Le flamenco et la guitare gitane

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LE FLAMENCO ET LA GUITARE GITANE Dossier

MEDIATHEQUES DU PAYS DE ROMANS ESPACE MUSIQUE

FÉVRIER 2013


SOMMAIRE

I) Présentation des intervenants 1) Prisca Briquet 2) Davy Santiago Luna Del Sol 3) Véronique Velasco 4) Rehan Shaikh

II) Histoire du flamenco 1) Les origines 2) Les grandes étapes (à partir de la moitié du XIXème siècle)

III) Les 3 visages du flamenco 1) Le chant 2) La guitare 3) La danse

IV) Figures et légendes 1) Le chant 2) La guitare 3) La danse

V) Quelques figures montantes 1) Parmi les chanteurs et chanteuses 2) Parmi les guitaristes 3) Parmi les danseurs et danseuses

VI) Discographie et bibliographie sélectives VII) Sources discographiques, bibliographiques et sites


I ) Présentation des intervenants 1) Prisca Briquet

Coup de cœur photographique des organisateurs du Festival Arte flamenco en 2012, Prisca Briquet est née en 1977 dans le Sud Ouest de la France. En 2004, en photographiant un concert, elle rencontre le flamenco qui devient rapidement une passion. Designer graphique de formation, elle se consacre depuis à la photographie flamenca. Elle privilégie la photo en noir et blanc pour mieux capter la dimension émotionnelle des artistes. De grands formats marqués par de très forts contrastes soulignent l’intensité de l’instant vécu par les artistes photographiés. Son objectif, « avoir le regard le plus pertinent sur le flamenco, ne pas trahir l’artiste » qu’elle photographie.

2) Davy Santiago Luna del Sol

Luna del sol est un groupe romanais de musique gitane, créé par Davy Santiago il y a 15 ans. Issu d'une famille de grands musiciens, Davy Santiago découvre très tôt sa passion pour la musique. Depuis il n'a cessé de faire évoluer sa musique en y mélangeant rock, funk, salsa ou fusion, sans jamais trahir ses racines. 2011 marque la sortie de son 1er album solo « Libertad », et la diffusion de deux de ses titres sur Radio France qui le nomme « Découverte de France bleu ». Aujourd'hui, Davy Santiago poursuit ses tournées à travers l'Europe, compose des musiques pour des téléfilms, des parcs d'attractions, ou des shows équestres. Pour le concert à la médiathèque, il jouera avec le batteur Olivier Capelli et le bassiste André Gobbato.


3) Véronique Velasco Véronique Velasco est une danseuse drômoise. Elle débute le flamenco et les danses espagnoles à l’âge de 10 ans, et suivra les cours de la danseuse professionnelle Carmen de Málaga pendant 6 ans. Dès 1986, elle donne elle-même des cours de danses flamenca, suit des stages auprès de grands danseurs : Juana Amaya, Cristobal Reyes, José Maya, Marie-Carmen Garcia… Elle crée également le ballet : « Las flamencas », avec lequel elle se produit en France. Elle enseigne désormais à Bourg-lès-Valence (Centre de danse Elisabeth Terisse) et à Romans (Maison des Jeunes Robert Martin) où elle dispense des cours pour tous âges et tous niveaux. Et elle continue de se former en France, à Madrid (Ecole « Amor de dios ») et à Barcelone.

4) Rehan Shaikh

Le nom du jeune guitariste rappelle ses origines indo-pakistanaises, et la musique qu’il interprète est le fruit de rencontres métissées. Né à Amiens en 1984, il étudie la guitare au conservatoire de musique d’Abbeville. Ensuite, il suit des formations en jazz et participe à des stages de guitare classique. En 2005, d’une rencontre avec un bluesman américain naît son attrait pour le blues. En 2008, il se rend en Amérique du Sud pour étudier les styles latino de la guitare, comme la bossa. Par ailleurs, son expérience dans l’enseignement lui a donné le goût de la pédagogie, qu’il met au service de la guitare gitane pour une conférence musicale et un atelier d’initiation.


II ) Histoire du flamenco 1) Les origines Issu d'une tradition vivante qui remonte à l'antiquité « le flamenco est surtout l'expression musicale d'une région, l'Andalousie, d'un peuple, les Andalous, qui ont créé un art que les gitans ont profondément influencé... Le don du peuple andalou pour la danse et le chant est déjà mentionné au VIème siècle avant J.-C. dans l'œuvre d'Avene « Heure maritime », qui évoque la rythmique des peuples d'Hispanie... Les origines du Flamenco sont complexes et multiples, mêlant les influences arabes, juives, byzantines, elles-mêmes émanations plus ou moins directes des grandes musiques persanes et indiennes. » in « Flamenco attitudes » Gabriel Sandoval L'étymologie du mot « flamenco » (« flamand » en espagnol) reste entourée de mystère. Le terme a d'abord été utilisé pour désigner les gitans eux-mêmes avant de renvoyer à leur art. • L'hypothèse la plus répandue attribue l'origine du mot à deux termes arabes « Felah et Mengus », qui, associés, signifient « paysan errant ». • Une autre théorie se base sur le sens littéral du mot flamenco (flamand). Au XVI ème siècle, des privilèges royaux sont accordés à certaines familles gitanes en récompense des services rendus dans l'armée des Flandres. Ne voulant pas être confondus avec les Gitans ordinaires, on les appelait alors « Les Flamands » (Los Flamencos). • Une autre thèse, plus linguistique, se réfère à l'argot du XVIII ème siècle en le rapprochant du mot « flameante » qui signifiait « flamboyant ». Si le mot flamenco a fait l'objet d'interrogations, l'origine de la musique qu'il désigne a suscité de nombreuses hypothèses et polémiques. La thèse byzantine Le musicien et musicologue catalan Felipe Pedrell a insisté sur l'influence des Byzantins qui ont occupé une partie de la péninsule ibérique (554-629), une hypothèse relayée par Manuel de Falla. La thèse juive En 1930, Maximo José Kahn publie un article sur le rapport entre le chant de synagogue et le cante jondo. Il trouvait à ce mot une étymologie hébraïque, « jom-tob » signifiant « jour de fête ». De son côté le musicologue Hipolito Rossy établit des rapprochements entre le flamenco et certaines chansons juives modernes. Par ailleurs d'autres rapports éventuels sont évoqués entre un chant flamenco (la petenera) avec la tradition juive. La thèse arabe Cette piste a de nombreux partisans. On ne peut en effet imaginer que près de huit siècles de présence musulmane n'aient pas laissé des traces dans la culture musicale de l'Andalousie, surtout lorsqu'on pense à la brillante civilisation du califat de Cordoue et à Zyriab, figure emblématique de la musique araboandalouse. Le bilinguisme pratiqué à l'époque dans cette région suppose des échanges musicaux entre les deux communautés arabe et autochtone. En 711, les Maures conquièrent « l'Al Andalus » et maintiennent leur domination jusqu'à leur expulsion finale de Grenade par le roi Ferdinand et la reine Isabelle en 1492. Zyriab


L'unité est construite par les Omeyyades, qui fixent la capitale à Cordoue en 756. Son souverain Abd-al-Rahman II prend le nom de calife. C'est un mécène qui regroupe des artistes et des savants. Le plurilinguisme des élites et le brassage ethnique favorisent la floraison culturelle. Cette influence laissera de nombreuses empreintes dans l'art et notamment sur le flamenco. Aujourd'hui on est frappé par une similitude entre les orchestres arabo-andalous du Maroc et les formations folkloriques de la province de Malaga « les pandas de verdiales » (forme archaïque des fandangos). L'apparition tardive du flamenco (fin du XVIII ème- début du XIXème) empêche toute transmission directe avec la musique arabe d'Andalousie, c'est donc à travers le folklore le plus ancien (comme dans le cas des verdiales) que de telles influences ont pu se manifester. Il faut rappeler le rôle joué par les Gitans, dont la culture musicale, d'origine indo-iranienne, est pratiquement la même que celle qui va inspirer la musique arabe la plus classique. La thèse gitane En 1922 Manuel de Falla rédige un fascicule intitulé « El cante jondo » (canto primitivo andaluz) destiné à préparer le premier concours de chant flamenco. Il s'agit de convaincre les autorités de Grenade et l'élite intellectuelle et artistique que le flamenco - rebaptisé cante jondo – n'est pas ce que tout le monde pense : une musique surgie des bas-fonds... Analysant les facteurs historiques, Falla évoque la thèse byzantine, ainsi que la prestigieuse culture arabe de l'Andalousie. Et en conclusion il souligne le rôle essentiel joué par les Gitans. « En plus de l'élément liturgique byzantin et de l'élément arabe, il y a, dans le chant de la siguiriya, des formes et des caractères indépendants, d'une certaine façon, des chants sacrés primitifs chrétiens et de la musique des Maures de Grenade. D'où viennent-ils ? Des tribus gitanes qui s'établissent en Espagne au XVème siècle. Ce sont des tribus venues de l'Orient, qui apportent au chant andalou la nouvelle modalité qui constitue le Cante jondo ». Lorsque le musicien aborde sa démonstration technique pour souligner les analogies entre le flamenco et « les chants primitifs de l'Orient » il est uniquement question de l'Inde et des Gitans. Partis du nord-est de l'Inde (actuellement le Pakistan), les Gitans ont traversé l'Arménie et la Perse, puis sont arrivés en Turquie. Ensuite certains se sont dirigés vers les pays nordiques, tandis que d'autres sont descendus dans le sud pour arriver jusqu'en Espagne. L'arrivée des Gitans en Espagne peut être située en 1425 (date du premier sauf-conduit accordé par Alphonse V). En 1462, un deuxième document précise l'installation des gitans en Andalousie. Mais dès 1449 des mesures répressives sont exercées à l'encontre des gitans. Véritables boucs émissaires, accusés de tous les maux et endurant tous les châtiments, les Gitans portent le lourd fardeau d'une histoire aussi sombre que le cante jondo. Le flamenco est le fruit musical de leur cohabitation avec les Andalous. C'est grâce à la grande hospitalité des Andalous, à leur tolérance et à leur capacité d'intégration des étrangers que les gitans ont pu trouver une terre d'accueil propice aux mélanges culturels et musicaux. in «Flamenco attitudes» de Gabriel Sandoval


