Dossier de presse
octobre 2013
L’accès aux soins
des plus démunis en 2013
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Journée internationale du refus de la misère 17 octobre 2013 Dossier de presse 17 octobre 2013
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introduction Accroissement du nombre de consultations médicales, retards de recours aux soins qui augmentent, cumul des difficultés rencontrées chez les personnes qui consultent dans les 20 centres d’accueil, de soins et d’orientation (Caso) de Médecins du Monde : le bilan que dresse l’Observatoire 2013 de l’accès aux soins en France est inquiétant. Il dessine un des visages de la précarité et de l’exclusion et nous révèle à quel point la misère et les inégalités territoriales et sociales de santé continuent de s’aggraver. Selon les chiffres de 2012, 98,2 % des personnes reçues en consultation vivent sous le seuil de pauvreté1 et seules 12,3 % des personnes majeures ont des droits effectivement ouverts à une couverture maladie, qu’elles soient françaises ou étrangères, en situation régulière ou non. Ces populations vulnérables sont largement ignorées par les statistiques officielles françaises de santé publique. à force de retard de recours aux soins et parfois plus tragiquement de renoncement aux soins, elles sont 75 % à nécessiter une prise en charge à l’issue des consultations. Plus inquiétant encore, le nombre de mineurs venant consulter dans les Caso : il a augmenté de 69 % en cinq ans, alors même que la loi leur garantit en principe un accès inconditionnel au système de soins, quel que soit leur statut administratif. La crise économique frappe en priorité les catégories les plus précaires. Pourtant, les dispositifs mis en place par l’état pour leur garantir un accès aux soins et aux droits fondamentaux s’avèrent toujours insuffisants. Le plan quinquennal de lutte contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale annoncé par le gouvernement en janvier 2013 prévoit des mesures importantes pour réduire les inégalités d’accès aux soins et prévenir les ruptures de parcours, venir en aide et accompagner vers l’insertion et enfin coordonner l’action sociale. Si certaines mesures ont déjà été adoptées, telles que le relèvement du seuil d’attribution de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C), Médecins du Monde reste vigilant sur la réalisation de l’ensemble des engagements, et notamment :
© Benoît Guenot
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• l’augmentation des places en hébergement d’urgence et en centre d’accueil pour les demandeurs d’asile, la fin de la gestion au thermomètre de l’hébergement et une véritable politique d’accompagnement vers le logement, • l’augmentation du nombre de Permanence d’accès aux soins de santé (Pass), l’amélioration de leur effectivité et le développement de la médiation sanitaire et sociale, • la simplification de la procédure de domiciliation, critère nécessaire pour l’octroi d’une couverture maladie. Le gouvernement doit cependant se montrer plus ambitieux dans la lutte contre la misère. Car des mesures efficaces existent, qui permettraient de mieux combattre l’exclusion et la stigmatisation des populations les plus vulnérables : • la fusion de l’Aide Médicale d’état (AME) avec la Couverture Maladie Universelle (CMU), • le respect de la circulaire du 26 août 2012 sur l’anticipation et l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites, et plus globalement une meilleure politique d’accueil et d’intégration des migrants, y compris des citoyens européens, • l’abrogation immédiate du délit de racolage passif des personnes se prostituant voté par le Sénat en mars 2013 et le rejet de tout projet de loi visant à pénaliser les clients, • le respect du Droit Au Séjour des étrangers Malades (DASEM), • la légalisation des Tests Rapides d’Orientation Diagnostic (TROD) comme outil de dépistage des hépatites pour les populations précaires les plus exposées.
