. Elles sont donc assez régulières sur l’ensemble de la parcelle et constituent la zone la plus dense en végétation sur le territoire étudié. Les arbres feuillus qu’accueillent les berges protègent du vent et de la chaleur en été, et laissent passer le soleil en hiver. Les reliefs et la nature sont deux des caractéristiques qui m’ont particulièrement touché et qui font de ce site un paysage atypique et attrayant. La topographie n’est pas négligeable et doit être prise en compte afin de proposer un projet respectueux de son environnement.
ENROBÉ
site d’étude
PENTES COUVERTES
N 310
parc départemental
40
0
5 10
50 m
36_ Document personnel, plan des types de sols présents sur la parcelle 37 et 38_ [Ci-contre] Photographies de Nicolas Berenbach, retouche personelles personelles, nature et gravats présents sur la parcelle
Zone recouverte d’enrobé ou de dalle béton
Zone fortement remanié, potentiellement le secteur le plus technique à végétaliser Remblais fortement compactés par la circulation, décompactions nécessaire pour accélérer l’installation des plantes
Terre végétale d’origine agricole pauvre en matière organique, non végétalisée, potentiel agronomique très bon Remblais en cours de végétalisation, enracinement superficiel, horizons parfois compacts Remblais végétalisés avec pénétration des racines sur plus de 50 cm de profondeur, mécanismes de pédogenèses en cours
3.3. Les types de sols : entre béton et terre végétale Durant plusieurs siècles, la parcelle a concentré les déchets des activités humaines aux alentours du site. Elle a d’abord était utilisé comme lieu de stockage de remblais (lors de la rénovation haussmannienne de Paris, du dragage de la Seine, ou plus récemment, de la construction du périphérique parisien), puis comme site industriel pour le stockage de matériaux, de véhicules et autres produits chimiques et polluants pour des entreprises de BTP tels que Colas et Joyau. Aujourd’hui, il reste beaucoup de traces de ces occupations. Les remblais sont une succession de couches plus ou moins dense et étendus de goudrons, de bitumes, de gravats, de sable calcaire, de graviers siliceux, de déchets plastiques et ferreux. On peut retrouver ces polluants jusqu’à 4 m sous terre. À l’Est, au niveau de l’entrée sur la parcelle, une zone est recouverte d’enrobé ou de dalle béton. De nombreux véhicules circulent dans cette zone et en font une zone très polluée ; se juxtapose ensuite des zones de remblais plus ou moins marqué par l’activité humaine, certaines sont en cours de végétalisation. Ce site est l’opportunité de ré-introduire la nature et l’agriculture en milieu urbain en expérimentant de nouvelles méthodes de régénération des sols et de production alternative.
42
39_ [Ci-dessus] Photographie de Nicolas Berenbach, retouche personelle, famille de Cormorans prĂŠsente sur le site 40_ [Ci-contre] Photographie personelle, vĂŠgĂŠtation sur les berges du site
Suite au constat de l’érosion de la biodiversité, officiellement reconnu en Juin 1992 à Rio de Janeiro lors de la conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement, l’Union Européenne a dévelopé sa propre politique de préservation de la biodiversité. Elle a mis en place un réseau d’espaces naturels ou semi-naturels appelés «Natura 2000», identifiés pour leurs richesses environnementales. Ce réseau désigne à la fois des zones spéciales de conservation annexée à une directive «Oiseaux» et des zones annexées à une directive «Habitats-Faune-Flore». Au 1er mars 2017, la France compte 1 766 sites, couvrant près de 13 % du territoire terrestre métropolitain et 11 % de la zone économique exclusive métropolitaine. Dans le département de Seine-Saint-Denis, on compte 15 sites inscrits dans le réseau Natura 2000. Depuis 2006, le Parc Départemental de l’Ile Saint-Denis, le site ainsi que la pointe Nord de l’Ile en fait partie ; il est annexé à la directive «Oiseaux».
Tout d’abord, il est intégré au sein d’une zone urbaine dense, ce qui nous invite à repenser la manière dont celui-ci doit être rattaché à son environnement. Ensuite, les berges du territoire présentent une grande richesse au niveau de la faune, et cela, malgré un passé industriel lourd. Enfin, annexée à la directive «Oiseaux», on retrouve sur le territoire une faune importante et notamment de nombreuses espèces aviaires : 12 espèces d’oiseaux sont protégées sur l’ensemble du site et la pointe Nord de l’île. On retrouve notamment le Martin-Pêcheur, le Grand Cormoran mais aussi la Mésange Charbonnière et le Verdier d’Europe. On trouve aussi une espèce de chauve-souris, la Pipistrelle. Dans la Seine, au niveau de l’agglomération parisienne et notamment du site, un total de 32 espèces de poissons est recensé. On retrouve notamment le Poisson-Chat, l’Anguille, la Truite ou encore l’Ablette.
Grâce à notre entretien en Octobre 2019, avec Guillaume Gaudry, chef de service adjoint dans le service des parcs urbains de l’Ile Saint-Denis, j’ai pu prendre conscience de plusieurs caractéristiques qui font de ce site un territoire original et d’une grande richesse, que je me dois de préserver et de mettre en avant.
Je retiens là qu’il est important d’avoir une approche spécifique, novatrice et presque expérimentale vis-à-vis de ce site ; les activités humaines ou infrastructures y sont tout à fait possibles, en revanche, il faut privilégier une gestion cohérente et durable de cet espace.
3.4. Un paysage riche, des espèces protégées
GARE RER C
STUDIO D’EPINAY
ÉCOLE DE NAVIGATION
1
POINTE NORD
44
PARC DÉPARTEMENTAL
PORT DE GENNEVILLIERS
2 COLAS PORT VEDIA
CAMPUS ENEDIS GRDF
ZONE INDUSTRIELLE DU VAL-DE-SEINE 41_ [Ci-dessus] Document personnel, plan de l’occupation des sols à proximité du site 42_ [Ci-contre] Photographies personelles, vue depuis le Pont d’Épinay
Tertiaire & logistique Logement
Équipement culturel
0 10 20
75 m
3.5. Un tissu urbain morcelé Au Nord de la parcelle, du côte d’Épinay-sur-Seine, on retrouve un quartier pavillonnaire avec des logements individuels en R+1 et R+2 et quelques logements collectifs notamment la tour Obélisque, de 32 étages, qui vient ponctuer le paysage verticalement. Cette zone pavillonnaire est fortement pentue. Au niveau de la station de RER de la Gare d’Épinay, par exemple, on se trouve 10 m au-dessus du niveau du site. Les habitations ont donc une vue plongeante sur l’île et la parcelle. De ce côté-ci de la Seine, à proximité du site, on retrouve aussi le Studio de cinéma d’Épinay et une École de navigation. Plus loin, on retrouvera une école primaire et un collège, un centre sportif et la Mairie d’Épinay, entre autres. Au Sud de l’île, le paysage est très différent. Le quartier est une vaste zone industrielle, portuaire et logistique appartenant à la ville de Gennevilliers ; on retrouve le port commercial de la ville et de nombreux entrepôts, notamment le site de Veolia Recyclage et le Campus Enedis GrDF. Le site, lui, est encadré par le Parc Départemental, à l’Est, et une zone sauvage à l’Ouest. Cette continuité verte est donc un tissu encore très différent de ceux qui se trouvent sur les deux rives bordant l’île. Effectivement, elle apparaît comme une pause dans le paysage urbain environnant très touché par l’activité humaine. Aux alentours du site coexiste des tissus urbains très
différents : il est très dense au niveau de la zone pavillonnaire d’Épinay-sur-Seine avec des typologies de bâti relativement petites tandis que l’on assiste au contraire au niveau de Gennevilliers ; des bâtiments à vocation industrielle, imposant dans le paysage mais peu nombreux et dispersés. La continuité verte dans laquelle se situe notre site d’étude nous invite à repenser la manière dont il communique avec les tissus urbains disparates des deux rives auxquelles il fait face.
