OASIS DES TIMOUNS
Apprentissage par l’expérience des cinq sens en milieu rural en Haïti Frasie Juliette & Kuntz Marieve - PFE AVT 2019 VILLE & TERRITOIRE
NOTICE DE PROJET
OASIS DES TIMOUNS Frasie Juliette & Kuntz Marieve PFE AVT 2019 VILLE & TERRITOIRE
- SOMMAIRE -
6 / LE CONTEXTE DE HAÏTI 8 - Les contraintes climatiques 10 - Le contexte éducatif 11 - L’école, lieu de sensibilisations 12 // LES RÉFÉRENCES 16 /// LE PROJET OASIS DES TIMOUNS 18 20 22 24
- L’école actuelle de la communauté Te Nwa - Développer des infrastructures socio-éducatives en milieu rural - Penser une structure scolaire selon des méthodes éducatives nouvelles - Initier un programme mixte
26 36 38 42
- Découper le projet en phases - Des espaces modulables - Une structure durable - En symbiose avec le milieu
6
7
LE CONTEXTE DE HAÏTI
8
LES CONTRAINTES CLIMATIQUES Située dans les grandes Antilles, la République d’Haïti partage une partie de l’île Hispaniola avec sa voisine la République Dominicaine. Deuxième pays le plus peuplé des Caraïbes, Haïti compte aujourd’hui près de 12 millions d’habitants dont environ 3,8 millions dans l’aire urbaine de sa capitale Portau-Prince. À 16h52 le 12 janvier 2010, un séisme d’une magnitude de 7 sur l’échelle de Richter frappe la ville de Port-au-Prince et les zones péri-urbaines de la capitale de Haïti. Le bilan est lourd, on dénombre plus de 220 000 morts et environ 300 000 blessés. Dix jours plus tard, le 20 janvier, encore sous le choc, Haïti subit une réplique d’une magnitude de 6,1. Très vite les médias relaient l’information et qualifient cet évènement comme étant l’une des plus grandes catastrophes humanitaires connues jusqu’à présent. Au lendemain du tremblement de terre, près de 1,5 millions de personnes ont perdu leur logement et plus de 600 000 d’entre elles ont dû quitter la capitale afin de pouvoir trouver un espace où construire un abri temporaire où vivre, voir survivre pour certains d’entre eux. Pendant les années qui suivirent cette catastrophe majeure, Haïti ne fut pas épargnée par d’autres aléas météorologiques. Deux ans après le séisme à peine, en 2012, Haïti a été victime de deux nouvelles catastrophes naturelles importantes : la tempête tropicale Isaac et l’ouragan Sandy qui ont provoqué quant à eux d’importants dégâts dans la zone sud, sud-est et ouest du pays. Quatre ans après ces deux évènements, en 2016, un nouvel ouragan, Matthew, ravage le sud et l’ouest du pays faisant un bilan désastreux de plus de 2 millions de sinistrés. Un an plus tard, en 2017, c’est l’ouragan Irma cette fois qui vient frôler Haïti et causer d’importantes inondations dans le nord du pays. À cela s’ajoutent également les épisodes de grandes sécheresses causées par le phénomène océanique El niño .
