Déjà Vu Numero UN

Page 1

Déjà Vu La photographie par

les photographes .

NUMERO UN SEPTEMBRE 2015

1


2


Pour l’art est né de l’envie de partager. Après dix ans de pratique quotidienne de la photographie, dix ans de rencontres avec des sujets et des photographes, il m’a semblé qu’il était temps de montrer ceux qui, au quotidien, m’inspirent. C’est de cette idée qu’est né le magazine.

L

e concept se veut simple : montrer les images, les images avant tout. Pas de barrière de genre, la photographie d’art est prise dans tout ce qu’elle regroupe. A chaque nouveau numéro, de nouveaux photographes, choisis par les précédents. Chaque interview est menée par les photographes invités, qui découvrent généralement le travail de leurs collègues : il s’agit de créer une discussion autour de la photographie, des oeuvres présentées.

M

ais il n’est pas question de cêder à la course de la nouveauté à tout prix : chaque photographe sélectionné pour figurer dans Déjà Vu y gagne une tribune à vie pour y présenter ses nouveaux travaux. Ainsi, il ne s’agit pas de célébrer les artistes pour un instant, mais de les suivre, de les voir évoluer, chercher, réfléchir. Déjà Vu est aussi le magazine des recherches, des succès et des échecs. Libre aux autres photographes invités d’en parler, de critiquer, et de grandir, tous ensemble.

P

our ce premier numéro, j’ai choisi trois photographes pour m’accompagner : de nationalités différentes, ils ne se connaissent pas. C’est l’occasion de rencontres, des genres et des gens, et de tisser des liens inédits. Camille Ferré nous présente ses photographies tout en douceur, au flou si évocateur, Cao Dien voile le soleil pour nous dévoiler des visages, des corps, tandis que Margrieta Jeltema nous livre de la poésie en nature morte.

C

es photographes sont donc les premiers à se prêter au jeu de ce nouveau magazine, comme vous en serez les premiers lecteurs. Nous espérons vous inspirer comme les artistes ici nous inspirent, aussi divers qu’ils le soient. Peu d’égo ici, juste l’amour des belles choses, pour l’art.

Adrien Le Falher

3


Camille Ferré

an.thea@live.fr facebook.com/CamilleFerrePhotographie

Adrien Le Falher

adrienlefalher.pro@gmail.com facebook.com/Adrienlefalherphotography adrienlefalher.com

Cao Dien

facebook : J.CAO Photography-Art josdein.com

Margrieta Jeltema

margrij@gmail.com facebook.com/margrietajeltema margrij.com

Déjà Vu est un web magasine qui paraît à chaque fois qu’il est prêt. Il a été créé et mis en page par Adrien Le Falher. 4


Table des matières Portraits éthérés...........................................6 par Camille Ferré

Souvenirs suspendus...................................14 par Adrien Le Falher

Motifs solaires...........................................22 par Cao Dien

Poésie florale..............................................30 par Margrieta Jeltema

5


Portraits éthérés par Camille Ferré

I C

l y a du fantastique dans les photographies de Camille Ferré, des contes, du cinéma. Pas ettonant, donc, d’apprendre qu’elle étudie le cinéma en parralèle de la photographie.

e qui m’impressionne dans son travail, c’est cette impression à la fois de sensualité et d’extrème fragilité, comme si ses modèles étaient toujours sur le fil, à la fois très précaire mais dotée d’une force inimaginable. J’y retrouve des héroînes gothiques, voire médiévales, entre Iseult et Julia Margaret Cameron. Et puis il y a l’exotisme aussi : le travail de Camille évolue vers des images plus complexes, plus ornementées. Quelques costumes, de sublimes bijoux... Les textures minérales se mélangent avec celle de la peau, avec toujours cette profondeur de champ très courte, comme une sorte de rêve, de vision fugace.

J

’aime les femmes de Camille. La simplicité esthétique des images leur donne la chance d’y amener leur propre complexité. Voir ces photographies, c’est à la fois être témoin d’une rencontre entre la photographe et ses modèles, mais aussi des modèles avec elles-même, leur force, leurs émotions, et ce bouillonnement interne, qui, par touches subtiles, transparaissent dans ces images. 6


