Malgré leurs liens, tel un continuum, chaque tableau de son parcours possède sa propre autonomie et tous les signes de ses toiles ont leur propre vecteur. Cependant, ses tableaux forment les pièces d'une mosaïque indivisible : comme si son parcours culminait en un tout. Aussi, pour bien saisir cette unité sous-jacente à tous ses tableaux, il était et reste nécessaire, voire obligatoire, de plonger dans le secret le plus profond de sa vie, afin de rejoindre et quasi violer sa spiritualité. GiancarloVigorelli1
L’homme qui voulait être peintre: Giorgio Piacenza Le lecteur du catalogue Tapié : un art autre : Torino Parigi New York Osaka réalisé en 1977 sous la direction de Mirella Bandini, découvre Giorgio Piacenza dans le chapitre “Michel Tapié de Paris à Turin”. En effet, on y apprend qu'il est l'hôte en 1963, d'une exposition de Sculptures en plein air de Sōfu Teshigahara, organisée dans le jardin de sa Villa sur la colline de Superga (voir p.43 et photographie). Cependant, au chapitre “Regeste” de l'activité de l' ICAR du même ouvrage, où est publiée la liste complète des 55 peintres des 15 nations présents en avril 1969 à la Galleria d'Arte Cortina de Milan dans l'exposition Espaces abstraits : de l’intuition à la formalisation, son nom n'apparaît pas. Et pourtant, parmi les cinq subdivisions d'artistes, établies par Michel Tapié à cette occasion, dans le second regroupement thématique “2) Métaphysique de la matière-espace”, on trouve un rébus : le nom Dassu. Voulant éclaircir cette énigme, on découvre, sur la couverture d'un dépliant réalisé antérieurement, la mention calligraphiée par Ambrogio (dit Giò) Minola : «La Bacheca c'est-à-dire Les Personnages du Centre International de Recherches Esthétiques de Franco Garelli, pour Giorgio Piacenza, Turin, 1963 ». Pour pimenter cette intrigue on retiendra qu'en 1964, à Lima, capitale du Pérou, se tenait une exposition du Gruppo WEGAS y Giorgio Da Superga 2 . En 1967, le théoricien et critique d'art français Michel Tapié de Céleyran écrivait dans son Introduction à La Connaissance Esthétique3 : « Les textes qui suivent n’auraient jamais vu le jour sans l'existence de fait de certaines créations de structures d’espaces abstraits d’artistes que je tiens à nommer avant toute autre chose, dans une liste empiriquement ordonnée : les œuvres en question sont les véritables axiomes présidant à cette introduction à une esthétique autre, post-dada. a) L’architecte catalan Gaudí, le logicien Bertrand Russell, le compositeur Edgar Varèse et le poète Ezra Pound. 1
b) Hofmann, Miró, Domoto Insho, Teshigahara Sofu. c) Clyfford Still, Pollock, Motherwell, David Smith, Lee Krasner, Kline, Wols, Mathieu, […] d) Donati, Tàpies, Piaubert, Yoshihara, Wessel, Castel, Damian, Crippa, Dassu, Wagemaker, Laganne, Schumacher, Pinot Gallizio...»4 . Puis, en 1970 (soit un an après le décès de Giorgio Piacenza), l'amateur d'art (comme il aimait être appelé) Michel Tapié écrira encore : « Dassu existe et existera comme artiste, il est représenté dans la collection du Centre d'Esthétique, j'ai emmené [plusieurs] de ses œuvres autour du monde, [les aient] montrées aux U.S.A. et au Japon avec [celles] des Gutaï, je le reproduis dans mes livres ; et je continuerai à le faire figurer tant dans des groupes d' hypergraphies que dans des ensembles d'espaces abstraits [...] J’ai aussi connu Monsieur Piacenza, dont je m’honore d’avoir eu l’amitié. Collectionneur d’œuvres audacieuses d’un "maintenant" qui était le sien, il a su intégrer ces œuvres d’art dans le cadre d’un art de vivre où l’amitié confidentielle trouvait sa profondeur d’épanouissement... »5. Au cœur de cette apparente énigme se déroule un événement artistique à la fois résolument autonome mais également profondément en lien avec son temps. Durant cette période d'élaborations fécondes, d'expérimentations foisonnantes et riche d'évolutions, dans le monde mais aussi à Turin, l'art contemporain va vivre un regain de très haute qualité. Giorgio Piacenza est né à Turin le 26 août 1910. Après des études courtes, où l'on ne décèle pas d'enseignement artistique, il obtient le titre de comptable. À quinze ans, il a pour camarade de classe, un certain Renzo Guasco6. Ils ne se retrouvent qu'en 1962, à l'occasion de l'inauguration de la XXXI Biennale de Venise. Guasco étant devenu critique d'art, se noue entre eux un rapport de réelle amitié. De ces retrouvailles, et à travers leurs échanges fréquents, l'activité de création artistique de Giorgio va être renforcée. Guasco prendra à cœur son rôle d'historien et narrateur de la vie de Piacenza, l'aidant notamment dans l'établissement d'un inventaire de son œuvre. En 1938, Giorgio Piacenza fait partie des membres fondateurs de la société manufacturière A.M.S.A. (Abbigliamento Manifatture Società per Azioni) basée à Turin, à laquelle participe aussi son frère cadet Gino, ingénieur diplômé de chimie. La manufacture prospère mais est détruite par les bombardements qui frappent la capitale industrielle piémontaise en 1942. L'entreprise est déplacée à Moncalvo (province d'Asti dans le Piémont). En 1944, ce sont les frères Piacenza qui la refondent sous le nom de T.T. (Trasformazioni Tessili) et qui lui font connaître très rapidement une forte croissance. Dès le début des années ‘50, leur industrie textile, spécialisée dans la production de 2
chemises, se révèle être à l'avant-garde de l'innovation. La firme T.T. doit notamment son succès commercial aux tout premiers modèles « sans repassage » rendus possibles grâce aux progrès techniques et aux nouveaux matériaux développés par l'industrie d'après-guerre. Ce succès est aussi bien le fruit des recherches minutieuses des Piacenza pour être à la pointe en matière d'avancées technologiques qu'à leur souci constant de capter l’esprit du temps pour répondre au mieux à la volonté de modernité de la société italienne. Le sort de la fratrie Piacenza veut que Mario, le benjamin des quatre frères, ingénieur chimiste comme Gino, s'expatrie au Pérou en 1946, où il développe, entre autres produits de synthèses, de nouveaux matériaux (pigments, liants, résines, adhésifs, solvants) bases des nouvelles teintes de peinture, vernis, ou laques modernes, dont bénéficieront particulièrement les artistes plasticiens. Entrepreneur, collectionneur d'art et mécène il s'exercera assidûment à la sculpture, son passe-temps favori. En 1954, il crée avec son associé Patricio de Almenara, l'industrie pétrochimique Teknoquímica SA. En 1960, ils fondent la Bienal de Arquitectura y Pintura Peruana, connue depuis 1962 sous le nom de Bienal de Teknoquímica, qui attribue l'un des prix les plus convoités au Pérou7. Mario va également jouer un rôle déterminant dans l'aventure artistique de son frère Giorgio. Piacenza dirige, en parallèle, la revue de mode masculine Club. À l'instar des grandes maisons, il y fait collaborer de talentueux dessinateurs. Son plus célèbre collaborateur est le créateur d'affiches et dessinateur de mode, italo-français, René Gruau8. Artiste dont la griffe reste la marque de référence des dessins publicitaires d'avant et d'après-guerre, fin connaisseur d’art et féru de shodō, l'art de la calligraphie japonaise. Nonobstant ces précisions d'ordre biographique, on ne saurait dire avec exactitude quand Piacenza commence à peindre. Il existe pourtant une note manuscrite, que nous estimons de sa main, réalisée pour son exposition à Biella (Piémont) en 1967, où il révèle : « Activité artistique depuis 1938: Peinture à l'huile et Gouache. - 1953 Peinture-vinylique. - 1963 Plastic-paints et reliefs plastiques. - 1966 Série d'acrylique 1-302. »9. Mais, Guasco réfute la première des dates prise comme point de départ de son activité créatrice. Guasco soutient que ce n'est qu'en 1950 et « suite à une grave opération, pour mieux affronter les heures d'ennui et d'inactivité forcée durant la convalescence »10 , qui éloigna Piacenza de son travail d'entrepreneur de façon momentanée, qu'il aurait décidé de prendre des leçons de peinture accompagné de sa femme Adriana Bechis. C'est ainsi que selon lui, il aurait alors fait appel à 3
