№8
Vendredi, 08 juillet 2016 Friday, 08 July 2016
Montreux Jazz Chronicle Le quotidien du Montreux Jazz Festival, 5e édition
The Montreux Jazz Festival daily newspaper, 5th edition
José González, Montreux Jazz Lab, 07.07
TONIGHT
QUINCY JONES
F Le légendaire producteur et compositeur américain propose une rencontre unique entre des artistes parmi les plus doués de la nouvelle génération et de grandes figures de la musique, fidèles amis de Montreux depuis des décennies. Pour l’occasion, tous ces créateurs seront accompagnés par le saxophoniste Pepe Lienhard, à la tête de son célèbre Big Band qui a accompagné Frank Sinatra, Sammy Davis Jr. et Shirley Bassey. A l’affiche: Patti Austin, Al Jarreau, le virtuose du piano et du mélodica Jon Batiste, Rashida Jones, fille de Quincy, Sunny Levine son petit-fils, le pianiste cubain Alfredo Rodríguez et le tout jeune Jacob Collier.
QUINCY JONES
PEACE
E The legendary American producer and composer is offering a unique encounter between some of the most gifted artists of the new generation and major music figures, faithful friends of the Festival for decades. For the occasion, all of these artists will be accompanied by saxophonist Pepe Lienhard, at the head of his famous Big Band which has notably played for Frank Sinatra, Sammy Davis Jr., and Shirley Bassey. Quincy Jones has invited some of the most recognizable voices from the history of the Festival, including Patti Austin, Al Jarreau, piano and melodica virtuoso Jon Batiste, Rashida Jones, Quincy’s daughter, Sunny Levine, his grandson, Cuban pianist Alfredo Rodríguez and talented newcomer Jacob Collier.
8 Last Night : Charles Bradley
9 Interview : Matt Corby
10 50 Summers of Music : Quincy Jones
QUINCY JONES, Auditorium Stravinski, 20:00
F Un festival, même cinquante ans de festival, cela tient sur quelques notes, qui justifient tout, donnent un sens. C’est ce qui s’est passé en cet été 1991. Pour la première fois, Quincy Jones venait à Montreux, coproduire le Festival avec Claude Nobs. Alors « Q » a réussi une chose unique: convaincre Miles Davis de venir jouer quelques morceaux de l’époque – la fin des fifties – où il enregistrait les plus beaux disques du monde avec Gil Evans. Miles détestait se retourner, refaire, plonger dans le passé. Alors on n’y croyait pas trop, à ce super big band, à la baguette de Quincy qui convoquait l’histoire. Ou plutôt : on crevait de trouille. La peur que ce ne soit pas assez bien, pas à la hauteur, pathétique carrément. Mais la vérité, c’est que dans le public, des gens se sont mis à pleurer tellement c’était beau, fort, intense. A la fin, ils jouent « Solea », la conclusion sublime de Sketches in Spain. C’est bouleversant. Cela ne parle pas du soleil, mais de la soledad, de la solitude et de la mort. Miles joue sa mort, il l’accueillera pour de bon quelques semaines plus tard. On ne savait pas et tant mieux, on aurait pleuré encore plus. Mais chaque fois que je revois Quincy, comme ce soir dans Montreux, j’ai envie de lui crier merci, encore, pour cette nuit-là, l’un de ces instants qui, oui : justifie tout. Alors merci à vous, « Q », et que, levée au moment du salut, la trompette rouge de Miles, elle, nous indique le Ciel pour toujours.
CHRISTOPHE PASSER
JOURNALISTE AU MATIN DIMANCHE, ANCIEN RÉDACTEUR EN CHEF DE L'ILLUSTRÉ, ÉCRIT DEPUIS TRENTE ANS SUR LE FESTIVAL.
TODAY'S GUEST MILES DAVIES & QUINCY JONES JULY 8TH 1991 MONTREUX CASINO
E Even after fifty years, a festival still hangs on a few notes
that explain everything and give it meaning. That’s what happened in the summer of 1991, when Quincy Jones came to Montreux to co-produce the Festival with Claude Nobs for the first time. “Q” managed the unthinkable. He convinced Miles Davis to play some of the pieces from the late fifties that appeared on the best of his records with Gil Evans. Miles hated looking back and reliving the past. We therefore weren’t too optimistic about Quincy’s power to summon up this historical big band. We were probably just scared. Scared that it wouldn’t be good enough, which was pathetic really. Our fear was all for nothing though. People in the crowd actually cried it was so beautiful and intense. The concert ended with “Solea”, the sublime final piece in Sketches in Spain. It spoke not of sun, but of soledad, solitude and death. Miles played his end, and met it a few weeks later. We’d have cried even more, if we’d known that then. Every time I see Quincy, like I did that night in Montreux, I want to yell thank you again for that night. It was one of those moments that, yes, explain everything. So thank you “Q”, and hopefully the red trumpet that Miles raised before us will always look up.
