Vol.7, no 2
Dépêches BULLETIN
DANS CE NUMÉRO 1
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MSF
CANADA
DANS LES CAMPS AU NORD DE L’OUGANDA, MSF OFFRE DES SOINS DE SANTÉ PRIMAIRES, DE L’EAU POTABLE,
Nord de l’Ouganda : combattre la maladie et l’insécurité
DES INSTALLATIONS SANITAIRES, ET DES TRAITEMENTS NUTRITIONNELS THÉRAPEUTIQUES AUX ENFANTS
Les enfants de la Somalie
GRAVEMENT MALNUTRIS.
Le pouvoir de la parole en Zambie
Le rêve de l’accès aux médicaments pour tous
La maladie de Chagas
Combattre la maladie et l’insécurité dans le 13
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Un nouveau médicament simplifie le traitement de la malaria Au revoir et merci!
Personne ne peut arrêter la pluie
NORD DE L’OUGANDA orsqu’on m’a appris par téléphone que ma première mission pour MSF se déroulerait en Ouganda, j’ai dû faire plusieurs recherches avant de trouver quelque information sur ce pays et les difficultés qui m’attendaient. En effet, le conflit qui sévit dans la région septentrionale de ce pays est l’une des dix crises humanitaires les plus négligées de la planète.
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Même si aux yeux de la communauté internationale, l’Ouganda jouit d’une stabilité relative depuis l’accession au pouvoir, en 1986, du président Yoweri Kaguta Museveni, la réalité est tout autre dans le nord du pays ravagé par la guerre.
Les habitants de cette région subissent depuis 18 ans les répercussions d’un conflit brutal. Depuis 1986, la Lord’s Resistance Army (LRA l’Armée de résistance du Seigneur) terrorise la région dans l’intention avouée de destituer le président ougandais. Le chef de la LRA, Joseph Kony, a circonscrit sa campagne armée au nord du pays, attaquant les civils qu’il dit vouloir « libérer » du joug de Museveni. Les enfants sont particulièrement vulnérables aux attaques des rebelles; jusqu’à maintenant, la LRA a enlevé des dizaines de milliers d’enfants (suite à la page 2)
Lauréat du prix Nobel de la paix 1999
Ouganda
LES ENFANTS SONT PARTICULIÈREMENT VULNÉRABLES AUX ATTAQUES DES REBELLES; JUSQU’À MAINTENANT, LA LRA A ENLEVÉ DES DIZAINES DE MILLIERS D’ENFANTS POUR LES ENRÔLER DE FORCE ET LES SOUMETTRE À L’ESCLAVAGE SEXUEL.
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Carrie Bernard (à droite) a travaillé cinq mois à Gulu dans le nord de l’Ouganda en tant que médecin bénévole. Elle a travaillé dans un refuge de nuit pour les enfants, un centre de traitement du choléra et des centres de soins isolés.
pour les enrôler de force et les soumettre à l’esclavage sexuel. Plus de 1,6 million d’habitants ont été déplacés durant ce conflit, soit 80 % de la population de la région. Les conditions sont déplorables dans les camps pour personnes déplacées. Ces camps dits « protégés » avaient officiellement été créés en 1996, sur une base temporaire, pour leur offrir un refuge sûr en attendant que l’armée ougandaise (UPDF) mettent les rebelles en échec. Les civils ougandais ont été forcés de laisser derrière eux leurs maisons, leurs terres et leurs vies pour se réfugier dans des villages surpeuplés qui ne sont pas très sûrs, où les conditions de vie sont pitoyables et l’accès aux soins médicaux insuffisant. Une soi-disant mesure temporaire, en place depuis maintenant neuf ans. L’accès à l’eau potable est inadéquat et l’insalubrité contribue à la propagation des maladies. Comme il est dangereux pour eux de s’aventurer jusqu’à leurs terres pour les cultiver, les habitants des camps dépendent de l’aide accordée par le Programme alimentaire mondial pour se nourrir. Ceux qui tentent malgré tout de le faire
s’exposent aux attaques de la LRA ou au risque d’être considérés par l’UPDF comme des partisans du mouvement rebelle. Même si les organismes humanitaires ont fait du nord de l’Ouganda une priorité, l’aide demeure limitée en raison de l’insécurité dans la région. De nombreux organismes n’interviennent que dans les camps les plus protégés par crainte de subir des attaques. On trouve des postes sanitaires, mais ceux-ci sont souvent abandonnés à cause du risque d’embuscade sur les routes. Ici, la mort est un fait quotidien, même si sa cause est souvent une maladie traitable comme la malaria, la diarrhée ou une infection respiratoire. La malnutrition est un problème omniprésent; elle fait ses plus grandes victimes chez les nourrissons et les jeunes enfants. Je suis arrivée en Ouganda en octobre 2004 pour travailler dans l’un des plus grands camps pour personnes déplacées du nord du pays, au plus fort d’une flambée de choléra. J’étais appelée par MSF à intervenir dans plusieurs programmes, mais dans les premiers temps, cette maladie a monopolisé toute mon attention. Nous avons d’abord travaillé sans relâche à l’établissement d’un centre de traitement du choléra, au recrutement et à la formation du personnel national et à l’organisation
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LES CIVILS OUGANDAIS ONT ÉTÉ FORCÉS DE LAISSER DERRIÈRE EUX LEURS MAISONS, LEURS TERRES ET LEURS VIES POUR SE RÉFUGIER DANS DES VILLAGES SURPEUPLÉS QUI NE SONT PAS TRÈS SÛRS, OÙ LES CONDITIONS DE VIE SONT PITOYABLES ET L’ACCÈS AUX SOINS MÉDICAUX INSUFFISANT.
