Monographie - Château de Thanvillé

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MÉMOIRE DE MASTER Faire de l’histoire, penser l’architecture et la ville Anne-Marie CHÂTELET & Michaël DARIN, Enseignants directeurs

MONOGRAPHIE DU CHÂTEAU DE THANVILLÉ DU WASSERBURG À LA GENTILHOMMIÈRE MÉTHODE D’ARCHÉOLOGIE DU BÂTI Année scolaire 2012-2013 ENSA de Strasbourg

Matthieu HÉBERLÉ 1


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École Nationale Supérieure d’Architecture de Strasbourg

MONOGRAPHIE DU CHÂTEAU DE THANVILLÉ DU WASSERBURG À LA GENTILHOMMIÈRE MÉTHODE D’ARCHÉOLOGIE DU BÂTI

Matthieu HÉBERLÉ

Enseignant directeur: Anne-Marie CHÂTELET Deuxième lecteur: Michaël DARIN

UEM 212/222: Faire de l’histoire, penser l’architecture et la ville 3


REMERCIEMENTS Je tiens sincèrement à remercier : - Anne-Marie CHÂTELET et Michaël DARIN, enseignants directeurs, pour leur suivi du mémoire et leurs précieux conseils durant ces trois semestres. J’adresse une vive reconnaissance à Madame CHÂTELET pour m’avoir soutenu dans mon projet et pour sa disponibilité en m’accompagnant au château de Thanvillé. - Jean-Jacques SCHWIEN, maître de conférence en archéologie médiévale, pour m’avoir orienté et guidé dans la méthode d’archéologie du bâti, pour avoir pris de son temps afin de venir au château mais aussi d’avoir apporté les rectifications nécessaires à l’élaboration de mon mémoire. - Jean-Marie ERNST, pour tous les documents en sa possession dont j’ai pu prendre connaissance et pour l’intérêt qu’il a porté à ce mémoire. - Olivier BADERMANN, tailleur de pierre professionnel, pour sa venue au château et ses indispensables analyses des marques d’outils. - Claude OBERLIN, glyptographe, pour son déplacement effectué au château et pour m‘avoir fait part des relevés et datations des marques lapidaires. - La famille WAGNER qui m’a autorisé à pénétrer à maintes reprises dans leur domaine privé du château de Thanvillé. - Hubert WACH et Michel BURLET-PLAN, architectes, pour m’avoir très gentiment transmis les plans et coupes du château. - Jean-Louis SIFFER, président de la Société d’Histoire du Val de Villé, pour m’avoir permis de consulter les archives et les documents iconographiques complémentaires de la société d’histoire. - Francis RAPP, professeur émérite de l’Université de Strasbourg, et Bernhard Metz, historien, pour les entretiens qu’ils ont bien voulu m’accorder. - Francis ADRIAN, maire de Thanvillé, pour son aide. - Ma famille et mes amis, qui m’ont soutenu et encouragé tout au long de ces recherches.

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AVANT-PROPOS

grâce à la collaboration de spécialistes et d’historiens.

Le château de Thanvillé, visible depuis la route principale reliant le Val de Villé à la plaine d’Alsace, surveille l’entrée de la vallée. L’imposant complexe castral, composé de murailles, de tourelles ou encore de canonnières, interpelle la curiosité du passant et nourrit son imaginaire.

Je voulais agir moi aussi à mon niveau, et peut être apporter une pierre supplémentaire à cet édifice particulier. Mais que pouvais-je amener de plus? Ma première démarche a été me renseigner sur son passé, connaître l’histoire du lieu. Seulement voilà, le château de Thanvillé n’a pas bénéficié d’études approfondies hormis l’annuaire complet de 2004 de la SHVV consacré à ce dernier et quelques articles parus dans d’autres annuaires.

Étant enfant, il est vrai que le château me terrifiait autant qu’il me fascinait. Les volets toujours clos du corps de logis ou la girouette branlante de la « tour des sorcières » se trouvaient être des thèmes parfaits pour narrer des contes et l’état de délabrement de l’ensemble ne faisait qu’intensifier les récits. Les bâtiments sont en effet en piteux état depuis des décennies et comme l’écrit Claude Jordy, historien et membre de la Société d’Histoire du Val de Villé (SHVV), « vision à chaque fois chargée d’émotion, il s’en dégage un sentiment de tristesse, de nostalgie, de mélancolie1 ». J’ai pris conscience de la « gravité » de la situation en 2003, lorsque une bâche a dû être placée sur la toiture de la demeure seigneuriale2 afin d’assurer une meilleure étanchéité à l’eau car les ardoises n’assuraient plus leur rôle. S’ensuivit la rénovation de la charpente d’une partie des communs en 20053 puis en 2010, tandis que le corps de logis principal resta intouché, subissant les assauts du temps. Malgré les travaux entrepris sur une partie des bâtiments, la vision journalière du château en continuelle dégradation m’affectait et ma récente visite à l’intérieur de la demeure n’a fait que conforter mon inquiétude. Perdre un tel bâtiment, monument exceptionnel et carte de visite fantastique pour la vallée, était inenvisageable pour moi et pour tous les habitants du Val de Villé. Le canton a déjà connu au XVIIIe siècle la destruction d’une rotonde romane, édifice rare de par sa forme; je ne souhaiterais pas qu’il en soit de même pour le château. Ce n’est qu’après 1970 que l’on porte un intérêt nouveau au château notamment grâce à la Société d’Histoire du Val de Villé. Cette association, créée en 1975, « a pour but de promouvoir et de favoriser la connaissance et la sauvegarde du patrimoine archéologique, historique, littéraire, artistique et sitologique du Val de Villé4 ». Des équipes ont sillonné les rues des villages pour observer, décrire les bâtiments et recueillir les témoignages souvent précieux des habitants. Cela a permis à ceuxci et aux élus d’être sensibilisés au patrimoine, souvent méconnu, de leur localité5 1 2 3 4 5

Citation de Claude Jordy, SHVV 2004 Article DNA, 2003 Article DNA, 2003 Article 1 des statuts de l’association Définition de la SHVV sur le site http://www.sh-valdeville.fr/

Je pensais alors étudier le château en tant que spécimen dans une série, celle des wasserburg. Sachant qu’il ne reste actuellement que quelques édifices de ce type en Alsace des 800 existant avant la Révolution, il aurait été intéressant de situer l’ensemble castral de Thanvillé dans sa région afin de faire ressortir les similitudes et différences de chacun d’entre eux. Je n’ai malheureusement pas trouvé d’ouvrages traitant de l’architecture des wasserburg et il m’aurait été très difficile de me procurer les plans, surtout anciens, de chaque bâtiment à étudier. Durant le deuxième semestre de Master 1, j’ai effectué un échange bilatéral à l’Université de Sydney, Australie, ce qui m’a contraint de laisser partiellement en jachère le mémoire. A mon retour à Strasbourg, j’ai poursuivi mes recherches aux archives départementales sans toutefois trouver de documents significatifs. Le peu de documents recueillis m’a posé problème et a suscité une grande interrogation de ma part quant à la poursuite du mémoire sur le sujet. J’ai alors contacté Jean-Jacques Schwien, maître de conférence en archéologie médiévale à l’Université de Strasbourg afin d’avoir de plus amples informations sur ce type de bâtisse. Très intéressé par l’écriture d’un mémoire en architecture sur le château de Thanvillé, il a très gentiment accepté de m’aider en me prodiguant de nombreux conseils. Après avoir discuté des sujets possibles, il nous sembla judicieux malgré tout de continuer dans cette direction au vu de ce que j’avais déjà amorcé. Mon mémoire s’est alors orienté vers une monographie du château de Thanvillé basée dans un premier temps sur les écrits historiques. Malgré l’apparente homogénéité des bâtiments donnant à ce château un certain prestige, celui-ci se compose d’une multitude d’éléments d’époques différentes. C’est grâce à l’analyse de ces éléments qu’il m’a été possible de déterminer plus précisément les étapes de construction et ainsi d’enrichir les écrits des historiens.

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MÉTHODOLOGIE

La méthode utilisée pour élaborer ce mémoire s’appuie sur le principe d’archéologie du bâti confronté aux écrits historiques. Contrairement à l’archéologie « traditionnelle » basée sur les travaux de terrain mettant à jour des vestiges matériels, l’archéologie du bâti consiste à « lire les murs6 »pour identifier les phases de construction et restituer la chronologie relative de l’édifice, voire sa datation absolue grâce aux marques lapidaires. Cette méthode s’appuie notamment sur le relevé « pierre par pierre » des façades, des mortiers utilisés ou de la charpente. Cependant, le manque de temps et de connaissances globales sur le sujet font qu’il m’est difficile de pratiquer cette méthode dans son intégralité. En revanche, ce mémoire est d’autant plus passionnant qu’il repose sur des principes nouveaux pour moi ainsi que sur une approche pluridisciplinaire. La fouille des archives, bien que décevante quant au manque de documents graphiques, s’est tout de même avérée personnellement enrichissante. Mettre à jour des informations conservées pendant plus ou moins longtemps et n’ayant pas ou presque pas été étudiées donne un vrai sens à cette tâche. Bien que le dossier des archives de Castex ait été en grande partie analysé, j’ai pu trouver des feuillets utiles à mon mémoire. Mais c’est plus particulièrement la méthode d’archéologie du bâti qui m’a réellement enthousiasmé. Réussir à retracer l’histoire d’un bâtiment grâce à l’observation, à l’analyse des façades et des marques de tailleur de pierre relevait presque pour moi de la clairvoyance. Ainsi, les empreintes du passé, invisibles pour ceux qui n’y prêtent pas attention, peuvent révéler la ou les vies de l’édifice grâce à l’œil averti et à l’expertise des spécialistes. Les nombreuses visites du château avec ces personnes m’ont d’une part été d’une grande aide dans l’avancement du mémoire, d’autre part les explications fournies ont véritablement amélioré ma compréhension de ce complexe castral. Les vagues connaissances personnelles quant aux différentes époques d’études m’ont aussi amené à me documenter sur les châteaux en Europe depuis le Moyen-âge. J’ai alors pu acquérir des savoirs de base concernant par exemple l’évolution complexe des fenêtres défensives ou résidentielles, m’apportant dorénavant un regard neuf sur les bâtiments qui m’entourent. Pouvoir donner une époque de construction d’un édifice, sans qu’elle soit extrêmement précise, grâce au style ou au décor de ses ouvertures est assez gratifiant. Il en va de même pour la forme des archères ou pour les traces d’outils laissées sur la pierre, ces caractéristiques nous renseignent elles aussi sur les périodes de réalisation. J’ai été très enthousiaste d’avoir pu me confronter à d’autres savoirs, n’ayant pas eu l’opportunité d’étudier de façon aussi spécialisée et pointue des monuments médiévaux en école d’architecture. 6

définition de R. Krautheimer

BILAN HISTORIOGRAPHIQUE

Partie historique Les ouvrages traitant de la seigneurie de Thanvillé ne sont pas nombreux. Histoire de la seigneurie lorraine de Thanviller-en-Alsace7, écrit par Bertrand-Maurice de Castex en 1886 demeure l’œuvre de référence à ce sujet. La première partie est consacrée à l’histoire de la seigneurie, de ses origines au combat de Thanvillé de 1870. Les 145 premières pages sont une étude historique rigoureuse menée par le propriétaire de l’époque. La seconde partie se compose de renseignements statistiques sur la seigneurie de Thanvillé plus précisément sur la culture, la population ou encore les impôts. Dans la troisième partie de son ouvrage il décrit le château, depuis sa construction jusqu’à son achat par son grand-père. Ancien officier de l’armée française, Bertrand-Maurice partageait ses activités entre la gestion de son domaine, la production d’aquarelles et les recherches historiques qui lui permirent de réunir une importante documentation sur le passé de la seigneurie et son château8. Cet ouvrage, très riche en descriptions m’est extrêmement utile. La société d’histoire du Val de Villé citée plus haut s’est intéressée à cet édifice. Je me suis alors emparé des annuaires parlant de près ou de loin de Thanvillé car les articles sont une source précieuse pour l’étude du château. A travers ces annuaires, mon premier objectif était d’établir une analyse historique du bâtiment afin de connaître exactement les grandes périodes de construction, de son origine à son état actuel. Étant vivement intéressé par le patrimoine, je pense qu’il est primordial pour un architecte d’avoir une bonne vision du passé du monument sur lequel il travaille. L’annuaire de 2004 est consacré presqu’exclusivement au château de Thanvillé et à sa seigneurie. L’article de Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé9, retrace précisément l’historique du château de son origine possible en 1089 à sa vente en 1981. C’est le seul article qui relate l’histoire de la seigneurie sur une période aussi longue. Les 28 pages donnent des informations rigoureuses sur les destructions et reconstructions du XVIe au XVIIIe siècle ainsi que sur le château occupé par les familles de Dartein et de Castex. Cependant, les notes ne sont pas nombreuses et l’auteur se base surtout sur l’ouvrage de Bertrand-Maurice de Castex. Je ne peux donc ni vérifier l’exactitude des propos ni approfondir certains points qui me semblent importants. L’article Thanvillé de la fin du Moyen-âge à la guerre de Trente Ans, l’invention d’une seigneurie10, paru dans l’an7 Bertrand-Maurice De Castex, Histoire de la seigneurie lorraine de Thanviller-en-Alsace , réédition, Paris, Le livre d’histoire, 2006, 247p 8 André Dubail, La galerie des ancêtres ou notices biographiques de quelques seigneurs et châtelains de Thanvillé, ASHVV, 2004, p.185 9 Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé ASHVV, 2004, p.141 10 Georges Bischoff, ASHVV, 2004, p.43