Un autre texte capital « Mundo y formas del cante flamenco » est rédigé par le poète cordouan Ricardo Molina et le chanteur Antonio Mairena publié en 1963 : « Le Cante est le fruit de l'intégration de divers éléments... le milieu dans lequel cette intégration s'est réalisée est celui des Gitans de la Basse-Andalousie... Les Gitans créent ou forgent le cante primitif… et ils le forgent avec des métaux en majorité andalous » En conclusion les Gitans, fiers de leur tradition et de leur sang, et les Andalous, jaloux de leurs racines, sont intimement liés dans l’élaboration mystérieuse du flamenco.

2) Les grandes étapes L’âge d’or du flamenco L’histoire du flamenco commence effectivement avec la grande époque des cafés cantantes, vers 1880, notamment avec l’ouverture du Café de Silverio par Silverio Franconetti (né à Séville en 1829, il s’imposa comme chanteur de flamenco dès 1865). C’est alors l’un des plus célèbres lieux de cante (chant flamenco), qui voit passer bon nombre des grandes figures de cette époque. Entre 1870 et 1900, de nombreux cafés cantantes s’ouvrent dans toutes les grandes villes d’Espagne. Cet essor déclenche un bouleversement radical dans l’histoire du flamenco. Désormais, ce n’est plus une exclusivité gitane : sorti de l’usage familial, le flamenco bénéficie d’une audience élargie et d’une évolution esthétique très nette, avec des artistes devenus professionnels. « En passant de la taverne au café, le genre gitan est devenu andalou et s’est transformé en ce que tout le monde appelle aujourd’hui flamenco. « Silverio » a créé le genre flamenco, mélange d’éléments gitans et andalous. » Antonio Machado « Demofilo » (1881)

Café cantante de l’époque

Silverio Franconetti

L’opera flamenca Les voix gitanes rauques, éraillées, laissent la place aux voix plus hautes des musiciens non gitans, plus adaptées aux prouesses vocales que l’opéra italien a mis à la mode. Le chant gitan était fait pour émouvoir, convaincre ; le nouveau public des cafés de cante souhaite entendre une musique plus agréable et plus conforme aux canons musicaux de l’époque. Ainsi apparaît l’opera flamenca*. Devenu spectacle, le flamenco ne se contente plus du seul chant (a palo seco*), ce qui va favoriser l’essor de la guitare flamenca, dont l’évolution se poursuit aujourd’hui encore. Et grâce à l’apparition de la scène, la danse prend de l’importance car elle se prête mieux à la communication avec le spectateur. Le cante jondo Au début des années 1920, des intellectuels et des artistes appellent à la renaissance de ce qu’ils estiment être l’une des plus pures expressions populaires espagnoles et andalouses : le flamenco. En 1922, le poète Federico Garcia Lorca et son ami Manuel de Falla organisent le concours de cante jondo à Grenade, réservé aux amateurs pour privilégier la pratique populaire.


Le jury se compose de Don Antonio Chacon, La Nina de los Peines, Ramon Montoya... Malgré la qualité décevante des artistes, cet événement inaugure le flamenco en tant qu’art moderne. Après la fin de la guerre de 1914-1918, de nombreux enregistrements phonographiques aux conditions acoustiques rudimentaires ont permis d’entendre toutes les subtilités du chant flamenco. Bien que les plus grands moments de flamenco surgissent rarement devant un micro… Le flamenco contemporain La guerre civile espagnole éclate en 1936. Et il faudra attendre les années 50 et l’opposition grandissante au franquisme pour que la recherche d’identité réveille l’âme flamenca. En 1954, on inaugure le premier tablao flamenco, qui rétablit le lien avec les cafés cantantes, et des chanteurs qui retournent à leurs racines. Le concours national de Cordoue de 1956 marque le début de l’ère contemporaine du flamenco avec une nouvelle génération d’artistes pleins de passion. Les festivals joueront aussi le rôle de tremplin pour tous les chanteurs, danseurs et guitaristes comme Camaron de la Isla, Paco de Lucia, Enrique Morente, Tomatito, Manuella Carrasco… Avec le disque et grâce aux moyens techniques, de nouveaux sons apparaissent ; et la diffusion s’élargit au monde entier. Le nouveau flamenco A partir des années 70, le flamenco traditionnel se détache des carcans de la tradition en se mélangeant à des courants musicaux du XXème siècle tels que la rumba, la pop, le jazz ou le rock pour y gagner une force et une créativité qui n’altèrent en rien son authenticité. Au contraire, la rencontre de tous ces courants musicaux va favoriser la naissance du flamenco moderne. Des artistes comme Camaron de la Isla, Enrique Morente et Paco de Lucia profitent de cette brèche. Avec le groupe Ketama, issu d’une vieille famille flamenca gitane, le flamenco rock prend toute sa dimension.

Enrique Morente

Paco de Lucia

Conclusion Le flamenco est devenu aujourd’hui un moyen d’expression direct et authentique pour la société andalouse, au même titre que le rock l’a été à ses débuts pour les Etats-Unis. Miles Davis a pu dire, en parlant du flamenco, qu’il « est l’équivalent espagnol du blues ». La tradition est devenue rébellion, la rébellion s’est faite tradition, le flamenco a évolué. Actuellement, on voit que le flamenco est bien vivant. « Ses sons noirs et son duende* n’ont pas fini d’envoûter les générations futures avec la même violence qu’ils possèdent encore la jeunesse d’aujourd’hui, pourtant nourrie d’autres sons et d’autres rythmes. » Bernard Leblon in « Flamenco »


III ) Les 3 visages du flamenco 1) Le chant Le chant : description, évolution Le chant flamenco n’est pas une pure récréation artistique. Il fut, bien au contraire dans un premier temps, un cri de souffrance et de peur mais aussi de délivrance et d’espoir. De plus, il est né de la rencontre d’un mode d’interprétation oriental et de traditions musicales occidentales. Et il change et se transforme chaque fois qu’un artiste recrée un cante en l’adaptant à sa voix, à sa personnalité, à son émotion, à son temps également.

Agujetas

Les chants du flamenco peuvent être rangés en 3 catégories : Les formes les plus profondes sont connues sous le nom de cante jondo (ou cante grande), alors que les formes relativement plus légères et frivoles sont nommées cante chico. Les formes intermédiaires sont appelées cante intermedio. De nombreux artistes de flamenco parmi les plus grands se sont spécialisés dans une forme unique. •

Le cante jondo, signifiant littéralement « chant profond » désigne les chants les plus primitifs du répertoire flamenco. Les textes sont le plus souvent très dramatiques et l'interprétation très expressive. Le cante jondo est d'abord représenté par les chants les plus anciens de la famille des tonas*, qui sont des chants sans instrument ni danse. Ensuite les chants accompagnés par la guitare les soleares, les seguiriyas*, tous les chants libres de la famille du fandango, et dans une moindre mesure certaines bulerias, lorsqu'elles sont interprétées de façon dramatique.

Miguel Poveda Manolo Caracol

Le cante chico est une union de la danse et du chant. C’est un art euphorique, gai et entraînant, nettement plus joyeux, que le cante jondo. Les thèmes abordés sont aussi optimistes que la mort, l’amour malheureux, le mal être, mais le chanteur accompagné de son guitariste parvient à enflammer son auditoire qui mêle ses applaudissements et ses cris à la performance du chanteur. Ces chants sont en fait le véritable aboutissement de l’évolution du flamenco. Par sa diversité et sa richesse textuelle et musicale, c’est l’image même d’un flamenco qui s’épanouit, plus vivant que jamais, et dont le style le plus sollicité reste la buleria.