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d’une campagne d’éducation auprès de la population pour tenter de juguler la progression de cette maladie pouvant causer la mort. Je m’étais attendue à travailler dur. Mais je ne m’attendais pas à devoir négocier avec des militaires pour être autorisée à soigner mes patients. Voilà pourtant comment les choses se passent dans un lieu où l’armée confine les citoyens dans leur hutte parce qu’elle cherche à distinguer les civils des rebelles. Nos efforts ont porté fruit; la poussée de choléra a été maîtrisée, si bien que j’ai pu canaliser mes énergies vers les centres de soins primaires dans les régions isolées du nord. MSF gère des centres de santé dans les zones où le gouvernement n’a pas réussi à le faire en raison de la guerre. Tous les jours, nous prenions en charge des gens gravement atteints de malaria, de malnutrition et de déshydratation causée par la diarrhée. Nos traitements ont souvent été couronnés de succès mais, dans de nombreux cas, des patients sont morts parce que les transporter à l’hôpital était trop dangereux. Lorsque les combats s’intensifient, il est impossible d’accéder aux centres de santé pendant plusieurs jours; notre personnel national se trouve alors coupé du monde et les réserves de médicaments baissent. Le courage et la détermination dont font preuve les membres du personnel national dans pareilles circonstances m’ont réellement impressionnée. Ce sont eux qui m’ont donné la force de continuer, même quand la situation semblait désespérée.
Le soir, il était parfois difficile de garder espoir en voyant des milliers d’enfants défiler dans notre asile de nuit à la recherche d’un lieu sûr pour dormir. Quelque 4500 enfants (certains à peine capables de marcher) parcourent ainsi une dizaine de kilomètres par crainte d’être attaqués et enlevés par les rebelles. Malgré la fierté que j’éprouvais envers notre programme (nous offrions un lieu sécuritaire, du counselling, des soins infirmiers et un encadrement fourni par des adultes), j’étais bouleversée à l’idée que ces enfants devaient quitter chaque soir la maison de leurs parents, pour aller dormir dans une tente surpeuplée en compagnie d’autres étrangers. Et notre refuge était loin d’être le seul : on estime à 50 000 le nombre d’enfants dans la même situation. Dans cette région, les besoins sont immenses. Vers la fin de mon séjour, nous avions commencé à mettre en œuvre des programmes de lutte contre la violence sexuelle et la violence envers les femmes. Ce sont des problèmes de plus en plus présents. MSF tente de répondre à l’accroissement des besoins en matière de traitement, de counselling et d’éducation. Les asiles de nuit ne sont pas près de disparaître et les gens qui vivent dans les camps éloignés ont désespérément besoin d’être soignés. Même si, en dernière analyse, le plus grand besoin de tous, c’est que la paix s’installe dans le nord de l’Ouganda, en attendant ce jour, MSF continue à fournir une aide essentielle aux plus vulnérables.
Carrie Bernard Médecin, Gulu, nord de l’Ouganda
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Lettre du terrain
Les enfants de la Somalie a Somalie se classe parmi les pays les plus pauvres de la planète et ne suscite guère d’intérêt dans le monde. On estime sa population à près de huit millions d’habitants. Au terme de vingt années de guerre civile, un gouvernement inexpérimenté a pris les rênes du pouvoir, alors que partout dans le pays l’insécurité règne.
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Toutes les régions de la Somalie accueillent un nombre élevé de personnes déplacées. Craignant d’être persécutées dans leur ancien lieu de résidence parce qu’elles n’appartenaient pas au clan dominant, ces personnes ont cherché refuge ailleurs dans le pays. Elles vivent dans un grand dénuement, privées de nourriture et des produits de première nécessité. Le statut des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays n’est pas reconnu par l’ONU; par conséquent, celles-ci ne reçoivent aucune aide internationale. En Somalie, des centaines de milliers de déplacés vivent dans des campements érigés en bordure des grandes villes, sans emploi, sans eau ni installations sanitaires, et très peu de nourriture; on y rencontre les problèmes de santé que ces circonstances engendrent habituellement.
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La Somalie ne compte aucun système public de santé ou d’aide sociale, mais la pauvreté est omniprésente. L’accès aux soins est restreint (d’après une estimation, le pays compterait huit médecins pour un million de citoyens). De nombreuses familles parcourent des centaines de kilomètres à pied pour conduire un enfant malade à l’établissement de santé le plus proche. Le vaccin contre la polio est gratuit, mais ce ne sont pas tous les enfants qui en bénéficient; les vaccins contre la coqueluche, le tétanos et la diphtérie sont en nombre limité. Cette terre ensoleillée et désertique est peuplée de nombreux chameaux, de chèvres et d’enfants. La plupart des Somaliens mènent une vie nomade et vivent dans la brousse. Le climat est chaud, la couverture végétale rare et les rivières se vident durant la saison sèche. Les familles nombreuses sont la règle; certains hommes prennent plus d’une épouse. Chaque femme donne naissance à six enfants en moyenne. Toutefois, selon les estimations les plus récentes, un enfant sur
quatre n’atteint pas l’âge de cinq ans et le taux de mortalité infantile est l’un des plus élevés au monde. De nombreux enfants vivent dans la brousse avec leurs parents et observent un mode de vie semblable à ce qu’il devait être il y a des milliers d’années. Leurs chansons portent souvent sur les chameaux. Les animaux constituent les biens les plus précieux de la famille; on boit le lait des chèvres et des chameaux. Dès qu’ils sont capables de s’en occuper, parfois même dès l’âge de cinq ans, les enfants conduisent les bêtes là où l’on trouve de l’herbe et de l’eau pour les faire boire et manger. Peu vont à l’école; environ 45 % des hommes et 25 % des femmes seulement savent lire. On soumet encore de nombreuses petites filles, vers l’âge de cinq ou six ans, à la mutilation génitale; c’est une coutume certes moins répandue qu’autrefois, mais qui se pratique encore et cause beaucoup de souffrance au sein de la population féminine.
