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Culture

Festival de la BD « Dessine-moi le Printemps arabe » S Le Festival international de la bande dessinée de Tétouan a fermé ses portes le e

26 mai dernier. Satisfecit général pour les organisateurs. Mais quel avenir pour le 9 art au Maroc ?

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essine-moi le Printemps arabe. » C’est sur ce thème évocateur que la septième édition du Festival international de la bande dessinée de Tétouan (FIBADET) a ouvert ses portes avec une résidence artistique, le 21 mai dernier. Les jeunes artistes arabes regroupés autour de deux dessinateurs, l’Espagnol Bartolomé Segui et le Français Jean-Luc Sala, ont tenté de coucher sur du papier des dessins se rapportant à la révolution des pays arabes. Il s’agissait entre autres de la liberté d’expression, de l’importance d’Internet, des dictatures, de l’usage des médias par les gouvernements, de l’armée et des martyrs, pour ne citer que ceux-là. Ainsi, chaque artiste choisit un thème et esquisse une image qui sera complétée par un autre artiste, lequel pourra développer la même thématique ou en aborder une autre. Une fois ce travail terminé, la BD, réalisée sous forme de dépliant, devrait être éditée et publiée, dévoilant à cette occasion le regard de ces jeunes dessinateurs sur leur époque. « Je suis surpris par l’enthousiasme de ces futurs bédéistes. J’espère qu’un actuel / Semaine du 2 au 8 juin 2012

jour nous pourrons faire un travail commun avec des artistes espagnols », déclare Bartolomé Segui pour qui cette rencontre a été très enrichissante. Le Printemps arabe est aussi artistique.

Une rencontre, un échange La résidence artistique s’est déroulée durant cinq jours (la manifestation s’est achevée le 26 mai) pendant la durée du festival, et les festivaliers ont eu droit à des vernissages thématiques, des visites, une rencontre avec l’artiste espagnol José Luis Agrega à l’Institut Cervantès, qui s’est dit satisfait d’échanger avec ces étudiants. « J’ai beaucoup aimé l’enthousiasme des étudiants marocains. Il faut le maintenir. » Ainsi, les étudiants de l’Institut national des Beaux-Arts de Tétouan (INBA), dirigé par Abdelkrim Ouazzani, ont pu faire montre de leur talent artistique en exposant des planches originales. Certaines ont été sélectionnées pour les concours prévus lors du FIBADET. La première place du grand prix « Jeunes talents, projet d’album » a été rempor-

tée par Omar Ennaciri qui verra son projet édité dans un avenir proche.

Richesse du continent Lancé en 2004, lors de l’ouverture du département consacré à la bande dessinée à l’INBA, le FIBADET est d’abord un espace d’encouragement pour les étudiants et lauréats de cet institut. D’ailleurs, le directeur Ab-

S La révolution des croqueurs Que se passe-t-il à l’Institut national des Beaux-Arts de Tétouan ? En marge du festival de la BD, des étudiants ont contacté actuel pour dénoncer un malaise qui dure depuis la première promotion de lauréats de cet institut. En effet, certains lauréats de l’INBA ont nourri le désir de poursuivre leurs études après leur quatrième année, d’autres ont voulu intégrer la fonction publique par le truchement de l’ENS. Hélas, leurs diplômes n’avaient pas d’équivalence. Ils montent donc au créneau avec, à l’appui, un dossier revendicatif exhaustif demandant un statut équivalent aux autres instituts de l’enseignement supérieur. Depuis le 28 mai, ils occupent la terrasse de l’Institut et ne veulent dialoguer qu’avec le ministre de la Culture. Le directeur de l’INBA, Abdelkrim Ouazzani, a tenté de les approcher, en vain. Selon le directeur de l’INBA, « les étudiants refusent le dialogue et demandent des choses surréalistes ». De leur côté, les étudiants estiment que leurs droits sont bafoués et réclament que justice soit faite.  n


© Ferdinand Demba /actuel

Culture / EXPOSITION

delkrim Ouazzani ne manque pas de le souligner : « Le FIBADET, c’est la rencontre entre des étudiants et des artistes expérimentés qui viennent partager leur savoir-faire. » Malgré une préparation difficile, le directeur est fier du travail de ses étudiants et salue au passage le rôle crucial joué par les artistes français et espagnols lors de cette manifestation artistique. Avec la participation des bédéistes tels

que Jérémie Nsingi (Tchoutchou/ RDC), Yannick Deubou (Bitchakala/ Cameroun), Max Obiang Nguéma (Alum Ndong Minko/Gabon), et Platini Lubunu (La médaille du Khramulahaja/RDC), le FIBADET garde les pieds sur le continent. Sans oublier la présence de JeanFrançois Chanson, bédéiste français établi au Maroc depuis une dizaine d’années, et auteur de plusieurs albums dont certains ont été traduits en darija et en tifinagh. Il n’y a pas de doute pour les organisateurs, le festival a été à la hauteur de leurs objectifs.

© DR

Quid de la BD au Maroc ? Mais peut-on faire abstraction de l’importance de la bande dessinée dans la société marocaine où l’image est prégnante ? Que nenni. Le neuvième art, considéré comme un support à part entière, a son rôle à jouer dans l’éveil des consciences au même titre que les médias classiques. Sa pénétration est d’autant plus importante qu’elle touche d’abord les plus jeunes. Or malgré le fait que le Maroc soit le premier pays du continent africain à proposer une filière BD, et qu’il abrite désormais trois festivals dédiés, la production ne suit pas.

José Luis Agrega, bédéiste espagnol, refile des tuyaux aux étudiants de l’INBA sur la réalisation d’une bonne planche.

Ce malaise connu de tous ne laisse pas indifférent mais aucune solution concrète n’a été proposée à ce jour. Et le FIBADET n’a pas évoqué le sujet. C’est à croire que les raisons sont irrémédiables. Pourtant, dans les couloirs, certaines indiscrétions laissent entendre que le véritable problème résiderait au niveau de l’écriture du scénario. Il y aurait une pénurie flagrante de bédéistes-scénaristes marocains. Cela expliquerait pourquoi la plupart des lauréats de l’INBA font carrière dans l’enseignement ou dans des agences de communication. C’est dire que la question de la compétence graphique est moins problématique que celle de l’écriture scénariste. La BD a certainement de beaux jours au Maroc. On pourrait voir émerger au moins cinq dessinateurs de talent par an. Pour cela, l’Etat et les responsables d’établissement devraient songer à renforcer la formation de ces futurs artistes en commençant par l’introduction d’un cours de scénario. Les étudiants gagneraient, aussi, à échanger régulièrement avec des bédéistes professionnels à l’instar de José Luis Agrega au FIBADET. D’autres pistes ? Ferdinand Demba actuel / Semaine du 2 au 8 juin 2012

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