COUPS DE CŒUR MONTREUX JAZZ 1991 Sting
Tori Amos
Camaron De La Isla Y Tomatito Chico Buarque Julian Joseph
Charlie Haden's Liberation Music Orchestra Allen Toussaint
CLAUDE'S COLLECTION F Chez Claude Nobs, c’est une collection parmi d’autres – trains à vapeur, lampes Tiffany, disques vinyles. Mais c’est peut-être la plus emblématique. Ils seraient une quinzaine, répartis entre les chalets de Caux et les Montreux Jazz Café, à exhiber leurs flancs acidulés et leurs entrailles chantantes à qui voudra leur tripoter les bitoniaux. Ces juke-boxes vintage, reliques de la première moitié du XXe siècle, se nourrissent de 45 ou 78 tours. Et ça marche! Contrairement à nos lecteurs numériques, qui ne supportent ni les chocs ni les mises à jour, ces vieilles bécanes sont montées sur des mécaniques increvables. Pas bégueule ni nostalgique pour autant, Claude Nobs était aussi propriétaire d’un Rio PMP300, premier lecteur MP3 de l’histoire du genre. Salomé Kiner © Yann Gross
Main Partners
E Claude collects them just as he collects steam
trains, Tiffany lamps, records and much more. However, they are probably his most emblematic collection. About fifteen of the bright-coloured singing machines stand waiting for someone to press their buttons in either a Caux chalet or a Montreux Jazz Café. These vintage, early twentieth century jukeboxes run on 45s and 78s, and they still work! The old machines are made of tough stuff, unlike our digital gadgets that can’t cope with shocks or updates. Claude Nobs was no prude though, as he also owned the first ever MP3 player, a Rio PMP300.
Friday, July 8th 2016 | Montreux Jazz Chronicle
EDITO MILES DAVIS ET QUINCY JONES, 8 JUILLET 1991 MONTREUX CASINO
3
PAYING
FRIDAY 08.07
AUDITORIUM STRAVINSKI QUINCY JONES
PRESENTS A 50TH ANNIVERSARY CELEBRATION WITH PEPE LIENHARD BIG BAND AND AL JARREAU, PATTI AUSTIN, JON BATISTE, RASHIDA JONES, SUNNY LEVINE, ALFREDO RODRIGUEZ, JACOB COLLIER
MONTREUX JAZZ CLUB
JACK BROADBENT
MONTREUX JAZZ LAB JEANNE ADDED LOU DOILLON
ROBBEN FORD
MONTREUX JAZZ CREATIONS
FREE
SIMPLY RED
MUSIC IN THE PARK 14:00 EJMA PRÉSENTE: CERULEAN POPPY 15:15
EJMA PRÉSENTE: LESTER K.