À l’hôpital, un enfant qui s’est piqué au pied avec une épine se remet du tétanos, fort heureusement – c’est une infection qu’on ne voit pratiquement plus en Europe ou en Amérique du Nord, à cause des programmes de vaccination. Les affections infantiles les plus dévastatrices sont les maladies diarrhéiques et la tuberculose. Il n’y a pas de chiffres concernant la prévalence du VIH/sida, mais selon toute vraisemblance, celle-ci n’est pas aussi forte ici qu’ailleurs en Afrique subsaharienne. Nous voyons aussi des enfants qui ont été blessés par une mine antipersonnel ou même par balle. Les accidents de la route sont chose courante. Il n’est pas inhabituel qu’un enfant blessé arrivé de loin meure avant que nous puissions intervenir. La mort d’un enfant est toujours un événement tragique, mais elle l’est encore davantage lorsqu’il s’agit d’une maladie évitable, dont on peut guérir si l’on dispose des ressources nécessaires. Médecins Sans Frontières (MSF) est l’un des rares organismes non gouvernementaux actifs en Somalie. Ses équipes
prodiguent des soins de santé à des adultes et à des enfants qui en ont désespérément besoin. MSF a pris en charge la gestion de l’hôpital de Galkayo au Puntland, où l’on trouve une unité pédiatrique et une maternité. De plus, MSF a établi un centre d’alimentation thérapeutique dans les quartiers nord et sud de Galkayo. Il n’est pas inhabituel d’y accueillir des enfants pesant moins de 60 % du poids normal pour leur taille. Souvent, ils souffrent aussi de maladies graves comme la rougeole, la diarrhée et la tuberculose. Nous les traitons et les ramenons peu à peu à une alimentation normale, grâce à une méthode d’intervention très spécialisée. Les enfants de la Somalie méritent d’avoir accès à l’école, de recevoir des soins de santé adéquats, et de vivre une vie longue et pacifique.
LA MORT D’UN ENFANT EST TOUJOURS UN ÉVÉNEMENT TRAGIQUE, MAIS ELLE L’EST ENCORE DAVANTAGE LORSQU’IL S’AGIT D’UNE MALADIE ÉVITABLE DONT ON PEUT GUÉRIR SI L’ON DISPOSE DES RESSOURCES NÉCESSAIRES.
Irene Turpie est médecin et vit à Dundas en Ontario. En 2005, elle a participé en tant que volontaire à un projet de MSF à Galkayo, Somalie. La ville de Galkayo est divisée en deux et chaque côté est contrôlé par différents partis. Il y a plusieurs personnes provenant d’autres régions du pays dans cette ville comme c’est souvent le cas dans des zones où règnent guerre civile et agitation.
Irene Turpie Médecin, Galkayo, Somalie
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Zambie
Le pouvoir de la parole en
ZAMBIE ans une certaine mesure, quiconque milite en faveur de l’équité en matière de santé dans le monde prêche aux convertis. Par exemple, il est facile de convaincre les lecteurs de ce bulletin qu’il est primordial d’améliorer l’accès au dépistage et au traitement pour les personnes séropositives et qu’il faut éduquer le mieux possible la population sur cette maladie si l’on veut en ralentir la transmission. Or il est beaucoup plus difficile de toucher les personnes qui se sentent peu concernées par le problème de la santé dans le monde parce que leur esprit est accaparé par les multiples détails de la vie quotidienne. Pour des organismes comme Médecins Sans Frontières, l’OMS ou la Croix-Rouge, présenter des arguments qui convaincront que la santé, tout comme la maladie, ne doit pas connaître de frontières, pose un défi constant.
