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2.1. Apparition d’une conscience des risques liés à la pratique des avortements
du sceau d’un secret, c’est aussi éviter toute forme de stigmatisation sur fond d’un regret profond provoqué par la tension entre les pesanteurs morales autour de l’acte d’avorter et l’impératif de se défaire d’une grossesse non désirée en situation d’impossibilité d’assumer les charges d’une parentalité. L’expression du regret ponctue quasiment tous les récits des femmes, marquant ainsi la prégnance du sentiment de culpabilité après l’avortement. Solange, Fatim, Victoire et Pharelle illustrent par leur propos ces sentiments de regrets partagés par la plupart des femmes ayant pratiqué l’avortement :
Solange, 25 ans, élève, célibataire :
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«Chaque jour même, je regrette …pour les deux (avortements) même. Je pense que c’est à cause de ça BAC là ça marche pas, c’est troisième année là…. Et puis quand je vois la fille de ma grande sœur … ça me fait un peu mal, je me dis si je savais, ma fille allait faire CP1, CP2. Je prie, je demande pardon à Dieu.»
Fatim, 22 ans, aide-soignante, célibataire :
«Moi-même j’ai déjà fait ça (avortement), mais je ne conseille pas quelqu’un de faire ça…parce cet enfant que j’ai jeté là, peut-être que c’est grâce à lui ils vont me connaitre dans le pays. Parce que, je serai grand type et il va m’enlever de tout ça là… je ne sais pas comment m’exprimer même… et puis cet enfant-là je l’ai jeté en tout cas ça me fait mal jusqu’à présent.»
Pharelle, 19 ans, élève, célibataire.
«Ça me fait mal, c’est 100 % regret même que si même là j’arrêtais école ou bien mon enfant n’avait pas de père c’est mieux que de me mettre dans les situations comme ça. Et si demain je ne fais pas enfant, que vais-je faire?»
L’expérience de l’avortement vécue conduit celles qui l’ont connue à vivre avec inquiétude : l’avenir de leur santé reproductive par crainte d’éventuelles conséquences physiologiques de l’avortement. Après le recours à l’avortement, les femmes sont souvent animées de deux sentiments contradictoires : sentiment victimaire et la culpabilité. Elles se considèrent victimes de la situation financière qui les a conduites à faire ce choix, victimes de la confiance placée en leur partenaire qui leur a imposé des rapports non protégés, mais aussi victimes potentielles des méthodes d’avortement utilisées, par peur de leurs effets secondaires. Mais en même temps, elles culpabilisent. Soit à cause de leur attachement à des valeurs religieuses, soit parce que l’avortement est mal accepté dans l’opinion publique, voire punie par la loi.
2.1. APPARITION D’UNE CONSCIENCE DES RISQUES LIÉS À LA PRATIQUE DES AVORTEMENTS
Dans la section 1 du présent rapport (p. 29 et suivantes), nous avions relevé chez les jeunes femmes ayant fait l’objet de l’enquête, une tendance à prendre des libertés avec les méthodes contraceptives et à utiliser l’interruption volontaire de grossesses plutôt comme un moyen de régulation des grossesses en raison de la présence d’une offre diversifiée de services d’avortement clandestin. Ce n’est qu’après la réalisation de l’avortement que les femmes prennent conscience des risques liés à sa pratique. La conscience du risque est quasi absente au moment de la demande de service motivée par des urgences. De façon générale, cette conscience des risques se construit par une lecture morale de l’acte et la peur de voir sa fertilité compromise par l’avortement. Il en résulte un sentiment d’avoir fauté en avortant et une peur de la stérilité comme « sanction divine ». Carmen estime que les conséquences de l’avortement sont irréversibles :
«Les conséquences là, sont irréversibles. Tu as fait deux, trois avortements. Au moment où tu auras besoin d’un enfant, tu peux