9
HAÏTI
CAP-HAÏTIEN LES GONAÏVES
SAINT-MARC
HAÏTI
LEVEQUE CABARET 35 KM PORT-AU-PRINCE
RÉPUBLIQUE DOMINICAINE
10
LE CONTEXTE ÉDUCATIF L’AVANT-APRÈS LE SÉISME DE 2010 Sur 10 millions d’habitants en 2010, 40 % soit un peu plus de 3,5 millions ne savent ni lire ni écrire. Quel que soit le niveau social, la demande en éducation est très élevée et n’arrive pas à être satisfaite. L’offre en école reste faible, notamment publique car les établissements du secteur privé représentent près de 90 %. Près d’un demi-million d’enfants en âge d’être scolarisés (6-12 ans) ne fréquentent pas l’école faute de places disponibles. Et cette insuffisance des services éducatifs et de formation se vérifie aussi au troisième cycle de l’enseignement fondamental, aux niveaux de l’enseignement secondaire et de l’enseignement supérieur, autant dans le secteur de la formation générale classique que des formations technique et professionnelle. Ainsi plusieurs milliers de jeunes sont inscrits dans des universités étrangères, dont plus de 20 000 en République dominicaine. Parallèlement nous constatons une inégale répartition entre les milieux urbains et ruraux, au détriment de ces derniers. En outre la qualité de la formation dispensée laisse nettement à désirer, les enseignants et les cadres scolaires étant en grande partie faibles au double plan quantitatif et qualitatif, les infrastructures et les équipements souvent inadéquats et les ressources didactiques et pédagogiques insuffisantes. Les lourds conséquences sont des taux élevés de redoublement, d’abandon et d’échec scolaire. Il faut y ajouter la non-adaptation des programmes aux spécificités de l’environnement et aux besoins de la société du pays. Des efforts ont pourtant été consentis au cours de ces deux dernières décennies, sans lesquels la situation serait sûrement plus grave. Certes, l’élitisme qui a traditionnellement caractérisé le système éducatif national s’est atténué de manière significative pour faire place à une certaine démocratisation de l’enseignement. Cependant il y a encore beaucoup à réaliser, si l’on tient véritablement à faire de l’éducation un outil voire un facteur déterminant du développement du pays. Comme on peut le deviner, la situation s’est lourdement aggravée à la suite du tremblement de terre qui a frappé le pays le 12 janvier 2010. Haïti doit alors faire face aux destructions massives d’infrastructures scolaires, du préscolaire à l’enseignement supérieur universitaire en passant par les niveaux fondamental et secondaire. Le constat est le même en ce qui concerne le système de la formation technique et professionnelle, sans compter les nombreuses pertes en vies humaines, élèves et étudiants, enseignants et professeurs, cadres de gestion scolaire en exercice et en cours de formation. Cela entraîne une recrudescence des besoins pourtant déjà criants en matière de ressources humaines qualifiées dans le secteur de l’éducation.
22 %
24 %
85 %
40 %
DE LA POPULATION EST COMPRISE ENTRE 10 ET 19 ANS
DU TRAVAIL EST INFANTILE
DES ÉQUIPEMENTS SCOLAIRES SONT PRIVÉES
D’ILLÉTRISME CHEZ LES ENFANTS
11
L’ÉCOLE, LIEU DE SENSIBILISATIONS INITIATION AUX ENJEUX ENVIRONNEMENTAUX La problématique de la dégradation de l’environnement en Haïti est aujourd’hui alarmante. Mais ces problèmes sont bien connus car quasi séculaires et résultant de comportements insouciants depuis plusieurs décennies. La déforestation combinée avec l’érosion des terres arables, les deux visages les plus notoires de cette dégradation de l’environnement, ont des conséquences néfastes sur la production agricole et pour le monde rural. Comment amener les paysans à ne plus exploiter de n’importe quelle manière les arbres des forêts ? Les clients de ces paysans, notamment les blanchisseries et les boulangeries, à trouver des substituts au charbon de bois ? Les compagnies de construction et les particuliers, à ne plus exploiter les carrières de sable et de pierres n’importe comment, à ne plus construire les immeubles et les maisons d’habitation dans le non-respect le plus total des règlements et normes d’urbanisme ? Les réponses à ces questions ne sont pas simples. Mais il n’y a pas de doute que l’éducation pourra contribuer à sensibiliser les citoyens à ces importants enjeux et amener les divers acteurs à adopter des comportements plus conscients et respectueux de l’environnement. Une démarche accompagnée d’une application sérieuse des règlements en vigueur est nécessaire, assortie au besoin de sanctions ou amendes appropriées, suite aux infractions à ces règlements.
APPRENTISSAGE DES RÈGLES D’HYGIÈNE L’éducation a un rôle important à jouer dans la santé, à travers la sensibilisation dès le plus jeune âge aux problèmes d’hygiène corporelle individuelle et d’hygiène publique, et à l’importance d’attitudes et de comportements appropriés à développer à cet égard. Elle se fera d’abord à l’école pour ceux qui y ont et y auront de plus en plus accès, devenant à leur tour des agents multiplicateurs des bénéfices reçus auprès de leur entourage, mais également par des campagnes utilisant les médias de masse en vue d’atteindre toutes celles et tous ceux qui n’ont pas été ou ne sont pas scolarisés. L’impact de ces actions risque évidemment d’être fort limité, si l’État, via notamment le réseau des collectivités territoriales, et les instances nationales dont ces collectivités relèvent ne jouent pas correctement leur partition dans ce domaine.