1
2
1
TOUR OBÉLISQUE
2
46
VÉOLIA RECYCLAGE
3 STUDIO D’ÉPINAY
4
ZONE PAVILLONAIRE
1
4 3
2
43_ [Ci-dessus] Document personnel, image extraite du site Google Maps 44,45,46 et 47_ [Ci-contre] Documents personnels, dessin de gabarits existants Ă proximitĂŠ du site
ESPACE ÉDUCATIF_ 250 m2 ATELIERS DE DÉCOUVERTES, SALLES DE PROJECTIONS PARCELLES D’EXPÉRIMENTATIONS
SALLES D’EXPOSITIONS_435 m2 TEMPORAIRES ET PERMANENTES AUTOUR DES PROBLÉMATIQUES AGRICOLES, ÉCOLOGIQUES ET DURABLES
SENSIBILISER/ FORMER
ESPACE DE FORMATION_390 m2 AUX PRATIQUES AGRICOLES ET PAYSAGÈRES
ESPACE DE COWORKING _450 m2 FOYER POUR LES ASSOCIATIONS ET ATELIERS DE TRAVAIL
LABORATOIRE SCIENTIFIQUE DE RÉGÉNÉRATION DES SOLS_160 m2
TRAVAILLER RESSOURCERIE ET ESPACE DE VENTE _ 180 m2
BASSINS DE PHYTOÉPURATION
IRRIGATIONS DES SERRES
FAB-LAB ÉCO-RESPONSABLE _130 m2
FLORICULTURE_8 400 m2 CULTURE DE FLEURS, DE PLANTES, D’ABRES ET D’ARBUSTES
HYDROPONIE CULTURE HORS SOL DANS L’EAU SOUS SERRE
CULTIVER 48
PERMACULTURE CULTURE HORS SOL EN BACS OU EN BUTTES
LE PROGRAMME LOGEMENTS_720 m2 8 T1 DE 33 m2 ET 8 T2 DE 39 m2 POUR LES ÉTUDIANTS ET FERMIERS EN FORMATION
HORTICULTURE MARAICHÈRE_4 600 m2 CULTURE DE FRUITS ET LÉGUMES HORS SOL
PRODUCTION ET VENTE DE FLEURS, DE PLANTES, DE FRUITS ET DE LÉGUMES EN CIRCUIT-COURT
HABITER
PRODUCTION DE COMPOST QUI FERTILISE LES SOLS
PRODUIRE DU SOL PLATEFORME DE COMPOSTAGE_150 m2 ET LOCAL DE STOCKAGE
JARDINS ET TOITURES VÉGÉTALISÉES PROMENADES, ESPACES DE PIC-NIC, PARCELLES INDIVIDUELLES, ESPACES D’EXPÉRIMENTATIONS
SE RÉUNIR AIRES DE JEUX/ TERRAIN DE SPORT _820 m2
ESPACE DE RESTAURATION_163 m2 SERVICE DE REPAS QUOTIDIENS ET DÉGUSTATIONS
PRODUCTION DE DÉCHETS ORGANIQUES
48_ Document personnel, le programme
RÉCUPÉRATEUR D’EAUX PLUVIALE ET DE VOIRIES
II. LA PROPOSITION URBAINE, QUELLE AVENIR POUR CETTE PARCELLE ? L’analyse approfondie du territoire et du site d’étude m’a permis de davantage comprendre les enjeux dans lesquels s’inscrit mon projet de fin d’étude. Assimiler les atouts et les richesses du site mais aussi les contraintes qu’il pose m’a finalement permis de mener à bien la suite de ma réflexion. D’abord, j’ai cherché à élaborer un programme harmonieux et légitime aussi bien envers le site qu’envers le public pour lequel le projet est destiné soit les habitants de l’île notamment, c’est à dire une population jeune, familiale et en recherche d’emplois. Il s’agit de concevoir un programme presque expérimental où les fonctions, les usages vont s’entrelacer, se croiser afin de mettre en place un lieu d’échange, de partage, d’expérimentation et de sensibilisation autour des pratiques agricoles et écologiques. Autrement dit, chacunes des activités doit être un support pour l’insertion sociale et professionnelle, l’éducation populaire et la recherche scientifique en lien avec l’écologie. À travers mon programme, je cherche à tisser de nouveaux liens entres les usagers eux-mêmes, mais aussi entre les usagers et l’espace environnant. Ce nouvel équilibre que le programme propose est finalement une première réponse à ce que pourrait être la ville de demain.
Ensuite, et grâce à l’analyse faite au préalable, il a été question de mettre en avant des notions qui m’ont semblé essentielles à reconsidérer afin de donner lieu à une proposition urbaine cohérente, adaptée à la population et au territoire. En premier lieu, c’est l’originalité du site qui m’a interpellée. En effet, sa nature, son relief et son caractère fluvial sont des qualités paysagères attrayantes et atypiques qui m’ont touchées et qui me sont tout de suite apparues comme des caractéristiques évidentes à mettre en avant. De plus, il me semble primordial aujourd’hui de mettre le contexte urbain et paysager en première position de sa recherche conceptuelle afin de créer un projet respectueux de son environnement. Ensuite, la linéarité de la parcelle m’a semblé être un point important à ne pas négliger. Prendre en compte cette caractéristique, c’est finalement considérer le site dans sa globalité et non pas traiter une seule portion de la parcelle. Enfin, il m’a semblé évident de prendre en compte le tissu urbain existant afin de proposer un projet totalement intégré à son milieu et qui s’installe dans une certaine continuité programmatique, urbaine et paysagère.
1. Un programme adapté et diversifié 1.1. Cultiver, valoriser les déchets et produire du sol : Halage et Les Alchimistes
50
49 et 50_ [Ci-dessus] Photographies d’oeillets et de tubéreuses cultivées par l’association issues de la page internet Halage 51_ [Ci-contre] Photographie personnelle des cultures de fleurs présentes sur le site
Halage est une association qui a été créée en 1994. Elle est engagée dans l’environnement et développe des projets répondant aux enjeux écologiques de son temps. Sur le site, elle mène un chantier d’insertion autour de la production de fleurs constituant ainsi une solution permettant d’allier dépollution des sols et création d’activités sur des zones délaissées. Notre objectif majeur a donc été de mettre au premier plan la proposition d’Halage qui souhaite finalement utiliser l’agriculture urbaine et en particulier la floriculture, comme moyen de réinventer la ville. Sur le site, la floriculture se manifestera par la production de fleurs, de plantes ornementales et de plantes comestibles, mais aussi de pépinières pour la production d’espèces ligneuses et vivaces et des bosquets d’arbres. Ces espèces s’enracinent en profondeur, ce qui est très bon pour la santé du sol et sa dépollution. De plus, les arbres et arbustes stockent du CO2 et fournissent en partie l’air que nous respirons. Les espèces plantées sont des essences locales adaptées à la région et sont des foyers pour les espèces d’oiseaux vivants dans les environs. Enfin, des pépinières aquatiques sont intégrées au site.
Dans ces bassins, on cultive des plantes aquatiques et semi-aquatiques comme les roseaux. L’ensemble des plantes sont coupées pour être ensuite vendues sur le site ou auprès de fleuristes ou de particuliers à proximité. En plus de la floriculture, j’ai choisi d’intégrer au site d’autres secteurs de la culture horticole afin d’élargir encore les possibilités liées à l’agriculture en ville. Ainsi, on retrouvera aussi de l’horticulture maraîchère pour la culture de fruits et légumes. Afin de produire des aliments comestibles sur ce site pollué, des méthodes de cultures hors-sol et régénératives seront mises en place pour la culture maraîchère et les plantes comestibles : le site constitue finalement un moyen de créer des écosystèmes. Tout comme les fleurs et les plantes, les fruits et légumes sont récoltés, puis directement vendus sur place. Ils sont consommés dans l’espace de restauration où un service de repas quotidiens est mis en place ainsi que des menus dégustations. Aussi, les fruits et légumes en surplus peuvent être livrés à des commerçants ou particuliers à proximité. Ici, l’agriculture urbaine représente un vecteur d’ouverture des métiers liés au végétal, secteurs d’activités formateurs et valorisants qui manquent de main d’œuvres en Île-de-France. De plus, l’horticulture apparaît comme un moyen de valoriser et d’approfondir les connaissances agricoles de chacun et donc de démocratiser ces pratiques en milieu urbain.
52
Les Alchimistes sont les seconds acteurs du site ; l’association est née en 2016. Ils cherchent à créer des «boucles de valorisation locale»1 en recyclant nos déchets en ville et en créant du compost. Les déchets alimentaires sont collectés sur le site et dans des poubelles prévues à cet effet, dans un rayon de 15 km. Ensuite, est entamée la phase de pré-traitement. On pèse les bacs de déchets et on les trie à la main. Les déchets passent ensuite 10 jours dans un composteur électromécanique pour être broyés : la matière sèche telle que les cagettes et les copeaux de bois et les déchets alimentaires sont ici mélangés afin d’obtenir le compost. La dernière étape est celle de la maturation du compost qui dure entre 4 et 6 semaines. Ici, il sera utilisé à même le site ou bien vendu en circuit court à des particuliers. Le compost permet de fournir la matière organique nécessaire pour restaurer les sols du site. De plus, il permet d’agir comme engrais naturels en fournissant aux plantes les nutriments dont elles ont besoin et ainsi de remplacer l’engrais chimique. Recréer du sol c’est finalement recréer de la biodiversité puisque cela va permettre de faire revenir des animaux et des végétaux. L’agriculture et le compostage en milieu urbain permettent de créer de nombreux emplois, mais aussi de nouveaux métiers tels que collecteur-composteur. 1 Les Alchimistes, https://alchimistes.co/
52, 53,54_ Photograpghies illustrant les trois ĂŠtapes du compostages extraites de la page internet Les Alchimistes
54
1.2. La Ressourcerie et le Fab-Lab, entre réemploi et fabrication éco-responsable Dans mon programme, j’ai choisi de mettre en place une Ressourcerie, soit un atelier collectant les encombrants, objets, équipements et textiles réutilisables pour les revaloriser afin de les revendre à prix solidaires. Les objets sont collectés à domicile dans un rayon de 15 km, à la déchetterie Véolia ou bien directement sur le site au niveau d’un point collecte où chacun est libre de déposer ce qu’il y souhaite. Ensuite, ces objets sont amenés dans l’atelier pour être triés, nettoyés, testés, démantelés afin d’être réparés ou recyclés. Enfin, les objets sont vendus pour la plupart dans la boutique solidaire. Des ateliers de découverte et d’initiation au recyclage et à la réparation sont organisés au sein même des ateliers de la Ressourcerie, permettant ainsi de créer une économie circulaire accessible au public. C’est finalement un espace de fabrication, d’échanges et de production de savoirs ouverts à tous. En plus de la Ressourcerie, un Fab-Lab écoresponsable est mis place afin d’innover tout en réduisant nos déchets. Ici, on réutilise le bois ou les métaux reliquats de la production industrielle environnante pour créer des prototypes qui viendront meubler le site comme des jardinières, des assises et des hôtels à insectes ou des outils qui seront ensuite utilisés par les agriculteurs du site.