Le cante intermedio est un juste milieu entre l’allégresse du cante chico et la tristesse du cante grande. On y trouve de nombreuses harmonies toutes issues de la longue et enrichissante occupation arabe en Andalousie. Ce sont essentiellement des chants andalous et non gitans. Comme le cante jondo, ils suivent une trajectoire plus intimiste, et on les retrouve dans les réunions familiales ou privées.

Les trois chants fondamentaux • La tona* : Considérée comme le plus ancien chant flamenco connu, issue de la forge, la tona n'a pas d'accompagnement de guitare, et son rythme évoque la cadence du marteau frappant l'enclume (martinete). En effet, les tonas ont généralement pour thème ou cadre les actions et travaux de la vie quotidienne. Les mélodies sont très nombreuses. Dans le folklore andalou, on retrouve plusieurs formes de tonadas, appelées « chants camperos » - par exemple, la vestia , ainsi appelée parce qu'elle était chantée par les paysans lorsqu'ils s'habillaient pour aller au village. Le peuple andalou a toujours chanté des tonadas en fonction des circonstances. Les voix gitanes, mauresques et mozarabes les ont chargées de marques orientales et les ont modelées pour donner naissance aux chants de base du flamenco. La copla de la tona est formée de quatre vers octosyllabiques. • La seguiriya* : Apparue à la fin du XVIIème siècle, la seguiriya est l'un des piliers du chant flamenco. Elle renferme toute la tragédie humaine, toute la solitude et le désespoir de l'homme face aux drames de la vie, à la mort. La seguiriya est un chant qui vient de l'intérieur, du plus profond de soi, de ce cœur d'où jaillissent les sentiments. Sa copla (strophe) se compose le plus souvent de quatre vers heptasyllabiques, parfois trois vers. Elle se distingue des autres coplas par son troisième vers, plus long. La danse qui l'accompagne est épurée, solennelle et majestueuse, composée de gestes lents. Elle évoque la précision et la détermination du toréador face au taureau quand s'engage le duel.

El Chocolate

Terremoto De Jerez


• La solea (au pluriel : soleares): Pour beaucoup, c'est la mère de tous les chants. C'est le troisième pilier du chant flamenco, imprégné du drame des gitans, de leur tragédie séculaire. Sa copla est formée de trois ou quatre vers octosyllabiques. La diversité des soleares est souvent due à leurs spécificités géographiques ou à leurs interprètes. D’autres chants lui sont apparentés comme les polos, les bulerias, les alboreas (chants de noce gitan) , ainsi que des chants ayant subi leur influence : les cantinas (originaires de Madrid), les alegrias, les romeras, les mirabras ou encore les caracoles ... La danse de la solea est superbe. Sommet de grâce et d'harmonie, elle est la danse flamenca féminine par excellence, au cours de laquelle les bras virevoltent et semblent s'envoler. Petit lexique du chant flamenco A palo seco : se dit des chants interprétés sans accompagnement. Duende : sorte d’état de transe provoqué par le flamenco sur le chanteur, danseur ou guitariste. Fandango : chant issu du folklore - en particulier andalou - qui a subi, très souvent, une attraction vers le flamenco. Toutes les provinces andalouses possèdent des fandangos. Opera flamenca : on désigne sous ce nom les spectacles, généralement organisés par des imprésarios professionnels, dans les années 20 et 30, et qui se déplaçaient en tournées dans les théâtres et arènes d’Espagne. On considère ce type de spectacle comme une dégénérescence du flamenco, en raison de l’utilisation de l’orchestre et du développement du cuplé. Seguiriya (ou siguiriya) : un des types (palos) fondamentaux du flamenco, caractérisé par des séquences rythmico-mélodiques à 12 temps, comme les soleares. Tonas : avec les romances, les tonas sont les chants flamencos les plus archaïques. On dit qu’il existait autrefois une trentaine de tonas, il n’en subsiste plus que trois.


2) La guitare flamenca Son ancêtre, la khitara, a été introduite dans la péninsule ibérique au IXème siècle par Zyriab, chanteur et musicien venu de Bagdad et installé à Cordoue. A l'époque les Maures dominaient la moitié sud de l'Espagne, c'est pourquoi on appelait cette guitare, la guitarra moresca. Au cours des siècles l'instrument connaît des transformations, et apparaît sous sa forme connue actuelle vers le XVème siècle. A cette époque la guitare avait des cordes doublées. Bien que voisine du luth, la guitare constitue une famille différente et leurs évolutions sont distinctes. La guitare espagnole acquiert sa sixième corde dans la deuxième moitié du XVIIIème. C'est grâce à deux espagnols que la guitare a véritablement pris son essor au XIX ème siècle : Antonio Torres et Francisco Tarrega ont cherché à trouver les bonnes dimensions de l’instrument, la disposition idéale des cordes. Torres deviendra le luthier le plus prisé pour la qualité sonore de ses guitares, et Tarrega l’un des plus grands virtuoses de l’instrument.

Francisco Tarrega

La guitare flamenca fait son apparition au milieu du XIX ème siècle. Vers 1860 le luthier d'Almería, Antonio Torres met au point le modèle flamenco. Il s’agissait d’obtenir un instrument moins onéreux, plus facilement transportable, et surtout assez puissant pour rivaliser avec la voix des chanteurs flamencos et les claquements de mains. La guitare flamenca est d'abord un instrument d'accompagnement du cante (le chant flamenco) et du baile (la danse flamenco) avant d'être aussi un instrument soliste. C’est dans le cadre des cafés de cante du milieu du XIXème que l’instrument va s’imposer peu à peu. Lutherie La guitare flamenca a la même forme qu'une guitare classique, mais elle est plus petite et plus légère. Le chevalet est plus bas, et la table est protégée des coups d'ongle par une plaque de frappe. Elle est fabriquée généralement en bois de cyprès espagnol, qui remplace l’acajou ou d’autres bois pour le fond et les éclisses*, la table d’harmonie restant en sapin dans tous les cas. La guitare flamenca est parfois appelée « blanca » en raison de la teinte du cyprès sur son dos et son éclisse, en plus de l'épicéa sur sa table d'harmonie. Elle peut être appelée flamenca « negra » si son éclisse et son dos sont en palissandre des Indes (marron foncé). Certaines de ses caractéristiques ont été déterminées, à l’origine, par des raisons économiques, pour adapter l'instrument à une clientèle moins fortunée, tandis que d'autres ont été conditionnées par les techniques particulières du jeu « flamenco ».


Jeu / Technique Parmi les caractères propres à la guitare flamenca, on reconnaît d'emblée la vigueur de l'attaque, la sonorité brillante, presque métallique, l'utilisation des syncopes et des silences, les coups frappés sur la table d'harmonie, l'orientalisme des gammes, la couleur insolite des accords et, le magnétisme puissant, la percussion envoûtante du compas*. Le jeu de la guitare (el toque) est l'art de toucher qui peut aller de la caresse la plus légère jusqu'aux coups : il peut l'écorcher de ses ongles, frapper du plat de la main la table de la caisse ou ses flancs, enrichissant ainsi le large éventail des percussions flamencas. Le jeu de la guitare flamenca est différent de celui de la guitare classique. La guitare flamenca est en bois de cyprès et peu profonde, ce qui donne un son sec qui se projette loin. Les cordes sont peu distantes du manche. Le tocaor les joue au-dessus à droite de la rosace, vers le bas, près du chevalet. C'est cet ensemble qui donne le « son flamenco ». Alors que le guitariste classique joue plus haut, à gauche de la rosace, le tocaor utilise en permanence son pouce comme base, il peut le faire buter comme un marteau et cela produit des sons percutants. Le pouce classique au contraire pince les cordes. La guitare flamenca repose sur la cuisse droite du tocaor, l'instrument est ainsi plus mobile, il peut suivre le baile. Au contraire la guitare classique repose sur la cuisse gauche, l'instrument est fermement tenu, calé entre les jambes. Les tonalités varient en fonction de la tessiture de voix du chanteur : le guitariste utilise dans ce cas une cejilla* pour s'accorder à la voix du chanteur. Les guitaristes de flamenco ont recours à tous les accords traditionnels, ainsi qu'à des cadences spécifiques au flamenco.

Les quatre rythmes fondamentaux sont ceux de la siguiriya, de la solea, du tango et de la buleria. Le jeu de la guitare flamenca a son vocabulaire : Les rasgueados sont les grands balayages bruyants, par la main entière, de toutes les cordes. Le trémolo est la répétition rapide et régulière des notes qui sont égrenées et donnent l'impression de caresse, de gouttes d'eau. Les gammes très rapidement données en fin de phrase, sont un trait qui font l'effet d'un éclair. Les falsettas sont les interventions de la guitare entre les périodes chantées, comblant le vide et réaffirmant le rythme.