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nuaire 2004, analyse la création de la seigneurie et explique la raison pour laquelle Thanvillé devint une enclave lorraine. Cet article permet de comprendre comment ce village, pourtant éloigné d’une vingtaine de kilomètres du col d’Urbeis formant la limite avec les Vosges, a été incorporé au duché de Lorraine. La galerie des ancêtres ou notices biographiques de quelques seigneurs et châtelains de Thanvillé11, paru dans le même annuaire, apporte des informations importantes quant à la généalogie des différents propriétaires. Ces deux articles me sont utiles pour saisir les influences qui ont guidé ou non les occupants lors des modifications du château, en croisant les informations avec les styles régionaux des différentes époques. J’ai passé de nombreuses heures aux archives départementales à chercher des informations dans les dossiers de la famille de Castex. La première partie de mon travail fut d’y trouver des plans, coupes ou autres documents descriptifs du château n’ayant pas été utilisés par les auteurs des annuaires de la Société d’histoire. A mon retour du semestre d’échange effectué en Australie, je me suis attelé à cette tâche laborieuse de décortiquer les annales familiales. Le résultat fut très décevant car aucun document graphique antérieur au XIXe siècle n’existe. En effet, les archives disponibles sont presqu’exclusivement des documents écrits retraçant l’histoire du château et déjà amplement étudiées par les historiens de la SHVV. Cependant, un document manuscrit de Bertrand-Maurice de Castex m’a permis de compléter la partie historique du XVIIe siècle par ses informations complémentaires. Après avoir été informé de mon projet de mémoire lors du mois d’octobre 2011, Francis Adrian, le maire de Thanvillé m’a mis en relation avec Jean-Marie Ernst, ancien professeur de français et historien du château depuis quarante ans. Originaire de ce village, il recherche en permanence des informations suite à l’élaboration de son «sujet départemental» sur le château de Thanvillé. Il tente de faire connaître cet édifice méconnu du grand public par ses écrits. Ainsi, M. Ernst correspond depuis de nombreuses années avec le journal des Dernières Nouvelles d’Alsace pour lequel il a déjà écrit une quarantaine d’articles. Son aide m’est précieuse pour connaître avec précision les étapes qui ont marqué le château. Il me fait part de ses recherches, de ses articles, de gravures, d’anciennes revues telle que La vie à la campagne12 sortie en 1919 et consacrée en partie à la vocation agricole du domaine. Cette revue comporte également des photographies du château au début du siècle, intéressantes pour comprendre son évolution. Le journal local les Dernières Nouvelles d’Alsace (DNA) s’est intéressé au château bien plus largement depuis la dépose de la bâche sur la toiture en 200313. Comme je l’ai évoqué plus haut, Jean-Marie Ernst en est le correspondant le plus important et ses articles sont pour 11 André Dubail, ASHVV, 2004, p.171 12 A. Maumene, Le château de Thanvillé, la vie à la campagne, 1919, pp. 53-57 13 Auteur inconnu, « Le château au sec pour l’hiver », Dernières Nouvelles d’Alsace, n°266, 14/11/2003

la plupart des histoires contant le passé du château. Cependant, celles-ci n’apportent rien de nouveau car l’auteur se base sur l’ouvrage de Maurice de Castex. Les autres articles que j’ai en ma possession ne me sont pas plus utiles car ils décrivent simplement les travaux engagés depuis 2003. En revanche, les DNA ont écrit plus récemment sur la rénovation intérieure des communs et ces articles apportent un éclairage intéressant quant aux modifications récentes s’y étant opérées. Les documents graphiques, quant à eux, sont des reproductions de plans issus des annuaires de la SHVV. Ceux antérieurs à la première moitié du XIXe siècle ne montrent pas avec précision le domaine, ce n’est qu’avec l’apparition du cadastre Napoléonien que le château et le bâti du ban de Thanvillé apparaissent de manière détaillés. On peut voir ces derniers dans l’Annuaire 2004 de la SHVV. De plus, les archives départementales du BasRhin ne possédaient aucun plan cadastral consultable et ce jusqu’à l’ouverture du nouveau bâtiment sur la route du Rhin en février 2013. Partie analytique Pour étudier les modes de défense utilisés à Thanvillé, il me fallait me documenter sur les fortifications du Moyen-âge et de la Renaissance. J’ai alors trouvé plusieurs ouvrages traitant du sujet tant au niveau national que régional. Le premier tome de « Châteaux et enceintes de la France médiévale » expose et analyse avec précision l’évolution des moyens de mise en défense des implantations seigneuriales ou urbaines. Le but de cet ouvrage est de « restituer les fonctionnalités des divers ouvrages, sans se focaliser sur les questions de forme ou de chronologie. » Le second tome, portant le même nom que le précédent, est consacré aux aspects de la résidence médiévale. Une première partie établit le bilan des recherches archéologiques tandis que les deux autres chapitres explicitent les transformations des éléments architecturaux résidentiels ou défensifs. Bien qu’au Moyen-âge l’Alsace ne faisait pas partie du royaume de France mais du Saint-Empire-Romain-Germanique, on ne peut rejeter l’idée que la sphère culturelle française ait pu influencer le territoire germanique et vice-versa. En effet, les courants architecturaux se limitent peu souvent à un territoire précis et débordent du cadre géographique initial. Le château de Thanvillé étant par exemple composé de fenêtres de différentes époques, il me fallait étudier l’évolution générale des ouvertures pour comprendre les changements opérés sur ce bâtiment. Il en va de même pour l’évolution des fortifications. Puisque le château était qualifié de « wasserburg » et de maison-forte, j’ai porté mes recherches sur ce premier terme s’appliquant à d’autres édifices de ce genre en Alsace. Malheureusement, excepté quelques mentions du mot « wasserburg », aucun ouvrage ne traite réellement de ce type architectural pourtant représenté dans la région. Toutefois, la maison-forte a fait l’objet de recherches notamment en Lorraine et en Bourgogne. 7


Les publications «Châteaux et maisons fortes en Lorraine centrale» tout comme « Les maisons fortes en Bourgogne du nord du XIIIe au XVIe siècle » possèdent des synthèses intéressantes sur la morphologie, l’organisation et le vocabulaire de ces maisons-fortes. Précédant les monographies d’édifices, les deux ouvrages synthétisent les informations des bâtiments étudiés. Cette première partie m’est alors très utile pour établir des similitudes avec Thanvillé tant au niveau des fortifications que des ouvertures.

pierre14 ». J’ai alors contacté Olivier Badermann, tailleur de pierre professionnel et compagnon du devoir, qui m’a accompagné au château. Son œil averti a permis de clairement identifier les outils employés mais également de connaître avec plus de précisions l’époque de conception des fenêtres. Ses indications, ainsi que celles de Jean-Jacques Schwien, m’ont été d’une grande aide pour conclure ce mémoire.

Je me suis également appuyé sur le livre intitulé « Châteaux et guerriers de l’Alsace médiévale » pour tenter de trouver des comparaisons avec l’édifice étudié. L’Alsace compte plus de 300 vestiges de châteaux forts qui se sont multipliés du XIIe au XVe siècles ; les auteurs retracent les périodes historiques de construction de ces châteaux et analysent de nombreux cas. Là encore, les généralités mises en avant me permettent de mettre en lien les méthodes de défense employées pour les châteaux régionaux avec celles de Thanvillé. Toujours localement, l’association « Châteaux forts et Villes fortifiées d’Alsace » publie chaque année un bulletin dans le but de vulgariser les connaissances sur l’histoire de l’Alsace au Moyen-âge et à la Renaissance. Les annuaires 2001 et 2002, spécialisés sur les châteaux forts, comportent notamment des articles sur le vocabulaire castral et la classification des édifices par type. Les bulletins 2007 et 2008 traitent par ailleurs de la Renaissance en Alsace et plus particulièrement des châteaux ou des remparts de cette époque. Les articles énumèrent les remaniements opérés après le Moyen-âge sur ces bâtiments avec l’évolution de l’artillerie. Les édifices ne sont malheureusement pas étudiés dans le détail, seules les transformations et leur date sont indiquées. Les raisons pour lesquelles, par exemple, telle fenêtre a été remplacée par une autre n’est pas explicitée. Malgré tout, ces descriptions constituent une source indispensable pour mon mémoire; elles dirigent précisément mes recherches sur tel ou tel château de la région pouvant être comparé à celui de Thanvillé. Afin de dater les ouvertures par l’examen des traces d’outils laissées sur la pierre, j’ai été amené à me documenter sur les instruments utilisés aux différentes époques. « L’outillage traditionnel du tailleur de pierre » de Jean-Claude Bessac constitue la « bible » en la matière car il répertorie, analyse, classe les outils employés depuis la Préhistoire à l’Époque Moderne. L’aspect technique est développé en premier lieu, accompagné du vocabulaire associé pour terminer sur l’aspect chronologique de l’outil. Des illustrations de marques complètent les analyses mais sont insuffisantes pour les non-initiés. Jean-Claude Bessac l’indique lui-même, « L’analyse technique des traces a pour but de fournir un instrument de travail au chercheur qui souhaiterait identifier par ses propres moyens l’outillage employé sur une pierre ouvrée ancienne. Toutefois, cette méthode n’est applicable par un non spécialiste que dans de bonnes conditions de lecture […]. Dans les cas douteux qui sont les plus courants, il sera toujours préférable de recourir à l’expertise d’un professionnel de la

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Jean-Claude Bessac, L’outillage traditionnel du tailleur de pierre de l’Antiquité à nos jours, p.9

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INDICATION Dans le langage des habitants du Val-de-Villé, Thanvillé est toujours assimilé à son château. Ce terme, dérivé du latin castellum, possède un sens générique englobant tout habitat fortifié mais c’est également le terme le moins précis employé dans la documentation écrite. Il englobe les châteaux forts, manoirs ou encore maisons fortes. Or, le château de Thanvillé ne serait qualifié comme tel qu’à partir de 1572 car il se nomme « domus » en 1104, « maison » à la fin du XVe et début XVIe ainsi que « place » en 1540. La terminologie médiévale donne ainsi des précisions sur l’état de fortification de l’édifice malgré le débat qui existe sur la rigueur des termes utilisés par les auteurs du Moyen-âge15. Les termes « domus » et « maison » sont souvent employés pour désigner un château tandis que « place » a une connotation indéniablement militaire. Ainsi, le « château » de Thanvillé aurait été fortifié avant son incendie du XVIe siècle et reconstruit par la suite sous la forme d’un wasserburg, dénomination employée par Claude Jordy dans son article publié dans l’annuaire de la Société d’Histoire du Val-de-Villé. Un wasserburg est un terme allemand littéralement traduisible par « château fort d’eau ». C’est un château de plaine ou maison-forte entouré de fossés inondés servant à se protéger. Cette dénomination s’applique à des édifices situés dans les pays anglo-saxons mais également en Alsace où ils étaient présents de façon importante. Dans cette région, les châteaux de plaine ne sont pas construits selon un modèle unique, la différence dans l’aspect est souvent due au matériau choisi, c’est-à-dire la maçonnerie de moellons enduite et blanchie. La préférence du tracé géométrique pour ces châteaux de faible altitude viendrait plus d’un type de plan du XIIIe siècle16. De plus, l’implantation sur un terrain plat rend les attaques de toutes parts plus aisées : les cours d’eau et les étendues marécageuses sont alors des éléments de défense recherchés. Jusqu’à la Renaissance, les fossés creusés artificiellement et remplis d’eau sont encore d’actualité, ils sont réalisés à cette époque par la noblesse rurale ayant reconstruit les châteaux. C’est par exemple le cas des châteaux d’Osthoffen, d’Orschwihr ou encore d’Oberkirch. Thanvillé possédait également de larges fossés remplis d’eau, comblés et asséchés en 1772, un marais à l’ouest supplantait quant à lui les murs d’escarpe construits à l’est. Le terme maison-forte est également mentionné pour décrire le château de Thanvillé. Au XVe siècle, le « mot « château » se dévalorise et sert à désigner des structures de plus en plus petites alors que la « maison-forte » devient un archaïsme à connotation militaire, qui désigne plus spécifiquement l’aspect fortifié d’une résidence seigneuriale17 ». 15 B.-C. Bachrach, historien spécialisé dans le haut Moyen-âge, prouve en 1975 qu’il existe un vocabulaire technique spécifique à cette époque contrairement à J.-F. Verbruggen certifiant que non en 1950. 16 Pierre Schmitt, Châteaux et guerriers de l’Alsace médiévale, Le château fort : mythes et réalités, p.106 17 Hervé Mouillebouche, Les maisons fortes en Bourgogne du XIIIe au XVIe s., p.103

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Dans l’ouvrage « Les maisons fortes en Bourgogne du Nord du XIIIe au XVIe s. », ce type de bâtiment est défini comme « un habitat fortifié mineur, capable de résister à un coup de main mais pas à une armée ». Mais au XVIIIe siècle, le château de Thanvillé est transformé en résidence par Fréderic de Lort de Saint-Victor puis en gentilhommière par BertrandMaurice de Castex. L’ancienne forteresse devient alors une agréable maison de plaisance. Pour une compréhension plus aisée, j’emploierai la formule « château » pour désigner l’édifice étudié.

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I.

Carte indiquant la position de Thanvillé et de Saint Hippolyte par rapport à Moyenmoutier Dessiné par Matthieu Héberlé (M.H)

Thanvillé, une terre Lorraine en Alsace

Pour retracer l’histoire de la seigneurie de Thanvillé, je me suis appuyé sur l’ouvrage de Bertrand-Maurice de Castex (ou plus simplement Maurice) intitulé « Histoire de la seigneurie lorraine de Tanviller-en-Alsace » ainsi que sur les annuaires de la Société d’Histoire du Valde-Villé. Ces derniers se sont eux-mêmes basés en partie sur l’ouvrage de Bertrand-Maurice de Castex ainsi que sur les archives de Castex. Une partie de ce chapitre est consacrée aux propriétaires successifs du château afin d’essayer de comprendre si leur origine ont pu influencer l’architecture des bâtiments. La construction d’un château à Thanvillé en 1089 est connue grâce à la chronique du dominicain lorrain Jean de Bayon écrite en 1326. Cette première mention, quelque peu tardive, se base sur des chroniques du XIe siècle disparues depuis. Il est alors nécessaire d’aborder avec prudence les sources de cet homme car il est prouvé que ce dernier se soit trompé en interprétant ou en complétant sa documentation sur ces périodes anciennes. De plus, ses écrits ne sont connus que par une copie du XVIe siècle, éditée en fragments par Belhomme. Le latin torturé utilisé par de Bayon a malheureusement causé une mauvaise compréhension des ses chroniques. C’est pourquoi Félix de Dartein, Bertrand-Maurice de Castex et l’abbé Nartz ont par exemple placé la construction du château en 1084 et non quatre ans plus tard. Quoiqu’il en soit, une forteresse est construite à Thanvillé sur les terres de l’abbaye de Moyenmoutier18 et est confirmée comme «celle19» de cette dernière en 1140. 1. Avouerie de Moyenmoutier et fief lorrain L’avouerie, terme féodal, est la charge de l’avoué. Ce dernier est un «laïc choisi par un évêque ou un abbé pour le représenter en justice devant les juridictions laïques et conduire au suzerain ou au roi les hommes d’armes de sa seigneurie20». En échange d’une rémunération, il fait en sorte de protéger l’institution ecclésiastique dont il a la charge. Moyenmoutier, village situé en Lorraine à une soixantaine de kilomètres de Thanvillé, se développe autour de l’abbaye fondée en 671. Les ducs de Lorraine exercent l’avouerie sur cette abbaye car ils en sont les suzerains. L’abbaye étant en possession de Thanvillé, ils possèdent ce village et en sont également les seigneurs jusqu’au XVIe siècle. Mais la plupart de ses possessions en Alsace sont données en fief à des nobles de la région comme les Schwarber ou les Hattstatt. Le duc Antoine de Lorraine cède finalement le domaine à 18 Notice de Dom Alliot de Moyenmoutier et Jean de Bayon dans Belhomme, Histoire de l’abbaye de Moyenmoutier 19 Une celle est une petite dépendance d’une abbaye dont un ou plusieurs moines y sont chargés de la gestion d’un domaine agricole (ASHVV 2004, p.22) 20 Définition d’une avouerie dans le dictionnaire Larousse: http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/avou%C3%A9/7155

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Les armes des familles De Lort de St-Victor, de Dartein et de Castex Histoire de la seigneurie Lorraine de Tanviller-en-Alsace, p.217

Portrait de Bertrand-Pierre de Castex

Le Val de Villé, un pays, des hommes, une histoire, p. 413

Jean de Widranges en 1540, originaire de Lorraine et devenu secrétaire ordinaire du duc. Puis, les propriétaires aux origines française, lorraine et allemande se succèdent. Jean-Friedrich de Worms est issu de la roture allemande21 et accède au rang de colonel-général de lansquenets au service du roi de France. Selon Claude Jordy, le métier de mercenaire qu’il exerce aurait eu un impact sur l’architecture du château reconstruit en 157222. Quelles sont les influences architecturales voulues par de Worms à cette époque? Autres possesseurs importants ayant œuvré dans les reconstructions, François-Anne Bazin de Chanlas et Frédéric de Lort de Saint-Victor. Le premier est issu d’une famille de noblesse lorraine et possède, en plus de Thanvillé, les château et village de Kientzheim dans le HautRhin. Le second est originaire d’Aquitaine, il épouse la fille de la propriétaire du château de Thanvillé et se charge d’administrer le domaine de 1736 à 1752. La seigneurie est alors cédée à son fils Charles-Frédéric, devenu capitaine au régiment de Navarre. En 1772, Thanvillé reste encore une terre Lorraine malgré la demande de rattachement au royaume de France. Enfin, la famille de Castex entre en possession du château grâce au mariage entre Adélaïde de Dartein et Bertrand-Pierre en 1810. Originaire du Gers, il devient député du Bas-Rhin en 1824, conseiller général du canton de Villé en 1833 et consacre la fin de sa vie à l’agriculture et à l’élevage des chevaux au château. Son fils Théodore, chambellan de Napoléon III, continue «les améliorations entreprises par son père tant en faveur du château que de ses terres23». Bertrand-Maurice, fils de Théodore, partage quant à lui ses activités dans la seconde moitié du XIXe siècle «entre la gestion de son domaine, la production d’aquarelles et les recherches historiques24 ».

