N°3
Dimanche, 6 juillet 2014 Sunday, 6 July 2014
Le quotidien du Montreux Jazz Festival The Montreux Jazz Festival daily newspaper
Selah Sue, Montreux Jazz Lab, 05.07
MONTREUX JAZZ
BOOM
TONIGHT
BUIKA: L’INCANDESCENCE
F La «fille de feu» de Majorque évolue dans les styles musicaux avec une voix cassée sans égal. Des paroles chargées d’expérience, de sensualité brute et d’Espagne. Connue pour ses collaborations avec Chick Corea, Anoushka Shankar, Mariza, Bebo y Chucho Valdés ou sa compatriote Luz Casal, Buika a souvent prêté sa voix à des bandes-originales de films. Son «amour d’aimer» hantait La Piel que Habito de Pedro Almodovar… Avec un album sorti en 2013, La noche
7 Best of: Selah Sue
más larga, Concha Buika épousera jazz et flamenco pour une nuit qu’on espère interminable le 6 juillet au Montreux Jazz Club.
BUIKA: THE FLAME
E Concha Buika, the Niña de Fuego from Majorca, has shared her inimitable voice with multiple musical styles. Her lyrics reflect deep experience, raw sensuality, and her homeland. Known for her work alongside Chick Corea, Anoushka Shankar, Mariza, Bebo y Chucho Valdés, and her compatriot Luz Casal, Buika has
also been featured on numerous film soundtracks, with her “Por el amor de amar” haunting Pedro Almodovar’s 2011 masterpiece, The Skin I Live In. Buika, who released an album entitled La noche más larga in 2013, will bring jazz and flamenco to a night that will live on forever. 6 July at the Montreux Jazz Club.
8 Interview: Chris Rea
Buika, Montreux Jazz Club, 20:00
10 Cycles pop
MJAF UBS Public Price Ann Chronicle 210x197 FR prod.pdf
© FFJM - F. Jaquenod for GM-Press, 1979
Dimanche, 6 juillet 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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04.07.14
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rendez-vous sur www.mjaf.ch/UBS pour découvrir les nominés ET gagner un ipad mini! 15 talents ont été selectionnés et se produiront durant le Festival, dans le cadre des Concours et de Music in the Park. Votez pour donner la chance à un seul de ces candidats de gagner une place à la Montreux Jazz Academy en automne 2014.
Prix du Public UBS
MONTREUX JAZZ FESTIVAL, 4-19 juillet 2014
IMPRESSUM Published by Fondation du Festival de Jazz de Montreux Creative Content 2M2C / Avenue Claude Nobs 5 / 1820 Montreux Switzerland www.montreuxjazz.com CEO Mathieu Jaton Project Coordinators Marine Dumas Isabel Sánchez Editor-in-chief David Brun-Lambert Project Assistant Hélène Panchaud Editorial Secretary Jade Albasini Contact chronicle@mjf.ch
Contributing Editors Antoine Bal, David Brun-Lambert, Julie Hugo, Salomé Kiner, Laurent Küng, Eduardo Mendez, Andrea Nardini, Margaux Reguin, Steve Riesen Photographers FFJM : Daniel Balmat, Mehdi Benkler, Arnaud Derib, Marc Ducrest, Lionel Flusin, Anne-Laure Lechat, Damien Richard GM Press : Georges Braunschweig, Joseph Carlucci, Inès Edouard Curchod, Inès Galai, Lauren Pasche EMI, Musikvertrieb, Phonag, Sony, Universal Music, Warner Translators Bridget Black, Louise Fudym, Amandine Lauber, Delphine Meylan, Lisandro Nanzer, Kristen Noto Printed by ImprimExpress Sàrl Printed in Villeneuve 5’000 copies on FSC paper
F Le Chronicle est plus beau dans les mains d’un lecteur plutôt qu’au sol. E The Chronicle looks better in a reader’s hand than on the floor.
