sommaire
8 introduction
ART ANTIQUE ET ART MEDIÉVAL
RENAISSANCE ET MANIÉRISME
DU BAROQUE AU NÉOCLASSICIMSE
XIX e SIÈCLE
ÈRE MODERNE
12 ART DE LA PRÉHISTOIRE
78 ÉCLOSION DE LA RENAISSANCE
156 BAROQUE EN ITALIE
234 ROMANTISME
312 EXPRESSIONNISME
166 BAROQUE EN FLANDRE ET EN ESPAGNE
246 PAYSAGES ROMANTIQUES
322 CUBISME
256 PRÉRAPHAÉLISME
332 NAISSANCE DE L’ART ABSTRAIT
22 ART ÉGYPTIEN 32 ART GREC ET ART ROMAIN
88 ÉPANOUISSEMENT DE LA RENAISSANCE
42 ART PALÉOCHRéTIEN ET ART BYZANTIN
100 HAUTE RENAISSANCE
54 « SIÈCLES OBSCURS » 64 ART ROMAN ET ART GOTHIQUE
110 RENAISSANCE À VENISE 120 RENAISSANCE DANS LES PAYS DU NORD 132 MANIÉRISME EN ITALIE 142 MANIÉRISME HORS D’ITALIE
178 BAROQUE AUX PAYS-BAS 190 BAROQUE EN FRANCE 200 ROCOCO EN FRANCE 210 ROCOCO HORS DE FRANCE 220 NÉOCLASSICISME
266 RÉALISME 276 IMPRESSIONNISME 288 pPOSTIMPRESSIONNISME 298 SYMBOLISME
340 DADAÏSME ET SURRÉALISME 350 EXPRESSIONNISME ABSTRAIT 358 POP ART ET OP ART 366 ABSTRACTION CONTEMPORAINE 374 TRADITION FIGURATIVE
384 GLOSSAIRE 386 INDEX DES ARTISTES 392 INDEX GÉNÉRAL 399 REMERCIEMENTS
RENAISSANCE ET MANIÉRISME
ÉCLOSION DE LA RENAISSANCE
origines L’ICONOGRAPHIE CHRÉTIENNE La peinture de la Renaissance se distingue par son goût pour le réalisme. Les artistes rompent avec le style linéaire et plat de Byzance au profit de formes et de figures plus réalistes, aux rondeurs sculpturales, situées dans un espace réel. Si l’iconographie chrétienne de Byzance est volontairement mystérieuse et distante du monde des hommes, Giotto, Duccio et leurs disciples commencent à raconter l’histoire du Christ à travers des termes plus proches de la réalité et de l’humanité. Dans les scènes narratives, la représentation toujours plus réaliste du monde matériel va de pair avec une expression nouvelle, tout aussi réaliste, de l’émotion et du drame.
INFLUENCES ARTISTIQUES Les fresques de la chapelle de l’Arena, au style narratif émouvant, sont influencées par la prédication franciscaine et les miracles, ainsi que par les prédécesseurs immédiats de Giotto et l’art classique. Leur réalisme monumental, d’une grande simplicité, est dû en partie à la technique de la fresque qui exige un travail méthodique et rapide sur une surface murale apprêtée chaque jour avec du plâtre humide.
Les enseignements de saint François (v. 1182-1226) et de son ordre humanisent la peinture italienne : le Christ est figuré en homme de douleur et non en dieu triomphant et distant. Saint François apparaît souvent dans l’art de la Renaissance italienne.
Saint François et les anges (détail, v. 1250-1300), de la ville natale du saint. Basilique Sainte-Mariedes-Anges, Assise, Italie
La rigidité de l’art byzantin s’atténue dans les peintures de Cimabue (Cenni di Pepe), peut-être maître de Giotto. Les personnages ont des expressions plus douces et des gestes plus naturels. Le trône incurvé traduit le volume et le recul de l’espace.
Maestà (v. 1280-1290) peinte par Cimabue pour l’autel de la basilique Santa Trinità à Florence. Galerie des Offices, Florence, Italie
Inspiré par l’art romain antique, Pietro Cavallini élabore un style plus naturaliste. Sa peinture novatrice de la figure humaine, robuste et adoucie, influence les artistes comme Giotto qui découvrent sans doute ses œuvres à Rome.
