Mémoire HMONP - RE-INVENTER

Page 1

(RE) INVENTER Construire avec l’existant

Marie CLAUDINOT Mémoire HMONP SEPT 2017 // OCT 2019

Professeur tuteur M.Maraval Mise en situation professionnelle Atelier GA Planet Studio


Atelier GA 211 Grand Rue 30270 Saint Jean du Gard Contact : 0466850811 // atelierga@wanadoo.fr

Planet Studio 11 Avenue du Pasteur Rollin 30140 Anduze Contact : 0466616373 // contact@planet-studio.fr

Ce mémoire professionnel a été rédigé dans le cadre de la formation pour l’Habilitation à la Maîtrise d’Œuvre en son Nom Propre (HMONP), sous la direction de Monsieur Michel Maraval. La mise en situation professionnelle (MSP) a été effectuée au sein de deux agences : - l’Atelier GA sous la responsabilité de Monsieur Stéphane Goasmat Architecte DPLG de Septembre 2017 à Avril 2018, -

l’agence Planet Studio sous la responsabilité de Monsieur Ludovic Martial Architecte DE-HMONP d' Avril 2018 à Avril 2019.


REMERCIEMENTS

Je tiens tout particulièrement à remercier Monsieur Ludovic Martial et Monsieur Stéphane Goasmat de m’avoir permis de réaliser ma mise en situation professionnelle au sein de leur agence. Leur générosité et leur engagement pédagogique me permettent aujourd’hui de me présenter devant ce jury d’Habilitation avec sérénité. Je voudrais également remercier Monsieur Michel Maraval, enseignant tuteur, pour sa réactivité et sa disponibilité lors de nos échanges. De même, j’aimerais remercier ma famille et mes amis qui m’ont toujours soutenus dans les moments de doute et qui, grâce à leur appui, m’ont permis de m'engager seule avec un peu plus d'assurance dans le monde de l’architecture. Je tiens aussi à remercier tous les professeurs, architectes et personnes d’autres corps de métier qui ont jalonnés mon parcours étudiant comme professionnel pour les expériences bonnes ou mauvaises - qu’ils m’ont fait vivre, ce qui m’a permis de savoir ce que je désirais et dans quelle direction je voulais m’orienter dans ce métier. Pareillement, j’aimerais remercier les architectes avec qui je collabore depuis le mois de Mai 2019 ainsi que les particuliers qui me confient maintenant des projets, pour la confiance qu'ils m'accordent. Enfin, j’aimerais remercier les membres du jury pour le temps qu’ils vont consacrer à la lecture de ce mémoire.

3



SOMMAIRE

Introduction

Partie 1 : Vers la HMONP - S’INVENTER a/ Un choix b/ Immersion dans le milieu

Partie 2 : L’exercice de la profession en milieu rural - RE-INVENTER son métier a/ L’architecture en milieu rural une approche particulière b/ La (re) construction du paysage au coeur de la pratique

Partie 3: Rénovation et extension - RE-INVENTER un lieu a/ Faire revivre les milieux ruraux b/ Le travail sur l’existant : technique et méthode

Conclusion Annexes Passeport

5



PREFACE

“ La campagne est un pays étranger. Cela ne devrait pas être, mais pourtant il en est ainsi ; cela aurait pu ne pas être, mais il en est ainsi et il en sera ainsi désormais : il est bien trop tard pour y changer quoi que ce soit. Je suis un homme des villes ; je suis n é, j’ai grandi, et j’ai vécu dans des villes. Mes habitudes, mes rythmes et mon vocabulaire sont des habitudes, des rythmes et un vocabulaire d’homme des villes. La ville m’appartient. J’y suis chez moi : l’asphalte, le béton, les grilles, le réseau des rues, la grisaille des façades à perte de vue, ce sont des choses qui peuvent m’étonner ou me scandaliser, mais de la même façon que pourrait me scandaliser ou m’étonner, par exemple l’extrême difficulté qu’il y a à vouloir regarder sa propre nuque ou l’injustifiable existence des sinus (frontaux ou maxillaires). A la campagne rien ne me scandalise ; par convention, je pourrais dire que tout m’étonne ; en fait, tout me laisse à peu près indifférent. J’ai appris beaucoup de chose à l’école et je sais encore que Metz, Toul et Verdun formaient les Trois-Evêchés, que delta égale b 2 moins 4 a c, et qu’acide plus base donne sel plus eau, mais je n’ai rien appris concernant la campagne, ou bien j’ai oublié tout ce que l’on m’avait appris. Il m’est arrivé de lire dans les livres que les campagnes étaient peuplées de paysans, que les paysans se levaient et se couchaient en même temps que le soleil, et que leur travail consistait, entre autre, à chauler, à marner, à assoler, à dessoler, à faluner, à heser, à houer, à sarcler, à biner ou à dépiquer. Les opérations que ces verbes recouvrent sont pour moi plus exotiques que celles qui président, par exemple, à la remise en état d’une chaudière mixte de chauffage central, domaine dans lequel je ne suis absolument pas versé. Il y a, bien sûr, les grands champs jaunes sillonnés de machines étincelantes, les bocages, les prairies plantées de luzerne et les vignes à perte de vue. Mais je ne sais rien de ces espaces, ils sont pour moi impraticables.” 1 Rien à l’école d’architecture ne nous a préparé à exercer en milieu rural, milieu qui pourtant manque cruellement d’architectes et de sachants qui pourraient éviter l’altération du paysage par une urbanisation non maitrisée et des constructions ne s’intégrant en rien à l’environnement qui est pourtant le faire valoir des espaces ruraux. 1Espèces d’Espaces - Georges Perec

7



INTRODUCTION

Me presenter pour soutenir l’Habilitation à la Maii trise d’Oeuvre en son Nom Propre est une decision que j’ai prise rapidement après l'obtention de mon diplôme de fin d’etudes mais qui m’a cependant demande de la reflexion. En effet, cette étape représente une phase de transition entre étude et vie professionnelle, entre théorie et pratique. C’est le moment de prendre conscience de la réalité du métier d’architecte, de la confronter avec une position personnelle. Cette confrontation entre réalité et expectation demande beaucoup de courage car, sur certains points, il y a contradiction. Au fil de mon cursus ma position s’est construite autour des idées d’autonomie et de liberté de décisions et d’expériences. C’est pourquoi j’ai décidé de commencer ma mise en situation professionnelle et donc ma première expérience dans un lieu dont j'ignorais tout, dans l’optique de sortir de ma zone de confort et des sentiers battus. Au fil de ces deux années qui sont en partie résumées dans cet écrit, j’ai expérimenté l’Architecture sous differents angles ce qui m’a permis de me forger ma propre vision de ce métier multiple. Dans ce mémoire j’ai voulu analyser cette expérience via un axe de réflexion particulier : le lieu de pratique du métier d’architecte. En effet, je me suis retrouvée aux côtés d’architectes qui avaient choisi de s’installer en milieu rural. Au fil des mois, j’ai pu remarquer à quel point le milieu dans lequel l’architecte exerce peut avoir une influence sur son approche. En regardant le métier par cette lunette, j’ai pu apprendre, comprendre et me questionner d’avantage sur la pratique de l’architecture. Afin de traduire au mieux mes réflexions, j’ai organise ce mémoire en trois sequences. La premiere revient sur mon parcours scolaire et professionnel et le choix de ce lieu comme première pratique de l’architecture. La deuxième tente de résumer la difficile approche de l’architecture en milieu rural en y abordant les clichés mais aussi la réalité du métier. Enfin, la dernière partie explore une facette porteuse du métier d’architecte surtout en milieu rural: le travail avec et sur l’existant, mon choix s’orientant principalement vers la

9


commande privée. En effet, l’extension, la réutilisation ou encore la rénovation d’ancien bâti permet une évolution des usages s’inscrivant dans le phénomène de mutation du milieu rural, sa redéfinition et son re-peuplement par de nouvelles générations lui apportant un nouveau souffle. Qu’est ce que le milieu rural ? “ Pour la majorité de mes semblables, la campagne est un espace d’agrément qui entoure leur résidence secondaire, qui borde une portion des autoroutes qu’ils empruntent le vendredi soir quand ils s’y rendent, et dont, le dimanche après-midi, s’ils ont quelque courage, ils parcoureront quelques mètre avant de regagner la ville où, pendant le reste de la semaine, ils se feront les chantres du retour à la nature. (...) j’aime être à la campagne: on y mange du pain de campagne, on respire mieux, on voit parfois des animaux que l’on n’a pratiquement pas l’habitude de voir dans les villes, on fait du feu dans les cheminées, on joue au scrabble ou d’autres petits jeux de société. On a souvent plus de place qu’à la ville, il faut le reconnaître, et presque autant de confort, et parfois autant de calme.“

2

Le milieu rural est un espace qui à bien évolué au fil des siècles. Le définir est donc assez compliqué et hasardeux. Cet espace se définit, d’un côté, grâce à ces images d’Epinal où l’on retrouve une campagne verdoyante entourée de ses villages de caractères et de ses paysans. C’est cette image que les parcs nationaux ou certains labels tentent de préserver tant bien que mal, voire même de muséifier. D’un autre côté, la réalité est tout autre avec le développement des zones pavillonnaires, des zones commerciales et touristiques qui sont en totale opposition avec cette image idéalisée et qui sont très loin des réalités de développement durable et d’écologie aujourd’hui prônées par tout un chacun. Au sein de ce milieu hétérogène, de nouveaux habitants tentent de cohabiter avec ceux que nous appellerons “les pure souche”: rencontre incongrue de deux mondes, greffe de la modernité sur la tradition. Lotissements, camping, résidences secondaires, habitat alternatif se mêlent aux vieilles bâtisses en pierres. Nous assistons depuis déjà quelques décennies à une nouvelle manière de s’approprier et d’habiter le milieu rural engendrant des tensions. En 2 Espèces d’Espaces - Georges Perec


effet, les problématiques sont nombreuses : l’étalement urbain, la protection de l’environnement, la dépendance à la voiture individuelle, autant de thématiques qui font naître des réflexions diverses où l’architecte doit aussi prendre sa place. Pour aller plus loin : Le mot “rural” vient de reuos signifiant “espace libre” qui a donné le nom latin rus traduit par “campagne”. La campagne est, elle, définie comme une vaste étendue de pays plat, que l’on peut alors opposer à la montagne, au littoral ou encore à la forêt. Ainsi, étymologiquement, l’espace rural est défini avec des caractères physiques et géographiques. Aujourd’hui, une nouvelle notion vient compléter la définition de la campagne qui devient “l’ensemble des lieux fertiles hors des villes”. 3 En réalité, l’espace rural ne regroupe pas seulement le milieu agricole comme au siècle dernier 4. C'est aujourd’hui un monde aux multiples facettes qui le rend très difficile à définir. De plus, l’intérêt pour les phénomènes urbains de ces dernières décennies a poussé à considérer différentes catégories d’espaces plutôt en fonction du cadre bâti que de l’activité qui s’y pratiquait. L’espace rural s’est alors vu divisé en plusieurs sous espaces ce qui a encore complexifié sa définition. Selon l’INSEE, l’espace rural 5 est tout ce qui n’appartient pas à une unité urbaine (définie comme un ensemble d’une ou plusieurs communes dont le territoire est partiellement ou totalement couvert par une zone bâtie d’au moins 2000 habitants 6 ). Malgré tout, les petites aires urbaines - bourgs et villages - au milieu des espaces ruraux sont des aires d’emploi et de dynamique sociale pour le monde rural qui l’entoure. Elles ne peuvent donc pas être dissociées de la définition de ce dernier. Ainsi, ces villages sont en étroits liens avec les campagnes environnantes qui, sur un principe d’échange vertueux, donne à cet espace rural à la fois sa dynamique et son attractivité tout en lui proposant ses services (santé, administratif, détente).

