Cipb justitia 1er numero

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N°1

Mars 2011

JUSTITIA Déesse romaine de la justice. Elle a les yeux bandés pour symboliser l’impartialité. Elle rend justice

objectivement,

sans

crainte ni faveur, indépendamment de l’identité, de la puissance ou de

J USTITIA Bulletin béninois d’information juridique

la faiblesse des accusés.

Editorial • Vers une Justice de développement ? SOMMAIRE Page Editorial Vers une justice de developpement

1

Actualité 2 Exception d’inconstitutionnalité Lexique Glossaire juridique

2-3

3

Parole d’Expert Conflits du travail

Etude de cas 4-5 Vacances pour temps d’essai Quoi de neuf GTJ

6

Portrait CIPB

6

Thème Les assesseurs

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GTJ,

En ce qui concerne la justice commerciale et celle relative au droit social, il est clair que 16h00, les dysfonctionnements sont nombreux et il voit plusieurs raisons à cet état de fait.

16 juin 2011 Parution du JUSTITIA n° 2 Juin 2011 Colloque international de Cotonou « Réforme du droit des sûretés » CERDIJ Cet emplacement est à votre disposition pour toute communication ou convocation que vous désirez publier. Page 1

Déjà à l’origine de la création du Groupe de Travail Fiscalité du Secteur Privé, le Conseil des Investisseurs Privés au Bénin, cercle de réflexion du secteur privé, s’engage maintenant dans la création d’un Groupe de Travail Justice du Secteur Privé.

Les greffiers béninois sont également en nombre insuffisant et travaillent dans des conditions peu propices à une bonne productivité. Ainsi, les dossiers non traités s’accumulent et il est évident que des juges surchargés ne peuvent rendre des jugements sereins et éclairés dans de telles conditions. Face au mécontentement des justiciables, l’Institution se referme sur elle-même et offre le visage d’une justice sourde aux demandes de sa « clientèle ».

Le premier problème est l’insuffisance des moyens humains et matériels mis à la disposition de la justice. Avec environ 150 magistrats pour 8 millions (1 magistrat pour 50.000 habitants), le Bénin se situe très loin des ratios constatés dans les pays du Nord, à l’exemple de l’Allemagne qui compte 1 magistrat pour 5.000 habitants.

les formalismes qui alourdissent les procédures soient assouplis. Il réclamera que le budget de la justice soit à la hauteur des ambitions intellectuelles des magistrats et des attentes de modernisation de l’Institution espérées par le secteur privé. JUSTITIA, le trimestriel que vous avez entre les mains, constitue la première sortie publique du Groupe de Travail Justice du Secteur Privé. Nous ne doutons pas que sa lecture suscitera des débats, avec les magistrats en particulier. JUSTITIA relaiera les plaidoyers du Groupe de Travail Justice du Secteur Privé auprès de l’Etat et des PTF qui s’intéressent au bon fonctionnement de la justice. On parle de fiscalité de développement. Notre plus grand souhait est de contribuer à la création d’une justice de développement.

Quelle analyse ce groupe de travail fait-il aujourd’hui de la situation de la justice dans notre pays ?

Agenda 7 avril 2011 Réunion du Financial Bank

Les opérateurs économiques béninois ne sont pas satisfaits de leur justice. La justice, qui devrait être un facteur de sécurité des transactions commerciales et des relations du travail, est généralement perçue dans notre pays comme un générateur de risques et d’incertitudes. Or, l’image que se fait un investisseur d’un pays se fonde en grande partie sur le fonctionnement de la justice, à côté de la fiscalité.

Or, l’entreprise, véritable client de l’institution, attend que celle-ci travaille dans la sérénité et de manière performante.

Roland RIBOUX Président du CIPB

Le Groupe de Travail Justice du Secteur Privé veut être à l’origine d’un plaidoyer actif. La première urgence sera d’obtenir de l’Etat un Cadre de Concertation tel qu’il en existe déjà en matière de fiscalité. Ce groupe de travail proposera les réformes qui s’imposent au Bénin afin que

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Actualité • Exception d’inconstitutionnalité Lexique

L’exception d’inconstitutionnalité soulevée dans un but dilatoire ou de manière abusive est punie d’une amende civile de 200.000 à 500.000 FCFA sans préjudice des dommages-intérêts !

Saisine Fait de saisir une juridiction. Elle est généralement faite par citation, assignation ou par requête simple ou conjointe.