Le Jugement dernier (détail, années 1290), Cavallini peint un Christ très tridimensionnel. Église Sainte-Cécile-du-Trastevere, Rome, Italie
Nicola Pisano et son fils Giovanni sont à la sculpture ce que Giotto est à la peinture. Inspirés par l’art antique, ils introduisent le drame et l’émotion dans leurs scènes narratives chargées, proches des fresques de Giotto.
La Crucifixion (détail, 1265-1268), d’une chaire sculptée par Nicola Pisano, traduit l’émotion et le tragique. Cathédrale de Sienne, Italie
ŒUVRE-CLÉ Le Baiser de Judas Giotto di Bondone, v. 1303-1306, Chapelle de l’Arena, Padoue, Italie Cette scène saisissante d’intensité, tirée du cycle de Giotto dans la chapelle de l’Arena, présente l’instant où Judas Iscariote trahit Jésus en le désignant d’un baiser de salutation. Au centre de l’image, le traître approche théâtralement son visage de celui du Christ qu’il enveloppe de son manteau, sur un fond hérissé de lances. Le regard impassible de Jésus, qui fixe calmement le visage tendu de Judas, présente une vigueur psychologique intense. Célèbres pour leur naturalisme révolutionnaire, leur splendeur monumentale, leur narration vigoureuse et leur impact émotionnel, ces fresques sont saluées, même par les contemporains de Giotto, comme l’aube d’une ère artistique nouvelle.
Giotto di Bondone Colle di Vespignano ?, près de Florence, Italie, v. 1270 – Florence, 8 janvier 1337
biographie
080
Peut-être formé par Cimabue, Giotto est le premier artiste dont le nom est connu depuis l’Antiquité. Dante, Boccace et Pétrarque, personnalités majeures de l’époque, font son éloge et il est réclamé dans toute l’Italie. Bien que l’attribution de ses œuvres soit souvent contestée, les fresques de la chapelle de l’Arena à Padoue et des chapelles Bardi et Peruzzi à Santa Croce de Florence semblent de sa main. Il a sans doute participé aux cycles de fresques de Saint François à Assise. Plusieurs retables portant sa signature sont peut-être de son atelier. Bien qu’elle ne soit pas signée, la Vierge d’Ognissanti lui est universellement attribuée car elle possède la même grandeur solennelle et la même humanité que les fresques de l’Arena.
081
RENAISSANCE À VENISE
RENAISSANCE À VENISE
La cité lagunaire
COULEUR ET LUMIÈRE
National Gallery, Londres, Royaume-Uni
L’éblouissant portrait que Bellini peint du doge Loredan, représentant élu prête-nom de la république de Venise, illustre à merveille la nature et le contexte de l’art pictural de la Renaissance vénitienne. Pour cette magistrale peinture à l’huile, Bellini choisit un fond bleu uni qui met en valeur l’éclat nacré du manteau et de la coiffe de cérémonie en soie, brodés de fils d’or scintillants.
la république de Venise et les Turcs ottomans. À la demande du sultan Mehmed II, le sénat vénitien envoie le peintre Gentile Bellini à Constantinople.
orientale, les navires rapportent des marbres
la Renaissance, Venise est aussi l’une des plus
exotiques polychromes, mouchetés de pourpre,
stables sur le plan politique. Bâtie sur une vaste
de rouge et de vert. Les bâtiments colorés
lagune, elle occupe une situation idéale pour
reflétés sur les canaux génèrent des couleurs
commercer avec l’Orient. Pendant tout le Moyen
fluides et changeantes qui se retrouvent
Âge, elle s’enrichit grâce au trafic maritime et elle
dans l’art pictural. L’Orient fournit également
envahit l’Italie. L’émissaire français Philippe de Commynes « s’émerveille » devant la formidable ville « sur l’eau ».
crée un empire d’outre-mer qui s’étend au-delà
des produits de luxe tels qu’épices exotiques,
w 1501 Lorenzo Loredan est élu doge de Venise.