Advertising Mathilde Blandin, m.blandin@mjf.ch Artistic Consultant David Tanguy Designed by eikonEMF Wilhelm Kaiser 13 / 1705 Fribourg / Switzerland www.eikon.emf.ch/anthracite Art Director Joackim Devaud Graphic Designer Rebecca Bühler Layout Composers Rebecca Bühler, Emilie Renevey, Lucien Roussy
EDITO
F Combien de festivaliers venus au Montreux Jazz se rendent à Territet désormais ? Il ne s’y passe plus que si peu. Pour l’essentiel, ceux qui poussent jusque là sont des acharnés d’archéo-pop. On l’oublie souvent aujourd’hui, mais bien avant que ce bout de Riviera ne devienne synonyme de musique et de Festival, c’est depuis Territet que s’est lancée une aventure hôtelière hors du commun. Des palaces construits ici à la fin du XIXe siècle, le Grand Hôtel tient une place à part. C’est en effet notamment à travers lui que la région s’est inscrite sur la carte des destinations hôtelières les plus prisées d’Europe. Parmi ses pensionnaires: Sissi ou Deep Purple. L’édifice est devenu une copropriété il y a des années. Son hall n’est plus accessible. Pour y pénétrer, il faut une clef. Nous l’avons trouvé, découvrant un espace demeuré tel qu’il était lorsque Richie Blackmore et son groupe vinrent y enregistrer «Smoke on the Water» en 1971. L’histoire est célèbre. Ce qui l’est moins, c’est l’environnement dans lequel les Anglais ont bouclé Machine Head. Une coupole à présent délavée. Des murs aujourd’hui jaunis qui
s’étendent d’un salon désaffecté à un escalier monumental que personne n’emprunte plus jamais. Au plafond, un lustre poussiéreux. Dans un coin, négligemment posée, la baignoire de Sissi. Combien de lieux identiques où s’est aussi construite l’histoire culturelle de Montreux au XXe siècle attendent d’être redécouverts? Réunis, ils constitueraient le panorama unique d’une aventure humaine et artistique inouïe, jamais mesurée et longtemps poursuivie en secret. David Brun-Lambert E How many festival-goers here for Montreux Jazz go to Territet these days? Not many. Most of the people who make it that far are fans of vintage pop. We often forget that long before this stretch of the Riviera was synonymous with music and the Festival, an extraordinary hotel adventure started in Territet. Many palatial hotels were constructed here at the end of the 19th century, but the Grand Hôtel is unique among them. It’s in large part thanks to this hotel that the region became one of the most desirable locations for hotels in Europe. Guests have included
WILD CARD: LEONZIO CHERUBINI*
Sissi and Deep Purple. The building has been co-owned for years. Its hall can no longer be accessed. You need a key to get in. We found one, and found a space that hasn’t changed since Richie Blackmore and his group came and recorded “Smoke on the Water” in 1971. This is a famous story. What is less famous is the setting in which the English group finished Machine Head. There’s a graying cupola. Yellowing walls the length of an abandoned drawing room that leads to a monumental staircase that nobody will ever use again. A dusty chandelier hangs from the ceiling. Ceramic tiles cover the floor. In a corner, carelessly left, Sissi’s bath waits. How many other places like this, which built Montreux’s cultural history throughout the 20th century, are waiting to be rediscovered? Together, they would make up a unique panorama of an unrecorded, unprecedented human, artistic adventure, which has continued in secret for a long time.
FACTS & FIGURES
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F Le nombre de Marie qui travaillent au Staff du Montreux Jazz Festival. En ce jour de Sainte Mariette, bonne fête! Notation musicale graphique mobile - Leonzio Cherubini! Travail imprégné par la New York School of Music and Visual Arts.! www.e-drumset.com!
! ! ! ! !
E The number of Maries on the Montreux Jazz Festival’s Staff. Today’s Saint of the Day? St. Maria Goretti !
“- Hey, c’est lourd ! On prend l’ascenseur? - L’ascenseur? Tu te prends pour les Stones ou bien? ”
Echange entre roadies entendu au B1
“- Hey, it’s heavy. Shall we take
the elevator? - The elevator? You think you’re one of the Stones or what? ”
Conversation between roadies heard at B1
LE SAVIEZ-VOUS
2+3+4
*Flora, Petit Palais, 06.07, 17:00
Main Partners
F Conçu par Eugène Jost en 1906 le Petit Palais était originellement une piste de patin à roulettes destinée aux clients du Montreux Palace. C’est notamment ici que Deep Purple élabora «Smoke on the Water» durant une jam en 1971. Ici aussi que Led Zeppelin donna son dernier concert sur la Riviera en 1972. Ce soir, le Petit Palais accueille Flora. E Built by Eugène Jost in 1906, the Petit Palais was originally a roller skate rink for the Montreux Palace’s clientele. It was here that Deep Purple created “Smoke on the Water” during a jam session that was at first named Title #1. It was also the site of Led Zeppelin’s last concert on the Riviera in October 1972. Tonight, the Petit Palais is hosting Flora, a piece for three drum kits and three percussion instruments.
Sunday, 6 July 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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PROGRAM 06.07 PAYING
AUDITORIUM STRAVINSKI
20:00
MONTREUX JAZZ CLUB
20:00
MONTREUX JAZZ LAB
TEDESCHI TRUCKS BAND
IVÁN «MELON» LEWIS & CONTINUUM QUARTET
TEMPLES
BUDDY GUY
BUIKA
EELS
MUSIC IN THE PARK
AFTERSHOWS
BAR EL MUNDO
BRIGHTON & HOVE YOUTH BIG BAND KU JAZZ ENSEMBLE I WITH DEBORAH BROWN AND STEVE LEISRING THE UNIVERSITY OF NEBRASKALINCOLN FACULTY JAZZ ENSEMBLE SHURE PRESENTS: FINGERTRAP FIDDLERS GREEN
14:00
F Dès la fin des concerts E Start when concerts end
16:15
Montreux Jazz Lab THE HIITERS ETIENNE DE CRÉCY
ZUMBA SESSION BEABAHIA APERO JAZZ BARRIO LATINO
20:30
CRÉATIONS Hôtel des 3 Couronnes, Vevey ALIM QASIMOV ENSEMBLE
THE ROCK CAVE
21:00
18:15 20:30 22:30 22:00
THE CHIKITAS DRENGE
THE STUDIO
23:00
EL MUNDO LATINO — LATINOS CLUB 22:00 DJ RUMBA STEREO, DJ CHARLIN
Montreux Jazz Club F Jam Sessions improvisées et DJs. E Improvised Jam Sessions and DJs.
