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Sommaire
Avant-propos 6 Récits d’une vie 8 Récits de voyage 30 Le Parc national du delta du Saloum 66 Les visages peuvent être inoubliables... 72 Les enfants Lebou 82 Profil 94
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Avant-propos J’ai inséré dans ce livre des photographies pour servir le texte plus que pour l’illustrer. Je ne voulais pas que "Le récit d'une vie" et "Le récit de voyage" ignorent l’univers de la photographie, dans le but de mettre en évidence le pouvoir qu’a la littérature de faire voir. Le souvenir n’est pas rendu totalement par une image qui ôte inévitablement les odeurs, les goûts, les sensations qui le font vivre. Pourtant, en s’inscrivant dans la temporalité, elle possède l’avantage de conserver le passé, de le comprendre et d’anticiper sur le futur. Le mot « photographie » signifie étymologiquement « écriture de la lumière », la photographie est alors l’art de rendre, grâce à la lumière, l’intensité d’une présence. L’écriture se présente bien souvent comme un prolongement de l’image. Ainsi sur ce livre, "Esprit Boy Dakar" je vous propose des clichés que côtoient des textes. Le texte n’a pas pour fonction de commenter les photos. Je suppose que l’activité littéraire est limitée. C’est pourquoi j'ai utilisé des images pour que les mots retrouvent leur prestige et la photographie leur authenticité. La photographie occupe plusieurs fonctions qui me donnent l’occasion de m’exprimer à travers mes séries de photos comme « Les visages peuvent être inoubliables... ou sur une autre série sur « les enfants Lebou ». Mes photos qu’elle soit documentaire, portrait, symbolique, révélatrice ou descriptive, elle entretient des relations ténues avec ma culture, d’un Sénégalais grandit dans une atmosphère urbaine de Dakar et au rendez-vous du donnez et du recevoir. Qu’elle lui soit subordonnée ou qu’elle la fasse jaillir, qu’elle se pose comme complémentaire ou rivale, ma culture mon inspiration occupe une place privilégiée et stratégique au sein de mes photos.
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Île de Gorée 7
Récits d’une vie
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Dakar, Mr Omar SY et Lamane
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Qui suis-je?
Je fais partie de la génération YES WE CAN. La génération qui a réalisé le rêve de Martin Luther KING. Nous étions enfants le 1er avril 2000. Voir Abdoulaye WADE président du Sénégal, alternance. Je fais partie de cette génération qui a vécu ces événements politiques et de ces moments historiques. Je suis né quelque temps avant la chute du mur de Berlin. J'ai étudié a l'école la naïveté du communisme avec des professeurs qui chanté les louanges de l’individualisme. J'ai vu à la télévision des politiciens promettre et trahir. J'ai assisté aux changements de gouvernement à travers Twitter ou Facebook. Je n’ai jamais connu la guerre, mais je sais que dans ma sous-région les djihadistes ont saccagé les œuvres historiques à Tombouctou. Mes parents étaient la « génération Abdou DIOUF », ils croyaient aux socialismes. Le capitalisme et le libéralisme nous ont rendus esclaves du travail et de la société de consommation. Vivre c’est acheter. Consommer est un système de vie et de pensée. Dans un pays ou jeunesse est synonyme de chômage. Je suis persuadé que nous sommes à la fin d’un système. Car ma génération de jeune Africain en a marre, parfois perdu ou déraciné. Et c’est en voyageant à travers mon pays que je suis parvenu à mieux me connaitre, voyager est parfois une reconquête de soi...
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CommunautĂŠ rurale de Yenne
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Voyage spirituel
Une certaine époque Dakar m'étouffa, provoquant chez ma personne une dépression terrible. Je cultivé au quotidien, l'enfer ces les autres. Ainsi pour me soigner j'avais décidé de suivre les battements de mon cœur, pour aller vivre à Toubab Dialaw. J'avais six mois pour retrouver ma personne entre collines et océan. Il existe autant de raison de voyager que de voyageurs. L’expérience n’est jamais absolue, elle est propre à chacun. Enfant d’un mouvement permanent, je voyage lentement. Plutôt que d’observer le paysage qui défile derrière la vitre, je choisis d’en sortir pour photographier ce paysage symbolisant mon état actuel. À vrai dire, mon rythme et mes habitudes n’ont que peu changé à Toubab Dialaw. Les fleurs et les couleurs sont différentes, le décor n’est plus le même. L’histoire si. Je ne suis pas à la poursuite de l’exaltation, je recherche la sérénité. Ce calme ondoyant auquel j’accède du sommet d’une colline à contempler l’océan atlantique et du bonheur des villageois. Cet air bleu doré qui illumine mes poumons et irrigue mon sang après une session de surf sur une magnifique vague au font rocheuse. Je guette ces sensations magiques où l’instant me surprend lorsque la seconde crépite et m’éblouit. Je chemine à la recherche de cette subtile alchimie, cette brèche dans l’espace-temps dont profite mon âme pour s’aligner avec la danse des astres sans-début sans fin, où toi, moi, lui ne sommes qu’un intervalle séduisant dans la mélodie. Je recherche cet entrelacs chaud au parfum des manguiers où je suis roc parmi les flots, une île au milieu du chaos. Quand tu apprends à voir, un sourire, un geste ou un regard ont la valeur de l’éternel, l’infinité du Présent. Je pourchasse quelques déferlements et des vagues creuses à ramener dans mes pensées en papier, que je surferais quand je serais nostalgique dans mon cœur en carton.