Acte authentique Document établi par un officier public habilité par la loi (notaire, officier d'état civil, huissier de justice, etc.), rédigé selon les formalités exigées par la loi et dont on peut obtenir l'exécution forcée. Exemples : acte notarié (vente immobilière, testament), procès-verbal de vente d'un commissaire priseur.

Référé Procédure d'urgence engagée devant le président d'une juridiction pour faire cesser une situation contraire à la loi. Elle permet d'obtenir, à titre provisoire : - toutes mesures qui ne se heurtent pas à une contestation sérieuse ; -

ou toutes mesures de conservation ou de remise en état pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite.

(suite en p. 3)

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L’Assemblée Nationale a délibéré et adopté en sa séance du 16 octobre 2008, puis en sa séance du 26 octobre 2010, suite à la décision DCC 09-120 du 06 octobre 2009 de la Cour Constitutionnelle pour mise en conformité la loi n°200807 portant code de procédure civile, commerciale, sociale, administrative et des comptes.

la loi alors que cette procédure ne peut porter que sur la loi elle-même et que d’autre part, le juge n’a pas transmis la requête dans le délai constitutionnel des huit (08) jours, le nouveau code adopté en attente de promulgation a prévu la sanction de l’auteur d’une exception d’inconstitutionnalité abusive ou soulevée dans un but dilatoire.

Cette loi importante pour notre pays apportera beaucoup d’innovations si elle était promulguée. Notre réflexion abordera la question de l’exception d’inconstitutionnalité qui est une prérogative constitutionnelle prévue aux articles 3 alinéa 3 et 122 de la constitution du 11 décembre 1990.

Les quatre articles du code qui organisent l’exception d’inconstitutionnalité (article 200 à 203) disposent que :

- La décision de sursis à statuer contenant les précisions et moyens sommaires du plaideur est transmise dans un délai de huit (08) jours à la Cour Constitutionnelle qui statuera dans le délai d’un (01) mois. - La décision ordonnant le sursis à statuer n’est pas susceptible d’appel. - Le sursis à statuer pour cause d’exception d’inconstitutionnalité ne peut être prononcé dans les procédures à l’exécution provisoire.

- L’exception doit indiquer clairement le ou les articles de la loi incriminée avec à l’appui et par écrit l’exposé sommaire des moyens.

Vivement que cette nouvelle mesure nous aide à éviter le dilatoire empêchant les juridictions de rendre les décisions dans un délai raisonnable.

- La décision de sursis à statuer doit être prise sur le siège.

Serge PRINCE AGBODJAN Juriste d’entreprise

Selon ce principe, tout citoyen peut soulever l’inconstitutionnalité d’une loi dans une affaire qui le concerne devant une juridiction. Ce mécanisme impose à chaque étape de la procédure qu'il soit sursis à statuer sur le litige jusqu'à la décision de la Cour Constitutionnelle. L’application de cette mesure suscite des abus et du dilatoire. Ainsi à l’instar de la décision de la Cour Constitutionnelle DCC 09-083 du 06 août 2009 où d’une part, l’avocat a soulevé cette exception sur la violation de

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Lexique (suite)

Parole d’Expert • La conciliation est-elle une abdication?

Citation

Loin d’être une abdication de droit, la conciliation permet, réellement, de conjurer l’incertitude juridique et judiciaire.

Acte remis par un huissier de justice qui ordonne à une personne de se présenter devant une juridiction comme défendeur ou comme témoin ; Exemple : citation à comparaître.

Conciliation La tentative de conciliation est prévue en matière de divorce ou la séparation des corps ; ou encore, en matière de procédure de recouvrement, dans les cas d’opposition à injonction de payer, de délivrer ou de restituer.

Haute Cour de justice Juridiction chargée de juger les actes commis par le Président de la République dans l'exercice de ses fonctions en cas de crime de haute trahison.

Ester en justice Participer comme demandeur, défendeur ou intervenant, à l’exercice d’une action judiciaire, à un procès.

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« Un mauvais arrangement est préférable à un bon procès ». L’effritement du lien de travail conduit souvent employeurs et salariés devant un tiers. Qu’il soit inspecteur du travail ou juge, celui-ci est contraint par la loi de concilier les parties en conflit. Mais le sens de cet exercice est souvent mal compris. La conciliation serait-elle une abdication de droits? Un concept simple. Concilier, c’est rapprocher, en vue, au mieux, de retisser le lien qui se fissure ou, à défaut, accorder les positions sur le règlement d’un différend. C’est, selon les mots du 1 Doyen CORNU , l’accord par lequel les parties mettent fin à leur litige, soit par voie de transaction, soit par abandon unilatéral ou réciproque de toute prétention. La conciliation ne résulte pas de l’application de la loi et, par conséquent, ne procède ni d’une sentence arbitrale, ni d’une décision judiciaire.