21 André Dubail, La galerie des ancêtres ou notices biographiques de quelques seigneurs et châtelains de Thanvillé, ASHVV, 2004, p.173 22 Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé, ASHVV, 2004, p.144 23 André Dubail, La galerie des ancêtres ou notices biographiques de quelques seigneurs et châtelains de Thanvillé, ASHVV, 2004, p.184 24 Ibidem, p.185

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2. L’enclave lorraine: un impact architectural ? Depuis le Xe siècle et ce jusqu’au rattachement du duché au Royaume de France en 1766, Thanvillé était possession du Duché de Lorraine. Tout comme Saint-Hippolyte, ce village était sous l’administration du Duc de Lorraine qui prélevait des impôts et redevances sur les habitants. Cependant, ces deux villages et leur château possèdent-ils un vocabulaire architectural « lorrain » ? Peut on parler d’architecture castrale « lorraine »? Les maisons et bâtiments de Saint-Hippolyte ont toutes les caractéristiques des villages viticoles alsaciens : les colombages mais également les éléments de la Renaissance alsacienne caractérisent la bourgade. Le château des Ducs de Lorraine a quant à lui été fortement remanié aux XIXe et XXe siècle, seule la cave est encore pourvue de quelques traces anciennes25. Le village de Thanvillé est formé de quelques « maisons-fermes », appelées maisons traditionnelles du Val-de-Villé26 similaires à celles construites dans les villages alentours au XVIIe siècle. Le château est à première vue un édifice « alsacien » notamment par l’emploi systématique du grès et par la présence de grandes portes en plein-cintre caractéristiques de ces mêmes maisons traditionnelles de la vallée. Dans un premier temps, les propriétaires successifs de cet ensemble castral étaient des nobles alsaciens dont la seigneurie, bien qu’appartenant au Duc de Lorraine, leur a été donnée en fief et ce jusqu’en 1541. Par la suite, le château fut notamment la possession de Jean-Friefrich de Worms, mercenaire annobli par Charles Ier de Lorraine mais d’origine allemande. Il fit reconstruire le château en 1572, à nouveau détruit en 1633 et reconstruit en 1663 par François-Anne Bazin de Chanlas. Ce dernier était issu d’une famille de la noblesse lorraine et possédait déjà des terres données par le Roi de France. Ainsi, l’architecture du château pouvait probablement alterner entre les influences germaniques et françaises avec des modes de construction identiques dans les deux cultures. Le rayonnement de nouvelles idées ou courants architecturaux se développe amplement au XVIe siècle, époque de la Renaissance. Le tracé bastionné par exemple se diffuse hors d’Italie après 1530 pour devenir la “doctrine de base” de la fortification en Europe pendant trois siècles. Carte des frontières avec l’indication «ENCLAVE DE LORRAINE», 1785 ASHVV 2004, p.26

Il faudrait alors consacrer une vaste et systématique étude sur la série des châteaux ou maisons-fortes des deux régions, analyser plus en détail leur organisation interne et externe puis finir par l’étude de cas du château de Thanvillé. Grâce à cette méthode, il serait possible de conclure si ce dernier est similaire aux maisons-fortes de Lorraine ou s’il ressemble davantage aux châteaux de plaine d’Alsace.

25 26

SAINT-HIPPOLYTE, ville lorraine, La Renaissance en Alsace, tome 1, 2007, p.87 La maison traditionnelle du Val de Villé, ASHVV, 1978, p.87

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3. Les périodes de construction du château selon les sources écrites Motte castrale du Schnellenbuhl près de Sélestat, XIIe s.

a. Les origines Comme il a été dit précédemment, le château remonterait à 1089 mais il n’est pas certain qu’il soit toujours resté à l’emplacement actuel. Situé de nos jours dans un étranglement de 250m entre deux collines de faible altitude, le château semblait se trouver dans le lieu idéal afin de contrôler la route reliant l’Alsace aux salines de Lorraine. De plus, entre la fin du Xe et le début du XIIIe siècle prolifèrent des mottes castrales, ouvrages de défense médiéval ancien. Composée d’un rehaussement important de terre rapportée et occupée en sommet par de fortes palissades en bois, la motte est considérée comme un château fort primitif. Le château de l’an mil répond à la fonction défensive et devient progressivement « la résidence fortifiée d’un puissant et de son entourage27 ». La motte castrale de Schoenau, l’une des mieux conservées en Alsace ou la motte du Schnellenbuhl sont des exemples intéressants.

http://fr.topic-topos.com/motte-castrale-du-schnellenbuhl-selestat

Or, nulle trace ne vient confirmer la présence d’un « castrum » sur le site de Thanvillé. Aucune trace de présence d’assises de fondations ou de pan de mur en élévation n’ont été décelés mais aucune fouille archéologique poussée n’a été effectuée à ce jour. b. Les reconstructions du XVIe au XVIIIe siècle i. Le château des Hattstatt et des Vidrange Des traces d’un château sont retrouvées dans les archives du Duc de Lorraine en 1507 qui le cède à Gaspard de Hattstatt. Celui-ci est chargé de réparer les fossés et les bâtiments afin de pouvoir soutenir un siège. Cependant, le château subit de graves dommages en 1540 durant la révolte luthérienne. Le duc Antoine de Lorraine, qui avait racheté la propriété en 1518, vend la propriété en 1541 à son conseiller et secrétaire Jean de Vidrange. Ce dernier le cède à son fils Olry qui voit le château et le village être ravagés par un violent incendie en 1571. Seuls quelques murs restent debout et seront rachetés l’année suivante par Jean-Friedrich de Worms, un mercenaire au service du roi de France Henri III.

AHVV 2004, p.45

Quel était son aspect avant la catastrophe? Personne ne peut le dire car les quelques fondations mises à jour ne permettent pas de définir l’état ancien. D’après Bertrand-Maurice de Castex, il ne ressemblait en rien à la construction actuelle, les châteaux du pays Rhénan ne sont en effet flanqués de tours qu’après le XVe siècle28. Il ressemblait sûrement aux châ27 28

M. Bur, Le château, 1999, p. 23 Viollet-le-Duc, Dictionnaire d’architecture

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teaux de montagne voisins mais avec de larges fossés remplis d’eau afin de se défendre contre l’ennemi. ii. La forteresse de Jean-Friedrich de Worms Jean-Friedrich décide de reconstruire le château à plan carré mais il ajoute quatre tours à plan légèrement bastionné. Le bastion apparaît en réaction au développement de l’artillerie29, d’abord en Italie dès 1530 puis en France. En Lorraine, le tracé bastionné est employé pour la première fois en 154730. Les murailles médiévales sont en effet trop vulnérables aux tirs de canon de part leur plan arrondi et les angles morts ainsi crées. En Alsace par exemple, Daniel Specklin modifie les fortifications de la ville de Strasbourg en 1577 et transforme le château de Lichtenberg en forteresse. Les ouvrages angulaires construits permettent de flanquer en feux croisés, c’est-à-dire de tirer parallèlement au mur et de supprimer les angles morts. Or, dans le dernier quart du XVIe siècle, ce système de défense est déjà bien dépassé. Pour Claude Jordy, auteur de l’article Le Château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé, l’importance des moyens utilisés pour la reconstruction du château ressemble à une mise en scène « imaginée par son maître d’œuvre dont on connaît le métier », mercenaire. Jean-Friedrich meurt en 1598, son épouse Claude de Gramont continue les travaux entrepris par son mari en agrandissant le domaine par l’achat des terres. Par la suite, Guillaume, fils de Friedrich et de Claude et devenu Friedrich de Tanviller, va s’occuper du château et de son domaine. Maurice de Castex livre une intéressante gravure31, représentant la vision qu’il a du château en 1632. Comment cet homme, propriétaire de la bâtisse à la fin du XIXe, peut-il livrer son état à cette époque ? A-t-il trouvé des plans ou autres gravures représentant le château au début du XVIIe siècle ? S’est-il basé sur des archives afin de créer cette gravure ? Les relevés effectués sur les encadrements de fenêtre permettront peut être de vérifier cette version de Bertrand-Maurice. Gravure de Bertrand-Maurice de Castex, 1880 ASHVV 2004, p.145

Quoiqu’il en soit, c’est une source tout à fait intéressante à analyser. Voici ce qu’en dit Claude Jordy : « On aborde le château par l’est où se présente la tour-porche surmontée d’un clocheton et ses deux ailes dont les extrémités sont marquées par deux tours rondes à trois niveaux avec toiture en poivrières. Deux murs d’escarpe au nord et au sud munis d’un chemin de ronde referment l’avant-cour. 29 La fortification bastionnée est étudiée sur le site: http://juliendaget.perso.sfr.fr/Clem/4021Vauban_ bastion.html 30 Bertrand-Maurice de Castex, Histoire de la seigneurie Lorraine de Tanviller-en-Alsace, p.187 31 Ibidem, p. 1

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La tour-porche précédée par un pont-levis permet de franchir le fossé sous la surveillance de deux bouches à feu qui flanquent l’entrée. Malgré les arcs en plein-cintre, le passage est couvert par un plancher à solives. La façade, en son axe, est percée de deux baies croisées en pierres : elle abrite au premier étage la chapelle, et au dessus, une salle de justice. Une tourelle coiffée d’un toit en poivrière renferme un escalier à vis dont les marches portent des marques de tâcherons. Deux petites fenêtres Renaissance permettent la surveillance du passage couvert. A l’extrémité ouest de l’avant-cour où se dresse un puits à margelle ronde se présente le château de plan carré protégé par un mur d’escarpe de 7 à 8m de haut dont les angles sont munis de quatre tourelles sans toit, de plan ovale. Ce mur est équipé d’un chemin de ronde à structure et plancher de bois. Il délimite une « chemise » de 6m de largeur. De cette époque date un escalier en colimaçon dans une tour « hors-œuvre » située dans l’axe de la façade est du château. Le corps de logis comprend deux étages sur rez-de-chaussée : ce dernier, très faiblement éclairé devait servir de cave ou de pièce de service. Le type d’escalier en place permet de rendre les différents niveaux indépendants. Les ouvertures aux différents niveaux sont munies de fenêtres à meneaux de petite taille percées en fonction de la répartition interne des locaux. Les quatre tours, qui flanquent les angles légèrement bastionnés, munies de canonnières renforcent l’aspect que peut avoir une maison-forte. La toiture en pavillon possède quelques petites lucarnes « selon-rempant ». Sur la gravure figure également la route de la vallée qui traverse l’avant-cour du château à l’est et en ressort par la courtine sud au moyen d’un deuxième pont-levis. » Bertrand-Maurice de Castex explique quant à lui que les fenêtres étaient d’un dessin uniforme et barrées de meneaux en forme de croix. Les défenses étaient tournées vers l’est et donc vers l’Alsace tandis que le coté ouest aurait été défendu par un marais. iii. La reconstruction par François Bazin de Chanlas Marie-Mathilde de Tanviller, fille de Friedrich de Tanviller et d’Estel de Kesserling, épouse François-Anne Bazin de Chanlas en secondes noces en 1655. Le château est détruit depuis 1633, année où il fut incendié et démoli en partie par les Suédois lors de la Guerre de Trente Ans. Ce n’est qu’en 1663 que Bazin de Chanlas décide de le restaurer. Selon Bertrand-Maurice de Castex, le château de la fin du XIXe siècle « est considéré par les archéologues comme datant du XVIIe siècle32 » mais daterait en par32

Notice sur le château de Thanvillé, Archives de Castex

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tie de 1572 car les bâtiments n’auraient pas totalement été incendiés par les Suédois. Ils auraient été reconstruits à la fois selon les plans de l’ancien château par de Worms33 mais en utilisant également une grande partie des murs des bâtiments toujours debout. Selon les sources orales de l’époque, Bertrand-Maurice écrivit que la porte d’entrée et les deux tours latérales des communs n’auraient pas souffert de l’incendie et seraient restées intactes. Il étaie ses propos en émettant l’hypothèse qu’à l’époque de la reconstruction du château en 1663, lorsque l’Alsace devient française, Louis XIV n’aurait pas « toléré la construction d’une [nouvelle] forteresse au milieu de ses possessions ». En effet, ce dernier fit raser les châteaux encore debout sur les terres nouvellement acquises, afin d’asseoir son pouvoir. De plus, un « vieux pavé avec un système d’égout » couvert de tuiles et de débris calcinés a été retrouvé à un mètre sous le sol de la cour puis recouvert d’une couche de terre lors de la reconstruction en 1663. Pour Bertrand-Maurice, cela prouve que l’ancienne cour et par conséquent l’ancienne enceinte avaient la forme actuelle. Ce mur d’enceinte crénelé composant les communs, où s’y adossaient quelques bâtiments isolés, était percé de meurtrières. Du côté du château, il se terminait par deux petits bâtiments flanqués d’une tourelle ronde dont « on voit encore les restes dans le poulailler [au nord] et on a retrouvé les fondations du bâtiment symétrique [au sud] » .

Le domaine du château de Thanvillé

http://www.chateau-fort-manoir-chateau.eu/chateaux-bas-rhin-chateau-a-thanville-chateau-de-thanville.html

Bazin de Chanlas reconstruisit le corps de logis en reprenant le plan arrêté par de Worms34. Cependant, Bertrand-Maurice indique que les fenêtres à meneaux dateraient de la fin du XVe siècle, quant aux voûtes des tourelles, elles seraient antérieures au XVIIe siècle. Un panneau de bois au rez-de-chaussée du corps de logis porterait également la date de 1598. Concernant enfin l’enceinte extérieure ruinée, les ressources de Bazin de Chanlas ne lui permettent pas de la relever et, encore en 1713, seules les pièces voutées des tourelles du corps de logis sont habitables. La tour et l’enceinte sud se trouvaient rasées à trois ou quatre mètres du sol mais, dans la glacière ont été retrouvées des « fondations de murs d’une très grande épaisseur ». « Les murs d’escarpe des fossés flanqués de 4 tourelles rondes s’élevaient jusqu’à hauteur du 1er étage et étaient percés de meurtrières, qui furent ensuite placées dans le mur de la glacière35. » On ne peut malheureusement pas vérifier ces propos car la glacière en question est comblée de terre rendant l’observation des murs impossible. Qu’en est-il vraiment de ces suppositions? C’est avec l’analyse des marques lapidaires des marches de la tourelle accédant à la chapelle qu’il sera d’abord possible de dire si les bâtiments est des communs datent bien de 1572. 33 p.147 34 35

Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé, ASHVV, 2004, Ibidem Archives de Castex

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iv. La résidence de Charles-Frédéric de Lort de Saint-Victor Vers 1770, Charles-Frédéric mène à bien des travaux qui vont « profondément changer l’allure et le caractère encore très militaires des lieux36 ». Il va en effet œuvrer sur les façades et l’intérieur du corps de logis mais également sur les communs et les jardins. Au niveau du château à proprement parler, il fait assécher le fossé entourant ce dernier et fait raser l’escarpe à un mètre du sol. De ce fait, il fait pénétrer la lumière au rez-de-chaussée et rend ainsi cette partie habitable. Toutes les façades vont-elles aussi subir d’importantes modifications. De Lort va recomposer la façade est en supprimant la tourelle d’escalier et en créant au même endroit la nouvelle porte d’entrée. Une seconde porte est pratiquée dans l’axe central de la façade sud en rapport avec les jardins et dans la percée visuelle du château médiéval du Frankenbourg.