l'artiste peintre turinois Giulio Da Milano, qu'il avait connu la même année, à la Mostra du Textile, lors de la remise du prix Spola d’Oro (La Navette d'Or) dont il était le promoteur. Or voici ce que nous disent, à ce propos, ses amis artistes Wessel, Assetto et Garelli, lors de leur exposition commune au Pérou : « il a peint durant vingt ans avec des moyens que nous qualifierons de classiques. Il peignait des tableaux n'ayant ni meilleure ni moins bonne facture que ceux réalisés par les académiciens de son âge. Le jeune dirigeant industriel peignait durant chaque temps libre qu'il pouvait arracher à sa tâche quotidienne. Il visitait les musées et les galeries, lisait les livres d'art et étudiait les courants spirituels en vogue à l'époque. Sur une période de trois ans, chaque jour, il travailla à l'étude du peintre Giulio Da Milano afin de parfaire sa maîtrise de la technique de la peinture à l'huile. Qu'il ait peint ensuite, comme il était courant de le faire durant la décennie de 1935 à 1945, n'est pas étonnant. De manière générale, les mouvements esthétiques avantgardistes et futuristes étaient alors négligés, au profit d'une plus grande popularité pour les beauxarts classiques »11. Sa période autodidacte est clairement reconnaissable à travers un ensemble disparate de toiles peu soignées. Elle se caractérise par l'utilisation de diverses techniques de peinture (à l'huile, à la gouache, aux émaux ou bien mixtes), par la nature instable des thèmes abordés (scènes champêtres ou citadines, figuratives et natures mortes) et par l'emploi de styles divers : tantôt cubiste, tantôt post-impressionniste ou encore fauve. À travers ses débuts autodidactes, on se rend déjà parfaitement compte de sa solide connaissance des mouvements en vogue au sein du monde de l'art turinois à la charnière du dernier conflit mondial. Ainsi, la décision d'approfondir ses potentialités à l'étude de Da Milano en 1950 apparaît comme un choix d'autant plus cohérent que l'on tient compte de sa période d'essais réalisés auparavant. Giulio Da Milano, peintre italien né à Nice en 1897, formé à l'Académie Albertine des Beaux-Arts de Turin puis au contact des peintres de l'École de Paris fut « un protagoniste, par trop méconnu, des évènements artistiques majeurs qui eurent lieu à Turin au tournant des années 1930 »12. Résidant à Paris, Da Milano fréquente le milieu du Montparnasse des années folles en compagnie des artistes turinois Gigi Chessa, Francesco Menzio et Carlo Levi. Foyer et creuset de créations artistiques, Paris est l'origine des courants de peinture turinois représentés par l'expérience du Groupe des Sei Pittori di Torino (Boswell, Chessa, Galante, Levi, Menzio et Paulucci) mais est également perceptible, de manière plus ample et plus articulée, dans le vaste mouvement qualifié tantôt de fauvisme turinois, d' intimisme turinois, de Parnassien ou encore de post-impressionnisme13. Piacenza se rend de façon quasi quotidienne, le soir après dîner ainsi que tous les jours fériés, à l'étude de Da Milano et ce durant près de trois ans. Il en résulte plusieurs centaines d'études, sur bois ou sur toile, d'huiles complexes. On remarque qu'elles ont en commun thème et goût pour les 4
natures mortes et les scènes d'intérieur, reflétant l'intérêt principal d'alors de son maître. Selon Guasco, « de nombreuses peintures de Piacenza pourraient être exposées, sans dénoter, auprès d'œuvres de Da Milano, de Menzio ou d'autres peintres de ces années-là ». Il ajoute cependant, « il n'y a pas de doute quant au fait qu'il commençait à ressentir que ce qu'il peignait n'était pas en accord avec le monde de l'industrie dans lequel il agissait, pas plus qu'avec les livres qu'il lisait, ni avec ses centres d'intérêts véritables et vitaux. Son besoin d'air est trahi par certaines huiles peintes au pinceau qui laissent déjà entrevoir son impatience, son envie de dépassement. On en a la confirmation par son utilisation intempestive des moyens traditionnels et par certaines ascensions chromatiques hors normes qui rappellent Matisse. Da Milano se souvient qu'un jour Piacenza lui montra un livre sur la peinture informelle. Or, on a appris depuis peu que Da Milano peignait dès 1934/1935 de véritables tableaux informels ante litteram, restés longuement inconnus. Dès lors, il ne pouvait ne pas comprendre et approuver les recherches de son élève, devenu entre-temps son plus cher ami »14. Bien que plus proche d'une palette fauve, une foule de petites huiles de sa femme Adriana reflète également l'enseignement de Da Milano. Ses amis écriront encore : « Giorgio Piacenza s'était longtemps consacré à l'activité dirigeante d'une industrie très spécialisée du Piémont. Cependant sa passion pour la peinture ne s'est jamais estompée. Au contraire, sa prédisposition naturelle s'est muée en quelque chose de bien plus engageant qu'un hobby, pour devenir désormais le contrepoint indispensable à son training industriel quotidien. Dès lors, il a commencé à s'intéresser et à prendre part toujours plus attentivement au sujet de la polémique, particulièrement vive dans les années cinquante, pro et contre la peinture figurative. L'art abstrait l'attire. Pourtant, dans un premier temps, ce ne fût pas Dassu le peintre mais Giorgio Piacenza l' amateur d'art qui eut ses faveurs, c'est-à-dire le collectionneur avisé, de peintures et de sculptures de jeunes artistes japonais, français, allemands et italiens »15. Piacenza date le début de sa période Peinture-vinylique en 1953. Ce terme se réfère à l'utilisation nouvelle de colles de synthèse, ici la colle d'acétate de vinyle connue en Italie sous le nom de Vinavil16 : colle blanche qui substitue cette même année les colles d'origine organique utilisées auparavant. Grâce à cette matière innovante, il réalise de nombreuses études, sur papier et sur carton, où il superpose des matières denses qu'il colle, spatule, sculpte, colorie, annote et certaines fois recompose. Il s'agit-là d'effets telluriques, de méditations sur la matière, de petits mondes. L'appellation Peinture-vinylique est une définition générique d'une période qui recouvre un ensemble de recherches en constante évolution. Les années durant lesquelles il entreprend ses nouvelles recherches, Turin va être le théâtre d'un 5
tournant décisif pour l'art abstrait. Jacques Lassaigne et Luigi Carluccio organisent au Palazzo Belle Arti (Palais des Beaux-Arts) dans le parc Valentino sept expositions annuelles, ouvertes de 1951 à 1961, et intitulées Peintres d'aujourd'hui - Pittori d'oggi : Francia-Italia. Des monographies, des rétrospectives et des expositions collectives proposent au public les œuvres des plus grands peintres contemporains, italiens ou français, mais également de jeunes talents émergents. Plus de deux cents artistes y sont exposés, dont une partie est déjà liée au tout nouveau mouvement : l'art Informel. C'est en 1956 que « Tapié commence à séjourner, d'abord épisodiquement, à Turin, ville qu'il aime immédiatement en raison de sa proximité avec la France et parce qu'elle lui donne la possibilité de s'isoler entre deux voyages pour se consacrer à l'étude »17. Il y organise les expositions de la Galleria Notizie de Luciano Pistoi, fait connaître et promeut l’Art Autre aux turinois. En mai 1959, il réalise l'exposition internationale Arte Nuova - Esposizione internazionale di pittura e scultura Ikebana di Sofu Teshigahara au Circolo degli Artisti di Torino qui voit 71 artistes confrontés suivant leur aire culturelle de provenance : Europe, Amérique et Japon. Conjointement, Tapié organise, à la Galleria Notizie, « en concomitance avec Arte Nuova une grande exposition du groupe Gutaï »18. Au mois d'octobre de cette même année 1959, se tînt l'inauguration du nouveau siège de la Galerie d'Art Moderne (GAM) de Turin19, « le vieil et inadapté hangar provisoire qui abritait depuis 1895, non sans difficulté, nos collections d'art moderne ayant été détruit presque par chance par les bombardements de 1942. Simultanément, […] au pavillon prévu à cet effet pour les expositions temporaires, eut lieu une grande exposition réunissant les Chefs-d'œuvre de l'art moderne des collections privées italiennes […] au total, 286 chefs-d'œuvre : les peintures et les sculptures des plus grands artistes contemporains italiens et étrangers […] Aux seuls noms de Sisley, de Cézanne, de Rousseau, de Gauguin, de Picasso, de Braque, de Gris, de Léger, de Matisse, de Rouault, de Chagall, de Soutine, de Klee, d' Utrillo pour les étrangers; de Modigliani, de Carrà, de De Chirico, de Casorati, de Campigli, de De Pisis, de Morandi, de Rosai, de Scipione, de Spazzapan et encore de Arturo Martini, de Manzù et de Marini […] on est en droit d'affirmer qu'elle fût l'une des plus riches, complètes et attractives expositions d'art moderne qui s'était tenue jusqu'alors en Italie »20. Enfin cette année-là, l'artiste traditionnel et maître fondateur de l'École Sōgetsu, Sōfu Teshigahara réalise, dans le jardin de la GAM de Turin, un grand ikebana intitulé Felicitazioni (Medetai). En 1960, la GAM expose des xylographies de Shikō Munakata : l’art traditionnel japonais décliné selon le style de l’incision expressionniste. En mars 1960, dans un palais magnifique du XVIe siècle, situé au 5 via della Basilica (lieu où en 1578 aurait séjourné le Tasse21), au cœur du centre historique de Turin, Tapié inaugure le siège de 6