Une mise en œuvre hétérogène. La conciliation est préalable en ce que la solution juridictionnelle ne peut intervenir qu’à l’échec de la tentative. Elle est obligatoire en ce que les parties ne peuvent renoncer à son exercice. Toute clause introduite aux fins de renonciation sera réputée nulle. C’est d’abord devant l’inspecteur du travail compétent que la tentative intervient. En cas d’échec et, par suite, de saisine du tribunal, le juge a l’obligation d’y procéder, avant de connaître du litige en droit. Des intérêts certains. La conciliation est, aussi bien une nécessité managériale qu’une nécessité sociale. Certains perdent de vue, en effet, que le temps a un impact sur le règlement des conflits. Or, « le temps, c’est de l’argent ». Le temps d’un procès n’est souvent pas compatible avec les exigences de la gouvernance d’entreprise. Du côté de l’employé, l’effet du temps est

également souvent dévastateur sur l’urgence sociale. Au fond, si on intègre bien ses différents aspects dans un audit judiciaire pour en évaluer la pertinence, on réaliserait mieux que pour chacune des parties, la conciliation est plus une nécessité qu’une formalité. Loin d’être une abdication de droit, elle permet, réellement, de conjurer l’incertitude juridique et judiciaire.

Me Joseph DJOGBENOU Agrégé des facultés de droit Droit privé et sciences criminelles Avocat au Barreau du Bénin

1

CORNU, Gérard, « Vocabulaire juridique », Association Capitant, P.U.F, Paris, 2009, p. 197. 2 Loi n°98-004 du 27 janvier 1998

Des fondements variés. Comme dans maints domaines où les être humains entretiennent des rapports de proximité, le législateur a imposé la conciliation dans le règlement des différends du travail. Que les différends aient un caractère individuel (articles 238 à 242 pour la procédure devant l’inspection du travail, et 246 pour la procédure devant le tribunal du travail), ou collectif (articles 252 à 256), le code 2 béninois du travail assortit leur règlement de la tentative de conciliation.

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Etude de cas • Vacances pour temps d’essai Le travailleur peut-il se faire licencier pour faute lourde dans l’exercice de son droit au congé ? -

Les faits

pour la convention collective les articles 19, 21, 22, 50 à 53 et 74.

S. K. demande à son employeur, une grande société financière de la place, de prendre son solde de congé, 3 semaines, durant le mois à venir. L’employeur accepte.

La réponse à la question générale posée par le cas suppose la réponse à d’autres questions plus spécifiques que soulèvent le cas soumis à notre appréciation.

Après 3 semaines, l’employé ne reprend pas son travail et l’employeur ne réussit pas à le joindre. S. K. revient après 4 semaines d’absence.

Est-ce qu’un travailleur qui va en congés pour trois semaines peut reprendre quatre semaines après en apportant quelques jours plus tard un certificat médical d’un médecin aussi inconnu qu’introuvable ?

L’employeur demande des explications, S. K. lui apporte quelques jours plus tard un certificat médical d’un médecin aussi inconnu qu’introuvable. Entre-temps, l’employeur apprend que S. K. avait signé un contrat de travail avec une société concurrente, fait son temps d’essai (4 semaines) qui s’est avéré non concluant. L’employeur licencie l’employé sans préavis pour faute lourde, selon l’art. 55 du Code du Travail béninois. L’employé s’adresse alors à l’inspection du travail qui exige 15 millions FCFA d’indemnités pour l’employé et sa réintégration immédiate dans l’entreprise.

L’avis du juriste Le cas soumis à notre appréciation pose les problèmes liés aux droits et obligations du travailleur en matière de congés payés dans la législation du Bénin. Pour être plus explicite, il suffit de se demander si : Le travailleur peut se faire licencier pour faute lourde dans l’exercice de son droit au congé ? Le siège de la résolution des nombreux problèmes que pose le cas soumis à notre appréciation est : - pour le code du travail en vigueur au Bénin, les articles 61,158 à 165 et 238 ; Page 4

Par principe, le travailleur en congés peut être malade durant ses congés. Cette maladie peut aussi l’empêcher de reprendre le travail au jour convenu après les congés. Seulement, ce dernier doit se conformer à l’obligation d’information de son employeur de sa situation de malade. Il ne s’agira pas pour le travailleur d’attendre la fin de son traitement pour justifier de son absence. L’information de l’employeur doit être préalable à la reprise du travail car l’article 19 alinéa 7 de la Convention Collective admet à titre indicatif comme faute lourde susceptible de justifier un licenciement, l’abandon de poste sans justification.