3Définition Petit Robert 4Les agriculteurs exploitants en activité ne constituent au total qu’un peu plus de 7 % de la population en activité dans l’espace rural. Source CAIRN : Le monde rural : quelques données de cadrage Clothilde Roullier 5Définition milieu rural INSEE : L'espace à dominante rurale, ou espace rural, regroupe l'ensemble des petites unités urbaines et communes rurales n'appartenant pas à l'espace à dominante urbaine (pôles urbains, couronnes périurbaines et communes multipolarisées). Cet espace est très vaste, il représente 70% de la superficie totale et les deux tiers des communes de la France métropolitaine. 6Définition INSEE d’une unité urbaine

11


D’un point de vue démographique, la ruralité se caractérisait depuis plusieurs décennies par sa dépopulation liée à l’exode rural et par son vieillissement. Néanmoins depuis quelques années, ces phénomènes ont tendance à se modifier7. Bien que les tranches d’âges les plus âgées soient toujours dominantes, on observe un rajeunissement de la population8 . De plus, on remarque que de nombreux ménages migrent de la ville à la campagne pour des raisons principalement économiques mais aussi de mieux vivre. En effet, on constate aujourd’hui que la ville déçoit, le rythme donné par cette dernière “métro, boulot, dodo” assorti d’une augmentation exponentielle du coût de la vie, a poussé de plus en plus de ménages à reconsidérer la question et à partir se réfugier dans des zones plus calmes et proches de la nature : on les appelle les “néo-ruraux”. Habiter à la campagne peut alors résulter d’un choix, mais également d’une solution par défaut. Il s'agit là d'une des difficultés de ces territoires. En effet, le milieu rural est caractérisé par le manque d’emploi.9 Avec la fin de l’agriculture traditionnelle et, dans notre cas, surtout de l’industrie minière, les emplois se sont raréfiés ce qui nécéssite pour les populations actives de se rapprocher des aires urbaines ou de souffrir de longs trajets. Malgré tout, à partir de 1990, le taux de progression annuel moyen de l’emploi en zone rurale a été supérieur à celui de la population, mais nettement inférieur à celui des zones urbaines (l’écart entre les deux univers du point de vue des facilités à trouver un emploi n’a fait que se creuser). Aujourd’hui un nouvel espoir est permis avec le télé-travail, même si on observe que le taux d'emplois disponibles dans les espaces ruraux est surtout lié aux services à la personne ou l’industrie et l’artisanat. Peu de cadres ont encore franchi le pas.

7Globalement, depuis le début des années 2000, l’espace rural se repeuple : la progression démographique y est plus rapide que dans les pôles urbains. Si le solde démographique naturel y reste légèrement négatif, le solde migratoire y a progressé très rapidement, dépassant celui de toutes les catégories d’espace à dominante urbaine, et y entraînant, avec un taux d’accroissement moyen global de 0,7 % par an, un dynamisme d’ensemble. Source CAIRN : Le monde rural : quelques données de cadrage Clothilde

Roullier

8En 2006, l’espace rural comptait 27,5 % de plus de 60 ans et 11,4 % de plus de 75 ans, contre respectivement 20,0 % et 7,7 % dans l’espace urbain. Malgré tout, on remarque que la population de l’espace rural a moins vieilli que celle de l’espace urbain. La part des 60 à 79 ans régresse dans l’espace rural (de – 1,6 point), tandis qu’elle demeure inchangée dans l’espace urbain. Celle des adultes d’âge actif progresse dans l’espace rural (+ 0,6 point) et demeure quasiment inchangée dans l’espace urbain (– 0,1 point). Celle des enfants et des très jeunes adultes est en baisse dans les deux catégories d’espaces, mais cette diminution est moins forte dans l’espace rural. Enfin, seule celle de la population des plus de 80 ans continue de progresser plus vite dans l’espace rural. Source CAIRN : Le monde rural : quelques données de cadrage Clothilde Roullier

9Pour autant, la dynamique de l’emploi n’a pas gagné ces zones rurales. Cette difficulté n’est pas récente. Dans les années 1990, le taux d’emploi était déjà sensiblement plus faible dans l’espace rural que dans l’espace urbain. L’écart entre les deux catégories d’espaces, qui avait un peu diminué entre 1990 et 1999 (de 6,5 à 5,6 points), a nettement augmenté en 2007 (passant de 5,6 à 8 points)  Source : INSEE


En effet, étant donné le peu de perspective de formation dans les milieux ruraux, les jeunes partent pour faire des études et reviennent rarement. Une autre facette du monde rural qu'il ne faut pas négliger, est le potentiel touristique qu’offrent ces espaces. Les campagnes sont étendues et donnent à voir des paysages variés aux habitants des villes venant se ressourcer Il est donc important que cet environnement soit respecté et même sublimer car il est une des sources de revenus les plus importantes pour ces zones. Ainsi, nous pouvons citer quelques exemples de projets incontournables qui ont permis d’augmenter de façon exponentielle les visites dans certaines zones rurales : La passerelle du pont du diable de Lamoureux et Ricciotti, Maison Rouge à Saint Jean du Gard par Vurpas Architectes, le Parc Naturel Régional de la Montagne de Reims de Giovanni Pacce, entre autre. Le travail de l’architecte permet souvent de plébisciter nos espaces ruraux au delà de nos frontières.

Finalement, l’exercice du métier d’architecte en zone rurale est tout aussi multiple que peut l’être la vision de cette dernière. En effet, l’architecte doit à la fois concilier une population assez fragile qui vient s’installer en zone rural par manque de moyens et un devoir de préservation du paysage soutenu par une population de néo-ruraux attachée au respect de leur environnement.

13


Passerelle du pont du diable Lamoureux & Ricciotti

Maison Rouge - MusĂŠe de la filature - St Jean du Gard - Vurpas Architectes

Parc Naturel RĂŠgional de la Montagne de Reims - Giovanni Pace


Partie 1 : Vers la HMONP - S’INVENTER a/ Un choix Après avoir validé mon Master à l’Ecole d’architecture de Montpellier j’avais cette volonté forte de travailler en agence pour me confronter aux réalités du métier et me former dans l’objectif de ‘voler un jour de mes propres ailes’. Très consciente de mon jeune âge et de mon manque d’expérience, je voyais cette période de mise en situation professionnelle comme un temps long qui me permettrait de me familiariser avec tous les aspects du métier. C’est la raison pour laquelle j’ai choisi la session longue d’HMONP de l’école de Montpellier et

que je ne me présente au jury qu'après deux années

d’expériences. Suite à mes premières expériences professionnelles réalisées pendant les périodes de stage, j’avais déjà une certaine idée de ce que je voulais ou ne voulais pas expérimenter en architecture. Je recherchais une agence à taille humaine et polyvalente où je pourrais exercer des missions variées pour m’assurer une formation complète. Après mon stage de M1 dans une grosse agence de Barcelone, j’avais la pleine conviction que ce type de structure ne me convenait pas. De même, j’espérais intégrer une agence ayant une pratique de l’architecture polie, en respect de son environnement avec une réflexion bio-climatique comme le prônait mon Master “Architectures et Milieux”. Je recherchais également une agence effectuant des missions sur l’existant. En effet, comme tout à chacun, après la licence, plutôt vue comme une étape généraliste du cursus d’architecture, j’avais privilegie certains aspects du projet par gouu t puis par conviction. C’est ainsi qu’après le stage de fin de licence effectué au STAP de Montpellier avec Monsieur Gabriel Joncquière-d’Oriolla, je me suis davantage interessee à la question de la rénovation. Ce sujet a d’ailleurs été un fil conducteur à toute l’étape du master : mon mémoire comme mon projet de fin d’étude ont abordé une partie de cette problématique très complexe. Aujourd’hui, cette thématique est toujours à l’honneur avec ce mémoire.

15


b/ Immersion dans le milieu Ce mémoire relate mon expérience dans deux agences ayant une pratique du métier d’architecte que l’on pourrait décrire comme opposée mais toutes deux inscrites dans leur milieu. Ces deux expériences m’ont donc permis d’expérimenter deux modèles de fonctionnement amenant à des projets foncièrement différents. L’Atelier GA - Une pratique de l’architecture contextualisée L’Atelier GA recrutait. Pendant mon master, j’avais régulièrement visité des bâtiments et/ou assisté à des conférences de Monsieur Stéphane Goasmat. Son agence remplissait la quasi totalité de mes critères de recherche. J’ai donc saisi l’opportunité de collaborer avec lui. En effet, cette agence me paraissait un bon environnement pour commencer ma mise en situation professionnelle : d’une part les différents projets sur lesquelles l’agence travaillait étaient très intéressants et amenaient la perspective d’une certaine responsabilité, et, d’autre part il y avait une volonté manifeste de l’architecte de me consacrer du temps pour ma formation. C’est ainsi que j’ai débuté ma mise en situation professionnelle à Saint Jean du Gard, petit village au coeur des Cévennes. L’Atelier GA est dirigé par Stéphane Goasmat, architecte DPLG diplômé de l’école de Paris. Aujourd’hui, après la séparation des deux architectes Goasmat et Arnold il y a quelques années, l’agence est devenue une très petite agence comptant 1 à 2 salariés maximum. Pour conserver l’influence que l’Atelier avait avant la séparation des deux architectes, l’Atelier GA fait maintenant partie d’un groupement (GIE) appelé l’Atelier Méditerranéen, regroupant d’autres architectes, paysagistes, urbanistes et bureaux d’études. Ce groupement de différentes entreprises éparpillées autour de l’arc méditerranéen permet de créer une entité plus forte et plus complète pour répondre aux appels d’offres. Le groupement co-traite même avec d’autres agences d’architectures plus importantes comme Tectoniques à Lyon pour répondre à certains projets d’envergure. L’agence concentre son activité autour des projets publics, principalement à vocation d’enseignement, tous caractérisés par une volonté de haute performance énergétique saluée par des labels comme BDM (Bâtiment Durable Méditerranéen).


Dans l’agence, l’architecture est vue comme une machine capable de créer un environnement confortable. Ainsi l’écriture architecturale est majoritairement issue des contraintes techniques et climatiques. L’ambition est alors de créer des bâtiments écologiques avec une faible empreinte environnementale. L’agence est spécialisée dans la construction bois. Cette culture constructive était assez nouvelle pour moi, m'étant jusque là surtout intéressée aux structures béton traditionnelles et naturelles comme le pisé, à l’école. Durant cette expérience de 7 mois j’ai pu travailler sur plusieurs projets, chacun à des stades différents. Les échanges avec les utilisateurs indispensables pour faire les bons choix La clé de tout projet réussi est le dialogue avec les usagers du site. Aujourd'hui, les missions complémentaires d’assistance à la maîtrise d’ouvrage sont de plus en plus mises à l’honneur dans les missions de maîtrise d’oeuvre en marché public dans le but d'instaurer un dialogue constructif avec la maîtrise d'usage. En tant qu’architecte, nous avons des notions d’usage mais nous devons prendre conscience que nous ne sommes pas les principaux utilisateurs de notre bâtiment. Il nous faut donc être capable, tout en gardant un jugement professionnel et donc un pouvoir de conseil, d’écouter les futurs occupants de l'espace que nous pensons, pour pouvoir s’adapter à leur future manière d'appréhender cet endroit. Ainsi, il faut éviter d’imposer sans aucune explication quoi que ce soit aux utilisateurs - matériaux de finitions ou système - même si cela peut être bénéfique au projet. En effet, si ces systèmes sont mal compris et/ou mal perçus, ils risquent d’êtres mal utilisés, mal aimés, mal entretenus et le bâtiment entier peut alors en souffrir. L’utilisation d’un revêtement de type sol mou (le Flotex) à l’école de Juvignac en est une bonne illustration. Ce produit est dit ‘révolutionnaire’ car extrêmement facile à nettoyer avec les bons outils. Malheureusement si les utilisateurs sont mal informés ou sont totalement réfractaires au matériel, il sera impossible de bien l’entretenir. De nombreuses critiques peuvent alors en découler, ce qui peut même finir par causer préjudice au projet.

17


Etude de Cas 1 : LES PENNES MIRABEAU - Ensemble composé d’un groupe scolaire maternelle et élémentaire et d’une médiathèque. Quand je suis arrivée à l’agence en Septembre 2017, ce projet était en phase PRO et le début de chantier était fixé pour Mai 2018. Le projet était en co-traitance avec Tectoniques à Lyon qui avait la maîtrise des plans PRO tandis que l’Atelier GA avait les missions de consultation des entreprises et analyse des devis, chantier ainsi qu’une mission d’aménagement et de mobilier pour les 3 entités. Ce projet passait par le BIM. L'Atelier GA n’avait aucune expérience avec cette nouvelle manière de gérer le projet architectural engendrant une organisation vraiment différente de ce que l’on peut voir avec un projet ‘traditionnel’. L’idée était donc de commencer la transition au BIM grâce à ce projet aux côtés de Tectoniques qui nous a assisté et conseillé tout au long de la mission. Mon embauche devait elle aussi permettre une transition plus en douceur au BIM grâce à mes compétences en informatique. Ainsi, j’ai donc pu intervenir à plusieurs reprises sur ce projet. Ma première mission à été d’aménager et de dessiner le mobilier pour ces 3 entités en parallèle de l’élaboration des plans PRO. La médiathèque se voulait révolutionnaire en désacralisant le livre. D’une part, les façades de cette entité avaient été pensées de façon à créer une immense vitrine pour pouvoir attirer le maximum de monde dans ces nouveaux locaux - l’idée du projet était d’amener la culture à l’intérieur d’une banlieue dortoir de Marseille où se mélangeaient un public peu éduqué avec un public ne consacrant que peu de son temps libre aux livres -. D’autre part, une cafétéria avait été installée en plein coeur du complexe pour permettre un autre rapport au livre. La partie école se voulait aussi révolutionnaire en permettant un enseignement adapté à chaque élève grâce à du mobilier modulaire. Durant cette mission j’ai pu orienter mes choix dans la composition du mobilier grâce à des réunions utilisateurs où j'ai rencontré entre autre les futurs enseignants des classes à qui j'ai présenté le travail accompli et qui ont pu me faire part de leurs observations. Le mobilier devait en effet s’adapter. Il ne fallait pas rester dans les codes classiques du banc, de la chaise ou de la table. L’idée était de réfléchir aux positions que pouvait/voulait prendre l’usager pour se sentir confortable dans son espace. Par exemple, pour la médiathèque, nous avons dessiné de petites alcôves en bois permettant de se couper de