Instrumentistes / interprètes On peut considérer que le premier guitariste de l'histoire du flamenco est El Planeta, qui s'accompagnait pour chanter. Il est considéré par la légende comme le premier chanteur et auteur de flamenco. Parmi les guitaristes les plus célèbres de la fin du XIX ème siècle et début du XXème siècle, on peut citer : José Patino Gonzalez, premier guitariste du Café de Silverio à Séville à jouer en solo et Antonio Perez, figure de premier plan des cafés cantantes. C'est à cette époque que vont naître les géants de la guitare flamenca, les grands tocaores. D'abord Ramon Montoya le plus grand, celui qui a accompagné les figures de légende, de Manuel Torre à La Nina de los peines. Il est considéré comme le plus pur guitariste flamenco du XX ème siècle. Il influencera des artistes comme Sabicas et Nino Ricardo. A partir des années 1950, Sabicas deviendra le maître qui élèvera le niveau technique du tocaor. Il dévoilera des trésors de virtuosité, et influencera toutes les générations à venir. Un autre musicien majeur de cette grande époque est Nino Ricardo. Celui qui a accompagné toutes les figures du cante entre les deux guerres, a développé l'improvisation inspirée et un grand style si personnel que Paco de Lucia le considère comme son maître. On peut citer également Pedro Soler, Moraito, Serranito, Mario Escudero… et Manolo Sanlucar, l’un des plus grands contributeurs à l’évolution de la guitare flamenca de cette seconde moitié du XXème siècle. La relève est donc bien assurée : un grand nombre de guitaristes de talent, parmi lesquels émergent quelques surdoués, qui ont déjà fait école. C'est le cas de Paco de Lucia qui marque véritablement une étape dans l'histoire de la guitare flamenca. A partir des années 1980 il devient le chef de file du flamenco. Depuis, la scène musicale du flamenco est florissante : des guitaristes remarquables avec la jeune génération représentée par Tomatito, Vicente Amigo, Gerardo Nunez, Juan Carmona….

Gerardo Nunez

Petit lexique de la guitare flamenca : Eclisse : pièce de bois réunissant la table d'harmonie au fond. Compas : mot employé, en espagnol, dans le sens de « mesure » musicale. Dans le langage flamenco il désigne le rythme particulier attaché à chaque type de chant. Cejilla : (mot espagnol pour « capodastre ») : petit instrument qui sert à faire un barré sur le manche de la guitare.


3) La danse Les origines La recherche des origines de la danse flamenca est tout aussi complexe que celle qui concerne le chant. Dans la danse flamenca actuelle on peut déceler au moins trois influences : • Orientale et gitane • Folklorique et populaire • Académique et « classique » L’influence orientale et gitane L’influence orientale – et plus spécialement indienne – est perceptible dans ce qu’on appelle le braceo (jeu de bras) de la danseuse, ainsi que dans certaines attitudes « figées » et une façon presque rituelle de marquer le rythme avec les pieds. En ce qui concerne l’influence gitane proprement dite, il faut se souvenir que, lors de leurs exhibitions professionnelles, du XVIème au XVIIIème siècle, les Gitans interprétaient les danses populaires locales : séguedilles (seguidillas), polvico, sarabande, fandangos, etc. En revisitant les danses du folklore andalou et en leur apportant leur touche personnelle, les danseuses gitanes ont en effet créé un style très individualiste. L’influence folklorique et populaire Cette influence est présente à toutes les époques, puisque c’est ce folklore traditionnel, ainsi que les chants et danses populaires, qui, dès l’origine, constituent le répertoire des musiciens et danseurs professionnels gitans. L’influence académique et « classique » Comme pour le cante, on va assister à la rencontre, puis à la fusion, de répertoires et de styles de danse presque diamétralement opposés, d’un côté une expression brutale et spontanée, presque « sauvage », issue d’une sorte de clandestinité artistique gitane, de l’autre, un courant traditionnel et populaire, remodelé au fil des siècles et devenu, depuis le XVIIIème presque académique. La véritable fusion va se réaliser, à partir de cette époque, dans les cafés cantantes, qui associent le folklore « académique » et le flamenco naissant, au milieu de variétés les plus diverses. En passant des tavernes aux scènes des cafés cantantes, la danse flamenca va évoluer notablement, en particulier parce que les planches permettent de mettre au point certaines techniques, comme le zapateado*, elles offrent davantage de place aux évolutions et rendent possible, entre autres, l’utilisation de la robe à traîne (bata de cola), qui n’apparaît qu’à ce moment-là. Ce n’est qu’au XIXème siècle que la danse est devenue partie intégrante du flamenco, lorsqu’elle s’est produite sur scène, tributaire et accompagnatrice du chant dans les premiers cafés cantantes.


Les caractéristiques Les développements scéniques actuels ne doivent pas faire oublier qu’il s’agit, au départ, d’une danse individuelle. Teresa Martinez de la Peña, danseuse, professeur de danse, et auteure de « Théorie et pratique de la danse flamenca », définit cet art comme une « danse introvertie ». Elle se pratique dans un espace réduit, sans grands déplacements ni sauts spectaculaires, avec des mouvements serrés et dirigés généralement vers le bas. Toutes ces caractéristiques opposent, évidemment, le baile flamenco à la danse classique européenne, extravertie et dirigée en sens inverse. Teresa Martinez de la Peña ajoute que la danse flamenca est une danse « abstraite », sans thème à illustrer ni action à imiter, dont les seuls guides sont les sentiments qui habitent l’interprète et sa capacité d’improvisation. Bien entendu avant de pouvoir improviser, l’interprète doit dominer parfaitement les attitudes et mouvements des bras et des mains, ainsi que les différentes techniques exécutées avec les pieds : punteado*, desplante*, zapateado.* Les attitudes et les techniques sont un peu différentes selon qu’il s’agit d’une danse masculine ou féminine. D’une façon générale, la première privilégie le zapateado et la seconde le braceo*, bien que les choses aient beaucoup évolué dans ce domaine.

Au sein de la danse flamenca on distingue la danse « gitane » et la danse « andalouse ». Les danses plus « gitanes » vont privilégier les desplantes et les mouvements violents, la passion, l’énergie vitale, l’exubérance et le déchaînement du rythme, alors que les danses plus « andalouses » donneront la préférence aux punteados, aux mouvements lents et harmonieux, aux déplacements, aux figures, à l’élégance et à la grâce. La danse gitane exprimerait plus spontanément et extérioriserait plus violemment les sentiments ; ce qui prime serait moins la maîtrise technique que l’affirmation de ce que l’artiste a en elle. L’interprétation andalouse apparaîtrait plus travaillée et mieux agencée du point de vue visuel. Exécuté individuellement, le flamenco est l’expression visuelle des sentiments ressentis par l’artiste, ainsi que sa faculté d’improvisation. La synthèse des deux styles se réalisera dans les danses considérées comme les plus flamencas, comme les siguiriyas ou les soleares. Quelques exemples de chants accompagnés de danse :


Buleria (d’origine gitane) : C'est l'un des cantes « festeros », c'est à dire festifs les plus connus. La bulería est un chant très rythmique ; il appelle la danse et s'accompagne de palmas. • Garrotin : Il a été rendu populaire par Carmen Amaya. Le nom de ce chant viendrait du mot Garote qui signifie « Gourdin ». La danse qui l'accompagne est de caractère plutôt festif. • Siguiriya (d’origine gitane) : La seguirilla ou siguiriya appartient au cante jondo*. Ce palo* est apparu à la fin du XVIIIème siècle, il est la quintessence du flamenco. C'est un chant qui vient de l'intérieur, du plus profond de soi, de ce cœur d'où jaillissent les sentiments. La danse qui l'accompagne est sobre, épurée, pathétique, majestueuse. Le premier bailaor qui défendait ce style fut Vicente Escudero et, plus tard, Pilar Lopez qui introduisit dans ce baile les castagnettes. C'est le baile le plus représentatif du flamenco : il exprime toute la tragédie humaine, la solitude, l'angoisse et le désespoir de l'homme. C'est une danse solennelle et sans fioriture.

Vicente Escudero

Pilar Lopez

Solea (d’origine gitane) : Cante qui vient du mot « Soledad » qui signifie solitude. C'est le chant basique du Grand Flamenco. Il dépeint des sentiments profonds. La danse qui l'accompagne est superbe ; sommet de grâce et d'harmonie, c’est la danse féminine par excellence.

Petit lexique de la danse flamenca Bailaor : danseur qui interprète de la danse flamenca – ou de la danse populaire – par opposition au danseur classique dit bailarín. Braceo : jeu de bras. Cante jondo : en andalou « chant profond ». Euphémisme proposé par Manuel de Falla et Federico García Lorca pour remplacer le mot « flamenco », devenu trop péjoratif au début du siècle. Desplante : série de coups de pieds frappés très fort avec les pieds sur le sol, exécutée pour terminer une séquence de la danse. Palo : on appelle ainsi chaque type de cante, par opposition aux styles ou variantes individuelles et locales. Punteado : jeu de pieds lié et léger, effectué sur les falsetas (séquences mélodiques) de la guitare. Zapateado : technique de danse qui consiste à frapper le sol rythmiquement avec la pointe et le talon des chaussures.