de la côte orientale de l’Adriatique, jusqu’à Chypre
colorants et pigments utilisés pour les
en passant par la Crète. La Sérénissime république
manuscrits, les textiles, les céramiques et les
w 1529 Le sculpteur et architecte
cours de sa longue carrière, Bellini est presque
étend aussi son hégémonie sur l’Italie du Nord.
peintures. Les colorants importés, qui donnent
l’unique artisan de la métamorphose de Venise –
unique de gouvernement. Ses dirigeants sont
recherchées pour les velours et les soies,
issus exclusivement des familles nobles qui
s’harmonisent aux roses, rouges et ors éclatants
cité secondaire sur le plan artistique – en foyer
gouvernent sous la présidence d’un doge élu,
des créations de Bellini, Palma le Vieux,
représentant de la république mais dépourvu
Titien et Véronèse.
d’art majeur, à l’égal des splendides villes de
de pouvoir politique. Les commandes artistiques
Florence et de Rome. La peinture vénitienne
importantes sont passées par l’État et les scuole :
techniques picturales. Si le climat sec et chaud
organismes de charité qui font office de clubs
de la Toscane permet à la fresque de s’épanouir,
sociaux pour les citoyens. Les artistes sont
l’humidité de Venise est incompatible avec
payés en ducats vénitiens, l’une des monnaies
ce procédé. Mais grâce à l’industrie de la toile
les plus fortes d’Europe.
à voile, les supports ne manquent pas,
de la peinture vénitienne de la Renaissance. Au
Giovanni Bellini, v. 1501,
w 1479 Un traité de paix est signé entre
Première cité marchande de l’Europe de
L’art de Giovanni Bellini marque les prémices
Portrait du doge Leonardo Loredan
L’essor d’une république insulaire
diffère des créations contemporaines en Italie centrale : alors que l’art plus intellectuel de Florence est fondé sur la ligne, Bellini et ses
La stabilité de Venise repose sur sa forme
À Venise, l’omniprésence de l’eau se répercute sur la peinture à bien des égards. L’eau crée la
w 1494 Le roi de France Charles VIII
Jacopo Sansovino qui a fui Rome après le sac de 1527 est nommé architecte de la république de Venise.
les nuances somptueuses et profondes
w 1547 À la bataille de Mühlberg an der Elbe,
Le climat vénitien affecte également les
et les peintres qui pratiquent l’huile sur la toile élaborent un style personnel spécifique.
DATES-CLÉS
v. 1440-1600
époque
les troupes catholiques de l’empereur germanique Charles Quint battent l’armée protestante de l’Électeur de Saxe. L’année suivante, Titien se rend à la cour impériale d’Augsbourg et peint un portrait de Charles Quint à cheval, à la tête de ses troupes. w 1568 Publication de la deuxième édition
révisée des Vies de Vasari qui consacre à l’art vénitien plus de pages que la première édition.
couleur et reflète la lumière. De la Méditerranée
disciples élaborent un style spécifique caractérisé par la beauté et la sensualité de la couleur, ainsi que par l’évocation de la lumière et de l’atmosphère. L’utilisation pittoresque de la couleur chez Bellini et son approche poétique du paysage s’intensifient chez Titien et Giorgione. Après la mort prématurée de ce dernier, c’est le grand maître Titien qui domine l’art vénitien. Jouissant d’un statut international inégalé, il exerce une influence durable sur l’art occidental.
La peinture vénitienne… s’attache à la couleur, à la lumière et à l’espace, et seulement en second lieu à la forme 1970 | John Steer Historien d’art britannique
Beauté reflétée
Sa situation sur la lagune confère à Venise une atmosphère unique : la lumière, l’espace et la couleur engendrent une beauté poétique reflétée par les peintures vénitiennes de la Renaissance.
111
124
RENAISSANCE ET MANIÉRISME
RENAISSANCE DANS LES PAYS DU NORD
CHRONOLOGIE
Le Retable de Mérode
Museum of Art, New York, États-Unis
Sur ce triptyque célèbre, l’Annonciation se déroule dans un intérieur flamand. Les donateurs ont peut-être acheté le tableau central avant de commander les deux panneaux latéraux, dont celui de gauche qui les représente. De nombreux objets y ont un sens symbolique : la souricière dans l’atelier de Joseph symbolise l’Incarnation du Christ qui « piège » le diable.