Ces objets pourront aussi être distribués à d’autres sites ou parcs des alentours pour sensibiliser un public plus large aux pratiques écologiques et durables, du recyclage et du réemploi. La Ressourcerie et le Fab-Lab permettent finalement de créer différents types d’emploi (collecte, réparation, recherche, fabrication, vente), sensibiliser le public à la réduction de déchets, encourager et former les consommateurs aux pratiques du réemploi et enfin, développer des prototypes permettant d’accueillir la biodiversité.
55 et 56_ [Ci-contre] Photographies illustrant une jardinière et un hôtel à insectes réalisés durant un chantier solidaire aux Grands Voisins en 2017, extraites de la page internet Zone-Ah. Exemples de réalisations faites en matériaux de réemploi.
56
1.3. Les laboratoires, recherche scientifique et régénération des sols En plus de la plateforme de compostage et des cultures horticoles, une bande de « technosols » a été mise en place par Halage dans le but de « comprendre comment dépolluer des sols par des moyens naturels, sans déplacements de ces sols vers d’autres sites »1, indique Belaïde Bedreddine, vice-présidente du conseil départemental chargé de l’écologie urbaine. Ainsi, pour aller dans la même direction que l’association, j’ai intégré à mon programme un laboratoire scientifique permettant de tester et d’analyser les polluants présents sur le site afin de trouver des solutions pour régénérer la parcelle. L’objectif est d’utiliser le remblai des nombreux travaux en cours dans le département, en raison des Jeux Olympiques et du projet du Grand Paris, et de le fertiliser à base du compost crée sur le site. Les laboratoires mis à dispositions permettront ainsi de pouvoir réaliser diverses expériences afin de régénérer même les sols les plus pollués du site et d’avoir d’ici quelques années un sol entièrement nouveau et fertile sur lequel il sera possible de cultiver ce que l’on souhaite mais surtout, ce dont la population aux alentours a besoin. Les expériences et études réalisées sur le site pourront être utilisées de nouveau sur d’autres chantiers en France. 1 Notre Île 193- été 2019, journal d’information locale,p.12
1.4 Sensibiliser et former aux pratiques agricoles, écologiques et durables
58
Afin de sensibiliser et former aux nombreuses pratiques présentes sur le site, j’ai mis en place différentes activités et de multiples situations possibles offrant une grande liberté aux usagers, petits et grands et donc la possibilité de prendre totalement possession du site et des pratiques qui y sont exercés. L’île étant composé d’une population jeune et familial, j’ai choisi d’intégrer à mon programme un espace éducatif, entièrement destiné aux enfants afin de sensibiliser les plus jeunes à ces pratiques qui sont inconnus en milieu urbain. Ainsi, dans l’espace éducatif on retrouve une zone de lecture, un espace de projection et des espaces de travail dans le but d’organiser des ateliers et des stages de création, d’initiation et de découvertes autour des pratiques agricoles, écologiques et durables. Des terres expérimentales en extérieur sont destinés à ces ateliers de découvertes afin de permettre aux plus jeunes de s’approprier une portion du territoire, de faire, d’observer et de prendre plaisir à expérimenter avec la matière qui nous est offerte. Ensuite, afin de former le public, j’ai choisi d’intégrer un espace de formation constitué de salles de classes, d’ateliers de travail et d’un espace détente. La formation est destiné aussi bien à des étudiants ou à des non
salariés qu’a des agriculteurs en activités et demandeurs d’emplois en reconversion. Ici, on enseigne l’agroécologie et l’agriculture biologique afin de former des maraichers et des chercheurs qui seront capables de s’adapter et d’aborder des pratiques spécifiques actuelles telle que la permaculture, l’hydroponie par exemple. Plusieurs types de formations sont proposés, des formations courtes, de découvertes ou de perfectionnement et des formations plus longues pour permettre de transmettre l’ensembles des compétences requises. Deux cursus sont possibles, celui de Jardinier-Paysagiste ou celui d’Ouvrier du Paysage. Seize logements temporaires, huit T1 et huit T2, sont intégrés au programme et directement reliés à l’espace de formation afin d’accueillir et de loger un certain nombre de personnes venant en formation sur le site pour des durées plus ou moins longues mais n’ayant pas la possibilité d’être logés à proximité. Enfin, j’ai choisi d’intégrer des salles d’expositions à mon programme; une salle d’exposition permanente à caractère pédagogique dédié aux pratiques actuelles, écologique et durables dans le but de sensibiliser le public et de l’inviter à se questionner sur la ville de demain. Une seconde salle, d’exposition temporaire, permettra d’exposer les prototypes réalisés au Fab-lab et les objets recyclés de la Ressourcerie en attente d’être vendus, installés ou distribués ou
encore les expérimentations créatives des enfants. Cet espace pourra aussi accueillir des artistes d’art urbain utilisant la nature comme support afin de sensibiliser le public sous une forme plus abstraite, plus ouverte. Cette salle d’exposition polyvalente permettra aussi d’organiser des conférences, des évènements ou encore des projections autour de ces pratiques afin de réunir ponctuellement l’ensemble des acteurs du site et la population de la ville et des alentours pour réfléchir, ensemble, aux problématiques agricoles, écologiques et durables. À ces salles d’expositions s’ajoutent un espace de lecture, de vente et d’emprunts de périodiques autour de ces mêmes pratiques.
SOCIAL
ÉCONOMIQUE
PRODUCTION LOCALE, VENTE DE PRODUITS
PÉDAGOGIQUE 60
CRÉATION D’EMPLOIS, FOYER POUR LES ASSOCIATIONS, VIE EN COMMUNAUTÉ
LE PROJET
LIEU DE FORMATIONS ET DE SENSIBILISATION POUR LES ENFANTS, LES ÉTUDIANTS ET LES ADULTES
DYNAMIQUE
ÉVENEMENTS, PROJECTIONS, TERRAIN DE SPORT, EXPOSITIONS, AIRE DE JEUX
ÉCOLOGIQUE
PRODUCTION ET VENTES DE PRODUITS FRAIS EN CIRCUIT-COURT, PRODUCTION DE COMPOST, RÉCUPÉRATION DES EAUX PLUVIALES ET DE VOIRIES, RÉGÉNÉRATIONS DES SOLS POLLUÉS
1.5 Vers un projet d’insertion sociale et d’implication citoyenne Les activités du programme cherchent finalement à intégrer totalement le public en le plaçant au premier rang de ces préocupations : la population devient acteur du projet à travers les activités proposées, du loisirs aux activités professionnelles. Les familles et la jeunesse de l’île et des environs peuvent venir se réunir, se détendre ou encore se cultiver dans les salles d’expositions, l’espace éducatif et les ateliers de découvertes, l’espace de restauration ou tout simplement les espaces nombreux espaces exterieurs et les promenades le long des berges. Les étudiants, salariés et personnes en réinsertion professionnelle, sont tout aussi concernées par le programme et notamment les salles d’expositions, l’espace de formation et les logements qui leur sont destinés. Enfin, les chargés d’associations, les scientifiques, les agriculteurs, les opérateurs de tri et de recyclage, les collecteurs-composteurs, tout ces acteurs qui permettent finalement le bon fonctionnement des activités sur le site, se voit devenir polyvalents car leur filiale est, d’une certaine manière, relié à toute les autres, permettant ainsi de constituer des lieux ouverts et des intéractions toujours plus complexes et variées. Finalement, des personnes de différents milieux cohabitent sur le même site afin de partager et d’échanger autour de pratiques qui nous concernent tous.
En plus de sensibiliser et former la population, ce programme permet d’offrir des emplois, de développer un lien social et l’implication citoyenne mais aussi d’améliorer le bien être et l’alimentation des habitants. Mon objectif est de créer un projet dynamique, économique, pédagogique et social intégré à son territoire mais aussi de donner les moyens d’une ambition écologique et de favoriser la biodiversité et le circuit-court en ville. Cette programmation innovante, ouverte à la fois sur l’art, l’agriculture, le recyclage et la science, est pour moi la solution la plus pertinente, permettant à la ville de se réapproprier ce territoire anciennement délaissé. En effet, cette pluralité d’activité et de situations possibles permet à chacun d’investir le territoire de la manière qu’il souhaite et ainsi de créer un lieu vivant et autonome, qui tend à créer de nouveaux liens ainsi qu’une nouvelle manière de vivre ensemble.
