Vorschau Universität Miséricorde

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Inaugurés en 1941, les bâtiments de l’université Miséricorde réalisés par les architectes Denis Honegger et Fernand Dumas incarnent la synthèse entre les tendances du classicisme structurel d’Auguste Perret et du modernisme de Le Corbusier. Le plan d’ensemble asymétrique, la diversité des éléments architecturaux et le traitement minutieux des surfaces en béton fascinent, comme émerveille aussi le travail virtuose des ingénieurs et des artisans. La publication contient une réédition du fascicule de 1941, ainsi que des photos actuelles et des textes sur l’ouvrage. Die 1941 eröffnete Universität Miséricorde der Architekten Denis Honegger und Fernand Dumas verkörpert eine Synthese zwischen den Tendenzen des Betonklassizismus von Auguste Perret und der avantgardistischen Moderne von Le Corbusier. Das Bauwerk fasziniert durch seine asymmetrische Anlage, die virtuosen Beiträge der Ingenieure und die umfangreichen Bearbeitungen der Betonoberflächen. Die Publikation umfasst einen Reprint der Baubroschüre von 1941, aktuelle Fotografien und Texte zum Bauwerk.

Publié par / Herausgegeben von Forum d’Architecture Fribourg, Architekturforum Freiburg

ISBN 978-3-7212-0905-1



Université Miséricorde Fribourg Classicisme structurel et modernité Universität Miséricorde Freiburg Betonklassizismus und Moderne niggli


Avant-propos

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Facsimile de l’ancienne fascicule de 1941 Les nouveaux bâtiments de l’université de Fribourg

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Mises en scène photographiques de l'université Miséricorde Verena Huber Nievergelt

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Miséricorde aujourd'hui, Photographies Yves Eigenmann, Heinrich Helfenstein, Primula Bosshard, Jérôme Humbert, Dominique Marc Wehrli

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L’université de Miséricorde Entre classicisme et modernité Christoph Allenspach

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Les constructions en béton de l’université Miséricorde à Fribourg Béton armé et l’art de l’ingénierie dans la construction Eugen Brühwiler

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Le concours d'architecture de 1937 Ambition, tradition et modernité Christoph Allenspach

286

Une difficile conservation Claude Castella

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L’œuvre de Denis Honegger en France Sebastien Radouan

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Biographies


Sommaire Inhalt

Vorwort

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Faksimile der alten Festschrift von 1941 Les nouveaux bâtiments de l’université de Fribourg

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Fotografische Inszenierungen der Universität Miséricorde Verena Huber Nievergelt

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Miséricorde heute, Fotographien Yves Eigenmann, Heinrich Helfenstein, Primula Bosshard, Jérôme Humbert, Dominique Marc Wehrli

208

Universität Miséricorde Zwischen Klassik und Moderne Christoph Allenspach

254

Die Betonbauten der Universität Miséricorde Freiburg Eisenbeton und Ingenieurbaukunst Eugen Brühwiler

270

Der Architekturwettbewerb von 1937 Ambitionen, Tradition und Moderne Christoph Allenspach

286

Eine schwierige Konservierung Claude Castella

294

Das Werk Denis Honeggers in Frankreich Sebastien Radouan

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Biografien


Le présent ouvrage sur l’université Miséricorde de Fribourg met en lumière un des principaux édifices construits en Suisse dans la première moitié du XXe siècle et rend accessible à un large public cette œuvre majeure de l’architecte Denis Honegger. L’idée de rééditer la plaquette parue en 1941 à l’occasion de l’inauguration de Miséricorde, aujourd’hui épuisée, n’est pas nouvelle. Sorte de grand cahier illustré, ladite plaquette s’ouvre sur une bonne vingtaine de pages d’annonces publicitaires. Suivent les propos des plus hauts représentants des milieux politique, religieux et académique du canton de Fribourg. La partie centrale de la publication donne la parole aux architectes, aux ingénieurs et aux spécialistes ayant participé à la construction. Elle traite par le menu de l’architecture des bâtiments et des travaux d’ingénieur, mais aussi du béton armé, de l’acoustique, de l’éclairage, de la fonction du verre, du chauffage et de la ventilation, des installations électriques, de l’étanchéité des terrasses, du fer forgé, du mobilier, etc. Tous ces articles, qui exposent les nombreuses idées innovantes mises en œuvre dans le cadre du chantier, font de la publication inaugurale un document précieux sur l’état de la technique au début des années 1940, document qui a également une valeur didactique. La nouvelle publication contient un facsimilé du document historique de 1941, ainsi que des photographies et contributions actuelles. Un des textes revisite l’œuvre de Denis Honegger sous l’angle de l’influence d’Auguste Perret et de Le Corbusier sur le jeune architecte. Un autre rend hommage au travail des ingénieurs Alexandre Sarrasin, Beda Hefti, Jean Barras et Henri Gigot, spécialistes chevronnés à qui l’on doit le squelette filigrane en béton de toutes les parties de l’édifice. Grâce à eux, Miséricorde est la parfaite incarnation de l’idée architecturale première: rendre visible la structure. Un article retrace les aléas du concours d’architecture et du choix d’un édifice en béton armé, audacieux pour l’époque, d’autant plus si l’on pense au contexte politique conservateur du canton et de l’identité catholique de son Université. Un autre encore éclaire l’œuvre ultérieure de Denis Honegger en France, dévoilant le devenir de l’architecte après le chantier de Miséricorde et complétant la biographie de l’architecte parue il y quatre ans. La qualité architecturale hors pair de l’université Miséricorde fait aujourd’hui l’unanimité. Cela n’a pas toujours été le cas. Après plusieurs transformations plus ou moins malheureuses, le bâtiment n’a pu être protégé contre de nouvelles atteintes à sa substance et placé sous la protection des monuments historiques que grâce à une action courageuse menée dans les années 1990. Les contraintes en termes d’utilisa-


Avant-propos Vorwort Cyrill Haymoz

Mit diesem Buch über die Universität Miséricorde Freiburg wird eines der bedeutendsten Gebäude der Schweiz aus der ersten Hälfte des 20. Jahrhunderts gewürdigt und das Hauptwerk des Architekten Denis Honegger einem breiten Publikum zugänglich gemacht. Die Idee zu einer neuen Publikation über die Miséricorde kam in der Vergangenheit immer wieder auf. Im Fokus stand dabei vor allem die Integration der vergriffenen Baubroschüre, die 1941 zur Einweihung der Miséricorde erschienen war. Die 150-seitige Publikation – aufgebaut wie ein illustres Sammelsurium – wurde eröffnet von einem Werbeteil und den Beiträgen der damaligen Würdenträger aus Kirche, Politik und Bildung. Der Hauptteil ist den Architekten, Ingenieuren und den am Bau beteiligten Spezialisten gewidmet. Ausführlich wird hier über die Architektur und den Ingenieurbau, aber auch über Beton, Akustik, Heizung, Lüftung, Elektroinstallationen, Beleuchtung, Glas, Flachdach, Schlosserarbeiten und die Kunst am Bau berichtet.