16:30 PHILADELPHIA JAZZ BAND
CHÂTEAU DE CHILLON
JAZZ MEETS CLASSIC
21:00 NIK BÄRTSCH'S MOBILE
SPECIAL EVENTS
COMPETITIONS
SHURE MONTREUX JAZZ VOICE COMPETITION
11:00
CASINO BARRIÈRE
MONTREUX MUSIC MEMORABILIA –
23:00 SILENT DISCO
THE ROCK CAVE 21:30 CARDIAC 23:00 KILMISTER 00:30 AFTERSHOW: SOUL KOFFI
GOODBYE LA RUCHE – VJING SOPHIE LE MEILLOUR 22:00 NICOLAS DUVOISIN 23:00 SUCRÉ SALÉ 01:00 DANIEL DREIER 03:00 ADOLPHO & FRANKY
MONTREUX PALACE
17:00 SEMI-FINAL
MAIN ENTRANCE, 2M2C
BAR EL MUNDO
16:00 BOOK BOX
Collaboration Festival Images Vevey - Montreux
Jazz Festival
WORKSHOPS
Voyage en harmonica, remembering Claude Nobs
PETIT PALAIS
15:00 NIK BÄRTSCH
UNITED COLORS OF FIESTA 20:00 RODRY-GO SALSA TEAM 22:00 DJ KAY-C
DJ RUMBA STEREO
PETIT PALAIS
13:00 GREGOIRE MARET
STROBE KLUB
President of the Jury: Angélique Kidjo
EXPOSITION
19:00 PRIX DU PUBLIC UBS ON STAGE 21:30 AFRODIZIA
FEU! CHATTERTON
PETIT PALAIS
17:00 ROBBEN FORD
INFORMATION
F Pour toutes les informations sur les prix et mises à jour du programme, veuillez télécharger la «Montreux Jazz App»
E For information on the prices and updates on the program, please download the “Montreux Jazz App” www.montreuxjazzfestival.com
Friday, July 8th 2016 | Montreux Jazz Chronicle
5
F Pour la 50e édition du Montreux Jazz Festival, UBS et la
Montreux Jazz Artists Foundation s’associent pour dénicher le meilleur singer-songwriter de Suisse ! Qui raflera le Prix du Public UBS 2016? Au public de décider ! Après une semaine durant laquelle les internautes ont été invités à voter, les trois finalistes de leur choix monteront aujourd’hui sur la scène de Music in the Park. Premier d’entre eux : JulDem, chanteurguitariste autodidacte d’origine saint-galloise et auteur d’un premier bel EP, Hello World (2014). Plus loin, Olga Matu (Olga Matuszewska), chanteuse et songwriter polonaise actuellement installée à Genève, et diplômée en composition et production du prestigieux Berklee College of Music de Boston. Enfin Philipp Saner, alias Silent Neighbor, talentueux chanteur et guitariste zurichois dont le premier disque est à paraître sous peu. A l’issue de leur prestation, le public votera jusqu’au 14 juillet minuit afin de les départager, offrant l’opportunité au lauréat(e) d’enregistrer ses compositions au fameux Balik Studio, au coeur de la région du Toggenburg.
PRIX DU PUBLIC UBS 2016
HIGHLIGHTS
E During the 50th Montreux Jazz Festival, the UBS and the Montreux Jazz Artists Foundation are working together to find the best Swiss singer-songwriter. Who will win the 2016 UBS Public Prize? It’s up to the public to decide. After a week of Internet voting, the public’s three finalists will battle it out on the Music in the Park stage. The first to prove his worth will be JulDem, a self-taught singer and guitarist from St-Gallen who released his first hit EP, Hello World, in 2014. The next to play will be Olga Matu (Olga Matuszewska), a singer and songwriter who obtained her degree in composing and producing from Boston’s prestigious Berklee College of Music and is now living in Geneva. Last to play will be Philipp Saner, aka Silent Neighbor, a talented singer from Zurich whose first album is due to be released soon. The public will then have till the midnight on the 14th July to vote for their favourite. The overall winner will get to record his/ her music at the famous Balik Studio in the heart of Toggenburg.
PRIX DU PUBLIC UBS 2016 08.07.2016 - 19:00 - FREE Music in the Park
Matt Corby Montreux Jazz Lab
Jacob Collier Montreux Jazz Club
PORTFOLIO JULY 7TH 2016
Charles Bradley Auditorium Stravinski
José González Montreux Jazz Lab
Beirut Montreux Jazz Lab
Han Seung Seok & Jung Jaeil Montreux Jazz Club
Alfredo Rodriguez Montreux Jazz Club
Vendredi, 8 juillet 2016 | Montreux Jazz Chronicle
8
MATT CORBY Le chanteur australien nous a reçus dans sa loge hier soir. Il est en tournée pour présenter son dernier album, Telluric.
INTERVIEW
Propos recueillis par Steve Riesen
F Pour enregistrer ton album, tu t’es isolé
dans une petite ville australienne durant six mois. As-tu besoin d’être seul pour créer ? J’ai surtout besoin d’être là où personne ne m’entend ! [rire] Je travaille de manière assez obsessionnelle. Si je ne parviens pas à terminer une chanson, ça m’obnubile pendant une journée, mais chez soi, ou en ville, on a tendance à oublier, à partir dans des distractions et on finit par perdre l’intention avec laquelle on s’est réveillé. Parfois, je fais une partie d’échecs et je me dis « Yeah, ça y est, j’y suis ! »
Il y a deux ans, tu as enregistré un album qui est finalement jamais sorti, en as-tu souffert ? Pas vraiment. En fait, quand on me l’a annoncé, ça a été un moment difficile. Mais par la suite, je me suis fait à l’idée qu’il ne sortirait pas, et ça a été un véritable soulagement. J’ai beaucoup appris de cette expérience, et aujourd’hui j’ai une idée plus claire de ce que je dois faire.