1. Le seuil de pauvreté est calculé par rapport à la médiane des niveaux de vie. En France, le taux de pauvreté correspond à 60 % de cette médiane. Ainsi, en 2011, 8,6 millions de personnes vivaient sous ce seuil, soit avec moins de 964 euros par mois. Source : INSEE
© Coralie Couëtil
© Boris Svartzman
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Médecins du Monde en France Calais Le Havre Valenciennes Metz
Rouen
Strasbourg
Colombes La plaine-Saint-Denis Paris
Nancy Besançon
Nantes Centre d’accueil de soins et d’orientation
Poitiers
Action mobile de proximité
Lyon Saint-éloy-les-Mines
Action de réduction des risques
Angoulême Grenoble
Personnes se prostituant
Bordeaux
Parrainage des enfants hospitalisés
Montpellier
Centre de soins pédiatriques
Toulouse Bayonne Cayenne
Nice Aix-en-Provence
Pau Mayotte Saint-Denis
Marseille Ajaccio
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Médecins du Monde, c’est plus de 44 800 consultations grâce à 20 centres d’accueil, de soins et d’orientation (Caso) en France et 63 actions mobiles qui comptabilisent environ 30 000 contacts. Les centres assurent un accès aux soins pour les personnes vulnérables exclues du système de santé français. Ce sont des structures « à bas seuil d’exigence » : pas de contrainte de papiers ni de rendez-vous nécessaire (hors consultations spécialisées). Les patients sont reçus par des équipes pluridisciplinaires qui proposent des consultations médicales, paramédicales et sociales adaptées, les accompagnent dans leurs démarches d’accès aux structures de droit commun et assurent les orientations nécessaires. En plus des consultations de médecine générale proposées par l’ensemble des Caso, certains centres dispensent également des consultations de spécialistes (gynécologie, dermatologie, cardiologie, ophtalmologie…), des consultations paramédicales (kinésithérapie, soins infirmiers …) et des entretiens avec des psychologues ou des psychiatres. Certains centres réalisent des consultations dentaires et/ou des actions de prévention individuelles ou collectives, en particulier pour lutter contre le VIH, les hépatites, les infections sexuellement transmissibles et la tuberculose. Dans quelques centres Médecins du Monde, des actions spécifiques d’accompagnement des étrangers malades dans leurs démarches de demande de régularisation pour raisons médicales ont été mises en place en partenariat avec des associations œuvrant dans le domaine juridique.
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Baromètre Médecins du Monde 2013 98 % des patients reçus dans les Caso vivent sous le seuil de pauvreté
46 % des femmes
enceintes rencontrées
présentent un retard de suivi de grossesse
+ 3 3 % de patients depuis 2008 30 560
patients différents en 2012. L’activité globale des Caso a augmenté de 24 % depuis 2008, et de 3,7 % depuis 2011.
43 % des patients
70 % des patients connaissent de graves difficultés de logement
ont recours aux soins de façon trop tardive
44 % vivent dans un
Une hausse constante du nombre de mineurs
logement précaire
13,2 % sont sans
domicile fixe
+ 69 % en 5 ans Ils représentent 12,5 % des patients en 2012
Seulement 12 % des patients
ayant des droits théoriques ont des droits ouverts. Ils étaient 18 % en 2010.
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La crise nuit encore la santé des plus précaires Un renoncement et/ou un retard de recours aux soins plus fréquents Sans surprise, la crise économique et financière continue de frapper durement les plus démunis et aggrave les difficultés des plus pauvres à se soigner. Dans ce contexte, c’est tout le système de santé solidaire qui est progressivement mis à mal. 43 % des patients reçus dans les centres de Médecins du Monde présentent lors de leur première visite un problème de santé qui aurait dû être traité plus tôt, et 22 % déclarent avoir renoncé à se soigner au cours des 12 derniers mois. Le retard de recours et le renoncement aux soins sont certes liés aux difficultés financières et aux conditions de logement dégradées. Mais à cela s’ajoutent de nombreux obstacles relevant de la complexité du droit et du dispositif français en matière d’accès aux soins. On constate par ailleurs que les patients français sont de plus en plus nombreux à renoncer à se soigner : ils étaient 14 % en 2011, ils sont désormais 26 %, en raison notamment de l’absence de complémentaire santé ainsi que de la baisse constante des remboursements d’assurance maladie.