COMPETITIONS
16:00
Andrés Corredor, Yoav Eshed, Alexander Goodman Président: Lee Ritenour
E The Festival’s interactive museum with exhibits, Festival archives, photo collection among other activities.
F Pour toutes les informations sur les prix et mises à jour du programme, veuillez télécharger la «Montreux Jazz App» E For information on the prices and updates on the program, please download the “Montreux Jazz App” www.montreuxjazzfestival.com
EN
FREE
« E » comme dans “Ensemble”. Une devise qui sied aussi bien à l’ambiance rassembleuse et les concerts hors pair qui vous attendent au Montreux Jazz Festival, qu’au principe du co-voiturage. Envie de partager un trajet avec de joyeux drilles, plutôt que de chanter à tue-tête la même vieille cassette tout seul dans un bus bondé? E-covoiturage.ch vous propose un nouvel outil qui remplit les véhicules en quelques clics, que vous soyez conducteur ou passager ! Comment ça fonctionne ? 1. Je saisis mes données 2. Je reçois une proposition 3. Je confirme ma participation 4. J’imprime ma feuille de route Alors jouez le jeu et annoncez votre trajet dès aujourd’hui ! Les premiers inscrits participeront automatiquement à un concours et une surprise attendra tous les festivaliers covoitureurs.
F L’espace muséal du Festival : dispositifs interactifs, diffusion des archives, expo photo et autres activités à découvrir.
INFORMATION
LADY NOON GARANCE KLANGKARUSSELL MASAYA
FR
CHALET D’EN BAS
SOCAR MONTREUX JAZZ ELECTRIC GUITAR COMPETITION - FINAL
ATTITUDE NOCTURNE
GOOD TO KNOW CO-VOITURAGE
16:00 18:00 20:00
“E” as in “Ensemble”: a motto that suits the incomparable feeling of connection at the Montreux Jazz concerts waiting for you and car sharing alike. Wouldn’t you rather share a few laughs as you’re cruising along instead of belting out the same old song by yourself in a jam-packed bus? E-covoiturage.ch provides drivers and roadtrippers with a new tool for meeting up in just a few clicks. How does it work? 1. I enter my info. 2. I receive an offer. 3. I accept the offer. 4. I print out my roadmap. So play the game and post your trip today! The first people to sign up are automatically entered into a contest and every car sharer at the Festival will receive a special gift.
PAYING
Petit Palais FLORA 17:00
excellentes mixeuses et remixeuses du coin qui savent sévèrement faire bouger sur leurs sets mélodiques: Garance puis Masaya. Pleine lune ou pas, on entend déjà des cris de loups égarés. Antoine Bal
CAROUSSEL DE NUIT
F Une électro pop aux accents dance lumineux et entêtants, voilà à peu près ce que distille le duo autrichien Klangkarussel qui a explosé en 2011 avec le tube «Sonnentanz». Avec un hit d’une telle efficacité, appuyé par ce refrain délicieusement porté par la voix de Will Heard, on s’imagine tout à fait regarder au loin un horizon au petit matin, léger et plein d’espoirs dans ce que pourrait bien nous apporter l’été. Ça fonctionne à l’universel.