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Denis Honegger. Infolio, Editions du patrimoine, Paris 2010 Simon Texier, Sébastien Radouan.

Die alte Baubroschüre, welche die zahlreichen innovativen Ideen der damaligen Technik in ihren Anfängen abbildet, hat heute geradezu didaktischen Charakter. Das vorliegende Werk enthält dieses wichtige Zeitdokument aus dem Jahr 1941 als Reprint, ergänzt durch aktuelle Fotografien und Texte zum Bauwerk. Neu thematisiert werden die Einflüsse von Auguste Perret und Le Corbusier auf den jungen Architekten Denis Honegger. Zudem werden die wichtigen Beiträge zur Konstruktion der Ingenieure Alexandre Sarrasin, Beda Hefti, Jean Barras und Henri Gigot aufgearbeitet. Ihnen ist ein in allen Gebäudeteilen filigranes Betonskelett zu verdanken, das die Architektur zu dem macht, was die Miséricorde verkörpert: die Idee, Struktur sichtbar zu machen. Ein neu verfasster Beitrag geht den Fragen des Architekturwettbewerbs und der aussergewöhnlichen Wahl eines Gebäudes des Betonklassizismus im damaligen Umfeld der konservativen Freiburger Politik und im Rahmen einer katholischen Universität nach. Ein weiterer Beitrag erörtert das spätere Schaffen Honeggers in Frankreich und zeigt so den Werdegang des Architekten nach dem Bau der Miséricorde. Zudem ergänzt er die vor vier Jahren erschienene Monografie über den Architekten.1 Mittlerweile weiss man um die Bedeutung der unbestritten erstklassigen Architektur, die in Freiburg realisiert wurde. Das war nicht immer so – die Miséricorde blieb lange unbeachtet und konnte nur dank einer mutigen Aktion in den Neunzigerjahren vor weiteren Eingriffen in die Bausubstanz bewahrt und unter Denkmalschutz gestellt werden. Der nutzungsökonomische Druck, der heute auf den Gebäuden lastet, ist spürbar. Hier soll ein Beitrag zur Konservierung aufzeigen, dass mit diesem grossartigen


tion, d’usure et de maintenance qui pèsent actuellement sur le bâtiment ne peuvent plus être ignorées. L’article consacré à la conservation de l’édifice montre la nécessité d’entretenir cet extraordinaire héritage avec soin et de le protéger dans sa totalité. Sauver les apparences ne suffit pas ! L’université Miséricorde n’est pas seulement le témoignage de visions architecturales du passé; l’édifice est aussi porteur de thèmes qui animent le débat actuel sur l’architecture. D’abord, celui de la structure en tant que moyen d’expression architectonique. Après des décennies de façades planes, la façade profilée revient en force. Les architectes parlent à nouveau ouvertement et sans complexes de structures et de proportions, de socles et de corniches, de listels et de bandeaux, sans prétendre renouveler ou poursuivre une quelconque tradition. Le choix entre façade lisse et façade structurée ne relève plus d’un courant de pensée, mais de la perception de l’espace et de sa forme. Ensuite, celui du matériau. L’architecture de Miséricorde serait impensable sans sa spécificité matérielle: l’usage du béton armé en tant qu’élément structurant et le traitement des surfaces en béton apparent. Au prix de milliers d’heures de travail, le béton de tous les éléments de construction, du socle à la corniche et jusqu’au dernier petit recoin de l’édifice, a été bouchardé et ciselé. Même à l’intérieur des bâtiments, le béton de toutes les surfaces a été traité comme s’il s’agissait de pierre naturelle, une matière au demeurant totalement absente à Miséricorde. Paradoxalement, pourrait-on dire, c’est le béton qui fait le génie du lieu, un lieu qui fait la fierté des Fribourgeois. Les publications des forums d’architecture sont autant d’occasions de porter à l’attention du public des sujets et objets méconnus ou guettés par l’oubli, voire de leur conférer une notoriété nouvelle. Le Forum d’Architecture Fribourg (FAF) fête ses dix ans. Après 60 conférences, deux expositions et de nombreuses discussions-apéros, toutes manifestations qui ont connu un beau succès, ce livre est sa première publication sur la culture architecturale fribourgeoise. Traduction: Clara Wubbe


Erbe auch weiterhin sorgsam umgegangen werden muss und es sicher mehr als nur ein Fassadenbild zu schützen gilt. Doch die Miséricorde ist nicht nur Vergangenheit; sie gibt auch Hinweise zu Themen, welche die aktuelle Architekturdiskussion anregen. Zum einen die wiederentdeckte Auseinandersetzung mit der Struktur als gestalterisches Ausdruckmittel: Nach einer längeren Zeit mit flächenbündigen Fassaden rückt diese erneut ins Bewusstsein. Architekten denken wieder laut und unverkrampft über Struktur, Proportion, Sockel, Kranzgesimse und Zierleisten nach, ohne sich dabei irgendeiner Tradition anzubiedern. Die Konfrontation und die Wahl zwischen strukturierter oder flächiger Fassade ist nicht mehr nur in einer ideologisch motivierten Denkweise verhaftet, sondern korreliert vielmehr mit einem Gefühl für den Raum und dessen Gestalt. Zum anderen ist da das Material: Die Architektur der Miséricorde wäre undenkbar ohne ihre materielle Eigenart – den Stahlbeton als strukturierendes Element und die Fülle an bearbeiteten Sichtbetonflächen. In Tausenden von Arbeitsstunden wurde vom Sockel bis zum Dachgesims und bis in die letzte Ecke eines jeden Bauteils mit dem Stockhammer gestockt und mit dem Scharriereisen scharriert. Selbst im Gebäudeinneren wurden sämtliche Betonoberflächen (Abb.1) bearbeitet, als handle es sich um eine Natursteinfassade – doch es wurde in der Tat keine einzige Natursteinplatte verbaut. Es gibt nicht viele Bauwerke in Stahlbeton, die eine so grosse Akzeptanz in der Bevölkerung geniessen. Paradoxerweise ist es gerade das Material Beton, das hier den genius loci ausmacht. Publikationen von Architekturforen bieten die Chance, Themen aufzugreifen, die sonst leicht in Vergessenheit geraten, schliesslich aber als wertvolle Beiträge auf Interesse stossen. Mit diesem Buch feiert das Freiburger Architekturforum (FAF) sein zehnjähriges Bestehen. Nach sechzig Vorträgen, zwei Ausstellungen und zahlreichen Apéros, die immer gut besucht waren, ist das Buch ein erster gedruckter Beitrag zur Freiburger Baukultur.