ÉDUCATION À LA CITOYENNETÉ La dernière mais non la moindre préoccupation est la citoyenneté. Elle désigne la manière dont les personnes appartenant à une société se comportent dans l’exercice de leurs droits mais aussi dans l’accomplissement de leurs devoirs. Ce sur quoi l’éducation peut influer de manière significative. Le dispositif à mettre en place dans cette perspective devra être diversifié et aller au-delà de ce qu’a pu apporter aux jeunes du pays le « petit manuel d’instruction civique ».
12
13
LES RÉFÉRENCES
14
DES CONSTRUCTIONS SIMILAIRES AU PROJET Le terrain et le peu de moyens dont dispose ce projet nous ont rapidement orienté vers l’idée d’une construction en terre crue et en bois. L’utilisation de la couleur dans l’architecture nous a également dès le début parue comme primordiale dans un contexte culturel où la peinture et les couleurs jouent un rôle prédominant. Ces quatre projets nous ont autant servi de référence dans la forme et dans le choix des matériaux que dans la mise en œuvre du projet : des volumes simples regroupés sur un seul niveau de façon à ce que le procédé constructif soit le plus facilement reproductible afin que le projet puisse être construit conjointement avec la population locale.
ALBERT FAUS ORPHELINAT / OUAGADOUGOU BURKINA FASO / 2015 / 235 M2
KÉRÉ ARCHITECTURE ÉCOLE / BURKINA FASO / 2001 / 310 M2 Construction en briques d’argiles et toit en tôle surplombant Participation active des villageois
15
HAND MADE SCHOOL / A. HERRINGER + E. ROSWAG ÉCOLE / BANGLADESH / 2007 / 325 M2 contexte rural Matériaux naturels / douceur végétale extérieure Création d’espaces reculés où l’enfant peut se retirer et se sentir protégé Utilisation de la couleur
INSIDE-OUT SCHOOL / A. TABOCCHINI & F. VITTORINI ÉCOLE / GHANA / 2019 Projet construit avec la population locale et un petit budget Résiste aux forts vents, faite de terre, bois et végétation locaux Classes extraverties ouvertes vers végétation environnante
16
17
LE PROJET OASIS DES TIMOUNS
18
ÉCOLE ACTUELLE DE LA COMMUNAUTÉ TE NWA Située au Nord de la ville de Leveque, l’école de la communauté Te Nwa est aujourd’hui fréquentée par les enfants de populations rurales alentours trop éloignées des villes et villages concentrés autour de la route nationale qui mène à la capitale de Port-au-Prince située à 35 kilomètre plus au sud. En effet, le terrain sur lequel se trouve actuellement l’école Te Nwa se situe à 3 kilomètres du premier village et des premières infrastructures de services. L’école se résume aujourd’hui à une tente accueillant une garderie et une classe faite en panneaux de bois contreplaqués. Elle ne dispose ni de système de restauration, ni d’équipement sportif et ne peut accueillir que très peu d’élèves. À cela s’ajoute le manque de personnel éducatif : les chargés d’enseignement de l’école Te Nwa sont volontaires et ne disposent d’aucune formation. Si cette école dispose de très peu de moyens c’est pourtant la seule à laquelle les enfants des zones rurales alentours ont accès. Nombreux d’entre eux d’ailleurs viennent de zones éloignées pour venir suivre une formation aussi basique soit elle.
19
20
DÉVELOPPER DES INFRASTRUCTURES ÉDUCATIVES EN MILIEU RURAL
SOCIO-
À partir des constats faits lors de notre analyse, nous avons pensé un projet d’équipements socio-éducatifs comportant des salles de classe, une bibliothèque, une salle polyvalente, des équipements sportifs et des espaces de jeux extérieurs. Le manque de personnel éducatif dont souffre Haïti en général, et plus particulièrement les zones rurales, nous a incité à penser cette infrastructure comme une école non seulement pour les enfants mais aussi pour les formateurs. Ainsi ce projet est également destiné à accueillir des adultes dans le but de les former à devenir enseignants. Le terrain de l’école actuelle est relativement vaste et dégagé. L’implantation de nouvelles infrastructures sur ce terrain ne nécessite donc pas la destruction des bâtis existants durant les travaux et permet alors aux enfants de poursuivre leurs activités durant toute la phase de construction de la nouvelle école. L’éloignement du terrain par rapport aux zones urbanisées impose la mise en place de puits, de récupération des eaux de pluie et d’irrigation. De la même façon, la situation géographique du site impose l’autonomie pour l’électricité et la gestion des eaux usées. Le principe constructif lui aussi doit faire preuve d’autonomie. Pour cela nous avons pensé la construction à partir de matériaux locaux et surtout d’éléments fabriqués sur place : les briques de terre crues ne nécessitent pas de grands moyens et l’étendue du terrain offre un large espace de séchage pour celles-ci. Quant à la construction, l’association TECHO, présente en Amérique du sud et centrale, se présente comme le meilleur moyen de faire collaborer des volontaires et des utilisateurs autour d’un chantier d’autoconstruction.
