PFE Architecture - 2013 - Matthieu Héberlé + Yashwan Jheelan

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Requalification du site DMC à Mulhouse

Matthieu Héberlé - Yashwan Jheelan

Projet de Fin d’Etudes 2013 Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Strasbourg Domaine Architecture et Compléxité Directeur d’études : Dominique Coulon


SOMMAIRE 0/ Héritage industriel 1/ Problématique 2/ Intervention Urbaine 3/ Intervention Architecturale 4/ Ouverture 5/ Références 6/ Maquettes


0/ HERITAGE INDUSTRIEL La ville de mulhouse est unique en France et en Europe Continentale grâce à son patrimoine industriel. Ville médiévale de taille moyenne protégée par un mur d’enceinte et trois bras d’eau concentriques; cette petite enclave dans l’Empire ne s’est jamais assujetttie et aura un fonctionnement républicain et une évolution hors du commun. Mulhouse devient une ville industrielle avec des usines qui s’implantent autour du mur d’enceinte avec leurs jardins. Elle devient la plus grande cité ouvrière du continent et sert de modèle pour celles à venir. Les patrons s’organisent en une Société Industrielle – la première en Europe continentale – sont venus placer au premier rang le partage de la connaissance et les valeurs humanistes, qu’ils mettent à profit pour construire ce qu’on a appelé le modèle mulhousien de société et de développent économique. Qu’il est loin sans doute ce temps, mais qu’il est vivant, son héritage. Il en résulte en effet, au delà de la désindustrialisation de l’ultime XXe siècle, une gigantesque fresque qui exsude de toutes parts l’aventure, les gloires et les souffrances d’une ville au destin totalement hors-norme. 1

1 FLUCK P., Les belles fabriques, un patrimoine pour l’Alsace, Do Bentzinger éd., Colmar, 2002


DMC Le site DMC était une véritable ville dans la ville, une « usine-ville » autonome avec des zones totalement dévolues à la production. Ce morceau de Mulhouse est organisé selon un schéma urbanistique qui lui est propre avec ses avenues, son réseau de voies ferrées qui est issu d’une lente maturation fortement accélérée à la charnière des XIXe et XXe siècles. DMC constitue en soi un album de l'évolution des architectures, inauguré par la filature géante de 1812 : une façade de 138,50 m sur quatre niveaux, la première cheminée couplée à une machine à vapeur venue s'élever dans le ciel d'Alsace. Séduit par le modèle anglais, le patron Daniel Dollfus-Mieg fît construire une cité ouvrière en 1853 à proximité du site. Mais DMC, c'est aussi des mers de sheds, un réfectoire (1886) au plan cruciforme, l'héritage des grands jardins anglais, la halle du groupe électrogène de 1901, des chaufferies géantes et les deux plus grosses cheminées subsistantes en Alsace avec des diamètres à la base de 7 mètres et 9 mètres respectivement. Et surtout la dizaine d'énormes usines de briques rouges (1902 – 1931) d'une sobriété toute puritaine inspirée du Lancashire et de Westphalie. 2 Les bâtiments emblématiques du site sont deux retorderies de 229 m de long pour 35 m d’épaisseur construites en 1911 et 1913.

2 . FLUCK P., FREY Y., JACQUE B., KELLER R. et SCHRECK N., DMC patrimoine mondial ? Do Bentzinger éd., Colmar, 2006


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01/ PROBLEMATIQUE Notre Projet de Fin d’Etude est basée sur la requalification du site de la filature DMC à Mulhouse. Située à trois kilomètres du centre-ville et occupant une superficie de 24 hectares, la filature est véritablement enclavée, sans connexions existantes avec le quartier. Cette dernière concentre aujourd’hui son activité sur une partie restreinte des bâtiments originellement occupés. Les retorderies et autres ateliers de finissage sont inoccupés depuis de nombreuses années mais possèdent une valeur patrimoniale importante et constituent un formidable potentiel de reconversion. En raison de la mutation des fonctions intervenant actuellement pour les usines textiles, ces dernières risquent probablement de fermer dans les prochaines années. La problématique qui en découle est donc celle-ci : comment désenclaver un morceau de ville mono-fonctionnel abritant une programmation obsolète ?


02/ INTERVENTION URBAINE


De l’analyse du quartier, on peut constater l’important tissu résidentiel encerclant le site DMC ainsi qu’un nombre important de bâtiments éducatifs: une école maternelle, deux écoles primaires, deux collèges et deux lycées professionnels. De cette observation, il était logique pour nous de centrer notre nouveau quartier autour des thèmes de la PEDAGOGIE et de l’ANDRAGOGIE. De plus, Mulhouse est la ville avec la moyenne d’âge la moins élevée en Métrople.

On remarque également que les bâtiments composant le site DMC sont des « objets » positionnés sur une matrice orthogonale, elle-même exacerbée par le « cardo et decumanus ». Ces deux voies de grand gabarit sont les artères principales du site s’arrêtant brutalement aux limites de la parcelle.