IV ) Figures et légendes


1) Le chant Antonio Chacón (1869-1929) connaît ses premiers succès à Cadix. Il fut le trait d’union entre 2 époques essentielles du flamenco, l’âge d’or et l’époque théâtrale. Sa voix de fausset, haute et fine, était totalement inadaptée aux chants de type gitan, mais il sut la mettre à profit dans le répertoire le plus andalou. En 1978, Enrique Morente lui rendit hommage. Pepe de la Matrona (1887-1980) chante très jeune dans les fêtes privées. C’était la mémoire d’un siècle de cante. Son dernier récital a lieu en 1975 à Madrid. Chanteur complet, il possédait une voix flamenca puissante. La Nina de los Peines (1890-1969) reste l'une des plus grandes voix, un génie incontesté, créatrice de nouveaux cantes. Pendant la guerre civile, elle s'exila en Argentine, puis enregistra de nombreux disques, dans tous les genres, avec une authenticité absolue. Sa voix particulière (« ce timbre de pur métal », disait Lorca) se caractérise par une attaque forte du chant et un sens du rythme inouï. Elle débute ses premiers enregistrements discographiques en compagnie de Ramon Montoya. Elle laissera l’héritage sonore le plus important du flamenco.

Chacón los Peines

Antonio La Nina de

Pepe Marchena (19031976) connaît un succès précoce : en 1918, il apparaît comme chanteur seul sur scène, à quinze ans. Les accents suaves de sa voix de fausset accompagnent une nouvelle étape au flamenco. Les styles traditionnels s’effacent devant la domination des fandangos, l’invasion des chants d’origine hispano-américaine, et la dérive vers le cuplé accompagné d’un orchestre, l’opera flamenca, au sentimentalisme larmoyant. Manolo Caracol (1909-1973) devient célèbre très jeune car il a remporté le premier prix du concours de Cante Jondo en 1922. Avec sa voix rauque et pathétique, il excelle dans les martinetes, les siguiriyas et les soleares.

la

Pepe Marchena Matrona

Pepe de

El Chocolate (1931-2005) chante dès l'âge de neuf ans et s'impose dans les festivals de Cante Jondo. Son timbre de voix nasal et vibrant est particulièrement adapté aux chants les plus gitans (martinetes, seguiriyas, soleares, bulerias...). Chanteur d’instinct, gitan plus que gitan, il irradiait de violence et d’élégance.


Terremoto de Jerez (1936-1981) débute comme danseur et ce n'est qu'à partir des années cinquante qu'il se produit comme chanteur. Et on découvre un chanteur très flamenco, une voix brisée et un duende unique. C’est le plus grand cantaor gitan de ce demi-siècle avec Camaron de la Isla. Enrique Morente (1942-2010) a intéressé Pepe de la Matrona dès son jeune âge par « son respect et sa capacité d'apprentissage ». Après des premiers albums strictement classiques, montrant une connaissance approfondie du flamenco traditionnel, le chanteur innovera (messes flamencas). Peu apprécié du public traditionaliste, la plupart des fans de flamenco et les critiques reconnaissent l'intelligence et l'engagement artistiques profonds de Morente : « Il prend les bases communes parfaitement définies par la tradition, et construit du nouveau sur ces dernières avec tout le potentiel imaginable du flamenco ». El Camaron de la Isla (1950-1992) est une légende, déchirée entre la rage de vivre et le désespoir le plus total. Il servit de modèle à de nombreux chanteurs : la profondeur de sa voix terriblement gitane, créait le mystère et la magie. Mélangeant flamenco archaïque et autres courants musicaux, il représente une étape de l'histoire du flamenco qui a favorisé l'émergence du nouveau flamenco.

El Camaron de la Isla

El Chocolate

Carmen Linares (1951) vit à Madrid depuis 1965 où elle a développé sa carrière. De son style très personnel, elle embrasse un large éventail de chants flamenco, des solennels au cante jondo. Une voix puissante, une expression chaude et pleine de sensibilité. Ines Bacan (1952) est issue d'une grande famille d'artistes. Mais elle ne vint au chant que très tard (vers 35 ans). Elle accompagne son frère Pedro, grand guitariste, de sa voix déchirante pleine d'incertitude et de retenue. Son chant semble ne pas finir, et transmet une profonde émotion.

Carmen Linares

2) La guitare Ramon Montoya (1879-1948)

Ines Bacan


Ce « roi » de la guitare flamenca a accompagné les plus grands chanteurs, tout en s’affirmant comme un des pionniers du toque (« jeu ») en solo. Il acquiert ses lettres de noblesse grâce à l'appui d'intellectuels comme le poète Federico Garcia Lorca et le compositeur Manuel de Falla. D'origine gitane Ramon Montoya est né dans un village près de Tolède. Il fréquente dès son enfance le Café de la Marina à Madrid, observant sans cesse les doigts des grands guitaristes de la fin du siècle, et recevant leurs conseils. L'illumination vient lorsque le jeune Montoya rencontre le guitariste classique le plus important de cette époque Miguel Llobet. Autodidacte, il commence sa carrière professionnelle à 14 ans, dans les cafés cantantes madrilènes. Celui qui ne sut jamais lire la musique osa créer une technique à lui, faisant avec son génie créateur la synthèse de tout ce qu'il voyait et écoutait. Il fut l'illustre accompagnateur d'Antonio Chacon et de La Nina de los peines. Il accèdera à la notoriété en étant le premier guitariste à faire des récitals solistes, et il enregistrera plusieurs disques comme accompagnateur et soliste. Il est considéré comme l'inventeur de la technique moderne de la guitare flamenca et influença des artistes comme Sabicas et Nino Ricardo. Nino Ricardo (1904-1972) Nino Ricardo est avant tout un très grand mélodiste. Né à Séville, il débute à l'âge de 14 ans, et apprend son métier, par l’exemple des professionnels qu’il côtoie dans des cafés cantantes de Séville. Jusque dans les années 1970, il est la référence majeure des guitaristes flamencos, à commencer par Manolo Sánlucar, Paco de Lucía, ... A ce titre il peut être considéré comme le grand initiateur de la guitare flamenca contemporaine. Il doit cette situation privilégiée à son génie de compositeur mais aussi à des circonstances historiques particulières : au cours des années 1930-1950, quelques grands artistes qui furent ses contemporains avaient émigré vers le continent américain (Sabicas, Estebán de Sánlucar, et Mario Escudero) ou vers la Grande-Bretagne (Pepe Martinez). Nino Ricardo participe à de nombreuses tournées d’opera flamenca (avec La Niña de los Peines, Manuel Centeno) et travaille pour les spectacles de Lola Flores, Concha Piquer... Il fut un guitariste capable de composer des « tubes » pour ce type de spectacle autant que d’accompagner les grands cantaores classiques. Sa discographie en tant qu’accompagnateur est l’une des plus abondantes de l’histoire du flamenco, initiée en 1927 par une série d’enregistrements avec La Niña de los Peines. Niño Ricardo est l’un des fondateurs d’une « école sévillane », plus attachée au toque a compás, et a cuerda pelá (jeu monodique), à laquelle son génie mélodique donnera un cachet inimitable. On lui doit de nombreuses techniques devenues rapidement usuelles pour tous les guitaristes flamencos, notamment en ce qui concerne les arpèges et les trémolos.

Ramon Montoya

Sabicas (1912-1990)

Nino Ricardo


Agustin Castellon Campos «Sabicas»est l’un des plus extraordinaires guitaristes et compositeurs de l’histoire du flamenco. Il a passé la plus grande partie de sa vie en Amérique. C’est sans doute ce long exil qui explique que Sabicas ait été le premier tocaor à se consacrer essentiellement au concert soliste. D'origine gitane, Sabicas est né à Pampelune. A l'âge de dix ans, il donne son premier concert. Il commence alors une carrière professionnelle classique, jouant dans les hauts-lieux flamencos de la capitale (Villa Rosa). Il devient fin 1920-1930 l’un des guitaristes les plus sollicités pour accompagner les grands noms du cante et du baile. Pendant cette période, son style apparaît nettement marqué par l’influence de ses aînés dans la course à la virtuosité : Luis Molina, Manolo de Huelva, et bien sûr Ramón Montoya pour le jeu soliste. En 1936, il est le premier guitariste de la troupe de Carmen Amaya, qu’il suit en tournée en Amérique. A partir de cette date, l’essentiel de sa carrière se déroule sur le continent américain. Après Buenos Aires, et Mexico, il s'installe à New York à partir de 1955. Au cours des années 1950-1970, ses enregistrements se succèdent à un rythme effréné. A New York, il se lie d’amitié avec Mario Escudero avec qui il enregistre de nombreux titres et encourage Paco de Lucia à développer son propre jeu. Ce dernier dira d'ailleurs de lui : « Avec Sabicas, j'ai découvert une façon de jouer que je n'avais jamais entendu auparavant, un style que j’ai mêlé à mon propre apprentissage pour en faire le mien » Sabicas fut ainsi la première grande star internationale de la guitare flamenca. Manolo Sanlucar (1943) Compositeur, concertiste et guitariste flamenco, avec Paco de Lucía et Serranito, il a contribué à favoriser l’évolution de la guitare flamenca. Manuel Muñoz Alcón, alias Manolo Sanlucar, né à Sanlúcar de Barrameda (Cadix), est introduit dans le monde de la guitare flamenca par son père dès l’âge de 7 ans. Après une formation aux côtés de Javier Molina, il fait ses débuts en 1957 au sein de la compagnie de Pepe Marchena. Sa prestation à l’Ateneo de Madrid en 1972 le consacrera définitivement parmi les plus grands guitaristes du pays. Son style, entre pureté des racines et avant-garde, est une recherche permanente de fusion entre le flamenco et la musique symphonique.