Klangkarussel, The Studio, 23:00
Depuis mai dernier, un autre chant fait son ascension. Il s’agit de Netzwerk, second single, que leur album éponyme va envelopper avec d’autres rythmes sautillants. Il sort ce mois-ci. C’est donc à une sorte d’anniversaire musical ou de crémaillère estivale que le groupe nous convie au Studio, haut lieu des nuits électroniques du Festival. Dans le lineup fort bien ficelé de cette première nuit dominicale montreusienne ouverte par la résidente du MAD Lady Noon, on retrouve aussi deux
E Austrian duo Klangkarussel exploded onto the scene in 2011 with the single “Sonnentanz” showcasing electro-pop with an entrancingly luminous dance feel. That amazingly effective title, anchored by the refrain in the scrumptious voice of Will Heard, really made you imagine looking out over the horizon early in the morning, not a care in the world, just wondering what summer had in store for you. And it wasn’t a one-off! Since May, another song has been making its way up the charts: “Netzwerk”, their new single, from the album of the same name – out this month! It will serve up plenty of other catchy rhythms. So, it’s to a sort of anniversary, or release party, that this group is inviting us at the Studio, the Festival’s venue dedicated to endless electronic nights. In the carefully assembled lineup for that first Montreux Sunday evening, kicked off by Lady Noon, resident at Lausanne’s MAD club, you will also find two excellent local howling spinners and remixers: Garance and Masaya. Whether or not the moon is full, you can already hear the howling of these lone wolves…
LIGHTS
HIGH
NIGHT CAROUSEL
Sunday, 6 July 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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PORTFOLIO 05.07
Tiken Jah Fakoly, Montreux Jazz Lab
Chris Rea, Auditorium Stravinski
Everlast, Montreux Jazz Club
Selah Sue, Montreux Jazz Lab
F Arrivé au Club au milieu du line-check, j’attends tranquillou que le concert commence. La musique s’éteint. Everlast et son beret s’approchent du micro, roulant des omoplattes. “You’re feeling alright ?” Seulement quatre mots et j’ai l’impression qu’une Triumph 750 vient de déraper sur le gravier à quelques mètres de mon visage. Une voix comme ça, c’est du boulot. A 100%. Comme un athlète de haut niveau. Se forcer à fumer encore une clope quand la langue est plus sèche que de la craie pilée. Se rincer la gorge au gin dès le matin. Tous les jours. Mais à long terme, ça paie. À peine ces premiers mots déclarés, le public reste silencieux comme un enfant qu’on engueule. “J’ai plutôt l’habitude de jouer dans des bars où les gens sont ivres et disent de la merde. Ici, vous m’écoutez. C’est cool. Mais si vous préférez picoler et parler pendant que je joue, ça me va aussi.” Everlast, c’est la classe virile et nonchalante.
SELAH SUE, YES SISTA!
Bastian Baker, Montreux Jazz Club
F La Belgique était à l’honneur hier soir. Devant moi, deux supportrices au maillot rouge sont venues admirer l’une des fiertés du pays : Selah Sue. « Wyd haden verloren ! », déplore-t-elle au micro. Du moins, c’est ce que j’ai compris. Le flamand, c’est pas mon fort. Son bassiste, lui, ricane. Son écharpe orange trahit ses origines hollandaises. Mais bref, le foot, elle le fait vite oublier ! A coup de reverb et d’écho loufoques, Selah Sue enflamme le public du Lab, En solo, sa musique est intime et intrigante. Avec ses men, ça devient carrément plus puissant. Raggae, pop, néo-soul, hip hop ? Peu importe le terme, elle se joue des genres pour se créer son propre univers. Et à Montreux, ce n’est pas une surprise. Son concert au Jazz Café était resté dans les mémoires. Steve Riesen
Laurent Küng
EVERLAST, THE MAN’S GOT BALLS
E I’m at the Club in the middle of the line to get in. Just chilling, waiting for the concert to start. The music shuts off. Everlast goes up to the mic with his beret, rolling his shoulders. “You’re feeling alright?” Just four words and I feel like a Triumph 750 just skid on gravel a few meters from my face. A voice like that takes work. 100%. Like a top-notch athlete. Forcing yourself to smoke yet another cigarette when your tongue already feels like powdered chalk. Gargling gin in the morning. Every day. But long-term it pays off. He’s barely uttered the first few words and the public is silent, like a child getting yelled at. “I’m more used to playing in bars where people are drunk and talking shit. Here, you listen to me. It’s cool. But if you’d rather drink and talk while I’m playing that’s okay too.” Everlast is masculine nonchalance personified.
BEST OF
EVERLAST, UNE HISTOIRE DE ROUSTONS
SELAH SUE, YES SISTA!
E Belgium was flavor of the night tonight. In front of me were two supporters in red strips who’d come to admire someone their country can be proud of, Selah Sue. She complained “Wyd haden verloren!” At least that’s what I understood. Flemish isn’t my forté. Her bassist sniggered. His orange scarf betrayed his Dutch origins. But anyway, she quickly had us forgetting soccer! Selah Sue fired up the public in the Lab with her reverb and crazy echoes. When she does solos, her music is intimate and intriguing. Add her men, and it suddenly becomes more powerful. Reggae, pop, neo-soul or hip hop? Whatever you want to call it, she plays with genres and creates her own universe. And in Montreux, it’s not a surprise. Her 2011 concert in the Jazz Café is still fresh in people’s minds.
CHRIS REA
Après douze ans d’absence, c’est en amoureux de Montreux et du Festival que Chris Rea est venu honorer hier soir la Riviera de sa présence. Touché!
After ten years without performing here, Chris Rea, a big fan of Montreux and of the Festival, honoured the Riviera with his presence last night.
Propos recueillis par Eduardo Mendez
Interview by Eduardo Mendez
F C’est la cinquième fois que vous venez jouer au Jazz Festival, un lieu que vous connaissez intimement pour y avoir résidé durant plusieurs années. Vous souvenez-vous de votre première venue ici? Ma première fois à Montreux… Je suis venu jusqu’ici depuis l’Angleterre en voiture avec ma femme et mes enfants. Le groupe Queen possédait alors un studio à côté du Casino. Dés qu’il était disponible, ils me laissaient y enregistrer, un coup de main qui m’a bien aidé à mes débuts. On est revenu ici une tonne de fois par la suite.