Il s’agit alors, dans un premier temps, de prolonger ces allées au-delà des routes afin de relier le site aux tissus environnants. Ces deux axes se croisent au « barycentre » du quartier et génèrent des places et lieux de rencontres. Des diagonales sont introduites dans ce système afin de relier les équipements publics déjà présents. Cette dérogation à l’orthogonalité enrichit les porosités, les parcours dans le site. Concernant l’aménagement urbain, il a été décidé de procéder par une logique de superposition et imbrications de « strates » physiques ou immatérielles afin de diversifier, complexifier et d’apporter des dimensions supplémentaires au site: La strate historique ou patrimoniale est celle de base. La strate des flux piétons et routiers. La strate des espaces paysagers. La strate des vides structurants. La strate des vues. Nous avons également utilisé un certain nombre de règles urbaines pour guider la conception du nouveau bâti. Le socle de toute construction neuve s’aligne à la corniche des sheds existants et la hauteur maximale des tours nouvellement créées ne dépassent pas les 65 mètres des cheminées industrielles présentes sur le site. Le but est ici de préserver l’horizontalité du site tout en apportant une dimension verticale supplémentaire avec l’ajout de «points hauts» qui viennent résonner avec les cheminées. Le nouveau bâti est ajusté en fonction des cadrages et des vues qu’offre le site. L’habitant bénéficie alors de gabarits peu élevés, appréciable pour l’ensoleillement. Ce nouveau bâti possède une grammaire, un rythme et des sequences qui accompagnent l’existant et souligne ce dernier.


Entrée du site

La ville n’est pas un objet à trois mais à quatre dimensions : la dimension temporelle interagit à différentes échelles avec les dimensions spatiales (…) et c’est un objet artificiel : il n’existe que par l’action des hommes, comme expression de plus en plus élaborée de la vie sociale et des activités humaines. (Laterrasse, 1994 : 77)


La désaffectation d’un équipement industriel se réalise en étapes successives en laissant généralement des bâtiments en friche et le terrain désaffecté. La filature DMC occupe aujourd’hui un tiers des bâtiments d’origine, le reste du site est inoccupé et la végétation reprend ses droits. La création des espaces paysagers est renforcée par l’idée de Charles ThierryMieg, fils de l’industriel éponyme, voulant à son époque créer un parc à Mulhouse pour l’« amélioration morale du sort des classes ouvrières». Le parc du Peuple, inauguré en 1868, est pour notre homme « un lieu de récréation et de repos pour toutes les classes de la population. La classe ouvrière y trouvera, le dimanche, une distraction honnête et instructive, les écoliers, les employés du commerce et de l’industrie, les mères avec leurs enfants un passe temps et un lieu de promenade pour les heures de loisir ». Ainsi, les espaces paysagers traversant le site sont support de pédagogie et de sociabilité, en interaction avec les fonctions du quartier. L’institut de botanique, la serre d’agriculture urbaine ou encore les logements se greffent sur cette colonne vertébrale végétale reliant la cité Briand à la cité Pranard. Notre rapport au patrimoine ne s’arrête pas au bâti mais comprend aussi les pratiques sociales. En plus des parcs aménagés aux ambiances différenciées, des jardins éducatifs, partagés et expérimentaux jalonnent la trame verte: accessibles à tous, ces parcelles cultivables jouent un rôle important pour les habitants par le rythme saisonnier qu’elles mettent en exergue. La fonction de ces espaces paysagers mutent au cours de l’année. Par exemple, les bassins deviennent des patinoires en hiver.

L’espace public possède une dimension importante dans le projet car le vide structure, il lie les programmes et les bâtiments entre eux sans pour autant avoir de connexions «bâties».


Place centrale - «Barycentre»


La notion de temporalité est cruciale dans toute reconversion. L’affectation ou la réaffectation se fait par étapes successives, par «strates» d’interventions. La temporalité guide la nature du paysage. Les arbres plantés pour dépolluer le sol sont déplacés dans des coulées vertes.

ANNEES

Un autre aspect du projet est la récupération et la réutilisation des matériaux; notamment celle de la brique qui est utilisé comme revêtement de sol après avoir été concassée ou pour la construction de mobilier urbain. Nous proposons aussi la récupération des eaux pluviales dans plusieurs bassins et dans des noues à travers le site pour l’agriculture urbaine.

SAISONS

JOURNÉE


Dialogue entre l’existant et le projet


03/ INTERVENTION ARCHITECTURALE


Nous avons choisi d’approfondir l’échelle architecturale en traitant la réhabilitation des retorderies. Ces deux bâtiments de 230 mètres de long et 35 mètres de large abriteront plusieurs fonctions comme un hôtel, des commerces et des plateaux de bureaux avec des surfaces différentes ainsi que des logements. Les bâtiments sont donc usités tout au long de la journée avec des occupations étalées. En traitant la circulation à travers ces derniers, nous introduisons la possibilité d’aménagements et de déplacements variés.

