Extrait Au bonheur des dames

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LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Au Bonheur des Dames Émile Zola

NIVEAU 2

A2 1100 mots



LECTURES CLE EN FRANÇAIS FACILE

Au Bonheur des Dames Émile Zola

Adapté en français facile par Françoise Claustres


Crédits photographiques : Couverture : Horváth Botond © Adobe stock Page 3 : BIS / Ph. Coll. Archives Larbor

Direction éditoriale : Béatrice Rego Marketing : Thierry Lucas Édition : Marie-Charlotte Serio Couverture : Fernando San Martin Mise en page : Isabelle Vacher Illustrations : Conrado Giusti Enregistrement : Lumiiq © CLE International, 2023 ISBN : 978-209-035935-0

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L’auteur Émile Zola naît en 1840. C’est l’un des grands écrivains français du XIXe siècle, avec Victor Hugo et Honoré de Balzac. Il a écrit la série des Rougon-Macquart, qui raconte la vie de deux familles sous le Second Empire (1850-1872). Dans cette série de vingt livres, Zola décrit de manière précise et scientifique la vie des gens de son époque (ouvriers, commerçants, artistes, prêtres, bourgeois…) et les injustices que certains subissent. Plusieurs de ses livres sont très connus : Germinal, L’Assommoir, Nana… Zola est un homme engagé qui a également défendu le capitaine Dreyfus, un soldat français juif accusé de trahison. Il a écrit à ce sujet un article célèbre, paru dans le journal L’Aurore en 1898 : « J’accuse… ! » Zola meurt en 1902. Des milliers de gens suivront son enterrement.

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Le livre Au Bonheur des Dames appartient à la série des RougonMacquart. On y retrouve Octave Mouret, le propriétaire d’un grand magasin, dont la jeunesse est racontée dans un autre roman, Pot-Bouille. Dans Au Bonheur des Dames, Zola raconte l’histoire de Denise, une jeune fille simple, bonne et courageuse qui s’occupe de ses deux frères après la mort de leurs parents. À Paris, elle découvre la vie, l’amour et les conditions de travail dans les grands magasins. Ce livre raconte aussi la transformation de Paris à cette époque : la création de boulevards (très grandes rues), la construction d’immeubles, l’agrandissement des magasins, l’apparition de nouvelles techniques de vente, la modernisation des petits magasins mais aussi la disparition de certains, « tués » par les grands magasins. Ce roman est en fait très moderne et il finit bien pour l’héroïne, ce qui n’est pas toujours le cas dans les romans de Zola !

Les mots ou expressions suivis d'un astérisque* dans le texte sont expliqués dans le Vocabulaire, page 54.

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1 CHAPITRE 1 Premiers pas de Denise au Bonheur des Dames

D

enise tient par la main Pépé, qui a cinq ans. Jean,

qui a seize ans, les suit. Ils arrivent de Cherbourg en train et sont perdus dans Paris. À tous les coins de rue, ils demandent aux gens la rue de la Michodière, où leur oncle Baudu habite. Tout à coup, Denise s’arrête. – Oh ! dit-elle. Regarde, Jean ! Devant eux, un grand magasin dont les étalages* colorés illuminent1 cette journée d’octobre. – Eh beh ! dit Jean. Ton magasin n’était pas aussi beau. Denise hoche la tête2. – Au Bonheur des Dames, lit Jean. Denise ne répond pas. Pépé ouvre de grands yeux devant les vitrines*. Depuis un moment, un gros homme avec des cheveux blancs, debout devant un magasin, de l’autre côté de la rue, les regarde. Les étalages du Bonheur des Dames l’énervent, et ces trois idiots qui regardent le magasin aussi. – Nous sommes rue de la Michodière, dit Jean. L’oncle doit habiter ici. Ils lèvent la tête, se retournent et voient une boutique* de tissus : Au vieil Elbeuf. – C’est là, dit Jean. – Eh bien ! Entrons, dit Denise. Lorsque leur père est mort, un mois après leur mère, l’oncle Baudu a écrit à Denise qu’elle pouvait venir travailler 1. Éclairent. 2. Secoue la tête pour dire qu’elle est d’accord.

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chez lui. Mais cette lettre a un an, et la jeune fille n’a pas dit à son oncle qu’ils arrivaient. – Monsieur Baudu ? demande Denise. – C’est moi, répond le gros homme avec des cheveux blancs. – Je suis Denise, et voici Jean et Pépé. Vous voyez, nous sommes venus, mon oncle. – Comment ! Vous voilà ! dit Baudu. Denise raconte. Après la mort de leur père, elle s’est occupée des enfants. Mais elle ne gagne pas assez d’argent pour tous les trois. – Jean commence demain chez un nouveau patron à Paris. Il sera logé et nourri. Alors, j’ai pensé que Pépé et moi, nous ne pouvions pas être plus malheureux qu’à Valognes3. – Allons, dit Baudu, entrez. Il appelle sa femme et sa fille et leur explique la situation. – Voyons, dit Baudu. Je t’ai écrit, c’est vrai, mais il y a un an ; et, vois-tu, ma pauvre fille, depuis un an, les affaires vont mal… Oh ! Cela va s’arranger. Mais tu ne peux pas travailler chez moi. Denise devient pâle4. – C’est bien, mon oncle. Nous allons partir. – Ne partez pas. Vous coucherez ici. Nous verrons demain. Madame Baudu et Geneviève, leur fille, trouvent une solution. Pour Jean, pas de problème. Pépé, lui, ira chez une vieille dame qui s’occupe d’enfants. Cela coûtera 40 francs par mois. Denise peut payer le premier mois. Il faut à présent lui trouver un travail. 3. Petite ville de Normandie, pas très loin de Cherbourg. 4. Presque blanche.