Aussi faudrait–il rappeler l’article 74 de la convention collective générale du travail qui dispose que « lorsque l’état de santé du travailleur requiert un repos sanitaire, seul un médecin du travail ou un médecin agréé peut en décider. Ce repos médical ne peut excéder quatre (4) jours renouvelables une fois lorsque l’état de santé du travailleur ne nécessite pas une hospitalisation ». La lecture combinée des dispositions cidessus citées montre que S. K. ne saurait passer une semaine après ses congés sans informer préalablement son employeur de sa situation de « malade » et sans obtenir d’un médecin de travail ou un médecin agrée une décision l’autorisant à jouir d’un repos sanitaire. Le fait de ne pas informer préalablement son employeur de sa maladie et de justifier l’absence par une décision d’un médecin de travail ou d’un médecin agréé constitue donc pour le travailleur une faute dont la sanction est laissée à la discrétion de son employeur. Le travailleur peut donc se faire sanctionner même s’il a été malade dès lors que la procédure prévue par le législateur n’est pas respectée.

Nonobstant les dispositions internes en vigueur dans les entreprises et consignées dans les règlements intérieurs des entreprises, le travailleur malade est tenu d’informer son employeur.

Il a été aussi relevé dans le cas soumis à notre appréciation que le travailleur pendant son absence avait conclu un contrat de travail à l’essai avec une société concurrente.

L’information de l’employeur avant ou pendant la maladie appuyée de l’envoi du certificat médical d’un médecin agréé est nécessaire surtout si la maladie est apparue comme un cas de force majeure.

La réponse à cette question trouve son fondement dans les articles 61 du code de travail et 21 de la convention collective générale du travail.

Selon l’article 22 de la convention collective générale du travail « en cas de maladie dûment constatée par un médecin agréé entraînant pour le travailleur une incapacité d’exercer ses fonctions, il est de droit mis en congé. Pour obtenir un congé de maladie, le travailleur doit adresser à l’employeur une demande appuyée du certificat d’un médecin agréé ».

Selon l’article 61 du code de travail « Le travailleur doit toute son activité professionnelle à l'entreprise sauf dérogation stipulée au contrat. Est nulle de plein droit toute clause d'un contrat portant interdiction pour le travailleur d'exercer une activité quelconque à l'expiration du contrat ». Quant à l’article 21 de la convention générale du travail, il ajoute que « Sauf stipulation contraire insérée au contrat

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Justitia n° 1 Mars 2011

Etude de cas • Vacances pour temps d’essai (suite) L’avis du juriste (suite) de travail ou autorisation particulière écrite du chef d’entreprise ou de son représentant, le travailleur doit toute son activité professionnelle à l’entreprise. Il lui est interdit d’exercer même en dehors des heures de travail une activité à caractère professionnel susceptible de concurrencer l’entreprise ou de nuire à l’exécution des services convenus. Il est également interdit au travailleur de divulguer et d’utiliser à des fins personnelles ou pour le compte de tiers, des renseignements ou des techniques acquis au service de l’employeur. Est nulle de plein droit, toute clause d’un contrat portant interdiction pour le travailleur, d’exercer une activité quelconque à l’expiration du contrat ». A la lecture des articles évoqués, le travailleur ne saurait conclure un contrat à l’essai avec un autre employeur. Il lui est également interdit d’exercer même en dehors des heures de travail une activité à caractère professionnel susceptible de concurrencer l’entreprise ou de nuire à l’exécution des services convenus. Dans le cas d’espèce, le travailleur qui est dans les liens contractuels avec son entreprise et qui signe un contrat de travail avec une autre société concurrente viole son contrat et peut être passible d’une sanction allant jusqu’au licenciement pour faute lourde.