21
POURQUOI
?
1
2
3
4
SOUS SCOLARISATION DES ENFANTS
MANQUE DE PERSONNEL EDUCATIF
ABSENCE D’INFRASTRUCTURES DE LOISIRS
DÉFAILLANCE DES INFRASTRUCTURES SCOLAIRES
OÙ ÇA ?
éCOLE TE NWA
3 KM
LeLEVEQUE projet se développe sur le terrain de l’actuelle école de la communauté Te Nwa au Nord de Port-au-Prince.
?
POUR QUI ?
u rs ate
» fants
Pour des enfants de tout âges confondus pour une formation de degré primaire.
for
m
n «e
ÉCOLE PRIMAIRE
un s
timo
FORMER DES FORMATEURS L’objectif de ce projet est de former des personnes à enseigner.
22
PENSER DES INFRASTRUCTURES SCOLAIRES SELON DES MÉTHODES ÉDUCATIVES NOUVELLES Avant le XVIIIème siècle, c’est la pédagogie traditionnelle qui prévalait à toute forme d’éducation. Cette méthode se basait sur des « codes d’enseignement uniformes » transmis de maîtres en maîtres par mimétisme. Ce mode d’enseignement était centré sur le maître et plaçait l’enfant dans une posture d’élève. C’est seulement à l’époque des Lumières, avec l’implication des sciences, que cette méthode a été remise en question et notamment, par le traité d’éducation Émile de Jean-Jacques Rousseau. Ce dernier a inspiré la pédagogie nouvelle où l’attention est centrée autour de l’enfant et non du professeur. Durant le XIXème siècle, l’éducation se basait sur les besoins liés à la révolution industrielle, soit une économie axée sur la production de masse. Enfin, à partir du XXIème siècle, l’éducation s’appuie plutôt sur des valeurs humaines où l’enfant doit pouvoir développer des capacités de pensée critique et d’autonomie.
L’ÉCOLE MONTESSORI L’école Montessori, reconnue depuis presque un siècle à travers le monde, a révolutionné les méthodes éducatives, notamment par le choix d’un environnement approprié à la taille et à l’âge de l’enfant. L’apprentissage se base ainsi sur la théorie des périodes sensibles divisées en séquences que sont successivement : - la période de l’esprit absorbant, entre 0 et 6 ans, - l’âge de l’instruction, entre 6 et 12 ans, - la période de transformations physiques et mentales, entre 12 et 18 ans. Le concept de l’école Montessori se base sur le processus permettant à l’enfant de devenir un explorateur sensoriel durant la première période (entre 0 et 6 ans). De cette manière, tous les sens sont stimulés à travers l’environnement de l’individu. Ainsi, l’architecture d’une école joue un rôle majeur dans cette première phase d’apprentissage. Lors de la deuxième phase l’enfant va se transformer en un explorateur intellectuel pour qui la question du pourquoi va devenir déterminante. Ce concept assigne, à celui que nous avons l’habitude de nommer professeur, le rôle de guide, faisant le lien entre le matériel didactique d’apprentissage et l’enfant. Lors de la présentation d’une nouvelle notion, par exemple, ce «guide» va regrouper les enfants et, à partir d’une histoire ou d’un jeu, il leur présente ce nouveau matériel didactique qu’ils pourront ensuite utiliser et appréhender individuellement. De la même manière, le guide ne possède pas de bureau dans la classe, il se déplace dans la classe dans le but d’être au plus proche de l’enfant. Du point de vue relationnel, les différentes fonctions et responsabilités données aux élèves sont réparties à tour de rôle, de manière à leur inculquer du respect vis-à-vis de leurs camarades.