Plan-terrier de 1786 ASHVV 2004, p.149

« Trois registres de percements sont mis en œuvre : chaque niveau reçoit cinq baies munies de jambages et de linteaux cintrés en pierre. Les baies rectangulaires du rez-dechaussée et du premier étage diffèrent du deuxième niveau où elles se rapprochent du carré. Les alignements verticaux composés par les ouvertures sont au nombre de cinq. Il se dégage de cette ordonnance symétrique la belle harmonie d’une façade « classique » à la française. Certaines baies sont encore munies de fenêtres à croisées. Des volets à battants viennent terminer l’habillage de ces deux façades37 ». La façade nord est percée de la même manière dans sa moitié ouest aux premier et deuxième étage. D’après l’aquarelle de Charles de Dartein, la façade ouest conserve son aspect « Renaissance » datant de la reconstruction du château en 1663. Les communs subissent à leur tour d’importantes modifications avec la construction de nouveaux bâtiments à partir des escarpes nord et sud de l’avant-cour. Les quelques édifices isolés s’appuyant auparavant sur ces hauts murs ont été remplacés ou complétés par d’autres bâtiments utilisés pour abriter le personnel et pour le stockage. L’aspect dissymétrique des pignons dentelés à l’ouest sont la résultante de la réutilisation des murs d’escarpe et ces travaux donnent aux communs son aspect actuel. D’après Maurice de Castex, ces bâtiments abritent à l’époque « logements de service, étable, écurie, bûcher, remise, buanderie, atelier de serrurerie, menuiserie, forge. Dans les greniers sont stockés foin et paille. » De plus, les accès et l’éclairage de ces communs s’effectuent coté cour où les ouvertures sont pourvues d’encadrements en pierre. Pour Claude Jordy, « certaines de ces dernières, très anciennes, ont été récupérées des façades est et sud du château38 ». Ainsi, les murs d’escarpe et les deux tourelles rondes encore visibles de nos jours auraient 36 p.148 37 38

Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé, ASHVV 2004, Ibidem, p.148 Ibidem, p.152

18


La façade est percée de fenêtres classiques Photo personnelle (pers.)

été construits après l’incendie de 1571 et sont restés debout depuis 450 ans. Les bouches à feu, les archères et les meurtrières sont-elles alors d’époque ? Les fenêtres dites « Renaissance » des communs datent-elles véritablement de la fin du XVIe siècle puisque récupérées du corps de logis ? Un « plan terrier » dessiné en 1786 montre les aménagements extérieurs du château. Selon Claude Jordy39, la nouvelle entrée du château s’effectue au bout de la grande allée au sud ou subsistent encore un portail en fer forgé avec deux piliers en pierre flanqués de deux murs convexes. c. Le XIXe siècle : les remaniements des familles de Dartein et de Castex Jean-Félix de Dartein achète en 1786 la seigneurie mise en vente par Charles-Fréderic de Lort mais il meurt en 1788. Son frère Charles devient alors le dernier baron de Thanvillé en 1780 puis la fille de Charles, Adélaïde, devient propriétaire avec son époux Bertrand-Pierre de Castex en 1827. Aucune modification du château n’a été entreprise pendant les 41 années de possession des de Dartein. En 1830, le général Bertrand-Pierre de Castex se retire définitivement dans son domaine de Thanvillé où il se consacre à ses terres et à l’élevage des chevaux. Après la mort de ses parents, son fils Théodore reprend le château en 1856 et se consacre lui aussi à l’exploitation du domaine et « à l’intelligente restauration de cette antique demeure féodale dans laquelle il sut réunir des collections d’antiquités et d’objets d’art qui en font l’une des plus belles et des plus curieuses demeures d’Alsace40 ». En 1868, la toiture est remplacée par un toit en ardoise avec lucarnes reposant sur une nouvelle corniche en briques. L’intérieur du château est remeublé, retapissé, la chapelle est rénovée et ornée de tableaux de la Renaissance. Malheureusement, le 17 Août 1870, les Badois saccagent la propriété et pillent le château sans pour autant faire de dégâts sur les bâtiments. Là-encore, le château est transmis à la génération suivante puisque Bertrand-Maurice de Castex41, le fils de Théodore, rachète la propriété en 1896 grâce à l’argent de son épouse mais participe déjà aux travaux de rénovation et de transformation depuis des années. L’ouvrage de Bertrand-Maurice ne relatant pas les travaux qu’il effectua sur le château, je me suis appuyé sur l’analyse de Claude Jordy42 ainsi que sur une analyse visuelle. Ce dernier indique par exemple que les bâtiments sont complétés en 1884 par des décors,

Peinture représentant le château au XIXe siècle ASHVV 2004, p.140

39 Ibidem, p.148 40 E. Sitzmann, Dictionnaire biographique des hommes célèbres d’Alsace 41 Bertrand-Maurice de Castex dit Maurice de Castex est l’auteur de l’ouvrage Histoire de la seigneurie Lorraine de Tanviller-en-Alsace 42 Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé, ASHVV, 2004, p.158

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des éléments factices donnant à l’ancienne forteresse une image de gentilhommière. En effet, un soubassement en appareil régulier et « avec fruit » ceinture le mur, une réplique des « chaînes d’angle à bossage trouées » est observable sous la moulure. On remarque également, qu’à certains endroits, le plaquage se désolidarise de la structure prouvant ainsi que ce socle n’est qu’un artifice. Les chaînages d’angles éveillent eux-aussi une certaine curiosité car le motif à trous dans le bossage est peu fréquent. On le retrouve de la même façon au niveau des communs, sur la tour d’entrée. Bouche-à-feu, décor en ciment, Thanvillé Photo pers.

De quand date en vérité ce soubassement en pierre et les chaînages d’angle? Est il possible que Charles-Frédéric de Lort ait effectué ces modifications lors des transformations des façades ou sont elles le résultat de la « mise en scène, de la création d’un ensemble factice de Maurice [de Castex]43»? Concernant la moulure en ciment au dessus du socle, il est aisé de dire que cette partie a été réalisée sous les ordres de Bertrand-Maurice de Castex car l’utilisation du ciment pour le travail de rocaille n’a débuté qu’après 1850. Au niveau des façades du corps de logis, Bertrand-Maurice réalise le percement de deux croisées alignées verticalement au premier et deuxième étages de la façade ouest. Au nord est ouverte une grande croisée à deux meneaux de style néo-renaissance afin d’éclairer la cage d’escalier. Le plan du château dressé en 1883 indique que cette dernière a été changée de place par Bertrand-Maurice lors des travaux de 1884 et qu’ainsi la distribution des étages supérieurs et inférieurs ont été modifiés. De plus, les encadrements de toutes les ouvertures du château sont cernés de moulures et d’appuis en ciment imitant le grès. Le but de ces ajouts sur les baies d’époques différentes étaient d’abord de créer un décor et probablement aussi d’unifier le bâtiment. La façade est n’a été modifiée que de façon minime car seule la porte d’entrée a été transformée. Elle est « encadrée de jambages et linteaux munis de « filets et champ plat », et surmonté d’un tympan couronné d’une corniche ». En son milieu figurent de surcroît les armes des Castex.

Soubassement, décor en ciment, Thanvillé Photo pers.

43 p.158

Claude Jordy, Le château de Thanvillé : un château de plaine dans la vallée de Villé, ASHVV, 2004,

20


Aquarelle de Charles de Dartein, 1830 ASHVV 2004, p.147

4. Confrontation avec les documents iconographiques Les documents iconographiques anciens sont très peu nombreux. Exceptée la gravure représentant l’ensemble du château par Bertrand-Maurice de Castex vers 1633 mais dessinée vers 1880 et celle ci-contre de Charles de Dartein en 1830, il n’en existe pas de représentation plus ancienne. Les iconographies sont en général des documents de travail très intéressants, elles permettent d’appréhender l’évolution subie par les bâtiments. L’aquarelle nous montre la façade ouest du corps de logis avant les travaux de 1884. Des fenêtres à meneaux occupent la travée centrale alors qu’aujourd’hui, ce sont des portesfenêtres. Leur largeur parait cependant identique entre la peinture et la photographie. Les fenêtres ont-elles été simplement rallongées jusqu’au sol? Les linteaux sont-ils d’origine? A t’on remplacé intégralement les anciennes fenêtres à meneaux? De plus, en comparant cette peinture avec la photographie actuelle, on remarque la présence d’une fenêtre supplémentaire au deuxième étage. Est-ce un oubli de la part de Charles de Dartein? La fenêtre a-t-elle été rajoutée après les travaux de la fin du XIXe siècle? L’observation et l’analyse de cette dernière pourra nous le dire.

5. Synthèse des étapes de construction selon les écrits historiques

Des ouvrages et articles étudiés dans la première partie de ce mémoire, on peut établir la chronologie des étapes de construction du corps de logis et des dépendances du château de Thanvillé. (Voir page suivante et ANNEXES 13)

Photo de la façade ouest, état actuel Credit photographique Pascal Scherer

21


1870 + 1884

DessinĂŠ par M.H

22


6. Recensement des points ou zones critiques L’ensemble des documents, écrits ou graphiques, ont permis de définir des «points ou zones critiques» c’est-à-dire des parties du château dont l’origine est incertaine ou non identifiable selon l’historique. Ces derniers peuvent être des portions de murs, des ouvertures ou des éléments de décor n’ayant pas reçu de datation précise de la part des historiens. Ils permettent alors d’orienter les observations, les relevés et les analyses sur telle ou telle zone du château. Les points critiques qui en résultent sont les suivants: -

Les murs d’escarpe (1): censés être de 1572 car ils n’auraient pas été reconstruits en 1663. Peut on réussir à prouver que ces murs sont ceux du XVIe siècle?

-

Les tours d’angle (2): n’apparaîtraient qu’après le XVe siècle dans les châteaux rhénans. Pourraient-elles finalement être antérieures à Thanvillé?

-

La tour-porche et la tourelle de la chapelle (3): auraient survécu à la destruction de 1633?

-

Les arches du passage de la tour porche (4): forme similaire aux portes cochères des fermes du XVIIIe siècle dans le Val-de-Villé. De quelle époque sont-elles finalement?

-

Les bouches à feu/ canonnières / archères (5): sont elles d’époque ou purement décoratives?

-

Les fenêtres à moulure en quart de rond (6): certaines dateraient du XVe siècle selon Bertrand-Maurice de Castex alors que le château est reconstruit complètement après 1572. On sait que certaines fenêtres ont été déplacées du corps de logis et replacées sur le mur d’escarpe des communs. Lesquelles le sont vraiment ?

-

La travée centrale de la façade ouest (7): les fenêtres du premier et deuxième étage sont elles totalement neuves ou ont elles été remaniées et transformées en porte-fenêtre en 1884?

-

La fenêtre à meneau supplémentaire dans la façade ouest (8): n’apparaît pas sur l’aquarelle de Charles de Dartein. Peut-on prouver qu’elle a été remplacée?

-

La date sur linteau de porte de 1591, au niveau des communs (9): porte de style « île de France ». Est-ce un rajout?

-

Le chaînage d’angle et le soubassement (10): ont-ils été rajoutés par Bertrand-Maurice de Castex à la fin du XIXe siècle?

Dessiné par M.H

23


II.

502 503

501

403

601

Classification, analyse et synthèse des éléments architecturaux du château de Thanvillé

402

401

153

122 154

152

104

121

204 123

151

124

103

101

203

205

Cette seconde partie du mémoire est consacrée à l’étude des éléments architecturaux du château afin de tenter de répondre aux points critiques et aux questions qui y sont liées. Par l’analyse générale des moyens de défense des châteaux au Moyen-âge et à la Renaissance, puis par la comparaison de ces éléments avec ceux étudiés à Thanvillé et classés grâce à la méthode d’archéologie du bâti, il sera possible de compléter certaines données historiques. 1. La méthode d’archéologie du bâti

801 901 206

144 141 142

132.22

101.31

131

101.32

101.33

101.34

902

101.35

132.3

132.3

143

102

123.3

132

134 133

101.21

101.22

101.23

101.24

101.25

132.2

123.2

207

208

202 104.31

121.2

201

133.1

101.12 302

101.14

123.1

301

121.1

124.1

701

Numérotation des façades Dessiné par M.H

152.3

151.2

152.2

151.1

152.1

103.31

103.32

103.22

103.23

103.21

103.11

103.33

103.12

103.13

103.34

103.24

153.3

104.24

104.23

122.2

104.25

104.13

122.1

153.2

144.3

154.3

154.2

141.3

144.1

102.33

102.34

102.35

133.3

102.22

102.23

102.24

134.3

102.25

Pour faciliter le passage entre le catalogue des descriptions et les dessins ou photographies, il a été nécessaire de numéroter les ouvertures. Chaque mur reçoit une numérotation de base puis chaque ouverture se voit attribuée un nombre en fonction de sa position dans l’étage. Par exemple, 103.34 indique la 4e ouverture en partant de la gauche du mur, au 3e étage du mur 103. ( Voir ANNEXES 2) 141.2

142.2

141.1

142.1

102.11

143.1

102.32

142.3

102.21

103.15

154.1

Je procède d’abord par l’étude générale des moyens de défense et des ouvertures du Moyenâge et de la Renaissance en Europe. Je réalise ensuite une classification des éléments du château de Thanvillé selon différents types: l’ouverture en tant qu’objet, leur décor, les outils de taille de pierre utilisés, la structure et matériaux de l’édifice. Par la recoupement des résultats obtenus, cette méthode me permet d’obtenir des premières hypothèses chronologiques. Puis, par une étude comparative supplémentaire avec d’autres édifices déjà datés, je peux identifier et estimer l’origine des éléments similaires du château de Thanvillé. Ainsi, grâce à la mise en relation de ces études complémentaires, il m’est possible de retracer les étapes de construction du château et de cette manière compléter son histoire.

103.25 144.2

153.1

104.12

102.31

143.3

143.2

103.14

104.35

104.11

124.21

101.15

132.1

151.3

104.34

104.32

104.21

124.22

303 101.11

104.33

122.3

104.22

101.13

133.21

Comme expliqué plus haut, la méthode employée ici est celle utilisée par les archéologues du bâti. Après avoir mis en avant les points dits «critiques» concernant l’historique, c’està-dire les éléments jugés personnellement obscurs ou certaines remarques non convergentes entre les différents ouvrages, je tente d’enrichir ces points critiques en différentes étapes. Il s’agit alors d’utiliser le maximum d’éléments présents possibles afin d’effectuer des datations. Malheureusement, la grande majorité des murs du château de Thanvillé sont encore recouverts de crépi empêchant toute étude globale sur la maçonnerie. Malgré cela, les parties non enduites permettent d’apporter des éléments de réponse. Je me base donc sur l’examen, le relevé et l’analyse détaillée de fragments de l’édifice en m’appuyant sur les éléments visibles du château sans devoir intervenir sur ce dernier. 121.3

124.3

102.12

102.13

102.14

133.2

134.2

133.1

134.1

102.15

Façade ouest Dessiné par M.H

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2. Les archères et les canonnières a. Historique

Meurtrière, château du Kagenfels Crédit photo. N. Mengus

Meurtrières, château du Kagenfels http://www.kagenfels.org/eak12.htm

L’archère est déjà utilisée dans les fortifications grecques et gallo-romaines mais elle est adoptée, ainsi que la fente étroite, dans tous les organes défensifs à la fin du XIIe siècle et devient un élément constitutif du système philippien44. Cette dénomination provient de Philippe Auguste, roi de France, qui joue un rôle primordial dans cette évolution pour assurer « une normalisation tout à la fois défensive et symbolique45 » de son territoire. En Alsace, elle apparaît dans la seconde moitié du XIIIe et devient partout une constante jusqu’à son remplacement pas la canonnière46. L’archère se caractérise par l’ébrasement interne débouchant à l’extérieur par une fente et forme vers l’intérieur une fenêtre de tir qui peut être pratiquée dans le mur de la pièce. Mais l’évolution de l’artillerie légère modifie les ouvertures de défense notamment avec l’apparition des gros calibres mobiles comme les canons. Ce n’est qu’à la fin du XVe siècle que l’artillerie devient un véritable danger Dans de nombreux cas, les anciennes archères sont transformées en couleuvrinières dès le début du XVe siècle et ce jusqu’à la fin du XVIe par le simple percement d’un trou dans la fente de tir afin de permettre le passage des armes à feu. Dans ce cas de figure, le diamètre de l’orifice circulaire mesure une vingtaine de centimètres. Les canonnières, c’est-à-dire les embrasures spécifiquement destinées aux armes à feu, apparaissent quant à elles au courant du XVe siècle. Au château de Hohenbourg à Wingen, des bombardes et des canons sont mentionnés en 1432. Les canonnières peuvent avoir des formes diverses (ovale, rectangulaire, « en lunettes », à rotule, ...) et présenter des redents. Les exemples sont nombreux en Alsace où ils sont visibles dans les châteaux ou les fortifications urbaines. On les retrouve par exemple sur la tour de l’horloge à Sélestat, sur les remparts de Colmar, au château du Lichtenstein, … Alors que les premières canonnières connues en Île-de-France datent de 1398, elles n’apparaissent qu’en 1430 en Bourgogne. Elles sont adaptées à des pièces de gros calibres, possèdent un orifice large (0.20 à 0.35m) et ouvert au ras du sol. Vers 1450, la canonnière est positionnée à hauteur d’appui avec l’apparition des couleuvrines et des arquebuses. Leur diamètre étant plus faible, les canonnières primitives peuvent être modifiées par l’ajout d’un orifice de petit diamètre au milieu de la fente de visée. Vers 1470, les canonnières évoluent par la création d’un double ébrasement donnant alors naissance à la « canonnière à la française ». L’orifice est ainsi placé à l’intérieur du mur afin de protéger l’embrasure de tir, de solidifier le mur et de rapprocher le tireur de l’ouverture47.