7


Ton travail est exclusivement composé de portraits. Pourquoi ce genre, plutôt qu’un autre ? J’ai commencé la photo voilà trois ans, de manière accidentelle, ma mère m’avait acheté un 550D pour faire des court métrages, et je me suis lancée dans la compréhension technique de l’appareil. J’ai fait beaucoup de photo à l’époque, de beaucoup de genres différents, pas mal de rue surtout, quelques paysages. Mais la découverte du portrait m’a beaucoup frappé, j’ai tous de suite voulu aller plus loin là dedans. Je pense qu’avant même la photographie, j’avais déjà une grande obsession des visages, que j’utilisais surtout pour le dessin. Je ne faisais également que ça, au point d’être incapable de dessiner un paysage. Certaines de tes photos font la part belle aux costumes, et aux bijoux. Est-ce que tu vois le portrait comme un support à la photographie d’objets, ou est-ce qu’ils sont fondamentalement liés ? Qu’apporte les costumes dans ton travail du portrait ? Pas vraiment, dans l’absolu, je n’aime pas trop

8

préparer mes shootings et un thème demande forcément de réfléchir à l’avance. L’important pour moi c’est le modèle et la lumière, je pars vraiment de là, le reste est presque superflu. Après je ne peux pas systématiquement réclamer du topless à mes modèles, certaines n’aiment pas ça et je peux le comprendre. Dans ces cas là, j’ai toujours peur d’être bloquée par des vêtements trop actuels, je ne me l’explique pas, d’où la prédominance de vêtements très typés. Puis les collaborations nous influencent, le travail fait avec Vanessa Lefevres (Les Plumes Impérial) m’a pas mal changé sur les robes, de nos jours c’est une amie et il arrive que je trouve un thème juste pour travailler avec elle. Certaines de tes photos sont inspirées de l’Inde, d’autre ont un côté plus victorien... Quelles sont des inspirations ? Pour la série Victorienne, l’inspiration m’est venu d’un tableau, je ne sais plus lequel, d’un peintre anglais du XIXe. Pour adoucir l’image j’ai mis un collant sur mon optique, je voulais un petite côté Vivianne Mook. J’aime beau-


coup l’idée de filtrer pendant la prise de vue plutôt qu’après. Pour l’Inde ça c’est fait parce que j’avais la possibilité d’utiliser ces bijoux. Je les trouve très beaux et je n’ai pas hésiter à réutiliser ce thème plusieurs fois car ça me laisse des possibilités très intéressantes sur la lumière, ils donnent sur la peau vraiment plus de force à la lumière et au contraste. Tu fais aussi du cinéma. Est-ce que tu considères la photo et le cinéma comme deux activités bien séparées ou est-ce que tu mélanges tes expériences et les laisse s’influencer l’une et l’autre ? Je l’ai faite pendant longtemps, cette distinction entre le cinéma et la photo. Peut-être parce que ces trois dernières année, j’ai surtout écrit des scénarios. La différence c’est aussi faite dans ma tête par rapport à la lumière, je pensais que la lumière de cinéma m’était inaccessible et ça me bloquait. Puis lors d’un atelier pratique dans mon université, j’ai compris que s’était dans le fond assez similaire, que du moins les lumières que je savais réaliser en photo étaient tous à fait transposables en vidéo et que ça n’aurait pas

l’air incongru. Je pense que cette expérience a déclenché quelque chose et ma pratique de la photo ma permit d’aller plus loin dans ma pratique cinématographique, surtout au niveau technique. J’ai d’abord réalisé un court métrage (très court de 3 minutes) dont j’étais la réalisatrice et le chef opérateur, dans la continuité de la lumière que j’utilise habituellement dans mes photos. Puis je me suis récemment mise à travailler sur les court métrages de mes amis et de mes camarades de classe. Ca me laisse moins de temps pour la photo, mais je préfère maintenant avoir une pratique moins intensive de deux fois par mois au lieux d’une fois par semaine. Ce qui est amusant c’est que mon envie de photo s’est développée dans la frustration de ne pas faire de court métrage régulièrement, mais que pour moi ça a fini par devenir une passion à part entière qui n’a esthétiquement pas toujours à voir avec ce que j’écris ou réalise en court métrage.