23
LES JEUX INHIBITEURS On remarque aujourd’hui, que les seuls espaces dédiés aux enfants restent très réglementés et sécurisés. Ils ne leur permettent pas de prendre leurs propres décisions sur le type de jeux ou d’activités qu’ils peuvent pratiquer. Il existe d’ailleurs des initiatives face à cette sur-sécurisation, telle l’île du Gouverneur à New York qui offre un espace de jeux interdit aux parents. Ainsi, tous les enfants peuvent y jouer comme ils l’entendent. Il s’agit de garder à l’esprit que la création de l’identité de l’enfant se fait plus facilement en dehors de la supervision des adultes. De cette manière, l’enfant a besoin d’un espace auquel il peut s’identifier pour s’y développer. L’école présente donc un lieu de premier choix où l’enfant doit pouvoir s’approprier le lieu en tant qu’individu mais aussi au sein d’un groupe.
L’ARCHITECTURE PROPRE AU SYSTÈME ÉDUCATIF MONTESSORI Durant les deux premières phases de l’école primaire, l’enfant a besoin d’un repère, un lieu familier où il se sent en sécurité. La classe doit tenir ce rôle de repère et offrir un espace perçu comme sécuritaire. Pour cela, l’architecture de l’école Montessori revoit la classe comme une reproduction miniature de la maison et permet ainsi à l’enfant d’y être autonome quant aux activités pédagogiques. Ainsi, l’école offre par exemple la possibilité à l’enfant de travailler à même le sol. Le plan rectangulaire, généralement alloué aux salles de classes traditionnelles, empêche l’enfant de se trouver un espace propre et donc de se distraire. Au contraire, le plan d’une salle de classe d’une école Montessori se présente généralement sous forme de L ou sous forme articulée. Cette typologie de salle de classe offre la possibilité de diverses activités et permet à chaque enfant de travailler à son rythme, en groupe ou individuellement, dans un même lieu mais dans des espaces différenciés. Il a été prouvé que l’enfant qui travaille en dehors de la supervision directe du professeur est souvent plus reconnaissant vis-à-vis de celui-ci et accorde plus d’importance à son travail. De la même manière, le plan ouvert offre plus d’opportunités à l’enfant en termes de rencontre, d’autonomie, d’initiatives et d’exploration sensorielle. Si chacune des trois séquences d’apprentissage de l’enfant se distingue par des besoins différents, le concept d’éducation Montessori prône la mixité des tranches d’âge au sein d’une même classe afin d’inciter à un sentiment d’entraide et d’unité sociale. Il s’agit donc de créer un environnement propice au développement perceptuel et aux capacités cognitives de l’enfant par le biais de la mise en place de diverses atmosphères permettant de stimuler tous les sens.
24
INITIER UN PROGRAMME MIXTE Le terrain de l’école Té Nwa sur lequel nous développons notre projet se présente comme un environnement aride. Il n’offre que très peu de zones ombragées dans un climat pourtant chaud. Pour remédier à cela, nous renaturalisons le terrain de l’école par un reboisement varié et riche en espèces d’arbres et de plantes. Quant à la structure de l’école, nous voulons un programme mixte permettant de former des adultes à devenir professeurs et donc à donner des cours de niveau primaire aux enfants des environs. Cela se ferait par des méthodes nouvelles d’éducation, tournées vers l’apprentissage par l’expérience personnelle et par un champ d’apprentissage plus large que celui d’une école classique. Cette infrastructure est également pensée pour accueillir annuellement des enfants pour un stage de sports pendant les vacances scolaires. Elle permet aussi de façon exceptionnelle de recueillir des sinistrés en cas de catastrophe naturelle, le pays étant régulièrement sujet à des séismes, des cyclones et des inondations.
25
DIVERSITÉ D’AMBIANCES
ZONE CALME DE REPOS FERME ANIMALE protégée par la fôret
COEUR DU COMPLEXE point de rencontres
ENTRÉE SECONDAIRE: dessert le stade, les dortoirs et le réfectoire
AIRE DE JEUX
ENTRÉE PRINCIPALE: dessert l’école, la bibliothèque et le réfectoire
La présente configuration permet au complexe de disposer de divers espaces, ouverts ou reculés par rapport aux autres selon les besoins des utilisateurs.
26
DÉCOUPER LE PROJET EN PHASES UN PROJET ÉVOLUTIF SELON LES MOYENS ET LES BESOINS Les moyens étant peu élevés, le programme est pensé pour être divisé en plusieurs phases réparties dans le temps. De cette façon, les équipements pourront être construits selon les besoins et les moyens des utilisateurs. La succession des différentes phases est pensée de manière à ce que la construction d’une nouvelle phase puisse s’appuyer sur les moyens mis en place dans la phase précédente. De cette façon, chaque élément construit ou planté lors d’une phase servira de modèle ou de matière première lors de la phase qui suivra. Le temps qui sépare chaque phase dépend à la fois du rendement des éléments mis en place lors de la phase précédente mais aussi des moyens et de l’évolution de l’école en général. La trame mise en place permet de baser la construction des bâtis à partir de modules facilement reproductibles. Ainsi, à partir du module de base qui est celui d’une salle de classe, les utilisateurs pourront construire et ajouter des espaces au fur et à mesure des besoins. De cette façon, la deuxième phase, par exemple, s’appuie sur le schéma de la première phase en utilisant le module de la salle de classe pour le copier afin de construire de nouvelles salles de classe, une bibliothèque et un réfectoire.
