OPINION
Dix règles incontournables pour réussir un programme d’accompagnement technique
P eter Hinton, Banquier conseil et chercheur associé à la Saïd Business School, Université d’Oxford Lynn Pikholz, Fondatrice et CEO, CapitalPlus Exchange
Quels sont les facteurs clés de succès d’un programme d’accompagnement technique ? Comment continuer à innover pour produire plus d’impact ? Éléments de réponse à partir de vingt entretiens menés auprès de bénéficiaires et de prestataires d’AT.
UN ARTICLE DE PETER HINTON Le parcours de Peter Hinton passe par le private equity, la banque, la distribution, le corporate finance et la comptabilité. Il dispose de trente années d’expérience commerciale, dont vingt-cinq consacrées au développement des PME en Afrique. Il enseigne à la Saïd Business School dans le cadre de deux programmes de l’université d’Oxford, l’Oxford Impact Investment Programme et l’Oxford Social Finance Programme, et exerce un rôle de conseil auprès de CapitalPlus Exchange (CapPlus), en tant que senior advisor. Peter Hinton a par ailleurs contribué au premier numéro de Secteur privé & Développement consacré à l’accompagnement technique, paru en 2011.
LYNN PIKHOLZ La fondatrice et CEO de CapitalPlus Exchange (CapPlus), Lynn Pikholz, est une experte du développement des économies émergentes et du financement des petites entreprises. Elle est notamment spécialisée dans les stratégies de réduction de la pauvreté adossées au marché. CapPlus stimule notamment l’investissement d’impact par le renforcement des institutions financières dans les économies émergentes.
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1/ Cibler les besoins du bénéficiaire. L’AT a de bons résultats lorsqu’il part du besoin exprimé par le bénéficiaire – et non par l’investisseur ou le bailleur. Tout autre objectif aura nettement moins de chances de succès. Paul Jackson, CEO de TUHF, un bailleur immobilier sud-africain, témoigne par exemple « qu’un récent programme d’AT a remarquablement résolu la question du niveau d’adéquation des fonds propres des institutions hypothécaires qui financent les promoteurs immobiliers. Le programme en question a également apporté des solutions à nombre de problèmes rencontrés dans le cadre de levées de fonds. Ce type d’accompagnement ciblé et pertinent demeure précieux. » 2/ Prendre le temps d’innover. Paul Jackson note aussi que l’adoption d’initiatives entièrement nouvelles est beaucoup plus compliquée à gérer pour les bénéficiaires : « Les initiatives novatrices demandent du temps. Les choix s’avèrent rarement judicieux lorsque les bailleurs d’AT mettent sous pression les bénéficiaires, sans saisir toutes les nuances de leur situation. » 3/ Impliquer le conseil d’administration. Les initiatives d’AT de grande ampleur doivent impliquer le conseil d’administration car les projets doivent être soutenus au plus haut niveau de l’entreprise. « C’est particulièrement important lorsque quelque chose se passe mal », souligne Ghalib Nishtar, CEO de Khushhali Microfinance
Bank – cette banque pour les PME affiche actuellement une très forte croissance au Pakistan. 4/ Engager financièrement les bénéficiaires. Toujours selon Ghalib Nishtar, les institutions financières bénéficiaires de l’AT doivent assumer une partie des coûts : « Les membres du conseil d’administration sont beaucoup plus attentifs lorsque je leur dis qu’il s’agit aussi de dépenser nos propres deniers ». Pour les institutions financières dont les ressources seraient plus limitées, il faut insister pour qu’elles mettent à disposition des équipes dédiées et/ou investissent dans l’amélioration des activités opérationnelles, à défaut d’assumer le partage des coûts. 5/ Bien sélectionner les consultants. Le succès d’un projet d’AT est souvent conditionné par l’alchimie entre le bénéficiaire et les experts qui vont effectuer la prestation de service. Les consultants doivent non seulement disposer de l’expertise technique requise, mais aussi de solides compétences interpersonnelles et d’une bonne sensibilité culturelle. 6/ Recruter des prestataires locaux ou régionaux. La majeure partie de l’AT doit être confiée de préférence à des sociétés et à des experts locaux ou régionaux. De telles initiatives permettront de renforcer les ressources humaines au service du développement, de consolider les liens de confiance à long terme et de susciter un soutien local, mais aussi de prévenir les