Sabicas Manolo Sanlucar

Paco de Lucia (1947)


La guitare flamenca moderne ne serait pas ce qu'elle est sans la révolution qu'apporta ce musicien de génie. Son invention stylistique et technique fait de son œuvre actuelle une musique d'avantgarde. Paco de Lucia de son vrai nom Francisco Sanchez Gomez est né à Algésiras (province de Cadix). Son père, lui-même guitariste, lui donne ses première leçons dès l’âge de 5 ans. Et à 12 ans, il participe avec son frère à un concours d'art flamenco, et remporte le prix spécial. Il enregistre en 1965 son premier disque « Dos Guitarras Flamencas ». Mais c'est en 1975 avec l'album « Fuente y Caudal » où il intègre à son jeu des techniques d'improvisation nouvelles, et surtout avec « Rumba Entre Dos Aguas » (1976), qu'il fait passer la guitare flamenca du statut de simple instrument d'accompagnement à celui de phénomène culturel planétaire. Paco de Lucia jette les bases du flamenco le plus contemporain et accumule les chefs-d'œuvres : « Almoraima », disque sur lequel il surpasse ce qu'avaient pu produire avant lui ses maîtres vénérés, Nino Ricardo et Sabicas ; « Siroco » magnifique hommage au flamenco, mélodique et harmonieux, sont autant de repères incontournables prouvant le génie révolutionnaire de Paco de Lucia. Sans jamais oublier son univers musical d'origine, il s'est associé à l'enregistrement de 10 albums de la grande figure du chant flamenco, Camaron de la Isla. Sa façon toujours renouvelée d'engager sa musique dans un dialogue constant, aussi bien avec les rythmes brésiliens, que le jazz ( Larry Coryell et Chick Corea, Al Di Meola et John McLaughlin avec lesquels il enregistre « Friday night in San Francisco »), ou encore la musique classique de ses illustres compatriotes Albeniz, Falla ou Rodrigo,…Tout cela montre son insatiable curiosité et la diversité de ses goûts musicaux.


3) La danse Carmen Amaya Fille du tocaor (guitariste) El Chino, Carmen Amaya (1913-1963) a incarné l’anti-académisme et s’est démarquée par sa danse énergique et ses gestes vifs. Elle a commencé à se produire dès son plus jeune âge (six ans) dans un restaurant de Barcelone, avant d’entamer une carrière internationale, notamment en France, au Music-hall Palace, puis à Madrid. Avec son style épuré et énergique, elle révolutionna la danse flamenca. Elle mit particulièrement en valeur les zapateados dans la danse féminine, qui se centrait jusqu'alors dans les mouvements des bras. Elle fut aussi la première danseuse de flamenco à s'habiller en pantalons pour exécuter ses chorégraphies. Bien qu'elle soit surtout connue comme danseuse, elle possédait également une voix remarquable et pleine de nuances. Elle chantait ainsi dans ses spectacles et enregistra plusieurs disques. Pour accompagner ses numéros de danse, elle jouait souvent des castagnettes, instrument qu’elle maîtrisait également. Grâce à la précision, au rythme et à l’élégance de sa danse, elle est considérée comme l’une des plus importantes danseuses de flamenco de tous les temps. Antonio Gades Né en 1936 dans la province d’Alicante, il a d’abord hésité entre le flamenco et une carrière dans la tauromachie. Il s’est finalement décidé à embrasser le baile et a rejoint l’académie de La Palitos. En 1952, il a intégré la compagnie de Pilar Lopez et s’est imposé rapidement comme premier danseur, jusqu’en 1961. Monté à Paris pour suivre des cours de chorégraphie, il y a rencontré Vicente Escudero, danseur autodidacte et artiste flamenco complet. Il a fondé une troupe avec laquelle il a parcouru le monde, avant de devenir directeur du Ballet National espagnol entre 1979 et 1980. Antonio Gades a profondément rénové la danse flamenca masculine et a ouvert la voie à toutes sortes d’innovations et de tendances. Il a participé à trois œuvres du réalisateur de cinéma Carlos Saura – « Bodas de sangre », « Carmen » et « El Amor brujo » –, faisant ainsi connaître le flamenco dans le monde entier.

Carmen Amaya

Antonio Gades


Mario Maya Le gitan de Grenade (bien qu’il soit né à Cordoue, en 1937), est un autre chef de file. Sa carrière, ponctuée de tournées à travers le monde et de spectacles avec des partenaires prestigieuses (La Chunga, Maria Baena…), est liée à la thématique des persécutions subies par les gitans, qu’il a mises en scène dans plusieurs créations. Ses chorégraphies n’ont pas toujours fait l’unanimité, car Mario Maya y intégrait les enseignements des maîtres américains de la danse contemporaine (il a vécu quelque temps aux Etats-Unis), mais son baile a toujours ému par son extrême expressivité. Ce virtuose perfectionniste a reçu de nombreuses récompenses (premier prix de danse et de chorégraphie en 1976 pour son Trio de Madrid, premier prix national de danse de la Chaire de flamencologie de Jerez en 1977, médaille d’Andalousie en 1986…). Il a trouvé une relève de talent en la personne de sa fille, la danseuse Belen Maya : http://www.telerama.fr/art/le-reel-loreal-the-real,93037.php Cristina Hoyos Née à Séville en 1946, elle a été première danseuse de la compagnie d’Antonio Gades de 1968 à 1988 et a participé à ses grandes créations, comme interprète et chorégraphe, propulsant avec lui la danse flamenca sur le devant de la scène mondiale. Après la dissolution de sa troupe (1975), Gades l’a appelée à ses côtés au Ballet National espagnol. Elle a participé avec lui aux films de Carlos Saura. Plus tard, Cristina Hoyos a fondé sa propre compagnie et monté son premier spectacle, « Ritmo flamenco », à Paris. Elle continue de présenter des spectacles où ses mouvements de bras, son compas à couper au couteau, l’harmonie de sa gestuelle ne sont pas sans évoquer l’art et la manière des anciennes danseuses andalouses.

Mario Maya

Cristina Hoyos


V ) Quelques figures montantes 1) Parmi les chanteurs et chanteuses Miguel Poveda Miguel Ángel Poveda León naît en 1973 à Badalona (Catalogne). Le jeune homme commence à chanter dans des cercles flamencos en Catalogne en 1988. Devant le succès rencontré en amateur, il songe vite à devenir professionnel et surtout veut conquérir la véritable "afición flamenca" en Andalousie même. Les débuts sont difficiles, mais en conjuguant parfaitement tradition et modernité, Miguel Poveda finit s’imposer. En 1993, il obtient sa consécration avec l’obtention du prix le plus recherché du monde flamenco, la « Lámpara Minera ». Son premier disque, « Viento del Este » sort en 1995 pour confirmer son entrée parmi les valeurs montantes du nouveau flamenco. « Suena Flamenco » en 1998, ainsi que ses nombreux spectacles et tournées font de Miguel Poveda un artiste reconnu internationalement. Hormis l'Espagne, il est une star dans tout le monde hispanique. Il a collaboré avec des artistes de renom comme Santiago Auserón, Raphael, Enrique Morente, Tomatito, Antonio Carmona ou Martirio, entre autres. De même, il a participé à plusieurs films avec des réalisateurs tels que Bigas Luna, Carlos Saura, Nicolas Klotz et Pedro Almodóvar. Diego Amador Auteur, compositeur, chanteur, guitariste et pianiste espagnol, Diego Amador est le frère cadet de Raimundo et Rafael Amador du célèbre groupe Pata Negra. Il est né à Séville en 1973 dans une famille gitane de grande tradition flamenca. Son parcours musical n'est pas du tout académique. Elevé dans une famille de guitaristes, son premier instrument fut tout naturellement la guitare. Néanmoins, il s’intéresse à d’autres instruments comme la basse ou le piano. Il accompagne des personnalités flamencas et intègre bientôt le sextet du légendaire Tomatito. Diego Amador collabore ensuite avec des maestros internationaux tels Larry Coryell, Biréli Lagrène ou le saxophoniste Jerry Gonzalez. Sa carrière solo démarre véritablement lorsqu’il invente, en pur autodidacte, une manière unique de faire sonner son piano comme une guitare de flamenco moderne. Il utilise pour cela des effets rythmiques et harmoniques traditionnels gitans. « Río de los canasteros » est le 3ème disque solo de Diego Amador. Avec cet album, il a reçu le « Award » du meilleur album instrumental. Cet opus témoigne une nouvelle fois du talent vocal et musical de Diego. En effet, il chante magnifiquement et il utilise différents instruments qu'il maîtrise parfaitement : piano, guitare et basse. Tangos, bulerías, fandangos, tientos et rumbas sont quelques uns des palos qu'il interprète, accompagné par des artistes tels que Raimundo Amador, Tomatito, Carles Benavent et Tino di Geraldo. En 2008 il a été primé à la Biennale de Séville du prix « Giraldillo » du meilleur pianiste de flamenco, ex-aequo avec Dorantes.