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Et si l’on faisait ce que l’on fait de mieux...
Rêver! Je suis un rêveur qui veut vivre comme les Peuls avec leur brebis dans un paysage du sahel. Images, monotones, navrantes qui miroitent et tremblent à cause de la chaleur. Je voudrais entendre le souffle du levant comme une respiration ardant d'un pur-sang de course qui augmente d'intensité à chaque kilomètre de moins vers le désert. Je veux vivre une vie libre et nomade, pour essayer ensuite de partager ce que j'ai vu avec quelques-uns le frisson mélancolique et charmé que j'ai ressenti en face des splendeurs tristes lors de mes promenades sur les collines de Toubab Dialaw.
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CommunautĂŠ rurale de Yenne
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Nous sommes seulement des voyageurs…
Des voyageurs des temps modernes. Si l’on observe les journaux de bord des grands navigateurs, on peut s’apercevoir assez vite que non, le voyage n’était pas grandiose tous les jours. Des moments sublimes succédant à d’autres, très difficiles. Mais pour faire bonne f igure,, on préfère souvent écrire sa propre légende plutôt que son quotidien plus prosaïque. Mais cette tendance en rencontre une autre actuellement : celle du « superhéros » qui laisse désormais entrevoir ses moments de faiblesse et qui le rend plus humain. C’est le cas au cinéma, mais aussi par certains postes sur instagram ou autre plateforme sociale. Je pense que la sincérité finit par émouvoir plus que l’apparence idéale. S’intéresse-t-on plus au « plus beau voyage carte postale » ou à l’aventure humaine que cela représente ? « Être vrai conduit à faire un vrai voyage, non ? » Je sais que je n’en sais rien. Je sais que le vrai, à la recherche de l’authenticité perdue, pour paraphraser Proust, est aussi un mythe, que mon moi cultive avec délectation d’ailleurs. Je crains qu’il ne mène à rien. À l’aune de mon humble expérience de dandy du réel, je serais tenté de dire lors de mon dernier week-end à Saint Louis, je me suis arrêté quelques minutes à l’angle de trois rues, durant mes pérégrinations à pied, pour juste regarder comme un ruminant ce qui se passe, absorber comme une éponge (c’est le travail du journaliste aussi) ce que je n’avais jamais fait à ce point jusqu’alors, est devenu un but. Et non plus un moyen. Échangé alors avec des passants via yeux et sourires ce que la parole ne permettait pas ou peu au-delà de l’anodin. En voir certains sourires de ma position d’observateur immobile. Comme s’ils comprenaient fort bien mes tentatives d’imprégnation. Voyager et utiliser les réseaux sociaux n’est-elle pas un des plus grands paradoxes du voyageur contemporain? Est-ce que la modernité a enlevé la beauté et la magie du voyage? Perdons-nous un peu de nous-même en mêlant aventures et réseaux sociaux ? À l’inverse faisons-nous du voyage un mythe encore plus grandiose?
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Les ĂŽles de la Madeleine
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Rencontre...
Sur ma route, j'ai fait des rencontres extraordinaires, inoubliables qui m'ont marqué à jamais, et embaument mon cœur d’un parfum unique, inimitable. Je m’en souviens longtemps, je les chéris, je les bénis. Certaines ne sont qu’éphémères, comme un songe qui se dissipe dans la brume du réveil, et ne sont pas éternelles. Mais celles-ci apportent tout de même parfois des richesses inespérées, s’évaporent en laissant les vestiges d’une amitié ou d’un amour incomplet, mais qui ont su toutefois nous amener à apprendre des leçons, sur nous-mêmes et les autres, à tirer des enseignements des erreurs passées. Elles m'ont aussi apporté par moment de joies et de surprises, m'enrober d’un bonheur fragile. D’autres ne nous accordent qu’un trou béant au cœur, illustrant la perte d’un être, qui contrairement à ce que l’on pensait, ne tenait pas tant que cela à nous. Ces rencontres, lorsqu’elles ont donné lieu à la naissance d’une amitié par exemple, qui n’a pu que s’achever misérablement, nous laisse l’âme en peine, cherchant à nous reconstruire, à redonner à notre quotidien un semblant d’éclat, malgré un échec cuisant, dévastateur. Mais heureusement d’autres personnes entrent à leur tour dans notre vie, et notre déception cède alors sa place à la redécouverte d’un miracle, d’une étincelle d’exaltation, puis d’épanouissement. Les barrières de méfiance s’effondrent peu à peu, pour être remplacées par une confiance nouvelle, et un partage d’expériences enrichissantes, par un échange de bonne volonté et d’instants agréables où se confondent complicité et solidarité. Dans tous les cas, que ces rencontres nous fassent ou non souffrir, qu’elles soient longues ou brèves, intenses ou quelconques, nous en retenons chacun un élément, le plus touchant, le plus navrant, ou bien le plus captivant.