57_ [Ci-contre] Document personnel
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58_ Photographie illustrant la Ferme du Rail dans le 19 ème à Paris, extraite de la page internet La Ferme du Rail. Exemple d’espace agri-urbain
2. Cultures et matérialité des sols 2.1. L’agriculture urbaine comme moyen de réconcilier homme et nature Dans l’ouvrage, Accueillir le vivant : l’architecture comme écosystème, l’auteur, Frédéric Chartier, nous raconte que la nature est trop souvent isolée : «Si les espaces végétalisés, sont pensés, dans les pays occidentaux, comme des éléments incontournables de l’aménagement urbain, ils sont toujours envisagés en contraste avec le bâti, et le plus souvent conçus séparement de ce dernier.»1. Effectivement, la nature en ville se manifeste le plus souvent par des parcs ou jardins soit des espaces verts comme des pauses dans le paysage urbain : la nature se trouve finalement là où le bâti n’est pas. Dans les espaces urbains très denses, le végétal est même immobilisé dans d’étroites jardinières, des espaces clôturés, mis à l’écart. Cette réflexion m’a permis de repenser la manière dont on traite la nature en ville. Ici, l’enjeu est finalement de penser architecture et biodiversité comme un tout et non comme deux entités distinctes par le biais notamment de toitures végétalisées et d’éco-activités relatives à l’agriculture urbaine. Rapprocher ces deux notions, architecture et biodiversité, à travers l’agriculture, permettrait finalement
d’intégrer totalement notre site de projet à son territoire et d’inscrire la ville dans un fonctionnement écologique et durable. Aussi, sensibiliser et former aux pratiques agricoles permettrait de développer des liens sociaux et l’implication citoyenne mais aussi de réconcilier homme et nature afin de restituer des liens qui s’étaient noyés dans le chaos urbain. Le projet de la Ferme du Rail dans le 19 ème arrondissement de Paris, en photographie cicontre, est un bon exemple d’espace agri-urbain associant architecture et biodiversité. C’est un lieu ouvert à tous qui acceuille, forme et insére durablement les personnes les plus fragiles. Ce lieu permet finalement d’allier agriculture et solidarité à travers un programme comprenant un centre d’hébergement, une exploitation agricole et un restaurant.
1
1 Chartier Frédéric, Dalix Pascale, Accueillir le vivant : l’architecture comme écosystème, Éditions Park Books, Paris, 2008, p.387
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2.2. Produire et consommer local en milieu urbain Introduire l’agriculture en ville permet aussi de favoriser les circuits-courts et donc, d’une certaine manière, d’améliorer l’alimentation et le bien-être de la population. De plus, consommer local c’est aussi favoriser l’économie locale : en effet, les produits issus de la production du site sont directement consommés et vendus sur place ou alors destinés à la vente indirecte, à condition qu’il n’y ait pas plus d’un intermédiaire. Consommer local c’est aussi réduire nos déchets, puisque les déchets, consommés sur place ou collectés dans les environs, sont directement soumis à la plateforme de compostage présente sur le site, et utilisés ensuite comme engrais naturel afin de recréer de la terre et restaurer les sols pollués au sein de la parcelle. Privilégier le circuit-court et produire localement c’est aussi réduire les gazs à effet de serres qui sont produits lorsqu’on importe nos aliments. Enfin, produire localement c’est aussi respecter l’ordre des saisons et donc réduire l’utilisation d’engrais. Une épicerie solidaire, Solibio, qui existe en centre-ville depuis quelques années, et un nouveau collectif, Comme Trois Pommes qui a vu le jour dans l’Écoquartier il y a quelques mois, démontrent bien la volonté des Îlodionysiens à consommer des produits locaux issues de circuits-courts. L’objectif du projet est donc de s’inscrire dans la continuité de ces projets et initiatives citoyennes existantes.
paillage_ mixe de matières vertes et carbonnées (paille, foin, feuilles décomposées) feuilles vertes fumier décomposé branches compost frais feuilles vertes copeaux de bois couche de carton
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matière brune carbonée matière verte azotée matière brune carbonée matière verte azotée matière brune carbonée matière verte azotée sol
59_Documents personnels illustrant le fonctionnement d’une cutlure en butte 60_ [Ci-contre] Document personnel illustrant le fonctionnement d’un système hydroponique
2.3. Les types de culture hors-sols : permaculture et hydroponie Afin de produire des aliments comestibles sur ce site pollué, des méthodes de cultures hors-sol et régénératives seront mises en place pour la culture maraîchère et les plantes comestibles. Ainsi, on utilisera la permaculture et des systèmes telle que la culture en butte ou en sacs pour régénérer les sols. Des serres seront aussi installées pour la culture hydroponique c’est-à-dire une technique de production horssol, où les racines des plantes cultivées ne plongent pas dans leur environnement naturel mais dans de l’eau dans lequel on a ajouté des nutriments.
grains d’argile
plateau de cultures (tube)
réservoir pompe à nutriments
distribution de la solution nutritive au goutte à goutte
évacuation des nutriments pompe à air regard de vidange cheminée de surverse
Seine
pluie
pompage
regard de récupération des eaux de voiries et pluviales
regard d’entretien_stockage et distribution
bassin 1_ graviers, pouzzolane et plantes = élimine les grosse particules 68
filtre organique bassin 2_ pouzzolane et plantes filtrantes (nénuphars, laîches ..) = absorbe les nitrates et les phosphates
noue de stockage et d’infiltration
bassin 3_ eaux claires
irrigation des espaces de culture extérieure
infiltration de l’eau dans le sol
irrigation des serres de culture hydroponique
regard de vidange_ évacuation des eaux usées
2.4. L’eau comme élément générateur du projet Comme nous avons pu l’étudier dans l’analyse, l’île Saint-Denis est bordée des deux côtés par la Seine; pourtant, l’eau, n’est présente nulle part au sein de la commune, ni même dans le Parc Départemental. Il m’est donc apparu évident de mettre en avant et de reconsidérer cet élément attrayant du paysage en l’introduisant sur la parcelle. En plus de dynamiser le paysage végétal du site, les bassins, accueillants des plantes aquatiques ou semi-aquatiques, jouent le rôle de phyto-épurateurs. Autrement dit, ils permettent d’épurer l’eau. Ils sont alimentés par l’eau de la Seine, l’eau pluviale et des voiries et les bactéries naturellement présentes dans le système racinaire des plantes vont se nourrir des matières organiques et les transformer en matière minérale assimilable par les plantes. Ce système permet ainsi d’absorber les polluants tels que les nitrates ou les phosphates contenus dans les eaux polluées. L’eau propre permettra d’irriguer les serres hydroponiques et les espaces de cultures extérieurs.
61_ [Ci-contre] Document personnel, schéma illustrant le cycle de l’eau au sein du projet 62_ [Ci-dessous] Document personnel, coupe illustrant le fonctionnement de la récupération des eaux pluviales et de voiries ainsi que du premier filtre organique
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évaporation de l’eau
noue de stockage et d’infiltration_ bassin 3
infiltration de l’eau dans le sol
filtre organique_ bassin 2
63_Document personnel, coupe longitudinale et cycle de l’eau au sein du projet
évaporation de l’eau
irrigation des espaces de culture extérieur
irrigation des serres de culture hydroponique
filtre organique_ bassin 1
2.5. Organisation de la parcelle et traitement des sols
SENSIBILISER/FORMER _ espace de formation _ salle d’expo CULTIVER _ floriculture _ culture maraîchère hors sol
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HABITER _ logements
64_Document personnel, plan masse
TRAVAILLER _ fab-lab éco-responsable _ ressourcerie _ espace de coworking _ laboratoire scientifique
SENSIBILISER/FORMER _ espace éducatif
SE RÉUNIR _ espace de restauration PRODUIRE DU SOL _ plateforme de compostage
Plan d’ensemble _ créer une continuité : prolonger le parc et le parcours urbain
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Flux et parcours urbain Espaces publics aménagés Bâtis Espaces verts / cultivés
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0 45 90
300 m
3. Accéssibilité et flux 3.1. Intégrer le site à son territoire et prolonger le Parc Départemental Nous avons vu dans l’analyse faite précédemment que le site se trouve entre le Parc Départemental et une zone naturelle fermée au public. Pour intégrer totalement le site à l’espace environnant, il m’est donc apparu comme évident de rattacher les deux espaces verts existants à travers la parcelle, en y prolongeant le parc. Ce prolongement permet d’instaurer une continuité verte et d’unifier cette portion de territoire. Cet espace vert sur la parcelle se traduit par des espaces cultivés ainsi que deux espaces publics longeant les berges Nord et Sud sur toute la longueur du site. Ces promenades publiques permettent d’habiter les berges pour profiter pleinement de la nature débordante qui s’y trouve mais aussi de profiter du caractère fluvial de l’île tout cela en rattachant physiquement les deux portions de territoire entourant le site.
Cultures et espaces publics
65_ Document personnel, plan d’ensemble- créer une continuité : prolonger le parc et le parcours urbain 66_ [Ci-contre et page suivante] Documents personnels, schémas conceptuels
Porosité
Flux et accès piétons Passerelle piétonne Flux et accès voiture
Accès et flux 76
Serres hydroponiques Horticulture maraîchère Floriculture
Types de cultures
3.2. Les flux au sein de la parcelle, entre culture et espaces publics Comme étudié précédemment, des barrières physiques existent entre le Parc, le site et la pointe Nord de l’île. Pour réellement avoir cette idée de continuité, il ne suffit pas de prolonger le Parc sur la parcelle en introduisant un espace vert, il s’agit aussi de créer une continuité spatiale, physique afin que le déplacement se fasse de manière totalement fluide et continue et cela, dès notre déambulation dans le parc. Comme le montre le plan d’ensemble vu précèdemment, il s’agit finalement de prolonger le parc mais aussi le parcours urbain. L’entrée sur la parcelle se fait donc au niveau de deux points de rencontres qui s’inscrivent dans la continuité du parcours existant. La première entrée se trouve au niveau de l’aire de jeux du parc départemental; elle s’inscrit dans la continuité du parcours dessiné dans le parc, parcours ponctué notamment de buvettes , d’aire de jeux ou des kiosques. La seconde entrée se fait au carrefour des cheminements piétons arrivant aussi bien du Sud de l’île que de la route Nord-Sud enjambant l’île. Cela aboutit à un accès haut sur une passerelle côté sud et une promenade basse coté Nord.