l’environnement pour profiter au maximum de la lecture. De même, l’ensemble mobilier qui constituait la cafétéria intégrait en grande partie les livres pour pouvoir mêler utile et agréable en repoussant les codes communs des médiathèques qui majoritairement interdisent toute nourriture ou boisson dans leurs espaces. Ma seconde mission sur ce projet a été d’analyser les offres des entreprises pour les lots architecturaux et ainsi permettre de guider la maîtrise d’ouvrage dans le choix de leurs futurs partenaires pour effectuer le chantier. Cette mission a été particulièrement formatrice. E-C 2 : JUVIGNAC - Le Groupe scolaire Nelson Mandela Quand je suis arrivée à l’agence, le chantier était terminé et la première rentrée était en cours avec toute la gestion que cela impliquait - dernières finitions pour la levée de toutes les réserves, entretien, adaptation de certains espaces après retours et réflexions des enseignants suite à la rentrée-. Ces retours ont été recueillis durant une réunion qui a permis d’éclaircir certains points auprès des utilisateurs. Cette rencontre a été extrêmement intéressante et source de réflexion. En effet, elle m'a permis de comprendre que le projet parfait n’existe pas et qu’il y a donc toujours des points qui peuvent être améliorer. Un projet n’est en effet jamais vraiment achevé même si le chantier est terminé. Un bâtiment juste livré est un peu comme un nouveau né, il a encore toute sa vie devant lui pour se transformer en fonction de la façon dont il est appréhendé et utilisé. J'ai également mieux compris l’enjeu que représentait la gestion des relations entre utilisateurs, maîtrise d’ouvrage et architecte. J'ai notamment appris que la hiérarchisation des demandes et des envies de la part de tous ces acteurs était indispensable et que cette hiérarchisation n’était possible que grâce à notre oeil d’architecte, professionnel apte à conseiller. Rénovation et flexibilité les indispensables pour penser la ville et la campagne aujourd’hui L’avenir de la campagne comme de la ville tient dans sa capacité de flexibilité, de réutilisation, de recyclage et d’adaptation de ses structures à des usages variés. En effet, les modes de vies évoluant très vite, le bâti ne peut se renouveler au même rythme. C’est pourquoi il faut penser le nouveau bâti comme des structures et des espaces adaptables et 19


flexibles mais aussi réfléchir à des moyens pour recycler le bâti existant et finalement penser la ville de manière durable. E-C 1 : MIREIO Inspire - Projet Pilote pour la rénovation des épaves énergétiques de bureau Le projet de recherche collaborative MIREIO (Moyen Industriel de Rénovation Énergétique des Immeubles Occupés) est mené par un groupement de différents corps de métier : économiste, constructeur, ingénieur en énergie renouvelable et architecte. Il a pour objectif de mettre au point un procédé de rénovation énergétique des bâtiments grâce à l’isolation par l’extérieur mais aussi grâce à l’utilisation de plusieurs innovations. Ainsi le projet MIREIO Inspire constitue le projet pilote de ce consortium d’entreprises. Quand je suis arrivée à l’agence le Permis de Construire venait juste d’être déposé . Durant le temps de latence de la dépose du Permis, j’ai pu commencer à travailler sur le dossier APD en menant des opérations de relevé avec la technologie du relevé de points pour mettre en place les modules d’isolation par l’extérieur. La technologie de relevé grâce à un drône et un scanner créant des nuages de points apporte une grande précision permettant une fabrication des modules d’isolation directement en atelier. Ces modules

se

positionnent alors parfaitement sur l’extérieur du bâtiment avec une précision au millimètre près. J'ai également pus travailler plus en détail sur la protection solaire du bâtiment : son aspect, sa matérialité, son positionnement grâce à différents logiciels de calcul. Ce projet m’a particulièrement plu du fait du travail avec et sur l’existant même si celui-ci n’a aucune valeur historique ou patrimoniale. Malheureusement, le projet faisait partie de ces processus très longs au financement basé sur les aides à l’innovation de la région. Je n’ai donc pas pu y travailler jusqu’à son achèvement.

E-C 2 : AGUESSAC - Concours Groupe Scolaire L’Atelier GA avait déjà beaucoup d’avance sur la plupart de ses concurrents du fait que le concours concernait un Groupe Scolaire, domaine dans lequel l’agence était spécialisée. Il ne fallait pas pour autant que nous baissions la garde, nous devions donc réfléchir à des solutions novatrices.


Ce groupe scolaire allait constituer la première pierre d’accroche pour un nouveau quartier dans ce village rural de la banlieue de Millau en plein développement. Le cahier des charges obligeait à une flexibilité pour certains espaces qui seraient utilisables en dehors des horaires scolaires. Le terrain choisi par la maîtrise d’ouvrage était exceptionnel bien qu’il soit balayé par un fort vent du Nord et longé par une route départementale assez bruyante. Il fallait donc tenir compte de ces contraintes pour penser un bâtiment agréable s’inscrivant dans le paysage. Le cahier des charges obligeait à une implantation de plain-pied pour ne pas gâcher la vue sur les montagnes des Causses Noires. Nous avons donc pensé le projet comme une grande fenêtre allongée offrant une vue imprenable pour les enfants sur leur environnement. Les matériaux choisis étaient bien entendu bio-sourcés et inscrits dans une logique de filière courte (bois du massif central, pierres de parement venant de la carrière voisine et isolation paille et ouate de cellulose produite elle aussi dans le secteur). Le tout était naturellement régi par les grands principes bio-climatique afin de répondre aux exigences d’un niveau BDO (Bâtiment Durable d’Occitanie) qualité OR (soit penser le projet en terme de coût global, garantir un confort thermique intérieur en toute saison, utiliser les énergies renouvelables, réfléchir au recyclage des matériaux, minimiser les zones imperméabilisées et gérer les eaux pluviales grâce à un système avant-gardiste...). Ce projet à été le dernier de mon expérience à l’Atelier GA. Ma mission a donc surtout été d’apporter mon aide grâce à une analyse poussée du corpus de concours, des problématiques urbaines, climatiques et paysagères ainsi que de fournir un corpus d’inspiration avec différents projets novateurs menés par d’autres agences.

21


Dans l'ordre : Les Pennes Mirabeau, L'Ecole Nelson Mandela et Le Groupe Scolaire d'Aguessac -Atelier GA


Planet Studio - Une agence d’architecture de proximité L’agence Planet Studio est l’agence d’architecture d’Anduze, petite ville considérée comme la Porte des Cévennes. Depuis 3 ans, l’agence est dirigée par Ludovic Martial, architecte HMONP diplomé de l’ENSA-Montpellier. Après 10 ans d’expérience dans différentes agences à Paris et à Montpellier, Ludovic Martial a repris l’agence d’Anduze car il voulait s’installer en Cévennes. Après un petit temps d’adaptation, il est finalement tombé amoureux de cet endroit, bien qu’il trouve que le métier d’architecte soit bien plus compliqué à exercer ici qu’à Paris ou dans l’Ouest de la France, région qu’il connaît bien. Effectivement, ici, les constructeurs et les entreprises générales sont omniprésents - même les maçons s’improvisent chef de chantier-. Il est donc assez compliqué de démontrer le caractère indispensable de l’architecte. L’agence était en plein développement et, en acceptant de collaborer avec elle, je m'engageais donc dans son évolution. L’idée a alors été de me former rapidement pour que je puisse être efficace. En effet, le rythme des agences ne répondant qu’à des projets privés n’est pas le même que celui des agences ne travaillant qu’en marché public. Pour être économiquement viable il faut que chaque employé gère approximativement 6 projets en même temps. Il a donc fallu que je m’adapte à un tout nouvel environnement de travail qui était totalement différent de mes expériences précédentes, que ce soit à l’Atelier GA comme durant les stages de Licence et de Master. Mais cette expérience d’un an m’a permis d’être confrontée à de multiples situations qui m’ont donné l’occasion d’apprécier le métier d’architecte dans tout son spectre : du conseil (en structure, en urbanisme et même en droit) à la gestion de chantier dans son sens large. La gestion de chantier est un point qui accumule beaucoup de différences entre public et privé. En effet, en public l’architecte est rarement seul face à la maîtrise d’ouvrage ou aux entreprises alors qu’en privé, les responsabilités ne sont pas partagées, l’architecte est seul face aux clients - s’il a de la chance il peut compter sur de bons artisans porteurs de solutions mais si ce n'est pas le cas, il est totalement seul - .

23


Le travail sur l’existant un secteur très porteur en milieu rural Avec la forte urbanisation du littoral, la pénurie de logements et les prix du marché qui explosent en ville, les milieux ruraux font alors figure d’Eldorado : on rach ète des habitats de charme pour les restaurer, on agrandi son chez soi.... L’intervention de l’architecte devient alors incontournable pour donner du cachet au bâtiment existant. E-C 1 : REVOL - Extension d’une maison de type ‘constructeur’ Le projet d’extension pour Mr et Mme Revol a été le tout premier projet que j’ai abordé à l’agence. Il a été source de beaucoup de premières fois. En effet, c’est sur ce projet que j’ai fait mes armes et appris à chiffrer des lots, respecter un budget très serré, suivre un chantier en totale autonomie (bien qu’accompagnée de l’oeil bienveillant du conducteur de travaux de l’agence). Ce projet mené de A à Z a été source de beaucoup de rebondissements et donc d’apprentissages. Le premier a été de gérer une clientèle privée extrêmement exigeante. Ainsi, il a fallu leur apporter une réelle valeur ajoutée, celle de l’architecte, tout en respectant un budget restreint. Le second a été de gérer une équipe de maîtrise d’oeuvre avec des artisans. Ceci a été LA grosse différence observée entre marché public et marché privé. En effet, en marché public, les entreprises sont, en général, de grosses entreprises qui maitrisent leurs détails d’EXE et qui sont pour la plupart réactives car elles se concentrent sur les chantiers publics et ne multiplient pas les petits chantiers. Par contre en privé, les artisans ne fournissent pratiquement aucun détail d'EXE, les détails se règlent en réunion de chantier, sur place et non derrière un bureau bien confortable - les EXE sont alors dus par l’architecte qui doit avoir une maîtrise technique assez poussée - ; les délais, eux, varient en fonction de la météo et du calendrier de chacun ce qui amène à des périodes de chantier bien plus longues qu’en chantier public. E-C 2 : PHIFRALO et GERSCHHEIMER - Rénovation d’un Mas La région des Cévennes compte un grand nombre de Mas laissés à l’abandon. Cet immobilier de charme représente aujourd’hui une grande partie du fond de commerce de la région. En effet, il attire étrangers et/ou citadins avec pour objectif un retour aux sources rimant avec changement de vie. En général la mission de l’architecte sur ce type de projet se


limite au dépôt de permis de construire des fois assortie d'une mission d’EXE car les clients pratiquent beaucoup l’auto-construction pour limiter les frais de rénovation et donc maintenir un budget souvent serré pour ce type de projet. E-C 3 : BEINER - Réaménagement intérieur d’une bâtisse de village Pour les agences d’architecture qui se limitent aux prestations de marché privé, l’architecture d’intérieure est une option non négligeable qui, bien souvent, est plus lucrative que la mission d’architecte classique. Ce projet, dans la même veine que la réhabilitation du bâti ancien, visait à la rénovation intérieure d’une ancienne maison de village. L'objectif était d'agrandir l’espace d’accueil du bar en y créant une petite salle des fêtes et un dortoir pour donner un point de chute aux motards s’arrêtant dans ce même café. Ce projet a donné lieu à un relevé du bâti indispensable quand le projet se déroule dans un cadre existant et d’un rendu d’inspiration et d’images abouties des nouveaux espaces.

25


Le tourisme, l’autre secteur porteur « Le tourisme rural représente près d'un tiers de la fréquentation touristique française. La campagne bénéficie aujourd’hui d’une image positive et devient une destination privilégiée pour les courts séjours. Elle incarne un art de vivre et des valeurs identitaires qui nourrissent l’imaginaire des visiteurs autant que la diversité de ses paysages, patrimoines, savoir-faire et traditions. Offrir un accueil et des prestations de qualité est le principal objectif des collectivités qui misent sur l’organisation d’événements, la mise en valeur des sites, les mobilités douces pour renforcer la dynamique touristique et la notoriété de leur territoire. La reconnaissance de la destination Campagne est fondée sur sa singularité, la qualité et la diversité de son offre. Face aux nouvelles attentes et exigences des clientèles, le développement d’une offre écotouristique devient un atout incontestable. » 10

E-C 1 : DUPRAT - Des gîtes écologiques pour miser sur le tourisme haut de gamme Comme évoqué précédemment, le tourisme est un des moteurs de l’économie dans les Cévennes et particulièrement le tourisme “vert” qui renvoie à une page forte de l’histoire des Cévennes : les hippies. Pour l'’architecte, le tourisme est aussi synonyme de chiffre d’affaire car cela ouvre les portes à de nombreuses réflexions comme ce projet de gîtes écologiques à Anduze. Cette mission a donné lieu à un permis de construire pour des éco-lodges d'une totalité de 320m2 SDP et à une mission d’EXE partiel que j’ai menée en autonomie.