1. Travail manuel de la texture sur un pilier en béton de l'entrée principale. Manuelle Betonbearbeitung an einer Stütze beim Haupteingang. Img. / Bild: Jacques Thevoz , env. / ca. 1940 © Service des biens culturels Fribourg. Fonds Recensement des biens culturels Fribourg.



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Mises en scène photographiques de l’université Miséricorde Fotografische Inszenierungen der Universität Miséricorde Verena Huber Nievergelt

Des contrastes affirmés, des compositions précises, des perspectives variées et des séquences quasi filmiques – telles sont les caractéristiques des photographies prises par Hugo Paul Herdeg des bâtiments universitaires de Fribourg réalisés par l’architecte Denis Honegger. Les premières images de la série photographique parue dans le fascicule (fig. 1) publiée à l’occasion de l’inauguration de l’édifice en 1941 et dans la revue suisse d’architecture Das Werk (fig. 2) proposent à la fois un aperçu riche en informations et une mise en regard plaisante de formes végétales et architecturales. L’élément humain y est également présent : sur la toute première photo, on voit passer deux religieux, accompagnés, dans la publication inaugurale, d’une silhouette d’ange (montage). Suivent en alternance des vues intérieures et extérieures, des gros plans et des cadrages plus larges. Quelques prises de vue diagonales confèrent aux bâtiments un caractère dynamique et celles des terrasses, qui laissent beaucoup de place au ciel, donnent une impression de vastitude. Si les photographies de Herdeg ont pour but de documenter les nouveaux bâtiments, elles fonctionnent aussi – du moins pour certaines – comme images autonomes. Elles procèdent de la mise en scène délibérément esthétisante de l’architecture, qui caractérisait la photographie moderne de l’entre-deux-guerres. Il n’était pas rare à l’époque 1. Fascicule de 1941, p. 50 Festschrift von 1941, S. 50

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Markante Kontraste, präzise Bildkompositionen, variantenreiche Perspektiven und filmisch anmutende Bildfolgen prägen Hugo Paul Herdegs Aufnahmen von Denis Honeggers Universitätsbauten in Freiburg aus dem Jahr 1941: Die ersten Bilder der Fotostrecke in der Festschrift zur Eröffnung (Abb. 1) und in der Schweizer Architekturzeitschrift Das Werk (Abb. 2) bieten sowohl eine informative Übersicht als auch eine optisch reizvolle Gegenüberstellung von Baumformen und architektonischen Formen. Beiläufig werden zudem zwei vorbeispazierende katholische Geistliche ins Bild gefasst – ihnen wird in der Festschrift zusätzlich die einmontierte Silhouette eines Engels beigesellt. Danach wechseln sich Innen- und Aussenaufnahmen, Details und weiter gefasste Ansichten ab. Einige Fotografien sind von Bilddiagonalen geprägt, die den Gebäuden einen dynamischen Charakter verleihen. Die Aufnahmen der Terrassen räumen zudem dem Himmel viel Platz ein und suggerieren Grosszügigkeit und Weite. Herdegs Fotografien dienten nicht allein der Dokumentation und Bestandsaufnahme der Neubauten, sondern funktionierten – zumindest zum Teil – auch als eigenständige Bilder. Sie künden von einer bewusst ästhetisierenden Bildinszenierung von Architektur in der modernen Fotografie der Zwischenkriegszeit, wo nicht selten eine enge 2. Das Werk, 1942 Nr. 2/3, p. / S. 33

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qu’architectes et photographes engagent d’étroites collaborations, dont pouvaient résulter des mises en image en parfaite adéquation avec les bâtiments qui en faisaient l’objet. Ce fut précisément le cas de Herdeg et de Honegger, qui s’étaient rencontrés à Paris au milieu des années 1930. Herdeg avait développé son propre style photographique, qu’il ne cessa de perfectionner jusqu’à son décès prématuré en 1953. Le mandat relatif à l’université de Fribourg fut son travail le plus important dans le domaine de la photographie d’architecture, travail qui lui permit de faire montre de son talent en très bonne place. Seule la publication de la série dans la revue DU, proposition émise par Honegger, ne se concrétisa pas ; on considérait alors que les photographies d’architecture n’avaient pas leur place dans une revue d’art. Aujourd’hui, les frontières entre photographie d’auteur, d’art et d’architecture sont devenues plus perméables. Les prises de vues actuelles de l’université Miséricorde présentent une singularité et un pouvoir évocateur plus affirmés que cela n’était courant et possible dans le cadre du mandat confié à Herdeg, et de la photographie de l’époque. Dans les photographies expressives en noir et blanc d’Yves Eigenmann, des flous de mouvement viennent contrarier les lignes claires des bâtiments ; se focalisant sur des détails, Heinrich Helfenstein esquisse dans des tons chauds de poétiques jeux de lumière ; et Primula Bosshard met en évidence le décalage temporel entre la modernité des équipement techniques – photocopieuses, imprimantes, horloges numériques et projecteurs – et la solennité des lieux. On note cependant aussi des similitudes entre les clichés de Herdeg et les travaux actuels. A commencer par la confrontation entre univers végétal et architectural, qui se retrouve dans les photographies de Jérôme Humbert et qui s’enrichit d’un travail sur la couleur. De même, les auditoires en encorbellement et les éléments géométriques modulaires qui rythment le complexe demeurent des motifs prisés. Les photos de Dominique Marc Wehrli sont sans doute celles qui se rapprochent le plus de celles de Herdeg, tout en étant résolument contemporaines. Si ses photos noir-blanc, caractérisées par la richesse des contrastes et la clarté de la composition, ne sont pas sans rappeler celles des années 1940, l’inclusion d’éléments tels qu’un pan de mur effrité couvert de graffiti révèle une évolution radicale des manières de voir – évolution qui permet aujourd’hui d’intégrer des situations déconcertantes ou décalées dans la photographie d’architecture. Traduction : Richard Squire