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– Vinçard ne cherche pas une vendeuse ? dit Geneviève. – Tiens ! C’est vrai ! crie Baudu. Nous irons le voir après avoir mangé. Colomban ! À table. Colomban est un gros garçon de vingt-cinq ans qui travaille chez Baudu et doit épouser Geneviève. Après le repas, Denise reste seule, assise près de la porte. Elle regarde le Bonheur des Dames, dont elle aperçoit les vitrines par la porte ouverte. Ce magasin, si grand, l’attire5. – Eh bien ! dit Baudu, allons chez Vinçard. Le magasin de Vinçard est propre et clair. – Que voulez-vous, monsieur Baudu ? demande Vinçard. – On m’a dit que vous cherchiez une bonne vendeuse. – Oh ! Ce n’est pas de chance. Je viens d’en engager* une ! Alors, Robineau, un homme qui est dans la boutique et qui travaille au Bonheur des Dames, dit : – On a besoin chez nous de quelqu’un au rayon* des confections*. Il faut se présenter à madame Aurélie. – Chez vous ! Ah non, par exemple ! crie Baudu. Sur le trottoir, Baudu se tait. Il marche vite. Rue de la Michodière, un voisin, debout devant sa boutique, l’appelle. C’est Bourras, un grand vieillard barbu. Il a un magasin de parapluies. Denise lève les yeux : le magasin de Bourras est coincé6 entre le Bonheur des Dames et un grand hôtel. – « Il » veut acheter la maison, dit Bourras, mais mon bail7 est encore de douze ans… « Il », c’est Octave Mouret, le propriétaire d’Au Bonheur des Dames. Baudu hoche la tête, puis il traverse la rue pour rentrer chez lui. 5. Fascine, séduit. 6. Serré. 7. Bourras loue le magasin. Il a un bail, un contrat de location.

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– Alors ? demande madame Baudu. Baudu raconte que Vinçard a engagé une vendeuse mais qu’on a proposé à Denise d’aller travailler… Avec le bras, il montre le Bonheur des Dames. – Là-bas ! Tout le monde se tait. – Tu es libre, dit Baudu à Denise. Tu fais ce que tu veux. Mais si tu savais ! Et il raconte l’histoire d’Octave Mouret. Un beau garçon arrivé du Midi à Paris, qui a eu des histoires avec des femmes puis a épousé madame Hédouin, la propriétaire du Bonheur des Dames. Un jour, elle traversait le magasin qui était en travaux. Elle est tombée dans un trou et elle est morte. Aujourd’hui, Mouret veut la mort de tous les petits magasins. – Tu feras ce que tu voudras, répète Baudu. Nous te disons les choses, c’est tout… Il la regarde. Il attend une réponse. Denise reste calme et dit : – Nous verrons, mon oncle. Et elle monte se coucher avec les enfants.

*** Le lendemain, à 7 h 30, Denise est devant le Bonheur des Dames. Il est trop tôt : les employés arrivent. Denise s’aperçoit qu’ils la regardent. Elle part faire un tour. Quand elle revient, elle voit un grand garçon devant le magasin. – Mademoiselle, lui demande-t-il, vous êtes peut-être vendeuse ici ? Je voudrais me présenter comme vendeur. – Je ne peux pas vous aider monsieur, je suis là pour me présenter aussi. ­– 8 –


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Ils recommencent à attendre. Les employés entrent dans le magasin. Quand ils passent près de Denise, ils la regardent et rient. Elle décide d’aller faire un tour quand elle aperçoit un jeune homme. C’est sans doute un chef de rayon, car tous les employés le saluent8. Il est grand, la peau blanche, avec une belle barbe. Ce n’est pas un chef de rayon : c’est Octave Mouret. Il se dirige vers son bureau. On frappe. Un jeune homme grand et maigre entre. C’est Bourdoncle. – Descendons à la réception, dit Mouret. La soie* est arrivée ? Au sous-sol, Bourdoncle prend une pièce de soie. – Alors, c’est décidé, dit-il, nous la vendons 5,60 francs… Ce n’est pas beaucoup. – Oui, oui, 5,60 francs, répond Mouret. Ce n’est pas grave de perdre un peu d’argent si nous attirons toutes les femmes dans le magasin. Bourdoncle et Mouret font le tour du magasin et s’arrêtent devant le rayon des soies. Une femme arrive et s’approche de l’étalage. C’est Denise. Elle se sent toute petite dans cet immense magasin. Mouret regarde Denise. Denise lève les yeux, et reconnaît le jeune homme qu’elle croit être un chef de rayon. Troublée, elle demande à un employé : – Madame Aurélie, s’il vous plaît ? – À l’entresol9. Denise remercie et part quand un employé du rayon des soies, Hutin, lui dit : – Non, par ici, mademoiselle… Il sourit, avec le sourire qu’il a pour toutes les femmes. 8. Inclinent la tête pour dire bonjour. 9. Entre le rez-de-chaussée et le 1er étage.