Ces deux expériences m’ont permis de comparer différentes gestion d’agence afin de me faire une opinion. Aujourd’hui, être une très petite agence en architecture est une situation assez instable. Miser seulement sur le marché public ou privé est dangereux. En effet les marchés publics sont plus stables que les marchés privés et rapportent plus, mais ils sont soumis à une forte concurrence et à une certaine restriction budgétaire de la part des 10Extrait de l’article du 08/08/2018 vu sur www.entreprises.gouv.fr/tourisme/tourisme-rural


politiques publiques. Il est donc difficile de survivre seul quand on est extrêmement spécialisé comme l’est l’Atelier GA. Le GIE formé via l’Atelier Méditerranéen prend donc tout son sens dans cette situation. Ainsi, les groupements entre architectes ou entre différents corps de métier paraît être une chose inévitable, tout comme la diversification des compétences et des marchés : il faut miser à la fois sur des projets publics et privés et tenter de se diversifier au maximum dans les programmes pour espérer se constituer un fond de roulement stable.

Anduze – Eco-lodge Duprat – Planet Studio

27


Partie 2 : L’exercice de la profession en milieu rural - RE-INVENTER son métier a/ L’architecture en milieu rural une approche particulière Pour ma première pratique professionnelle je recherchais un certain dépaysement. Ceci passait par un changement d’environnement. C’est pourquoi, j’ai accepté de quitter la ville pour venir exercer en milieu rural et ainsi découvrir une autre forme d’architecture que j’espérais plus contextualisée, respectueuse de son environnement et du paysage. Les Cévennes étaient pour moi une région particulièrement intéressante du fait de ses caractéristiques géographiques mais également du fort attachement de ses habitants à leur environnement et leur patrimoine, ce qui promettait de nombreuses rencontres enrichissantes et un joli travail avec et sur l’existant. Nous allons tenter de faire le portrait de cette région haute en couleur en abordant ses particularités, ses problématiques, les dynamiques qui la rendent vivante et donc finalement, décrire l’environnement de l’architecte en milieu rural. « En France, l’attractivité des espaces ruraux n’est plus à démontrer. Cadre de vie, proximité avec la nature, lieu d’épanouissement et de sociabilité, antidote à la ville : la campagne traduit une évolution inédite du style de vie de nombreux individus et de leur rapport à l’espace (…) La campagne en tant que domaine dédié à la seule activité agricole ou lieu d’inscription de la société rurale a disparu ; elle est désormais un espace aux multiples usages, où des individus travaillent, habitent et se détendent tout en tissant continuellement des liens avec une diversité de territoires. » INRA 11.

11Manifeste commun pour le défense des Nouvelles ruralités (département de l’Allier, du Cher, de la creuse et de la Nièvre)


Les territoires ruraux en plein essor Avec la crise du logement et de l’emploi, les territoires ruraux offrent un espoir pour une nouvelle vie, différente et bien plus attachée à des valeurs simples basées sur la proximité avec la nature. Ainsi, de plus en plus de citadins se laissent séduire par la campagne, ce qui rend ce territoire de plus en plus attractif. On observe donc une réurbanisation des milieux ruraux qui engendrent de nombreux conflits territoriaux mais aussi sociaux et créé de nouveaux enjeux urbains et architecturaux. En effet, certains départements font de la ruralité leur priorité en réfléchissant à un maillage plus fin des villes moyennes et des campagnes. Les acteurs du monde rural jouent alors un rôle très important dans cette nouvelle redistribution territoriale. Présentation : - Le Maire qui établit le pont entre pouvoir public et administrés. En général élu pour sa personnalité et non pas pour ses idées politiques, il dispose souvent d’un grand champ d’action pour impulser de nouvelles dynamiques urbaines et faire de sa commune un point central. Anduze et sa gestion en est un exemple frappant. Depuis une petite décennie, le Maire accomplit un travail de longue haleine pour donner à sa commune une place centrale dans les enjeux urbains des Cévennes. Ce travail porte ses fruits puisque, depuis quelques années Anduze est devenue un endroit incontournable et finalement bien plus agréable, accueillant et dynamique que la ville voisine, Alès. Nous pouvons parler aussi de St Jean du Gard qui, à contrario, depuis les dernières élections communales est entrain de sombrer dans un obscurantisme faisant perdre toute attractivité au village qui était pourtant un des principal concurrent de la commune d’Anduze. - Le PLU devient alors un outil au service de l’urbanisme mis en place par les mairies. Il dessine l’orientation urbaine que la commune veut adopter. Il permet souvent une redynamisation des bourgs et communes rurales tout en participant à l’entretien des paysages, à l’amélioration des conditions de vie, à l’accroissement de l’économie rurale et au maintien des populations dans l’arrière-pays. En effet, aujourd’hui, tous les PLU ont tendances à verrouiller leurs espaces périphériques pour limiter le mitage du paysage et 29


ainsi redynamiser leur centre dans l’espoir de se créer un réseau de proximité (administratif et/ou commercial). Mais ces PLU sont des documents administratifs lourds qui ne changent pas facilement ni rapidement et sont soumis à consultation publique. Ils ne symbolisent donc pas forcément les tendances actuelles. De plus, en campagne les PLU se font plus rares et c’est alors le RNU qui est utilisé. Le RNU, document passe partout, ne défend pas une volonté urbaine forte et contextualisée. Qui plus est, depuis la création des agglomérations, les Permis de Construire et demandes d’urbanisme en tous genres sont souvent traitées par les communautés d’agglomération qui sont, elles, totalement détachées des proximités et des liens affects que l’on retrouve en campagne. D’ailleurs, cela amène souvent à des incompréhensions au moment des demandes complémentaires ou des refus. - Les CAUE avec les architectes conseils et les Conseillers des Parcs Nationaux, eux, influent d’une autre manière sur la protection du paysage grâce à des missions de sensibilisation et d’information pour faire évoluer les mentalités des habitants mais aussi des acteurs urbains comme les communes. Ils défendent le paysage rural tout en essayant de ne pas le muséifier pour le rendre attractif. - Les Architectes des Bâtiments de France occupent également une place centrale dans le Gard. En effet, de nombreux quartiers et villages sont concernés par les zonages de protections (ZPPAUP et autres). En général mal compris, mal acceptés et même peu défendus, même au sein des professionnels, les décisions des ABF tendent à muséifier certains centres bourgs et font fuir beaucoup d’investisseurs et de nouveaux habitants. - Les habitants peuvent eux aussi être moteurs de nouvelles initiatives avec la création d’éco-hameaux, d’espace partagés de proximités relançant une vie sociale un peu laissée à l’abandon dans les endroits les plus reculés. Ces initiatives sont en général basées sur l’auto-construction, l’auto-gestion et des modes de vie alternatifs. - Les architectes sont les acteurs les plus à même de protéger les paysages des espaces ruraux d’une part, par leur engagement éthique et professionnel et d’autre part grâce à leurs idées novatrices et leur vision plus globale mais proche des réalités du terrain. Ainsi, l’acte de construire pour l’architecte devrait rester central. Malheureusement la


profession souffre toujours d’une image élitiste et peu de particuliers osent venir demander les services d’un architecte qui est alors remplacé le plus souvent par les constructeurs et les entreprises TCE. En effet, la question du budget est souvent la grande problématique quand on parle de marché privé et, s'octroyer les services d’un architecte a un coût, certes que nous, en tant que professionnels, défendrons au titre d’une conception et réalisation de qualité, mais qui ne trouve pas forcément écho dans la population. Finalement, en milieu rural, il est de plus en plus difficile pour l’architecte d’accéder au chantier. L’architecte est assimilé à une aide à la conception, à une aide indispensable au montage des dossiers de permis de construire qui sont de plus en plus complexes et non pas à une aide de technicien. La profession souffre encore de son image d’artiste déluré n’ayant pas les pieds sur terre, concevant des projets extrêmement coûteux. Au cours de ces deux années de pratique au sein d’agences d’architecture implantées en milieu rural, j’ai pu échanger avec les différents acteurs susnommés. Ainsi, j’ai pu apprécier le rôle de chacun et me rendre compte de certains dysfonctionnements dans la logique d’application de leurs compétences. Pour prendre un exemple concret, durant ma période de travail chez Planet Studio, j’ai participé à un projet de maison à St Jean du Gard. St Jean du Gard étant en zone Natura 2000 « habiter », nous avons du remplir, au moment de la demande de permis de construire, un dossier concernant l’impact du projet sur son environnement. Je me suis personnellement chargée de la mise en place de ce dossier. J’ai donc du prendre rendez vous avec les clients au bureau de l’animatrice du site de la vallée du Gardon. Les clients n’ont pas du tout compris en quoi cette démarche consistait car le formulaire est très général et accompagné d’une certaine lourdeur administrative. Ainsi, les clients, bien que très ouverts à ce type de démarche, n’ont pas compris l’utilité de cette classification du site en zone Natura 2000 et l’utilité du dossier. Cette complexité administrative dessert finalement un des objectifs principaux pour lesquels ces zones Natura 2000 ont été instaurées.

31


Une affaire de proximité La proximité est une revendication contemporaine. L’offre commerciale cherche à se rapprocher de la demande, que ce soit par une proximité physique comme technologique (via internet et les différents réseaux sociaux qui sont devenus prépondérants dans l’acquisition de nouveaux marchés). Ainsi, un service se doit aujourd’hui d’être de proximité. C’est pourquoi, on voit émerger cette problématique même en architecture. Parler de proximité revient d’abord à considérer la notion d’éloignement physique, géographique. Ainsi, la proximité se caractérise par une faible distance entre un point A et un point B. Aujourd’hui, les architectes sont mal répartis sur le territoire et on note que la pratique de l’architecture en milieu rural est plus rare qu’en ville. Cette situtation favorise aussi un milieu moins concurrentiel en milieu rural. La proximité géographique n’est donc pas la caractéristique première que retient la Maîtrise d’Ouvrage lors de son choix d’une Maîtrise d’Oeuvre. En effet, au vu de l’étendue de la zone que doit couvrir chaque architecte pour répondre aux différentes demandes - moins d’architectes au m2 mais aussi moins de clients, il faut donc étendre son champ d’action pour pouvoir survivre - on ne s’attend pas obligatoirement à ce que l’architecte soit notre voisin comme on pourrait l’espérer d’une boulangerie. La proximité est alors un lien plus abstrait qui se tisse entre l’architecte et son client. Elle passe par un champ d’action plus étendu. Par exemple, quand on vient du milieu rural ou que le projet se trouve en milieu rural, on consulte en général un architecte venant du milieu rural et non pas de la ville dans l’espoir de retrouver une proximité de situation et d’approche. Le champs d’action profite également d’une notion de capacités professionnelles. Ainsi, en milieu rural, quand l’architecte est choisi pour effectuer une mission complète, il reprend une place centrale en étant considéré comme le pilier du projet. Il devient alors la personne de confiance à laquelle on se confie dans l’espoir qu’il réponde parfaitement à toutes nos attentes, au delà même de la simple architecture, grâce à une mission de conseil très approfondie. Lorsque l'on parle de proximité on parle aussi d’accessibilité et de disponibilité immédiate du service. Finalement, cela revient à parler d’un lien plus abstrait entre offre et demande.