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Verena Huber Nievergelt Historienne de l’art, professeure de design et technique. Elle a écrit son travail de licence sur le photographe Hugo Paul Herdeg et sa thèse de doctorat sur des photographies de l’urbanisation de la Suisse des années 1960. Elle enseigne depuis 2012 à la haute école pédagogique de Berne. Verena Huber Nievergelt Fotografie- und Kunsthistorikerin sowie Dozentin für Design und Technik. Sie hat ihre Lizenziatsarbeit zu Hugo Paul Herdeg verfasst und über Fotografien der urbanisierten Schweiz seit den 1960er Jahren promoviert. Seit 2012 lehrt sie an der Pädagogischen Hochschule Bern.

Zusammenarbeit von Architekt und Fotograf stattfand, aus der sich kongeniale Umsetzungen von Bauten in Bilder entwickeln konnten. Dies war auch bei Herdeg und Honegger der Fall, die sich Mitte der Dreissigerjahre in Paris kennengelernt hatten. Herdeg hatte einen eigenen fotografischen Stil entwickelt, den er in seiner späteren Laufbahn bis zu seinem frühen Tod 1953 weiter perfektionierte. Honeggers Bau der Universität Freiburg stellte Herdegs grössten und bedeutendsten Auftrag im Bereich der Architekturfotografie in der Schweiz dar, der es ihm ermöglichte, seine fotografischen Stärken an prominenter Stelle auszuspielen. Einzig eine von Honegger angeregte Publikation in der Zeitschrift Du kam nicht zustande, da die Architekturaufnahmen nicht über die Anbindung an einen architektonischen Kontext hinausgelangten. Heute sind die Grenzen zwischen Autoren-, Kunst- und Architekturfotografie fliessender geworden. Die aktuellen Aufnahmen der Universitätsbauten zeigen stärker und bewusster individualisierte und bildhafte Perspektiven, als es im Rahmen von Herdegs Auftrag und der damaligen zeitgenössischen Fotografie üblich und möglich gewesen war. Die stimmungsvollen schwarzweissen Aufnahmen von Yves Eigenmann etwa konterkarieren die festen Linien der Bauten mit Bewegungsunschärfen; Heinrich Helfenstein skizziert in seinen atmosphärisch dichten Detailansichten poetische Lichtspiele in warmen Farbtönen und Primula Bosshard dokumentiert in ihren Bildern den zeitlichen Kontrast zwischen modernen technischen Gerätschaften wie Fotokopierern, Druckern, Digitaluhren und Scheinwerfern gegenüber dem altehrwürdigen, sakralen Charakter der Bauten. Es zeigen sich aber auch Anknüpfungspunkte zwischen Herdegs Aufnahmen und aktuellen Arbeiten: Das Interesse an der Gegenüberstellung von Pflanzenwelt und architektonischer Formensprache wird in Jérôme Humberts Aufnahmen wieder aufgegriffen und um den Aspekt der Farbigkeit erweitert. Fotografisch interessant bleiben ausserdem die auffallende Form der auskragenden Elemente des Hörsaals und die wiederholt auftretenden, modularen geometrischen Elemente. Am engsten verwandt mit Herdeg und zugleich symbolhaft für die Andersartigkeit heutiger fotografischer Zugänge sind wohl die Aufnahmen von Dominique Marc Wehrli: Die kompositorisch klare, kontrastreiche Fotografie in Schwarzweiss ist jener aus den Vierzigerjahren nicht unähnlich, aber der Einbezug von Situationen wie einer mit Graffiti bemalten, bröckelnden Mauer unter den fotogen auskragenden Hörsälen machen eine entscheidende Veränderung in der Sichtweise deutlich, die es heute erlaubt, auch Irritationen und widersprüchliche Kontexte in die Architekturfotografie hineinzunehmen.

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Um einen direkten Bezug zur Betonbauweise von 1930 bis in die Siebzigerjahre herzustellen, wird in diesem Aufsatz bewusst der damals gebräuchliche Begriff «Eisenbeton» verwendet, der auch Sinnbild ist für eine Ingenieurmethodik, die auf eine sparsame und wirtschaftliche Verwendung der Baustoffe Stahl und Beton sowie auf einem pionierhaften Umgang mit der neuartigen Betonbauweise basierte. Seit den Siebzigerjahren ist der Begriff «Stahlbeton» gebräuchlich.

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Dr Humm/Henri Gicot/Beda Hefti/Alexandre Sarrasin, Jean Barras, «Le béton armé», in: Les nouveaux bâtiments de l’Université de Fribourg, 1941.

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Ebd., S. 52.