l'International Center of Aesthetic Research22. « Avec la fondation de l' ICAR à Turin - avec Luigi Moretti, Franco Assetto et dont Ada Minola deviendra présidente – Tapié réalise l'événement le plus important de son parcours : la possibilité de présenter, dans une exposition permanente articulée dans des espaces de type muséal sur deux étages, et de mettre en valeur dans des expositions personnelles les artistes qu'il avait suivis depuis 1946 et à travers lesquels il avait construit la théorisation de l' art autre ; laquelle évolue au cours de la période turinoise, avec l'apport de Moretti, vers des spéculations scientifiques »23. 1962 marque la pleine affirmation de Tapié à Turin : il y organise, avec Pistoi, une grande exposition internationale intitulée Strutture e Stile : Pitture e sculture di 42 artisti d'Europa, America e Giappone24. L'exposition s'ouvre en juin, sous les bons auspices du directeur de la GAM, Vittorio Viale qui dans sa présentation se montre ouvert aux propositions de Tapié : « de par les idées qui la guide et par le choix des artistes et des œuvres présentés, on pourrait penser qu'il s'agit d'une exposition peu en accord pour l'enceinte d'un musée. En réalité, si l'on considère, comme il me paraît essentiel, qu'outre sa fonction d'école et de lieu de documentation, une Galerie d'art moderne, qui plus est publique, doit remplir le rôle de centre d'entraînement et de moteur de création, il va de soi qu'en son sein soient prises en compte toutes les idées : que puisse s'y affronter et y être débattus tous les problèmes. Et cela, à fortiori avec une énergie et un intérêt décuplé, lorsque ces idées et ces problèmes ont trait aux perspectives futures de l'art ; ou du moins, sont les perspectives d'un esprit sage et pointu qu'un critique tente de configurer »25. En septembre se tient l'inauguration de l'exposition L’incontro di Torino à la Promotrice delle Belle Arti, réunissant à nouveau de nombreux artistes européens, américains et japonais. Durant l'année 1959, Piacenza s'installe dans sa nouvelle demeure située Strada Superga. À côté de la villa, au fond du parc, il aménage son studio dans une construction rustique : c'est le véritable refuge de l'artiste. Composé d'espaces de travail, avec le four à céramique pour Adriana et d'une pièce propre à recevoir ses amis artistes, il en fait en quelque sorte un musée privé. Ce studio sera le lieu où d'autres artistes viendront expérimenter ses nouvelles techniques. « S'il y a une date importante (on peut même dire, la plus importante) qui marque un tournant significatif dans l'activité artistique de Piacenza, c'est bien celle de sa rencontre avec le peintre et sculpteur Franco Garelli. Durant l'été 1959, Giorgio et Adriana Piacenza vont à Albisola dans le but de rendre visite à Garelli : ils se lient d'amitié. Garelli représente d'emblée pour Giorgio Piacenza un modèle de liberté. Il en retient une leçon très précieuse : quel que soit le moyen de travail utilisé, toujours agir et s'exprimer librement »26. Lorsqu'il fait la connaissance de Garelli, celui-ci possède déjà un parcours artistique riche et 7
complexe. Né en 1909, il débute en tant que sculpteur et se fait connaître dès 1927 par ses sculptures en terre cuite de grandes dimensions. Attiré par le second futurisme turinois, il fréquente ensuite Arturo Martini et Luigi Spazzapan. Étant médecin de formation, il reprend un temps, après la guerre, son activité à la Faculté de Médecine. Il donne des cours d'Anatomie Artistique à l’Académie Albertine des Beaux-Arts, puis de Portrait et de Modelage au Lycée Artistique. Il rencontre à Albisola les membres du groupe CoBrA et, grâce aux rapports qu'il entretient avec le Laboratorio Sperimentale di Alba de Pinot Gallizio, participe en 1956 au I Congresso Mondiale degli Artisti Liberi. Outre la pratique de la peinture et du dessin, à partir de 1950 il crée des sculptures en bronze puis, à partir de 1954, il réalise des œuvres en fer faites d'assemblages et de soudures. En 1959, il travaille au Japon où il se lie d'amitié avec des Gutaï et expose à Tōkyō et Ōsaka 27. Par l'entremise de Spazzapan, Garelli et Franco Assetto furent les premiers artistes que Tapié rencontra à Turin lorsqu'il décida d'y séjourner. Garelli fut l'intermédiaire entre Piacenza et Tapié. « Très vite Piacenza fit la connaissance de tous les artistes que Tapié faisait venir dans notre ville. Il collectionnait leurs œuvres et liait d'amitié avec certains d'entre eux » 28. Assetto et Wilhelm Wessel sont les deux autres artistes avec lesquels il va nouer une profonde et fondamentale amitié. Assetto, né à Turin un an après Piacenza, ayant fait des études de pharmacie, est un artiste éclectique, dandy, surréaliste. Suite à une période informelle très personnelle il sera l'instigateur du Baroque Ensembliste. Il travaille dans le domaine des arts appliqués et est considéré comme le précurseur du Pop Art. Il expose au Japon avec les Gutaï et vit ensuite de longues années aux ÉtatsUnis. Un musée lui est dédié à Frontino, commune du Montefeltro, dans les Marches. Wilhelm Wessel, né en 1904, est un peintre allemand qui débute sa jeune carrière artistique à l'institut Bauhaus sous la direction de Kandinsky. Il décide de partir vers d'autres horizons : d'abord en travaillant en tant que graphiste en Tchécoslovaquie puis en tant qu'enseignant en Turquie, il poursuit son périple et parcourt la Grèce et le Moyen-Orient. À son retour, il fait des études d'archéologie et de peinture. Ayant obtenu le titre de professeur, il enseigne l’art de 1931 à 1939. Après la guerre, il s'installe dans sa ville natale, Iserlohn (où se trouve un musée qui lui est dédié ainsi qu'à sa femme, la peintre Irmgart Wessel-Zumloh) et travaille énergiquement comme peintre indépendant. En 1958, il est exposé à la XXIX Biennale de Venise, puis au cours des années soixante il sera présenté à New-York, à Lima en compagnie de Piacenza et aux Bahamas. De ses débuts influencés par l'expressionnisme, et suite à un passage par la Neue Sachlichkeit (« Nouvelle Objectivité ») en passant à travers une période « peintre de guerre » en Afrique et en Italie, il rejoint au milieu des années cinquante, le mouvement Informel. En 1957, il fait partie des peintres de l'exposition Aktiv-Abstrakt. Neue Malerei in Deutschland, réunissant les principaux protagonistes 8
de la scène informelle allemande à la Städtische Galerie (Lenbachpalais) de Munich29. C'est une forte personnalité, dotée d'un caractère rigoureux, méditatif et profondément critique. « Entre ces deux hommes que l'âge, la formation et la nationalité séparaient, l'amitié fut intense. Piacenza avait entièrement confiance en Wessel. Celui-ci était le seul habilité à lui dire quels tableaux garder et lesquels détruire. Afin d'inscrire tous les progrès réalisés dans son travail, il lui offrit ses précieux calepins. “ 15 mars 1966 - Arrivée de Wessel qui m'offre ce carnet de notes. Je lui fais la promesse d'y inscrire chacun des épisodes concernant mon activité de peintre ”»30. Entre le couple Piacenza et le couple Wessel se forge une amitié profonde. Ils se rendent fréquemment visite et s'écrivent de nombreuses lettres. On y lit de nombreux conseils réciproques donnés à distance souvent propres à leurs travaux, d'ordre technique ou consistant en l'échange de matériels et de photographies, mais on y trouve également des récits de voyages, des comptes rendus de visites d'expositions, ou simplement des descriptions du labeur quotidien et des pensées du moment. Par exemple, Wessel écrit : “Cher Giorgio aujourd’hui Dimanche! Ça veut dire : du travail à l’atelier et Adriana et Maria t’attendent pour le déjeuner - mais tu ne viens pas, parce que tu es trop occupé par ton travail...”. Réponse de Piacenza : “Cher WILHELM, [...] Comme toujours ta fantaisie de peintre m’a imaginé justement à la place où je me trouve tous les dimanches, c’est-à-dire dans l’atelier, concentré sur mon travail...”. Wessel : “Dans ce Moment, 1 heure de l'après-midi, Maria et Adriana t’attendent dans la maison pour manger, pendant que toi aujourd’hui, jour de la Fête-Dieu - tu t’occupes de création, de mystères, de métaphysique de la matière : pappa!”31 . Au début des années soixante, la santé de Giorgio Piacenza décline à nouveau. Sa vie est alors marquée par l'alternance de périodes travaillées, d'arrêts maladie et de créations artistiques. Toute sa personnalité est sujette à son calvaire rythmé par de nombreux séjours douloureux à l'hôpital et par l'espoir sans cesse renouvelé par les périodes de soins, tout comme l'est son désir intense de devenir peintre. Piacenza visite, de 1962 à 1966, chacune des trois éditions de la Biennale de Venise. Guasco s'en remémore : « Ces retrouvailles à Venise […], furent parmi les plus heureuses. Je me souviens encore de cette espèce de fièvre qui ne nous quittait jamais tandis que nous visitions les Pavillons et les jardins de la Biennale, où bien lorsque nous nous attablions aux cafés de la Place Saint Marc. Sans discontinuer, notre groupe se défaisait pour mieux se ré-agréger un peu plus loin : on se perdait et l'on se retrouvait dix fois par jour. Il me semble qu'ils étaient tous présents ; Fontana, Tapié, Stadler, Garelli et Assetto, ainsi que tous les américains, tous les japonais et tous les 9
