Les architectes de l’agence collaborative germano-italienne noa* ont été rappelés pour poursuivre le développement de l’hôtel Silena, entamé il y a cinq années de cela. Au programme, une immersion assumée dans des racines venues d’Asie. Visite.
Texte : Fabienne Dupuis
Quand l’un obtenait son diplôme d’architecte à Graz, en Autriche, l’autre tirait encore des droites sur les bancs de la fac de Vérone en Italie. Lukas Rungger et Stefan Rier ne savent pas encore qu’ils vont se rencontrer quelques années plus tard à Milan, chez Matteo Thun & Partners. Mais la chose arrive, et si chacun poursuit son apprentissage ici et là tant que celui-ci les mène aux quatre coins du monde, ils prennent enfn la décision en 2010 de créer leur propre entité : ce sera noa*, une agence d’architecture collaborative et interdisciplinaire basée à Bolzano et Berlin. Et qu’est-ce donc que ce noa* qui porte en sus un petit astérisque fanqué là comme une étoile de berger ? Ce noa adoubé de son étoile, c’est sans doute une philosophie en forme de credo. Quelque chose comme une activité explorative qui piocherait dans les méthodes interdisciplinaires du design. Une matière évolutive qui varie selon la nature et les exigences de chaque projet, nous précise-t-on. S’il devait y avoir un mot ? L’émergence ! Un concept un peu thésard qui cache l’idée synecdotique du tout sur les parties. En bref, une approche et stratégie globalisées. La théorie une fois posée, nous voilà décortiquant l’un des derniers projets de l’agence. Ou plutôt un retour. À l’hôtel Silena. Une adresse de 1 800 m2 située à Vals dans le Tyrol du Sud en Italie, et qui avait déjà été réimaginée en 2017 par l’agence noa*. Cinq années plus tard, les propriétaires, riches de voyages en Asie, reviennent avec des idées plein la tête. Et de sérieuses envies de changements. Loin de l’altération, du revirement ou de la falsifcation, cette nouvelle réfexion offre à l’agence de poursuivre son dessein.
C’est le changement dans la continuité, avec quelques ajouts : une nouvelle entrée, six suites de plus ou encore un centre de bien-être pour les adultes seuls. Mais l’entrée d’abord. Qui s’affche comme un exercice de style où les bois bruns viennent jouer des coudes avec une palette de bleus et de gris. De la matérialité, de la verticalité et des horizontales de matières – la céramique, la pierre et le bois – habillent cette réception devenue un foyer aux effuences d’une sérénité toute organique qu’un mur de rouleaux de prières tibétains vient compléter de ses formules incantatoires. Les bonsaïs, eux, restent impassibles. Plus loin, les six nouvelles suites. Des espaces imaginés autour de l’ombre et des lumières, et de panneaux de bois qui structurent les chambres. À ceux-ci, ont été ajoutés d’autres panneaux, opaques ou semi-transparents, qui fltrent à l’envi, les rayons du jour ou ceux de lampes soigneusement positionnées, offrant au passage une théâtralité jubilatoire dans la forme d’un kabuki moderne ! Plus loin, le spa, conçu comme un onsen (sources chaudes) japonais, est inscrit dans un espace bardé de béton noir, rappelant sans équivoque la pierre de lave. Dessus, le gargouillis des fics focs de l’eau des piscines et fontaines offre aux sens le spectacle saisissant d’une réfexion infnie. La transition est achevée. Souveraine et méditative.
“ Les espaces des six nouvelles suites sont imaginés autour de l’ombre et des lumières, et de panneaux de bois qui structurent les chambres. ”