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Pour justifier ce licenciement, l’employeur devrait produire un exploit d’huissier ou toute autre pièce de valeur probante justifiant les relations conclues entre son travailleur et l’entreprise concurrente. Il est à rappeler que l’employeur de S. K. peut également ester en justice le nouvel employeur pour débauchage de son travailleur. A la suite de ce licenciement pour faute lourde, l’inspection du travail peut-elle exiger le paiement de cinq millions de FCFA d’indemnités et sa réintégration immédiate dans l’entreprise ? Avant de répondre à la question, il est à préciser que la notion de « réintégration » acceptée dans le code de travail en France n’est pas admise dans le code de travail béninois. Au Bénin, le juge n’est pas compétent pour demander la réintégration d’un travailleur licencié. Il ne peut qu’octroyer à ce dernier la réparation des dommages causés. Selon l’article 238 du code de travail tout litige individuel du travail qui survient au sein de l'entreprise est obligatoirement soumis, avant toute saisine du tribunal de travail, à l'inspecteur du travail pour tentative de règlement amiable.

l'inspecteur du travail signé des parties ou de la partie présente. Il ressort de cette disposition que l’inspecteur du travail n’est pas un « juge » pour exiger le paiement de cinq millions ni demander une réintégration du travailleur. Il n’a qu’un rôle de « conciliateur ». Au Bénin, seul le tribunal du travail composé d’au moins un magistrat, un président, un greffier, un assesseur employeur et un assesseur travailleur peut se prononcer sur tous les différends individuels du travail. Au vu de tout ce qui précède, un travailleur peut se faire licencier pour faute lourde après l’exercice de son droit aux congés ou en allant conclure un nouveau contrat de travail sans résilier celui existant. Il suffira pour l’employeur de prendre les dispositions utiles pour justifier les faits caractéristiques de la faute lourde et de respecter la procédure quant au licenciement de ce travailleur.

Serge PRINCE AGBODJAN Juriste d’entreprise

La conciliation ou la non conciliation est constatée par procès-verbal de

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Quoi de neuf • GTJ (Groupe de Travail Justice) Association d’entrepreneurs installés au Bénin, le CIPB est un cercle d'échanges, de réflexions, d’analyses et de propositions aux fins d'améliorer l'environnement des affaires. Eu égard aux résultats encourageants du « Groupe de Travail Fiscalité », le CIPB milite aujourd'hui pour la création d'un autre cadre formel d'échanges entre le Gouvernement et le Secteur Privé. Ainsi, depuis le 21 octobre 2010, il a créé un comité de réflexions dénommé « Groupe de Travail Justice (GTJ) » dont les actions devraient aider à proposer de réelles réformes en vue de l'instauration d'une justice plus crédible. Ceci passera inéluctablement par l'instauration d'un cadre de concertation avec les autorités béninoises. Composé des responsables des ressources humaines et des services juridiques des entreprises membres du CIPB et d'experts en droit du travail, le GTJ est organisé en sous-comités et se réunit mensuellement. Il utilise comme démarche méthodologique le diagnostic

des problèmes qui entravent le fonctionnement des entreprises au plan juridique et propose des solutions. Au nombre des obstacles, on note le problème de la ‘barèmisation’ des indemnités lors de conflits sociaux et l’absence des assesseurs dans les cours et tribunaux. A ces préoccupations s'ajoutent la formation des chefs et cadres d’entreprise en droit du travail, les risques professionnels et le respect des procédures dans les conflits du travail. Au Bénin, les investisseurs ne sont toujours pas satisfaits de la justice; car la complexité des procédures et les jugements rendus en première instance relatifs aux indemnités à verser en cas de conflit, apparaissent parfois illusoires et dénués de tout bon sens. Bien que prévu à l'article 242 du Code du Travail, l'absence continue des assesseurs employeurs et travailleurs auprès des cours et tribunaux vient impacter

davantage sur la fiabilité des décisions de justice. Le GTJ souhaite faire actualiser et faire appliquer l'arrêté interministériel n° 120 /MFPTRA/MJLDH/SGM/SP-CNT/SA du 16 mars 2006 portant nomination des assesseurs employeurs et travailleurs auprès des cours et tribunaux. La mise à la norme Iso de la justice béninoise est aussi un thème de réflexion. Pour une meilleure visibilité des activités du groupe, le GTJ réalise un bulletin d’information trimestriel gratuit, « Justitia ». Le GTJ travaille en synergie avec le Conseil National du Patronat du Bénin (CNP-Benin), la Chambre de Commerce et de l’Industrie au Bénin (CCIB), le barreau, des magistrats, des notaires et des huissiers et également avec certains Partenaires Techniques et Financiers. Josué AZANDEGBEY Chargé d’études économiques au CIPB

