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LITTÉRATURE LISEZ MAYOTTE « COMPLÉTER MON DEVOIR DE MÉMOIRE »

LE DOCTEUR MARTIAL HENRY LÈGUE AUX JEUNES GÉNÉRATIONS MAHORAISES SES REGARDS SUR 50 ANNÉES D'HISTOIRE DE MAYOTTE (DE 1972 À 2022) SOUS LA FORME D'UNE AUTOBIOGRAPHIE. UN LIVRE QU'IL DÉDIE À SA

DÉFUNTE ÉPOUSE HONORINE RANOROMALALA RAKOTO, À SES ENFANTS ET SES AMIS D'ENFANCE.

Originaire de Mayotte, Martial Henry fut témoin et acteur de l'histoire passionnante de cette petite île devenue le 101ème département de France en 2011. De son enfance de métis de culture malgache, mahoraise et française jusqu'à son parcours sans faute qui l'a conduit à être major de sa promotion à chaque étape de sa vie d'élève puis d'étudiant en médecine, il raconte son engagement sans faille en tant que médecin et humaniste et en tant qu'élu œuvrant pour le développement de Mayotte au sein de la République française.

Premier originaire de notre île à embrasser, avec brio, une carrière de médecin, on lui connaît également un long engagement politique au Conseil général de Mayotte où il fut durant 16 ans, le 1er vice-président de Younoussa Bamana, jusqu'en mars 2001. À la retraite depuis quelques années, le docteur Martial Henry vient de publier son autobiographie sous compte d'auteur aux éditions L'Harmattan. Un livre préfacé de Firose Koytcha, autre enfant de l’océan Indien. Médecin de grande renommée et humaniste comme lui, en compagnie duquel il a participé à de nombreuses missions humanitaires médicochirurgicales au bénéfice des populations déshéritées, notamment à Madagascar. Les deux hommes se connaissent depuis les bancs du lycée Gallieni, à Antananarivo, où ils ont préparé le bac en 1957.

Diplômé d'État de la faculté de médecine de Paris en 1963, il est revenu pratiquer dans sa région, à l'hôpital de Moroni, à Mayotte et à Anjouan. Une période durant laquelle il va renforcer ses compétences en qualité de médecin praticien hospitalier, mais aussi de chirurgien et directeur gestionnaire d'établissement de santé. Une période qui lui permit de s'imprégner très largement des réalités socio-sanitaires de toutes les îles de l'archipel des Comores. Le prince Saïd Ibrahim, alors président du Conseil de gouvernement du TOM des Comores, le nomma ministre de la Santé en 1970. Un poste qu'il va occuper pendant 3 ans avant de retourner en métropole, pour une spécialisation à l'Ecole Nationale de Santé Publique de Rennes. Il revient aux Comores l'année suivante pour diriger le service de santé du TOM des

Comores jusqu'à la proclamation de l'indépendance pour trois des îles de l'archipel en 1975. Martial Henry rejoint Mayotte, son île natale, pour y exercer les mêmes compétences.

En 1982, le commando des Chatouilleuses de Mayotte réussit à le convaincre de porter ses couleurs aux élections cantonales, à Dzaoudzi. À ce titre, il fut témoin et acteur de l'évolution et du développement de notre île, d'où sa capacité aujourd'hui à restituer aux jeunes générations mahoraises ses souvenirs sur ces 50 années de l'histoire de notre département. Cette autobiographie prend la forme d'un entretien avec Emmanuel TusevoDiasanvou, un journaliste qui a longtemps exercé au sein Mayotte la 1ère. Dans ce livre, le docteur Martial Henry parle sans tabou de ses origines mahoraises malgré son nom à consonnance européenne, balayant ainsi les nombreux clichés d'étranger qu'une certaine classe politique comorienne attribue à sa famille originaire de Mtsapéré. Il parle également de son enfance et de sa scolarité, de la cohabitation pacifique entre les religions à Mayotte, ainsi que de sa passion immodérée pour le football.

Une grande partie de ce livre est consacré à sa carrière de médecin, notamment des enseignements de son mandat de ministre de la Santé. Il évoque les handicaps actuels du système de santé à Mayotte, « malade à cause de l'explosion démographique » , affirme-t-il sans détour. Dans le chapitre consacré à la coopération sanitaire entre Mayotte et les Comores, Martial Henry explique avoir été intéressé par le fait de renouer des liens avec les ministres, responsables et acteurs de santé du pays voisin pour mettre en place une entraide pour organiser des évacuations sanitaires dans notre département afin de soulager les plateaux techniques des autres îles, en capacité insuffisante pour soigner certaines maladies. Une coopération qui a bien marché, selon lui, jusqu'à l'arrivée au pouvoir d'Ahmed Abdallah Mohamed Sambi, qui a préféré une collaboration avec l'Iran.

La fin de cette autobiographie est consacrée à la méthode pratiquée, en son temps, par le Conseil général de Mayotte, pour positionner ses élus en première ligne sans les médiations entre les maires des communes et les villageois. Il évoque le long chemin parcouru par les Mahorais vers la départementalisation de leur île. « Pour Mandela, la cause, c’était la liberté de l’Afrique du Sud face à l’apartheid mais il était réaliste, il savait que ça ne pouvait pas se faire du jour au lendemain » , souligne-t-il. Se projetant sur le cas de Mayotte et le choix de ses leaders (ses compagnons Zoubert Adinani, Marcel Henry, Younoussa Bamana, Adrien Giraud, Zéna Mdéré et autres), le docteur Henry explique qu’ils ont choisi l’ancrage dans la France « parce qu’une toute petite île comme la nôtre, dans cette mondialisation, je le répète souvent, ne peut pas s’en sortir toute seule » . Il conclut par un message à l’adresse des jeunes Mahorais sur les raisons qui l’ont conduit à écrire cette autobiographie : » Je pense que si l’on sait d’où l’on vient, on est beaucoup plus en capacité de décider, d’avancer et d’arriver là où on souhaite parvenir »

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