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soumbedioune
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Un jour, tu seras un lutteur...
La limite est fine entre courage et bêtise, entre force de caractère et insouciance. Et pourtant, bien peu arrivent à percevoir le vrai courage, celui sincère et sans arrière-pensée, sans ambition ni recherche d’admiration. Celui-là même que l’on ne remarque pas tant il paraît naturel, spontané… Il convient alors de faire le bon choix, de faire face à son indécision et de décider de soi-même quel est le bon chemin à suivre. La vraie force n’est pas forcément la plus visible, mais la plus durable, là plus véritable. Face aux épreuves de la vie, certains chercheront à fuir afin de ne pas se confronter à leurs frayeurs, de se terrer dans le trou de leur angoisse pour s’y retrouver coincé par la suite… D’autres quant à eux, même si cela les terrifie, rassembleront toute leur volonté pour surmonter l’obstacle, pour en venir à bout ou du moins essayer. Et ces derniers auront tout compris, essayé. C’est la chose la plus simple, et à la fois la plus dure. Ne pas craindre l’échec, la part de chances qui fait que l’on n’obtiendra pas toujours ce que l’on veut. Et pourtant, ils auront raison de s’acharner sans relâche, de ne pas se laisser entraver par leur peur, car c’est en y croyant qu’ils auront ne serait-ce qu’une petite chance d’y parvenir. Alors non, le courage ce n’est pas l’absence de peur, ou bien l’ignorance de cette dernière, mais au contraire, c’est prendre conscience de cette peur, tâcher de la comprendre, pour mieux la contourner, voire parfois l’éradiquer… Le courage, ce n’est pas la facilité, mais bien l’envie de réussir, d’atteindre notre objectif, quel qu’en soit le prix. Alors oui, parfois le courage nous brûlera un peu les ailes, mais au moins nous pourrons toujours continuer de voler.
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Guerew
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Souvenir d’enfance...
Nos amis d'enfance font partie de nous, nous habitent à chaque moment de notre vie. Certains évoluent avec le temps, pourtant ils restent toujours présents. On en hait certains, on en vénère d’autres, mais notre mémoire ne choisit pas toujours de nous rappeler ceux qui nous sont agréables. Ils se transforment avec les années, s’embellissent quelques fois à travers nos pensées, mais il est rare qu’ils parviennent totalement à nous quitter. Il y en a qui hante nos nuits, d’autres encore allègent nos vies. Fantômes de nos passés, reflet de notre réalité, ils sont omniprésents, et pas toujours sensibles au temps. Les souvenirs peuvent être nos meilleurs amis comme nos pires ennemis, pourtant sans eux ne serait pas mémorisé le fruit de nos années passées. Ils peuvent nous permettre de nous améliorer, nous amène parfois à changer, où à se conforter dans la personne que l’on est, mais jamais ils ne nous laissent indifférents. Ils sont ceux qui nous font souffrir, sourire, ou bien même grandir. Compagnons de notre quotidien, ils nous accompagnent jusqu’au bout du chemin. Ils s’immiscent de temps en temps en nous, alors que l’on aimerait les savoir absents, inexistants. Mais l’on ne peut contrôler ce que nous avons côtoyé, l’essence même de ce qui nous permet d’avancer. Les gens changent, mais leurs souvenirs demeurent, ils sont le miroir de leur vie, la vérité ne pouvant être évitée.
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Ndayane
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Le sourire du bonheur...