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67_ Document personnel, perspective- promenade vers le belvédère Nord à travers les espaces plantés
4. Aménagements urbains et espaces publics 4.1. Reconnecter les deux rives Comme nous l’avons vu précédemment, le site est bordé par des tissus urbains très disparates. J’ai trouvé alors pertinent d’utiliser le projet comme un moyen de reconnecter les deux rives : deux pontons coupent transversalement la parcelle afin de rattacher physiquement et visuellement les deux portions de territoire qui bordent l’île et de favoriser l’interaction entre elles. Ces pontons permettent aussi de passer de la promenade côté Nord au jardin sauvage côté Sud sans pour autant impacter les espaces de cultures et déranger les usagers qui y travaillent. Aussi, ces pontons permettent de voir presque simultanément les deux bras de la Seine, ce qui permet de reconsidérer cet atout paysager en le plaçant une nouvelle fois au coeur du projet. Au Nord, le ponton aboutit à un belvédère : ici, on profite d’une vue en hauteur sur le «grand bras» de la Seine, la zone pavillonnaire et les ponts qui rejoignent l’île. Au Sud, le ponton aboutit aussi à un belvédère mais celui-ci vient habiter la pente, pour offrir un point de vue plus proche de l’eau et des éventuelles activités de loisirs qui sont exercées ici, sur le «petit bras». Des surfaces horizontales en bois sont incrustés aux escaliers et permettent de jouer le rôle de table, par exemple : les escaliers deviennent alors un espace invitant à se réunir et non plus seulement un simple accès.
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Bélvédère Nord
Bélvédère Sud
68_ [Ci-contre] Document personnel, coupe transversale côté Nord, vue sur une serre hydroponique et le belvédère 69_ [Ci-dessus] Document personnel, axonométrie illustrant le belvédère côté Sud
Promenade Nord
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70_ Document personnel, axonométrie illustrant la promenade côté Nord
4.2. Habiter les berges et s’adapter à la topographie Les berges, de par leur nature, leurs reliefs et leur proximité à la Seine, représentent un paysage attrayant et original qu’il m’a semblé important de reconsidérer et de mettre en avant. Pour profiter pleinement de cet atout paysager que nous offre le site, j’ai choisi d’installer mes espaces publics, mes promenades, le long de ces berges. Il est important d’aménager ces espaces en offrant une liberté de déplacement, une déambulation fluide aux usagers tout en préservant la végétation qui s’y trouve. La promenade au Nord, ponctué d’une aire de jeux principale et d’aires de jeux secondaires, représente une source de nouvelles centralités au sein du territoire car elle permet de délocaliser la population des espaces publics du parc au sein du projet. Cette promenade est aussi ponctuée d’un terrain de sport, et d’aires de pique-nique. Cette promenade au niveau des berges hautes se dynamise à l’aide de « décrochés » ; des promenades basses plus étroites au niveau de trois endroits sur la parcelle où celles-ci sont accessibles. En s’adaptant à la topographie, cette différence de hauteur permet finalement de créer une balade où les deux niveaux se répondent. Les escaliers se fondent dans la topographie et sont utilisés à la fois pour rejoindre la promenade basse et à la fois comme gradins pour s’asseoir et profiter du paysage. Il me semblait important de considérer ces berges au
Nord et de les habiter, les aménager car côté Sud, ces dernières sont impraticables ; l’espace public est alors légèrement reculé par rapport aux berges mais tout en les longeant pour garder cette proximité avec la Seine et tout de même profiter du cadre qui est offert ici. Ainsi, au Sud, les bosquets d’arbres et d’arbustes et les pépinières aquatiques permettent de créer un paysage plus sauvage où des parcelles individuelles polyvalentes invitent à se réunir. Ces espaces de cultures viennent dynamiser le parcours sous la passerelle. Ils peuvent être utilisés par un public varié pour des activités diverses. Ces espaces peuvent être utilisés par les enfants du quartier lors des ateliers découvertes, par exemple, dans ce cas, la parcelle devient un espace expérimental. Mais ces parcelles peuvent aussi être utilisées par les habitants du site ou bien par un public extérieur qui souhaite avoir son propre potager en milieu urbain. Ces espaces de cultures individuelles permettent finalement à chacun de pouvoir s’approprier une portion du territoire si il le souhaite. Ainsi, cela rend la promenade originale, vivante et changeante. C’est finalement un moyen, une fois de plus, de créer de nouveaux liens entres les multiples acteurs du site.
Tracé 84
Bâtis
III. LE PROJET ARCHITECTURAL, VERS UN MODÈLE DE VILLE ALTERNATIVE Après avoir établi un programme mixte et adapté ainsi qu’une proposition urbaine et paysagère adéquate, le projet architectural s’est finalement vu découlé de tout cela d’une manière totalement fluide et donc cohérente. Tout comme le programme et l’urbanisme, l’architecture est ouverte sur la ville et répond au paysage. La figure globale est une ligne poreuse; des pleins qui viennent habiter la longueur du site le long des berges et investir le paysage ponctuellement sans le brusquer. Une passerelle permet d’assurer une continuité physique et visuelle entre ces trois éléments. Elle permet de libérer le rdc pour laisser la nature s’y développer tout en marquant physiquement et visuellement cette linéarité. Enfin, un bâtiment signal en bout de parcelle vient s’élever pour s’adresser à la ville et au paysage, habiter le ciel et tenir l’horizon. Cette skyline, que constitue ainsi le projet architectural, se fond totalement dans le tissu urbain existant et notamment la dense zone pavillonnaire. 71_ [Ci-contre] Documents personnels, schémas conceptuels
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72_ Document personnel, axonomĂŠtrie conceptuelle
1. Implantation et volumétrie 1.1. Habiter la longueur du site La longueur du site m’a longtemps questionné. En effet, je me suis interrogé sur la manière d’implanter le bâti, les dimensions du site nous permettant beaucoup de possibilités. Il était important pour moi de prendre en compte cette linéarité qui me semble être un atout plus qu’une contrainte. La nationale étant très bruyante, implanter le bâti de ce côté ne me semblé par être la solution idéale. De plus, cela marquerait davantage la rupture qu’il existe entre le parc et le site que je souhaitais faire disparaitre. M’implanter le long des berges du côté de la zone industrielle m’a semblé alors être l’approche la plus pertinente. En effet, habiter la longueur du site permet de profiter pleinement du paysage qu’il propose, de mettre en avant cette qualité dimensionnelle ainsi qu’investir et dynamiser l’ensemble du site et non pas seulement une portion. De plus, cela permettrait aux habitations côté Epinay d’avoir une vue plongeante sur le site et les espaces cultivés. 1.2. Ponctuer le paysage et libérer le rdc Il a fallu ensuite trouver un moyen d’investir la longueur de la parcelle sans avoir une emprise au sol trop forte mais un impact programmatique quand même assez important pour dynamiser le territoire dans son ensemble.
Dans le parc, le kiosque, la buvette ou encore l’espace d’accueil viennent ponctuer le paysage. Je souhaitais intervenir de la même manière sur mon site soit ponctuer l’espace public avec des espaces de loisirs destinées particulière aux habitants de l’île. De plus, ponctuer le paysage de cette manière permet d’intervenir légèrement mais à plusieurs endroits différents au lieu d’intervenir une seule fois et marquer une forte emprise au sol. Dans le dernier bâtiment en bout de parcelle, le bâtiment majeur, les patios ponctuent la ligne de la même manière que les bâtis viennent ponctuer le paysage. On a ici une alternance entre vide et plein, entre opacité et transparence; entre architecture et nature d’une certaine manière. Afin d’investir la longueur du site et créer une continuité physique et visuelle, une passerelle haute relie chacun des trois bâtis. Cette promenade permet d’habiter la longueur du site tout en libérant le rdc permettant ainsi à la végétation de prendre le dessus et de se développer en toute liberté. Les poteaux centraux permettant de soutenir la passerelle deviennent silhouettes de ce paysage sauvage en venant créer un nouveau paysage dans cette nature omniprésente.