français que nous retrouverions bientôt à Turin, le 18 juin, pour l'inauguration de l'exposition Struttura e Stile à la Galerie d'Art Moderne [...] j'ai le souvenir de sa façon de s'immobiliser pour observer attentivement certaines œuvres dans les Pavillons de la Biennale. Il possédait cette capacité rare de s'approprier des images et leur signification profondes »32. Le rapport qui s'était instauré avec le groupe gravitant autour du critique français est perceptible dans La Bacheca qui en est l'extraordinaire illustration. Tapié : « Cher Garelli, j'aimerais transformer la bibliothèque baroque du premier étage en une bacheca remplie de sculptures en céramique (comme celles que tu es en train de faire à Castellamonte [au nord de Turin]). Elles seraient à l'image des peintres, auteurs des tableaux qui ornent mes murs. Qu'en penses-tu? ». Meuble de style baroque, transformé en vitrine à trophées afin d'y exposer vingt et une sculptures chacune dédiée à l'un des artistes suivant : Assetto, Teshigahara [Sōfu], Shiraga [Kazuo], Garelli, Onishi [Shigeru], Wessel, Inshō [Dōmoto], Tàpies, Spazzapan, Ossorio, Mathieu, Yoshihara [Jirō], Budd [David], Mukai [Shūji], Damian, Capogrossi, Morlotti, Fontana, Serpan, et dont les deux plus grandes représentent l'une Piacenza et l'autre Tapié. Véritable wunderkammer de l’informel, cette curiosité devait représenter le summum de sa collection et de ses amis. En 1963, Sōfu « en répondant favorablement à l'invitation de l'International Center of Aesthetic Research fera une démonstration de Grand Ikebana et de Calligraphies dans le jardin de la Villa Piacenza gracieusement prêtée pour l'occasion »33. Guasco note : « dans mes carnets en date du 9 juin 1963 : “ après-midi et soirée d'hier chez Piacenza. Exposition de sculptures et Ikebana géant de Sofu Teshigahara. La démonstration d'ikebana de Sofu s'est quasiment terminée en canular lorsqu'il y a déposé au sommet un parasol de jardin à larges bandes vertes et blanches. Puis, il s'est mis à peindre à l'aide d'un énorme pinceau une très longue banderole posée sur l'herbe. Il tombait une pluie fine... ” »34. Piacenza attribue à l'année 1963 un changement dans sa technique de production (« 1963 Plasticpaints et reliefs plastiques »). Sous ces deux définitions il réunit une variété d'expérimentations techniques. Ses « reliefs plastiques » correspondent à des moulages réalisés à partir de nombreux matériaux : objets, bijoux, pièces de monnaie, fossiles, etc... Ses « Plastic-paints » englobent les variantes d'expérimentation qui font suite à sa période Peinture-vinylique. Bien souvent, les techniques qu'il utilise pour ses toiles se confondent. Ainsi, il insère librement des moulages au sein de ses peintures plastiques formant de complexes jeux de couleur et de matière. « Garelli et Piacenza travaillaient souvent ensemble, ils s'échangeaient leurs découvertes techniques, lesquelles étaient, à certaines périodes, quasi quotidiennes. Il n'y avait guère de répit 1
entre leurs inventions formelles et leurs expérimentations de nouveaux produits » 35. Les résultats directement rattachés à ces travaux de recherche sont des tableaux dont les surfaces plastiques monochromes se développent en éléments tridimensionnels. Garelli, allant même jusqu'à leur apposer une étiquette spécialement conçue, est l'inventeur de leur titre : les PLAMEC. Durant l'été de « l'année 1964, il se rend au Pérou, à Lima où vit Mario l'un de ses frères, en compagnie de Wessel, Garelli et Assetto. Il expose (ce qu'il ne se sentait pas encore en mesure de faire en Italie) avec ses trois amis réunis dans le Groupe Wegas, pour une exposition Arte Actual à la Galería Antiquariato »36. Il s'agit d'une expédition complexe à plus d'un titre. Mario, leur hôte, qui avait rencontré les amis de son grand frère Giorgio durant ses voyages en Italie, produisait déjà des matériaux pour artiste (des peintures à l'huile, à la tempera et des acryliques). Non seulement il comprend tout l'intérêt de développer, avec sa Teknoquímica, de nouveaux matériaux permettant aux artistes de changer de technique mais en outre il prend conscience de l'importance du rôle que ces matériaux revêtent afin d'être propices à un renouvellement des actes artistiques. Ils doivent répondre aux problématiques d'une peinture toujours plus en volume et à grosse épaisseur, propres à assurer une très forte tenue et prêts à supporter et englober tout type de pigments et de couleurs adéquats. Aussi, il était déjà en train d'expérimenter certains nouveaux matériaux qu'il appelait "pappe"37. Mario Piacenza qui est le promoteur d'une série d'expositions dédiée à des artistes européens et sudaméricains, invite donc Garelli, Assetto et Wessel à exposer à Lima et à réaliser dans son laboratoire une partie de leurs œuvres à l'aide de ces nouveaux matériaux 38. Wessel, Garelli et Assetto forment à cette occasion le groupe acronyme WEGAS et l'exposition prévue pour trois artistes (« Antiquariato est une galerie assez spacieuse pour y présenter trois peintres conjointement dans ses salles... »39) est programmée pour le mois d’août. Giorgio Piacenza et Adriana sont très heureux de participer à l'expédition, d'aller retrouver leur famille, et ce, malgré la toute récente convalescence d'une grave période de maladie : « dans un album, je trouve mentionné ces deux dates : 10 février - 24 mars 1964. Sur les pages de l'album sont collés 124 petites œuvres, la plupart exécutées en polyester sur papier carton. Il les appelaient “reliefs plastiques”. Adriana m'apprend qu'à cette période il était malade au point de ne pas pouvoir rejoindre son studio. Il se limitait donc à effectuer des œuvres de petit format sans sortir de chez lui »40. Au Pérou, Giorgio Piacenza paraît transformé, le climat est à l'enthousiasme. On ne saurait trop affirmer si c'est grâce à Mario, ou suite à l'insistance de Wessel, qui le poussent à exposer avec le Groupe WEGAS en tant que Giorgio Da Superga, pseudonyme tiré du lieu où il vit
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et crée et qui est aussi un hommage à Giulio Da Milano. Il signe les œuvres qu'il réalise au Pérou à l'aide des pappe DA SU. Les WEGAS sont présentés dans le catalogue par des textes de Tapié. Ils signent collectivement la présentation de Giorgio da Superga41. Garelli expose ses « plamec », des bronzes ainsi que des assemblages en fer qu'il n'avait encore jamais osé montrer à Turin : libre assemblage de pièces métalliques dont l'origine mécanique est déclarée. Assetto présente ses « reliefs baroques » très certainement réalisés à Lima. Tandis que Wessel (dont le catalogue indique que : “Todas las Pinturas han sido ejecutadas con materiales plásticos” (« Toutes les Peintures ont été réalisées avec des matériaux plastiques »)) s'éloigne de sa période rigoureusement informelle : là émergent certaines figures, masques et signes graphiques antiques qui seront présents de manière marquante dans ses élaborations ultérieures. DA SU (qui depuis l'Europe, a apporté ses vinyle-peintures de petit format), expose huit «Experimento “matérico” », quatre « Investigación plástica », quatre « Metafísica del signo » et un « Mundo raro », ou « Monde Étrange ». On peut voir d'après les photographies de l'exposition que les pièces réalisées au Pérou ont beaucoup de relief et de matière. On pourrait penser à certaines visions zénithales du désert et de domaines anciens. Voici les notes extraites du carnet de voyage d'Adriana : 29 / 7 Départ 30 / 7 J'écris alors que nous descendons vers Lima HOURRA WEGAS 3 / 8 J'ai travaillé toute la journée à la Teknoquímica pour les tableaux et les esquisses. Giorgio a travaillé sans discontinuer pour Wessel. Proposition faite à Garelli d'une sculpture destinée à l'aéroport de Lima. Espérons que la commande se fasse. sam 8 août 1964 j'ai découvert le désert!!! Soirée passée avec Enrico Colmenares + Assetto + Wessel dans une cité ensevelie puis, sans Wessel, à écouter le silence du désert. 13/8 Transfert des tableaux à l'Antiquariato 14/8 Réaménagement de l’Antiquariato et mise en place finale de l'exposition. Arrivée à 7h des journalistes. C'est un début prometteur bien qu'il n'y ait eu que peu de personnes. Giorgio est heureux. 17/8 […] en soirée : inauguration officielle. Splendide : des gens élégants...Succès total « Le voyage au Pérou et au Brésil l'a profondément touché et marque un tournant dans son art. Or, et malgré toutes les suggestions formelles qu'on retrouve également dans ses œuvres durant une certaine période, je dirais cependant qu'il en tira une révélation d'ordre plus spirituelle que 1
formelle. Si l'on compare ses tableaux effectués à Lima avec les petits formats peints à Turin quelques mois auparavant, on note que le nœud informel s'est soudainement décanté. Les pierres incorporées dans ses tableaux semblent représenter un temps et un espace sans confins. Les craquelures rappellent celles du désert. Giorgio rapporta à Turin le souvenir des arcanes de la géométrie de Puruchuco, la mémoire de formes emblématiques et de symboles indéchiffrables du musée de Paracas ainsi que cette vive émotion qu'il ressentit un jour sur une plage du Brésil, à Guaruja - il était seul et le temps semblait arrêté - quand un cheval blanc s'est approché de lui et lui a léché la main »42. Successivement, mû par l'émotion du souvenir inoubliable, le parcours en tant que peintre de Piacenza, ainsi que de Wessel, sera à jamais marqué par cet impact avec un monde encore fort lointain, ancien, en rapide modernisation, riche en souvenirs du passé, rempli de culture et d'images. Tout le groupe éprouve une très forte émotion de cette vision d'un art « baroque » dans son univers mystérieux, avec sa symbolique, ses ors et ses couleurs, ainsi que la vue du désert et de ses villes fantômes. Piacenza ramènera également une petite collection d'importantes pièces archéologiques. Guasco : « Après son séjour au Pérou, il continua pendant plus d'une année ses élaborations de reliefs plastiques, employant