«Clapton m’a félicité, disant: quel jeu de guitare passionné! J’étais en larmes» Quant à Claude Nobs, il a participé à mon premier album, Water Sign. Il a joué de l’harmonica sur le premier morceau. Ça nous a rapprochés, au point qu’on est devenu très bons amis. Parmi toutes ces images de Montreux que vous avez, laquelle gardez-vous en particulier en tête? Une fois, en rentrant à l’hôtel,
INTERVIEW
Dimanche, 6 juillet 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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on a improvisé une petite jam et joué «All gone». J’ai fini par un solo de guitare. En sortant de la chambre, je tombe sur Eric Clapton. Il s’approche et me félicite: «Ouah! Quel jeu de guitare passionné!» Venant de lui, ça m’a bouleversé. J’étais en larmes. Beaucoup de tes titres ont été enregistrés ici à Montreux. Qu’est-ce que le cadre t’inspire musicalement? La vue qu’on a des montagnes et du Lac en marchant vers Chillon est une des plus époustouflantes au monde. J’ai été partout dans le monde, mais je n’ai jamais rien vu de pareil : un paysage si imposant, chaque jour différent, ça vous coupe le souffle.
Comment te sens-tu avant ta performance de ce soir ? Demandez moi ça après le concert (rire). Je suis toujours stressé quand je joue dans des lieux d’exception comme Montreux. C’est un lieu particulier, spécial. C’est comme devoir jouer chez soi, l’enjeu est plus important…
E It is your fifth time here performing at the Montreux Jazz Festival. You’ve lived here too. What is your personal relationship with Montreux? I first came to Montreux with my wife and my little kids in a car from England. Queen, the rock band, had a studio near the casino and, when the studio was empty, they used to let me record, which really did help me in the beginning. After that, we came back many times. Claude Nobs actually played the harmonica on the first track of my first record, Roxanne and we became very good friends. Of all the memories you have from Montreux, what is the most vivid one? The best memory for me was when I went back to the hotel. We had a jam session and we played a song called All gone. I did a slide guitar solo in the end. And Eric Clapton was waiting at the hotel and he came over to me and he said “very good”. In fact he said “wild guitar playing”. Coming from him, that was completely overwhelming. I was in tears.
You’ve recorded many of your songs here in Montreux. What inspires you musically here? Looking at Dents du Midi as you walk towards Chillon.
«Clapton said to me: wild guitar playing! I was in tears.» For me, it is one of the strangest places in the world. You know I’ve been everywhere, but to be so low and see something so high, never the same, everyday different. How do you feel before performing tonight? Ask me after the concert. I always get very nervous in places like Montreux, because it is a particular location. It means something more special. It’s like being at home, so you get a bit scared.
«RESPIRE»
«Le Montreux Jazz Café: Le nirvana des fétichistes pop!»
sais pas… j’veux dire, je sais. Elle est tombée sur mes e-mails.» J’évite de remuer le couteau dans la plaie. Elle est fraîche. Je dis: «Je peux te payer un verre? Tu sais quoi? Je dois certainement être le seul Italien pure souche basé à Shanghai que tu risques de rencontrer ce soir». Il m’entend à peine. Il est ailleurs. «Je suis venu ici pour le show, dit-il. Mais j’ai plus envie de voir quoi que ce soit…» «Respire, mec», j’ai envie de lui dire. Mais je me rends vite compte que tout ça ne me regarde pas. C’est l’heure de me rendre au Petit-Théâtre. Je traverse le Montreux Palace. J’accède à la salle. C’est déjà bondé. Sans le faire exprès, je bouscule une femme aux cheveux noirs et bouclés. «Scusi.» Elle se retourne. Je la reconnais. Il y a cinq minutes, elle jetait sa serviette au visage de son infidèle boyfriend.
rich Russian guys, a charming blonde girl is watching, like fascinated, a Jamiroquai live video on a screen… “I must believe. I can do anything. I can heal anyone,” he sang. Yeah, with my access pass I feel just like Jay Kay. But… A young couple on the table number 5 is vividly arguing. The tone of the girl is definitely a bit higher” for being a normal discussion. “I told you many times! It’s enough. It’s over!” She throws the towel over the table. She gets up and runs away. Weird situation. Complicated. “But please.... Wait just one second! Let me explain you”, he says, standing like petrified on his seat. Outside the wind is rising. The sky is turning purple. And thunders tears the sky. Male empathy. I come closer to him.