Plantation de diverses essences de bois pour la construction.
1
REBOISEMENT DU SITE
Construction en brique de terre et crue et structure plastique pour la toiture.
2
CONSTRUCTION DE LA PHASE 1
Construction en crue et structure bois récolté sur
3
CONSTRUCTION
27
Construction en brique de terre et crue et structure de la toiture en bois récolté sur le site.
n brique de terre et e de la toiture en le site.
N DE LA PHASE 2
La trame mise en place permet l’ajout de modules selon les besoins et les moyens des utilisateurs.
4
CONSTRUCTION DE LA PHASE 3
5
AGRANDISSEMENTS
28
PHASE 0 REBOISEMENT DU SITE Reboisement de la parcelle à partir de bois nécessaires à la construction et au façonnage du paysage.
29
Reboi
se m
en
t
Reboisement du site.
30
PHASE 1 CONSTRUCTION D’UN ESPACE D’APPRENTISSAGE Chaque salle de classe d’une superficie de 45 m2 représente un module. Lors de la phase 1, nous avons pensé l’association de deux salles de classe dans un seul bâti de façon à pouvoir jouer sur la taille des espaces et créer des espaces modulables selon les besoins. La salle de réunion et l’espace cuisine sont regroupés dans un bâti équivalent à un demi module.
31
Potag er
Création d’un potager.
Point d ’ ea ue
t san
itaires
Mise en place d’un puits et de toilettes sèches.
2 salle sd
e cla
sse
Mise en place d’espaces de jeux et de terrains sportifs.
Espaces
ex
rs ieu tér
Construction de 2 salles de classe de 45 m2 chacune et d’une salle de réunion.
32
PHASE 2 AGRANDISSEMENT DE L’ÉCOLE ET CONSTRUCTION D’ESPACES CULTURELS Les 3ème et 4ème salles de classe sont pensées de la même façon que les deux premières. La bibliothèque et le réfectoire sont chacun pensé dans un bâti équivalent à un module, soit 45 m2 chacun.
33
2 salle sd
ec
e lass
Construction de 2 salles de classes supplémentaires de 45 m2 chacune.
Bibliot
hè q ue
Construction d’une bibliothèque de 45 m2.
Réfecto ire
Construction d’un réfectoire/salle de spectacle de 45 m2.
34
PHASE 3 CONSTRUCTION DE DORTOIRS ET DE SANITAIRES Les dortoirs, sont répartis sur trois édifices : un dortoir fille, un dortoir garçon et un dortoir pour les enseignants. Chaque dortoir est pensé à partir du module de base, soit 45 m2.
35
Dort
oir s
Construction de dortoirs pour loger des enfants lors d’événements plus longs.
Dou c
h es
Construction de douches.