L’intervention préserve la structure existante et la sublime en la laissant apparaître dans les différents espaces. Pour ce faire, les plateaux sont occupés par des constructions légères, flexibles et démontables. La hauteur sous plafond de chaque niveau étant supérieure ou égale à 5 mètres, un deuxième niveau en mezzanine permet aux bureaux d’augmenter leur surface de travail si besoin. Les bâtiments agissent comme une enveloppe thermique, seulement les surfaces utilisées sont chauffées. La forte épaisseur des murs contribuent à leur inertie thermique.


Le niveau du rez-de-chaussée de la retorderie 63 est volontairement laissé libre afin de bénéficier d’un vaste plateau utilisable pour des événements ou différentes manifestations de la ville, tels que l’exposition annuelle de jeunes artistes «Mulhouse 00» ou les défilés de la Cité de la Mode. La perspective sur plus de 200m créee par l’alignement des poteaux-poutres donne à cet espace une dimension unique qu’on préserve en le gardant libre. Les éléments verticaux de circulation sont traités comme des objets sculpturaux venant ponctuer le paysage intérieur. Le fil conducteur du projet se base sur une déformation visuelle de la trame des poteaux en fonction de la programmation et des ambiances recherchées. Cette «bande» culturelle connecte les deux retorderies par le sous-sol et l’extension, la liaison transversale apporte ainsi une dimension supplémentaire à ces longs bâtiments.

Pour mettre l’emphase sur la pédagogie et l’andragogie, les bâtiments accueillent un équipement culturel ; un Learning Center regroupant une cinémathèque, des espaces d’expositions pour les arts numériques, une MJC et une ludothèque, des espaces de co-working et une médiathèque.


Le volume simple de la médiathèque, positionné en diagonale sur les bâtiments existants, répond à la logique du site. Il fait écho à la géométrie rationnelle du site industriel, il dégage des vues et des cadrages sur le centre-ville de Mulhouse et la Forêt-Noire d’un côté, sur les Vosges et le Ballon d’Alsace de l’autre. Le langage constructif dans cette extension est affirmé comme dans les retorderies mais avec des façades treillis permettant de libérer des plateaux sans poteaux. Une bande servante centrale différencie les espaces en une zone de travail au nord et en une zone de lecture et de détente au sud. Cette colonne vertébrale de la médiathèque, abrite les noyaux de circulations, les salles de travail tout comme les salles opaques de projection et les alcoves de repos. Elle accentue l’effet de dilatation de l’espace. Les extrémités du volume sont libérés sur toute hauteur afin de profiter des points de vue offerts. Dans le but de réguler les apports solaires, la façade de la médiathèque se compose d’une résille percée d’ouvertures de tailles différentes. Cette résille permet d’avoir une lecture d’un volume homogène mais avec des percements variés. Grâce à un processus paramétrique, nous avons obtenus plusiuers itérations de façades. Nous avons ensuite procédé à des ajustements dans la densité des ouvertures la façade retenue en fonction des espaces qui se trouvent derrière.


04/ OUVERTURE


Ce projet de Fin d’Etude a été une occasion unique de traiter une thématique qui nous passionne tout en traversant plusieurs échelles. La démarche du projet a aussi conforté certaines de nos intuitions sur la question du patrimoine industriel notamment que les nombreuses contraintes peuvent être génératrices d’idées et de concepts forts. Malgré certaines difficultés concernant la gestion d’une telle masse programmatique, le PFE nous a permis d’aborder des notions sur le paysage et l’espace public, l’urbanisme et le design. Dans les bâtiments à réhabiliter et à transformer, l’espace est une donnée. En conséquence, le programme est une variable. A partir de ce constat, nous avons choisi de proposer des circulations variées à travers les bâtiments sur lesquelles viennent se greffer les diverses fonctions. Comme notre démarche de projet est expérimentale, nous ne proposons pas une solution mais plutôt un système. Un système qui n’est pas figé mais qui peut être adapté à plusieurs scenarii.


architecture

- Friche de la Belle de Mai, Espaces de diffusion des arts plastiques, Marseille [ARM Architecture]

Centre de la connaissance et de la culture, Konsberg, Suède [Mecanoo Architecten]

05 / RÉFÉRENCES

- Planification urbaine du quartier Bastide-Niel, Bordeaux, [MVRDV]

- Centre de la mode, Shangai [Arte Charpentier architectes]

- Halle Pajol, Paris [Françoise-Hélène Jourda] - CNR-ISMAR Research Labs – Arsenal, Venise [Cecchetto&Associati]

bibliographie - Kenneth Powell, L’architecture transformée - Article de Bernard Reichen ; les leçons de la reconversion. Constructions d’hier, usages d’aujourd’hui - P. Fluck; DMC, un patrimoine mondial?


06 / MAQUETTES




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