9


10


11


12


13


Souvenirs suspendus par Adrien Le Falher Swirls of color, dreamlike images The hint of a tree, waves, reflections of a summer’s sky, sunlight and waves Invite us to explore an enchanted world full of memories; A summer afternoon near a lake, a river One can hear laughter, children playing, lovers embracing Or maybe we walk through morning light, everything is silent In waiting.. Adrien’s photography delves into a world that’s almost visible, almost there Like a dream half remembered in the early morning Leaving us with a feeling of fleeting beauty A moment almost grasped, almost there to see More dreamed then seen Almost understood Like the dreaming water-lilies painted by Monet Like the fluttering divine light evoked by Turner In our imagination we are transported to these places where A soft breeze brushes colors and intricate shapes onto a silver mirror That never quite reveal their true nature There is always another secret to be found in these never ending unfolding stories. In other - earlier - work, like the cityscapes of Paris and Manhattan, details are not blurred at all; They are clear and abundant But it’s not difficult to find a ‘lien’ to the series shown here; No detail in the photographs is more important than another: All of them serve to give an impression of light and color That creates before our eyes a transcendent city where the unfolded stories and memories become Gradually more important and fascinating Than the image seen at first glance. Texte de Margrieta Jeltema

14


15


En floutant les formes, ces photos met- Tes autres photos sont une recherche tent en avant les couleurs, est-ce qu’il de l’ultra-netteté dans les détails, esty a une intention particulière derrière ce que cette série est un contre-pied ? cela ? Pas vraiment. Ce n’est pas tant les détails J’ai une passion intarissable pour les qui m’obsèdent que les textures. Lorsque couleurs et la façon dont elles se marient. je prend un paysage en photo, c’est parce Néanmoins, je ne pense pas que cette que je suis fasciné par l’impression qu’il a série ne repose que sur les couleurs : j’es- sur moi. C’est cette impression que je veux saie surtout de composer des formes, afin retranscrire dans mes images, plus que la de créer des compositions harmonieuses. réalité du lieu. Et pour moi, cela passe par Il y a toujours dans mon travail un rapport une mise en avant des textures. Cellesavec la géométrie, dont j’essaie toujours ci peuvent être extrèmement définies, de tester les limites, dans les deux sens. comme les feuilles des arbres dont je Soit en acceptant sa rigueur, soit en la voudrais capturer chaques nervures, ou pulvarisant. Dans un sens, cette série est plus flou, comme ici. Mais finalement la un pendant de mes photos plus “rectan- démarche reste la même : il s’agit toujogulaires”. Ici je cherche la courbe. Même urs de retranscrire une sensation, et la si les images peuvent paraître diffuse, je faire revivre à celui qui observe mes phocherche toujours des lignes. C’est ce qui tographies en le plongeant dans des imme permet de sélectionner les photos ages trop complexes pour être analysées. dans cette série, celles que je retiens, et Mon but est de créer un état presque hypcelles que je mets de côté. nothique, où le conscient lache prise et où l’on peut se plonger complètement dans les images. 16


Quels sont pour toi les différences entre n’est pas du tout la même, mais surtout, l’argentique et le numérique ? As-tu une les détails sont capturés de manière à la fois plus précise, et plus réelle. Il y a dans préférence ? l’argentique une douceur et une précision Il y a pour moi deux différences majeures qui sont à la fois paradoxales et inimitaentre l’argentique et le numérique : les bles. Et lorsque l’on veut créer, comme couleurs, et la précision spatiale, qu’on moi, de véritables fenêtres sur le monde, pourrait nommer résolution, ou défini- c’est indispensable. Voir une photo grand tion. Le numérique est limité de manière format tirée sur plusieurs mètres de large, extrèmement précise dans les deux cas : c’est une expérience unique, qui nous aven 8 bit, chaque couche de couleur peut ale tout entier. C’est ce genre d’impression comprendre 256 valeurs, et pas plus. En qui m’intéresse. argentique, il n’y a pas de valeurs, juste l’infini des possibles. On le remarque dans les dégradés, à force de s’entraîner l’oeil. Aujourd’hui, je distingue immédiatement une image argentique du numérique, quelque soit le traitement par lesquels l’image numérique est passée. Enfin, la précision : en argentique, j’utilise le plus souvent une chambre photographique, avec des pellicules qui font 4 pouces sur 5. C’est énorme ! A peu près 27 fois la taille de mon capteur numérique. Ca change plein de choses : la profondeur de champ 17


18


19


20


21


Motifs solaires par Cao Dien

L E U

e travail d’un photographe, comme tout artiste, commence en essayant de se trouver un style. Et Cao Dien, il en a, du style. Des couleurs complémentaires mais un peu passées, des portraits pudiques : on croise rarement le regard de ses modèles. t puis la lumière : toujours naturelle par sa source, mais toujours modifiée. Cao Dien aime la lumière surtout pour sa part d’ombre, il aime la lumière qui lui permet d’imprimer des motifs. Littéralement, de la photo-graphie.

n style, c’est de la technique, et c’est aussi des motifs : des fleurs, toujours des fleurs. Réelles ou projetées, elles ajoutent tantot une touche de naturel, tantôt d’artificiel, dans ces portraits qui sont finalement assez phantasmagorique. En effet, il n’y a pas de contexte dans les images de Cao Dien : elles sont hors du temps et de l’espace. Elles n’existent que par le fait de la lumière, paraissent comme volatiles. Et c’est le propre de la photographie de fixer ces instants de lumière.