Die Universität Miséricorde ist ein eigensinniges Gebäude, das in seiner ambivalenten Erscheinung zwischen Tradition und Moderne gleichermassen irritiert wie fasziniert. Es entstand zwischen 1939 und 1941 unter schwierigen Bedingungen, während Europa vom Krieg erschüttert wurde und die Schweiz von wirtschaftlichen, ideologischen und sozialen Krisen geprägt war. Die Architektur versucht sich in der Balance zwischen einer klassizistischen Tektonik und einer modernen Volumetrie. Die Ambivalenz dieses Vorhabens drückt sich nicht nur in der Erscheinung der Gesamtanlage, sondern auch in den einzelnen Bauteilen, Räumen und Formen und sogar in der technischen Ausführung und der Ausstattung aus. Der junge Architekt Denis Honegger, der für den Entwurf verantwortlich zeichnete und sich mit Leidenschaft bis in die kleinsten Details um die Ausführung kümmerte, war sich dieser Ambivalenz durchaus bewusst. Er liess die architektonischen Grundsätze seiner beiden Lehrmeister, des Klassizisten Auguste Perret und des Avantgardisten Le Corbusier, einfliessen und wagte damit einen schwierigen Spagat. Es war eine herausragende Leistung, ihre beiden entschieden konträren Konzepte in eine originäre Synthese zu giessen und daraus eine eigenständige Haltung zu gewinnen. Für den Kritiker Peter Meyer war die Miséricorde Lehrbeispiel eines neuen Trends zur Mässigung und ein Anlass zur vertieften Auseinandersetzung mit der Frage der Monumentalität in der Moderne. Peter Meyer, der renommierte Beobachter der zeitgenössischen Architektur der Schweiz, hat 1942 den Neubauten der Universität Miséricorde eine Doppelnummer der Zeitschrift Das Werk1 gewidmet und damit einem einzelnen Gebäudekomplex eine erstaunliche Aufmerksamkeit geschenkt. Im Aufsatz «Die Neubauten der Universität Fribourg im Rahmen der Architekturentwicklung»2 hat er sie mit Auguste Perret und Le Corbusier in Verbindung gebracht, die damals international zu den einflussreichsten Architekten zählten. «Das Werk der Architekten Dumas und Honegger bekennt sich zum Schulzusammenhang mit Auguste Perret. Wenn es auf der einen Seite vielleicht nicht in allen Teilen die abgeklärte Reife der Perretschen Bauten erreicht – und infolge der Kompliziertheit des Bauprogramms wohl auch nicht erreicht hätte, wenn es von Perret selbst gebaut wäre – so versucht es andererseits noch mehr ausgesprochen funktionelle Formelemente in die Komposition einzubauen, wie sie vor allem im anderen Lager der Modernität entwickelt worden sind, das man mit dem Namen Le Corbusier bezeichnen kann, ohne dass dieser damit als der einzige Urheber dieser Formenwelt hingestellt sein soll. Dass der kühne und grosszügige Versuch, die beiden wichtigsten Zweige der Modernität zu einer Synthese zusammenzuspannen, nicht ganz ohne einige Härten ablaufen konnte, versteht sich von selbst und vermindert das Verdienstliche des Unternehmens nicht».3 Meyer hat es tunlichst vermieden, 209



Yves Eigenmann

Né en 1954 à Berne, grandit à Berne puis Fribourg. Formation de dessinateur en architecture et de photographe. Etabli à Montréal entre 1979 et 1990, il travaille comme photographe indépendant pour Poly Photo et le CCA (Centre Canadien d’Architecture). De retour en Suisse, il partage un atelier avec Primula Bossard à Fribourg de 1993 à 2012. Collabore régulièrement avec des architectes, des graphistes et des musées pour la réalisation de publications sur l’architecture. Vit et travaille à Fribourg. 1954 geboren in Bern, aufgewachsen in Bern und später in Freiburg. Ausbildung als Hochbauzeichner und Fotograf. 1979 bis 1990, lebt und arbeitet er als unabhängiger Fotograf für Poly Photo und das CCA (Canadian Centre for
 Architecture) in Montréal. Nach der Rückkehr in die Schweiz von 1993 bis 2012 Ateliergemeinschaft zusammen mit Primula Bosshard in Freiburg. Regelmässige Zusammenarbeit mit Architekten, Grafikern und Museen für Architekturpublikationen. Lebt und arbeitet in Freiburg.

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Denis Honegger, le grand écart entre ses maîtres La filiation avec Perret et le Corbusier est en effet évidente. La biographie de Denis Honegger, le véritable auteur de l’université de Miséricorde5, est liée à celles de ces deux architectes depuis le milieu des années 1920.6 En 1926-1927, il fait un stage, de six mois probablement, à l’atelier de Le Corbusier et de Pierre Jeanneret à Paris. À cette époque, l’atelier planche sur des projets de villas et sur un concours pour le Palais des Nations à Genève. Une esquisse de Honegger pour ce grand concours international est conservée. L’architecte s’est aussi penché sur les écrits théoriques de son maître d’apprentissage.7 Et sans doute a-t-il, depuis 1925 déjà, fréquenté sporadiquement l’Atelier du Palais de Bois, la classe privée d’architecture de Perret, tout en travaillant à l’atelier des frères Auguste, Claude et Gustave Perret. De 1928 à 1933, il est leur chef d’agence, travaille à divers projets de concours et dirige plusieurs chantiers. C’est dire que le répertoire constructif et architectonique des Perret n’avait pas de secret pour lui. Les idées fondamentales de ses deux maîtres ont laissé des traces dans les projets de Honegger. En 1927 et 1928, il dessine les plans de trois maisons d’habitation dont l’une surtout, la double maison-atelier pour Jean Arp et Sophie Täuber Arp et pour Nelly et Theo von Doesburg (elle ne sera pas construite), est proche du langage architectural de Le Corbusier : un cube simple et compact avec deux petits logements en duplex organisés sur un plan libre et dotés de fenêtres-bandeaux, de toits-jardins et d’escaliers en colimaçon.8 La ressemblance avec les villas de Le Corbusier et de Pierre Jeanneret est manifeste. Bien que Denis Honegger travaille déjà pour Perret à l’époque, il semble voir son avenir en tant qu’architecte dans l’avant-garde moderne. Ainsi, il collabore avec ses illustres clients modernistes, les Arp et les von Doesburg, au projet du dancing «L’Aubette» à Strasbourg. C’est en 1931 seulement qu’il réalise un projet inspiré directement des principes d’Auguste Perret. Le projet de concours pour un théâtre populaire à Charkov, en Ukraine, que Honegger a élaboré avec Oscar Nitzchké, un autre disciple de Perret, montre une construction squelette. Cependant, aux éléments classicistes se mêlent des éléments avant-gardistes. Alors que les socles et les corniches sont très accusées, comme chez Perret, les verticales sont peu marquées. Par ailleurs, on reconnaît des fenêtres en angle dans la partie du socle ainsi que des fenêtres en bandeau sur les façades latérales, ce que le maître aurait dénoncé avec véhémence. L’apparentement avec le constructivisme russe est évident. Dans son texte pour la publication inaugurale des nouveaux bâtiments universitaires de Fribourg (1941), Honegger ne parle pas de la filiation mentionnée par Peter Meyer, mais il entreprend de présenter ses idées théoriques dans un exposé qu’il tient l’année suivante à Zurich et qui est publié dans le numéro de la revue Das Werk consacré à la présentation des bâtiments universitaires.9 Il y évoque Auguste Perret comme «notre maître», alors qu’il ne mentionne pas Le Corbusier, signifiant par là qu’il ne lui attribue aucune influence directe sur l’architecture de Miséricorde. Les raisons n’en sont pas connues, mais apparemment Honegger n’a pas jugé opportun de publier son lien avec une mouvance avant-gardiste encore décriée. «Le Corbusier, c’est l’aventure, Perret, le sens de la réalité», aurait-il dit en aparté.10 Honegger était conscient de la difficulté de faire la synthèse entre les principes de ses maîtres. Il connaissait la relation tendue entre les deux architectes. En 1908 et 1909, Le Corbusier avait travaillé comme dessinateur dans l’atelier d’Auguste Perret, 210