Des obstacles à l’accès aux soins et aux droits En France, les étrangers en situation irrégulière peuvent bénéficier de l’Aide Médicale d’état (AME). Ce dispositif permet un accès aux soins gratuits à toute personne qui justifie d’une domiciliation en France et d’une présence ininterrompue de 3 mois sur le territoire. Les personnes précaires en situation régulière ainsi que les personnes en demande d’asile peuvent quant à elles bénéficier de la Couverture Maladie Universelle (CMU) et de la Couverture Maladie Universelle Complémentaire (CMU-C). Cependant, seuls 12 % des patients reçus ont des droits effectivement ouverts le jour de leur première visite dans les Caso (ils étaient 16 % en 2011). Les principaux obstacles à l’accès aux droits et aux soins sont le critère de résidence imposé par la réglementation, la méconnaissance du dispositif sanitaire et social français, ou encore la barrière linguistique. Mais c’est aussi et surtout la complexité de la législation en vigueur qui fait obstacle, à laquelle s’ajoutent certaines pratiques abusives des Caisses primaires d’assurance maladie (CPAM). Les étrangers sans titre de séjour cumulent une difficulté supplémentaire qui est la peur d’être interpellés, qui limite leurs déplacements, notamment vers les dispositifs de prise en charge. Une part encore significative de patients (32 %) demeure aujourd’hui totalement exclue du système d’accès aux soins en raison du critère de résidence en France de plus de trois mois imposé en 2004 pour pouvoir bénéficier d’une couverture mala-
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die. Les permanences d’accès aux soins de santé (Pass) sont un dispositif permettant de recevoir et soigner ces personnes sans aucun critère préalable. Malheureusement, leur nombre insuffisant et leur manque d’efficacité dans certaines régions les empêchent de remplir leur mission de santé publique.
Des pathologies chroniques ou graves Un tiers des patients reçus dans les centres de Médecins du Monde requièrent des soins urgents. Ces patients doivent le plus souvent être suivis dans la durée : 67 % d’entre eux sont affectés par une pathologie chronique (syndromes anxieux, hypertension artérielle, diabète, etc…) pour laquelle un traitement est prescrit dans la majorité des cas. Des troubles de la santé mentale sont repérés pour 11 % des consultants des centres en 2012. Les troubles anxieux ou les syndromes dépressifs sont les plus diagnostiqués. Chez les étrangers, la fréquence des troubles mentaux est accentuée pour les personnes en demande d’asile, en raison des traumatismes consécutifs aux violences qui les ont amenées à fuir leur pays mais aussi des conditions de vie déplorables que la plupart d’entre eux connait une fois en France. Les patients reçus en consultation sont encore trop nombreux à ne pas connaître leur statut sérologique concernant le VIH et les hépatites B et C. Parmi les personnes dépistées dans les deux centres franciliens, la prévalence du VIH est 14 fois supérieure à la prévalence nationale. 9 % des patients dépistés sont porteurs d’une hépatite B et presque 6 % ont une sérologie d’hépatite C, soit respectivement plus de 14 et 7 fois supérieures à la moyenne de la population générale.
© Sarah Alcalay
Les populations vulnérables Si le recours tardif et le renoncement aux soins touchent indistinctement toutes les catégories de population, ils sont majorés chez les personnes marquées par une vulnérabilité sociale – les femmes, les mineurs, les étrangers en situation irrégulière, les personnes sans domicile fixe ainsi que les patients sans couverture maladie.
Les mineurs
Les femmes
En 2012, 12,5 % des patients reçus dans les centres sont mineurs. Depuis 2007, leur nombre n’a cessé d’augmenter de manière inquiétante (+69 %). Un mineur sur deux est âgé de moins de 6 ans et parmi eux, seuls 40 % sont suivis par les services de Protection maternelle et infantile (PMI). Lors de leur première visite, près de 90 % des mineurs sont sans couverture maladie, alors qu’ils doivent légalement en bénéficier sans conditions. Près d’1/3 des mineurs accusent un retard de recours aux soins et 13 % y ont renoncé aux cours des 12 derniers mois. Les mineurs sont aussi affectés par le mal logement : ils sont 37 % à vivre dans un logement précaire, 28 % à être hébergés par une association ou un organisme et 10,4 % à ne pas avoir de domicile fixe, avec des conséquences néfastes sur leur état de santé et leur réussite scolaire. La couverture vaccinale des jeunes est en deçà des objectifs fixés dans le plan de santé publique. Ils sont seulement 2/3 à être correctement vaccinés contre le BCG et le DTP, 63 % contre le ROR et la coqueluche et seulement 58 % contre l’hépatite B.