22


23


Tes séries sont très axées sur le soleil Est-ce que cela fait une différence pour et les ombres, peux-tu m’en dire un peu toi ? plus sur le concept derrière ces photos ? La plupart de mes photos sont prises en C’est vrai que je suis très intéressé par numérique mais il m’arrive de prendre le soleil. J’ai l’impression de dessiner ces quelques photos en pellicule (au Vietombres, c’est parfait, je les vois vraiment nam). Je pense que le numérique permet comme des œuvres d’art. une retouche plus facile et plus rapide que les pellicules. L’argentique demande beauUtilises-tu des lumières artificielles ? coup de temps pour scanner et imprimer. Est-ce que tu crées la lumière ou estce que tu trouves des endroits où la lu- J’ai vu que tu partageais le travail d’aumière est intéressante pour y prendre tres photographes sur les réseaux sodes photos ? ciaux, quels sont tes préférés ? Quel est celui qui t’inspire le plus ? J’utilise toujours la lumière naturelle du soleil quand je prends des photos. Je Tous les photographes qui travaillent sur trouve un endroit où le soleil est suffisam- les ombres ou photographient avec des ment fort pour créer des ombres et ensuite Leica m’intéressent. Je suis particulièreje place la dentelle pour créer le motif. ment le travail d’Antoinnette Art sur Facebook. Ce sont ses photos qui me donnent envie d’en prendre à mon tour. Tes photos sont-elles prises en argentiques ou en numérique ? Pourquoi ? 24


Qui prends-tu en photo ? Est-ce que fectum, quid rerum ordo postulat ignorare tu cherches des mannequins ou est-ce dissimulantem formidine tenus iusserim que ce sont des amis ? Leurs parles-tu custodiri. quand tu prends les photos ? Nunc vero inanes flatus quorundam vile Je fais beaucoup d’auto-portraits et si- esse quicquid extra urbis pomerium nasnon ce sont mes amis. J’ai besoin qu’ils se citur aestimant praeter orbos et caelibes, sentent vraiment à l’aise quand je prends nec credi potest qua obsequiorum diversides photos. Des fois, je les aide à poser de tate coluntur homines sine liberis Romae. manière à avoir l’air naturel, je veux qu’ils ressentent le soleil, qu’ils sentent la beauté de ce qui est en train de se créer. En conclusion, j’aime la lumière et les ombres. J’essaye de les contrôler et de dessiner avec sur le corps des autres avec la lumière, ça fait comme des tatouages. L’appareil photo c’est le pinceau, la lumière et la dentelles sont l’encre. Je ne prends pas des photos, je dessine des tatouages avec mes émotions.Dvigc Montius nos tumore inusitato quodam et novo ut rebellis et maiestati recalcitrantes Augustae per haec quae strepit incusat iratus nimirum quod contumacem prae25


26


27


28


29


Poésie florale par Margrieta Jeltema

L

e travail de Margrieta est basé sur l’équilibre entre la fragilité et le pérenne. Étant aussi sculptrice, elle travaille surtout la céramique, à la fois fragile et capable de survivre à son créateur. De même, son travail photographique se concentre sur les fleurs (ces choses délicates capables de casser un mur pour grandir), parfois sèches, parfois éclatantes mais toujours dramatiques. Ses photos ne sont pas seulement délicates, elles sont précises, construites, elles sont l’expression de son esprit au delà des barrières de la simple photographie : c’est aussi de la peinture, mais avec cette texture inimitable apportée par la photographie grand format.

S

es photos se lisent comme de la poésie : c’est autant à propos de ce que vous lisez que de ce qui se trouve entre les lignes. C’est à la fois le résultat d’un travail très conscient et l’expression subconsciente d’elle-même. Loin d’être un simple exercice technique comme la vie peut l’être, ces photos sont, en un sens, plus proches d’auto-portraits fleuris

I

l y a une tension entre le classique et le moderne dans son travail : la nature morte a existé depuis des siècles et les appareils photo grand format qu’elle utilise viennent du début du 20eme siècle. Magrieta rajoute quelque chose de nouveau dans cette forme classique, à travers cette expression d’elle-même. : fragilité, évanescence et transcendance à travers l’art pour devenir éternel.