Citoyen de Tournai
Jean Fouquet, v. 1455-1460,
« LE MAîTRE DE FLÉMALLE »
Maître de Flémalle/Robert Campin (atelier de), v. 1427-1432, Metropolitan
contexte
La Renaissance nordique apparaît au xve siècle en Flandre avec les œuvres novatrices de Van Eyck, du Maître de Flémalle et de Van der Weyden. Au xvie siècle, ce premier style flamand se transforme en véritable « floraison » de la Renaissance nordique. Les Allemands Dürer et Grünewald, ainsi qu’une nouvelle génération d’artistes flamands tels Bosch et Bruegel, élaborent des styles et des thèmes inédits comme les paysages et les scènes de la vie quotidienne.
Étienne Chevalier présenté par saint Étienne (Diptyque de Melun) Gemäldegalerie, Berlin, Allemagne
Ce panneau forme initialement un diptyque avec la Vierge à l’Enfant (à droite). Peintre du roi de France Charles VII, Fouquet place le trésorier du roi et son saint patron dans un espace réaliste où la perspective est présente.
« Le Maître de Flémalle » est le nom inventé pour désigner l’auteur anonyme d’un groupe de peintures dont on croyait jadis à tort qu’elles provenaient d’une « abbaye de Flémalle ». Ces peintures dominent la première école flamande au même titre que celles de Jan van Eyck. Pour des raisons stylistiques, elles ont d’abord été attribuées au jeune Rogier van der Weyden mais la plupart des spécialistes pensent aujourd’hui qu’elles sont de Robert Campin, le maître de Rogier, éminent artiste de Tournai (actuelle Belgique).
La Vierge et l’Enfant entourés d’anges (Diptyque de Melun)
Jean Fouquet, v. 1455-1460, Musée royal des Beaux-Arts d’Anvers, Belgique
Si le donateur et son saint patron sont représentés dans un intérieur italianisant dépeint avec précision (à gauche), la Vierge et l’Enfant, entourés de chérubins et de séraphins bleus et rouges, occupent quant à eux un espace céleste irréaliste. La Vierge au sein nu, extraordinairement lisse et blanche, vêtue d’une élégante tenue de reine, est inspirée d’Agnès Sorel, la maîtresse du roi, morte en 1450.
En 1410, l’artiste Robert Campin acquiert la citoyenneté de Tournai, ce qui indique qu’il est probablement né ailleurs. La Mise au tombeau qui lui est attribuée date à peu près de cette époque. Elle associe le fond d’or médiéval et les personnages sculpturaux réalistes, influencés par l’œuvre de Claus Sluter.
1410
1415
Commande princière Entre 1450 et 1460, Jean Fouquet enlumine un livre d’heures pour Étienne Chevalier, son principal mécène à la cour de Charles VII.
1420
1425
1430
1435
1440
1445
1450
1455
Van Eyck à La Haye
La première mention de Jan van Eyck date d’août 1422 : il est alors cité comme un maître travaillant avec un assistant à la cour de Jean de Bavière, comte de Hollande, à La Haye.
La peinture flamande plaira en général aux dévots plus que toute peinture italienne 1548 | Michel-Ange
Rogier van der Weyden
Cité par le peintre portugais Francesco de Holanda
biographie
Tournai, Flandre, 1399 ? – Bruxelles, Flandre, 18 juin 1464
Rogier de la Pasture (« Roger de la prairie »), le plus grand artiste flamand du milieu du xve siècle, est connu sous le nom néerlandais de Rogier van der Weyden. Fils d’un coutelier, il est placé en apprentissage chez Robert Campin à Tournai. En 1435, on le retrouve à Bruxelles dont il est nommé peintre officiel l’année suivante. Il peint des portraits et des sujets religieux, et il dirige un atelier prospère. À la mort de Van Eyck en 1444, il devient le premier peintre de la cour de Philippe le Bon. Sa renommée gagne la France, l’Allemagne, l’Italie et l’Espagne, et son style naturaliste, émouvant et sensible, influence profondément l’art pictural européen.