Mise en oeuvre d’une couleuvrine dans une couleuvrinière (avant 1437) Jean Mesqui, Châteaux et enceintes de la France médiévale, p. 303

44 45 46 47

Jean Mesqui, Châteaux et enceintes de la France médiévale, tome 2, p.254

Ibidem, p.42 Ibidem, p.256 Ibidem, p.317

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Cette première innovation est accompagnée d’une seconde qui est liée à la multiplication des armes de petit calibre où un orifice rond de quelques centimètres de diamètre suffit. L’ébrasement externe disparaît car inutile, l’orifice peut simplement être percé à la jonction de deux pierres. Ces canonnières sont utilisées jusqu’au XVIIIe siècle mais elles ne sont pas présentes à Thanvillé. Bien que l’archère-canonnière soit utilisée à la fois dans les châteaux-forts et les maisons-fortes, les canonnières à ras du sol ne sont utilisées que dans ces premiers édifices. L’entretien d’un canon coûtait trop cher pour des seigneurs modestes comme à Thanvillé. Cependant, les canonnières à ébrasement externe (bien qu’archaïques au XVIe siècle) sont répandues dans les maisons-fortes : elles représentaient un élément décoratif et dissuasif contrairement aux autres ouvertures. Les canonnières possèdent également d’autres caractéristiques autres que l’orifice d’ouverture, ce sont les ébrasements et la position des armes. Contrairement aux archères, elles nécessitent un espace interne de plus ou moins grande importance utilisé par le tireur pour le maniement des armes. Ces niches de tir sont en général de plan de base rectangulaire avec un ébrasement d’ouverture important de forme triangulaire. Elles évoluent ensuite par la spécialisation de l’espace réservé au tir en devenant des chambres de tir fermées, fréquemment observables après 1450. b. Relevé, observations et comparaisons

Archères-canonnières, Thanvillé Photo pers.

Bouches-à-feu, Thanvillé Photo pers.

Or, ni les archères-canonnières (ou couleuvrinières) ni les canonnières (ou bouches-à-feu) visibles à Thanvillé, positionnées à la fois sur les tourelles du corps de logis et sur les tours rondes des communs, ne présentent de niche intérieure ou de chambre de tir. De plus, la faible épaisseur des murs a pour conséquence un ébrasement interne peu important. Toutefois, l’espace à l’intérieur des bâtiments est suffisant pour aisément manier les armes et la proximité immédiate de fenêtres résidentielles n’est pas anormale dans les tourelles du corps de logis. En effet, les fenêtres ont joué à toutes les époques le rôle d’embrasure de tir et dans de nombreux cas, les canonnières furent aménagées en allège de fenêtre bien au-delà de 1500 dans des châteaux devenus résidentiels. Leur placement sur les flancs des tourelles au niveau du corps de logis montre leur aspect défensif limité: les couleuvrinières et les canonnières ne sont prévues que pour une défense rapprochée48 et ne peuvent couvrir que les façades du bâtiment. Pour être davantage efficace, elles devraient se trouver sur les faces des tourelles bastionnées, bien qu’à cet endroit, les angles morts ne peuvent être complètement évités . Sur les tours rondes des communs, ces deux types d’ouvertures semblent avoir une utilité défensive au vu de leur placement dans les murs. 48

L’orifice des canonnières a pour conséquence un angle de tir pas très important

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Relevé d’une canonnière, tour d’angle sud des communs Dessiné par M.H

0

50

100 cm

Plan du premier étage, repérage des canonnières

Le relevé de quelques archères-canonnières à Thanvillé indique que ces dernières pourraient être d’anciennes archères transformées en canonnières par le percement d’un orifice circulaire à la base de la fente mesurant vingt centimètres. Beaucoup d’archères ont subi le même sort, notamment en Bourgogne comme il a été vu précédemment. Par leur forme et leurs proportions, les canonnières pourraient elles aussi être d’origine, c’est-à-dire du XVIe siècle. L’étude des traces d’outils montre que ces canonnières ont été taillées à la broche, pour les archères, à la pointerolle et au marteau taillant pour les canonnières (voir Tableau «OUTILS», ANNEXES 4). L’emploi de ces outils et l’aspect rustique49 des ouvertures confirme leur mise en place au XVIe siècle, comme la plupart des canonnières des châteaux et remparts alsaciens. N

Dessiné par M.H

angle mort

Schéma des zones couvertes par les tirs: les façades externes des communs sont défendues efficacement par les ouvertures de tir placées dans les tours rondes tandis que le corps de logis est pourvu d’angles morts rendant le bâtiment vulnérable aux attaques. Dessiné par M.H 49

Selon Olivier Badermann

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3. Les ouvertures résidentielles

a. Historique Les fenêtres peuvent êtres étudiées selon plusieurs critères : la structure, la stylistique et l’aspect ou encore la pure fonctionnalité. La combinaison de ces derniers forment un élément d’éclairage assez complexe évoluant dans le temps. On observe toutefois que la structure n’a pas varié de façon importante, les fondements sont identiques à toutes les époques bien que les dimensions soient variées. Les données stylistiques et fonctionnelles vont alors jouer un rôle important dans l’étude chronologique. La question structurelle des fenêtres se pose dès le percement du mur : il faut reporter les charges des parties supérieures de part et d’autre de l’ouverture. Pour les moins larges, archère ou canonnière, la voussure plate voire simplement le linteau suffit à stabiliser la structure. Pour les autres ouvertures, l’arc de décharge est une voûte et apparaît comme la solution universelle depuis l’Antiquité50. Elle est en règle générale maçonnée et composée de claveaux en pierre. Fenêtre de la chambre du roi, Château de Tarascon Châteaux et enceintes de la France médiévale, p.219

Fenêtres à croisillons horizontaux, Croucy-sur-Ourq et Septmonts Châteaux et enceintes de la France médiévale, p.209

A Thanvillé, on retrouve les types de fenêtres suivants: • Les fenêtres unitaires, sans partition verticale par un meneau : de par leur dimension faible, elles sont couvertes d’un linteau et vont de la meurtrière à la fenêtre étroite. • Les fenêtres rectangulaires : elles sont parfaitement fonctionnelles « au plan de leur usage interne ». Elles apparaissent comme la forme la plus courante des fenêtres de petite taille. • Les fenêtres à meneau vertical : elles ont fait disparaître la catégorie des jours d’éclairage en raison de leur meilleure fonctionnalité. L’élément vertical permet en effet d’obtenir une baie plus large en assurant le passage des contraintes et de bénéficier de vantaux davantage manipulables de l’intérieur51. Ces ouvertures à meneau unique sont extrêmement fréquentes et sont l’origine du développement des fenêtres à meneau et croisillon devenues la règle à partir de 1350. Les fenêtres à plusieurs meneaux verticaux sont quant à elles moins utilisées pour des raisons de solidité. On en trouve pourtant un nombre assez important en Alsace notamment au Haut-Koenigsbourg dans le palais du XIIe siècle ou au château de Birkenfels à Ottrott datant du début du XIIIe siècle. • Les fenêtres à croisillons horizontaux : il semblerait que ce type de baie soit apparu vers le milieu du XIVe siècle et se soit généralisé très rapidement dans l’architecture castrale et palatiale. Elle se retrouve par exemple au château du Louvre restructuré par Charles V vers 1370 et s’impose rapidement dans la fenêtre courante. A partir du XVe siècle, la structure des ouvertures se simplifie de plus en plus et c’est la décoration qui 50 51

Eugène Viollet-Le-Duc, Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Arc Jean Mesqui, Châteaux et enceintes de la France médiévale, p.199

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Repérage des fenêtres «hétérogènes» Dessiné par M.H

apporte des variantes comme les moulurations des piédroits et des meneaux, la présence de réseaux et l’existence ou non d’archivoltes. La fenêtre à croisée est la fenêtre emblématique de l’architecture de la Renaissance52. Concernant les piédroits, les linteaux et les encadrements, « l’élément décoratif le plus simple et le plus fréquent, est sans aucun doute le chanfrein, accompagné d’un délardement du couvrement53 ». De tout temps, les arêtes vives à angle droit dans le décor des fenêtres n’ont jamais été admises et le chanfrein est utilisé universellement. Il permet d’établir une transition entre la façade et l’intérieur et d’y apporter ainsi plus de lumière. Depuis le début du XIIe siècle et jusqu’à la fin du XIVe siècle, les baies sont embellies de colonnettes à chapiteaux supportant des arcs d’encadrement, remplacées par des baguettes toriques à chapiteaux puis par des baguettes prismatiques à partir des années 1400. Le chapiteau ayant disparu, la baguette torique évocatrice de la colonnette n’avait plus lieu d’être. Ainsi, au moyen-âge, la plupart des meneaux verticaux ont une forme de colonnette pour les fenêtres prestigieuses ou sont des cylindres prismatiques pour les fenêtres communes. Au Château du Roi à Tarascon, la fenêtre de la chambre royale possède une baguette torique d’encadrement prolongée au meneau et au croisillon afin de ne pas créer une gêne au niveau de l’intersection. Cette particularité date du milieu du XIVe siècle. b. Relevé, observations et comparaisons Le château de Thanvillé se compose de nombreuses fenêtres de types variés entre les communs et le corps de logis. On observe d’abord l’importance numérique des fenêtres hétérogènes, c’est-à-dire celles composées d’éléments disparates (jambage, linteau) sans liens entre les uns et les autres. Elles sont surtout présentes au niveau des communs et plus curieusement au dernier étage de chaque tourelle du corps de logis. Elles sont caractéristiques d’un remploi et indiquent clairement qu’elles ne sont pas à leur emplacement d’origine. Malgré tout, l’étude des marques d’outils et du décor sur ces dernières montrent que beaucoup d’entre elles sont un assemblage des parties de fenêtres d’origine. Les tableaux «OUVERTURES» et «DÉCOR» (voir ANNEXES 3 et 7 ) montrent le nombre considérable de fenêtres présentant une moulure en quart de rond. Le recoupement supplémentaire des tableaux «OUTILS» et «DÉCOR» (ANNEXES 4 et 7) des ouvertures permet de prouver que les fenêtres à moulure en quart de rond sont les plus anciennes. Ce décor, rare en Alsace se retrouve par chance sur l’encadrement de porte d’une ferme dans un village proche, datée de 1535. 52 D’après Eugène Viollet-le-Duc dans le Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle 53 Jean Mesqui, Châteaux et enceintes de la France médiévale, p.211

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De plus, l’utilisation de la pointerolle et du marteau taillant, ainsi que la présence de moulures en quart de rond aplanies sont caractéristiques des fenêtres du XVIe et XVIIe siècle. D’après Olivier Badermann, tailleur de pierre professionnel, leur aspect rustique et l’irrégularité des courbes des moulures en sont la preuve. Comme ce décor est attesté aux alentours de Thanvillé au début du XVIe siècle, les fenêtres du château dateraient donc de 1572, année de reconstruction du château après l’incendie qui le ravagea une année plus tôt. On remarque également que certaines fenêtres des communs ont une moulure ayant été bûchée, signifiant qu’une partie de la pierre en saillie a été enlevée. On a alors affaire à des fenêtres du même type que les précédentes, datant de 1572 mais remaniées par la suite.

Fenêtres à moulure en quart de rond, façade ouest Photo pers.

Détail du quart de rond Photo pers.

Les proportions de quelques ouvertures donnent de la même façon des indications sur leur époque de pose. Au Moyen-Age ou à la Renaissance, elles sont plutôt étroites ou divisées en meneaux si la largeur totale augmente. En revanche, trois portes piétonnes habillées d’une moulure en quart de rond ont des dimensions peu habituelles; leur largeur de passage trop importante signifie qu’elles ont été remaniées en utilisant certains linteaux ou jambages existants puis complétées (ou non) par de nouvelles pièces. Il en va de même pour quelques fenêtres rectangulaires des communs où la longueur du linteau est plus importante que celle des jambages. Ces proportions «modernes» signifient que ces dernières ont été rajoutées par la suite, en conservant les jambages mais en créant un nouveau linteau. On ne peut toutefois pas donner de date quant à leurs transformations.

Porte d’entrée de 1535, Neuve-Eglise Photo pers.

Détail d’une fenêtre de Thanvillé Photo pers.

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4. Le décor et la structure En Alsace mais aussi dans les régions limitrophes, beaucoup d’éléments architecturaux similaires à ceux de Thanvillé se retrouvent dans les châteaux, bâtiments publics ou même résidentiels. D’une part, l’influence des grands courants architecturaux est telle qu’elle devient la règle pour les maîtres d’oeuvre qui appliquent ces principes avec toutefois des différences locales. D’autre part, ces particularités peuvent se limiter à une zone géographique faible, à l’échelle de plusieurs villages. En tout cas, «chaque époque a ainsi été marquée par des créations plus ou moins habiles dans les provinces reculées du royaume, tout dépendait des goûts, des connaissances et des capacités financières du commanditaire54».

Arc de décharge au dessus d’une porte de remploi, Photo pers.

Arc de décharge au dessus d’une fenêtre de remploi, Photo pers.

A Fontenay-le-comte, la maison Millepertuis construite vers 1570 possède une porte d’entrée d’époque Renaissance décorée de pierres trouées. Ce décor aurait été introduit en France par Serlio en 1551 et demeure assez rare, notamment en Alsace. Or le château de Thanvillé est reconstruit en 1572 ce qui correspond assez clairement à la période d’utilisation de ce type d’ornementation. De surcroît, les chaînages d’angle sont de véritables pierres de taille maçonnées dans la tourelle et non des placages rajoutés. Tout ceci confirmerait le fait que les tourelles et donc l’utilisation du plan bastionné pour le corps de logis daterait de 1572. Au dessus de quelques ouvertures se trouvent des arcs de décharge composés de briques appuyées sur des planches de bois (voir tableau «STRUCTURE», ANNEXES 6). Leur mise en oeuvre peu soignée indique que les encadrements sont des remplois. On retrouve le même type de brique sur des fragments de mur où il a été question de réparations et de «raccommodage». D’autres briques sont laissées volontairement visibles au niveau de la corniche. Ces dernières ont été rajoutées lors du remplacement de la toiture par Bertrand-Maurice de Castex en 1884.

Maison Millepertuis, Fontenay-le-comte, vers 1570

http://lynette.over-blog.com/article-16156143.html

Bossage troué, Thanvillé Photo pers.