Aimer quelqu’un c’est se donner à la personne sans retenue, s’y abandonner les yeux fermés, en toute confiance. Mettre notre cœur entre ses mains, sachant qu’elle peut le briser à tout instant. Aimer quelqu’un c’est souhaiter sa présence, vouloir être près de lui, ou d’elle. Etre prêt à tout pour cette personne. S’accrocher à son regard, à ses mots, et quand vient le moment de l’oublier, ne pas y arriver, au risque d’avoir le cœur déchiré… L’amour, c’est prendre le risque de souffrir c’est vrai. Mais parfois au-delà des larmes versées se trouve un bonheur inégalable, parfait, que l’on rêve juste d’atteindre à nouveau. Alors oui, l’amour fait peur, il peut faire mal, mais il faut parfois fermer les yeux sur ses peurs pour espérer, avancer, et peut être même le trouver. Car avant même de l’avoir réalisé, il frappera de nouveau à la porte de ton cœur. Mais tu n’auras pas le temps de lui dire d’entrer, il se sera déjà glissé en toi…
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Somone
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Imagination...
Pas de préméditation, aucune intention. Fermez donc les yeux et abandonnez-vous à votre imagination. Laissez-la s’emparer de chacun de vos sens, transformer votre monde et en créer un nouveau. Vous sentez comment des images vous trottent dans la tête, vous ressentez tous les mirages qui vous envahissent l’esprit ? Inspirez-vous-en ! Ne réfléchissez plus, foncez ! Laissez-vous guider par chacune de vos idées, même minimes ! Laissez-vous inonder par ce que vous souffle votre conscience, absorbé par les profondeurs de votre insouciance. Vous pensez que cela est inutile, stérile, que ça ne vous mènera nulle part ? Eh bien, détrompez-vous ! Car c’est parfois dans le plus grand flou qu’émergent les projets les plus fous, mais aussi les plus spontanés, sincères, ceux qui sortent de vos tripes et reflètent votre personnalité, votre individualité. Échappez-vous au son de votre inspiration, poursuivez sans relâche l’expression de vos sentiments. Allez au plus profond de vous-même, plongez au cœur de vos envies, donnez-vous-en le tournis, tout est permis ! Et quand vous croirez avoir épuisé tout en quantité, grattez encore, soulever un peu plus le voile recouvrant vos songes et laisser les s’étirer à rallonge. Lâchez prise, brisez ce fil qui vous sépare de la liberté, rejoignez donc un peu plus cette agréable naïveté. Rêvez en toute impunité, et laissez-vous enfin emporter par votre créativité. Elle n’attend que vous, alors ne la déceviez pas. En son sein vous trouverez la tranquillité tant recherchée, et parviendrez à vous détacher de ses secrets trop longtemps camouflés.
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Plage des Viviers, Petite Corniche Almadies
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Inspiration...
Voyager c’est vivre tout simplement! On peut voyager sans aller très loin d’ailleurs… Et quant à vivre, autant se rendre la vie aussi joyeuse que possible! (en plus ça rend celle des autres également plus agréable: le voyage est contagieux! En tant que voyageur on entend souvent la phrase inverse, alors à l’instant cette phrase est touchante. Vous avez l’impression d’avoir capté l’essence même de la vie, comme dans les romans de Paolo Coelho vous avez l’impression d’écrire votre légende personnelle. Vous avez l’impression de tenir votre vie par le bon bout. En réalité, vous savez au fond de vous-même qu’il en fallut des errances et des erreurs avant de saisir cette petite vérité. Vous êtes né (ès) pour voyager. C’est votre vocation, votre conviction et votre destin. Certaines personnes ont toujours eu cette envie inassouvie de découvrir le monde. Simplement, ils ont cette impression que leurs vies se sont faites sans eux. Ils ont subi la vie qu’ils pensaient devoir vivre. On a tous eu ce sentiment d’enfermement dans son propre quotidien. Certains pensent que c’est cela la vie. Jusqu’au jour où ils découvrent cette fameuse phrase, « On a deux vies, et la deuxième commence quand on se rend compte qu’on n’en a qu’une. » Il faut leur dire qu’il n’est jamais trop tard. La vie se fait, se défait et se refait. Peu importe l’âge qu’on a. L’essentiel est de ne plus perdre une minute. Je sais qu’il n’y a rien d’inspirant en moi, rien d’extraordinaire, rien que les autres ne possèdent pas déjà. Simplement, j’ai regardé les autres voyager et je me suis dit : Pourquoi pas moi? Un voyageur n’inspire pas. Il crée un déclic. Ce sont les parcours qui sont inspirants. Personne n’est plus charismatique, plus courageux ou plus aventureux qu’un autre. Mais on peut encourager, stimuler et donner confiance en quelqu’un qui ignore posséder déjà ces qualités.
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Bargny
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RĂŠcits de voyage
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Somone, rĂŠserve naturelle.