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MSF prend souvent la parole au nom de personnes ou de pays que la pauvreté ou la guerre réduit au silence, en espérant qu’ils puissent un jour s’exprimer avec leurs propres mots. C’est précisément cet espoir qui est en train de se concrétiser en Zambie. MSF administre un projet situé dans la zone rurale de Nchelenge, au nord de la Zambie, après avoir remodelé un programme qui avait autrefois servi à accueillir l’afflux massif de réfugiés venus de la République démocra-
tique du Congo (RDC) voisine. La situation en RDC a évolué, et MSF s’est adapté. En 2001, ses travailleurs ont amorcé un programme de dépistage du VIH, d’éducation et de consultation à l’intention de la population zambienne. En janvier 2004, un premier patient a reçu un traitement antirétroviral (ARV). Les gens viennent de centaines de kilomètres à la ronde pour bénéficier du programme. Pour les Zambiens, le VIH fait partie de la réalité quotidienne depuis des décennies. Or, comme dans tant d’autres pays d’Afrique, ses effets se font voir plutôt qu’entendre. La plupart des pays africains n’ont pas fait preuve de la même prévoyance que l’Ouganda, où le gouvernement s’est attaqué directement au problème en favorisant un dialogue ouvert entre les patients, les autorités et les médias. Jusqu’à présent, la pauvreté, la stigmatisation et la désinformation ont empêché que la même chose se produise en Zambie. Toutefois, un groupe de plus en plus nombreux de patients déterminés à vivre « positivement » et à s’affirmer est en train de transformer les choses avec l’aide de MSF. Dans les groupes de soutien qui se sont constitués à Nchelenge, tout comme dans les autres projets MSF au centre du pays, les gens apprennent à prendre la parole. Chaque jour, des dizaines de personnes, séropositives ou non, se réunissent pour discuter du combat que leur communauté livre contre le sida et des moyens de remporter la bataille. On met en commun des idées qui leur permet-
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tront d’assurer le gagne-pain des plus atteints par la maladie parmi elles. On discute des mesures que devrait prendre le gouvernement pour les aider. On est bien informé, et le débat est passionné. Tous quittent la petite salle avec l’envie de changer les choses, la tête pleine d’idées. En Zambie, le VIH fait la manchette. Presque tous les jours, les quotidiens de Lusaka proposent un reportage sur l’accès aux soins ou rapportent les propos d’un porte-parole. On dénonce la réticence des politiciens, notamment du président, à se soumettre publiquement à un test de dépistage. Selon le chef de mission du projet de Nchelenge, Riekje Elema, la communauté séropositive acquière de mois en mois une notoriété grandissante. Avec les élections prévues en 2006, voilà un groupe auquel les politiciens prêtent désormais une oreille attentive. On pense que le gouvernement annoncera bientôt que les ARV seront distribués gratuitement dans tout le pays. Les Zambiens sont en voie d’accomplir ce à quoi MSF n’osait rêver. Au lieu de tenter de convaincre un auditoire récalcitrant de la pertinence de leurs arguments, ils sont en train de faire la preuve qu’on ne peut rester indifférent à ce qu’ils ont à dire.
James Maskalyk Médecin en tournée dans les projets de MSF en Zambie
Accès aux médicaments essentiels
LE RÊVE DE L’ACCÈS AUX MÉDICAMENTS POUR TOUS epuis l’entrée en vigueur, en avril 2005, de la Loi de l’engagement de Jean Chrétien envers l’Afrique, les sociétés canadiennes ont enfin la possibilité de produire des versions génériques de médicaments, destinés à être exportés vers les pays en développement aux prises avec des problèmes de santé publique.
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Tel que le soulignait la dernière livraison de Dépêches (vol. 7, no 1), Médecins Sans Frontières a placé une commande auprès d’un fabricant pour vérifier si la nouvelle loi permettra réellement de fournir des médicaments aux patients qui en ont besoin. Depuis l’adoption de cette loi par le Parlement en avril 2004, pas un seul comprimé n’est encore sorti du pays, mais un espoir pointe à l’horizon. Une société canadienne importante, Apotex, a accepté de mettre au point une association à dose fixe (soit trois médicaments en un) pour le traitement du VIH/sida. Le produit est en cours d’élaboration et le fabricant a déposé une demande d’approbation auprès de Santé Canada. La nouvelle loi canadienne (appelée successivement projet de loi C-56, C-9, puis C-29) constitue la première tentative de mise en œuvre du paragraphe 6 de la Déclaration de Doha, ratifié le 30 août 2003. Dans cette décision, l’Organisation mondiale du commerce (OMC) avait accepté d’autoriser pendant un certain temps la fabrication de versions génériques de médicaments brevetés sous licence obligatoire, à condition que celles-ci soient destinées à l’exportation. On ne sait pas encore comment cette loi se traduira en pratique et quels problèmes elle pourrait soulever.
Liste de médicaments. La loi ne devrait pas s’accompagner d’une liste limitant les médicaments auxquels elle s’applique, mais c’est malheureusement le cas. La moitié des médicaments qu’elle renferme ne sont plus protégés par un brevet ou bien sont des médicaments rarement utilisés ou anciens; la liste est extrêmement restrictive pour ce qui est des autres médicaments admis. Le produit que MSF a demandé à Apotex de fabriquer n’y figure pas; par conséquent, sa requête pourrait être rejetée, bloquée ou provoquer des délais. La bonne volonté des fabricants. Rien ne garantit aux fabricants génériques qu’un médicament donné sera approuvé par Santé Canada ou que le détenteur du brevet ne cherchera pas à contester la décision. Incitatifs financiers limités. Certains fabricants affirment que le gouvernement devrait offrir de meilleurs incitatifs financiers (comme des allégements fiscaux ou des subventions) pour les encourager à s’engager dans la production d’un médicament dans le cadre de cette loi. ENSUITE? Le fait d’obtenir l’accès à un traitement de première intention contre le VIH/sida constituerait une réussite en soi. Savoir qu’il s’agit d’un médicament d’origine canadienne est une chose dont les citoyens de ce pays pourront être fiers. Néanmoins, il ne faut pas perdre de vue le portrait d’ensemble. Lancé en 2001, l’appel
en faveur de « l’accès aux médicaments pour tous », confirmé par la Déclaration de Doha, n’a pas encore abouti à la production d’un seul comprimé. Le jour où l’on administrera enfin le premier médicament élaboré au Canada dans un pays en développement, cinq années au moins se seront écoulées. Nous aurons donc mis tout ce temps avant qu’un fabricant générique dans un État membre de l’OMC ne réussisse à produire un seul médicament en vertu des dispositions du paragraphe 6. Combien de personnes le VIH/sida aura-t-il fauchées entre temps? ONUSIDA estime que pour la seule année 2004, le nombre de victimes a atteint les trois millions. Cette lenteur du processus est inacceptable. Bien peu de pays se sont précipités pour suivre la voie tracée par le Canada; les fabricants européens de génériques ont quant à eux clairement indiqué qu’ils n’y voyaient aucun intérêt. Comment alors ne pas perdre tout espoir que des instruments juridiques comme le paragraphe 6 nous aident à changer le cours de la crise du sida? Le Canada peut s’estimer satisfait d’avoir accompli quelque chose, mais nous ne pouvons nous permettre de croire que là réside la solution. Le rêve de l’accès aux médicaments pour tous est bien loin d’être réalisé… et jusqu’à présent, les mots de Doha sont restés lettre morte. Rachel Kiddell-Monroe Coordonnatrice de la campagne Accès aux médicaments essentiels
Le dévouement inlassable de certains acteurs canadiens dans ce dossier. Sans le zèle et la détermination manifestés par différents intervenants au cours des 18 derniers mois, notamment des organismes de la société civile, des fonctionnaires, des politiciens canadiens et de Stephen Lewis, envoyé spécial à l’ONU pour le VIH/sida en Afrique, le dossier n’aurait vraisemblablement pas abouti. Obstacles de nature technique. La complexité de la loi et les restrictions qu’elle impose pourraient la rendre impraticable.