Fig. / Bild 2 : Projet de concours pour le Théâtre du Peuple à Charkov/Ukraine, avec Oscar Nitzchké, 1931. Wettbewerb für das Volkstheater in Charkow/Ukraine, mit Oscar Nitzchké, 1931.

Fig. / Bild 3 : A gauche, maison-atelier double pour Hans Arp et Sophie Täuber et Nelly et Theo van Doesburg, prévue à Clamart près de Paris, projet 1927. Doppelwohnhaus für Hans Arp und Sophie Täuber sowie Nelly und Theo van Doesburg, vorgesehen in Clamart bei Paris, Entwurf 1927.


Fig. / Bild 1 : Vue d’ensemble / esquisse. Gesamtansicht der Universitätsbauten im Quartier Miséricorde.

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Honegger et Dumas ont toujours été mentionnés comme les deux auteurs du projets, et ils ont signé ensemble le texte de la publication inaugurale. Cependant, ils n’ont été associés que pour la réalisation. Dumas a lui-même certifié que son partenaire était l’unique auteur de l’Université Miséricorde, dans une lettre datée du 8 janvier 1951. Voir Archives Marc-Henri Honegger, copie dans les archives de l’auteur.

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Voir la biographie de Denis Honegger

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Honegger a réalisé des esquisses d’après des photos tirées de Vers une architecture. In: Denis Honegger. Editions du Patrimoine, Paris 2010. S. 4.DAF/Cité de l’architecture et du patrimoine/ Archives d’architecture du XXe siècle.

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Voir note 7, p. 4. On remarquera le plan en bandes très étroites. Le Corbusier se servira de telles proportions plus tard, pour l’Unité d’habitation à Marseille.

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Honegger Denis. Quelques remarques à propos d’architecture. Das Werk, no 29, double cahier février/mars 1942, p. 39-46. Propos de Marie-Thérèse Honegger, l’épouse de Denis Honegger, lors d’un entretien avec l’auteur.

10

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et les deux hommes entretenaient des relations de maître à élève tout à fait amicales. Mais à partir des années 1920, ils se distancient progressivement l’un de l’autre, distance qui se mue en antagonisme. Ils en viennent bientôt à représenter des opinions opposées sur l’importance de la structure pour l’aspect visuel de l’architecture. Pour Perret, la construction en béton armé est l’élément clé du bâtiment, qui détermine aussi son esthétique. Il a peu de compréhension pour l’accentuation de la forme du bâtiment, telle que la défendent Le Corbusier et l’avant-garde moderne: «On cherche des formes, de nouvelles formes. C’est une erreur : le nouveau ne doit pas être une recherche mais un résultat. Le nu de beaucoup de façades récemment construites est trop une recherche et pas assez le résultat des mesures prises pour exprimer la destination de l’édifice, et le défendre contre les intempéries. La corniche, le chambranle, le bandeau, etc., ne sont pas de vains ornements, ce sont des organes qui font que l’aspect reste, contre vents et pluie, ce que l’architecte a voulu qu’il soit. L’emploi de matériaux apparents conduirait l’architecte à des solutions saines et durables. (...) Si la structure n’est pas digne de rester apparente, l’architecte a mal rempli sa mission.»11 Pour Perret, la construction, ses différents éléments et le matériau doivent donner à voir une unité. Les piliers, les bandeaux et les corniches en béton apparent qui structurent les façades sont les résultats contraignants de la construction qu’ils reflètent. Il concevait toujours des corniches bien profilées afin de délimiter clairement le passage de la partie façade à la partie toit. Ces éléments étaient porteurs et avaient une fonction d’articulation. Les ôter de la façade pour en faire des volumes architectoniques per se était un non sens pour lui. De son côté, Le Corbusier s’exprime sur l’architecture de son ancien maître et sa prétention d’innover dans la revue Architecture d’aujourd’hui (1927) : «Perret n’est pas du tout un révolutionnaire, c’est un continuateur. (...) Et dès lors, voici le paradoxe: Auguste Perret se divise en deux hommes : le constructeur (dans le sens le plus élevé, le plus digne) et l’architecte dans le sens qui n’est pas celui des temps modernes.»12 Pour Le Corbusier, la construction en béton armé diffusée par Perret est certes d’une grande importance, mais plutôt comme élément auxiliaire, permettant la libre disposition des fonctions dans l’espace. Il ne veut pas de poutres ni de piliers apparents sur les façades. Ou alors sous forme de pilotis libres, pour marquer la transparence et la structure spatiale. La controverse « architecture squelette» et «architecture compacte» peut se résumer en ces deux affirmations contraires : «L’architecture est l’art d’organiser l’espace. C’est par la construction qu’il s’exprime», selon Perret13, et «L’architecture est le jeu savant, correct et magnifique des volumes sous la lumière», selon Le Corbusier.14 Évoquant la prédilection de Perret pour la corniche, Le Corbusier avait en 1927, dans Architecture vivante, ajouté à ses cinq points sur la nouvelle architecture – le toit-jardin, la maison sur pilotis, la fenêtre en longueur, le plan libre et la façade libre – un sixième point : la suppression de la corniche. Son commentaire : «(...) du point de vue esthétique, admettre que la corniche doive être supprimée, c’est apporter un élément capital à la rédaction d’un code nouveau de l’architecture».15 Perret de son côté fustige la fenêtre-bandeau de Le Corbusier et encense la fenêtre en hauteur. 16 En 1935, dans l’Encyclopédie française, il va jusqu’à établir un lien entre la fenêtre horizontale et la mort : «En outre, la fenêtre verticale encadre l’homme, elle est d’accord avec la silhouette ; et si nous évoquons la signification éternelle et universelle de certaines lignes, alors que la ligne horizontale est la ligne du repos et de la mort, la ligne verticale est celle de la station debout, c’est la ligne de la vie.»17