“BREATHE”
“What’s going on, man?”, I ask. “I don’t know… I mean, I should know. She probably has read my mail box.” I grasp what might have happened and I “don’t rub salt into it”. The wound is still fresh. “May I offer you something? I’m the only born Italian based in Shanghai that you could meet in town tonight” I say… He doesn’t hear me. He’s lost. “I came here for the show, he says. Now I don’t want to see anything. Not without her”. “Breathe, man”, I think. But I suddenly realize that is not my business. It is time for me to join the Petit Théâ tre. I walk into the hall of the Montreux Palace. It’s already crowded. By mistake I hit a curly black hair girl. “Sorry madame.” I apologize. She turns around. I know that face. And her unfaithful (ex) boyfriend. Andrea Nardini
ALL ACCESS
F «Je prendrai un mojito.» Sauf qu’ils sont en dèche de menthe. La poisse! Ma première expérience au Montreux Jazz Café débute mal. «Désolé Monsieur, par contre nous avons un excellent vin italien.» Mais comment elle a su que je suis italien? Je gesticule comme un chef d’orchestre, ou quoi? Ou est-ce mon accent…
«Merci, ce sera finalement une pression.» Elle s’éloigne. J’attends le début de la demi-finale du concours de guitare au Petit-Théâtre du Montreux Palace. Je contemple ce qui m’entoure. Le Montreux Jazz Café, c’est… le nirvana des fétichistes pop! Le kimono de Freddie Mercury trône juste là, devant moi. Si beau. Le personnel? Rien à redire. J’observe les clients. Un curieux cocktail de classes sociales: quelques hipsters, des Russes fortunés et une blonde pleine de charme le regard cloué sur un écran qui difuse Jamiroquai, live: «I must believe / I can do anything / I can heal anyone…» Ouais. Je plane comme mon pote Jay Kay. Mais… J’entends que ça gueule à la table 5 qu’occupe un jeune couple. La fille élève drôlement la voix. «Je te l’ai dit: c’est fini! Terminé!» Elle balance sa serviette, se lève, file. « Mais… attends!», geint le gars, éploré. Dehors, le vent s’est levé. Le ciel a viré au pourpre et le tonnerre gronde. Dans un élan de solidarité masculine, je m’avance précautionneusement vers lui. «Ça va, vieux?», je lui demande. Et lui de répondre: «Je
E “May I have a mojito?” They ran out of mint. My first approach with the Montreux Jazz Café would have been better. “Sorry sir, but we have a great Italian red wine!” What? How did she understand I’m Italian? Do I move my hands like an orchestra leader? Or maybe is because of my accent? Who cares!? «Merci Madame, but I prefer a cold beer now!” She walks away. I’m waiting to attend the opening half-final guitar competition at the Petit-Théâtre in Montreux Palace. I look around me. The inside of the Montreux Jazz Café is… A pop fan dream! Freddie Mercury’s kimono is right front of me. It is beautiful. It looks heavy. It hypnotizes me. The staff is flawless. I look at the other customers, now. A very particular potpourri of social classes: few hipsters, some
Montreux Jazz Café: The pop fetishists’ nirvana!
Sunday , 6 July 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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CYCLES POP
Le groupe Temples incarne un phénomène immuable de la pop: un cycle par lequel la culture populaire replonge à sa source tous les trente ans. F «Shelter Song» ou «Keep in the Dark»: à l’écoute aveugle de ces perles pop, combien ont d’abord juré avoir affaire à un obscur groupe psychédélique des sixties? Un œil sur les garçons de Temples, ensuite: coiffure, fringues, instruments et jusqu’à l’arrogance, tout sonne chez ces types effrontément vintage. Sauf que non. Les auteurs du somptueux Sun Structures n’ont rien connu du Summer of Love et jamais goûté aux utopies communautaires flower power. Et pour cause, le quatuor du Northamptonshire s’est formé en… 2012! Moyenne d’âge? Pas même vingt-six ans! Autant dire que ces garçons n’ont jamais goûté aux fantaisies hippies autrefois dispensées par les papes Ginsberg et Leary. De fait, et par delà sa musique délicieusement rétro (quoique servi par un son résolument moderne), Temples précipite une question: pourquoi délibérément s’inscrire dans une époque révolue depuis… un demi siècle? Pas de calcul, ici. Mais avant tout une affaire de cycle.