Le développement de certaines agences d’architecture va dans ce sens grâce à une dématérialisation du service via internet et même certains petits logiciels de conception permettant un visuel instantané des envies et du programme des clients. Je pense que dans un avenir proche, les agences d’architecture devront toutes approfondir cette notion d’immédiateté dans le service car c’est un critère de choix central : le client veut tout et tout de suite. L’architecte devra donc adapter sa méthodologie sans pour autant en faire pâtir la qualité de son travail. L’architecture de proximité, peut, quant à elle, être définie par le re-positionnement de l’usager au coeur de la réflexion architecturale. De mon point de vue, cette définition n’a que peu de sens car l’architecture ne devrait pas s’être éloignée des problématiques d’usage. Ainsi dans tous projets, l’architecte devrait reconsidérer ses principes et ses concepts en fonction des personnes qui vont utiliser le lieu. Aujourd’hui, les collectifs d’architecture visent à cette pratique via l’engagement de jeunes architectes en mal de lien avec le grand public mais aussi grâce à des architectes engagés qui veulent donner un nouveau sens à leur pratique. En marché public, cela revient à animer des réunions avec les usagers pour permettre d’adapter son concept aux différents besoins. J’ai pu participer et même organiser ce type de réunion durant la période où je travaillais à l’Atelier GA : - A Juvignac tout d’abord, une réunion a été organisée à la livraison de l’école Mandela de façon à permettre à la maîtrise d’oeuvre d’expliquer le bâtiment aux usagers et de recueillir les retours des enseignants et parents d’élèves dans l’optique d’améliorer l’école mais aussi de faire évoluer notre conception

pour que nos

futurs

projets

s'améliorent - Aux Pennes-Mirabeaux ensuite, où j’ai pu organiser et mener des réunions avec les futurs enseignants et intervenants de l’école pour la conception du lot mobilier. En fonction de leur retour, j’ai pu faire évoluer la conception et ainsi avoir l'assurance de penser un mobilier qui correspondent aux besoins. Le lot mobilier était une prestation en option qui a finalement été validée par le maitrise d’ouvrage grâce à notre persévérance sur la conception en accord avec les besoins de tous. Finalement, l’architecture est également confrontée à cette problématique de proximité de par sa réputation. La profession est vue comme élitiste, et donc pas forcément accessible à tous les budgets. C’est donc un des nouveaux et nombreux combats des 33


architectes : se rapprocher de la population pour reconquérir la place qu’ils ont laissés il y a quelques années aux constructeurs. En effet, on constate qu’à l'heure actuelle de nombreuses personnes préfèrent se passer de nos services en raison d’une désinformation associant le service de l’architecte à une population aisée. Ainsi, les gens préfèrent réaliser leurs travaux eux même ou mandatent le maçon, personnage central dans chaque chantier et souvent digne de confiance, comme gestionnaire de la bonne conduite des travaux. Cette pratique est très répandue en campagne où le bouche à oreille et les relations de confiances sont encore

primordiales.

De plus, comme nous l’avons

évoqué en

introduction, la principale source d’emploi dans les campagnes se trouve être l’artisanat. Quand on habite en campagne il est donc très courant d’avoir des contacts de professionnels dans le bâtiment. Ce réseau personnel permet alors de facilement créer sa petite équipe de maîtrise d’oeuvre de confiance et donc s’assurer un chantier sans trop de problème tout en se passant d’un professionnel comme l’architecte chapeautant le chantier.


b/ La (re) construction du paysage au coeur de la pratique “ L’habitant de pavillon n’est pas le meilleur ami du professionnel de la ville. L’urbaniste et l’architecte regardent généralement de haut ce mauvais plaisant, avec ses stupides envies de maisonnette qui nous abîment le paysage. S’il n’existait pas, celui-là, nos villes ne seraient pas couvertes de lotissements. Quelle plaie. On entend souvent des propos de ce genre dans les métiers de la fabrication urbaine. Face à ces Français qui rêvent à 91% de maison individuelle - et qui, dans 57% des cas en habitent une -, c’est l’accablement des spécialistes. Et le désintérêt. Architectes et urbanistes abandonnent ces arriérés à leur mauvais goût tout en se lamentant sur «l’étalement urbain», marées pavillonnaires qui grignotent les champs autour des cités. (...) La bienveillance, qualité des bons architectes “

12

Face aux mutations rapides et récentes du monde rural plusieurs problématiques sont soulevées dont celle de la préservation du paysage : faire valoir de ces milieux naturels et touristiques. La campagne comprise entre une ruralité héritée et une urbanité diffuse soulève parfois des tensions entre anciens et nouveaux habitants. Les conflits d’usage sont nombreux : campagne agricole, campagne touristique, campagne cadre de vie, campagne naturelle, campagne traditionnelle : autant de compréhensions d’usage qui sont source de discorde. Ainsi, l’étalement urbain et la nouvelle forme que revêt la ville en s’étendant, ville diffuse et consommatrice, sont très critiqués et les habitats pavillonnaires qui les constituent sont largement pointés du doigt. En effet, ce phénomène maximise la compétition foncière avec les activités déjà présentes et notamment avec l’agriculture en raison de l’artificialisation des sols. Aussi, il engendre également de nombreuses problématiques comme le manque d’équipements de proximité, le manque de vie sociale et culturelle, la prédominance de la voiture, la mauvaise utilisation des sols, et plus généralement le réchauffement climatique . Autant de sujets malheureusement encore d’actualité mais que nous aimerions voir appartenir au XXe plutôt qu’au XXIe siècle.

12Hissez les pavillons ! Libération 09/07/2011 Sybille Vincendon

35


Aujourd’hui, bon nombre d’acteurs engagés que nous avons présentés précédemment luttent contre ces habitats pavillonnaires et militent pour une urbanisation raisonnée en accord avec le paysage et une architecture contextualisée. En effet, construire en milieu rural c’est souvent devoir s’intégrer à un paysage hors du commun, à une histoire modeste mais faite de savoirs-faire locaux et de matière. L’innovation est toutefois permise mais elle doit s’inscrire dans le respect des traditions. Le concours du Groupe Scolaire d’Aguessac que j’ai pu commencer avec l’Atelier GA est un bon exemple qui illustre l’engagement des collectivités notamment dans la préservation du patrimoine rural et du paysage. Tous les documents du concours étaient orientés de façon à pousser les différents concurrents à penser une architecture bio-sourcée, bio-climatique et respectant le paysage grâce à son intégration, tout en imposant de viser une qualité architecturale labelisée BDM Or. L’adresse du tailleur de pierre et de la scierie étaient même indiquée de façon à que l’on puisse se rapprocher d’eux pour penser notre projet. Malheureusement, malgré les différentes réglementations urbaines, l’architecture privée échappe au contrôle de ces collectivités et on assiste alors à la construction toujours plus intensive de lotissements qui transforment de façon brutale et durable les abords des villages ruraux. Cette problématique ne date pas d’aujourd’hui mais des années 70 et ne fait que s'amplifier. Aujourd’hui le problème dépasse les critiques d’ordre esthétique pour tirer la sonnette d’alarme sur la qualité urbaine que les lotissements donnent à nos campagnes. En effet, il est le premier exemple de la transformation de l’espace rural en espace résidentiel et, bien que beaucoup pensent que les lotissements sont une manne pour ces zones délaissées car ils entraînent son repeuplement, ils ont des effets néfastes bien pire que le dépeuplement. Le lotissement est une opération foncière qui n’a rien à voir avec le processus centenaire d’urbanisation des zones rurales. Cette modification du paysage urbain mais aussi social entraîne des conflits. Une nouvelle identité villageoise naît de l'existence ces habitants des nouveaux quartiers et celle-ci est en conflit avec l’identité ancestrale. Par ailleurs, le phénomène de lotissement dépasse le phénomène plus ancien de mitage urbain car il créé de nouveaux quartiers, de nouveaux pôles d’habitat qui ne s’organisent pas autour d’un pôle d’activité ou d’une attraction urbaine locale mais bien au beau milieu de nulle part. Ils participent alors à l’explosion des petits points d’attractivité locaux qui


résistaient encore à l’intérieur des villages ruraux au profit des pôles d’attractions plus lointains desservis par la voiture. “ Dans les petites communes rurales plus lointaines, ou la pression est moindre, les nouvelles maisons, d’une architecture quelconque, s’implantent de façon aléatoire le long de rues existantes, entraînant un grand gaspillage d’espace, et une négation de la qualité patrimoniale des villages ou hameau. Les coeurs historiques des villages sont souvent peu soignés et beaucoup de maisons anciennes sont laissées à l’abandon. La qualité architecturale et paysagère des petits villages de France s’affaiblit massivement. C’est donc un patrimoine dont nous sommes apparemment fier qui s’en va ”13 Les PLU, pour les communes qui en disposent, tentent aujourd’hui de maîtriser le phénomène. L’architecte doit également prendre ses responsabilités et sa place pour contrer l’expansion des habitats individuels sans valeur architecturale. C’est pourquoi je pense qu’il est urgent de revoir notre approche. Je défends donc corps et âme les petites agences comme Planet Studio. Dans une démarche de proximité et de générosité, Ludovic Martial a repris l’agence d’architecture d’Anduze pour continuer à tenter de contrer le phénomène des constructeurs et offrir des prestations architecturales de qualité même aux plus petits budgets. Bien qu'elle ne se cantonne pas seulement aux projets de Maisons, cette agence en a fait sa spécialité et apporte une réelle plus-value à tout client venant lui proposer un projet. Nous pourrions parler de la maison MeTall à Sauve dont j’ai pu observer la fin de phase chantier : au milieu d’un tissu urbain d’habitat individuel de constructeurs, l’architecte Ludovic Martial, voulait une maison qui s’intègre parfaitement au paysage environnant fait de vallons et de champs d’oliviers. Cette maison sur deux étages en ossature métallique reprend la forme des maisons à toiture deux pentes environnantes et joue la carte de la transparence maximum au rez de chaussée pour faire disparaître l’ancrage au sol du bâti. Au rendu: l’impression d’une cabane suspendue dans les arbres et cela pour un prix défiant toute concurrence. Finalement le geste architectural est un investissement qui peut permettre au client de faire des économies assez rapidement. 13Comment agir sur l’urbanisation en milieu rural : Le cas du parc Naturel régional des Ballons des Vosges - François Tacquard DAT Conseil

37


Maison MeTall –Sauve (30) – PlanetStudio 170m2 SDP / 145000 euros HT


La qualité plutôt que la quantité Dans tous les domaines, l’avis général préconise de privilégier la qualité. La qualité est toujours, de maniere plus ou moins explicite, opposee à la quantite, notions qui sont toutes deux liées à celle du couu t et de la valeur, abordee de maniere plus ou moins normative ou reflexive. Dans les operations architecturales et urbaines, elle est tout particulierement en vogue actuellement. Pour autant, son evaluation apparait particulierement complexe et difficile tant les variables à considerer sont nombreuses et disparates. Ici nous définirons la qualité plutôt dans un sens d’optimisation du ratio coût/bénéfice. Ainsi, la nouvelle mode est à la polyvalence des espaces, à la création de lieux multi-usages pour amortir les coûts de fonctionnement des bâtiments. On retrouve beaucoup de nouveaux concepts innovants testés dans les grandes métropoles où l’espace manque et le prix du mètre carré s’envole. Mais la création et l’innovation architecturales ne sont pas réservées aux seules métropoles, elles sont aussi un enjeu dans le processus de revitalisation rurale. Réinventer des usages, combiner ou coordonner des fonctions, ces nouveaux lieux poursuivent un même objectif : régénérer le lien social. Cette dimension multifonctionnelle revêt une importance particulière d'autant plus que les moyens financiers des communes et la démographie moins importants qu’en ville engendrent une architecture bien plus frugale. Les réflexions tendent alors vers des programmes bien plus flexibles et adaptables pour créer des lieux d’activités dynamiques tout au long de la journée et de l’année. L’objectif étant de créer de nouveaux pôles porteurs dans le village et les communautés de communes pour redynamiser tout un secteur en perte de vitesse. Nous pouvons prendre l’exemple d’un projet de l’atelier GA datant de 2015 : la Salle Polyvalente de La Fage Saint-Julien en Lozère qui ,grâce à une grande salle modulable (pouvant être divisée en plusieurs petites salles) accueillant aussi les services techniques de la mairie (maintenance, stockage et garage), fait revivre un petit village lozérien. Cette salle est en effet louée pratiquement tous les week-ends pour des événements familiaux et en semaine, elle est utilisée par les différentes associations du village qui profitent de ce lieu unique, offrant une vue magnifique sur le paysage, en proposant de nouvelles activités.

39


Partie 3: Rénovation et extension - RE-INVENTER un lieu a/ La rénovation du bâti un enjeux de société 2 exemples avec le projet MIREIO et le Réaménagement d’un Mas à Boisset et Gaujac Maîtrise d’ouvrage et Maitrise d’Oeuvre : Consortium MIREIO Programme : Prototype pour la réhabilitation d’épaves énergétiques Lieu : Castelnau le Lez, 34170 Surface du projet: 1.200m2 Budget : NC Missions : Mission Complète Phases abordées : APD/PRO Livraison : NC Le consortium d’entreprise à l’initiative de ce projet est constitué par plusieurs corps de métier du bâtiment dont un architecte, Stéphane Goasmat. MIREIO 1 se veut être le prototype à échelle 1:1 du procédé développé par le consortium pour la réhabilitation des épaves énergétiques. Quand je suis arrivée à l’agence, le Permis de Construire allait être déposé mais il fallait poursuivre la réflexion de manière plus détaillée, techniquement mais aussi

développer son montage

commercial. Ce bâtiment prototype allait accueillir les bureaux du consortium mais également d’autres bureaux pour des entreprises innovantes ainsi qu'une micro-crèche. Il fallait donc trouver de potentiels locataires pour les intégrer à la réflexion de façon à transformer ce bâtiment de telle manière qu'il puisse correspondre à chacun et le faire revivre. Aujourd’hui de nombreux bâtiments de bureaux sont vides car non adaptés aux nouveaux usages du travail mais aussi non adaptés aux enjeux thermiques actuels, ce qui engendre des coûts d’exploitation exorbitants. Le projet MIREIO a pour objectif de faire évoluer cette situation en rénovant la ville dans une optique de développement durable. Nous avons donc organisé plusieurs rendez-vous avec différents potentiels locataires, que nous avons ensuite sélectionnés de façon à faire avancer le projet. Ces rendez vous ont été synonyme d’échange et de grand apprentissage en matière des besoins de chacun en fonction des futurs usages du bâtiment.