212

Cité d’après Pierre Vago, in: L’architecture d’aujourd’hui, octobre 1932, Perret, p. 17. Perret n’a guère écrit avant les années 1930, mais s’est exprimé d’autant plus souvent dans des interviews pour des revues.

11

Le Corbusier, in: L’architecture d’aujourd’hui, Perret, Oktober 1932, S. 8f.

12

«Auguste Perret. Contribution à une Théorie de l’Architecture», erstmals publiziert in: Werk Nr. 2, 1947, S. 54.

13

Le Corbusier [1923], Vers une architecture, Paris 1924, S. 35.

14

In: L’Architecture vivante, Ausgabe Herbst/ Winter 1927, S. 25. Vgl. Jacques Lucan, Composition, non-composition, Lausanne 2010, S. 320ff. Die polemische Anspielung erfolgte in der Hauszeitschrift von Perret, der einer der Gründer von Architecture vivante war.

15

Zur Polemik gegen das Bandfenster vgl. Christian Freigang, „Auguste Perret, die Architekturdebatte und die ‚Konservative Revolution’ in Frankreich 1900-1930, Deutscher Kunstverlag München Berlin 2003, S. 289ff.

16

Encyclopédie française, November 1935. Zitiert nach: Auguste Perret, «Anthologie des écrits, conférences et entretiens», in: Christophe Laurent/Guy Lambert/Joseph Abram (Hrsg.), Le Moniteur, Paris 2006, S. 277.

17

Fig. / Bild 4 : Le Corbusier, maison de la Weissenhofsiedlung, Stuttgart, 1927. Le Corbusier und Pierre Jeanneret, Haus der Weißenhofsiedlung, Stuttgart, 1927.


4

Ebd., S. 33.

5

Zwar wurden Honegger und Dumas stets gemeinsam als Urheber des Projekts genannt und sie haben auch den Text der Einweihungsschrift gemeinsam unterzeichnet. Allerdings waren sie nur für die Bauausführung assoziiert. Dumas selbst hat seinem Partner in einem späteren Brief, datiert vom 8. Januar 1951, die alleinige Autorschaft der Universität Miséricorde bescheinigt. Vgl. Archiv Marc-Henri Honegger, Kopie im Archiv des Autors.

6

Vgl. Biografie von Denis Honegger, S.

7

Honegger fertigte Skizzen nach Fotos aus Vers une architecture an. In: Denis Honegger, Editions du Patrimoine, Paris 2010, S. 4. DAF/ Cité de l’architecture et du patrimoine/Archives d’architecture du XXe siècle.

8

Bemerkenswert ist der Grundriss von sehr schmalen Streifen. Le Corbusier hat mit solchen Proportionen im Grundriss erst bei der Unité d’habitation in Marseille gearbeitet.

9

Denis Honegger, «Quelques remarques à propos d’architecture», Das Werk Nr. 2/3, 1942, S. 39–46.

den Lesern eine detaillierte Analyse der neuen Universitätsbauten zu bieten und den behaupteten «Schulzusammenhang» eingehend zu erläutern. Stattdessen hat er sie für seine eigene Theorie zum «Problem der Monumentalarchitektur» vereinnahmt, «zu dem diese Universitätsbauten einen so wichtigen Beitrag bilden».4 Die Debatte zur Monumentalarchitektur soll später erörtert werden. Denis Honegger im Spagat zwischen seinen «Maîtres» Der «Schulzusammenhang» war tatsächlich naheliegend, da Denis Honegger, der eigentliche Urheber des Gebäudes,5 seit Mitte der Zwanzigerjahre biografisch mit den beiden Architekten verbunden war.6 1926/1927 weilte er für ein Praktikum von vermutlich sechs Monaten im Atelier von Le Corbusier und Pierre Jeanneret in Paris. In dieser Zeit wurde an Projekten für Villen und am Wettbewerbsprojekt für den Völkerbundpalast in Genf gearbeitet. Eine Planskizze Honeggers für diesen grossen internationalen Wettbewerb ist erhalten geblieben. Er beschäftigte sich auch mit den theoretischen Schriften des Lehrmeisters.7 Auguste Perret war als Bezug noch bedeutender. Vermutlich besuchte er bereits seit 1925 sporadisch die Kurse in dessen Atelier du Palais de Bois und arbeitete gleichzeitig im Atelier der Brüder Auguste, Claude und Gustave Perret. 1928 bis 1933 war er ihr Chef d’agence, bearbeitete Wettbewerbsentwürfe und leitete mehrere Baustellen. Das konstruktive und architektonische Repertoire kannte er folglich bis in die kleinsten Details. Die Grundprinzipien beider «Maîtres» haben in jenen Jahren deutliche Spuren in den Entwürfen von Honegger hinterlassen. 1927 und 1928 entwarf er drei avantgardistische Wohnhäuser, wobei er vor allem beim Projekt eines Doppelhauses für Jean Arp und Sophie Taeuber-Arp sowie für Nelly und Theo van Doesburg die architektonische Syntax Le Corbusiers aufnahm. Für das nicht realisierte Haus sah er einen geometrisch einfachen und kompakten Baukubus mit äusserst schmalen Duplexwohnungen vor, der mit einem freien Grundriss organisiert und mit Bandfenstern, Flachdach, Dachgarten und Wendeltreppen ausgestattet war.8 Die Nähe zu den Villen von Le Corbusier und Pierre Jeanneret ist offensichtlich. Obwohl Honegger in dieser Zeit bereits für Perret arbeitete, sah er offenbar seine Entwicklung als Architekt innerhalb der modernen Avantgarde. Seine illustre Kundschaft, mit der er zur gleichen Zeit an der Gestaltung des Dancing L’Aubette in Strassburg arbeitete, ist ein klarer Hinweis dafür. Erst 1931 ist nachweislich ein Entwurf entstanden, der sich nach einigen Grundprinzipien von Auguste Perret richtete. Das Wettbewerbsprojekt für ein Volkstheater im ukrainischen Charkow, das Honegger zusammen mit Oscar Nitzchké – einem weiteren Perret-Schüler – ausarbeitete, zeigt einen Skelettbau. Die Haltung schwankte allerdings ambivalent zwischen klassizistischen und avantgardistischen Elementen. Während der Sockel und das Dachgesims wie bei Perret markant betont sind, treten die vertikalen Strukturelemente kaum in Erscheinung. Stattdessen sind im Sockel Eckfenster und in einigen Fassaden Bandfenster zu erkennen, die der Meister vehement abgelehnt hätte. Die Annäherung an die Strukturbauten des russischen Konstruktivismus ist offensichtlich.