«Je fais de la musique sur laquelle on peut danser.» Est-ce que les Australiens ont un rapport à la musique différent de celui des Américains ou des Britanniques ? Je pense que oui. En Australie, on a une station de radio, Triple J, qui passe de la musique indépendante. C’est une plateforme très intéressante qui permet aux artistes de sortir davantage des sentiers battus. L’Australie balance des sons plutôt cool en ce moment, avec des groupes comme Hiatus Kaiyote. À mon sens, c’est aussi dû au fait qu’il y fait bon vivre. Être là-bas, c’est avant tout avoir du temps et de l’espace pour faire ce que l’on veut, sans craindre pour son job ou sa maison. Tu mentionnes des influences très différentes, Jeff Buckley, Nina Simone, Neil Young… Comment les intègres-tu tous dans ta musique ? J’ai l’impression que ça se fait naturellement. Je sais que l’on essaye de nous mettre dans des cases, mais je dirais que je fais de la musique sur laquelle on peut danser. Le gospel influence ma manière de chanter, et les compositions se font en fonction de mes émotions du jour. C’est ainsi que je résumerais mon album : un mélange d’influences et d’ambiances.
The Australian singer met us in his dressing room last night. He is on tour promoting his new album, Telluric. Interview by Steve Riesen
E You isolated yourself for six months in a small Australian town to record your
album. Do you feel the need to be on your own to create ? It’s more like I want to be somewhere where no one can hear me… [laughs] The way that I work is a bit obsessive. When I can’t find an end to a song, I can’t stop thinking about it for a whole day. But when you’re at home or in the city, you can forget what you’re doing and be distracted. Then, you just lose the original intention you had when you started the day before. Sometimes, I just play a game of chess or something, and suddenly, I’m like “Oh yeah, I’ve got it !” You recorded a full album two years ago that was never released. Was that a hard experience to get over ? Not really… Actually, the moment that I heard it was the hardest part. But I think every bit after that was kind of “Yeah, well, I’m not putting this out”, and it was a relief, really. I learned a lot from this experience, now I know what I have to do.
“The type of music that I play it’s stuff you can dance to.” Do you feel that the United States and Great Britain approach music differently to Australia ? I think so, yeah. We have a radio station called Triple J, which is an interesting platform for independent music that really helps people go a bit more wild with what they create. The music that is coming out of Australia at the moment is pretty cool, with bands such as Hiatus Kaiyote. I think it’s also due to the fact that Australia is an amazing place to live. Anyone who’s here is very lucky, which means you have time and space to do what you want, without having the threat of maybe losing your job or your house. How do your very different musical role models, like Jeff Buckley, Nina Simone and Neil Young blend into your music ? I think they naturally do. People try to describe the type of music that I play, but I would just say it’s stuff you can dance to. The way I sing is heavily influenced by gospel and the way that I create compositions is based on whatever I felt that day. This is basically what my new album is: an ensemble of vibes and influences.