pour cela des techniques et des matériaux toujours distincts et insérant dans ses compositions des moulages de monnaies, de petites mains, de bas-reliefs asiatiques ou de colliers. En avril 1966, il effectue ses premiers « décollages » ou « arrachages vinyliques ». La date des toutes premières expérimentations est clairement indiquée dans son carnet. Le 17 avril il y écrit : “ Je visite l'exposition de Bissier à La Bussola et j'en retire un fort sentiment de poésie et d'élégance ”, et le jour suivant : “ Dimanche 18 avril - Les 5 décollages faits aujourd'hui ont reçu l'approbation de Garelli et de Guasco. Garelli a voulu en faire un et a pu noter les nombreuses nouveautés et possibilités de ce nouveau moyen ”, et une semaine après : “ 24 avril - J'ai perfectionné la technique des décollages ”. La technique du décollage, décrite de manière simple, consiste, tout d'abord, à poser sur une surface lisse (comme du verre ou du polyéthylène) les couleurs que l'on aurait mis en dernier à l'aide d'une technique traditionnelle. Et après celles-ci, les avant-dernières, et ainsi de suite. Certaines fois Piacenza utilisait, en plus des couleurs, des découpages d'œuvres précédentes, ou bien de petits moulages, qu'il incorporait au tableau. Sur l'œuvre ainsi créée à « l'envers » il étend une strate de vinavil et par-dessus applique une toile. Plusieurs heures après, quand les couleurs et la vinavil sont parfaitement secs, il effectue « l'arrachage ». Les couleurs se détachent de la planche de polyéthylène et restent fixées sur la toile. L'arrachage du tableau donnait toujours lieu à une révélation, bien que l’artiste ait prévu et calculé chacun des effets. Un peu à la manière d'un céramiste qui attend toujours une surprise quand il ouvre le four, ou comme le graveur lorsqu'il 1
soulève son premier tirage d'une planche. Cette méthode de travail qui inverse le processus habituel requiert une très forte dose d'imagination. Durant les trois ans qui lui restent à travailler, Giorgio ne l'abandonnera plus. […] Malgré l'habitude quasi quotidienne des deux dernières années passées parmi ses œuvres, je reste impressionné par sa fertilité inventive. Rares sont les répétitions et encore plus rares (et toujours très subtiles) sont les références aux œuvres d'autres peintres. On aurait dit que le procédé qu'il avait découvert, et qu'il perfectionnait tous les jours, stimulait son imagination. Pour sûr, il lui permit d'atteindre des résultats d'une extrême précision formelle et d'une splendeur chromatique inconnue avec les techniques habituelles »43. Ces décollages ou arrachages auront pour titre Serie Acrilica (« 1966 Série d'acrylique 1-302 ») et pour souligner sa recherche continue, Dassu ne les datera que rarement, préférant leur attribuer un numéro progressif associé aux deux derniers chiffres de l'année en cours. Piacenza n'expose à nouveau qu'en 1967. À Turin, entre « l'Équipée au Pérou » en 1964 et ses deux expositions personnelles en 1967, ont lieu des événements importants. La ville de Turin est le théâtre des célébrations du centenaire de l'unification du pays et connaît un retentissement international à travers l'exposition Expo 1961, plus connue sous le nom d' Italia '61. L'année 1963, dans trois édifices historiques turinois, l'exposition Mostra del barocco piemontese inaugure un nouveau cycle de recherches sur le Baroque et focalise à nouveau l'attention de toute l'Europe sur cette période artistique que les mouvements culturels de la première moitié du XXe siècle avaient en partie négligé. En 1965, au sein du complexe Torino Esposizioni, l'exposition Gli ori del Perù (L'or du Pérou) présente l'extraordinaire univers que les membres du groupe WEGAS avaient pu découvrir sur place, en compagnie des Piacenza, l'année précédente. La jeune Galleria Sperone propose de mieux connaître le Pop Art qui avait été introduit peu auparavant à la Biennale de Venise. La GAM de Turin, en collaboration avec l'association « Amici Torinesi dell'Arte Contemporanea », expose entre novembre 1967 et janvier 1968, Le Muse Inquietanti - Maestri del Surrealismo (Les Muses Inquiétantes - Les Maîtres du Surréalisme) premier volet d'un cycle d'expositions temporaires dirigé par Luigi Carluccio qui offre une relecture de l'Art entre XIXe et XXe siècle. Piacenza s'interroge sur son activité artistique : affronter une exposition personnelle est un argument récurrent dans ses nombreuses lettres à Wessel. « Stadler et Tapié ont vu mes Travaux séparément et ils [les] ont jugés très intéressants ». « La maladie et surtout le travail m’ont empêché de dévouer beaucoup de temps à la “recherche de la matière” mais des expériences nouvelles ont été faites quand même ». Wessel : « Je lui ai montré (au critique Hersa Wischer) la petite toile dont tu m’as fait cadeau […]. Elle a noté le nom DASSU qu'elle visitera la prochaine fois [qu'elle sera] en 1
Italie... Elle visitera DASSU pour voir son œuvre »44. Sur ses œuvres commence à apparaître la signature Dassu. Il parle de Dassu à la troisième personne : « Ces jours-ci, Adriana et moi, avons terminé d’encadrer les toiles que tu avais choisi lors de ta visite à Turin et un tas d’autres que j’ai fait depuis de ton départ. Nous avons aussi mis l’atelier parfaitement en ordre et nous y avons fait une exposition complète des œuvres de Dassu. […] l’ami Garelli a exprimé un jugement très favorable. Il pense que le moment de faire une exposition plus engagée est arrivé. […] je n’ai aucune envie de réaliser cette exposition ici, en Italie » 45. Wessel : « Je suis heureux que vous ayez terminé la question de la présentation des petites et grandes toiles Dassu […]. Et Garelli a raison : Maintenant tu dois participer aux expositions à Torino avec tes chefs-d'œuvre […]. Et il faut commencer en Italie, il faut se présenter là-bas » 46. Dassu : « J’ai aussi joint une autre photographie […] qui reproduit un de mes derniers “décollages” que M. TAPIÉ a choisi d'envoyer au Japon, où il pense que je pourrai faire une exposition, dans les prochains mois de 1967 »47. Les expositions de Dassu en Italie se réaliseront en 1967. Le 17 février, commence l'exposition collective Specchi di Assetto. Plasticpaints di Dassu. Sculture di Garelli, au Circolo degli Artisti di Biella. C'est un acte courageux que d'y participer. Assetto y propose à nouveau ses « Specchi », ou « Miroirs », qu'il avait déjà montré à Turin l'année précédente à la Galleria Fogliato. À cette occasion, Guasco fait le commentaire suivant : « Ce qu'admire par-dessus tout Assetto, chez les artistes-artisans de l'Art nouveau, c'est la passion qu'ils mettent dans leur travail, cette diligence doublée de cette minutie tendant à devenir une manie et permettant des créations hors normes […]. Dans leurs cadres, Assetto a réuni toutes ses expériences techniques et ses inventions fantastiques de peintre surréaliste au début, puis d'adepte de l'abstraction-baroque. Les cristaux, quant à eux, sont de diverses couleurs, et ainsi, celui qui s'y regarde se voit à chaque fois de façon différente et a l'illusion d'un brusque changement de lumière dans la salle d'exposition... » 48. Garelli y expose des sculptures en bronze, en fer et en céramique ainsi que des dessins. Il expose entre autres sculptures, ses « Macchine », ou, si vous préférez, ses « Machines », qu'il avait présentées à la Quadriennale de Rome et ses « Tubi », ou « Tubes », proposés l'année précédente au public de la Biennale de Venise. Les œuvres de Dassu sont au nombre de quarante-sept, il y expose des petits et des moyens formats aux titres tantôt hermétiques, tantôt évocateurs. Luigi Carluccio nous apprend à leur sujet : « […] ses curiosités émanent également de sensations intensément vécues, coagulées et comprimées sur la base d'expériences naturelles : telles qu'un mur, un support, un moment de la journée, un traitd'esprit, ou peut-être même un mythe ou bien encore un souvenir ; l'artiste, à l'instant précis de leur réalisation, s'affaire à l'aide de toutes les ressources techniques qu'il connaît et d'autres qu'il 1