«Pourquoi délibérément s’inscrire dans une époque révolue depuis presque… un demi siècle?» Cycle 30 Ayant rejoint MGMT, Tame Impala ou Jagwar Ma dans une veine qui mêle habilement nuances psyché et efficacité rock, Temples s’inscrit pleinement dans un phénomène inhérent à la pop: une suite de cycles immuables «par lesquels les mêmes mouvements culturels se répètent tous les trente ans environ», selon l’écrivain et journaliste Nik Cohn, auteur de l’ouvrage culte Awopbopaloobop alopbamboom. «Une autre boucle plus spécifique encore fonctionne
POP CYCLES
par période de trois années, poursuit le créateur de la rock critic. À trois ans de frénésie succèdent trois années de calme plat». Ainsi, depuis l’année 1960 – premier creux de la vague dans la jeune histoire du rock – à aujourd’hui, on peut examiner les reliefs et léthargies de la pop à l’aune d’un phénomène implacable. La fin des idoles À la source de ce mécanisme, les curieuses circonvolutions par lesquelles passe le rock entre 1957 et 1963. D’abord, affaire d’enragés, il vit trois années plus tard son premier coma. Là, industrie et teenagers marchent pour la première fois main dans la main, tandis que le high school rock et le twist deviennent des phénomènes commerciaux de grande ampleur. Puis, tout cela est brusquement balayé lorsque les Beatles alignent le vieux régime du rock et ouvrent copieusement le feu. Trois ans plus tard, le phénomène se répète de nouveau: l’ancienne garde jetée aux chiens, l’amorce du flower power, puis son acmé, enfin son effondrement. Et ainsi jusqu’à la fin du XXe siècle quand Nirvana - près de trente ans après la publication de - déclare à son tour la fin des idoles. Là, à nouveau s’installe un désert avant que le cycle ne reprenne. Trois décennies après l’essor du grunge – «un flower power à l’envers» selon Nik Cohn - Temples s’inscrit ainsi et sans probablement l’imaginer au creux d’une mécanique intangible. Un système invariable qui, par delà les modes, courants et manœuvres de l’industrie, dicte seul son pouls à l’histoire du rock. David Brun-Lambert
Temples incarnate an immutable pop phenomenon: a cycle in which pop culture goes back to its source every thirty years. E When blind listening to pop jewels “Shelter Song” or “Keep in the Dark”, many would swear these sounds come from an obscure psychedelic band from the sixties. Looking at the guys in the Temples, their hairdo, clothes, instruments, even their arrogance, it all seems terribly vintage. Don’t be fooled. Quite understandably, the men behind the magnificent Sun Structures experienced neither the summer of love, nor the flower power utopias of community. With good reason – the Northamptonshire quartet formed in 2012 and their average age is less than 26. Suffice to say, these guys never experienced the hippy daydreaming shared by the popes Ginsberg and Leary. Indeed, with its scrumptiously retro music (albeit served by a resolutely modern tone), the Temples trigger a question: why deliberately settle in a period that has been over for half a century? No maths here, it’s all about cycles. 30-year cycle Joining MGMT, Tame Impala and Jagwar Ma in a movement that cleverly combines psychedelic dynamics with the efficiency of rock, the Temples are fully in line with a phenomenon inherent to pop: a series of fixed cycles “in which the same cultural movements repeat about every thirty years,” according to journalist and writer Nik Cohn, author of Awopbopaloobop alopbamboom. “Another even more specific loop takes place within a three year period. Three years of excitement, followed by another three years of stagnation.” So, from 1960, which marks the first crash in the recent history of rock to today, we can look at the peaks and troughs of pop in the light of an immutable phenomenon.
TIMELINE
1969
THE GRATEFUL DEAD
Aoxomoxoa
1968
RICHARD BRAUTIGAN
Sucre de Pastèque
1968
JEFFERSON AIRPLANE
Crown of Creation 1968
GRAND ANGLE
Dimanche, 6 juillet 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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The end of idols This mechanism originated in the interesting twists and turns in rock between 1957 and 1963.
“Why deliberately settle in a period that has been over for half a century?”
Originally the preserve of the furious, rock went through its first stupor three years later. For the first time, the industry and teenagers walked hand in hand, while high school rock and twist became large-scale commercial phenomena. Suddenly, it was all brushed aside when the Beatles swept aside rock traditions. Three years later, the same thing occurred: to hell with the old guard, the beginning of flower power, its climax, its collapse. And so on until the end of the 20th century, when it was Nirvana’s turn to declare the end of idols, nearly thirty years after the release of Please Please me. We hit another desert before the cycle starts over. Three decades after the rise of grunge, which Nik Cohn termed a “backwards Flower Power,” the Temples are taking part in this intangible system, probably without being aware of it. An unchanging pattern that dictates the pulse of rock history all by itself, regardless of fashions, trends and industry manoeuvres.
TIMOTHY LEARY
La Politique de l’extase
1967
THE JIMI HENDRIX EXPERIENCE
Are You Experienced? 1967
THE BEATLES
Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band 1967
SCOTT MCKENZIE
«San Francisco (Be Sure to Wear Flowers in Your Hair)» 1958
ALLEN GINSBERG
Howl
1957
JACK KEROUAC
Sur la Route
du bruit, des imprévus. Il faut être rapide, efficace et flexible. Mais de voir toute cette grande famille se démener pour un même objectif, la musique, c’est très stimulant» explique ce challenger aux doigts agiles. Les néons bleus du Club miroitent sur la robe laquée d’un superbe piano à queue. Penché sur les 88 touches du clavier, Matthias Maurer «construit» une première octave, «contrôle» sa quinte, «étouffe » une corde, «détend» une cheville… Une gestuelle méticuleuse et délicate, mais avant tout technique: «Je ne suis pas un artiste, je
suis un artisan. Un accordage bien tempéré, c’est beaucoup de mathématiques», dit-il en tendant son oreille aguerrie. C’est un peu de météo, aussi. Vendredi, les fortes pluies ont fait monter le piano d’Agnes Obel dans les médiums: «Heureusement, je repasse toujours après les balances pour faire quelques ajustements». Mais il ne reprendra son souffle qu’au début du concert, lorsqu’il sera acquis que le piano est bon. Déformation ou conscience professionnelle, appelez-ça comme vous voudrez… Salomé Kiner
Sunday , 6 July 2014 | Montreux Jazz Chronicle
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MATTHIAS MAURER, PIANO TUNER AT THE MONTREUX JAZZ FESTIVAL.