1.3. Une skyline qui s’inspire du tissu pavillonaire existant
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Afin d’intégrer totalement le projet à son territoire, il m’est apparu important de prendre en compte le tissu urbain existant et notamment la zone pavillonnaire d’Epinay puisqu’elle constitue la zone la plus dense à proximité du site. J’ai alors pris la décision de créer une skyline faisant écho à ce tissu urbain : il s’agit donc de créer des bâtis de tailles disparates en R+1 et R+2 telle la hauteur des logements individuels et de créer un bâtiment signal d’une dizaine d’étages faisant référence aux tours de logements collectifs qui ponctuent le paysage. Le bâtiment signal, ici, en R+12 permet à la fois d’être vu depuis le parc et les villes d’Epinay et de Gennevilliers mais aussi d’être vu depuis le Sud de l’île, car , nous l’avons vu précédemment, de part sa forme en croissant, il est possible, depuis un bout de l’île de percevoir l’autre bout. Ainsi, ce bâtiment signal serait visible depuis de nombreuses perspectives sur le territoire. Aussi, sa position en bout de parcelle permet d’avoir une vue sur l’ensemble de la pointe Nord de l’île et donc sur la réserve et sa nature débordante. Enfin, bâtir en hauteur permet d’avoir une emprise au sol moindre.
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74,75 et 76_ Documents personnels, croquis illustrants la skyline du projet 77_ Photographie personnelle, vue sur la zone pavillon a i r e , t i s s u u r b a i n q u i m ’a i n s p i r é l a s k y l i n e d u p r o j e t
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78_ Documents personnels, coupes axonométries
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_Logements, espace de formations, salles d’exposition
_Espace éducatif
_Espace de restauration, plateforme de compostage
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79 et 80_ Documents personnels, croquis des logements et espaces de travail
2. Des dispositifs architecturaux au service du projet 2.1. Les patios et les ouvertures Il est important et primordial pour moi d’offrir a chaque espace des qualités spatiales qui lui correspondent et qui lui permettent de se différencier et de s’affirmer dans le projet. Le rdc du long bâtiment, soit la Ressourcerie, le Fab-lab et l’espace de vente et d’accueil, est entièrement vitré afin de se prolonger vers l’extérieur et d’être rattachée visuellement au paysage et à l’espace environnant. Au contraire, le premier niveau est majoritairement opaque. Par ce biais, je cherche à tourner vers l’intérieur les espaces de travails et les laboratoires, pour créer de nouveaux liens entres les différents acteurs du site et ainsi favoriser la vie communautaire au sein du projet. Autrement dit, au rdc, je souhaite privilégier les liens entre les acteurs et le site tandis qu’au premier niveau, je privilégie les liens entres les acteurs eux même. Ici, c’est donc en grande partie les patios qui vont apporter la lumière nécessaire aux espaces de travails. Ces patios permettent aussi de dynamiser la ligne en séparant les espaces sans pour autant ajouter des cloisons. Finalement, les patios ponctuent la ligne tout comme les plots ponctuent le paysage : on a une alternance entre le vide et le plein, entre intérieur et extérieur d’une certaine manière.
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81_ Document personnel, perspective- vue depuis le belvédère Sud vers les espaces de travails_ ici, on comprend bien que le ponton traverse le projet et notamment au niveau d’une des ouvertures de la sous-face. Aussi, on comprend le contraste entre le rdc entièrement vitré et le premier niveau, davantage opaque.
2.2. Les toits-terrasses et les coursives habitées Afin d’offrir aux habitants de l’île et des villes environnantes des espaces verts originaux et des lieux extérieurs singuliers, j’ai choisi de créer des toitures terrasses et végétalisées sur l’ensemble des bâtis.
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La première toiture végétalisée se trouve au niveau de la toiture des espaces d’exposition et de formation. C’est un jardin expérimental: les personnes en formations dans les étages inférieurs peuvent utiliser cet espace pour expérimenter de nouvelles méthodes de culture par exemple, avant de cultiver le site lui-même et cela sans avoir à quitter le bâtiment et à deux pas des salles de classe et des logements. La dimension esthétique et paysagère des toitures végétalisées participe ici à l’amélioration du cadre de vie des résidents et des acteurs du site. En effet, depuis les coursives, les résidents ont la vue sur une ambiance globale davantage verte grâce à cette végétation. De plus, c’est un lieu d’accueil pour la biodiversité et permet finalement de réconcilier une fois de plus architecture et nature.
Végétation Substrat végétal Filtre Drainage Couche de protection Membrane étanche résistante aux racines Isolant en plaque Pare-vapeur Support
82_ Document personnel, détail de la toiture végétalisée
83_ Document personnel, axonométrie Sud-Ouest- vue sur les logements, les coursives habitées ainsi que la toiture végétalisée
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84 et 85_ [Ci-dessus] Photographies illustrant l’École de la Biodiversité à Boulogne-Billancourt réalisée par l’agence Chartier Dalix, extraite de Chartier Frédéric, Dalix Pascale, Accueillir le vivant : l’architecture comme écosystème. Exemple de toiture végétalisée
Aussi, la toiture végétalisée permet d’améliorer la qualité de l’air, « elle contribue à la captation des particules fines et polluantes et à la réduction de la teneur en dioxyde d’azote et dyoxyde de soufre. ». Enfin, elle participe au rafraichîssement de l’air « grâce à l’évapotranspiration des végétaux »1 . La seconde toiture végétalisée est au niveau de l’espace éducatif. De même, les enfants peuvent expérimenter et profiter d’un espace vert au sein même du bâtiment où sont organisés les ateliers de découvertes. Dans les deux cas, la hauteur du substrat est de minimum 30 cm et est composée notamment du compost réalisé à même le site. Les photos ci-joint illustrent l’École de la Biodiversité à Boulogne-Billancourt de l’agence Chartier Dalix, projet qui m’a servi de référence. Ici, la végétalisation de la toiture est très ambitieuse. La hauteur du substrat (terre végétale en provenance des Yvelines mélangée à du compost) varie de 30 cm sur les rampes semées, avec un mélange d’espèces de gazon à 50 cm pour la partie en prairie semée, et avec un mélange prairial jusqu’à 1 m 20 pour la partie forêt dans laquelle des essences typiques de la chênaie-charmaie ont été plantées.
1 Komitès Pénélope, Guide des toitures végétalisées et cultivées. Mairie de Paris, 2018, p.10 à 14
En plus des toitures terrasses et végétalisées, j’ai mis en place dans mon projet des coursives habitées permettant d’accéder aux logements. Ces coursives apparaissent comme un prolongement des cuisines et permettent ainsi de jouer le rôle de séjours extérieurs ou encore de terrasses partagées. Disposées en quinconces, elles dynamisent la façade et proposent une multitude de scénarios et de vues différentes. Grâce à leur orientation à l’Ouest, on y profite des derniers rayons du soleil tout en contemplant la vue et notamment la pointe Nord de l’île et sa nature préservée. Tout comme les toitures terrasses et végétalisées, ces coursives sont finalement un moyen d’offrir des espaces extérieurs originaux et attrayants et ainsi créer de nouveaux liens entre les nombreux acteurs du site mais aussi entre les différents acteurs et le paysage, la nature.
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2.3. La passerelle et le parcours architectural Comme nous l’avons vu précédemment, la passerelle est tout d’abord un moyen de prolonger le Parc Départemental en prolongeant les flux et le parcours urbain. C’est aussi une manière d’habiter la longueur du site tout en libérant le rdc. Cette passerelle instaure finalement une continuité visuelle et physique du Parc jusqu’en bout de parcelle. C’est une seconde ligne d’horizon, une autre lecture possible du paysage existant. La passerelle permet aussi de créer des va-et-vient entre le rdc et ce nouveau niveau de référence qu’est la passerelle, soit le R+2. Elle engendre ainsi une multitude de manière différente d’habiter le site et de s’y déplacer. Effectivement, du rdc ou du R+2, les expériences spatiales, sensibles et perceptives sont variés : au rdc, notre regard est porté à la fois sur le proche et sur le lointain, sur la nature débordante juste à nos pieds et sur les bateaux circulant sur la Seine; tandis qu’au second niveau, la passerelle favorise un regard en plongée ou bien sur la zone industrielle et l’horizon au loin et un déplacement moins libre, davantage rigide. Depuis l’aire de jeu du Parc, la forme évasée de la rampe est comme une invitation à poursuivre le parcours au sein de cette passerelle. Ainsi, la continuité physique qu’engendre la passerelle permet un parcours architectural fluide avant même l’entrée sur la parcelle. De plus, elle permet aux trois bâtis, aux trois programmes, d’être totalement rattachés.
La passerelle abouti finalement à une toiture terrasse et à une rampe zig-zag au sein du patio du dernier bâti. Elle permet de rejoindre le rdc et de desservir les espaces de travails, tout en laissant la possibilité d’explorer le paysage intérieur. Faire des allers-retours sur cette rampe revient à prendre le temps d’apprécier l’espace : il n’est pas question ici d’atteindre un but le plus rapidement possible mais de se questionner sur le déplacement lui-même, sur le parcours et ce qu’il engendre. La pente est douce et régulière, il n’y a donc pas d’effort particulier à fournir, on prend plaisir à parcourir la rampe. On ne subit pas la pente, on l’apprécie.