Deux tiers des femmes reçues en consultation médicale déclarent vivre dans des conditions dégradées. Seules 15 % d’entre elles disposent de droits à une couverture maladie. Concernant la prise en charge médicale, elles sont particulièrement affectées par le recours tardif et le renoncement aux soins. Les femmes enceintes représentent près de 4 % de l’ensemble des femmes dans les Caso en 2012. Parmi elles, 9 % sont sans domicile, près de la moitié présente un retard de suivi de grossesse et 70 % nécessitent des soins urgents. Bien que 3/4 d’entre elles puissent théoriquement bénéficier d’une couverture maladie, elles sont seulement 6 % à avoir des droits effectivement ouverts.
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Quelle alternance politique pour les plus pr caires ?
Les engagements du plan quinquennal insuffisants Des mesures trop faibles sur l’accès à une couverture maladie pour tous En relevant le plafond de la CMU-C et de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS), le gouvernement a réduit les freins financiers à l’accès à la santé de nombreuses personnes précaires pour lesquelles aucun dépassement d’honoraires ne devra être appliqué. L’AME reste quant à elle un dispositif complexe, difficile d’accès, qui génère des retards de soins et débouche trop souvent sur une absence totale de prise en charge médicale. En cause : des demandes parfois abusives de pièces administratives, l’interdiction du dépôt de dossiers d’AME dans certaines CPAM, des refus de soins… 1/3 des personnes reçues en consultation se heurtent au critère de résidence de plus de 3 mois nécessaire pour obtenir l’AME et plus d’1/4 des adultes reçus pour la première fois dans les centres MdM ne disposent pas d’une adresse postale indispensable pour accéder à des droits sociaux. La simplification de la procédure de domiciliation prévue pour 2013 par le plan quinquennal doit être mise en place pour permettre à un plus grand nombre de personnes de bénéficier de l’AME. Médecins du Monde déplore l’absence de réforme autour de l’AME et réclame la fusion de l’AME dans le dispositif CMU. Cette intégration permettrait ainsi un accès aux soins plus simple et moins stigmatisant et serait garante d’une politique de santé publique efficace.
Renforcer les dispositifs des Permanences d’accès aux soins de santé (Pass) Les Pass sont des dispositifs de prise en charge médicale et sociale, situés au sein de centres hospitaliers publics, pour les personnes en situation de précarité, indépendamment de leur statut administratif. Les équipes de MdM constatent fréquemment que cet accueil inconditionnel n’est pas toujours respecté, en particulier pour les personnes n’ayant droit à aucune couverture maladie. Le nombre insuffisant de Pass, leur manque d’effectivité dans certaines régions et la méconnaissance du dispositif entraînent des difficultés de prise en charge, des orientations inadaptées et des procédures de remises de traitement non opérantes.
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Médecins du Monde reste vigilant quant à la création de nouvelles Pass et demande tout particulièrement un renforcement des Pass pédiatriques, dentaires, psychiatriques et mobiles.
Priorité au logement pérenne En matière de logement, le plan quinquennal prévoit la fin de la gestion au thermomètre de l’hébergement. L’enquête de MdM sur l’hébergement d’urgence en 2013 montre que plus de 60 % des personnes faisant une demande d’hébergement auprès du 115 n’obtiennent pas de réponse, soit par manque de places disponibles, soit par refus des personnes elles-mêmes, la solution proposée étant inadaptée à leur profil. Parmi les personnes restées sans hébergement, 12 % sont des mineurs, 3 % des femmes enceintes et 34 % présentent un problème de santé. Ainsi, les facteurs de vulnérabilité ne garantissent pas l’attribution d’une place d’hébergement. Bien que 5000 places supplémentaires en hébergement d’urgence soient prévues en 2013, Médecins du Monde déplore l’absence de structures d’hébergement ouvertes toute l’année en nombre et en capacité d’accueil suffisants. Afin de sortir d’un système de simple « mise à l’abri », un accompagnement social vers le logement pérenne doit être privilégié.