36
DES ESPACES MODULABLES INSPIRÉS DE L’ARCHITECTURE VERNACULAIRE Le module de base qui sert de bibliothèque ou de cantine est doublé pour former les salles de classe. Il est rectangulaire et de plein-pied comme la maison typique. Cette forme géométrique de base est tramée et permet une structure simple à comprendre, à mettre en œuvre en auto-construction, logique pour un agrandissement et résistante, point majeur qui sera développé en détails plus loin. Les modules sont percés de deux types d’ouverture : - des briques ajourées sur des surfaces multiples de 120x160cm, - des carrés de 40x40 cm colorés sur leurs tranches. Le climat étant tropical, il est nécessaire de se protéger du soleil et de sa chaleur tout en permettant une circulation de l’air intérieur via un système de ventilation naturel qui est ici permis par des aérations sur des façades opposées. La couleur, très présente dans l’architecture en Haïti, est ici ajoutée dans les ouvertures de manière ponctuelle. Elle sera également introduite dans les enduits de façade extérieure et sur les murs isolés dans le jardin. Ces derniers servent de guide et de pare-soleil pour les espaces de circulation extérieure. Ils seront, dans ce cas précis, supports de fresques réalisées par les enfants ou l’un des nombreux artistes-peintres locaux, Haïti étant connu pour ses nombreux et talentueux poètes et peintres. En plus de ces ouvertures, les modules possèdent deux portes au minimum. Elles sont placées sur des façades différentes pour des raisons culturelle, de sécurité et d’aération. Dans le cas où les salles de classe seraient subdivisées par les parois amovibles, cela permettrait que chaque entité ait son accès extérieur accessible sans passer par les autres classes et ainsi sans déranger les autres cours. La flexibilité des usages et donc la modularité des espaces est primordiale dans ce projet haïtien. En effet, le programme de base est celui d’une école mais il est possible qu’elle devienne un abri d’urgence en cas de catastrophe climatique, une nouvelle ferme, une clinique ou un centre de formation agricole ou d’enseignement. Ainsi la simplicité des surfaces rectangulaires s’adapte aux usages par l’ajout de parois mobiles accrochées aux pannes supportant la toiture. Ces parois intérieures habituellement servent également de volets extérieurs lorsque l’ensemble est fermé ou qu’un cyclone approche. Leurs largeurs correspondent donc à celle des ouvertures, c’est à dire une fois celles des pans en briques ajourées et trois fois les ouvertures de forme carrée. Ainsi elles sont toujours utilisées. Dans le cas où elles ne sont pas nécessaires, elles sont entreposées dans une niche prévue à cet effet.
37
Espace boisé
Espace animalier
ZONE LOISIRS: stade, dortoirs, tribunes, espace animalier
Potager
Espace ombragé
Espace de rencontre
ZONE CENTRALE: Sanitaires, puit, cuisine
ZONE SCOLAIRE: écoles, bilbiothèque, réfectoire, bureau des professeurs
Les salles de classe sont pensées comme des volumes simples pour servir à de grandes assemblées mais divisibles en de petits espaces pour y dispenser différentes types de cours.
Aire de jeux
38
UNE STRUCTURE DURABLE DES MATÉRIAUX LOCAUX ET SIMPLES À METTRE EN ŒUVRE Les objectifs qu’on s’est fixé quant aux matières premières sont les suivants : - qu’elles soient peu chères, - locales autant que possibles, - naturelles et aussi peu transformées que possible, - pauvres en énergie grise, - faciles à mettre en œuvre par les membres de l’association Techo, - recyclables ou réutilisables. On a donc choisi la terre crue comme matière principale à la structure. Ainsi, l’adobe proposée est une brique de terre crue séchée à l’air libre. Son format de 40x40x10cm est fabriqué dans une moule de bois réutilisable et permet une meilleure stabilité en cas de séisme. Il est complété par des demimodules de 40x19,5x10cm, notamment utiles pour les chaînages d’angle et également de quart de modules de 19,5x19,5x10cm qui sont indispensables sur les parties ajourées. L’adobe est faite de 4 composants facilement accessibles et à mélanger avec les pieds, dans les proportions suivantes : - 18% de terre argileuse, - 53% de terre sableuse, - 22% d’eau qui sera tirée du puits, - 7% de paille. Les briques sèchent à l’ombre dans un lieu ventilé et empilées verticalement. La végétation est également utilisée pour la toiture et les panneaux amovibles. Ce choix permet la continuité de la transmission du savoir-faire artisanal dans le domaine de l’architecture vernaculaire. Cette utilisation de la végétation est en accord avec le principe majeur de ce projet en phases qui est d’utiliser ce qui a été planté à la phase précédente. Parmi ces plantes structurelles figurent le bambou qui sert aux arceaux de toiture, le vétiver qui tressé forme les panneaux mobiles et le bananier dont les grandes feuilles entrelacées permettent une toiture imperméable.
39
COMPOSITION DE LA STRUCTURE
40
DES VOLUMES COMPACTS ET RÉSISTANTS Les différents éléments formant l’école reposent sur un sous-bassement de pierres ou de briques cuites cimentées détaché du reste de la structure pour protéger les intérieurs des inondations et des séismes et l’adobe de l’humidité du sol. Des bambous ou roseaux placés verticalement et horizontalement ‘‘en clef’’ dans les angles viennent renforcer les murs d’adobe en cas de tremblement de terre. Cette protection est complétée par un chaînage d’angle permis par un jeu entre les briques entières et les moitiés ainsi que par un chaînage haut dissociant la toiture des murs et consolidant la structure en partie haute. La toiture et les gouttières reposent sur des pannes de bois de section minimale pour porter également les panneaux amovibles légers. La toiture doit être légère, sans débord de toiture pour ne pas être emportée par les cyclones. Elle doit également être perméable à l’air afin de ralentir les vents violents qui voudraient s’y engouffrer et laisser s’échapper l’air chaud de l’intérieur. Cela est permis ici par des bambous verticaux ajourés sous l’arc de toiture, motif de bois que l’on peut retrouver verticalement ou en diagonal dans l’architecture vernaculaire.