Après ces différents rendez vous, j’ai été chargée de faire évoluer les plans et leur donner plus de détails. Le principe de cette rénovation tourne autour du réaménagement intérieur du bâti mais aussi de toute son enveloppe avec la pose de panneaux préfabriqués en extérieur de façon à isoler le bâtiment de manière très efficace. Afin de pouvoir imaginer ces panneaux préfabriqués, il fallait avoir des mesures extrêmement précises de l'ossature existante du bâtiment. C’est pourquoi un relevé par point via drône a été mis en oeuvre. Je travaillais également sur les espaces extérieurs avec pour objectif de minimiser les surfaces d’enrobé et dessiner plus d’espaces plantés afin de rendre les zones de parking moins imperméables et limiter l’albédo. Ce travail sur les extérieurs m'a également conduit à retravailler l’auvent métallique qui permettait d’amener de l’ombre sur les façades et les coursives de circulation extérieures. Cet auvent métallique accueillait une structure permettant de faire pousser de la végétation, toujours dans une logique de développement durable. La R&D en architecture L’expérimentation en architecture est peu commune et est en générale réservée aux grands projets d’architectes renommés ayant le pouvoir d’imposer de la recherche et développement à la maîtrise d’ouvrage. Ce projet était donc pour moi particulièrement intéressant car il m’a fait découvrir une autre facette de l’architecture. Bien entendu, il était calé et codifié en fonction de la loi MOP comme tous les autres projets de maîtrise d’oeuvre mais il y ajoutait cette possibilité d’évolution et d’invention. Je pense que c’est une réelle nécessité en architecture d'avoir la possibilité d'intégrer plus facilement la recherche grandeur nature sur les bâtiments, afin d'accélérer la construction de la ville et son évolution et ainsi répondre au mieux aux besoins actuels. La question est alors d’intégrer l’architecte à ce processus. En effet, durant ce projet, l’architecte, Stéphane Goasmat était mis au second plan car il n’était pas le chercheur et donc le technicien du projet. Dans le consortium, il était finalement la personne avec le moins de connaissance sur le sujet concerné. En effet, on demande aux architectes d’avoir des connaissances sur une multitude de sujet, ce qui ne permet pas une connaissance technique poussée sur chacun des sujets. L’architecte ne fait alors plus le poids face aux chercheurs et acteurs spécialisés dans le domaine concerné et peut alors être vite relégué au statut de signataire.

41


Dans ce type d'organisation de projet, il faut donc veiller à que l’architecte prenne aussi une place de gestionnaire de chantier. Il doit entièrement faire partie de la réflexion pour intégrer le projet globalement à la ville et à ses enjeux.


Maîtrise d’ouvrage : SCI Phifralo Programme : Réhabilitation d’un Mas Lieu : Boisset et Gaujac, 30140 Surface du projet: 250 m2 Budget : 200.000 € Missions : Mission Partielle / ESQ-PC-EXE Phases abordées : ESQ-PC-EXE

Un groupe d’amis a contacté l’Agence Planet Studio dans le but de s’entourer d’un professionnel à même de les conseiller sur son projet très complexe de rénovation. Etant déjà très bricoleurs et assistés d’un maçon, ils cherchaient plus particulièrement des idées pour réaménager de façon intelligente le Mas plutôt qu’un technicien aguerri qui mèneraient le chantier. Ce Mas était particulier. Il était constitué de deux parties bien distinctes reliées par une sorte de cage d’escalier ouverte aux quatre vents. Seul le RDC du premier bloc avait été aménagé de façon à être habitable, le reste n’était que dépendances et granges. Il fallait donc réfléchir à comment distribuer les pièces de façon à organiser pour chacun des futurs habitants des espaces privatifs, tout en assemblant les deux parties du Mas. Les clients allaient habiter ce Mas en tant que résidence secondaire et voulaient pouvoir accueillir le maximum de personnes. Il leur fallait donc deux chambres bien définies pour chacun des couples mais le reste devait pouvoir être adaptable et potentiellement utilisé comme dortoir. Je leur proposai donc en premier lieu plusieurs organisations schématiques de façon à comprendre réellement leurs besoins qu’ils n’étaient pas parvenus à bien définir dès le début. Une fois que le choix d’organisation fut figé, je commençai à tracer les plans et les façades de façon à répondre à leurs exigences tout en les conseillant d'un point de vue réglementaire compte tenu du PLU plutôt restrictif de la commune. Je proposai donc des extensions en bois qui se marieraient parfaitement avec l’ancien tout en ne prédominant pas sur l’existant: les différentes époques de chaque intervention sur le mas resteraient visibles. Une première extension fut dessinée pour fermer la cage d’escalier et la rendre hors eau, hors air. Une deuxième extension fut pensée pour créer un pool house pour la future piscine et une troisième extension consistait en un agrandissement pour accueillir un atelier de poterie qui servirait à l’un des client en particulier. Ces extensions prenaient un vocabulaire plus moderne avec des ouvertures plus

43


grandes pour apporter de la lumière tout en permettant de profiter du paysage. Pour le reste, la structure du mas fut peu modifiée, seule 3 fenêtres furent agrandies pour amener plus de luminosité dans les pièces. La mission s’étendait aussi à de l’architecture d’intérieur avec l’aménagement entier des granges et différentes dépendances. Je m’attellai donc à leur proposer des solutions économiques et faciles à mettre en oeuvre pour réorganiser les volumes. Un home cinéma agrandi d’une salle de jeu sur filet fut proposé pour l’étage en mezzanine du deuxième bloc. Un immense salon/ salle à manger divisible en plusieurs espaces fut aussi organisé de façon à relier les deux blocs constituant le mas. Ainsi, les espaces devenaient de plus en plus ludiques et modulables. L’étage du premier bloc, lui, restait simple avec des chambres et des salles d’eau pour tout le monde. Après la dépose du permis, qui fut plus laborieuse que prévue du fait de l'absence de coopération des services d’urbanisme qui considéraient le projet un peu trop moderne pour le lieu - bien que la demande rentre dans la réglementation imposée par le PLU - nous commençâmes à travailler plus en détail sur le projet de façon à rendre possible tout ce que nous avions dessiné. Les clients avaient un budget très serré mais voulaient pouvoir faire le maximum de chose eux même. Finalement, ils optèrent pour un bardage bois sur agglo plutôt que des extensions en ossature bois qu’ils ne s'imaginaient pas pouvoir mettre en oeuvre seuls. Ce fut donc avec grande tristesse que je vis le projet se détricoter peu à peu au profit d’une praticité de mise en oeuvre pour des non professionnels et une maîtrise du budget. La question du budget dans les projets sur existants est souvent épineuse car il est très difficile d’estimer le travail à accomplir : nous ne sommes jamais à l’abri de mauvaises surprises. Il est vrai que la MAF, dans le cadre de mission sur existant, conseille l’intervention d'un bureau technique avant même l’étape de l’esquisse pour permettre de vérifier la solidité de l’ouvrage existant. Mais ces tests ne peuvent se faire sans prélèvement ce qui peut créer une situation très tendue si l’expert est amené à donner un avis défavorable pour tous travaux de construction sur l’existant. Dans une telle situation, il laisse en effet un bien non exploitable plein de trous et des clients m écontents ayant déboursés une somme d’argent importante en pure perte. Dans notre cas, le BE technique c’est exprimé après la phase esquisse pour expliciter quelques points qui seraient sûrement problématiques lors du chantier et conseiller sur quelques renforts. Ces


suggestions ont été ajoutées aux plans d’EXE de façon à être suivies par les différents intervenants tout au long du chantier que nous n’étions pas missionné pour suivre. Un regard de technicien Pour les commandes privees de particulier, il ne faut pas perdre de vue que l’architecte s’adresse majoritairement à des non-inities du domaine de la construction. Le rôle de l’architecte et le fait d’y recourir le positionne aussi en tant qu’expert de l’acte de construire. Il est alors de son devoir de donner son avis et de conseiller chaque situation, de souligner les solutions qualitatives, les points qui pourraient poser des difficultés au niveau administratif, réglementaire ou financier. Dans ce projet, pour ne pas être surpris à la fin de la mission, nous aurions dû, avant de défendre nos propositions, les faire estimer afin de ne pas proposer quelques choses qui, finalement, ne correspondait pas aux capacités techniques et financières des clients. En effet, notre roo le dans le projet est d’orienter les choix de la maii trise d’ouvrage vers la meilleure reponse architecturale, tout en ne negligeant pas ses capacités techniques, financières mais aussi le point de vue du client. Il nous faut alors adopter une demarche p édagogique, prendre le temps d’expliquer, défendre, justifier et argumenter ses partis pris. Cette démarche impliquee et investie permet de guider, conseiller, et ainsi de jouer le rôle d’intermediaire entre le client et son projet, en gardant toujours en tête les notions de budget et de faisabilite technique qui doivent être vérifiées au fur et à mesure de l’avancement. La question du langage entre le client et l’architecte est également importante. En effet, le client n’est pas obligatoirement réceptif à la manière de communiquer normalement utilisée par les architectes, à savoir : les plans et les coupes. Il m’est arrivé très souvent de me retrouver face à des clients qui n’arrivaient pas à lire des représentations 2D. Dans une telle situation, les nouvelles technologies peuvent nous être d’un grand

secours : les documents 3D avec des maquettes

numériques interactives et même de plus en plus, la réalité virtuelle peut être un bon moyen de débloquer la situation.

45



b/ L’extension ou comment composer avec l’existant Exemple d’une mission complète d’extension d’une maison à St Bénézet (30)

Maîtrise d’ouvrage : Mr et Mme REVOL Programme : Extension d’une maison d’habitation Lieu : St Bénézet, 30350 Surface du projet: 30m2 Budget : Prévu 35.000€ HT avec les plus values 46.800€ HT Maîtrise d’Oeuvre : Planet Studio Missions : Mission Complète Phases abordées : De l’esquisse à la Réception Livraison : Mai 2019 Ces clients ont fait appel à un architecte dans le but de s’entourer d’une personne de l’art mieux à même de repondre à leur demande mais aussi mieux à même de mener leur projet à bien grâce à une équipe d’artisans de confiance. Proprietaires depuis peu d’une maison construite dans les années 90’, ils avaient pour objectif de la transformer pour en faire leur maison de famille idéale. Le couple, avec ses 3 enfants, accueille régulièrement de la famille et des amis. Leur pièce à vivre n’était donc pas adaptée aux usages qu’ils y consacraient. L’idée était donc d’agrandir cette pièce à vivre grâce à une extension construite sur la terrasse existante et ainsi y mettre la cuisine et la salle à manger (Phase 1). L’emplacement de l’ancienne cuisine deviendrait alors un espace de bureau calme permettant aux enfants de faire leurs devoirs (Phase 2). La maîtrise d’ouvrage avait déjà eu recours à un architecte, il y a quelques années pour la rénovation d’un cabinet médical et l’expérience s’était plutôt mal passée. Nous avions donc une pression supplémentaire pour fournir un travail extrêmement bien ficelé et ainsi gagner leur totale confiance. Ce projet d’extension a été le tout premier projet que l’on m’a confié quand je suis arrivée en Avril 2018 à l’agence Planet Studio. Ludovic Martial, le gérant, avait déjà fait une première visite chez les clients avant mon arrivée. Avec le retard que l’agence avait accumulé au fil du temps, cela faisait plus de 2 mois que le couple attendait une première esquisse. Il était donc urgent de leur présenter une proposition. Ludovic m’avait prévenu que le budget était très serré (35.000 € HT pour 30m2 d’extension) et quasi impossible à respecter sauf si miraculeusement la terrasse extérieur était