54

Michel Figeac, Châteaux et vie quotidienne de la noblesse, p.107

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5. Les fortifications

a. Historique Concernant les édifices maçonnés, le flanquement réapparaît de manière significative dans le deuxième tiers du XIIe siècle avec des tours souvent rectangulaires puis rondes55. L’origine du flanquement systématique se situe au niveau des enceintes gallo-romaines après le IIIe siècle de notre ère.

Château de Dourdan, flanquements cylindriques introduits par Philippe Aguste en 1200 Châteaux et enceintes de la France médiévale, tome 1

La régularisation des plans des édifices par la réapparition de plans rectangulaires marque également la fin du XIIe siècle, on parle alors de fortification gothique ou philippienne. Le concept géométrique s’impose ainsi, dépassant les « simples tendances à la régularisation et au flanquement56 ». L’archétype rectangulaire philippien se présente alors comme une enceinte rectangulaire flanquée de tours circulaires aux angles et parfois au milieu des courtines avec une porte ménagée entre deux tours au milieu d’une courtine et enfin d’une tour maîtresse fréquemment placée à l’angle de deux courtines. Le modèle de tour circulaire à archères s’imposa partout sur le territoire royal et même au-delà par l’application systématique des canons philippiens. Le schéma rectangulaire à tours flanquantes circulaires s’impose donc partout sur le territoire royal par l’application systématique des canons philippiens. Qu’en est-il de l’architecture castrale en Alsace, appartenant au Saint-Empire-Romain-Germanique à cette époque ? Les nouveaux concepts ne se diffusent pas de façon homogène : la Provence, le Jura ou encore l’Alsace seraient quasiment dépourvus de ce type de fortifications selon Jean Mesqui57. Cela s’expliquerait par le fait que ces terres étaient sous domination du Saint-EmpireRomain-Germanique et qu’il n’existait pas de forteresses flanquées à plans géométriques au delà du Rhin. Pourtant, selon l’étude de Gérard Giuliato sur les châteaux et maisons fortes de Lorraine, le plan quadrangulaire avec tours de flanquement apparaissent dès le XIIIe siècle dans cette région et se multiplient considérablement à la fin du Moyen-âge. Il en est de même pour l’Alsace, d’après Nicolas Mengus, auteur de l’article « Les châteaux aux XVe et XVIe siècles : une mutation à coups de canon ! »58. Le bastion, quant à lui, fait son apparition en France en 1530.

Château de Dourdan, plan rectangulaire Châteaux et enceintes de la France médiévale, tome 1, p.42

55 56 57 58

Jean Mesqui, Châteaux et enceintes de la France médiévale, tome 1, p.36 Ibidem, p.42 Ibidem, p.71 In Annuaire des châteaux et villes fortifiées d’Alsace, 2007

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b. Relevé, observations et comparaisons

Ce type de tour se retrouve dans de nombreux châteaux de plaine de la région mais aussi au niveau des remparts urbains. Ceux de Saint-Hippolyte et d’Altkirch possèdent encore une tour ronde de flanquement datant du XIIIe siècle alors que les remparts d’Ammerschwihr sont flanqués de la Tour des Voleurs en 1535. Le château d’Osthouse comporte deux tours rondes datées de 1436, il en va de même pour celui d’Osthoffen doté de flanquements circulaires du XVe siècle. Les châteaux de Diedendorf et de Wangenbourg sont quant à eux flanqués de tours circulaires du XVIe siècle. Les exemples rencontrés permettent de constater que la construction de tours de flanquement circulaires se situe entre le XIIe et le XVIe siècle empêchant toutefois toute conclusion de datation sur le seul fait de leur présence.

Tour des cigognes, St-Hippolyte, Bastion de la monnaie, Altkirch, XIIIe s. XIIIe s. Photo pers.

Château d’Osthouse, 1436

http://Promenades-en-Alsace.html

Google street view

Château d’Osthoffen, XVe s.

http://www.chateau-dosthoffen.com

Château de Wagenbourg, XVIe s. Crédit photo. Bernard Karcher

Château de Diedendorf, 1577

http://villages. ab.pagesperso-orange.fr/ canton-su/diedendorf/diedchato.htm

Pour approfondir l’analyse, on observe qu’à Thanvillé la base des murs des tours de flanquement ne sont épaisses que de 0.60 mètre alors qu’en Lorraine, elle varie de 1 à 2 mètres. De plus, la maçonnerie des murs d’escarpe se compose à leur base de fragments de jambages de fenêtres et celle des tours apparaît bien frêle. En effet, cette dernière est constituée de moellons de petite taille maçonnés entre eux avec une grande quantité de mortier. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la taille réduite des moellons n’est pas forcément signe de fragilité. Jean-Jacques Schwien émet l’hypothèse qu’un mur composé de briques résisterait mieux aux projectiles qu’un mur maçonné de pierres de grandes taille. L’onde de choc ne se transmettrait pas aussi loin dans le rempart et par conséquent, ne fragiliserait pas autant ce dernier. La faible épaisseur des murs des tours ne signifie pas non plus qu’elles aient été construites tardivement59. Bien que certains châteaux forts médiévaux soient pourvus de murs de 4 mètres d’épaisseur (Haut-Koenigsbourg,...), on retrouve des murs de remparts dont l’épaisseur est inférieure à 1 mètre (Dachstein, Molsheim. C’est également le cas du château de Verges en Franche-Comté, construit vers 1550, où l’épaisseur des fortifications entourant la propriété avoisine les 0,70 mètre. De plus, le rez-de-chaussée de tours rondes est couvert d’un plafond voûté indiquant un état ancien60. On peut également voir que les linteaux des portes d’entrée des tours (701.12/ 801.11) sont taillés de manière courbe afin d’encastrer parfaitement les encadrements. Les portes, présentant des moulures en quart de rond avec la présence de marques de pointerolle et de marteau taillant, ont un aspect similaire aux bouches-à-feu du XVIe siècle. Ces portes et par conséquent les tours de flanquement pourraient dater de cette époque. 59 60

“tardivement” signifie ici le XVIIe siècle D’après Olivier Badermann lors de notre visite sur place.

33


6. Relevé des marques lapidaires Une marque lapidaire ou marque de tâcheron est un signe géométrique (voire une lettre ou un monogramme) gravé dans la pierre de taille par un tailleur de pierre. Les marques lapidaires visibles sur chaque marche de l’escalier en colimaçon menant à la chapelle ont pu être relevées et analysées par Claude Oberlin, glyptographe. Il a en effet relevé plus de 7000 marques à travers l’Europe et possède un répertoire conséquent. Bien que « grossièrement » taillées, les marques de l’escalier peuvent être définies comme appartenant à quatre tailleurs différents. Après comparaison, les mêmes marques se retrouvent au château de Diedendorf près de Sarre-Union. Ce dernier a été construit en 1577, époque de la Renaissance Alsacienne tardive. Grâce à cette comparaison, on peut confirmer que l’escalier en colimaçon ainsi que la tourelle de la chapelle du château de Thanvillé ont été édifiés aux environs de 1575. Cette date coïncide avec la reconstruction du château en 1572 et la conservation quasi-intacte de cette partie des bâtiments suite au pillage de 1633. Château de Diedendorf,

Crédit photo. Thierry Dichtenmuller

Relevés des marques lapidaires par Claude Oberlin, château de Diedendorf Dessiné par Claude Oberlin

Relevé des marques lapidaires de la tourelle d’escalier par Claude Oberlin, château de Thanvillé Dessiné par Claude Oberlin

34


Plan du château de Thanvillé en 1883 ASHVV 2004, p.161

Tour des communs,Thanvillé Photo pers.

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7. Réponse aux points ou zones critiques La classification par type des ouvertures et des éléments architectoniques a permis de déterminer des datations plus fines de ces dernier(e)s et par conséquent du château. Des réponses ont également pu être apportées aux points critiques définis plus haut grâce au recoupement des tableaux. -

Les murs d’escarpe (1) : les murs dont les parties sont décrépies montrent des moellons de petite taille incapables de résister à une attaque. La présence de jambages de fenêtres compris dans la maçonnerie à la base des murs témoigne également des transformations opérées sur cette partie de l’édifice. Par les écrits et par l’état actuel des murs, on peut uniquement dire que ces derniers ne sont pas postérieurs à 1663.

-

Les tours d’angle (2) : aucune fouille archéologique n’a été effectuée sur le site afin de mettre à jour des possibles fondations antérieures au XVIe siècle. Tout comme pour le mur d’escarpe, les moellons observés sont de petite taille mais ne permettent pas de donner une époque précise. La présence de canonnières et de couleuvrinières permet d’avancer que les tours dateraient de 1572, voire seraient antérieures à cette date.

-

La tour-porche et la tourelle de la chapelle (3) : les relevés de marques lapidaires confirment la construction de ces parties du château en 1572.

-

Les arches du passage de la tour porche (4) : les outils utilisés et la forme générale des ouvertures démontrent que ces portes à arc en plein-cintre datent de 1572. Une date devrait se trouver au dessus de la clé d’arc, mais son emplacement est dissimulé derrière un décor en ciment de 1884.

-

Les bouches à feu/ canonnières / archères (5) : les bouches à feu et les canonnières seraient de la même époque que les fenêtres à moulures en quart de rond, c’est à dire de 1572. Malgré leur époque de conception, leur rôle était surtout dissuasif.

-

Les fenêtres à moulure en quart de rond (6) : les traces d’outils et le décor de ces fenêtres concordent avec l’époque de reconstruction du château en 1572 et pourraient même dater de 1540.

-

La travée centrale de la façade ouest (7) : les fenêtres ont été remaniées en conservant les linteaux et les jambages existants de 1572 tout en agrandissant ces derniers. Les linteaux possèdent encore la marque du meneau déplacé. 36


-

La fenêtre à meneau supplémentaire dans la façade ouest (8) : la présence de mortier entre le jambage et le linteau confirme que la fenêtre n’est pas à son emplacement originel, elle a été ajoutée lors des travaux de 1884.

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Les fenêtres hétérogènes (9) : ces fenêtres sont composées d’éléments anciens dont de nombreux fragments décorés d’une moulure en quart de rond, datés de 1572.

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La date sur linteau de porte de 1591, au niveau des communs (10) : le style de la porte est totalement différent des ouvertures originelles du château et la date 1591 n’aurait pas été écrite dans une typographie gothique à cette époque. Quoiqu’il en soit, cette porte est un élément rapporté.

-

Le chaînage d’angle et le soubassement (11) : les chaînages d’angle à bossage troué dateraient de 1572 grâce à la similitude observée avec la maison Millepertuis. Le soubassement est quant à lui composé de deux parties: celle inférieure pourrait dater de 1572 ou de 1663 mais la partie supérieure daterait quant à elle de 1772.

Le château de Thanvillé est ainsi un complexe castral construit dans son ensemble, non pas au XVIIe siècle comme le soulignent les écrits, mais au XVIe siècle.

8. Synthèse des étapes de construction complétée par la méthode d’archéologie du bâti La méthode d’archéologie du bâti et l’étude générale des éléments castraux ont permis d’établir cette seconde synthèse des étapes de construction du château en complément de celle basée sur les sources écrites. Des doutes ont pu être levés sur l’origine de certaines parties de l’édifice et des datations plus précises ont pu être apportées. (Voir page 39) Aussi, dès la Renaissance, les châteaux sont construits comme une forme symbolique. Selon Pierre Schmitt, les « résidences alsaciennes du XIVe siècle seraient déjà, non plus de vrais châteaux, mais quelque chose comme des symboles de château61». L’archaïsme des éléments utilisés dans les constructions a pour but d’affirmer le bâtiment comme une forteresse au moment où la fonction militaire s’efface progressivement. Pour Hervé Mouillebouche, l’architecture des maisons fortes en Bourgogne est archaïsante et ostentatoire62. Le château de Thanvillé possède lui aussi de nombreux éléments archaïsants rendant pro61 p.340

Jean Mesqui, Châteaux et guerriers de l’Alsace médiévale, Le château fort : mythes et réalités,

62 Hervé Mouillebouche, Les maisons fortes en Bourgogne, p.240

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blématique la datation des édifices. Comme il a été cité plus haut, « la reconstruction du château [en 1572] ressemble à une mise en scène « imaginée par son maître d’œuvre dont on connaît le métier [mercenaire] ». Cette hypothèse semble se vérifier, car les éléments de défense visibles sur les bâtiments, quoique d’époque, ne sont pas en nombre suffisant et leur position ne couvre pas efficacement tous les abords du château. Finalement, on a affaire davantage à un palais qu’à une forteresse, où le côté résidentiel prend plus d’importance que l’aspect défensif, même aux XVe et XVIe siècles. Quoi qu’il en soit, l’observation du tracé des bâtiments associée aux études complémentaires des éléments de ces derniers (partie II du mémoire) permettent de certifier que le château présente une architecture ordonnée de la Renaissance française. A la fin du XVIe siècle, les architectes recherchent en effet une plus grande symétrie et une certaine régularité63. Contrairement aux châteaux de montagne médiévaux s’accomodant du terrain souvent accidenté sur lequel ils sont construits, le plan centré de l’ensemble castral de Thanvillé démontre la volonté de créer un programme spatial d’ensemble, où le site s’adapte à l’architecture comme c’est le cas, par exemple, pour les châteaux de la Loire édifiés à la même époque. En Alsace, les châteaux de plaine encore présents ressemblent plus à des «fermes fortifiées» gérant un domaine agricole. Les tours de flanquement rondes ou carrées accolées au bâtiment principal, visibles aux châteaux de Diedendorf ou de Breuschwickersheim, ne reflètent pas une composition selon un plan régulier. Ainsi, pour Jean-Jacques Schwien, le château de Thanvillé serait peut être l’illustration d’une «première influence de l’époque française en Alsace». Il serait très intéressant d’exploiter ultérieurement cette idée et d’effectuer de plus amples recherches à ce sujet.