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Maladie de Chagas
AU-DELÀ DES
cultures
LES RENCONTRES QUE L’AIDE HUMANITAIRE CATALYSE AVEC LES PEUPLES AUTOCHTONES PEUVENT ÊTRE DES OCCASIONS EN OR POUR MIEUX COMPRENDRE LES ENJEUX DE LA SANTÉ DANS DES CONTEXTES DIFFÉRENTS.
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’ai passé l’année de mes 20 ans à m’immerger dans la vie des familles habitant dans les oasis égyptiens, à accompagner un guerrier Massaï jusqu’à son village au nord du Kenya, à parcourir l’Himalaya nu-pieds comme les gourous Indiens, fascinée par les multiples cultures. À mon retour au Canada en 1989, j’ai commencé des études en anthropologie, un parcours qui me donne aujourd’hui le statut singulier de docteure en anthropologie. C’est quelque part au tout début de ce parcours que j’ai fait connaissance avec Médecins Sans Frontières (MSF); la vision, les gens et le côté pratique de l’organisation ont retenu mon attention. J’ai voué les sept dernières années de ma vie profes-
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sionnelle à tenter de mieux comprendre cette culture humanitaire dans ses rapports avec des groupes autochtones. J’en ai fait un sujet de thèse de doctorat, un livre et une façon personnelle d’appliquer l’anthropologie. Je me suis particulièrement préoccupée du volet de la rencontre entre deux médecines : médecine biomédicale humanitaire et médecine traditionnelle autochtone, une rencontre qui exige un effort de collaboration entre les deux partis. Ceci m’amène à mon histoire d’aujourd’hui. MSF-OCBA [bureau de Barcelone] m’avait invitée à Itaka Guasu, chez les peuples autochtones Guarani au sud de la
Bolivie. Ces survivants de périodes d’esclavage, de conversions missionnaires et de multiples autres relations d’exploitation par les colonisateurs espagnols font aujourd’hui face à de graves problèmes de santé, dont une maladie qui conduit à une mort subite, plusieurs hommes et femmes dans la quarantaine. Cette maladie est aujourd’hui connue sous le nom de maladie de Chagas, nommée d’après le scientifique Carlos Chagas qui a découvert, en 1909, le parasite qui en serait la cause, à savoir le tripanosoma cruzi. La maladie de Chagas se répand actuellement de façon épidémique. Elle est sournoise : elle se développe lentement et progressivement sur des périodes se prolongeant jusqu’à 30 ans; elle est sans symptômes apparents, difficile à déceler et à reconnaître jusqu’à ce que, soudainement, elle cause la mort. Elle est dévastatrice, surtout dans les milieux pauvres et marginalisées telles les populations autochtones. Au moment de cette invitation, une équipe de MSF conduisait déjà des interventions auprès des populations du sud de la Bolivie en vue de contrôler la maladie de Chagas et devait intervenir sous peu chez les Guarani. L’intervention conduite était essentiellement un traitement biochimique au benznidazole. Pourtant il est connu que le traitement pharmacologique utilisé de façon isolée ne suffit pas pour contrôler cette maladie; il faut en éliminer la
cause, à savoir l’insecte (la vinchuca) qui transporte le parasite (et le transmet aux humains) et dont les spécimens pullulent dans les habitations de cette région. C’est là que les choses deviennent plus complexes, car elles impliquent la participation active de chaque maisonnée Guarani. Pour éviter la réinfection, les maisons doivent être détruites, reconstruites, arrosées, nettoyées selon des principes d’hygiène particuliers; les animaux domestiques doivent habiter à l’extérieur…, une série de modifications majeures au style de vie des Guarani auxquelles ces derniers résistent. Le coordonnateur du projet de MSF m’a ainsi lancé une invitation spéciale afin qu’ensemble nous puissions aller voir qu’elles étaient les raisons de ce manque d’intérêt quant à la mise en pratique des recommandations de la santé publique chez les Guarani. Il devait y avoir une explication chez ce peuple digne et riche en connaissances. Nous sommes allés voir du côté des médecines traditionnelles qui entrent souvent en compétition avec les nouvelles connaissances thérapeutiques introduites. Nous avons d’abord rencontré des représentants autochtones et internationaux qui travaillaient déjà dans la région afin d’obtenir leur autorisation pour discuter avec les personnes se préoccupant actuellement de la santé de ces populations. Nous sommes ensuite allés visiter ces personnes. Le premier
représentant que nous avons rencontré, Don Felix, était à la fois auxiliaire de santé et herboriste; il travaillait simultanément avec des produits pharmaceutiques et des produits à base de plantes, et collaborait avec les Upurupuanos (guérisseurs / divinateurs) depuis déjà plusieurs années. Personne venant d’une organisation de santé internationale ne l’avait jamais consulté concernant ses connaissances thérapeutiques traditionnelles, et il était agréablement surpris que nous nous intéressions à ses savoirs sur les plantes médicinales et à son rôle de médiateur entre les cultures. Don Felix et tous ceux et celles avec qui nous avons parlé ont insisté sur le rôle crucial que jouent les Upurupuanos chez les Guarani. Ces guérisseurs diagnostiquent le mal-être en lisant dans les feuilles de coca; leurs conseils sont très appréciés et ont toujours un impact social important. Ils ne parlent pas de la maladie de Chagas en tant que telle, mais possèdent les capacités et les connaissances susceptibles de donner des explications sur celle-ci, explications qui sauraient être significatives pour les Guarani. Là réside peut-être la voie qui permettrait aux populations autochtones d’apprendre les façons d’éviter la réinfection par les vinchucas et de lutter contre la maladie de Chagas. Transiter par les thérapeutes venant du milieu social local peut fournir les outils sociaux et culturels afin que la biotechnique soit utile. Ainsi les chances de contrôler la maladie de