invente. L'emploi de médiums traditionnels mélangés à du sable, du polyester, du vernis lui permet d'obtenir une extraordinaire variété de fonds. […] L'insertion de fragments naturels ou d'artefacts, accentue et élargit autant la qualité que le champ de perception visuelle, ce qui déplace, les limites de la connaissance. Il s'agit ici d'œuvres qu'un contexte variable, de moyens de création et d'effets souhaités, maintient en suspension, entre peinture et relief coloré ; comme à mi-chemin entre une effusion d'une dilatation atmosphérique et une rigoureuse définition d'ordre structurelle. Ceci étant dit, ce qui leur confère un ton particulier, est autant suggéré par les teintes que par les matières, et se manifeste donc, par une série de touches qui restent admirables, quand bien même elles passent, du plus raffiné des jeux de contrastes de certains glacis violets et des ors-éclatants, des vertsémeraude, des bleus lapis-lazuli et des rouges-grenat à des tâches de couleurs indistinctes semblables à de la moisissure, à du lichen recouvrant un mur calciné et tombant en ruine, ou à des inflorescences organiques. On éprouve une sensation très forte, qui bien souvent prend la forme de l'objectivité sensuelle dégagée par la marque d'un cachet, suscitant alors, les échos inquiétants et pénétrants d'une sorte de "tactilisme" visuel, comme un contrechant, ou en contrepoint, à la légèreté filigranée des images »49. Au 20 du mois suivant, avec les œuvres exposées à Biella, Dassu inaugure sa première exposition personnelle à la Galleria -Centro Arte e Cultura- Liguria de Gênes, dans le Palais Cattaneo Mallone. Le catalogue d'exposition contient le texte du journaliste Luigi Carluccio, une note élégamment calligraphiée de l'éminent Michel Tapié, une note de son ami proche Franco Garelli (« […] J'ai assisté, ces dernières années, au travail quotidien de Dassu et je connais son travail réalisé auparavant. De cet « engagement » ininterrompu ressort une accumulation de centaines d'œuvres [...] de ce travail quasi éblouissant, chaque jour enrichi par l'expérience et par le truchement de techniques totalement novatrices, une nouvelle piste s'ouvre dans le cheminement de l'art. » 50) et enfin, une note d'un autre très grand ami Franco Assetto (« Ainsi, Dassu a su dépasser son désir de solitude : souhait de ne laisser voir ses travaux qu'aux amis et, encore, non sans réluctance […]. Je n'avais jamais approuvé son égoïsme, ou si vous préférez son égocentrisme, de ne pas communiquer à ses semblables ce qu'il avait su et pu réaliser durant toutes ces années avec les matières plastiques. On peut voir des dizaines de réalisations obtenues avec différents types de matériaux plastiques et aux rendus distincts. […] s'il nous est aujourd'hui donné d'apprécier la valeur artistique de Dassu, il reste impossible pour nous de connaître l'étendue de ses inventions avec les matières plastiques... »51 ). Entre 1967 et 1969, Dassu produit énormément. Il continue sa série d'acryliques : ses décollages sont progressivement numérotés et archivés comme l'attestent les photographies prises dans son 1
atelier où l'on peut les voir suspendus en ordre. Il insère dans ses œuvres des signes, des lettres, des bouts de phrase, des symboles, et les qualifient d' œuvres Pop dans son courrier à Wessel. En l'espace de ses trois dernières années il va produire près de mille œuvres. En plein doute quant au fait d'exposer à nouveau, il continue cependant à « expérimenter » et, désormais confiant de ses capacités, il s'attèle à l'établissement de ses archives et pour cela, il classe, il découpe, il remanie des œuvres définitives savamment agencées. Comme c'est avant tout un peintre, il reprend ses crayons et ses pinceaux : sur ses moulages et sur ses décollages il donne des coups de pinceau colorés qu'il superpose et entrecroise avec des signes mystérieux, des symboles, de minuscules dessins et des graffitis labyrinthiques. En 1967, Michel Tapié aurait voulu exposer ses œuvres dans les salles d'exposition permanente du « Centre », à tel point qu'il avait même projeté de faire, au sein de l' ICAR, une exposition personnelle de Dassu. Il faut pourtant attendre l'inauguration du 2 avril 1969, pour voir Dassu faire partie intégrante des 55 peintres des 15 nations que Michel Tapié présente à Milan, dans l'exposition Espaces abstraits : de l'intuition à la formalisation. C'est l'événement le plus important auquel il participe. Dans le catalogue d'exposition figure la reproduction de l'une de ses œuvres double: placés côte à côte sur la même planche, deux décollages de sa série d'acryliques, réunis par technique mixte. Encore une idée provenant de Wilhelm Wessel, qui estime qu'il faut montrer deux travaux disparates pour obtenir une œuvre majeure (« 29 juin 1967 - Durant l'après-midi, Wessel choisit des œuvres sans lien apparent afin d'en faire des toiles de plus grand format et m'ouvre ainsi une nouvelle voie pour mes créations de matière »52). Il meurt dans sa villa de Superga le 23 septembre 1969, après une ultime période de souffrance. Dix jours auparavant, il venait de réaliser sa dernière œuvre. « Il était donc conscient de pouvoir confier à la peinture la meilleure partie de son être. […] Nul parmi nous pouvait deviner ses pensées, durant les longues heures de solitude et d'insomnie, lorsque la maladie instaurait tout autour de lui une barrière qui l'isolait de tous »53. En 1974 et en 1975, la Galerie im Hailing de Göppingen proposera deux expositions personnelles du peintre Dassu. En 1975, une exposition personnelle sera dédiée à Dassu à la Galleria Nick Edel de Turin puis, l’année suivante se tiendra une exposition personnelle à la Galleria Beniamino de Sanremo. En 1986, sa famille proposera une exposition Dassu dans sa villa, Strada Superga. En 1990, aura lieu l'exposition personnelle de Dassu au centre Piemonte Artistico Culturale de Turin. 1
DASSU: épilogue. « Ce fut une visite - et une vision - sincèrement déconcertante. Je n'arrivais pas à comprendre qu'une carte aussi dense, abondante, parlante, puisse être - non pas seulement pour moi, comme je l'appris peu après - inconnue. Puis, à travers les quelques mots échangés avec lui et par le menu récit (ponctué par les silences) d'Adriana, il m'apparut clairement en regardant dans le cercle magique de l'œuvre, sa destinée; tout en faisant le parallèle entre sa vie et la peinture, non pas seulement par une vague d'émotion qui m'aurait envahi mais par la valeur exemplaire de son combat face au destin qui se dégageait progressivement de chacune de ses œuvres, je prenais doublement conscience, du sens et de la valeur de cette peinture restée quasi clandestine. » Giancarlo Vigorelli54
« Ses tableaux, qui transmettent de profondes vibrations émotionnelles, sont d'une intensité et d'une pureté que j'ai rarement retrouvée chez d'autres artistes contemporains. Lorsque toute son œuvre sera connue, l'art de notre temps s'en trouvera enrichi d'un apport insoupçonné. » Renzo Guasco55
La convergence entre les expérimentations de Piacenza/Dassu et de son action de collectionneur et de mécène clairvoyant au sein du projet/de l'expérimentation de Tapié est un fait fondamental sur le plan de la connaissance et de la réflexion. Ce projet avait vu son centre se déplacer en Europe et s'établir à Turin. Une ville somme toute centrale entre les États-Unis et le Japon, pôles extrêmes de son périmètre d'action géographique et culturel. Dassu participe à cette grande expérimentation de l'Informel, expérience également de type humaniste et ayant pour but de faire évoluer l'art européen du XXe siècle vers un art autre aux aspirations supranationales. L'idée-maîtresse de départ va se transformer : le théorème de Tapié ne se résoudra pas de lui-même, c'est-à-dire à l'intérieur même de l'Informel, il évoluera en une prolifération de nombreuses tendances autonomes et en leurs propres évolutions et adaptations, à tel point que s'imposera la tentative de réorganisation à l'aide de la logique mathématique et du structuralisme de l'architecte Luigi Moretti. Apparaîtront et se développeront spontanément la Métaphysique de la Matière, les Structures de Répétition, les Espaces Intuitifs, l' Hypergraphie, le Baroque Ensembliste et beaucoup d'autres encore.
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Le travail de Piacenza constitue, tant par l'étendue et par la linéarité de ses recherches que par ses doutes et sa remise en question, une dissection d'une cellule de la vaste aire d'expérimentation de l'Informel. Sa recherche (qui, comme pour beaucoup, ne débute qu'à l'abandon de la peinture réaliste et figurative) se structure au travers de la collecte d'œuvres, de la visite d'expositions et de la fréquentation d'amis. Elle se développe grâce aux expérimentations techniques et esthétiques, et prétend assumer les traits d'une recherche scientifique, au même titre qu'un certain Tapié voulait que soient scientifiquement établies l'analyse et la promotion de l'art. Sa Collection fait office de Musée privé, lieu de connaissance, de rencontre, de choix de vie et sera son guide durant l'exténuante recherche qui l'amènera à devenir le peintre Dassu. « La Bacheca » de Garelli en est le « manifeste » et fournit l'occasion à Tapié de déclarer : « Si l’acte d’art est essentiellement une totémisation de mythes, le fait de La Bacheca Garelli-Piacenza y ajoute un autre mythe qui le transcende à une autre puissance : ce mythe est celui de l’amitié » 56. L' Amitié, ou la manière de faire de l'art en concordance d'actions et par le biais de transferts de techniques, de promotions de pensées et par hybridation des idées. Une attitude rappelant sa manière d'être de « chercheur », c'est-à-dire à sa façon d'envisager son activité : une recherche en quête d'invention, d'expression et d'enrichissement intellectuel personnel, mais également synonyme d'expérimentations partagées en permanence, suscitant débats et toujours ouvertes à la critique. L'attitude de Giorgio Piacenza qui est contradictoire dans son oscillation perpétuelle entre activité professionnelle et hobby intimiste, entre sphère publique et sphère privée, est sublimée par celle de Dassu, cohérente dans sa recherche de la qualité esthétique et formelle la plus pure. La lecture de l'Art de cet Homme est la grande histoire d'un être qui agit librement.