Miguel Poveda

Diego Amador

Estrella Morente Née en 1980, c’est une chanteuse de flamenco issue de la famille gitane Morente, originaire de Granada. Elle est mariée avec le matador de toros de Malaga Javier Conde. Son père, le chanteur Enrique Morente, et sa mère, la danseuse Aurora Carbonell, lui ont transmis dès l'enfance l'essence du flamenco. À l’âge de huit ans, elle participe à un premier enregistrement, accompagnée à la guitare par Sabicas. Elle collabore ensuite avec son père, chantant sur plusieurs de ses disques dont « Omega » en 1996. En 2001, son premier disque personnel, « Mi cante y un poema », est un succès populaire qui lui permet de participer à plusieurs festivals, de la biennale de Séville au festival de guitare de Barcelone et au Festival international de musique et de danse de Grenade. Elle obtient un disque de platine pour ce premier enregistrement et un disque d'or pour l’album « Calle del aire ». Au cinéma, elle participe à la bande sonore du film « Buñuel et la Table du Roi Salomon » de Carlos Saura, où elle chante « Los cuatro muleros », et à celle de « Volver » de Pedro Almodóvar, où elle prête sa voix à Penélope Cruz pour l'interprétation de la chanson titre. Elle participe aussi au film d'animation « Chico et Rita ». « Mujeres », sorti en 2006, est un hommage aux grandes voix féminines d'Espagne et d'ailleurs.

Estrella Morente

Parmi ces chanteurs et chanteuses qui continuent à faire vivre le flamenco on pourrait également citer Diego el Cigala, Rosario de la Tremendita…

2) Parmi les guitaristes Vicente Amigo Compositeur et guitariste espagnol né en 1967 à Guadalcanal (Andalousie), il est considéré comme l'un des plus grands virtuoses de la guitare flamenca contemporaine. Il passe son enfance à Cordoue (Andalousie) où il fait ses débuts de guitariste vers l'âge de 8 ans. Très vite repéré par ses enseignants, il intègre le groupe du maître Manolo Sanlúcar auprès duquel il restera cinq ans premier guitariste et où il développera sa virtuosité hors du commun.


En deux ans, il remporte trois des principaux concours de guitare flamenca : • 1988 : 1er prix du concours international de guitare flamenca de Badajoz. • 1988 : 1er prix du concours national del cante de las minas de la Union • 1989 : prix Ramón Montoya au XIIème concours national de Arte flamenco de Córdoba Interprète et compositeur, ses albums sont des chefs-d'œuvre de virtuosité et de technicité. Son originalité tient dans son style très aérien et ses thèmes accessibles à l'oreille profane. Néanmoins, il reste flamenco dans le son et ses rythmes en utilisant des compas traditionnels. Son album « Poeta » paru en 1997, rend hommage au poète Rafael Alberti. Sur cet album, il est accompagné par l'orchestre symphonique de Cordoue. Il a joué avec El Pélé, José Mercé, Camarón de la Isla, Carmen Linares, Khaled, et d'autres artistes. Juan Carmona Guitariste français de flamenco, il est né à Lyon en 1963. Parti s'installer en Andalousie durant sa jeunesse, il remporte plusieurs concours internationaux de guitare. Sa carrière discographique l'amène à se produire à travers le monde. Plusieurs de ses albums sont nommés aux Latin Grammy Awards dans la catégorie « meilleur album flamenco ». Juan Carmona s'initie à la guitare flamenca à l'âge de 10 ans et donne son premier récital à Marseille en 1978. Il séjourne durant une dizaine d'années à Jerez de la Frontera, en Andalousie, où il parfait sa connaissance de la culture flamenca. Il accompagne des chanteurs comme Agujetas et Duquende, et enregistre entre autres avec Chano Domínguez. En 1988, Juan Carmona remporte le grand prix du concours international de guitare de Jerez de la Frontera. L'année suivante, le guitariste Manolo Sanlúcar lui remet le diplôme de la fondation flamenca de Jerez. Il remporte le concours Paco de Lucía de Madrid en 1994. En 1996, Juan Carmona débute sa carrière solo avec l'album « Borboreo », dédié à la ville de Jerez et enregistré sous la direction musicale d'Isidro Muñoz. La même année, il accompagne José Mendez et Moraíto Chico sur l'album « Entre dos barrios ». Ses deux albums suivants, « Orillas » et « Sinfonica Flamenca », sont nommés aux Latin Grammy Awards dans la catégorie « meilleur album flamenco », respectivement en 2003 et 2007. Depuis 2003, il enseigne le flamenco au Conservatoire régional de La Garde près de Toulon.

Juan Carmona Vicente Amigo


Tomatito José Fernández Torres est natif d'Almeria (Andalousie) où il naît le 20 août 1958. Il est le fils et le neveu de guitaristes de flamenco tous deux surnommés « El Tomate », il devient logiquement Tomatito (le petit de « Tomate ») dès qu'il touche sa première guitare à l'âge de dix ans. Elève et accompagnateur de Paco de Lucia dans les années 70, Tomatito assure ensuite la relève de celui-ci auprès de Camarón de la Isla à partir de 1979. La rencontre entre les deux hommes fait des étincelles avec l'album « La Leyenda del Tiempo » qui lance le flamenco rock. Cette exceptionnelle complicité humaine et artistique se poursuit jusqu'au décès de Camarón de la Isla en 1992. Tomatito prend son envol avec ses albums « Rosas del Amor » (1987) et surtout « Barrio Negro » en 1991, véritable manifeste du nuevo flamenco. Virtuose reconnu bien au-delà du flamenco, Tomatito apporte son style à des artistes comme Frank Sinatra, Elton John, John McLaughlin, Mecano ou Larry Corryel. Il ne s'éloigne cependant jamais trop d'une musique qui coule littéralement dans ses veines et collabore en 1993 avec le chanteur Duquende pour « Duquende y la Guitarra ». Après « Guitarra Gitana » en 1997, Tomatito débute une nouvelle collaboration, cette fois avec le pianiste de latin jazz Michel Camilo pour « Spain » en 2000. « Paseo De Los Castaños » (2001), et « Aguadulce » (2004) restent sagement dans son registre habituel. Tomatito revient au latin jazz avec « Spain Again », de nouveau avec le Dominicain Michel Camilo. Tomatito enregistre en 2010 avec l'Orchestre National d'Espagne et le chef catalan Josep Pons, « Sonanta Suite » ou la rencontre du flamenco et de l'inspiration classique espagnole.

Tomatito

Parmi ces guitaristes on pourrait également citer Manolo Franco, Rafael Riqueni, Moraito Chico….


3) Parmi les danseurs et danseuses Sara Baras Née à San Fernando dans la Province de Cadix le 25 avril 1971. Elle commence la danse à l'âge de huit ans dans l'école fondée par sa mère. À 15 ans, Sara Baras fait ses premiers pas sur scène, et c'est à 18 ans qu'elle se voit remettre par la télévision espagnole le premier prix du concours Gente Joven réservé aux jeunes talents. En 1989, elle intègre la compagnie Gitanos de Jerez de Manuel Morao avec laquelle elle obtient la reconnaissance nationale et internationale. L'année suivante elle collabore avec le chanteur Enrique Morente et la compagnie de Paco Pena à l'occasion d'une tournée européenne. L'année 1995 est marquée par une nouvelle tournée de six mois en Chine, en Corée du Sud et au Japon. En mai 1996, Merche Esmeralda l'invite à participer à son spectacle « Mujeres » et à la suite du succès rencontré en Espagne, Antonio Canales lui propose de danser dans son nouveau spectacle « Gitano ». Elle fonde sa propre compagnie, le Ballet Flamenco Sara Baras en 1997. Sa première chorégraphie, « Sensaciones », est créée par sa compagnie à Murcia en avril 1998. Elle continue de danser et elle a d’ailleurs « enflammée » la scène du Théâtre des Champs Elysées en décembre dernier avec « La Pepa », son dernier spectacle de flamenco. Eva Yerbabuena Dès son plus jeune âge, cette artiste a fait de la danse sa raison d'être à force de ténacité, de conviction et de passion. Eva María Garrido, ou Eva Yerbabuena de son nom d’artiste, naît à Francfort en 1970. Elle a suivi les cours du maître Mario Maya et a dansé très jeune (12 ans !) dans la compagnie de Rafael Aguilar. Puis elle danse également dans la compagnie de Paco Moyano, et avec des danseurs célèbres comme Javier Latorre et Javier Barón. Elle est désormais l'une des plus brillantes danseuses de flamenco, car sa danse sait toucher à l'émotion dans ce qu'elle a de plus vibrant, aux sentiments les plus profonds. C'est son passage aux Abesses (Paris) en 2000 qui révèle son talent au public français. Elle a reçu le Prix national de la danse 2001 et le Prix flamenco Hoy 2001 (meilleure Danseuse de l'année). Mais elle est également reconnue à la Biennale de flamenco de Séville (en 2002), avec un Prix national de danse, pour « Flamenco de la Cava ». Depuis elle continue de sillonner l'Europe, avec des spectacles comme « 5 Mujeres 5 ».