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– En haut, tournez à gauche. Les confections sont en face. Denise est troublée. – Vous êtes trop gentil. Merci mille fois, monsieur. Elle part. Hutin se retourne vers un employé. – Quelle désossée10 ! En haut, Denise aperçoit cinq ou six vendeuses, habillées de robes de soie. Une, grande et mince, la tête très longue, ressemble à un cheval. – Madame Aurélie ? lui demande Denise. La vendeuse la regarde mais ne répond pas. Elle demande à une de ses camarades, petite : – Mademoiselle Vadon, savez-vous où est Madame Aurélie ? – Non, mademoiselle Prunaire, je ne sais pas. Les vendeuses ont compris que Denise venait se présenter. Elles la regardent et se moquent d’elle. – Avez-vous vu ses bottines11 ? dit la grande Prunaire à la petite Vadon. – Et sa robe ! répond l’autre. Elles se taisent car une femme forte12 de quarantecinq ans entre. C’est madame Aurélie, la première*. Elle aperçoit Denise et lui demande ce qu’elle veut. – Madame Aurélie, je vous prie ? – C’est moi. Denise a la bouche sèche, les mains froides. – Quel âge avez-vous ? demande Madame Aurélie. – Vingt ans, madame. – Vingt ans ! Je vous en donnais à peine seize ! – Oh ! Je suis très forte ! 10.Tas d’os. Denise est maigre. Hutin se moque d’elle. 11. Petites bottes. 12. Un peu grosse.

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– Je veux bien vous inscrire. Mademoiselle Prunaire, donnez-moi le cahier. À ce moment-là, Mouret arrive, suivi de Bourdoncle. Surpris de retrouver Denise, il demande à madame Aurélie ce que cette jeune fille fait là. Quand la première lui répond qu’elle se présente comme vendeuse, Bourdoncle dit tout bas : – Impossible ! Elle est trop laide. On apporte le cahier. – Votre nom ? demande Madame Aurélie. – Denise Baudu, madame. – Dans quel magasin avez-vous travaillé, à Paris ? – Mais, madame, j’arrive de Valognes, en Normandie. – Où travailliez-vous, à Valognes ? – Chez Cornaille. – Je le connais, c’est une bonne maison, dit Mouret. Madame Aurélie continue d’une voix plus douce : – Et pourquoi êtes-vous partie de chez Cornaille ? – Des raisons de famille. Nous avons perdu nos parents. – Où demeurez-vous à Paris ? – Chez mon oncle… Chez mon oncle Baudu, là, en face. – Comment, vous êtes la nièce de Baudu ! C’est lui qui vous a dit de venir ? demande Mouret. – Oh ! non, monsieur ! Denise rit. Son visage s’illumine. – Mais elle est jolie ! dit tout bas Mouret à Bourdoncle. – On dit que votre oncle ne nous aime pas, dit Mouret plus fort. Eh bien, s’il ne peut pas prendre sa nièce dans son magasin, nous lui montrerons que sa nièce peut travailler chez nous. Denise devient très pâle. C’est Mouret. Elle a compris. Madame Aurélie ferme le cahier. Si Mouret veut Denise, ce sera Denise. ­– 12 –


– C’est bien, mademoiselle, dit-elle. On vous écrira. Denise remercie madame Aurélie. Elle passe devant Mouret et Bourdoncle et les salue. – Eh bien ! mademoiselle, avez-vous réussi ? lui demande quelqu’un dehors. Denise reconnaît le grand garçon du matin. – Je ne sais pas monsieur, répond-elle. – Moi non plus, je ne sais pas. Comment vous appelezvous ? – Denise Baudu. – Moi, je m’appelle Henri Deloche. Ils se sourient et se tendent la main. – Bonne chance ! – Oui, bonne chance !

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AU BONHEUR DES DAMES Émile Zola Denise Baudu est une jeune provinciale qui travaille au « Bonheur des Dames », magasin dirigé par Octave Mouret à Paris. Son histoire explore la montée des grands magasins au XIXe siècle, les rivalités économiques et les relations personnelles. Elle met en lumière les thèmes de la modernité, de la consommation, de la société en mutation, de la séduction et des sacrifices personnels. MOTS

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