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Gorée
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Gorée est peut-être la plus célèbre et la plus touristique des iles Sénégalaise, mais c’est aussi la plus belle. Je déteste les expressions toutes faites, les choses trop évidentes et les poncifs. Nous sommes libres d’aimer ou détester un lieu. Dans le milieu backpacker, il est de bon gout d’adorer ou détester des endroits. Certains lieux sont jugés trop touristiques, trop mainstream, plus assez sauvage. Gorée, je le suppose, fait partie de ces lieux. Je l’avoue, j’aime Gorée même si le Chevalier Stanislas de Boufflers et Anne Pepin ne regardent plus le soleil se coucher sur Dakar depuis longtemps. Je peux être nostalgique d'une époque que je n’ai pas connue à chaque fois que je me promène dans les rues droites de l'ile. Je laisse mon odorat voyager dans le temps pour découvrir la senteur de la gomme arabique dans les maisons provençales à l'Italienne et le parfum des mulâtres qui sucre l'ambiance de l'époque dans la cour intérieure des maisons en pierre. Je place toujours mon imagination dans une époque ou Facebook n'existait pas, ni instagram, ni twitter et les gens avaient le temps de lire et apprécié la photographie en argentique. Cette petite pensée peu profonde avait pour projet de présenter Gorée comme un lieu touristique, mais authentique. Vous pourrez voir beaucoup de choses à Gorée si vous êtes ouvert d’esprit et si la liberté des autres et une liberté supplémentaire pour vous même. Gorée possède un côté un peu surfait. Promenez-vous du côté de la maison des esclaves et vous verrez peut être cette femme mulâtre au détour d’une ruelle, allez visiter l'ancien palais du gouverneur situé a l'ouest de l'ile. Peut-être vous seriez les derniers visiteurs avant que cette épave s'écroule par la force de l'atlantique. Faites cette randonnée de la plage jusqu'au Castel et Gorée vous apparaîtra comme un volcan surgit de l'océan atlantique.
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Chez Olivier Cogels, Île de Gorée.
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Maison gorĂŠenne.
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Chez Marie Jose Crespin, Île de Gorée.
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Iwol
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Iwol est sur une montagne aux versants de champs verts et blanc de coton sur les étendues rougeoyantes des cultures de bissap et les roches dolérite qui dominent tout le pays Bedik. La vue imprenable qui s’étend jusqu’aux frontières de la Guinée-Conakry et au-delà ; nous pouvons retracer tout notre itinéraire et nous remémorer les moments incroyables et uniques que nous venons de vivre sur ces terres sauvages. Les levers avant l’aube, quand la Croix du Sud est couchée sur l’horizon, l’odeur du pain cuit dans la braise, la complicité avec des chasseurs qui nous accompagnent, les départs en 4x4 dans une savane bruissant de vies qui s’éveillent, parfum de la parkia biglobosa, des caicedrat en fleurs, douceur des vents, ciels immenses, chaleur plombant du soleil au zénith, spectacle de tant d’animaux qui vaquent à leur quotidien en totale harmonie et nous acceptent dans leur univers, regard majestueux des élans de Derby, promenades du soir, couchers de soleil flamboyants, éveil des vies nocturnes – le cri déchirant des Chimpanzés –, veillées qui se prolongent autour du feu, que montent dans le ciel les étoiles australes : Fomalhaut, Phénix, Al-Naïr. Vision biblique du mont Assirik sanctuaire de la nature sénégalaise.
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Jeune fille Bedik
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Mont Assirik
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On se déplace en 4X4, à son rythme, afin de mieux s’approprier celui de la nature... Le Sénégal oriental est une région de contrastes par ses reliefs et l’infinie variété de couleurs de ses paysages. Ici l’aube tient toujours ses promesses et l’on ne manquerait pour rien au monde le spectacle de l’éveil des animaux dans un décor qui évolue d'un flou bleuté vers des nuances de rose et d'orangé, puis étincelle, net et éblouissant jusqu'au déclin du soleil. Une piste de terre rouge s’interrompt dans le parc Niokolo-Koba. L’hôtel est installé à Simenti, situé en bordure du fleuve Gambie au cœur du parc. À proximité des caïlcédrat, rônier et baobabs dont les fruits enivrent les singes verts. Le guide nous aidera à décrypter leur comportement, en fonction des mouvements de leurs oreilles, de leur queue... Ici commencent la grande confrontation, l'abandon... Dans le ciel, les nuages dessinent des figures où se posent les pensées. Les repas succèdent à la magie du crépuscule et l’on retient son souffle, on guette les bruits, on interprète les craquements, les cris qui rompent le silence. La nuit est dense, elle semble épaisse, propice au frisson, on renoue avec la peur ancestrale du noir et plus confusément avec celle du lion d’Afrique, de la bête sauvage. L’émerveillement suivant sera baigné par la fraîcheur, on s’installe sur les bords du fleuve Gambie. Cette réserve d'eau permanente agit comme un appât pour les animaux qui vivent ici de façon sédentaire.