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Chagas pourraient être augmentées, et les traitements pharmaceutiques pourraient alors atteindre une meilleure efficacité. Les « découvertes » scientifiques ne sont utiles et ne peuvent devenir efficaces qu’au moment où elles s’ancrent dans le quotidien de manière significative. Plutôt que d’ « éduquer » unilatéralement les populations ciblées, ici les Guarani, à partir des principes et techniques de la biomédecine sur lesquels se basent les savoirs humanitaires, MSF-OCBA a, par ma visite, lancé la possibilité de joindre ces « découvertes » à celles que les populations locales ont aussi mises à jour en ce qui concerne la santé et les maladies. Cela permet une approche multidirectionnelle plus compréhensive et flexible qui travaille et coopère avec le potentiel thérapeutique existant sur place. Une communication et un échange de savoirs significatifs pour les deux groupes devraient porter fruit. Sans ce dialogue, il s’agit d’un rendez-vous manqué.
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Les rencontres que l’aide humanitaire catalyse avec les peuples autochtones peuvent être des occasions en or pour mieux comprendre les enjeux de la santé humaine dans des contextes différents. Mes recherches préalables portant sur un projet de MSF Hollande auprès de populations autochtones de l’Amazonie brésilienne ont démontré que l’approche biomédicale dite neutre adoptée au niveau de MSF international devient politique et culturellement distincte alors qu’elle prend place au sein des populations nationales et locales des projets (Laplante 2004). Flexibilité, adaptabilité, compréhension sont tous des éléments nécessaires pour travailler dans les différents contextes culturels. Mon séjour en Bolivie a essentiellement consisté à laisser les populations Guarani et leur médecine traditionnelle, le temps de prendre leur place dans les discussions entourant la maladie de Chagas. Le contexte national bolivien à l’intérieur duquel vivent aujourd’hui les Guarani est d’ailleurs propice à ces contributions.
La Bolivie est une société multiethnique ayant une longue tradition de co-habitation avec la maladie de Chagas. Des traces du parasite ont été retrouvées dans des momies des anciennes civilisations Inca (1400 ans av. J.-C.) et Wankari (400 A.D.) du pays. La tradition des herboristes autochtones Kallaway, qui a pu un jour être aussi organisée dans les hautes Andes que l’est aujourd’hui la tradition biomédicale au niveau international, se préoccupe encore aujourd’hui de questions de santé liées à la maladie de Chagas et a développé certains traitements et manières de faire qui minimisent son ampleur. La Bolivie compte de riches expériences de collaboration entre les approches traditionnelles en santé et les approches biomédicales, des expériences de collaboration qui peuvent largement contribuer à la lutte contre la maladie de Chagas.
Julie Laplante Anthropologue, consultante pour MSF
Progrès médicaux
UN NOUVEAU MÉDICAMENT SIMPLIFIE LE TRAITEMENT DE LA MALARIA e Groupe de travail sur les médicaments pour les maladies négligées (DNDi – Drug for Neglected Diseases Initiative) a annoncé la mise au point d’une nouvelle formule de polythérapie destinée au traitement de la malaria. On estime que cette maladie fait chaque année entre un et deux millions de victimes; dans quatre-vingt-dix-neuf pour cent des cas, ces décès surviennent en Afrique subsaharienne. La malaria est présente dans plus de 100 pays et menace 40 % de la population mondiale.
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La nouvelle formule annoncée concerne l’association de deux médicaments en un seul comprimé, soit l’artésunate et l’amodiaquine (AS/AQ). Grâce à celle-ci, on a pu réduire substantiellement la dose pour adulte, qui est actuellement de quatre comprimés à prendre deux fois par jour pendant trois jours (soit 24 comprimés en tout), à deux comprimés à prendre une fois par jour pendant la même durée (c’est-à-dire six comprimés). DNDi a également élaboré une formule pédiatrique : un comprimé de petite taille, facile à avaler et soluble dans l’eau. DNDi est un programme de recherche sur les médicaments à but non lucratif, qui a été fondé en 2003 par les entités suivantes : l’Institut de recherche médicale du Kenya, le Conseil de recherche médicale de l’Inde, la Fondation Oswaldo Cruz du Brésil et le ministère de la santé de la Malaisie, tous des organismes de recherche publics; l’Institut Pasteur, un institut de recherche privé; le programme de Recherche sur les maladies tropicales de l’OMS, une organisation internationale de recherche, et Médecins Sans Frontières. DNDi a récemment signé une entente avec la société Sanofi-Aventis pour que celle-ci achève l’élaboration de la formule à dose fixe AS/AQ et prépare le dossier nécessaire en vue de l’enregistrement obligatoire du médicament et du processus de présélection de l’OMS.