CHARLES BRADLEY AUDITORIUM STRAVINSKI
F Un concert de soul réussi? Ce n’est pas difficile. Prenez deux cuivres,
une section rythmique, un guitariste, un claviériste. Et placez Charles Bradley au milieu. Un frisson parcourt notre corps à chaque fois que son chant suave se mue en cri du cœur. Révélé sur le tard, l’Américain passe d’une soul ternaire à un funk carré avec autant d’aisance que son héros d’enfance, James Brown. Un déhanché de trentenaire lui colle à la peau, entre break et danse du robot. Lorsqu’il s’absente de la scène, il revient avec un costard doré, un T-shirt Toutankhamon des plus kitsch et un gâteau d’anniversaire pour son batteur. Le Strav’ chante «Happy Birthday» en chœur. Charles prêche l’amour, l’amitié. Il serait injuste de parler de revival ou de voyage dans le temps, tant l’émotion est authentique, palpable, éternelle. Le paroxysme est atteint avec «Changes», une chanson de… Black Sabbath. La ballade dépouillée du quatuor aux cheveux longs se transforme en lamentation épique, habillée de cuivres et d’un groove irrésistible. Et quelle voix! Nom de dieu, quelle voix! Magistral, tout simplement. Le public du Strav’ pourra dire à ses petits enfants: «Je n’ai pas vu James Brown, mais j’ai vu Charles Bradley». Steve Riesen
JOSÉ GONZÁLEZ MONTREUX JAZZ LAB
F Les murs du Lab tremblent encore de la soirée métal de la veille. Changement radical de ton ce soir : José González, héraut suédois d’une délicatesse folk, arrive seul sur scène, guitare à la main. Je ne suis pas familier du bonhomme et ne demande qu’à me laisser faire. Son univers : douceur, respect de la tradition qu’incarnera ici-même Neil Young mardi prochain. Le chanteur me conte alors ses récits tout simples, d’une belle voix légèrement nasillarde, accompagnés d’arpèges de guitare murmurants. Écoute et communion. L’atmosphère est presque religieuse. Attentive et respectueuse. Derrière le barde, des musiciens ajoutent quelques touches de couleurs sans jamais interrompre le cours de l’immense tranquillité qui règne désormais. Seulement, après la claque métal reçue mercredi, j’ai l’impression de prendre le dessert avant l’apéro. Les morceaux s’enchaînent et la fatigue l’emporte. J’ai envie d’entendre José déverser un peu de ses tripes, me coller le frisson. Mais non. La salle, elle, est comblée. S’ouvre en final un morceau plus énergique. Ça monte ! Oui, j’y crois, encore ! Et non… Fin. À peine plus tard, Beirut enfin me rassasiait. Eduardo Mendez
E Performing a successful soul concert isn’t hard. All you need are two
brass instruments, a percussion section, a guitarist, a keyboard player and Charles Bradley. He sent shivers down our spines every time his gentle song turned into a heartfelt cry. Discovered late, the American’s music went from ternary soul to square funk as easily as that of his childhood hero James Brown. His dance moves were still the same as the breakdance and robot moves he used in his thirties. He left the stage, only to come back wearing a gold suit with the kitschiest Tutankhamen t-shirt ever and carrying a birthday cake for his drummer. The whole Strav’ sang happy birthday. Although Charles preached love and friendship, it would be unfair to call his concert a revival or a walk down memory lane, given the level of authentic, palpable and eternal emotion in the room. The climax of the night was “Changes” by Black Sabbath. The long-haired foursome’s raw ballad was transformed into an epic threnody with an irresistible brass groove. And what a voice! Oh gosh, what a voice! It was outstanding. The crowd in the Stravinski will now be able to say, “I may not have seen James Brown, but I have seen Charles Bradley”.
E The Lab’s walls were still shaking from last night’s heavy metal. Tonight was definitely different. José González brought the delicacy of Swedish folk music to the stage with just his guitar. I didn’t know the guy so I just let his world wash over me. His soft music respected the tradition that Neil Young would continue here next Tuesday. The singer told simple fairy tales in a beautiful, slightly nasally voice to the murmur of guitar arpeggios. The crowd listened attentively and respectfully as one to the almost religious concert. His musicians added a touch of colour to the bard’s story without ever disrupting the tranquillity of his session. The thing was that after Wednesday’s metal, I felt I had had dessert before the apero. The songs melted one into the other, and tiredness came over me. I wanted to hear José let his hair down and send a shiver down my spine. But it wasn’t going to happen. The crowd was in awe by the end of the concert, which appeared to be getting livelier… and livelier… until it just ended. Not soon after, I managed to get lucky with Beirut.