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Le fleuve Gambie traverse le parc du Niokolo Koba.
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C'est l'unique lieu au Sénégal où l'on peut voir les hippopotames. Des Cobs de Buffon, des guibs harnachés passent paisiblement tandis que des crocodiles du Nil se prélassent dans les points d’eau. En route vers le mont Assirik la piste d'herbe sèche ressemble au pelage d'un mammifère géant, la trace des roues à d'énormes griffures. Le Mont dresse une silhouette qui apparaît de loin comme desséchée. Le relief est composé de ces larges plateaux cuirassés, les "bowé" en langue peule, parcourue chaque année par le feu. En saison des pluies pourtant, ils se couvrent de l'un des meilleurs pâturages de la région. C'est la zone du parc qui est le véritable sanctuaire de la nature. Vous aurez la possibilité d'y voir des espèces devenues ailleurs très rares, comme l'éléphant, l'élan de Dery, le potamochère, et le chimpanzé. Grâce à la création du Parc, à partir des années 50, la population d'éléphants, estimée à l'époque à une trentaine d'individus, a pu se reconstituer jusqu'au début des années 70. Les années de sécheresse ont été celles du grand braconnage. Les éléphants ont subi des pertes énormes. Actuellement, on assiste à un début de reconstitution de leur population à travers le Parc. Il subsiste plusieurs troupeaux, un sur le Niokolo Koba, un sur Assirik et quelques individus isolés entre Badi et Simenti. Ils font aujourd'hui l'objet d'un suivi scientifique et d'une protection rapprochée. Plusieurs jeunes ont été identifiés et on peut cultiver l'espoir raisonnable de voir survivre les derniers éléphants du Sénégal.
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Un Cobe de Buffon femelle avec ces deux petits, parc Niokolo Koba .
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Podor la paix au bord du fleuve Sénégal
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Le nez dans les étoiles, le film du trajet repasse dans ma tête. Aux villages prospères de la savane ponctuée de cultures maraîchères, de rôniers et de baobabs ont succédé, à mesure qu’on avance vers le nord, des terres sablonneuses vallonée sur des dunes rouges jalonnées de huttes en paille des familles peules. Podor se découvre au bout d’une route dans les derniers kilomètres après le carrefour de Taredji, une piste perchée sur des digues qui serpente entre les champs de culture où vaches, chèvres et moutons pâturent. La ville de Podor est une oeuvre du climat sahélien, le paradoxe des alizés continentaux tutoie le tragique et le comique avec des journées qui peuvent être extrêmement chaud suivies par des nuits glaciales. Le chevalier de Boufflers, qui y a séjourné, a gardé de la ville un merveilleux souvenir, le comparant en 1785 au «poêle de l’Afrique, avec sa garnison composée de 20 soldats agonisants… Et ces magasins où il n’y a presque rien». Selon le chevalier, le thermomètre explosait à midi. Un rien exagéré. Les rues sont calmes et impeccablement tracées au cordeau. Le long du quai, bien refait et classé monument historique, comme quelques-unes des maisons de cet ancien comptoir colonial, on admire les merles à dos métallique et à courte queue, on déguste le capitaine ou le rouget du fleuve. Les promenades dans le village de Ngawlé là où on apprécie ses maisons en banco construites de façon traditionnelle, ses ruelles étroites et propres, ses façades ornées de motifs en relief dans l’argile, Ngawlé est une parfaite représentation de l’architecture traditionnelle en banco.
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Le Fort de Podor
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Mes plus beaux souvenirs reste le Thiofy Studio du photographe Oumar Ly à l’écart du marché de Podor.Oumar Ly avait à l'époque 71 ans. «Mon père était grand jardinier, je vendais les salades au marché.» Tout jeune, il achète son premier Kodak à la Maurel et Prom et ouvre son studio en 1963, faisant l’opérateur ambulant : baptêmes, mariages et photos d’identité, pour lesquels il parcourt les villages avec les autorités. «Je faisais les deux rives, Mauritanie et Sénégal. Quand un Maure refusait d’être photographié, je lui disais : "Si tu ne prends pas de photo, tu n’iras jamais à La Mecque, car tu n’auras pas de carte d’identité."» La combine marchait. Oumar Ly a pris tout le monde. En 2009, l’homme au Rolleiflex 6x6 devient célèbre, un des rois du portrait africain, à l’instar de Malick Sidibé, notamment grâce à une journaliste française, Frédérique Chapuis. Alors qu’il recadrait les visages, elle a imprimé les photos en entier et ça a fait la différence. Le bivouac installé sur l’île à Morphil au pied d’un immense acacia qui courbe ses longs bras vers l’humidité du sol, des effluves de ragoût de viande chatouillent les narines.Le petit matin vous trouvera aguerri, et grand bien vous fasse, car le fils d'un marabout est venu nous cherché pour nous guidé sur les traces d’El Hadj Oumar Tall (1794-1864), le chef guerrier qui combattit Faidherbe, et inversement. Oumar Tall fonda l’immense empire Toucouleur et résista face à la colonisation. «Il se tailla, par le verbe et le sabre, un empire qui s’étendit de Tombouctou au Fouta Djalon, avant de disparaître un jour de février 1864 dans le mystère des falaises de Deguembéré», près de Bandiagara (Mali). On peut, suivant cette balade, retrouver les traces des «mosquées omariennes», comme celle d’Alwar, son village natal, en briques de terre séchée, de style soudanais. La nuit, Podor dort tôt. L’électricité y est rare, car trop chère pour les familles. Malgré tout, les étoiles brillent plus faiblement qu’en plein désert. Heureusement, il y a le thé à la menthe de notre hôte pour adoucir mon esprit de Dakarois.