La Descente de croix
Rogier van der Weyden, v. 1440, Musée du Prado, Madrid, Espagne
À l’instar des retables sculptés courants dans les églises flamandes, Rogier entasse ses personnages presque grandeur nature dans un espace restreint, accentuant l’émotion intense suscitée par les expressions angoissées et les attitudes contorsionnées. Réalisé pour la guilde des arbalétriers de Louvain, ce chef-d’œuvre soigné cache de minuscules arbalètes dans ses entrelacs peints. Les postures du Christ et de Marie en évoquent également la forme.
Mise au tombeau
Dirk Bouts, dans les années 1450,
National Gallery, Londres, Royaume-Uni
Les couleurs sourdes et délicates de cette image poignante résultent de l’application directe surla toile de pigments mélangés à de la colle. Le tableau a peut-être été peint pour être exporté en Italie, le support étant facile à rouler pour le transport.
1460
125
DU BAROQUE AU NÉOCLASSICISME
Baroque en Italie
Bacchus et Ariane
L’Entrée de saint Ignace au paradis
Luca Giordano, v. 1680-1690,
musée de Castelvecchio, Vérone, Italie
Le Bernin à Paris
Le Rêve de Jacob
En 1665, Le Bernin séjourne à Paris où il travaille pour Louis XIV, mais son projet pour la façade principale du palais du Louvre est refusé.
Né et mort à Naples, Giordano est également actif à Florence et à Venise, ainsi qu’en Espagne où il est au service de Charles II pendant dix ans à partir de 1692. Polyvalent et prolifique, il est renommé pour sa vitesse de travail.
Salvator Rosa, v. 1660-1670, Chatsworth House, Royaume-Uni
Personnage haut en couleur et esprit indépendant, Rosa est l’auteur d’une œuvre très variée. Ses peintures les plus typiques sont des paysages « sauvages » comme celui-ci, fruits de son invention. Avec leurs formes déchiquetées et leur facture rude, ils rompent avec les paysages classiques sereins de Lorrain et de Poussin.
Andrea Pozzo, 1688-1694,
église Saint-Ignace-de-Loyola, Rome, Italie
Cette peinture prodigieuse couvre le plafond de la nef de l’église Saint-Ignace-de-Loyola, à Rome. Elle est dédiée au fondateur de l’ordre jésuite du même nom, qui y est représenté, flottant en extase au centre de la composition. Pozzo est réputé comme un virtuose de la perspective sur laquelle il écrit un traité érudit (1693-1700).
Sainte relique
En 1690, Guarino Guarini termine la chapelle du Saint-Suaire à Turin, chef-d’œuvre d’architecture baroque qui abrite le célèbre suaire du Christ.
1650
1660
Un début éclatant
Avec ce retable de l’Adoration des bergers, sa première œuvre publique importante, peinte pour l’église San Giuseppe dei Falegnami, Carlo Maratta entame à Rome une carrière extrêmement brillante dès 1650.
Victimes
En 1656 et 1657, la peste ravage Naples puis Gênes, tuant près de la moitié de la population dans les deux villes – et presque une génération entière d’artistes. D’autres villes comme Rome sont également touchées mais dans une moindre mesure.
1670
1680
1690
Vieillard respecté
En 1678, l’architecte et sculpteur Cosimo Fanzago décède à l’âge de quatre-vingt sept ans à Naples. Il est depuis longtemps le principal artiste de la ville. Ses œuvres exubérantes font souvent appel aux marbres colorés.
Trace toutes les lignes vers ce point véritable, la gloire de Dieu 1693 | Andrea Pozzo
LES JÉSUITES
contexte
162
L’ordre jésuite (ou Compagnie de Jésus) est fondé en 1534 pour promouvoir le catholicisme romain. Cet ordre de prêtres, connu pour son zèle missionnaire et éducatif, joue un rôle-clé contre le protestantisme dans la Contre-Réforme. L’ordre ayant de nombreux sympathisants fortunés, ses églises sont souvent richement décorées, notamment l’église mère du Gesù à Rome, commencée en 1568. Maître-autel de l’église du Gesù, Rome, Italie
L’Apparition de la Vierge Marie à saint Philippe Néri Carlo Maratta, v. 1675,
palais Pitti, Florence, Italie
Après la mort du Bernin en 1682, Maratta devient la personnalité dominante du monde artistique à Rome. Ses peintures religieuses suaves et grandioses reprennent souvent les traditions de la Haute Renaissance avec plus de mouvement et une émotion plus franche.