Friday, July 8th 2016 | Montreux Jazz Chronicle
LAST NIGHT
9
Vendredi, 8 juillet 2016 | Montreux Jazz Chronicle
10
QUINCY JONES
50 SUMMERS OF MUSIC
«
CLAUDE NOBS ADORAIT SE FOUTRE À POIL F Ici, c’est chez moi ! Je ne rigole pas, vous savez. Je suis un
Montreusien. J’ai rencontré Duke Ellington en 1973. J’avais produit pour lui une émission télévisée, quelques mois avant qu’il ne meure. Il a écrit un message à mon intention sur une carte postale : « Tu seras celui qui mettra à terre les catégories de la musique américaine. Plus de catégories. Tout ce que tu ressens, ce que tu sais jouer, fais-le ». C’est le meilleur conseil qu’on m’ait donné. Quand j’ai produit pour la première fois Michael Jackson, je n’ai eu aucun doute. Il connaissait mon passé et il avait un talent inouï. Mais il y a plein de frérots du jazz qui sont venus vers moi, ils me menaçaient : « Tu ne peux pas faire ça, ce n’est pas du swing ». Mais cassez-vous ! Je joue du R&B avec Ray Charles depuis que j’ai treize ans. Ensemble, on a connu le racisme dans les États du Sud. Chaque jour, on se répétait cette phrase : « Il n’y a pas une once de notre estime de soi qui dépende du fait que vous nous acceptiez. » Alors, quand des types me parlent de barrières, de limites ou de genres, j’ai envie de commettre un meurtre. C’était peut-être autour de cette passion non négociable pour toutes les musiques qu’on s’est trouvés avec Claude Nobs. Lui aussi, on l’avait emmerdé parce qu’il ne faisait pas que du jazz à Montreux. En 1991, j’ai organisé cette soirée à Montreux. « From be-bop to hip-hop ». On avait Jon Hendricks avec Clark Terry, et puis Melle Mel et tout un tas de rappeurs. Très vite, ils m’ont donné l’impression d’être les be-boppeurs de leur temps. Même urgence, même rapidité. Je les ai aidés comme Count Basie m’avait à l’époque pris sous son aile. Un jour LL Cool J, qui avait dix-sept ans, est venu vers moi : « Hé, Mister Jones, qu’est-ce que les chanteurs et les instrumentistes pensent de nous » ? Il avait raison de poser cette question. Les rappeurs ne sont ni des chanteurs, ni des instrumentistes. Le rap, c’est la troisième entité. Il ne faut pas les sous-estimer, ils peuvent changer le monde.
...
CLAUDE NOBS LOVED TO STRIP
E This is my home ! I’m not kidding. I am a Montreusien. I met Duke Ellington in 1973. I produced a TV program for him, a few months before he died. He wrote me a message on a postcard : “May you be the one that de-categorizes American music. No more categories. Whatever you feel, whatever you know how to play, do it”. It was the best advice I’ve ever had. The first time I pro- duced Michael Jackson, there was no doubt in my mind. He knew my past, and he had incredible talent. But a whole lot of jazz brothers came and warned me : “You can’t do that, man, it’s not swing”. Get out of here! I was playing R&B with Ray Charles when I was thirteen. Together, we experienced racism in the Southern states. Every day, we said to ourselves : Not one drop of my self-worth depends on your acceptance of me. So when guys start talking to me about barriers, about limits or genres, I feel like murdering someone. Maybe it was this uncompromising passion for all music that brought me close to Claude Nobs. People had got on his case, too, because he didn’t only do jazz in Montreux. In 1991, I had organized this show at Montreux, “From Be-Bop to HipHop”. We had Jon Hendricks with Clark Terry, and then Melle Mel and a whole bunch of rappers. Pretty soon, it occurred me that these people were the beboppers of their day. There was the same urgency, the same speed. I helped them, just as Count Basie took me under his wing, back in the day. One day LL Cool J, who was seventeen, came up to me : “Hey, Mr. Jones, what do the singers and musicians think of us”? He was right to ask. Rappers are neither singers nor musicians. Rap, is a third entity. We shouldn’t underestimate them. They can change the world.
50 SUMMERS OF MUSIC
À LIRE →
Textes d'Arnaud Robert (en collaboration avec Salomé Kiner) Coédition Montreux Jazz Festival et Editions Textuel Texts by d’Arnaud Robert (in collaboration with Salomé Kiner) Co-published by the Editions Textuel and Montreux Jazz Festival
CHF 69.-
Disponible à la boutique Festival ou sur www.montreuxjazzshop.com
...