Le médicament sera offert au secteur public, aux organismes internationaux et aux ONG, aux prix cibles de moins de 1 $US et de 0,50 $US respectivement pour les traitements pour adulte et pour enfant. Sanofi-Aventis a accepté de faire don à DNDi de trois pour cent des ventes au secteur privé, qui serviront en retour à réduire le coût du traitement. Sanofi-Aventis a en outre accepté de se charger de l’enregistrement, de la production et de la distribution initiales du médicament au prix coûtant. Celui-ci devrait être mis en vente au milieu de 2006. L’entente conclue entre DNDi et SanofiAventis est non exclusive. Toutefois, DNDi a garanti l’exclusivité à cette dernière pendant toute la durée du programme de développement du produit et jusqu’à ce que le premier enregistrement soit chose faite. DNDi a pour mission de mettre au point des médicaments nouveaux ou améliorés, adaptés au terrain, pour traiter les maladies négligées qui affligent les pays très pauvres, notamment la leishmaniose, la trypanosomiase africaine (la maladie du sommeil) et la maladie de Chagas. Le programme vise également à sensibiliser la communauté internationale au besoin urgent d’élaborer des médicaments pour lutter contre ces maladies et à renforcer la capacité existante dans les pays où elles sont endémiques. Pour en apprendre davantage sur DNDi et le rôle crucial des médicaments dans la lutte contre les maladies négligées, consulter www.dndi.org. [site en anglais seulement]
Tiré du bulletin d’information de DNDi No10, avril 2005
AGIR POUR ENRAYER LES MALADIES NÉGLIGÉES Le 8 juin dernier, DNDi lançait un appel aux gouvernements pour qu’ils appuient de manière significative et soutenue les efforts visant à renouveler les vaccins et les méthodes diagnostiques destinés aux personnes qui souffrent et meurent de maladies négligées. Cette date marque le lancement d’une campagne d’un an ayant pour objectif d’inviter tous les organismes et les individus ayant des vues communes, y compris des leaders d’opinion et des membres de la communauté scientifique et de la presse, à signer une pétition qui sera déposée à l’Assemblée mondiale de la Santé en 2006. Chaque jour, plus de 35 000 personnes succombent à des maladies infectieuses comme le sida, la malaria ou la tuberculose, ou à des maladies hautement négligées comme la leishmaniose, la maladie de Chagas et la maladie du sommeil. Si des mesures vigoureuses ne sont pas mises en place, ces maladies continueront de ravager les pays en développement, avec les conséquences mondiales que cela suppose. Les gouvernements doivent agir DÈS AUJOURD’HUI. Pour se renseigner sur la campagne et sur les façons d’y participer, ou pour consulter la liste des signataires, visiter www.dndi.org. [en anglais seulement]
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MSF au Canada
AU REVOIR ET MERCI! et été, je quitterai MSF Canada après avoir occupé le poste de directeur général pendant sept ans, au terme d’un parcours qui fut pour moi des plus enrichissants.
C
Bien des choses se sont passées au cours de cette période, mais certaines personnes et certains faits resteront gravés dans ma mémoire : • la contribution de médecins canadiens comme Richard Bedell, David Tu, Cheryl McDermid et Sumeet Sodhi à la lutte contre le VIH/sida; • le rôle vital qu’a joué la campagne Accès aux médicaments essentiels face à la nécessité de faire fléchir le prix des médicaments et de préconiser un nouveau traitement de la malaria dans nombre de pays; • le dévouement du personnel national avec lequel j’ai eu le plaisir de travailler l’an dernier en République du Congo, à titre de chef de mission dans un pays oublié et dévasté par la guerre; • l’engagement d’un si grand nombre de volontaires canadiens, dont l’indéfectible dévouement aura permis de transformer la vie d’une multitude de gens : merci à Jane Little, Steve Cornish, Vincent Échavé, Michael Hall, les sœurs
Dépêches Vol.7, no 2
Skinnider, Reine Lebel, Leslie Shanks et aux innombrables autres personnes qui se sont investies pour apaiser les souffrances des délaissés de ce monde; • la compréhension des Canadiens et des Canadiennes, qui ont continué à appuyer MSF même lorsque sa position était contraire au vent dominant – dénoncer le jumelage entre action militaire et action humanitaire en Afghanistan, réprouver l’exploitation des travailleurs humanitaires à des fins politiques au Kosovo ou, plus récemment, interrompre notre collecte de fonds pour les victimes du tsunami une fois nos objectifs atteints. Ce fut pour moi un réel privilège de diriger une organisation aussi dynamique que MSF et de collaborer avec un personnel aussi compétent. Ensemble, nous avons réussi à en faire l’un des organismes internationaux les plus efficaces et respectés au Canada. Après mon départ, je travaillerai à un projet de livre sur MSF, destiné aux jeunes lecteurs, à la demande d’une maison d’édition canadienne. Sans l’appui inestimable de nos donateurs et de nos donatrices, nous serions dépourvus de l’indépendance et de la capacité nécessaires pour mener à bien notre travail : traverser les lignes ennemies