47


utilisable pour servir de dalle à l’extension. Mais cela était peu probable car, dans tous les cas, tout bon maçon ne veut pas utiliser comme fondation des éléments existants, sauf si ceux ci ont été examinés au préalable par un BET gros oeuvre. Ludovic m’intima donc de leur proposer un projet intelligent et complet sans toutefois prendre en compte le budget dans un premier temps. Il faut dire que cette variable du prix était vraiment nouvelle pour moi. Essayer de respecter un budget si serré dans le cadre d’un projet privé était un travail qui ne m’avait jamais été donné à faire. On me communiqua donc quelques ratio et quelques devis d’autres extensions que l’agence avait pu faire tout en sachant très bien qu’il me serait difficile de chiffrer les postes à l’euro près. Pour proposer un projet intelligent et complet, j’ai tout d’abord analysé les lieux. La maison était une bâtisse maçonnée de type constructeur des années 90’. Elle était construite en plusieurs volumes décalés les uns des autres pour permettre de partitionner les espaces extérieurs et ainsi jouer avec les différents degrés de privacité. L’extension projetée allait donc uniquement rajouter un nouveau volume à l’ensemble. Finalement, si nous respections le style de la maison, cette extension s’intégrerait assez facilement au reste. Je décidai donc de partir sur une proposition d’un volume avec une toiture monopente de 30%, à l’identique des autres volumes de la maison. Cette solution présentait toutefois une difficulté de liaison de toiture entre existant et extension c’est pourquoi je testai différents autres formes de toiture de façon à argumenter chaque proposition face au client. Les clients ne voulaient bien entendu pas que cette extension rende encore plus sombre leur pièce à vivre d’origine, ils désiraient donc un volume au maximum vitré. Ludovic leur avait déjà déconseillé l’option de la serre, car, dans le Sud, ce type d’extension devient vite invivable en été, et au niveau du budget, il est difficile d’avoir quelques chose de bien réalisé pour une somme modique. L’extension allait être orientée plein Ouest. Si nous percions une grande baie vitrée sur cette façade, il faudrait la protéger. Ce volume très simple s’est alors vu prolongé d’une pergola en acier que j’ai dessinée de façon à ce qu’elle apporte quelque chose de moderne et qu’elle puisse à la fois protéger la façade Sud que nous voulions aussi largement ouvrir. Au Nord, la maîtrise d’ouvrage voulaient également une fenêtre assez grande qui leur permettraient de garder un angle de vue sur la piscine pour surveiller les enfants. Je dessinai donc une grande fenêtre bandeau sous laquelle serait installé le plan de travail de la cuisine. Le plan intérieur, pour ce premier jet resta assez simple de façon à que l’on puisse percevoir l’espace que l’extension allait apporter. Après cette première proposition, quelques modifications ont du être apportées pour coller parfaitement aux désirs de nos clients :


-

agrandissement de la baie existante pour agrandir le passage entre extension et existant avec l’ajout d’un IPE comme linteau; ce petit geste permettrait d’amener un peu de modernité dans le style de l’extension,

-

création d’une allège / passe plat pour fermer la baie vitrée de l’ancienne cuisine et ainsi permettre d’installer une cuisine en angle

-

agrandissement de certaines baies

Toutes ces modifications allaient avoir un coût non négligeable. Je convoquai donc la maîtrise d’ouvrage pour leur expliquer les problématiques de budget et leur proposai un chiffrage avant toute dépose de Permis de Construire. Fin Mai, nous commencions donc des consultations d’entreprise après avoir monté le dossier DCE qui se composait des plans, coupes et façades de l’extension au 1/50e et de détails en 2D et 3D ainsi qu’un dossier de pièces écrites - une sorte de descriptif sommaire qui comportait le détail pour l’intervention de chaque lot -. J’ai pu établir ce descriptif grâce à l’aide précieuse du conducteur de travaux de l’agence qui m’a aidée et expliqué beaucoup de termes techniques, ce qui m’a permis de détailler au mieux les actions que chaque lot avait à mener. Fin juin, les devis étaient tous arrivés sur mon bureau, il n’y avait plus qu’à les analyser. Je savais déjà que nous allions dépasser le budget car, quand nous étions allé voir sur place avec le maçon, celui ci avait été catégorique, la terrasse actuelle étaient en mauvais état car construite en deux fois. La dalle se fissurait et n’était pas plane. Il préconisait donc de tout enlever pour refaire de belles fondations qui seraient aussi beaucoup plus résistantes au sol argileux présent sur le terrain. A la fin de mon analyse le constat était sans appel, il fallait revoir le projet, nous explosions complètement le budget initial en atteignant un total de près de 55.000€ HT ! La réunion de présentation du budget s’annonçait explosive, le conducteur de travaux proposa donc de m’accompagner, proposition que j’acceptai volontiers. La reconstruction de la dalle coûtait environ 10.000€ HT et les différents ajouts que la maîtrise d’ouvrage augmentait la facture d’environ 5.000€ HT. Ils acceptèrent donc de revoir à la baisse le pourcentage de surface vitrée et d’ouvrants ainsi que de considérer une implantation plus carrée de l’extension en faisant fi des découpages de la terrasse actuelle qui, de toute façon, serait démolie. Durant cette réunion nous avons finalement mis tout le projet à plat de manière à pouvoir enlever les éléments qui n’y étaient pas indispensables.

49


Ainsi, le second accès côté Sud disparu pour éviter le coût de la création d’un escalier. Ces escaliers étaient à la base voulus en acier pour reprendre le style de la pergola et du grand volet persienne se trouvant à l’Ouest. Finalement nous avons préféré l’option en maçonnerie pour rappeler les autres escaliers extérieurs existants d’une part, mais aussi pour l’économie extraordinaire que cela engendrait. La pergola fut, elle aussi, impactée par la réduction de budget et se vit simplifiée. Petit à petit et grâce à une mise en concurrence des artisans et aux quelques gestes commerciaux des entreprises avec qui l’agence travaillait habituellement, nous sommes parvenus à atteindre un budget d’environ 46.800€ HT qui, finalement, correspondait aux exigences de la MOA. Mais la suite de la mission s’annonçait tendue car les clients n’avaient plus vraiment confiance en nous et nous prenaient clairement pour des amateurs. La demande de Permis fut déposée au début des vacances d’été et acceptée à la rentrée. Le projet ne comportait aucun risque au regard des documents d’urbanisme de la commune qui était encore en RNU. Après les deux mois de délais de recours des tiers, soit en Novembre 2018, le chantier commença avec la première réunion où je rencontrai toutes les entreprises de façon à faire le point sur les objectifs généraux de qualité, la mise en oeuvre du chantier, ainsi que les objectifs calendaires. Une discussion plus technique fut également amorcée avec chaque lot pour faire le point sur les réservations à transmettre au lot gros oeuvre. Je m’appuyais beaucoup sur le descriptif sommaire et les plan PRO que nous avions établis pour la consultation des entreprises et qui avaient évolués avec les changements du projet. En effet, ce type de dossier n’est pas figé et doit être modifié au fur et à mesure de l'avancement du projet. La difficulté se trouve dans la transmission de ces dossiers, les entreprises doivent toujours être à jour. Je peux citer comme exemple pour illustrer mes propos, ce jour où mon sang se glaça au cours d’une visite de chantier avec un des employés maçon et le menuisier. Cette réunion avait pour but de faire un rappel des réservations. Durant la réunion, je constatai avec effroi que le maçon travaillais avec le premier plan PRO utilisé pour la consultation et ne disposait même pas de détails de réservation du lot menuiserie. Dès ce jour je décidai d’envoyer les dossiers par mail mais aussi de les remettre en main propre à chacun lors des différentes réunions pour être bien sûre que tous les intervenants en disposeraient au moment venu. Les entreprises savaient que j’étais la « petite nouvelle » de l’agence d’architecture et pouvaient apprécier ma jeunesse. Je ne pouvais pas cacher mon manque d'expérience pratique. C’est pourquoi je décidai de ne surtout pas laisser d’incompréhension dans les discussions et demandai des précisions à chaque fois qu’il y en avait besoin. Finalement ce positionnement fut apprécié par tous,


les entreprises ne me prirent jamais de haut et me respectaient comme chef de chantier à l’écoute de leur problématique et, pour ce qui me concerne, j’avais des explications techniques très poussées de la part de ces professionnels qui sont toujours très heureux de pouvoir partager leur savoir. Cette relation a été possible car je savais que je n'avais à faire qu’avec des entreprises de confiance qui avaient l’habitude de travailler avec l’agence. A la moindre remontée de ma part sur un entrepreneur qui m'aurait manqué de respect, je savais que ma hiérarchie m’aiderait à recadrer les choses. J’étais avant tout la représentante de Planet Studio sur le chantier et non pas Mme Claudinot architecte DE que l’on pouvait moquer pour son inexpérience. Le gros oeuvre devait commencer dès la semaine d’après pour que l’extension soit mise hors eau pour les vacances de Noel. Malheureusement, c'était sans compter les pluies cévenoles qui ne s’étaient pas déclarées depuis le mois de septembre. Elles arrivèrent dès le lendemain de la réunion et stagnèrent sur la région jusqu’à la mi-décembre. Il était donc impossible pour le lot gros oeuvre de démolir la terrasse et de la reconstruire tout en garantissant un chantier propre. En effet, la qualité du terrain fait d’argile ne permettait pas la circulation des machines sans retourner en totalité la parcelle. Le calendrier fut donc revu et la date de mise hors eau de l’extension repoussée de deux mois, soit pour fin février 2019. Les clients n’étaient pas satisfaits mais acceptèrent qu’ils jouaient de malchance et qu’il était dans leur intérêt d’attendre la fin des pluies pour envisager toute démolition de façon à garder un terrain propre. La démolition commença dès la fin des pluies et elle nous réserva quelques surprises. Nous découvrîmes que les fondations de la terrasse existante mais aussi celles de la maison étaient de très mauvaise qualité, ce qui expliquait certainement la plupart des fissures constatées sur la maison dès le début de notre mission. Nous fîmes donc un rapport photographique et écrit en parallèle du Compte Rendu de chantier pour nous décharger de toute responsabilité si, après notre intervention, les fissures évoluaient sur l'existant. Heureuse initiative car, quelques jours après, une des jonction de toiture existante, à l’opposée de notre intervention, se fissurait et provoquait des infiltrations. Ce point à été particulièrement difficile à gérer pour moi. En effet, le maçon ayant constaté un problème assez conséquent, ne me fis pas confiance pour gérer les choses et informa directement mes supérieurs qui ne connaissaient pas le chantier. Je me suis alors retrouvée en port à faux. Il a donc fallu que je recadre les entreprises pour bien leur expliquer que c’était moi (et uniquement moi) le référent du chantier et que toutes les remarques devaient m'être transmises, à charge pour moi de traiter toute seule le problème ou d’en informer mes supérieurs. La nouvelle année arriva et, mi février, je convoquais les entreprises en charge du sous oeuvre pour établir un calendrier. Les « dead line » annoncées étaient cette fois bien plus facile à respecter du

51


fait que l’extension allaient être hors eau et donc que les entreprises n’étaient plus soumises aux aléas climatiques. Les différents lots s’enchaînèrent assez rapidement de façon à ce que le travail soit terminé pour l’arrivée de la cuisine prévue mi-mai. L’arrivée de la cuisine était l'événement pivot qui ferait basculer le chantier de la Phase 1 à la Phase 2. La suite du chantier se déroula sans accro car tous les détails avaient été pensés en amont et toutes les réservations avaient bien été respectées; cette fin de phase 1 adoucit les rapports avec la MOA. Mi-avril le façadier faisait les enduits, fin avril la pergola et le volet persienne étaient installés. La réception des lots de la Phase 1 fut prévue pour début mai. Après la réception de la nouvelle cuisine et l’enlèvement de l’ancienne, la seconde phase pouvait être mise en place. Cette seconde phase était bien plus simple du fait que seul les lots placo/électricité et peinture se succédaient. Les travaux de remise au propre de l’ancienne cuisine pour en faire un coin bureau prirent 2 semaines et chaque lot profita même de ce temps pour lever toutes les réserves de la phase 1. La réception de la phase 2 fut alors possible dès mi mai 2019 et le chantier fut levé pour permettre aux clients de profiter au maximum de leur nouvelle extension qui, sans nul doute, agrandissait leur espace et rendait leur pièce à vivre bien plus fonctionnelle et agréable. L’accompagnement Ce projet m’a confrontee pleinement à la notion d’accompagnement. Cette notion est inherente à l’acte d’architecture et, bien que cela prenne beaucoup de temps, doit prendre une place preponderante dans la demarche. L’architecte doit être à l’ecoute, poser les bonnes questions, echanger pour être mieux à même de repondre aux attentes. L’echange devient alors la pierre angulaire de la relation. En ce sens, il est primordial d’etablir un langage commun, à la fois graphique et oral. Le dessin sert de base d’expression, il permet de faire passer des idees, d’expliquer. Dans cette relation particuliere qu’il faut creer avec son client, l’architecte doit avoir un discours clair et comprehensible - nul besoin de se perdre dans un dialecte trop technique -. De plus, il ne faut jamais oublier que le projet, bien que l’on en soit désigné comme chef d’orchestre, n’est pas le nôtre mais bien celui du client, qui doit se sentir à l’aise avec et plus tard à l’intérieur. Les questions de « beau » ne peuvent avoir d’incidence dans la relation car l’architecte se doit de respecter les goûts de la maîtrise d’ouvrage. Ainsi, le client qui est à l’origine du projet doit être integre au processus de conception et de realisation de maniere privilegiee : le projet est un travail d’equipe qui commence des les premiers coups de crayons, chacun contribue à son elaboration, architecte comme maitre d’ouvrage.