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Auberge du Tékrour/Maison Guillaume Foy
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De Joal à Palmarin
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Le vent charrie une poudre de sable, de sel ou argile, multicolore, nuée rasante qui file en ondoyant. Le désert s'étire, infini, silencieux, jusqu'à rejoindre l'azur. Partis de Joal, quelques voyageurs traversent en 4 x 4 l'immensité minérale. Plus loin, la route-digue de latérite rouge file tout droit vers les villages de Ngallou, Nguethie, Ngouloumane, Diakhanor... De part et d'autre, les terres nues couleur oxydées et marbrées de sel, localement délavé par un duvet d'herbes sèches, rappellent l'intensité des rayons du soleil. La mangrove qui les protégeait, s'éloigne à la frontière de la mer et de la terre, a fini par disparaître avec le temps. Étouffé par la rareté des eaux douces et avec le sel de plus en plus abondant, ceux qui a sans doute provoqué la disparition de certaines espèces animales pintades, biches, végétales et la baisse de la production agricole. Seuls des Baobabs résistent encore à la salinisation des terres inondée par l'avancée de l'océan atlantique. Quelque part on traverse un espace indemne avec de grands trous, protéiformes et multicolores, tour à tour vêtu de roses, orange ou blanc. Face à ce paysage, j'avais douté des récits de voyage du comte Édouard Bouët-Willaumez, officier de marine et explorateur français. décris ainsi ces paysages en 1848 « De Joal à Palmarin, la côte est coupée par de petites rivières ou marigots qui viennent déboucher à la mer, surtout pendant la saison des pluies : l'une d'elles prend le nom de rivière Goussau-Gué ; à 2 milles de cette rivière s'avance la pointe de Palmarin, reconnaissable à des touffes d'arbres fort distinctes, au milieu desquelles sont bâtis quelques-uns des villages de ce nom3. » Aujourd’hui, j'assiste à ce spectacle contrasté, de vallée fossile craquelée, asséchée ponctuant le paysage d’un site de palmiers marins à la beauté pittoresque, reste de verdure du passé.
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Le dĂŠsert de Lampoul
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À proximité de Kébémere et Louga, les dunes de Lompoul offrent des paysages époustouflants. C’est le point de départ de nombreuses randonnées à dos de chameau et de bivouac dans le désert. Lompoul port de pêche industriel régi par les Russes, et son désert à l'intérieur des terres. Nous y accédons après quelques heures de plages puis par des pistes nous plongeant à l'intérieur des terres. À Lompoul le paysage commence à changer, des dunes apparaissent, la couleur du sable tire de plus en plus sur le rouge et la végétation disparait peu à peu. La piste nous détériorant nous sommes de plus en plus secoués. Nous arrivons enfin sous une chaleur torride. Le Lodge en plein désert est constituée de plusieurs tentes d'habitations entourant une tente plus grande ou nous prendrons nos repas. Le désert est présent à perte de vue avec ses dunes rouges géantes. Le paysage est magnifique, lunaire. Il n'y a pas un nuage dans le ciel de plomb. Le moment que je préfère de ces journées écoulées dans le désert se passe à la fin de l'après-midi avant que le soleil ne se couche, quand la luminosité n'a plus l'intensité aveuglante du soleil de midi. Les ombres douces produisent alors un effet magique de clair-obscur sur les dunes. On s'arrête de marcher. Repue de cette marche, je m'affale sur une dune, face au soleil. Au premier plan, la lumière qu'il diffuse est de plus en plus tamisée, alors qu'à l'horizon le ciel flamboie d'un rouge éclatant qu'aucun regard ne saurait soutenir. Ces ultimes minutes où le soleil nous offre sa lueur déclinante paraissent interminables. Il semble comme hésiter à se coucher et nous, nous aimerions le retenir, de peur qu'il n'emploie la nuit à reconsidérer sa mission en nous maintenant dans une pénombre éternelle. Mais nous savons que, le lendemain, fidèle à lui-même en ces contrées sauvages, il répandra généreusement sa lumière et sa chaleur. Il rythmera la vie de ce désert de sable que toute âme paraît avoir délaissée et qui pourtant, est riche d'une vie souterraine insoupçonnée. La tente blanche qui nous servira de chambre est spacieuse, éclairée par des bougies et des lampes tempête. Elle est meublée d'objets maures (poufs, coffres en cuir) et les lits sont confortables. À notre grande surprise, à l'arrière de la tente, est érigée une salle de bain en plein air protégée par une brande. Les nuits sont un peu fraiches, mais les couvertures ne manquent pas ... 60