63

Michel Figeac, Châteaux et vie quotidienne de la noblesse, p.90

38


1870 + 1884

39


CONCLUSION Le château de Thanvillé, maintes fois transformé au fil des siècles, revêt un aspect homogène d’une grande élégance. Pourtant, il se compose d’éléments architecturaux d’époques différentes, assurément non repérables au premier coup d’œil. Il est clair que les fenêtres dites « à la française » du corps de logis n’apparaissent pas comme des ouvertures médiévales, leur taille et leur linteau surbaissé placent formellement leur origine au XVIIIe siècle. Il en va de même pour quelques larges ouvertures et certaines portes cochères des communs dont les linteaux possèdent des caractéristiques identiques. Mais une partie importante du château emploie quant à elle un langage du Moyen-âge et de la Renaissance, donnant cette image de « forteresse de plaisance ». Les indispensables articles de la Société d’Histoire du Val de Villé ainsi que l’ouvrage de Bertrand-Maurice de Castex m’ont alors permis de connaître avec plus de précision les étapes de construction du château et l’histoire des propriétaires l’ayant possédé. On a d’abord remarqué l’origine géographique diversifiée des familles depuis la construction du château au XIe siècle, alternant entre le Saint-Empire-Romain-Germanique, le royaume de France et le Duché de Lorraine. Il est cependant difficile de réellement conclure que l’appartenance à tel ou tel territoire eut une influence sur l’architecture du château car les courants architecturaux sont également une « mode », une tendance temporaire évoluant selon de nombreux paramètres. De tout temps, les propriétaires sont libres de faire construire leur bâtiment en fonction de leurs goûts tout en s’adaptant aux techniques nouvelles. La canonnière à redans ou l’archère arbalétrière ont beau être obsolètes au XVIIe siècle, elles jouent parfaitement leurs rôles de dissuasion et de prestige recherchés par leur maître d’ouvrage, que ce soit en Alsace ou en Lorraine. Ainsi, le château de Thanvillé est un château de plaine possédant des caractéristiques identiques à ceux rencontrés dans la région, du moins dans l’organisation générale (plan géométrique, fossés secs ou remplis d’eau, …) et dans son aspect extérieur (emploi du grès, tours rondes avec toiture en poivrière, …), il serait toutefois possible d’y observer les emprunts d’un langage architectural lorrain notamment dans l’organisation interne des bâtiments. Une étude complémentaire pourrait alors être menée sur le sujet afin de conclure si oui ou non, il y a une empreinte architecturale de cette région limitrophe en plus de l’influence française. De l’étude des écrits historiques et par les incertitudes ou contradictions en découlant, une série de points critiques ont été identifiés puis en grande partie résolus par la méthode d’archéologie du bâti. Cette dernière a donc été fructueuse puisqu’elle a permis d’étoffer certains propos des historiens repérés dans la première partie du mémoire. L’observation puis « l’extraction » des éléments architecturaux pour leur classification ont donné des résultats probants par le recoupement des tableaux mais également par l’avis de professionnels. L’analyse des traces d’outils sur la pierre est très délicate pour un non-initié même

en possession de l’ouvrage de Claude Bessac, L’outillage traditionnel du tailleur de pierre. Ainsi, la faculté de discerner les marques d’outils par les spécialistes a été d’une remarquable aide afin d’estimer la mise en œuvre des ouvertures. Pareillement, la participation de Claude Oberlin, glyptographe, a permis d’apporter une datation précise et extrêmement précieuse des marques lapidaires. Néanmoins, il aurait été nécessaire d’aller plus loin dans l’utilisation de cette méthode, cependant tous les éléments requis concernant cette dernière n’ont pu être réunis pour aller au bout de la démarche. Le crépi étant encore présent sur une grande partie des murs, il était difficile d’émettre des conclusions sur l’ensemble du château. La lecture des murs prend en effet une place importante dans l’archéologie du bâti. L’analyse globale de la maçonnerie est une clé supplémentaire pour comprendre la chronologie d’un édifice, les différences d’appareil par exemple sont un très bon indicateur des changements et modifications opérés sur les bâtiments. L’étude peut par ailleurs se porter sur l’analyse des mortiers, la composition des briques ou encore l’usage de la dendrochronologie permettant des datations extrêmement précises de pièces de bois. La discipline d’archéologie « classique » pourrait alors compléter la démarche précédente afin de mettre à jour des vestiges anciens tels que des fondations ou des morceaux de fenêtres. Les archives de la famille de Castex mentionnent effectivement la présence de « débris calcinés » enfouis sous la terre dans la cour du château, datant probablement de 1572. Cet ensemble de techniques archéologiques permettrait alors de retracer avec plus d’exactitude les étapes chronologiques de construction du château. La difficulté de la méthode réside véritablement dans son approche pluridisciplinaire. Il m’a été obligé de contacter plusieurs personnes ayant des connaissances spécifiques sur tel ou tel aspect du château. Ces compétences « éparpillées » demandent de retourner de nombreuses fois sur place mais aussi de se documenter sur des périodes et des domaines scientifiques variés. En effet, il était problématique de trouver des ouvrages traitant précisément des sujets étudiés, particulièrement ceux analysant les remaniements des châteaux pendant la Renaissance en Alsace. Dans cette région ont surtout été étudiés en détail les châteaux de montagne qui ponctuent le massif Vosgien. La méthode d’archéologie du bâti nécessiterait d’y consacrer tout son temps, objectif difficile à atteindre pour un étudiant qui doit gérer conjointement plusieurs projets. Malgré tout, cette approche singulière m’a réellement enthousiasmé car elle m’a permis de découvrir d’autres moyens de « faire de l’histoire ». J’ai justement trouvé très enrichissant la manière de « lire » le passé d’un édifice par l’observation et l’analyse poussée des éléments qui le composent.

40


Finalement, j’ai pu (re)découvrir ce château, important à mes yeux, au fil de ce mémoire. Je ne soupçonnais pas la mise en scène architecturale voulue par les différents propriétaires ; les moyens de défense mis en œuvre encore visibles aujourd’hui donnent toujours l’impression d’une sentinelle veillant l’entrée du Val-de-Villé. L’analyse du château de Thanvillé pourrait ainsi s’effectuer de manière approfondie grâce à la méthode d’archéologie mais il serait également passionnant de replacer ce dernier dans une étude plus large sur les châteaux de plaine en Alsace et dans le bassin Rhénan, globalement peu analysés, afin de caractériser les édifices de ce type dans la région.

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SOURCES Archives Départementales du Bas-Rhin C183(7) : Limites des finages de Thanvillé Série 42J : Fonds de Castex 42J25 : Description du château de Thanvillé et de la seigneurie en vue de leur vente éventuelle (1808) 42J : Forêt seigneuriale de Thanvillé 27

42J55 : Notes pour servir à l’histoire de Thanvillé

Sources imprimées 8E490/8 : Recensement des portes et fenêtres de la commune de Thanvillé (14/03/1820)

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ASHVV : Annuaire de la Société d’Histoire du Val de Villé

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ANNEXES 1

La famille de Castex

NOTICES BIOGRAPHIQUES

La famille de Dartein

Bertrand-Pierre Castex est né en 1771 dans le Gers66 de parents boulangers. Il entra au service de la compagnie franche du département du Gers en 1792 en tant que maréchal des logis et obtint dès 1806 le rang de colonel sur le champ de bataille d’Iéna par Napoléon Ier. Nommé général de division en 1814, il fut élevé au rang de vicomte en 1817. De 1824 à 1827, le général de Castex siégea à la Chambre des Députés comme représentant du BasRhin. Il fut également commandant de la 5e division militaire à Strasbourg de 1826 à 1830, année de la Révolution de Juillet. Pendant les absences de Bertrand-Pierre dues aux différentes campagnes guerrières, c’est Adélaïde qui élève seule leurs dix enfants et gère le domaine une fois les partages effectués. En 1830, son frère Félix vient lui prêter main forte après avoir abandonné son poste de sous-préfet à Sarrebourg mais le bâtiment se trouve dans un état vétuste et attend toujours d’être restauré. C’est à cette époque que Bertrand-Pierre perdit son commandement et se retira à Thanvillé pour se consacrer à l’agriculture, à l’élevage des chevaux ainsi qu’à la rénovation du château. En sa qualité de retraité de l’armée, Bertrand-Pierre de Castex fit aménager une nouvelle voie en 1867 permettant de relier le Val de Villé à Barr. En 1843, c’est l’ancienne Route du Sel entre Thanvillé et Scherwiller qui est doublée et permet à Thanvillé de devenir un véritable carrefour entre la plaine et les Vosges.

Jean de Dartein né dans le Périgord en 1719, prit la direction de la fonderie royale de Toulon en succession de son oncle. Il fut ensuite nommé commissaire général des fontes de l’artillerie de Strasbourg en 1760, reprise par son fils Jean-Félix. Le 17 juin 1786, ce chevalier de l’ordre du roi acheta au baron de Lort « la terre, seigneurie et baronnie patrimoniale de Tanviller en totalité »64. Jean-Félix passait la majorité de son temps à Strasbourg en raison des responsabilités qui lui incombaient à la fonderie. C’est alors son frère aîné Charles, préteur royal65 à Sélestat, qui dirigea toutes les affaires de la seigneurie. Le château était alors habité la majorité du temps par Anne de Colmont, mère de Charles et Jean-Félix. Elle mourut en 1788, Jean-Félix l’année suivante. Charles désira conserver Tanviller mais dut d’abord « racheter l’usufruit viager laissé à la veuve de Jean-Félix de Dartein, puis désintéresser son plus jeune frère, Jean-Hermine ». Il dut également s’engager à payer les livres toujours dues au baron de Lort en 1791. Ainsi, Charles de Dartein devint le dernier seigneur de Thanvillé. Pour échapper à la tourmente révolutionnaire, il n’eut d’autre choix que de reprendre la direction de la fonderie de Strasbourg en 1790 qu’il quitta en 1805. Outre Thanvillé, Charles de Dartein possédait également un hôtel à Strasbourg et le château de Kolbsheim où il préférait habiter lors de la belle saison. Le château de Thanvillé n’était alors occupé que quelques jours pendant l’année et fermé le reste du temps, ce qui causa des dégradations importantes des bâtiments. Uniquement les travaux les plus urgents furent entrepris. En 1814, Charles mourut et laissa le domaine à ses trois enfants dont le partage n’eut lieu qu’en 1827. Thanvillé revint à l’aînée, Adélaïde, qui avait épousé le baron Bertrand-Pierre de Castex en 1810 et dont ce dernier s’occupa de la propriété dès 1815.

64 65

Histoire de la seigneurie Lorraine de Tanviller-en-Alsace, p.128

officier chargé de la surveillance des organes exécutifs municipaux et disposant du droit de promulguer seul des règlements de police

1. Bertrand-Pierre

2. Théodore Contrairement à ses aïeuls, Théodore de Castex n’est pas attiré par l’armée mais se consacre pleinement à l’agriculture. Grâce au rachat du château après la mort de sa mère Adélaïde en 1856, son domaine s’étend sur plus de 200 hectares répartis sur cinq communes et comprend notamment les dépendances du château, un moulin ou encore des bois et pâturages. Il continue les améliorations entreprises par son père sur le château et sur les terres, il est intéressé par l’agronomie et publie même un ouvrage en 1866 intitulé Examen de quelques questions relatives à l’Enquête sur l’état de l’agriculture. A la fois maire de Thanvillé et conseiller général du canton de Villé, Théodore de Castex est également nommé chambellan de Napoléon III. En août 1870, plus de 200 dragons allemands viennent en reconnaissance dans le Val de Villé et campent sur les prés du château. Après avoir été mis en déroute par les gardes mobiles de Sélestat, les badois reviennent en force et mettent à sac le château. Théodore doit s’enfuir, il est condamné à mort par contumace mais est gracié et autorisé à revenir en Alsace. 66 Indication trouvée sur le site “Les amis du patrimoine Napoléonien”: http://lesapn.forumactif.fr/ t5639-castex-de-bertrand-pierre-general-de-division-depute?highlight=castex

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Il essaie alors de vendre le domaine dorénavant situé dans le Reichsland Elsass-Lothringen. La vente est annoncée dans une publication lors de l’exposition universelle de Vienne en 1873. Une congrégation de religieuses suisses voulant installer une école d’agriculture est prête à acheter le château mais cette transaction n’a finalement pas lieu. Théodore finit sa vie à Paris où il meut le 3 août 1898. 3. Bertrand-Maurice Né le 15 Juin 1853 à Molsheim, Bertrand-Maurice est le fils de Théodore de Castex et de sa première épouse. En 1880, il épouse Alice Pothier dont la fortune permet à notre homme de racheter le domaine de Thanvillé à son père en 1896. Il démissionne de l’armée en 1898 afin de revenir à Thanvillé mais les autorités allemandes lui interdisent de se rendre à Strasbourg et Colmar. Il se retrouve donc sous résidence surveillée au château où il est projeté d’installer le téléphone public en 1900. Bertrand-Maurice est Membre de la Société des artistes français, il peint des aquarelles et eaux fortes dont certaines sont utilisées pour illustrer son ouvrage « Histoire de la Seigneurie lorraine de Tanwiller (1886) ». Au moment de la Grande Guerre, le propriétaire craint pour le château au vu des antécédents de 1870. Lors de la bataille du 18 août 1914, son assureur de Sélestat propose aux militaires d’installer un « Feldlazarett » dans le château, c’est-à-dire un hôpital de campagne. Cette décision permet aux bâtiments d’être sauvegardés. En 1919, Bertrand-Maurice accueille Le Président de la République dans le salon d’honneur du château. Il meurt en 1931. 4. Pierre, Gérard et Maurice Pierre de Castex est né en 1884, il se fait élire conseiller général du canton de Villé en 1919 mais meurt prématurément en 1924 en raison des séquelles de la guerre. La famille Castex s’installe alors à Paris et ne revient à Thanvillé qu’en été. Gérard, le fils de Pierre, est né en 1911. Il est grièvement blessé dans la Sarre pendant la seconde guerre mondiale. Devenu propriétaire du château après la mort de ses parents, il le restaure et le remeuble. En effet, le bâtiment à de nouveau pillé pendant la guerre, même l’argenterie murée dans la cave a disparu. A sa mort en 1979, son frère Maurice tente d’éviter de vendre le château mais en vain, il s’en sépare en 1981. 46


ANNEXES 2 502 503

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104.31

101.35

132.3 132.3

132.3 132.3

133.1

132.3

101.13 101.13 101.12 101.12 101.14 101.14 101.22 101.22 101.23101.23 101.24101.24

124.3

124.3

124.22

124.22

123.2 123.2 123.1 123.1

124.3 124.3

124.1

121.3

121.2

121.2

124.1

122.3

122.3

122.2

122.2

104.31 104.32

104.21 122.3 122.3

121.3 121.3

124.21 124.21 124.22124.22

101.15 101.15 101.25 101.25

121.3

104.21

104.31104.31

104.33 104.32

122.2 122.2 122.1 122.1

104.34

104.23 104.23104.24 104.24 104.33104.33 104.34104.34 104.32104.32 104.22 104.22

104.11 104.11 104.21104.21 121.1 121.1 121.2 121.2

104.33 104.34

104.24104.24 104.23104.23 104.13 104.13 104.12

104.12

104.35

104.35

104.25 104.25 104.35104.35

104.25104.25

153.3

153.3

153.2

153.2

153.3 153.3

153.2 153.1 153.2 153.1

154.3

154.3

154.2

154.2

154.3 154.3

154.1 154.1 154.2 154.2

104.22104.22 133.21133.21

101.11101.11

FACADE EST

101.12101.12

101.13101.13

101.14101.14

151.3

151.3

152.3

152.3

151.2

151.2

152.2

152.2

123.1 123.1

103.31

103.22

151.3 151.3

152.3 152.3

151.2 151.2 151.1 151.1

152.2 152.2 152.1 152.1

151.1 151.1

152.1 152.1

103.21

CORPS DE LOGIS

103.32

103.22

103.21 103.31103.31 103.32103.32

103.11 103.22 103.12 103.11 103.22

103.12

103.21103.21

103.11103.11

FACADE OUEST

103.32 103.31

103.12103.12

103.33

103.23

103.34

103.33

103.23

103.33103.33

103.13 103.13 103.23103.23

103.13103.13

103.24

103.25 103.24

103.34

104.11104.11

124.21124.21

101.15101.15

132.1 132.1

133.1 133.1

121.1 121.1

FACADE SUD

124.1 124.1

122.1 122.1

102.31 143.3

143.3

143.2

143.2

144.3

144.3

141.3

141.3

142.3

142.3

144.2

144.2

141.2

141.2

142.2

142.2

103.25

103.34103.34

104.12104.12

143.3 143.3

102.21 144.3 144.3

141.3 141.3

142.3 142.3

144.1 144.1 144.2 144.2

141.2 141.2 141.1 141.1

142.2 142.2 142.1 142.1

144.1 144.1

141.1 141.1

142.1 142.1

103.14 103.15 103.14 103.15 103.24103.24 103.25103.25 143.2 143.2 143.1 143.1

103.14103.14 103.15103.15 143.1 143.1

102.31

102.21

102.31102.31

102.32

102.22

102.33 102.32

102.23 102.22

104.13104.13

102.34 102.33

102.24 102.23

102.34

102.24

102.32102.32 102.33102.33102.34102.34

153.1 153.1

102.35

102.25

154.1 154.1

102.35 133.3

133.3

134.3

134.3

133.2

133.2

134.2

134.2

102.25

102.35102.35

102.11 102.11 102.21102.21

102.12 102.12 102.13 102.13 102.14 102.14 102.22102.22 102.23102.23102.24102.24

102.15 102.15 102.25102.25

102.11102.11

102.12102.12 102.13102.13102.14102.14

102.15102.15

133.3 133.3

134.3 134.3

133.1 133.1 133.2 133.2

134.2 134.2 134.1 134.1

133.1 133.1

134.1 134.1

FACADE SUD

48


M307

TB10

TB7

TB8

TA7 TA5

TB9 M304

M305

TA3 TB4

TB5

TA4

TB6

M402

M201

M302

M404 M401

M403

M405

M406

M202

M204

M407

TB2 TB1

TA6

M306

M206

M205

M207

M209

M210

M203 M301

TA1

M208

M303

TA2

TB3

AILE EST, FACADE EST

801.41

208.4

206.31 402.3

208.3

801.31

402.2 201.11

402.1

204.12

204.13

204.15

801.21

205.21

205.11 205.12

302.21

206.21 208.11

206.11 801.11

207.11 207.12

208.12

208.22

208.13

302.11

302.12

AILE EST, FACADE OUEST

COMMUNS

49


601.34 403.31

403.32

403.33

403.34

403.35

403.36

403.37

403.21 601.24

403.23

403.22

403.24

403.25

403.26

403.15

403.13

403.11

502.11

502.12

502.13

403.12

601.14

403.14

AILE NORD, FACADE NORD

401.213 401.211

401.212

401.111

401.112

401.113

401.214 401.114

401.115

401.116

401.215 401.118

401.117

401.119

401.216 401.120 401.121

401.217 401.122

401.218 401.124

401.125

401.123

AILE NORD, FACADE SUD

50


701.35

701.34

301.318 301.311 301.211

301.312

301.313

301.314

301.315 301.316

301.212

301.213

301.214

301.319

301.317

301.321

301.320

301.215

301.323

301.322

301.217

301.218 701.25

301.112

301.113

301.114

701.24

301.216

301.115

301.118

301.111

301.116

301.117

301.119

301.120

701.14

AILE SUD, FACADE SUD

303.21

303.22

303.23

303.115

303.117

303.25

303.24

303.26

303.27

303.122

303.123

303.116 303.111

303.112

303.113

303.114

303.118

303.119

303.120

303.121

303.124

AILE SUD, FACADE NORD

51


FENÊTRE

ANNEXES 3

SIMPLE PORTE COCHERE

PORTE PIETONNE

1 COMPARTIMENT LINTEAU DROIT

201.14 / 401.117/ 206.11/ 202.12/ 303.120

204.11-13/ 208.11-13

701.12/ 601.11/ 801.11

123.1/ 123.3/ 132.1/ 132.3/ 133.1/ 133.3/ 142.1/ 142.3/ 143.1/ 143.3/ 152.1/ 152.3