Seuls 11 % des demandeurs d’asile ont des droits ouverts Les personnes en demande d’asile sont plus exposées au retard et au renoncement aux soins. En cause, les délais de gestion de la procédure d’asile et la fragilité psychologique liée au parcours migratoire. Malgré leur droit à l’hébergement, ils sont 16 % à être sans domicile et à se retrouver dans le circuit de l’urgence sociale, faute d’infrastructures suffisantes. Dans la perspective d’une réforme législative annoncée, Médecins du Monde appelle à des changements en profondeur de la procédure d’asile et du dispositif d’accueil. Médecins du Monde restera vigilant sur la création de 4 000 places en Centre d’accueil de demandeurs d’asile (Cada) prévue d’ici 2014.
© Jérôme Sessini/Magnum Photos pour MdM
Le droit au séjour et à la protection des étrangers malades (Dasem) Depuis 2011, le droit au séjour d’une personne étrangère en situation irrégulière malade est subordonné à « l’absence » d’un traitement approprié dans son pays d’origine. Ce texte conduit à des renvois abusifs de patients présentant des maladies graves alors que l’effectivité de cet accès n’est absolument pas garantie.
Médecins du Monde demande le rétablissement immédiat de la protection des étrangers gravement malades en revenant à la législation de 1998 en la matière. La gouvernance du dispositif d’évaluation médicale doit rester sous la tutelle exclusive du ministère de la santé afin de garantir une véritable protection pour les étrangers malades dans le respect de la déontologie médicale et en faisant primer la santé publique sur les effets répressifs de la politique migratoire.
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L’alternance politique doit lutter contre tous les visages de la misère
© Jérôme Sessini/Magnum Photos pour MdM
© Christina Modolo
Une politique de harcèlement et de stigmatisation à l’égard des populations roms
Proposer des solutions appropriées pour lutter contre le VIH et les hépatites
Un an après la sortie de la circulaire « relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites », le bilan est sans appel : une grande majorité des expulsions se fait toujours sans diagnostic préalable et sans solution de relogement. Les équipes de MdM dénoncent ces expulsions abusives et constatent des situations sanitaires d’urgence dans ses programmes « bidonvilles » partout en France. Les populations évacuées sont jetées dans l’errance, ce qui constitue une barrière importante à leur intégration sociale et à leur suivi sanitaire.
Les TROD du VIH et des hépatites B et C permettent d’établir le statut sérologique du patient en moins d’une demi-heure. Ils permettent une prise en charge moins tardive, et de ce fait limitent les risques d’aggravation. Ils sont particulièrement adaptés aux populations les plus exposées ayant peu accès aux dispositifs de dépistages classiques. Bien que les TROD VIH soient autorisés, ceux permettant le dépistage de l’hépatite C sont toujours illégaux en France, alors même que leur utilisation en couplage avec le TROD VIH a prouvé son efficacité sur le programme MdM à Bayonne.
Face à ce constat, il est nécessaire d’instaurer une politique globale et humaine de résorption des bidonvilles et de l’habitat indigne. Médecins du Monde demande le respect de la circulaire du 26 août 2012 afin qu’un travail d’anticipation et de concertation avant toute expulsion soit systématiquement mené pour aboutir à des propositions de relogement dignes. La médiation sanitaire et sociale doit être davantage privilégiée.
Médecins du Monde demande de toute urgence l’autorisation légale de pratiquer les TROD hépatites. Par ailleurs, la validation gouvernementale du projet portant sur l’ouverture d’une salle de consommation à moindre risque constitue une réponse adaptée à la prévention de la transmission du VIH et des hépatites auprès des usagers de drogues par voie intraveineuse. Le gouvernement doit respecter son engagement d’ouvrir la salle en 2013.