pour dispenser des soins médicaux aux pauvres, introduire les traitements antirétroviraux dans les coins les plus reculés de l’Afrique et affronter les gouvernements et les interlocuteurs internationaux qui placent leurs propres intérêts devant ceux des déshérités du monde. Je me garderai toutefois d’afficher une attitude trop triomphaliste alors qu’il reste tant à faire. Dans les pays en développement, seulement 10 % des personnes atteintes du sida reçoivent les traitements dont elles ont besoin. Nos volontaires accomplissent un travail exceptionnel au Darfour, au Congo et en Somalie, mais sont parfois dépassés par l’ampleur de la souffrance. Présentement, nous ne pouvons même pas travailler en Afghanistan puisque l’assassinat de nos cinq collègues dans ce pays l’an dernier demeure irrésolu. Refuser de se laisser abattre quels que soient les obstacles : voilà l’une des grandes forces de Médecins Sans Frontières. Grâce à votre appui inestimable, nous finissons toujours par trouver un moyen de venir en aide à ceux et celles qui en ont besoin. Je vous en remercie. David Morley Directeur général, MSF Canada
Lecture suggérée
Personne ne peut arrêter la pluie L’histoire se déroule en Angola, aux derniers stades de la guerre qui a déchiré ce pays pendant 30 ans. No One Can Stop the Rain raconte l’expérience de deux volontaires de Médecins Sans Frontières (MSF), un chirurgien et son épouse, qui décident, à mi-chemin dans leur carrière, de laisser derrière eux une vie confortable pour affronter le meilleur et le pire de l’humanité. Nous suivons le parcours du couple jusqu’à Kuito, au cœur même du pays, au fil des lettres et des extraits de leur journal personnel. À l’époque, cette capitale de province jouissait de la réputation peu enviable d’être la ville la plus minée au
LES CANADIENNES ET CANADIENS EN MISSION
monde. Travaillant auprès des personnes déplacées et des victimes des mines et de la malnutrition, les auteurs se font les témoins de faits et d’événements qui nous offrent une perspective unique sur la vie au sein de la vaste citadelle humanitaire. Ils racontent bien sûr l’expérience de la guerre, mais aussi les rencontres enrichissantes que le hasard met sur leur route, avec des habitants et d’autres volontaires comme eux.
No One Can Stop the Rain, par Karin Moorhouse et Dr Wei Cheng, est publié chez Insomniac Press. En vente dans toutes les bonnes librairies.
Andrew Morton Marlene Power Mireille Roy Patrick Ulrich RÉPUBLIQUE DU CONGO Maryse Bonnel Tyler Fainstat Sophia Kapellas Patrick Robitaille Heather Thomson SIERRA LEONE Johana Amar Priscilla Brooke Chentale de Montigny Nancy Graham
AFRIQUE DU SUD Peter Saranchuk ANGOLA Miriam Lindsay BURUNDI Eugénie Granger Gabriela Phal Diane Rachiele Jennifer Weterings COLOMBIE Darryl Stellmach CÔTE D’IVOIRE Jessika Huard Kurt Jansen ÉTHIOPIE Martin Alpert Isabelle Aubry HAÏTI Sylvain Charbonneau Robert Parker Jean Sander
INDE Lynne Chobotar Sajida Hussain Claude Trépanier INDONÉSIE Sasha Bernatsky Michelle Chouinard Brigitte Larose Gurnam Sodhi Karin Sutherland KENYA Sylvain Deslippes David Michalski Tiffany Moore LIBÉRIA Asit Mitra Carrie Morrison MYANMAR Nancy Dale Carol Frenette Jim Newton Manisha Rajora
NIGÉRIA Adam Childs OUGANDA Donald Chambers Asha Gervan Maïwenn Henriquet Thomas Kelly Thierry Oulhen Tom Ripley OUZBÉKISTAN Catherine de Ravinel PAKISTAN David de Bold RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO Nicolas Barrouillet Frédéric Beaudoin Paul Blasig Émilie Frédérick Sylvain Groulx Serena Kasparian Dawn Keim Jean-Sébastien Matte
SOMALIE Steve Dennis Bruce Lampard SOUDAN Reshma Adatia Mario Fortin Ivan Gayton Megan Hunter Zayd Majoka Nasser Salam Arun Sharma Sheila Stam Hassan Valji TCHAD Kevin Coppock Vance Culbert Frédéric Dubé Darcy Gagnon ZAMBIE Bonnie Fournier Eva Lam Sima Patel
Dépêches Médecins Sans Frontières 720, av. Spadina, bureau 402 Toronto, Ontario, M5S 2T9 Tél. : (416) 964-0619 Téléc. : (416) 963-8707 Numéro de téléphone sans frais : 1.800.982.7903 Courriel : msfcan@msf.ca Site Web : www.msf.ca Rédactrices : linda o. nagy Dominique Desrochers Directeur de la rédaction : Tommi Laulajainen Collaborateurs : Carrie Bernard, DNDi, Nancy Forgrave, Rachel Kiddell-Monroe, Julie Laplante, James Maskalyk, David Morley, Irene Turpie Tirage : 90 000 Graphisme : Artshouse Communications Inc. Impression : Warren's Imaging and Dryography Été 2005
ISSN 1484-9372
Crédit photos : Jet Belgraver, Chris de Bode, Jean Marc Giboux, Julie Laplante, Sebastien Le Clezio, Greg Locke, Stefan Pleger, John Reardon, Julie Rémy, Gilles Saussier, Stephen Shames, Serge Sibert/Cosmos, Kenneth Tong
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LES DONS PLANIFIÉS
Nancy Forgrave Responsable des dons planifiés