Fig. / Bild 5 : Auguste Perret, services techniques des constructions navales, Paris, 1928-31.

In seinem Text der Einweihungsschrift von 1941 hat Honegger sich nicht mit dem von Peter Meyer erwähnten «Schulzusammenhang» befasst. Er hat aber den Versuch einer theoretischen Erörterung in einem Vortrag unternommen, den er im folgenden Jahr in Zürich hielt und der begleitend zur Präsentation der Universitätsgebäude im Das Werk abgedruckt wurde.9 Dort hat er Auguste Perret als «notre maître» zitiert, während er Le Corbusier unerwähnt liess und ihm damit keinen unmittelbaren Einfluss auf die 213


La théorie de Denis Honegger dans la tradition du rationalisme classiciste C’est seulement après l’inauguration de Miséricorde en 1942 que Denis Honegger expliquera sa vision de l’architecture dans un exposé tenu à Zurich et publié dans la revue Das Werk.18 Il s’y réclame explicitement de Perret. Au début de son exposé, il définit l’architecture de manière lapidaire comme «l’art de construire des édifices dans des proportions et selon des règles déterminées par la destination de ces édifices, les matériaux employés et le milieu».19 En tant que part d’industrie, elle doit répondre à un besoin, en tant que part de science, elle doit permettre la réalisation d’une idée, et en tant que part d’art, elle doit créer de la beauté. L’architecture doit en outre obéir à des règles et des principes. Il cite le philosophe catholique Jacques Maritain, qui fait alors autorité dans les milieux catholiques francophones : «Tout l’élément formel de l’art consiste dans la régularisation qu’il imprime à la matière. De plus, il est l’essence de l’art, d’après les anciens, d’avoir des règles certaines.»20

Honegger Denis. Quelques remarques à propos d’architecture. Das Werk, no 29, février/mars 1942, p. 39-46.

18

Ibid., p. 42.

19

Jacques Maritain, Art et Scholastique, Art catholique, Paris 1920, p. 53. Honegger cite sans donner de no de page. Le philosophe catholique Maritain (1882-1973) a été un des représentants les plus en vue du thomisme au XXe siècle. Dans son œuvre de jeunesse, il attribue les principes de l’art à la scolastique du Moyen Âge.

20

Note 18, p. 41s.

21

Philibert de l’Orme (1510-1570), architecte français, a écrit sur les techniques de maçonnerie et la construction de voûtes. Voir Nouvelles Inventions pour bien bastir et à petits Fraiz (1561).

22

Honegger énumère cinq principes, dévoilant directement et indirectement certaines de ses sources théoriques :21 1. Le principe de la solidité exige qu’une œuvre soit bien construite (mise en œuvre des matériaux), avec les connaissances théoriques et techniques nécessaires pour construire un ouvrage solide. Il évoque Philibert de l’Orme 22, Andrea Palladio23 et finalement Auguste Perret dont il cite la phrase la plus célèbre : «L’architecture, c’est ce qui fait de belles ruines, l’œuvre bien construite vieillit bien.»24 2. Le principe de l’ornementation ou de la modénature veut que les éléments constructifs d’un édifice contribuent parallèlement à son aspect esthétique. L’architecte doit traduire les éléments architectoniques d’un bâtiments en ornements, afin d’éveiller l’émotion artistique. Comme Perret, il fustige certaines «écoles dites modernistes» qui veulent depuis quelques années bannir les bandeaux, les listels, les moulures et les corniches des façades. Et comme Perret, pour qui ce principe est fondamental, il prend à témoin Fénelon qui a dit que «l’architecture est l’art de tourner en ornements les parties constructives de l’édifice.25

Fig. / Bild 6 : Aula magna en construction, système des piliers. Grosse Aula im Bau, Stützenordnung

3. Le principe de la symétrie que Honegger voulait compris au sens large comme «l’équilibre de proportions et de rapports des volumes entre eux», la pondération des masses étant le résultat des proportions exactes des parties individuelles et de leur rapport avec le tout. Pour reprendre Perret : «En composition, il importe d’abord de mettre sa construction d’équerre avec le ciel.»26 Et de citer l’Acropole d’Athènes comme le plus bel exemple de symétrie et de pondération des masses : ses différentes composantes sont bien strictement symétriques, mais le complexe dans son ensemble ne l’est pas. Honegger fait allusion à la symétrie «pittoresque» ou «optique» défendue par Auguste Choisy (sans le nommer), à savoir l’équilibre entre la construction et le paysage dans lequel elle s’inscrit.27 Le Corbusier a lui aussi repris cette idée dans Vers une architecture.28 Honegger connaissait le livre de Choisy, comme le montrent des dessins d’après des illustrations de l’ouvrage, conservés dans ses archives.29 4. Le principe de l’harmonie ou de l’eurythmie «exige que l’unité la plus complète règne dans la composition, c’est-à-dire que l’ensemble des détails constituent un tout harmonieux.»30 Une unité qui, selon Honegger, n’est pas un principe rigide, mais est une source de richesse et de variété. Certes, elle demande une similitude des rapports 214

Fig. / Bild 7 : Façade de l’aile des séminaires. Fassade des Seminarflügels.


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