41
STRUCTURE PARASISMIQUE ET PARACYCLONIQUE
42
EN SYMBIOSE AVEC LE MILIEU RIEN NE SE PERD, TOUT RETOURNE À LA TERRE Le projet doit être autonome dans la production de ses besoins et dans la gestion de ses déchets car il est éloigné géographiquement de toute urbanité et dispose de peu de moyens financiers et techniques. Il n’y a pas de réseaux d’eaux potable ou grise, de passage des éboueurs ni d’accès à l’électricité. Des panneaux solaires sont installés sur les toitures pour délivrer l’énergie nécessaire à l’éclairage, aux équipements dans la cuisine, à la recharge des mobiles et à quelques ordinateurs si besoin. L’eau potable est amenée par camions en bidon tandis que l’eau courante est tirée d’un puits placé au plus près de la cuisine et central par rapport aux salles de classe. Ainsi il remplit un grand lavabo extérieur qui permet aux enfants de faire leur vaisselle et de nettoyer leur matériel après la classe de peinture. La pluie est régulière sur l’année et plutôt abondante entre mai et octobre. Elle glisse sur les toitures voûtées dans les gouttières puis dans les rigoles placées en pieds de mur. L’eau de pluie est ainsi récoltée et stockée dans des bidons de plastique afin de ne pas la gâcher et d’en avoir en cas de besoin. Les eaux récoltées du puits et de la pluie se déversent dans les rigoles aménagées dans le sol qui irriguent à la fois le potager et les plantations de bambous. Le grand lavabo extérieur est équipé d’un système simple de déviation pour que les enfants puissent donner l’eau sale soit aux bambous peu capricieux soit au potager qui ne veut pas de peinture dans son eau. Un autre circuit est mis en place, c’est celui des aliments. Le potager offre un support de pédagogie pour les enfants mais aussi la production suffisante de denrées alimentaires pour les midis. Ainsi les légumes et autres plantes comestibles sont transformés dans la cuisine proche pour être dégustés à la cantine. Tous les restes sont donnés aux poules ou transformés en compost utilisable soit pour le verger soit pour le potager.
43
CYCLE DES ALIMENTS
Potager comme moyen de subsistance Agriculture comme support d’éducation Restes partagés entre le compost et les poules
CYCLE DE VIE DES VÉGÉTAUX
Transformation des plantes en mobilier Techniques variées de tressages Transmission des savoirs locaux traditionnels
De l’arbre au mobilier
44
REVÉGÉTALISATION DU SITE SOUS UN CLIMAT TROPICAL Le reboisement intensif de la parcelle est nécessaire car le site entre mer et montagne est plutôt aride et car le pays a subi une déforestation sévère pour des raisons économiques que sont : - la production de charbon, - la nécessité de bois de construction. Cependant, il est important de rappeler les intérêts des arbres et plantes, notamment écologiques et spécialement en climat tropical et en zone sismique et cyclonique : - ils absorbent le CO2, - ils apportent ombre et air frais, - Ils nourrissent la faune et la protègent, - ils stabilisent les sols, surtout en cas d’inondation ou glissement de terrain, - ils retiennent l’humidité du sol et de l’air, - ils produisent de l’alimentation (baies, fruits, etc), - ils ralentissent les vents, même les plus forts des cyclones. Et dans le cas spécifique de cette école rurale, la nature ainsi crée offre un lieu de balade agréable à l’ombre du soleil, aux senteurs et aux couleurs multiples. Elle devient pour les enfants un support d’apprentissage pratique sur son fonctionnement et ses apparences riches et variées. Elle sert aussi de décor à une piste d’athlétisme possible et aux poules donnant sans compter œufs et caquètements aux écoliers.
45
REPLANTATION DU SITE AVEC DES ESPÈCES VARIÉES
Frasie Juliette & Kuntz Marieve - PFE AVT 2019 VILLE & TERRITOIRE