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à la marge

1.3. Les « réfugiés-visiteurs », des populations structurellement à la marge

Les réfugiés venus d’autres pays arabes tels que les réfugiés syriens, irakiens, soudanais, yéménites et somaliens, ne sont pas considérés officiellement comme des réfugiés au même titre que les réfugiés palestiniens, mais plutôt comme des « invités » ou des « visiteurs » temporaires : une formule non juridique rappelant la tradition d’hospitalité arabe, mais qui ne garantit aucun droit de résidence ni de protection juridique. Le « titre » de réfugié peut leur être conféré à titre opérationnel sur la base d’un Protocole d’accord conclu en 1998 entre la Jordanie et le HCR dans un contexte alors marqué par la crise des réfugiés irakiens. Ledit Protocole confirme le principe de non-refoulement, de respect de la croyance religieuse ainsi que le droit à ester en justice et à recevoir une assistance légale. Il fixe aussi les paramètres d’une coopération en matière de protection et d'assistance aux réfugiés/demandeurs d'asile, donnant au HCR le soin exclusif de déterminer la qualité de réfugié22 .

Ce statut n’octroie aux réfugiés enregistrés aucun droit formel de résidence, fut-elle temporaire, ni l’accès à tous les services publics. Les seuls services publics facilement accessibles aux réfugiés enregistrés auprès du HCR sont l’enseignement primaire et secondaire gratuit23, ainsi qu’une aide médicale dont l’étendue a varié selon les différentes populations de réfugiés, mais qui a été fixée uniformément depuis 2019-2020 au niveau des indemnisations pratiquées pour les « Jordaniens non assurés », soit à hauteur de 40 à 50 % des dépenses pour les soins prodigués dans les établissements publics. Le marché du travail ne leur a été ouvert qu’à la marge, la législation jordanienne n’autorisant de manière générale l’emploi des étrangers qu’à condition qu’il supplée à un manque de qualifications ou de ressources humaines au sein de la main-d’œuvre jordanienne dans certains secteurs économiques et selon des quotas préétablis24. Mais parce que, contrairement aux travailleurs migrants venus en Jordanie dès le début des années 1970 afin de combler le manque de main-d’œuvre locale dans des secteurs peu attrayants comme l’agriculture, la construction, la restauration et les services domestiques, les réfugiés ont en général afflué sur le territoire national dans l’urgence, sans encadrement légal ; leur arrivée a généralement fait craindre une déstabilisation sociale et/ou politique du pays, poussant les autorités jordaniennes à limiter au maximum leur accès au marché du travail. L’aménagement nécessaire des conditions de résidence des « réfugiés-visiteurs » s’est ensuite développé de manière ad hoc, selon les risques et les opportunités relatifs à chaque population de réfugiés, et dans l’attente d’un retour au pays d’origine ou d’une réinstallation dans un pays tiers.

22 Durant une période ne devant pas en principe dépasser six mois, mais cette période a été renouvelée par le HCR, une pratique implicitement acceptée par la Jordanie. 23 Au même titre que les déplacés de Gaza, l’enseignement supérieur les considère comme des étudiants internationaux dont les frais d’inscription sont hors de portée pour la majeure partie d’entre eux. 24 Voir Code du travail jordanien, article 12, a et b.

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