Le chantier : un support d’apprentissage Bien que l’enseignement tente de nous rapprocher de la dimension technique de l’architecture, on constate toutefois une certaine distance entre l’idée du projet et sa solution constructive. J’étais donc persuadée que le chantier me permettrait de mieux comprendre et de mieux m’approprier les technicités du métier et ainsi avoir une maîtrise plus importante du projet. La réalisation découle de la conception préalable et, pour moi, ces deux étapes dans l’acte de construire ne devraient pas être dissociées entres plusieurs intervenants comme on le voit souvent aujourd’hui sur les marchés privés. L’architecte doit défendre la mission complète avec force et conviction. Ce projet d’extension a été “mon” projet du début à la fin et, bien que j’aie pu m’appuyer sur les conseils avisés de Ludovic Martial ou du conducteur de travaux, tous les déboires comme toutes les victoires me revenaient. J’ai eu cette chance d’être propulsée de la sorte, en totale liberté sur un chantier, grâce à la confiance de Ludovic Martial mais aussi grâce à ma connaissance technique particulièrement poussée pour une jeune architecte DE. En effet, déjà à l’école, je m'intéressais beaucoup à la structure et à la constructibilité de mon projet car j’avais ce besoin de travailler de façon plus concrète. Finalement c’est dans le chantier que j’ai pu totalement m’épanouir. J’apprécie particulièrement cette ambiance fondée sur l’échange entre entreprises et architecte. Les entreprises ont un savoir purement technique sur un point du projet et l’architecte a une vision plus globale mais, sur certains points, moins précise. C’est pourquoi il a besoin de l’oeil avisé d’une entreprise compétente pour mener à bien le projet. D’une manière générale, la communication est une composante essentielle pour assurer la bonne marche et la temporalité du chantier, à la fois avec les clients et les entreprises. Sur ce chantier la MOA était en permanence présente sur les lieux, il était donc important d’être là, à son écoute pour la rassurer. En effet, pour les clients, le moindre petit détail qui leur paraissait anormal - le retard d’une livraison ou la modification d’une intervention - était source de stress. Ce chantier demanda donc aussi une grande rigueur aux entreprises pour limiter le stress du chantier.

Ce premier chantier a été une expérience d’une grande richesse, très formatrice. Cela a été pour moi un véritable “chantier-étude de cas”. J’ai appris de chaque réunion, de chaque situation : à la fois sur le rôle de l’architecte comme sur les points techniques tant dessinés que réalisés. Le chantier est le lieu ou une multitude de compétences se croisent et laissent place à des apprentissages mutuels. Dans une action collective, c’est le lieu où le projet imaginé devient enfin

53


une réalité où il se matérialise. J’y ai découvert la concrétisation du dessin avec les difficultés que cela peut engendrer, j’ai appris comment les choses se construisent et surtout dans quel ordre. J’ai appris également à manager une équipe en réel chef d’orchestre, à assurer une interaction saine avec les différents acteurs du projet. Dans son rôle de médiation entre les deux parties que représentent la MOA et les entreprises, l’architecte ne doit en effet pas privilégier l’une ou l’autre, au risque de compromettre la relation entre les acteurs jusqu’à la réception. Il doit en permanence travailler sur les deux fronts, trier les informations, peser ses mots tout en restant impartial. Ainsi, la psychologie de chantier est très importante. En effet chaque entrepreneur est différent, fonctionne et s’organise différemment. Il convient donc également d'être observateur pour savoir quelle attitude adopter, ni trop souple, ni trop dure. D’une manière générale, j’ai pris conscience qu’une des clés pour bien mener son chantier était l’anticipation. Il faut sans cesse se projeter pour détecter les problématiques éventuelles qui pourraient survenir d’un point de vue technique comme calendaire. La prise de recul est elle aussi importante. Peu de situations demandent une réactivité à la minute, il ne faut pas être trop pressé dans l’acte de construire et ainsi laisser aux choses le temps de mûrir. En parallèle de la direction du chantier, aidée par la secrétaire de l’agence, je gérais l’aspect comptable avec les situations, les déclarations MAF et mettais à jour le bilan global de l’opération que je transférais régulièrement à la MOA. Cette gestion demande une certaine rigueur mais n’était pas nouvelle pour moi. En effet, j’avais déjà gérer l’aspect administratif et comptable du chantier de Caumont sur Durance à l’Atelier GA, chantier autrement plus complexe en terme d’allotissement.


55


Conclusion Ce mémoire retrace mon parcours professionnel de ces deux dernières années tout en interrogeant la manière dont j’envisage ma future pratique professionnelle. Le master à l’ENSA-Montpellier a assuré la transmission du savoir théorique grâce à l’apprentissage de la représentation, de la conception et de la réflexion spatiale. La formation HMONP, elle, s’est chargée de la transformation de ce savoir théorique en savoir pratique avec l’étude de l’art de construire. Ainsi, les aspects qui avaient été laissés de coté durant la formation initiale ont été au centre des attentions durant cette période: le management, la réglementation, le chantier, l’économie de projet, la relation client. Pour améliorer cet apprentissage, j’avais choisi de participer aux seminaires de formation HMONP de la session longue, en parallele de ma mise en situation professionnelle, ce qui a ete un choix vertueux car il a renforce mes connaissances et à donne du sens à ce que j’apprenais sur le terrain. J’etablissais ainsi un lien concret entre enseignements et vie quotidienne à l’agence. Cette formation m’a alors permis d’acquérir les outils nécessaires au bon exercice libéral et à poser les bases de mon futur métier d’architecte. J’ai appris à travailler avec plaisir dans le dialogue et l’échange en prenant conscience de la valeur du temps et de l’énergie dépensée derrière un projet bien concret. Durant ces deux annees de pratique, j’ai pu aborder differents aspects de la profession d’architecte en agence et apprehender reellement l’etendue des competences qui doivent être celles de l’architecte maitre d’œuvre. En somme, de saisir son role sa globalite et de mesurer l’ensemble des responsabilites qui lui incombent. Cela m’a laisse le temps de murir mon projet et d’aiguiser mon regard sur la pratique architecturale qui m’anime. Ma passion reside dans la gestion des projets dans leur globalite, dans leurs moindres details, des premieres relations clients avec ces premiers coups de crayon jusqu’à la mise en œuvre. Ces expériences dans le milieu professionnel décrites précédemment m’ont confortées dans mon ambition de maîtrise d’œuvre. La qualité d’une réalisation est le fruit d’une cohésion entre conception et construction. Les architectes qui m’ont accompagnee durant ces deux annees m’ont montre, certes, leur capacite é de dessin mais aussi et surtout leur capacite à suivre un chantier, à orchestrer les differents acteurs, et à s’adapter aux imprévus pour obtenir la réalisation souhaitée. L’expérience du chantier est indispensable pour realiser une conception de qualite é car elles alimente un repertoire personnel de details, problématiques, solutions techniques, matériaux et mises en oeuvre. La conception n’en sera toujours que meilleure car elle sera nourrie à chaque fois par des exemples concrets, realises et testés.


Un projet professionnel

Après un an passé au sein de Planet Studio, la réalité économique du métier nous a rattrapés et ma collaboration au sein de l’agence a dû être interrompue en raison d'une insuffisance de projet. J’avais déjà accumulé plus que les 6 mois d’expérience requis pour se présenter à l’habilitation et j’avais pu suivre un projet de A à Z, de la conception au chantier, en autonomie. Je me sentais donc prête pour le jury d’HMONP. Ce jury, bien qu’il ne soit qu’un passage, ouvre la porte à la pratique libérale en son nom propre. J’ai donc décidé de commencer à travailler mon relationnel dans l'objectif de devenir architecte libérale après le jury. Dans cette optique, j'ai créé une micro-entreprise pour commencer à me tester en temps que chef d’entreprise. Cette micro-entreprise est aujourd'hui implantée dans les Cévennes car c’est une zone que je commence à bien connaître et où j’ai déjà pu organiser des collaborations intéressantes ainsi que créer des liens forts que ce soit avec des architectes comme avec des artisans sérieux en qui j’ai toute confiance. Malgré tout, je continue à travailler sur des projets de grandes envergures, écoles ou logements en sous-traitance avec des agences d'architecture, pour des missions diverses allant du concours au DCE. Je commence également à avoir mes propres clients privés pour des extensions ou de petites maisons en mission complète. Ces clients sont en général attirés par mon approche féminine, sensible et écologique. Je tente alors de tisser une relation de confiance malgre mon jeune âge avec la maitrise d’ouvrage en leur proposant un projet qui leur correspond. Avec la création de cette entreprise, j’ai découvert une autre facette du métier, basée bien plus sur le relationnel : la parole mais aussi et surtout l’écoute. Cette aspect du métier, du fait de mon caractère, me plaît particulièrement. Cela fait maintenant plusieurs mois que je me suis lancée et je ne suis pas mécontente. J’aime mon metier, j’aime sortir de ma zone de confort, me challenger et j’aime par dessus tout apprendre. Je me sens aujourd’hui prête à assumer une mission de maitrise d’oeuvre en mon nom propre à plus grande echelle et à endosser les responsabilites. La validation de l’HMONP me permettrait de repondre legitimement, avec liberte et independance, à tous les projets futurs que j’envisage et qui se presenteront. Je suis toutefois, consciente qu’il me reste beaucoup à apprendre pour acquerir les competences necessaires pour être une architecte maitre d’œuvre techniquement autonome, l’apprentissage du metier etant permanent et quotidien. Je souhaite donc poursuivre et acquerir de l’experience supplementaire grâce aux collaborations et sous traitance que j’ai déjà mises en place avec des paires qui me permettent de découvrir d’autres aspects du métier que je ne connaissais pas encore.

57



BIBLIOGRAPHIE

Au bonheur des Campagnes (et des Provinces) – Bertrand Hervieu et Jean Viard , Ed. de l’Aube, 1996 Le monde rural : quelques données de cadrage - Clothilde Roullier (CAIRN) Manifeste commun pour le défense des Nouvelles ruralités (département de l’Allier, du Cher, de la creuse et de la Nièvre) Comment agir sur l’urbanisation en milieu rural : Le cas du parc Naturel régional des Ballons des Vosges - François Tacquard DAT Conseil Espèce d’Espace – Georges Perec, Ed. Galilée, 2000

59



ANNEXES

61



63


C.V. MARIE CLAUDINOT Née le 20/12/1993 à St Martin d’Héres (38) marie.claudinot@gmail.com // 0642962902 251 av Maryse Bastié 30140 Boisset et Gaujac FORMATIONS 2018 : Formation HMONP à l’ENSA-Montpellier 2017: Diplomée Architecte DE à l’ENSA-Montpellier (Master Architecture et Milieux- master spécialisé en bio-climatique). 2015 : Licence d’architecture validée en ERASMUS à Istanbul Technical University (ITU). 2013 : L1 en Langues Étrangères Appliquées (LEA) à l’Université Paul Valéry à Montpellier option Anglais, Espagnol, Chinois EXPÉRIENCES PROFESSIONNELLES 2019 : Création de la micro-entreprise LesAteliersC-m 2018-2019: Collaboratrice architecte chez Planet Studio, Anduze (30) 1an // Marché privé ESQ/PC/PRO/DCE/Maitrise d’Oeuvre 2017-2018: Collaboratrice architecte chez Atelier GA, Saint-Jean-du-Gard (30) 7mois // Marché public Concours/PRO/SYN 2016 : - Stage chez DNA Architects à Barcelone 3mois // Concours/PRO/Gestion de projet - Workshop en Scénographie à l’Opéra de Montpellier, espace Corum 1semaine // Mise en scène de Turandot de Puccini - Responsable communication et graphiste à l’ESN Montpellier (Erasmus Student Network) 1an // Promotion de l’association et d’évènements sur les réseaux sociaux / Création d’évènements et de visuels / Gestion d’équipe - Workshop avec Karen Smuth sur le désenclavement du quartier de la Paillade 2015 : Stage au STAP (Service Territorial de l’Architecture et du Patrimoine) de l’Hérault à Montpellier. 1mois // Aide au suivi de dossiers. 2014 : - Stage de 2 semaines chez DeltaVoiles à Mauguio (34) Etude de marché pour la diversification de l’entreprise dans le secteur de l’architecture tendue. - Workshop d’une semaine en architecture navale à l’ENSA-Montpellier Conception d’un prototype de voilier pour l’observation sous-marine PUBLICATIONS 2017: - Publication rétrospective des travaux d’étudiants sur Perpignan, Ed. l’Espérou - Mémoire sur l’Evolution de la ville et la protection du patrimoine (avec les félicitations du jury) // https://issuu.com/marieclaudinot/docs/evolution_de_la_ville_et_protection


PASSEPORT

65


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.