163
DU BAROQUE AU NÉOCLASSICISME
209
CHEF-D’ŒUVRE Les Hasards heureux de l’escarpolette Jean Honoré Fragonard, 1767, Wallace Collection, Londres, Royaume-Uni Pierre Rosenberg, historien d’art français distingué, décrit
« de façon à voir les jambes de la belle enfant ». « Médusé »
Fragonard comme « l’essence parfumée » du xviiie siècle.
par cette entreprise risquée, Doyen suggère qu’elle
Ce tableau, œuvre la plus célèbre du peintre, peut être
conviendrait bien mieux à Fragonard, qui accepte la
décrit comme l’essence parfumée du style rococo. Tout
commande. Le « gentilhomme de la cour » qui n’est jamais
est enchanteur dans cette jolie jeune femme vêtue de rose
nommé par Collé est peut-être le baron de Saint-Julien.
corail, qui s’envole joyeusement dans les airs, légère et
Fragonard transforme l’évêque en homme d’un certain
gracieuse comme un papillon. Pour la beauté de la couleur,
âge, qui peut être le mari de la femme. Celui-ci est berné
la dextérité de la facture et la vivacité de l’atmosphère,
par le jeune amant, couché dans les buissons, hors de sa
la peinture est inégalée dans l’art de l’époque.
vue, qui jouit d’un spectacle excitant. Au-dessus du jeune
Il existe fort heureusement un récit contemporain du
homme, une statue de Cupidon (dieu de l’amour érotique)
poète français Charles Collé qui raconte comment l’œuvre
participe au jeu, un doigt devant la bouche, sorte
a été commandée. Collé rapporte les propos d’un peintre
d’incitation au secret.
mineur, Gabriel-François Doyen, que lui aurait tenus
Un autre détail amusant, qui passe souvent inaperçu :
un « gentilhomme de la cour ». Celui-ci lui aurait demandé
le petit chien en bas à droite de la scène. Dans l’art, le
de peindre un tableau de sa maîtresse sur une escarpolette
chien est souvent le symbole de la fidélité, mais celui-ci
poussée par un évêque, et de placer sa personne
jappe comme pour avertir le mari trompé de son infortune.
Jean-Honoré Fragonard
Fragonard a transformé la sérénité mélancolique de Watteau en abandon joyeux aux plaisirs des sens
Grasse, avril 1732 – Paris, 22 août 1806
1972 | Donald Posner Historien d’art américain
biographie
208
Formé par Boucher, Fragonard remporte en 1752 la prestigieuse bourse d’études du Prix de Rome qui lui permet d’étudier à l’Académie de France de la capitale italienne de 1756 à 1761. Rentré à Paris, il tente de s’imposer comme peintre de scènes héroïques grand format, mais il réalise qu’elles ne correspondent pas à ses talents ; il se tourne donc vers les scènes romantiques et intimes qui lui apportent la célébrité. À l’apogée de son succès, il est l’un des artistes les plus admirés de France. Mais le goût se détourne du style rococo léger et la Révolution française met quasiment fin à sa carrière en balayant l’aristocratie frivole à laquelle il s’adresse. Vers 1792 il abandonne la peinture et travaille quelques années comme administrateur au musée du Louvre puis il vit et meurt dans l’obscurité.
228
DU BAROQUE AU NÉOCLASSICISME
NÉOCLASSICISME
L’Amour et Psyché
Anne-Louis Girodet-Trioson
Louis David, 1817, Cleveland
Museum of Art, Cleveland, États-Unis
biographie
Montargis, 29 janvier 1767 – Paris, 9 décembre 1824
Après la défaite de Napoléon et la restauration de la monarchie, David s’exile à Bruxelles et dans ses tableaux ultérieurs, il évite la controverse politique. Il s’inspire ici d’un récit antique d’Apulée pour une allégorie morale qui met en contraste la beauté idéalisée de Psyché avec le naturalisme rustique de l’Amour.