Sara Baras

Eva Yerbabuena

Parmi ces danseurs et danseuses on pourrait également évoquer Manuela Carrasco, Joaquin Cortes, Belen Maya…


VI ) Discographie et bibliographie sélectives •

1) Sélection de CD et DVD disponibles à l’espace musique

Anthologies

Beginner’s

guide to flamenco – Nascente, 2012 Cette compilation célèbre le flamenco de toujours, et montre sa vitalité. Le flamenco traditionnel, avec guitare, voix, frappes de pied et claquements de mains, côtoie des fusions avec d’autres styles musicaux. Flûte, piano et accordéon, rock et jazz renouvellent cette musique authentique avec bonheur. Tout le charme de ce panorama réside dans sa diversité et sa richesse, la mise en valeur de tous ces talents. Un enchantement !

El triangulo del flamenco – Winter & Winter, 2012 Cet album nous emmène « dans les rues, places, bars et maisons privées où vit le flamenco ». Stefan Winter s’est rendu en Andalousie « dans le but de trouver des chansons authentiques, pleines d'émotion, de sensualité et d'intensité ». L’album s’ouvre avec un très beau morceau aux sons de la vielle et d’instruments à percussion. Puis des voix s’élèvent, nous sommes au cœur du flamenco le plus vrai, le plus spontané… Un très bel hommage à cette musique !

Arte flamenco : l’âge d’or du cante – Mandala, 2004

Interprètes  Amador Diego « Rio de los canasteros » - World Village, 2008  Amigo Vicente « De mi corazon al aire » - Sony, 1991  Bork Detlev « Between classical & flamenco » - Christophorous, 2005 La guitare et l'Espagne sont inextricablement liés depuis l'apparition de cet instrument apporté par les Maures au Xème siècle. Inspirant aussi bien la mélancolie que la joie extrême, la guitare semble être le miroir de l'âme espagnole. Ce disque rassemble des oeuvres entre le XVIIIème et le XXème siècle interprétées par le guitariste Detlev Bork. Un bel enregistrement qui nous fait découvrir le rapport étroit entre le répertoire classique et le flamenco.  Carmona Juan « El sentido del aire » - Chant du Monde, 2010 D’ascendance andalouse, « El gitano frances » est né à Lyon, et sa guitare ne le quitte plus dès l’age de10 ans. Virtuose et élégant, son flamenco est limpide et créatif. Juan Carmona croise les harmonies d’autres univers musicaux comme le jazz (Bireli Lagrène), les musiques classique (Landini) ou indienne, ouzbek… Et l’album foisonne de rythmes, de chaleur et de beauté.


Une merveille de créativité qui vous fera aimer le flamenco.  Chicuelo Juan Gomez « Complices » - Harmonia Mundi, 2004  De la Isla Camaron « Camaron de La Isla » - Le Chant du Monde, 1990  De Lucia Paco « Flamenco virtuoso » - Universal, 2008 De son vrai nom Francisco Sanchez Gomez, Paco de Lucia est considéré comme l'un des plus grands guitaristes flamenco au monde. Né à Algeciras en Andalousie, il s'est fait connaître grâce à son jeu d'une grande virtuosité. La compilation « Flamenco virtuoso » fait le tour de sa carrière entre 1965 et 1998 en 17 titres, en solo et aussi accompagné du guitariste madrilène Ricardo Modrego et de son frère Ramon de Algeciras. Du grand art.  De Lucia Paco « En vivo » - Universal, 2012  De Lucia Paco « Entre dos aguas » - Philips, 1991  El Lobo Paco « Mi camino lamenco » - Buda, 2011 Première guitare, et Paco el Lobo découvre un disque du chanteur flamenco Pepe de la Matrona. Il va se spécialiser dans le chant pour la danse, créer plusieurs groupes, intégrer les traditions, explorer de nouvelles voies. Atypique et marginal, c’est un de rares musiciens à maîtriser les nombreux styles de flamenco. Il nous invite au cœur de cette musique, du plus sombre au plus léger, avec fougue et émotion, sur un album généreux et émouvant.  Fays Raphaël « Andalucia » - Chant du Monde, 2008  La Nina de los Peines « La Nina de los Peines » - Fandango, 1989  Linares Carmen « La luna en el rio » - Auvidis, 1991  Marchena Pepe « Pepe Marchena » - Le Chant du Monde, 1991  Mendes José « Entre dos barrios » - Empreinte Digitale, 1997  Montoya Ramon « Ramon Montoya » - Le Chant du Monde, 1991  Morente Enrique « Flamenco en directo » - Universal, 2009 Cet espagnol de Grenade a d’abord chanté du flamenco traditionnel, avant d’interpréter des poèmes de Garcia Lorca et Lope de Vega sur des airs flamencos. Il a également mélangé ce style à la musique classique, celle du Sénégal et de Cuba, et même du punk rock… Novateur, critiqué pour son hérésie, il a compris toute la richesse de cette musique. Et aujourd’hui, la plupart des amoureux du flamenco reconnaissent son énorme engagement émotionnel.  Morente Estrella « Autorretrato » - EMI, 2012 Fille du célèbre Enrique Morente et issue d’une grande famille d’artistes gitans de Grenade, cette chanteuse a baigné dans le flamenco. Estrella Morente est une


cantaora reconnue et très appréciée dans son pays, elle a d’ailleurs été la voix « cachée » de Penelope Cruz dans le film « Volver ». Elle a travaillé sur cet « autoportrait » avec son père, malheureusement décédé, avant que l’album ne soit achevé. Un disque chargé d’émotions !  Poveda Miguel « Coplas del querer » - Universal, 2009  Saura Carlos « Flamenco flamenco » - Bodega Films, 2010 (DVD) Réalisé en 2011, le film de Carlos Saura rend un hommage somptueux à l'art andalou. « Flamenco flamenco » s'ouvre sur une -scène galerie de tableaux- où se succèderont les grands maîtres (Paco de Lucia, José Merce...) et les nouvelles générations (Miguel Poveda, Estrella Morente, Sara Baras, Israel Galvan...). Sensualité, intensité, et couleurs du flamenco participent à ce spectacle envoûtant où sont réunis musique, chant et danse.  Saura Carlos « Carmen » - Studio Canal, 2009  Soler Pedro et Claus Gaspar « Barlande » - Infiné, 2011 Ici pas de flamenco comme on a l’habitude de l’entendre : il s’agit d’une rencontre musicale entre un guitariste flamenco (Pedro Soler) et un violoncelliste (Gaspar Claus). D’un côté il y a un père qui souhaite revenir à un flamenco « épuré » et de l’autre un fils qui expérimente, improvise avec son violoncelle. Le résultat interpelle car il est original, inhabituel et finalement on se laisse séduire par cette musique !  Soler Pedro et Achiary Benat « Près du cœur sauvage » - Al Sur, 2000  Tomatito « Sonanta suite » - Universal, 2010

2) Sélection de livres disponibles à la médiathèque  Bois Mario « Le Flamenco » - Marval, 1999)  Dieuzaide Michel « Compas flamenco » - Cairn, 2006  Duzert Jean-Louis « Balada Flamenca » - Editions de l’Atelier In8, 2011  Filiu Jean-Pierre « Camaron : la révolution du flamenco » - Mille et une Nuits, 2010  Leblon Bernard « Flamenco » - Cité de la musique / Actes Sud, 1995  Sandoval Bernard « Flamenco attitudes » - Solar, 2003


VII) Sources discographiques, bibliographiques et sites

 Lemogodeuc Jean-Marie et Moyano Francisco « Le Flamenco » - PUF, 1994  Leblon Bernard « Flamenco » - Cité de la musique / Actes Sud, 1995  Dieuzaide Michel « Compas flamenco » - Cairn, 2006  Duzert Jean-Louis « Balada flamenca » - Editions de l’Atelier IN8, 2011  Sandoval Gabriel et Bernardo « Le flamenco : entre révolte et passion » - Milan, 1998  Sandoval Gabriel « Flamenco attitudes » - Solar, 2003  Bois Mario « Le Flamenco » - Marval, 1999

 http://www.flamencoweb.fr  http://www.greatsong.net  http://www.musiquealhambra.com  http://priscabfoto.blogspot.fr/  http://www.musicpourtous.fr.st/  http://www.lunadelsol.net/  http://www.lasflamencas.fr/


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