86_ [Ci-contre] Document personnel, coupe longitudinale
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Circulations extérieures Circulations intérieures et entrées Espaces publics extérieurs
3. Architecture et matérialité 3.1. Entre continuité et déconstructivisme La passerelle assure une continuité sur la totalité du site et du projet tandis que des éléments davantage déconstruits viennent bousculer cette rigidité. Les deux plots, l’espace de restauration ainsi que l’espace éducatif révèlent une certaine dynamique, un mouvement dans lequel on est pris dès lors que l’on va parcourir la passerelle et les traverser. Dans ces lieux, les volumes sont évidés de leur masse et les formes interagissent entre elles afin de créer des espaces originaux, déconstruits. Une fois de plus, on divague entre différents modes d’habiter, entre proche et lointain, entre continuité et discontinuité, entre fini et infini.
précédent engendre une sensation de rythme. Lors de notre parcours sur la passerelle, notre œil s’accroche à quelque chose en bout de perspective. On est curieux de découvrir cette composition qui apparaît au loin, qui jaillit du sol et se dresse dans le paysage. Effectivement, j’ai trouvé intéressant de travailler la façade Est des logements comme une façade sculptée, originale, afin d’offrir autre chose à contempler que le paysage déjà connu et omniprésent. Cette façade apparaît finalement comme un tableau, un nouveau paysage dans le paysage. De plus, elle permet d’offrir de multiples vues cadrées depuis l’intérieur et donc de créer des logements singuliers et atypiques.
3.2. Tension, rythme et composition Il existe une certaine tension entre les bâtis, de part leur implantation et la manière de circuler entre eux. Effectivement, il existe une alternance bien déterminée des différent éléments qui permet de mettre en place un mouvement de progression lorsque l’on se situe sur la passerelle par exemple. Plus on avance, plus on découvre le projet, ce qui s’y passe. Chaque élément succède à un autre d’une certaine manière et la corrélation entre ce qu’on perçoit à un moment donnée et à l’instant
87_ [Ci-contre] Documents personnels, perspective- vue depuis la passerelle et axonométries conceptuelles des trois bâtis
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couverture, tôle en zinc ondulée verticale voligeage sur liteaux/lamed’air 40 mm pare-pluie 5 mm isolation laine de roche 140 mm ossature en CLT 145 mm
panneau de contreventement en fibre de bois 16 mm pare-vapeur 5 mm
isolation laine de bois 50 mm vide technique finition plâtre
88_ Documents personnels, détails de la façade et du plancher à ossature bois
3.3. Privilégier les matériaux biosourcés et durables Dans l’ensemble du projet, architectural et paysager, j’ai favorisé les matériaux biosourcés. Privilégier ces matériaux dans la construction permet de valoriser des ressources renouvelables puisque ces matériaux sont issus du vivants, d’origine animale ou végétale. De plus, cela permet de limiter l’emploi de matériaux fabriqués à partir de métaux et combustibles qui polluent l’environnement. La structure porteuse, planchers, façade, murs porteurs et voiles sont en CLT, des panneaux de bois massif lamellé-croisé. Les poteaux-poutres sont en lamellé-collé. Le bois m’est apparu comme la solution idéale car c’est un matériau biosourcé qui permet de réaliser des structures hautes et élancées, tout comme mon projet. De plus, il a une bonne tenue au feu et c’est un isolant thermique et phonique. Il permet donc un confort optimal dans les logements. Le revêtement de l’espace de restauration, de l’espace éducatif ainsi que des espaces de travail est un bardage à claire-voie en mélèze. Au niveau des logements et des étages inférieurs, la couverture est une tôle en zinc ondulée. Ce matériau léger, résistant et durable protège la structure bois contre les intempéries et nécessite peu d’entretien et une quantité modérée d’énergie pour sa fabrication.
/ CONC LU SI O N
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Le projet ici réalisé est une première réponse à ce que pourrait être la ville de demain, soit une ville durable et résiliente. C’est finalement un projet expérimental, qui, à mon sens, doit servir d’exemple à d’autres friches industrielles ou terrains vagues qui chercheraient à rendre à la nature ce qui lui appartient, afin de créer de nouveaux liens entre biodiversité et architecture, notions qui étaient jusqu’à présent perçues comme des antipodes. Faire partie de ce groupe de projet et avoir l’opportunité de réaliser ce travail pour mon projet de fin d’étude m’a clairement permis de réaliser qu’en tant qu’architecte, nous avons ce devoir aujourd’hui, et plus que jamais, de prendre en compte les choses qui nous entourent, pour les utiliser afin de faire du projet. Ce n’est pas la nature, le paysage et les choses environnantes qui doivent s’adapter à notre projet, mais bien l’inverse. Nous devons totalement maîtriser ce que nous modifions dans le paysage existant afin de s’inscrire sans cesse dans une continuité qui ne doit qu’évoluer et grandir avec son environnement. Ce que nous construisons aujourd’hui doit finalement être un tremplin pour la nature, la biodiversité, l’écologie. Il n’est plus question de réaliser des choses indépendantes, qui vont évoluer seules; il s’agit de sans cesse expérimenter afin de créer des projets globaux où l’humain, l’environnement, sont le point de départ de tous nos raisonnements. En faisant un travail sur un an, j’ai réalisé à quelle point il était important d’inclure à sa recherche de projet une phase de recherche urbaine et paysagère conséquente, celle-ci permettant finalement de totalement s’intégrer à son environnement, ce qui me parait aujourd’hui primordiale lorsque l’on fait du projet. Autrement dit, j’ai compris qu’il était important de prendre en compte le contexte territorial, social, historique ou encore urbain du site puisque c’est seulement à partir d’ici que l’on va pouvoir réellement commencer à expérimenter afin de s’approprier cet espace, cette portion de territoire qui nous est confiée. De plus, cela a été une réelle opportunité de pouvoir travailler sur un site comme celui-ci, au centre des préoccupations de demain et introduisant des enjeux écologiques et sociaux actuels et fondamentaux invitant à une réflexion sur des problématiques qui nous touchent tous aujourd’hui, pas seulement en tant qu’architectes, mais aussi en tant qu’Homme.
Enfin, en tant qu’étudiante en architecture et suite à la crise sanitaire de cette année, il était important pour moi de proposer à travers ce projet une manière de vivre autrement ; de travailler, d’habiter, de se déplacer, d’une manière plus cohérente et systémique. Selon moi aujourd’hui, on ne cherche plus à toujours vouloir aller plus vite et plus loin, mais, au contraire, à favoriser les mobilités douces et la proximité, à diminuer les déplacements inutiles, pénibles et surtout à promouvoir des pratiques durables. En 2012, Julien Damon, professeur à Science Po et urbaniste, parlait déjà de « démobilité ». Aujourd’hui, c’est une notion qui me parait inévitable à prendre en compte. Effectivement, et comme l’a souligné le sociologue Bruno Marzloff, le confinement a fait la preuve « qu’une démobilité est souhaitable et qu’une déconsommation est possible »1. Afin d’organiser la ville et le travail autrement, j’ai alors tenté d’appliquer ces nouveaux concepts dans mon projet, notamment en favorisant l’économie circulaire et la création d’une vie communautaire locale. À travers ces nouveaux modes de vie, j’ai cherché finalement à améliorer l’alimentation et le bien-être de la population, à stimuler le dévelopement des liens sociaux, à motiver l’implication citoyenne et à créer un lieu vivant, autonome, qui tend à créer de nouveaux liens ainsi qu’une nouvelle manière de vivre ensemble.