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Giancarlo Vigorelli, « Il "caso Piacenza" », introduction du catalogue d'exposition Giorgio Piacenza : DASSU, Renzo Guasco (a cura di Adriana Bechis ved. Piacenza), Tipografie Torinese Editrice, Turin, 1975, p. 14. 2 Groupe acronyme formé lors d'un séjour à Lima en 1964 et composé de : Wessel, Garelli, Assetto et Giorgio da Superga [N.d.T.]. 3 Michel Tapié, in Introduction à La Connaissance Esthétique, Prolégomènes à une pratique de la connaissance logico-passionnelle des structures esthétiques et à une puissance qui est aussi celle de la perception artistique des ensembles abstraits, International Center of Aesthetic Research, Turin, 1967. 4 “I testi che seguono non avrebbero potuto vedere la luce senza l’esistenza di fatto di determinate creazioni di strutture di spazio astratto di artisti che voglio nominare prima di tutto in una lista ordinata empiricamente; le opere in questione sono i veri assiomi che danno origine a questa introduzione ad una estetica “altra”, post-dada.” 5 “Dassu esiste ed esisterà come artista, egli è presente nella collezione del “Centre d’Esthétique”, ho portato alcune sue opere in giro per il mondo, esposte in U.S.A. ed in Giappone insieme ai Gutaï, le riproduco nei miei libri; io continuerò a presentarlo sia nei gruppi d’“hypergraphies” come negli ensembles d’“espaces abstraits”...Ho anche conosciuto monsieur Piacenza, di cui mi onoro di aver avuto l’amicizia. Collezionista delle opere audaci di un “presente” che era il suo, egli ha saputo integrare queste opere d’arte in un quadro d’arte di vivere in cui l’amicizia confidenziale trovava la possibilità di svilupparsi profondamente...” Citation du texte-hommage de Michel Tapié, « En haute amitié »(1970), dans Renzo Guasco, op. cit. (voir note 1) , p. 63. 6 Renzo Guasco (1910-2004) poète, critique littéraire et critique d'art. Il eut lui aussi une activité professionnelle (fonction dirigeante à la S.A.I.) éloignée de ses centres d'intérêts culturels. Il a collaboré à de nombreuses parutions en tant que critique littéraire et artistique. Citons entre autres : le quotidien Il Popolo d'Italia, la revue hebdomadaire Radiocorriere TV et la revue Europa Letteraria dont le fondateur et directeur n'est autre que le célèbre critique Giancarlo Vigorelli. La maison d'édition ¿Dantesca? a publié de nombreux volumes de ses poèmes et de ses critiques. 7 Infos disponibles en ligne sur la Biennale de Teknoquímica : http://www.tekno.com.pe/GOPortal/Default.aspx? tabid=122 (date d'accès: 01 février 2011). 8 René Gruau (1909-2004), comte René Zavagli-Ricciardelli Delle Caminate, alias San Secondo, alias Borys. 9 Specchi di Assetto. Plasticpaints di Dassu. Sculture di Garelli, cat. d'expo, Circolo degli Artisti, Biella, 1967. 10 Citation de « Ricordi di un'amicizia », Renzo Guasco, op. cit. (voir note 1), p.18. 11 Mostra DASSU, cat. d'expo., Galleria Liguria, Gênes, 1967 (N.B.: en se contentant de remplacer « Giorgio da Superga » par « Dassu », le texte de ce catalogue [cette citation y comprise] correspond à la traduction de celui de l'exposition de 1964 du Grupo WEGAS y Giorgio da Superga à la Galería Antiquariato de Lima, au Pérou). 12 Luigi Carluccio, Specchi di Assetto. Plasticpaints di Dassu. Sculture di Garelli, Circolo degli Artisti di Biella, Biella 1967 (et Gênes, 1967). 13 Marco Rosci et Giulia Zanasi, Da Milano, cat. d'expo., Galleria Sant’Agostino, Turin, 1998. 14 Renzo Guasco, 1975, op. cit. (voir note 1) , p. 19. 15 Voir note 10. 16 Vinavil : acronyme de Vinyl Acetate de Villadossola, ville septentrionale du Piémont [N.d.T.]. 17 Mirella Bandini, « Michel Tapié de Paris à Turin », Tapié : un art autre : Torino Parigi New York Osaka, éd. d'Arte Fratelli Pozzo, Turin, 1997, p. 33. 18 Mirella Bandini, ibid. supra, p. 37. 19 Communément appelée GAM de Turin : Galleria civica d' Arte Moderna di Torino [N.d.T.]. 20 Vittorio Viale, Il Museo Civico di Torino 1959-1960, Turin, 1960. 21 Tasse (Torquato Tasso, dit le) : célèbre poète du XVIe siècle (1544-1595) [N.d.T.]. 22 Durant ses dix-sept années de fonctionnement à Turin, plus connu sous le nom de "Centre" ou de "Musée-Manifeste", l' ICAR : International Center of Aesthetic Research, dont on trouve des parutions sous son nom traduit en italien Centro Internazionale di Ricerche Estetiche, ou encore en français Centre international de Recherches Esthétiques (à noter les trois acronymes composés : ICAR, CIRE et CRE)[N.d.T.]. 23 Mirella Bandini, op.cit. (voir note 17), pp. 37-38. 24 L'exposition circule en se modifiant, d'abord en janvier 1963 de la GAM de Turin à la Städtische Kunstgalerie de Bochum avec le titre Profile I, Strukturen und Stile , puis en 1964 avec le titre Intuiciones y realizaciones formales au Centro de Artes Visuales del Instituto Torcuato Di Tella à Buenos Aires [N.d.T.]. 25 Vittorio Viale, Présentation de Strutture e Stile, cat. d'expo., Michel Tapié et Luigi Moretti, éd. d'Arte Fratelli Pozzo, Turin, 1962. 26 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 19. 27 Pour plus d'informations sur Franco Garelli voir : Sculture di Garelli, Enrico Crispolti, Turin, 1966. Enrico Crispolti (a cura di), Franco Garelli, cat. d'expo., Circolo degli Artisti, Milan, 1989. Lorenza Trucchi, Piergiorgio Dragone et Enrico Crispolti, Franco Garelli, Moderno Ulisse della scultura, cat. d'expo., Galleria Martano, Turin en collaboration avec la Galleria Martini & Ronchetti, Gênes, 1995 28 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 20.
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Infos disponibles en ligne sur Wilhelm Wessel et Irmgart Wessel-Zumloh : http://www.villa-wessel.de/ (date d'accès: 01 février 2011) 30 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 22. Pour information, le contenu des carnets a été intégralement reporté par Guasco dans son manuscrit non publié qui pourrait être antérieur au texte du catalogue paru en 1975. Nous avons donc la possibilité de reprendre fidèlement les parties concernant l'activité artistique de Piacenza. À ce jour, ses carnets n'ont pas été retrouvés. Comme certaines reproductions permettent de le déduire, il s'agit de carnets à dessin qui lui avaient été offerts par Wessel, identiques à ceux que ce dernier a en main sur de nombreuses photos. 31 Le terme “pappa” désigne de manière ironique les matériaux créés par Mario, le frère de Giorgio Piacenza. L'expression “la pappa è pronta!” est utilisée de manière coutumière en Italie pour signifier que le repas est prêt, que la tambouille, est servie! De la correspondance entre Wessel et Piacenza a été conservée bon nombre des originaux des lettres de Wessel datées de 1962 à 1969 ainsi que les photocopies de celles de Piacenza entre 1965 et 1969 [N.d.T.]. Pour information, voici le texte ( avant correction ) avec entre parenthèses la date de rédaction de celles-ci : “Caro Giorgio aujourd’hui Dimanche! Ca veut dire, tu travail à l’atelier et Adriana et Maria t’attend pour le déjeuner mais tu ne viens pas, pars que tu es trop occupé par ton travail...”(Lettre de Wessel à Piacenza du 9 mai 1965) - “Cher WILHELM, ... Comme toujours ta fantaisie de peintre m’a imaginé justement à la place où je me trouve tous les dimanches, c’est-à-dire dans l’atelier, concentré sur mon travail...” (Lettre de Piacenza à Wessel du 12 mai 1965) - “ Dans ce Moment, 1 heure-midi-, Maria et Adriana t’attendend dans la maison pour manger, pendent toi - aujourd’hui fête de Dieu - tu t’occupe avec la création, avec la mistère, la methaphisique de la mathière, pappa! ” (Lettre de Wessel à Piacenza du jeudi 17 juin 1965). 32 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 17 et p. 24. 33 Carton d'invitation de l' ICAR au vernissage de l'exposition et à la performance de Teshigahara le samedi 8 juin 1963. 34 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 22. 35 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 19. 36 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 22. 37 « À propos des "pappe", suite à toute une série d'expérimentations […] elles ne montrent pas de signes du phénomène d'arrondissement. C'est-à-dire qu'elle (la matière pappa) respecte parfaitement les traits qu'on veut lui donner. Naturellement, on obtient un effet structuré uniquement blanc et l'on doit ensuite y appliquer la couleur à l'aide d'huile, de gel, de vernis, etc... L'aspect final est complètement différent du rendu d'un plâtre coloré car, outre la possibilité d'une structure plus plastique et plus dense, la pappa capte la couleur de manière bien distincte du plâtre ou du ciment, comme si c'était la pâte même qui avait cette couleur. J'ai pu confirmer ce stade de développement de la PAPPA, non seulement à l'aune de mes propres recherches mais également à l'échelle d'un grand chantier en cours d'exécution.... Une peinture murale pour l'abside d'une église, appliquée directement sur ciment, qu'est en train de réaliser Fernando de Zsyslo, considéré comme étant le plus grand peintre abstrait péruvien [...] Il est enthousiasmé par l'utilisation des pappe et du gel et projette de faire toute une série de tableaux à l'aide de ce système. Un autre grand peintre a mis la main à la pappa et prépare actuellement une exposition. Quel dommage que Monsieur Tàpies n'ait pas connaissance des pappe, il aurait la solution pour que ses tableaux, conservés dans les principaux musées des États-Unis, ne tombent pas en ruine! […] Même la méthode de la résine perdue a été nettement améliorée : dommage que Garelli ne soit pas là, je lui aurais donné de nouveaux moyens techniques très amusants. Comme par exemple, la possibilité de souder deux morceaux de métal sans soudure électrique ni autogène » (Lettre de Mario Piacenza à Giorgio Piacenza du 5 mars 1964). “A proposito delle pappe, dopo tutta una serie di nuovi esperimenti ... non da il fenomeno dell’ "arrondissement". Ossia rispetta perfettamente il segno che si voglia dare. Naturalmente si ottiene un effetto strutturato solamente in bianco ed il colore viene applicato successivamente, con olio, gel, smalti, ecc.. L’aspetto finale è ben diverso dal gesso dipinto, perchè oltre alla possibilità di una struttura più plastica e più ricca, la pappa riceve il colore in forma molto diversa dal gesso o dal cemento, come se fosse la massa stessa con il colore. Questa fase nello sviluppo della PAPPA l’ho potuta confermare, oltre che con le mie prove dirette, con grossi lavori in corso di esecuzione..... un gran murale per l’abside di una chiesa, applicato direttamente su cemento, che sta eseguendo Fernando de Zsyslo, considerato il miglior pittore astratto del Perù ... é molto entusiasta delle pappe e del gel ed ha in progetto una serie di quadri con tale sistema. Un altro pittore ha già preso la mano alla pappa e sta preparando una esposizione. Peccato che il Sig. Tàpies non conosca le pappe, perché avrebbe il mezzo per cui i suoi quadri non cadano a pezzi nei principali musei degli Stati Uniti. ...Anche il metodo della resina perduta é stato migliorato, peccato che non ci sia qui Garelli , perché gli potrei dare dei mezzi nuovi molto divertenti. Per esempio saldare due pezzi di metallo senza saldatura elettrica né autogena” Lettera di Mario Piacenza a Giorgio Piacenza in data 5 marzo 1964. 38 « Lui il a fait une grande activité sur le plan d’art. Surtout c’était lui, qui avait organisé notre exposition. Nous avions travaillé dans son studio, avec son matériel de couleurs etc. Nous lui remercions tant que je lui ai prié d’accepter cette peinture “Fantasma azul” comme souvenir de notre travail chez lui pour tous qu’il a fait pour nous » (Lettre de Wessel à Piacenza du 3 juin 1965).