»
← TO READ
IMPRESSUM
PETER TOSH - 1979
HEROES
Published by Fondation du Festival de Jazz de Montreux Creative Content 2M2C / Avenue Claude Nobs 5 / 1820 Montreux Switzerland www.montreuxjazz.com CEO Mathieu Jaton Project Coordinators Marine Dumas Isabel Sánchez Editor-in-chief David Brun-Lambert Project Assistant Thibaud Mégevand Editorial Secretary Lucie Gerber Contact chronicle@mjf.ch Contributing Editors David Brun-Lambert, Alexandre Caporal, Salomé Kiner, Eduardo Mendez, Steve Riesen, Arnaud Robert Photographers Daniel Balmat, Mehdi Benkler, Marc Ducrest, Lionel Flusin, Emilien Itim, Anne-Laure Lechat Translators Bridget Black, Sandra Casas, Emma Harwood, Marielle Jacquier, Amandine Lauber Printed by PCL Presses Centrales SA Av. de Longemalle 9 CH - 1020 Renens Advertising Kevin Donnet, k.donnet@mjf.ch Designed by eikon Wilhelm Kaiser 13 / 1700 Fribourg / Switzerland www.eikon.ch
© 1979 Georges Braunschweig
F Un œil au programme du Festival en 1979. Un vertige. Elis Regina et Hermeto Pascoal au coude-à-coude. Chick Corea et Herbie Hancock réunis ici pour la première fois. B.B. King ou Taj Mahal portant les couleurs blues. Quand Ella Fitzgerald, Count Basie et Weather Report offrent un panorama intimidant des possibles jazz. Bien sûr, on en passe. Pour s’attarder sur une initiative majeure prise par Montreux cette année-là : le lancement d’une nuit reggae, innovation bientôt devenue tradition durable (de Burning Spear à Capleton, de Horace Andy à Sizzla). Ainsi annoncés un 6 juillet pour essuyer les plâtres : Dennis Brown, Steel Pulse et surtout Peter Tosh. Les billets s’arrachent. On se presse pour venir voir « The Toughest » live, devenue la grande voix dissidente du reggae depuis son départ des Wailers six ans plus tôt. En lutte contre tout ce qui domine, menace ou fait ployer, l’ami d’enfance de Bob Marley publie alors des disques majeurs comme on dresserait des barricades ou prendrait les armes. « 400 Years », « Steppin’ Razor », « Get Up, Stand Up » ou « Mystic Man » : les classiques insurgés que le Jamaïcain offre cette nuit à un Casino en nage. Rebelle, indigné, porteur d’une douleur pour laquelle il n’est pas de remède, le « Steppin’ Razor » joue comme en mission, appelant en salopette blanche au feu rédempteur et aux réparations. David Brun-Lambert
Director Nicolas Stevan Art Director Joackim Devaud
E One look at the 1979 Festival programme will
take your breath away. Elis Regina and Hermeto Pascoal on stage together. Chick Corea and Herbie Hancock reunited here for the first time. B.B. King and Taj Mahal playing the blues. Ella Fitzgerald, Count Basie and Weather Report providing an impressive all-encompassing jazz demonstration. I could keep going of course, but there was a major new addition that I wanted to check out that year. Montreux’s first reggae night became a lasting tradition, with artists such as Burning Spear, Capleton, Horace Andy and Sizzla taking to the stage. That’s why, Dennis Brown, Steel Pulse and, above all, Peter Tosh were part of the 6th July line-up. The tickets were gone in a flash. Everybody wanted to see “The Toughest” live, after he’d become the big dissident voice of reggae in the six years since he’d left the Wailers. Bob Marley’s childhood friend released major albums, like others would build barricades and take up arms, to fight against domination, intimidation and elimination. “400 Years”, “Steppin’ Razor”, “Get Up, Stand Up” and “Mystic Man” are just some of the insurgent classics that the Jamaican played that night at the Casino. He was an outraged rebel, communicating a pain for which he had no remedy. He stood in white dungarees and played “Stepping Razor” as if on a mission to call for redemption and redress.
Graphic Designer Manuel Schaller Layout Composers Nadine Schneuwly, Nicolas Nydegger, Manuel Schaller Retrouvez tous nos numéros sur issuu.com/montreuxjazzchronicle Suivez nous sur les réseaux sociaux facebook.com/montreuxjazzfestival twitter.com/MontreuxJazz
F Le Chronicle est plus beau dans les mains d’un lecteur plutôt qu’au sol.
E The Chronicle looks better in a reader’s hand than on the floor.
Friday, July 8th 2016 | Montreux Jazz Chronicle
11
1
25.05.16
18:28
© FFJM - F. Jaquenod for GM-Press, 1979
MJAF PDP2016-Ann Chronicle 210x296 EN PROD.pdf
VOTE
for your favourite singer songwriter
& WIN an iPad mini
GO TO www.mjaf.ch/UBS to discover the nominees
MONTREUX JAZZ FESTIVAL, July 1-16, 2016