From feeling to notes.
De la touche à la note. F Dans la mythologie des métiers fascinants, il y a l’accordeur de piano. Comme son cousin luthier, on l’imagine avec de grandes oreilles et une longue barbe hirsute. Matthias Maurer n’a ni l’un ni l’autre.
«Un accordage bien tempéré, c’est beaucoup de mathématiques» Jeune homme fringant, très boy next door, il vous parle d’un Steinway comme d’autres s’émeuvent pour des intérieurs cuirs: avec un léger trémolo dans la voix. Parce qu’à défaut d’avoir le physique de l’emploi, Matthias Maurer en a toute l’ardeur: «C’est un peu ésotérique, mais je pense que les pianos ont une âme. Elle naît d’un mélange entre leur histoire, le choix du bois et les musiciens qui les pratiquent.» A 32 ans à peine, il a déjà posé ses
mains sur les plus belles bêtes de l’écurie des cordes frappées. Formé à Paris, à Vienne et au Tessin, il fait ses classes chez Bösendorfer et Steinway. Il aurait pu s’établir comme facteur de piano. Mais les passions ouvrent l’appétit: au monde reclus des travaux d’atelier, Matthias Maurer préfère l’adrénaline du terrain. Lorsqu’il n’est pas en tournée avec Hélène Grimaud ou la japonaise Hiromi, il sillonne les écoles, les studios d’enregistrement et les salles de concerts suisses. Du transport à l’accordage, son entreprise, Piano Workshop, propose une prestation complète. Au Montreux Jazz Festival, il bichonne les sept pianos répartis entre le Stravinski, le Lab, le Club, le Chalet d’en bas, les workshops et les compétitions. Pour lui, dont le métier exige patience et précision, les conditions de travail sont particulières: «Il y a parfois
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“Well-tempered tuning involves a lot of mathematics” Educated in Paris, Vienna, and Ticino, he took classes on Bösendorfers and Steinways. He could have specialized as a piano maker, but you go where your passion takes you. Matthias Maurer prefers the adrenaline of the land to the recluse’s world of the workshop. When he is not on tour with Hélène Grimaud or Japanese pianist Hiromi, he goes back and forth between schools, recording studios, and Swiss concert halls. From transportation to tuning, his company, Piano Workshop, provides a complete
range of services. At the Montreux Jazz Festival, he attends to the seven pianos spread between the Stravinski, the Lab, the Club, the Chalet d’en bas, workshops, and competitions. For him, occupying a profession that requires patience and precision as he does, working conditions are quite unusual: “Sometimes there’s noise, or surprises. You have to be quick, efficient, and flexible. But seeing this big family giving its all with the same goal, the music, in mind is very inspiring,” explains the nimble-fingered challenger. The blue neon lights at the Club reflect off the grand piano’s lacquered surface. Leaning over the piano’s 88 keys, Matthias Maurer “constructs” a first octave, “holds” his fifth, “muffles” a piano string, “loosens” a piano cord, all of them meticulous, delicate, yet purely technical movements. “I am not an artist. I am an artisan. Well-tempered tuning involves a lot of mathematics,” he says as he listens with his sharp hearing. It is a bit of forecasting as well. Friday’s heavy rains made Agnes Obel’s piano rise in pitch. “Luckily I always pass by after the audio balance to make a few adjustments.” Yet he won’t be able to catch his breath until the beginning of the concert when he can be assured the piano is in perfect order. Unable to switch off, or conscientious, call it what you will.
PORTRAIT
MATTHIAS MAURER, ACCORDEUR DE PIANO DU MONTREUX JAZZ FESTIVAL.
E You will find piano tuner on the list of most fascinating jobs. You would imagine him with big ears and a disheveled beard like a stereotypical luthier. Matthias Maurer has neither. A classy young man who has that boy next door vibe, he talks about Steinways like car fanatics talk about leather interiors, with a tremor in his voice. Although he may not look the part, he most certainly has the fervor: “It’s a bit esoteric, but I believe pianos have a soul. It is birthed from a blend of their history, the choice of wood, and the musicians who play them.” Barely 32 years old, he has already worked on the top echelon of pianos.
M ESUR E ET D ÉMESUR E *
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PARTENAIRES D’ÉMOTIONS
www.parmigiani.ch Parmigiani_HQ • Visual: Tonda Metrographe S • Magazine: Chronicle_2014 (CH) • Language: English • Doc size: 210 x 294 mm • Calitho #: 06-14-99243 • AOS #: PF_01387 • EB 25.6.2014