Lutter contre les violences faites aux personnes se prostituant
Mayotte, territoire d’exception au droit à la santé
En 2013, le Sénat a adopté une proposition de loi visant à abroger le délit de racolage public tout en ouvrant la voie à une proposition de loi en faveur de la pénalisation des clients. Les équipes de MdM sur le terrain constatent pourtant que les personnes se prostituant sont reléguées vers des lieux de plus en plus isolés, donc dangereux, moins aptes à négocier des pratiques sexuelles protégées et sont de fait plus exposées aux violences. Les effets délétères des arrestations et gardes à vue à répétition pour racolage ont un impact psychologique majeur sur des personnes qui se sentent harcelées. En cas d’agressions, elles consultent moins souvent les médecins, ce qui empêche aussi l’obtention de certificats médicaux nécessaires aux plaintes en justice.
Depuis 2005, un système spécifique de sécurité sociale a été mis en place, sans CMU, CMU-C ni AME, ouvert aux seuls Français et étrangers majeurs en situation régulière2, entrainant l’exclusion d’environ 1/4 de la population de toute protection maladie, et donc des soins3. Les enfants de personnes sans-papiers ou mineurs isolés n’ont aucune forme de protection maladie. La peur des expulsions, la barrière linguistique et les difficultés administratives sont autant d’obstacles qui amènent à des retards de recours ou des renoncements aux soins : dans notre centre de soins pédiatrique à Mayotte, 42 % des accompagnants disent avoir renoncé à des soins pour leur enfant en 2012.
Médecins du Monde demande l’abrogation immédiate du délit de racolage public et rejette tout projet de pénalisation des clients qui relègue plus encore les personnes se prostituant dans des zones de non-droit.
Médecins du Monde réclame l’accès effectif aux soins de tous les mineurs à Mayotte et le respect des engagements internationaux de la France.
2. Selon l’ordonnance n°96-1122, pour être considéré en situation régulière : il faut être « autorisé à séjourner sur le territoire de cette collectivité territoriale pour une durée supérieure à trois mois ou y résider effectivement depuis trois mois » et donc avoir un titre de séjour ou un récépissé. Dans ce dernier cas il faut apporter la preuve de la résidence à Mayotte depuis plus de trois mois. 3. Math A., « Mayotte. La situation économique et sociale », Chroniques internationales de l’Ires, 2012 :134. 10
Dossier de presse 17 octobre 2013
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© Jérôme Sessini/Magnum Photos pour MdM
conclusion Avec le plan quinquennal, le gouvernement français a adressé un signal positif aux personnes précaires et aux acteurs de la solidarité comme Médecins du Monde. Mais les indicateurs de santé de l’Observatoire 2012 indiquent qu’il faudra aller au-delà des mesures annoncées pour combattre la misère et ses conséquences sanitaires. Plus que jamais, Médecins du Monde milite pour des valeurs solidaires et développe des projets innovants pour répondre aux besoins des personnes les plus précaires, tels que l’ouverture d’une salle de consommation à moindre risque ou d’un programme en Auvergne pour lutter contre la précarité en milieu rural. Des dispositifs comme la médiation sanitaire et sociale des programmes bidonvilles ont prouvé leur efficacité auprès des populations marginalisées. Médecins du Monde sera présent lors des débats qui accompagneront les élections municipales et européennes afin de rappeler la nécessité de mettre en place des mesures concrètes de lutte contre les inégalités sociales et territoriales, y compris au niveau local. à présent, il faut lutter contre les stéréotypes qui empêchent de prendre les mesures appropriées en faveur des populations vulnérables, comme les usagers de drogues ou les personnes se prostituant. Un autre enjeu majeur demeure la lutte contre la stigmatisation de certaines populations telles que les Roms, dont l’intégration sociale encouragée par les instances européennes est trop souvent bafouée par une politique sécuritaire qui les met en danger. Exclure les personnes vulnérables et multiplier les discours discriminant à leur encontre revient à nier leurs droits les plus fondamentaux et met en péril la cohésion sociale de la France. Il est urgent que les personnes les plus précaires bénéficient des mesures concrètes et plus ambitieuses attendues de l’alternance politique.
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