Girodet est l’un des élèves les plus doués mais aussi les plus versatiles de David. Après une brève formation d’architecte, il entre dans l’atelier du maître en 1784 et cinq ans plus tard il remporte le Prix de Rome. Portraitiste exceptionnel, il applique en permanence la technique méticuleuse de David. Mais certains aspects de son œuvre le rapprochent du romantisme (p. 234-245), notamment son goût pour les thèmes fantasques et sa pratique de la peinture nocturne qui produit des effets lumineux très insolites. David reste souvent perplexe devant les œuvres de Girodet mais Napoléon, conquis, lui passe de nombreuses commandes.
Ils veulent maintenant des peintures dans lesquelles on puisse entrer ; fi donc !
L’Apothéose des héros français morts pour la patrie pendant la guerre de la Liberté
Anne-Louis Girodet, 1800-1802,
château de Malmaison, Rueil-Malmaison
Lorsqu’il rénove sa résidence de Malmaison, Napoléon commande deux peintures pour commémorer son livre favori : une épopée en vers d’un barde celte appelé Ossian. Ces poèmes s’avèrent plus tard frauduleux mais à l’époque Ossian est considéré comme l’équivalent nordique d’Homère, auteur d’une vision plus locale de l’Antiquité.
1800
1805
Mort de Vien
Joseph Marie Vien meurt à Paris en mars 1809, un an après avoir été anobli par Napoléon Bonaparte. Il consacre la fin de sa vie à la rédaction de ses mémoires.
v. 1820 | Jean-Auguste Dominique Ingres Peintre français
1810
1820
1815
David et Madame Récamier
La bataille de Waterloo
Le 18 juin 1815, les armées britannique et prussienne s’allient et écrasent les Français à Waterloo, anéantissant les ambitions impériales de Napoléon. Il abdique et en octobre il est exilé sur l’île de Sainte-Hélène.
En 1800, David commence un portrait de Madame Récamier, mais en raison d’un différend, c’est Ingres, son élève, qui le termine en ajoutant un candélabre de style grec à la composition.
Publication de Frankenstein
Frankenstein ou le Prométhée moderne est publié anonymement à Londres le 1er janvier 1818. L’auteur, Mary Shelley, âgée de vingt et un ans, s’inspire d’un rêve qu’elle a fait lors d’un séjour près de Genève.
Le style Empire
Entrée de Napoléon Ier à Berlin
François Gérard, 1805, musée Carnavalet, Paris
Gérard, qui est l’un des élèves préférés de David, élabore une version plus douce et plus gracieuse du style de son maître. Ce portrait est initialement commandé à celui-ci mais le modèle n’appréciant pas le résultat, Gérard reprend le travail.
Napoléon commande plusieurs œuvres d’art pour commémorer sa campagne de Prusse en 1806. Après sa victoire à la bataille d’Iéna, il conduit un défilé triomphal dans les rues de Berlin. Meynier peint une frise historique sur des thèmes patriotiques et il fournit les modèles des sculptures et des reliefs qui doivent décorer l’Arc de Triomphe du Carrousel à Paris.
contexte
Portrait de Juliette Récamier
Charles Meynier, 1810, château de Versailles
La marque du néoclassicisme qui prévaut à l’ère napoléonienne ne se limite pas à la peinture, elle touche également les arts appliqués. Le mobilier et d’autres objets intègrent des détails décoratifs empruntés à la Grèce antique, à Rome et à l’Égypte. L’inspiration vient parfois d’œuvres néoclassiques modernes. Les héros du Serment des Horaces de David agrémentent ici une horloge décorative.
Auguste écoute la lecture de l’Énéide
Jean Auguste Dominique Ingres, 1819,
musées royaux des Beaux-Arts, Bruxelles, Belgique
L’horloge du Serment des Horaces, v. 1810, musée Carnavalet, Paris
Au début de sa carrière, Ingres opte pour une version austère du style néoclassique, fondée sur son talent exceptionnel de dessinateur. Il déclare qu’« une chose bien dessinée est toujours peinte correctement ». Il choisit ici des couleurs sourdes et des personnages sculpturaux mais le cadre est inexistant.
229