102.13

401.111/ 401.112/ 401.115/ 401.116/ 401.118/ 401.119/ 401.211/ 401.212

104.13

301.112-115

101.13/ 104.11/ 153.1/ 103.15/ 401.113/ 401.121/ 401.123/ 401.125/ 301.111/ 301.118/ 303.111/ 303.116/ 303.118/303.122/ 201.12/ 201.16/ 203.113/ 203.118

MENEAU/CROISILLON

LINTEAU CINTRE

LINTEAU ET CLE D’ARCADE

2 COMPARTIMENTS

303.115/ 303.117

122.2/ 123.2/ 132.2/ 133.2/ 142.2/ 143.2/ 152.2/ 153.2

401.214-218/ 205.21

102.11/ 102.12/ 102.14/ 102.15/ 102.21-25/ 102.3135/ 104.24/ 101.11/ 101.12/ 101.14/ 101.15/ 101.21-25/ 101.31-35

302. 21/ 302.31

52


FENETRE 3 COMPARTIMENTS

301.216/ 302.22

4 COMPARTIMENTS

6 COMPARTIMENTS

104.32 103.11/ 103.22/ 103.25/ 134.2/ 141.2

FENETRE DE TIR BOUCHE A FEU

ARCHERE CANONNIERE

701.13/ 701.14/ 701.21/ 701.23/ 701.25/ 701.31/ 701.33/ 701.35/ 202.11/ 202.13/ 601.12/

601.21/ 601.23/ 601.31/ 601.33/ 701.22/ 701.32/ 701.24/ 701.34

104.12 121.3/ 124.3/ 131.3/ 134.3/ 141.3/ 144.3/ 151.3/ 154.4

104.22

53


ANNEXES 4

OUTILS

POINTEROLLE

PERIODE EXEMPLES D’UTILISATION De tous temps

BROCHE

De tous temps

CISEAU plat

De tous temps

CISEAU brettelé

Fin 19e

54


OUTILS

CHARRUE

TAILLANT rustique

PERIODE EXEMPLES D’UTILISATION A partir du 19e siècle

Depuis M-A jusqu’au 18e

55


ANNEXES 5 REPÉRAGE DES MARQUES D’OUTILS SUR LES ÉLÉVATIONS

FAÇADE EST

FAÇADE NORD

FAÇADE OUEST

FAÇADE SUD

56


AILE EST, FAÇADE EST

AILE EST, FAÇADE OUEST

57


AILE NORD, FAÇADE SUD

AILE NORD, FAÇADE NORD

58


AILE SUD, FAÇADE SUD

AILE SUD, FAÇADE NORD

59


ANNEXES 6

STRUCTURE ARC DE DÉCHARGE : BRIQUE (+ BOIS)

MUR BRIQUE

MOELLON

ENDUIT

sous la corniche du corps de logis 104.22 / 104.25/ 104.32/ 104.34/ 104.35/ 201.15/ 203.111/ 203.112/ 203.114/ 203.115/ 203.117/ 303.111/ 303.112/ 303.113/ 303.114/ 303.115/ 303.116/ 303.117 DECOR CHAINAGE ET SOUBASSEMENT

FRISE LOMBARDE

GRES

BOIS

CIMENT

BRIQUE

ENCADREMENT D’OUVERTURE CIMENT

Corniche des communs Corniche du corps de logis 60


ANNEXES 7

DÉCOR FENÊTRES ARÊTES VIVES

CAVET

303.25/ 303.27/ 201.11-13-15-17/ 302.11-12-31 203.111-114-116117-119-120123/ 403.23 à 26/ 403.12-13

MOULURE ET CONGÉ EN QUART DE ROND

LINTEAU DROIT + FEUIL- LINTEAU DROIT + LURE (ENCADREMENT MOULURE BÛCHÉE RÉGULIER)

122.1-2-3/ 123.1-2-3/ 124.2/ 131.2/ 132.1-2-3/ 133.1-2-3/ 142.1-2-3/ 143.1-2-3/ 152.1-23/ 153.1-2-3/ 206.21/ 103.11-12-13-14-15/ 103.21-22-23-24-25/ 103.31-32-33-34/ 104.1213/ 104.21-22/ 104.32/ 401.111-112-113-114120-121-122-123-124125/ 401.211-212-213/ 205.11-12/ 801.1121-31-41/ 206.21-31/ 207.11-12/ 301.116117-118-119-120/ 301.211-212-213-214215-217-218/ 303.119121-124-21-22-23-24/ 302.3/ 402.3/ 202.21/ 202.23/ 701.12/ 701.41/ 203.12/ 601.11/ 601.13/ 601.22/ 601.41

104.23/ 104.25/ 104.3133-34-35

303.21-22-23

LINTEAU DROIT + FEUILLURE (ENCADREMENT IRRÉGULIER)

303.112.113.114/ 301.112-113-114-115

LINTEAU A ARC SURBAISSE

101.11-12-14-15/ 101.21 à 25/ 101.31 à 35/ 102.11 à 15/ 102.21 à 25/ 102.31 à 35/ 104.24

61


CAVET + CORNICHE A MODILLONS

301.216/ 302.21-22

DÉCOR PORTE LINTEAU DROIT + MOULURE ET CONGE EN QUART DE ROND

205.12/ 207.11/ 801.11/ 103.15/ 401.121-123

FENÊTRE GÉMINÉE

403.31 à 37/ 301.311 à 315/ 301.321 à 323

LINTEAU DROIT + LINTEAU SUR MOULURE EN QUART COUSSINET+ DE ROND SANS CONGÉ MOULURE

401.113

104.13

LINTEAU DROIT + CHANFREIN

303.111

LINTEAU à ARC SURBAISSE

ARCHE PLEIN CINTRE + CHANFREIN

ARCHE SURBAISSEE

201.14/ 202.12/ 401.117/ 206.11

204.11 à 15/ 208.11-12-13

104.11

PIEDROIT PLAT

101.13

62


ANNEXES 8 ICONOGRAPHIES

Maquette “réalisée en vue de la vente du château” Le Val de Villé, un pays, des hommes, une histoire, p.415

Gravure du château de 1870

http://www.alsatica.eu/alsatica/bnus/Vue-du-chateau-de-Thanville-appartenant-aujourd-hui-a-M.-le-vicomte-deCastex,1_P_2F644079.html

63


Cartes postales de la première moitié Du XXe siècle, tel qu’on se le représentait au XVIIIe siècle ASHVV 2004, p.93

64


ANNEXES 9 MINUTES EFFECTUテ右S A THANVILLE

65


66


67


ANNEXES 10 PLAN MASSE DU CHATEAU DE THANVILLE (FORMAT DWG) Dessiné par le cabinet d’architecte d’Hubert Wach

CANAL

PC2

Plan de masse ech.1/500° SELON ART. 431-9

ESPACES VERTS ARBORES EXISTANTS A CONSERVER

ESPACES VERTS ARBORES EXISTANTS A CONSERVER

LIMITE DU PROJET: -S.H.O.N. existante = 0m2 -S.H.O.N. créées par changement de destination = 434 m2

A' 286 0

gou ACCES GRANDE SALLE ttiè re + +0,15 7,8 0 fait +0,15 ière + 10 ,40

754

PAR T EXI IE AI L STA NTE E NOR AA D +0,15 MEN ACCES GRANDE SALLE AGE

0

ACCES OFFICE 323 ttiè re + 3,17

gou

gou

ttiè re + 4,7

CORPS DE LOGIS PRINCIPAL

105

+0,03 +0,40

5

+0,15

ACCES ACCUEIL 5 ACCES SALON

circulation et accès gravillonnés

R

331

477

8

PHOTO ENVIRONNEMENT PROCHE

PHOTO PAYSAGE LOINTAIN

+0,00

-0,06

ACCES SANITAIRES

+4 ,75

265

gou

ttiè re

8

0 + 10 ,4 ière

fait

2 154 605

gou ttiè re

+0,15

Fontaine

+4 ,75

+0,00

A

aménagements extérieurs conservés en l'état

ACCES DEPUIS RD424

5

607

56

4

NIVEAUX AVANT TRAVAUX NIVEAUX APRÈS TRAVAUX

ES UD

0

SA IL

202

EXE

127

ANN

ACCES PRINCIPAL circulation traitement actuel à conserver

ESPACES VERTS ARBORES EXISTANTS A CONSERVER

ASSAINISSEMENT ET PARKING VOIR PLAN DE SITUATION ECH.1/1000°

WACH HUBERT ARCHITECTE DPLG 67220 SAINT-PIERRE-BOIS

Aménagement d'une salle d'animation et locaux annexes dans l'aile Nord des dépendances

pour S.C.I. Du Domaine de Thanvillé

68


ANNEXES 11 PLANS RDC / R+1 Dessinés par M.H

69


ANNEXES 12 COUPE DE LA TOITURE DU CORPS DE LOGIS Dessiné par le cabinet d’architecte de Michel Burlet-Plan

70


ANNEXES 13 TABLEAU RÉCAPITULATIF DES PROPRIÉTAIRES ET DES TRAVAUX EFFECTUÉS Dessiné par M.H

PROPRIETAIRES

ACTIVITE

TRAVAUX

DEGATS

Gaspard de HATTSTATT

Répare les fossés et les bâtiments

1507

Antoine DE LORRAINE

Achète le château

1518

Conseiller secrétaire du Duc

rachat

1541

Colonel général des lansquenets, service du roi de France Henri III

Reconstruction selon plan bastionné

(1489-1544)

Olry DE VIDRANGE (vers 1530-1589) Jean Friedrich DE WORMS 15..-1598 Friedrich DE TANVILLER (fils de JFW) ….-1650 Marie-M de TANVILLER + François BAZIN DE CHANLAS Henriette-Agnès COQFONTAINE + Frédéric DE LORT DE ST-V. Charles-Frédéric DE LORT DE ST VICTOR

révolte luthérienne : graves dommages, incendie

Pillage et incendie par les Suédois Reconstruction château suivant plans de JeanFriedrich

1660

Reconstitution du domaine morcelé

1686

Transformations en une résidence de campagne

1752

Guerre de 30 ans

PARTICULARITES

1540

THANVILLE

Duché de Lorraine

1571

ALSACE Saint Empire Romain Germanique SERG SERG

1572

Plus d’ouvrages circulaires mais angulaires

SERG

1633

>1634 : L’alsace devient progressivement française

SERG

Enceinte extérieure non relevée

Royaume de FRANCE

Rend habitable chambres des tourelles

Percements des fenêtres « classiques » Construction des communs pour agriculture

Jean-Félix DE DARTEIN

Rachat de la seigneurie

1786

Jardins

LORRAINE française

FRANCE

(1747-1788)

71


PROPRIETAIRES

ACTIVITE

TRAVAUX

Adélaïde DE DARTEIN (fille de JFD) (17881856) + Bertrand Pierre DE CASTEX

Vicomtes DE CASTEX

Héritage de la seigneurie

DEGATS

PARTICULARITES

1814

Se consacre à ses terres et élève des chevaux

Baron d’Empire

THANVILLE

ALSACE FRANCE

>1832 : jardin à l’anglaise

…-1842 Théodore DE CASTEX

Vicomte

Rachat du château

(1828-1898)

Chambelland de Napo III

« Intelligente restauration »

1856

Guerre : pillage des meubles et des ouvres d’art

1870

1868 : remplace toiture+ nouvelle corniche

FRANCE

Aménagements intérieurs Exploitation du domaine

Bertrand-Maurice DE CASTEX (1853-1931)

Soldat gascon

Rachat de la propriété

Elevage Travaux de rénovation + transformations : éléments factices comme

1884

Notable alsacien

ALLEMAGNE

Intérieur remeublé, redécoré Percement de 2 croisées au centre de la façade ouest Percement grande croisée à 2 meneaux sur façade nord

Gérard DE CASTEX

Rachat par la famille WAGNER

Pillage

1918

pillage

1944

Moulures en ciment autour baies

1981

(1911-1975)

72


TABLE DES MATIÈRES REMERCIEMENTS 4 AVANT-PROPOS 5 MÉTHODOLOGIE 6

II.

Classification, analyse et synthèse des éléments architecturaux du château de Thanvillé

24

1. La méthode d’archéologie du bâti

24

2. Les archères et les canonnières

25

a. Historique 25

BILAN HISTORIOGRAPHIQUE 6

b. Relevé, observations et comparaisons

INDICATION 9

26

3. Les ouvertures résidentielles 28 I.

Thanvillé, une terre lorraine en Alsace

11

1. Avouerie de Moyenmoutier et fief lorrain

a. Historique 28 b. Relevé, observations et comparaisons

29

11

4. Le décor et la structure

31

2. L’enclave lorraine : un impact architectural ?

13

5. Les fortifications 32

3. Les périodes de construction du château selon les sources écrites

14

a. Historique

32

a. Les origines 14

32

b. Les reconstructions du XVIe au XVIIIe siècle

14

6. Étude des marques lapidaires 34

i. Le château des Hattstatt et des Vidrange

14

7. Réponse aux points ou zones critiques

ii. La forteresse de Jean-Friedrich de Worms

15

iii. La reconstruction par François Bazin de Chanlas

16

8. Synthèse des étapes de construction complétée par l’étude d’archéologie du bâti 37

iv. La résidence de Charles-Frédéric de Lort de Saint-Victor 18

b. Relevé, observations et comparaisons

36

CONCLUSION 40 ANNEXES 42

c. Le XIXe siècle : les remaniements des familles de Dartein et de Castex 19 4. Confrontation avec les documents iconographiques

21

5. Synthèse des étapes de construction selon les écrits historiques

21

6. Recensement des points ou zones critiques

23 73


74


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