30


31


Tes photos comportent beaucoup de textures, on dirait presque de la peinture. Est-ce que la peinture t’inspire ? Quels artistes ? La nature morte est souvent très symbolique et conceptuelle. Au-delà de la beauté des fleurs que tu capture, tes photos véhiculentelles un message ? Merci Adrien pour ta remarque sur les textures et le style peint de cette série de fleurs. Il y a quelques années, j’ai fait des nymphéas en porcelaine, ils étaient tellement légers qu’ils flottaient sur l’eau. Je les ai appelés “Hommage à Monet ». Les tableaux de Monet sont tellement emplis de lumière et de poésie, j’espère que mes nymphéas étaient un peu comme ça. Hypnotisée par leur transparence, j’en ai fait des photos. Mais au final toutes ces photos numériques me paraissaient identiques. Leur qualité était correcte si le but était de montrer les céramiques mais en tant qu’images il leur manquait quelque chose. J’ai pris, après un long moment, le vieil appareil de mon père.

32

J’ai toujours été scotchée par les différentes étapes des gravures de Rembrandt où il souligne dans chaque version d’un même original, le noir et les points de lumière, tout en gardant les détails les plus fins, dramatisant encore et encore le dessin original jusqu’à une vision pleine de compassion, renforcée par les lignes du velours, de l’effort humain de trouver la balance entre la lumière et les ténèbres. Les Vanités de l’Age d’or allemand parlent de la beauté comme évanescente et fragile. Des céramiques d’Iznik, en passant par les Vanités de Rachel Ruysch, les tulipes sont devenues synonymes d’élégance. Comme les roses, elles sont aussi un symbole romantique, nous aspirons à conserver leur éphémère beauté. Mais les images que nous en faisons sont, elles, comme éternelles. L’image elle-même est le message, il a une intention, l’intention de partager, de dire une histoire et d’explorer le monde de l’imagination. Tu n’es pas seulement photographe, tu es aussi céramiste et poète. Comment cela influence-t-il ton art ?


Avant de faire des céramiques, je faisais surtout des gravures, je peignais aussi. C’est beaucoup plus tard que j’ai réalisé l’importance de la photographie ; quelque chose que j’avais pris pour acquis et qui m’a emporté vers quelque chose d’autre. La photographie a toujours fait partie de ma vie depuis que mon père ma présenté sa chambre noire faite-maison. C’était un ingénieur avec une passion pour le jardinage, les oiseaux et la photographie. J’ai parfois envie d’un monde empli de possibilités comme celui que peut-être seuls les artistes de la Renaissance ont connu ; un monde où il y avait un certain empressement à adopter et combiner les différents types de connaissances. Michel-Ange n’était pas seulement un peintre, c’était également un sculpteur bien sûr mais aussi un poète et un architecte. Les domaines de la science et des arts n’étaient pas séparés. On cherchait les bénéfices des solutions venant de différentes expériences. En altérant le contexte, les objets et les images peuvent révéler quelque chose de nouveau.

Tu prends tes photos en pellicule et avec un appareil grand format si je ne me trompe pas, pourquoi ? Le retour au vieil appareil de mon père m’a mené à la recherche et à la découverte de plus anciens et beaucoup plus grands appareils. J’en suis tombée amoureuse. J’ai souvent ces images de mon père enfant, il sortait dans les champs de la campagne des Frises, où les prés verts étaient divisés par de petits canaux, et les petits ruisseaux étaient, et sont toujours, la maison de beaucoup d’oiseaux nicheurs. Il a construit un mécanisme qui était activé par les oiseaux eux-mêmes quand ils entraient dans le nid. Le lendemain, il récupérait son appareil avec le négatif exposé. Il n’y avait de sophistication technologique ou d’outils très chers, rien que ce qu’un petit garçon pouvait trouver chez lui et adapter sans aide. C’était juste une boite avec une lentille, un bout de ficelle et sa passion pour les oiseaux et la photographie. La simplicité et le contrôle manuel de ces appareil offre des possibilités sans fin.

33


34


35


36


37


Déjà Vu a été créé et mis en page par Adrien Le Falher. Les textes ont été traduit par Cerise Montauban. Ce magasine vise à supporter la jeune photographie d’art contemporaine, au delà des genres. Supportez la photographie contemporaine, supportez Déjà Vu. 38


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.