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Saint-Louis
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Saint-Louis du Sénégal est un de ces noms qui éveille indubitablement quelque chose dans l’imaginaire collectif des Sénégalais. Situer tout au nord du Sénégal, près de la frontière avec la Mauritanie. Si le site était déjà un centre de transit de caravanes, ce fut la première ville fondée par les Européens en Afrique de l’Ouest. Un glorieux passé est en effet attaché au nom de cette ville du nord du pays situé à l’embouchure du fleuve Sénégal. Saint-Louis, baptisé ainsi en l’honneur du roi Louis XIII, devint vite un port commercial et militaire important. La gomme arabique et la traite des esclaves conduisirent la ville à son apogée au XIXe siècle. Longtemps, Saint-Louis fut un comptoir commercial important. Mais lorsque Dakar fut choisie comme capitale, le déclin commença. Saint-Louis vit passer du beau monde. À noter que c’est de Saint-Louis que partit Mermoz pour relier le Brésil en avion en 1930. Ce fut la première liaison postale transatlantique. Aujourd’hui, les rues de l’île témoignent toujours de ce faste d’antan. Elles ont ce charme qui pousse le visiteur à ralentir ses pas pour s’imprégner de l’atmosphère particulière du lieu. Chaque ruelle de l’île offre son lot de détails. L’ancien hôtel des impôts abrite un étonnant double escalier dans sa cour intérieure. Le bâtiment est néanmoins laissé à l’abandon comme en témoignent les archives éparpillées un peu partout dans les pièces du rez-de-chaussée. Ici aussi, le patrimoine ne reçoit pas le soin qu’il mérite. Le poids de l’histoire est ici constamment palpable. La lumière du soleil couchant caresse les façades ocre et colorées de ces vieilles bâtisses coloniales, soulignant les balcons en fer forgé, les vieilles portes ou les cours intérieures au charme certain. Le pont Faidherbe qui enjambe le fleuve Sénégal est un peu le symbole de Saint-Louis.
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La CathĂŠdrale de Saint-Louis
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Le Parc national du delta du Saloum en ULM.
*Planeur ultra-lĂŠger motorisĂŠ
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Les visages peuvent être inoubliables…
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Notre image est une richesse. Preuve parfois de notre passage sur terre. Nous verrons que notre portrait qu’il soit photographié ou dans l’imagination de la mémoire collective est basé sur des souvenirs. Certains le gardent pour eux et d’autres le partagent. Sur cette série de photographie, j’ai voulu partager ma fascination pour les visages, les regards et les traits des femmes. Peu importe les canons de beauté classiques, la beauté dépasse les cultures, les âges, les classes sociales. Sans vouloir tenir un discours faussement humaniste et simpliste sur les femmes. Qu’elle soit muse ou modèle: modèles de beauté, modèles d’estime de soi, modèles de force…
NB: Cette série de photos a été exposée à la Biennale africaine de la photographie, 11e édition de Bamako.
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Les enfants Lebou de Toubab Dialaw
Cette série de photos a été exposé au festival international de photographie et d'arts visuels à Madrid par PHotoEspaña.
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PROFIL
d’un cheval de charrette
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Cette série de photos a étais exposé a Milano photofestival.
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Ce livre doit beaucoup aux conseils d’Iba GAYE. J’en profite pour remercier Madame Terry CARNEY, elle est la première à croire en mois dans mes aventure et dans la photographie, sont soutient été de l’or à l’époque. Merci à tous mes modeles: Adja Diakhaté, Fama Dia, Aissata Diop, Mariéme Seck, Codou Olivia, Awa Mbodj, Dorah Kingue, Lee Litumbe et Kewe Lo. Produit per Copyright pour les collections de FROM DAKAR. Conception graphique : Moctar BA Couverture : Moctar BA moctar-ba@live.fr
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