1 Marzloff Bruno dans le Libération du 08/05/20, https://www.liberation.fr/
I CO NOGRAP HIE
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Couverture_ Document personnel 1_ Document personnel, image extraite du site Google Maps, p.4-5 2_ Photographie de Soukni Myriam, retouche personnelle, vue sur le pont et la commune d’Epinay depuis l’Ile-Saint-Deni, p.14 3 _Document personnel, plan de situation du département, p.16 4 _Document personnel, plan de situation de la Plaine Commune aussi appelé Arrondissement de Seine-Saint-Denis, p.17 5_ Document personnel, plan de situation de l’Ile-Saint-Denis et des aménagements futurs au sein de la Plaine Commune, p.17 7_ Document personnel, plan des espaces verts à proximité de l’Île Saint-Denis, p.20 8 _ L’Ile-Saint-Denis, Huile sur toile, Alfred Sisley, 1872, Collection du Musée d’Orsay, p.21 9_ Photographie personnelle, vue sur le pont d’Epinay depuis les berges du site, p.21 10_ Document personnel, plan du réseau des transports et des voiries à proximité de l’Île Saint-Denis, p.22 11_ Document personnel, plan de situation de l’Île-Saint-Denis, p.24 12_ Photographie personnelle, vue depuis le pont d’Epinay vers le Sud de l’île, p.25 13_ L’Île-Saint-Denis, jeune fille jouant dans une prairie ; au loin, les cheminées des usines de la banlieue parisienne, 1954, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis, p.26 14_ 1787, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis, p.28 15_ cadastre napoléonien, 1811, extrait de la page internet Seine Saint-Denis, p.28 16_ L’Ile-Saint-Denis, Huile sur toile, Alfred Sisley, 1872, Collection The Metropolitan Museum of Art, p.28 17_ Rue Méchin, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis, p.28 18_ Saint-Ouen illustré. Plaisirs d’été. Une joyeuse partie de canotage autour de l’île, photographie extraite de la page internet Seine Saint-Denis, p.28 19_ Ile Saint Denis -Quai du Moulin, photographie extraite de la page internet PhilipponKalt Architectes, p.28 20_ Entrepôt du Printemps, photographie extraite de la page internet PhilipponKalt Architectes, p.28 21_ photographie de la cité Marcel Cachin, extraite de la page internet Center Blog, p.28 22_ Document personnel, carte des vides et des pleins du tissu urbain de l’Île-Saint-Denis, p.30 23_ Document personnel, plan de l’occupartion des sols sur l’Île Saint-Denis, p.32 24 et 25 _ Photographies de Soukni Myriam, retouches personnelles, l’Écoquartier fluvial et les friches industrielles, p.33 26_ Document personnel, population par grandes tranches d’âge, p.34 27_ Document personnel, population de 15 à 64 ans par type d’activité, p.34 28,29,30,31 et 32_ Photographies personnelles et de Julia Olpinska, p.37 33_ Document personnel, plan du site et des barrières physiques qui l’encadrent, p.37 34_ Document personnel, plan de la topographie du site et des environs selon le niveau NGF-IGN 69, p.38 35_ Document personnel, coupe AA’, p.38 36_ Document personnel, plan des types de sols présents sur la parcelle, p.40 37 et 38_ Photographies de Nicolas Berenbach, retouche personelles personelles, nature et gravats présents sur la parcelle, p.40 39_ Photographie de Nicolas Berenbach, retouche personelle, famille de Cormorans présente sur le site, p.42 40_ Photographie personelle, végétation sur les berges du site, p.42
41_ Document personnel, plan de l’occupation des sols à proximité du site, p.44 42_ Photographies personelles, vue depuis le Pont d’Épinay, p.44 43_ Document personnel, image extraite du site Google Maps, p.46 44,45,46 et 47_ Documents personnels, dessin de gabarits existants à proximité du site, p.46 48_ Document personnel, le programme, p.48 49 et 50_ Photographies d’oeillets et de tubéreuses cultivées par l’association issues de la page internet Halage, p.50 51_Photographie personnelle des cultures de fleurs présentes sur le site, p.51 52, 53,54_ Photograpghies illustrant les trois étapes du compostages issues de la page internet Les Alchimistes, p.53 55 et 56_ Photographies illustrant une jardinière et un hôtel à insectes réalisés durant un chantier solidaire aux Grands Voisins en 2017, issues de la page internet Zone-Ah. Exemples de réalisations faites en matériaux de réemploi, p.54 57_Document personnel, p. 60 58_ Photographie illustrant la Ferme du Rail dans le 19 ème à Paris, extraite de la page internet La Ferme du Rail, p. 62 59_Documents personnels illustrant le fonctionnement d’une cutlure en butte, p.66 60_Document personnel illustrant le fonctionnement d’un système hydroponique, p.67 61_Document personnel, schéma illustrant le cycle de l’eau au sein du projet, p.68 62_Document personnel, coupe illustrant le fonctionnement de la récupération des eaux pluviales et de voiries, p.69 63_Document personnel, coupe longitudinale et cycle de l’eau au sein du projet, p.70 64_Document personnel, plan masse, p.72 65_ Document personnel, plan d’ensemble- créer une continuité : prolonger le parc et le parcours urbain, p.74 66_ Documents personnels, schémas conceptuels, p.75 et 76 67_ Document personnel, perspective- promenade vers le belvédère Nord à travers les espaces plantés, p.78 68_ Document personnel, coupe transversale côté Nord, vue sur une serre hydroponique et le belvédère, p.80 69_ Document personnel, axonométrie illustrant le belvédère côté Sud, p.81 70_ Document personnel, axonométrie illustrant la promenade côté Nord, p.83 71 et 72 _ Documents personnels, schémas et axonométries conceptuels, p.84 et 86 73_ Documents personnels, coupes axonométries, p.88 74,75,76,78 et 79 _ Documents personnels, croquis, p.90 et 92 77_ Photographie personnelle, vue sur la zone pavillonaire, tissu urbain qui m’a inspiré la skyline du projet, p.91 80_ Documents personnels, coupes axonométries, p.90 81_ Document personnel, perspective, p.95 82 et 83_ Documents personnels, détail de la toiture végétalisée et axonométrie Sud-Ouest, p.96 et 97 84 et 85_ Photographies illustrant l’École de la Biodiversité à Boulogne-Billancourt, p.98 86_ Document personnel, coupe longitudinale,p.100 87_ Documents personnels, perspective- vue depuis la passerelle et axonométries conceptuelles des trois bâtis, p.100 88_ Documents personnels, détails façade et plancher à ossature bois,p.104
B I B L I OGRAP HIE _OUVRAGES ET REVUES
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ADRIAENS Aino, Toitures végétalisées. guide de recommendations. Pourquoi et comment acceuillir la nature sur son toit, Service des parcs et domaines de la Ville de Lausanne, 2014 CATTANT Julie, Projets de paysage, Revue scientifique sur la conception et l’aménagement de l’espace, L’horizon matière de l’habiter CHARTIER Frédéric, DALIX Pascale, Accueillir le vivant : l’architecture comme écosystème, Éditions Park Books, Paris, 2008 KOMITÈS Pénélope, Guide des toitures végétalisées et cultivées. Mairie de Paris, 2018 LEVAU-FERNANDEZ Madeleine, L’Île-Saint-Denis, au fil de l’eau, Éditions Le temps des Cerises Sous la direction de MASBOUNGI Ariella, Penser la ville par le paysage, Éditions de La Villette, 2002 Notre Île 193, Journal d’information locale, Été 2019 PHILIPPON Brigitte, L’Île-Saint-Denis, une île connectée, Enclaves urbaines, le magazine de l’ANABF, La Pierre d’Angle, 2016
_ARTICLES La Plaine Commune 9 villes 1 projet commun, 2014 Ville en vert, ville en vie : un nouveau modèle de société, Les entreprises du Paysage, 2016 Les Phytotechnologies appliquée au site et sols pollués, ADEME (Agence de l’environnement et de la maitrise de l’énergie, 2012
_SITES INTERNET Agriculture en Ile-de-France, http://www.ile-de-france.chambagri.fr Halage, https://www.halage.fr Insee, https://www.insee.fr/ La Ferme du Rail, https://www.fermedurail.org/ Les Alchimistes, https://alchimistes.co Libération, https://www.liberation.fr/ L’Ile Saint-Denis, https://www.lile-saint-denis.fr Natura 2000, https://www.natura2000.fr Seine Saint-Denis, https://www. seinesaintdenis.fr Trame verte et bleue, centre de ressources, http://www.trameverteetbleue.fr/
TABLE DES MATIÈRES SOMMAIRE AVANT-PROPOS INTRODUCTION
I. ÉTATS DES LIEUX, REPÉRAGES ET PROBLÉMATIQUES 1. A l’échelle de la métropole 1.1. Un territoire au coeur des projets pour la ville de demain 1.2. Trame verte et paysages fluviaux : des intérets écologiques pour la région 1.3. Accessibilités et centralités 2. A l’échelle de la ville 2.1. Situation géographique et forme urbaine 2.2. Un passé industriel lourd, un avenir prometteur 2.3. Transports, urbanisme et occupation des sols 2.4. Une population diversifiée 3. A l’échelle du site 3.1. Une parcelle linéaire et enclavée 3.2. La topographie : reliefs et nature 3.3. Les types de sols, entre béton et terre végétale 3.4. Un paysage riche, des espèces protégées 3.5. Un tissu urbain morcelé II. LA PROPOSITION URBAINE, QUELLE AVENIR POUR CETTE PARCELLE ? 1. Un programme adapté et diversifié 1.1. Cultiver, valoriser les déchets et produire du sol : Halage et Les Alchimistes 1.2. La Ressourcerie et le Fab-Lab, entre réemploi et fabrication éco-responsable 1.3. Les laboratoires, recherche scientifique et régénération des sols 1.4. Sensibiliser et former aux pratiques agricoles, écologiques et durables 1.5 Vers un projet d’insertion sociale d’implication citoyenne
9 10 12 14 16 16 19 22 25 25 26 30 34 36 36 39 40 43 44 48 50 50 55 57 58 61
2. Cultures et matérialité des sols 2.1. L’agriculture urbaine comme moyen de réconcilier homme et nature 2.2. Produire et consommer local en milieu urbain 2.3. Les types de culture hors-sol : permaculture et hydroponie 2.4. L’eau comme élément générateur du projet 2.5. Organisation de la parcelle et traitement des sols
63 63 65 66 68 72
3. Accéssibilité et flux 3.1. Intégrer le site à son territoire et prolonger le Parc Départemental 3.2. Les flux au sein de la parcelle, entre culture et espaces publics
74 74 76
4. Aménagements urbains et espaces publics 4.1. Reconnecter les deux rives 4.2. Habiter les berges et s’adapter à la topographie
78 78 82
III. LE PROJET ARCHITECTURAL, VERS UN MODÈLE DE VILLE ALTERNATIVE
84
1. Implantation et volumétrie 1.1. Habiter la longueur du site 1.2. Ponctuer le paysage et libérer le rdc 1.3. Une skyline qui s’inspire du tissu pavillonaire existant
86 86 86 88
2. Des dispositifs architecturaux au service du projet 2.1. Les patios et les ouvertures 2.2. Les toits-terrasses et les coursives habitées 2.3 La passerelle et le parcours architectural 3. Architecture et matérialité 3.1. Entre continuité et déconstructivisme 3.2. Tension, rythme et composition 3.3. Privilégier les matériaux biosourcés et durables CONCLUSION
92 92 96 100 102 102 102 104 106
HABITAT-RECHERCHE SCIENTIFIQUE-EDUCATION POPULAIRE- CULTURE DES SOLS- BIODIVERSITÉ