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“Antiquariato é una galleria piuttosto grande nelle cui sale risulta facile presentare tre pittori nello stesso tempo... ” (Lettre de Mario Piacenza à Franco Assetto du 23 mai 1964). 40 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 22. 41 Voir catalogue d'exposition Arte Actual muestra Grupo WEGAS Wessel - Garelli - Assetto y Giorgio da Superga à la Galería Antiquariato, Lima, Pérou, 1964. 42 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 24. 43 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), pp. 24-26.
Pour information, voici le texte ( avant correction ) avec entre parenthèses la date de rédaction de leur correspondance : « Stadler et Tapié ont vu mes Travaux separatement et ils ont jugé tres interéssants » (Lettre de Piacenza à Wessel du 23 janvier 1965). « La maladie et sourtout le travail m’ont empeché de devouer beaucoup de temps à la “recherche de la matiére” mais des experiences nouvelles ont eté fait quand meme » (Lettre de Piacenza à Wessel du 4 mars 1965). « J’ai montré à elle (la critica Hersa Wischer) la petit toile que tu m’as fait cadeau...Elle s’est notée le nom DASSU et s’elle visitera prochein fois en Italie...elle visitera DASSU pour voir son oevre » (Lettre de Wessel à Piacenza du 9 mai 1965). 45 Pour information, voici le texte ( avant correction ) avec entre parenthèses la date de rédaction de leur correspondance : « Dans ces jours nous avons terminé, Adriana et moi, d’encadrer les toiles que tu avais choisi lors de ta visite à Turin et un tas d’autres que j’ai fait depuis de ton depart. Nous avons aussi mis l’atelier dans un ordre complet et nous y avons fait une exposition complete des oevres de Dassu. ...l’ami Garelli à exprimé un jugement tres favorable. Il pense que le moment soit arrivé de fair une exposition plus engagée....je n’ai pas aucun envie de reàlizer cette exposition ici en Italie » (Lettre de Piacenza à Wessel du 23 août 1965). 46 Pour information, voici le texte ( avant correction ) avec entre parenthèses la date de rédaction de leur correspondance : « Je suis heureux que vous avez terminè la question de la prèsentation des petit et grandes toile Dassu....Et Garelli a raison : Maintenant tu dois parteciper aux esposition a Torino avec tes chef d’oevres...Et il faut commencer en Italie, il faut se presenter la bas . » (Lettre de Wessel à Piacenza du 2 septembre 1965). 47 Pour information, voici le texte ( avant correction ) avec entre parenthèses la date de rédaction de leur correspondance : « J’ai aussi adjoint une autre photographie...qui reproduit un de mes actuelle “ decollages” que M. TAPIÉ a choisi pour l’envoier en Japon où il pense que je pourrai faire une exposition dans les prochains mois du 1967 » (Lettre de Piacenza à Wessel du 7 octobre 1966). 48 “Quello che Assetto ammira negli artisti-artigiani dell’Art nouveau è la passione per il lavoro, la diligenza, lo scrupolo, che può raggiungere la mania e dare vita a frutti abnormi.... Nelle loro cornici Assetto ha riunito tutte le sue esperienze tecniche e le sue invenzioni fantastiche di pittore surrealista prima, astratto-barocco poi. I cristalli sono di colori differenti, in modo che chi vi si specchia si vede ogni volta diverso e prova l’illusione che sia improvvisamente mutata la luce dell’ambiente ...” Renzo Guasco, ¿..? 49 “...le sue curiosità muovono ancora da sensazioni intensamente accolte, rapprese e compresse su un nucleo di esperienze di natura: un muro, una quinta, un’ora del giorno, una piega dello spirito, forse anche un mito, o una memoria; il momento della loro realizzazione concreta trova l’artista impegnato con tutte le risorse conosciute della tecnica e con altre che inventa. L’uso della sabbia, del poliestere, dello smalto commisti con i medium convenzionali realizzano una straordinaria varietà di fondo ...L’inserimento di frammenti naturali o di manufatti accentua e dilata sia il campo che la qualità della percezione visiva, e quindi sposta i termini mediati della conoscenza. Sono opere che un contesto variabile di mezzi e di effetti, tiene sospesi tra la pittura e il rilievo colorato; tra l’effusione atmosferica in espansione e la rigorosa definizione strutturale. Esse trovano la loro nota più persuasiva in una serie di note, suggerite dalla tinta e dalla materia, che sono preziose anche quando passano dalla raffinatezza di certe velature violacee e dagli squilli dell’oro, del verde degli smeraldi, dell’azzurro dei lapislazzuli e del rosso delle granate all’indistinto delle muffe, dei licheni di un muro calcinato e lebbroso, o di una infiorescenza organica. E’ una forte sensazione, che acquisisce sovente l’oggettività sensuale di un sigillo e suscita, allora, gli echi sconvolgenti e penetranti di una specie di tattilismo visuale, come un contrappunto, o un controcanto, alla lievità filigranata delle immagini” Luigi Carluccio, in Mostra DASSU, catalogue d'expo., Galleria Liguria, Gênes, 1967. 50 “..Conosco il quotidiano lavoro di Dassu di questi ultimi anni e so il lavoro di prima. Il suo “impegno” ininterrotto ha accumulato centinaia di opere ...da questo lavoro quasi abbagliante, nell’esperienza di ogni giorno arricchita nel cammino delle tecniche nuovissime, una nuova pista si apre nel cammino dell’arte.” Franco Garelli, in Mostra DASSU, catalogue d'expo., Galleria Liguria, Gênes, 1967. 51 “E Dassu ha superato anche il suo desiderio di solitudine, di non lasciar vedere i suoi lavori che agli amici e con riluttanza....Non m’era mai apparso giusto il suo egoismo o meglio egocentrismo di non comunicare agli altri uomini 44
cosa aveva potuto e saputo realizzare durante tanti anni con le materie plastiche. Ci sono decine di realizzazioni ottenute con materie plastiche differenti e con effetti diversi. ...se è possibile vedere oggi il valore artistico di Dassu, non è possibile conoscere la gamma di realizzazioni ottenute con il variare delle sue invenzioni con la plastica...” Franco Assetto, in Mostra DASSU, catalogue d'expo., Galleria Liguria, Gênes, 1967. 52 Carnet de Giorgio Piacenza voir note 30. 53 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 29. 54 Giancarlo Vigorelli, « Il "caso Piacenza" », introduction du catalogue d'exposition Giorgio Piacenza : DASSU, Renzo Guasco (a cura di Adriana Bechis ved. Piacenza), Tipografie Torinese Editrice, Turin, 1975, p. 11. 55 Renzo Guasco, op.cit. (voir note 1), p. 32 et p. 33. 56 Michel Tapié, in La Bacheca c'est-à-dire Les Personnages du Centre international de Recherches Esthétiques de Franco Garelli, pour Giorgio Piacenza, Turin, 1963 La Bacheca ovverossia personaggi del Centro Internazionale di Ricerche Estetiche di Franco Garelli per Giorgio Piacenza, Torino, 1963.