Portrait • CIPB (Conseil des Investisseurs Privés au Bénin) Association d’entreprises investissant au Bénin, le CIPB est créé en décembre 2002 en vue d’établir un cadre formel de partenariat public-privé et d’œuvrer à l’amélioration du climat des affaires au Bénin. Il regroupe aujourd’hui une quarantaine de grandes entreprises de tous les métiers et de tous les secteurs d’activités. Son bureau exécutif est présidé par Monsieur Roland Riboux appuyé de deux vice-présidents, d’un secrétaire et d’un trésorier. Dénué de toute ambition politique, le CIPB défend une vision à long terme de l’entreprise créatrice de richesse, vecteur essentiel de croissance, d’emplois et de réduction de la pauvreté.

Dans ses actions pour atteindre ses objectifs, le CIPB collabore avec l’Etat béninois et les organisations internationales (PNUD, Banque Mondiale, FMI, OMC, CNUCED, Commission Européenne) dont il entend être un organe de référence.

Il bénéficie du soutien de plusieurs partenaires économiques et financiers. Pour les années à venir, le CIPB se propose d’élargir le champ de ses réflexions et actions à l’amélioration des secteurs justice, agriculture, eau, électricité, télécommunications, infrastructures. Des études seront menées en privilégiant, comme d’ordinaire, l’approche méthodologique « groupes de travail ».

Luc ASSOGBA Chargé de communication au CIPB

Les entreprises membres de l’Association sont toutes animées du désir de proposer des solutions aux freins et entraves au développement du pays, qui représentent aussi des obstacles à la bonne marche de leurs affaires. Page 6

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Thème • Les assesseurs au Bénin, définition et rôle Dans un tribunal du travail, les assesseurs sont des juges non professionnels nommés après élection par les organisations d’employeurs ou de travailleurs les plus représentatives. Au Bénin, les tribunaux du travail connaissent des différends individuels du travail entre les travailleurs et leurs employeurs. Le tribunal du travail constitue une chambre spécialisée mais non autonome du tribunal : c’est la chambre sociale composée d’un Président, d’un assesseur salarié et d’un assesseur employeur (art. 242 du code du travail). C’est là une composition échevinale propice au dialogue social tripartite cher à l’organisation Internationale du Travail (OIT). Une place primordiale est concédée aux assesseurs dans l’échevinage du tribunal. On se contentera ici de la détermination des assesseurs ainsi que de leur rôle. Par définition, l’assesseur est celui qui aide, qui conseille. Au sein du tribunal du travail, les assesseurs sont des juges non professionnels nommés après élection par les organisations d’employeurs ou de travailleurs les plus représentatives du secteur privé ou semi public. Ils doivent jouir de leurs droits civiques, justifier d’une bonne moralité et d’une expérience professionnelle confirmée dans la branche d’activité qu’ils représentent. Les qualités attendues de l’assesseur se trouvent condensées dans son serment : « je jure de remplir mes devoirs avec zèle et intégrité et de garder le secret de délibérations». Du point de vue de sa formation, ce serment qui est toute l’orientation de la conduite de l’assesseur, est analogue au serment prêté par les conseillers prud’hommes français, ce qui explique valablement l’application de la jurisprudence des tribunaux français en cette matière aux assesseurs des tribunaux du travail africains. Il est donc proscrit du comportement de l’assesseur toute tendance au démarchage, à l’indignité, au faux fuyant, à toutes formes de vénalité.

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En d’autres termes, l’assesseur remplit son devoir avec désintéressement, sans idée de venir au tribunal monnayer ses prestations. D’ailleurs, au regard de la loi, « les fonctions d’assesseurs sont gratuites » (article 242 al 8). Le respect de la justice passe par une certaine intransigeance dans la conduite de l’assesseur sauf à faire déconsidérer cette justice, car le rôle des assesseurs est important dans le déroulement du procès. En effet, au plan de la morale judiciaire, le rôle des assesseurs consiste à garantir la coutume professionnelle des parties. Dans la pratique, l’assesseur assure au juge professionnel du droit qu’est le Président du tribunal, l’éclairage particulier dont son expérience, sa compétence et sa connaissance du milieu professionnel lui donnent l’expertise. Par rapport au juge professionnel rivé sur la manipulation abstraite, souvent routinière du droit, l’assesseur manifeste une perception et une prise plus réelles sur les faits et, lorsqu’on, sait la place déterminante des faits dans le conflit de travail, la présence des assesseurs vient sceller l’apaisement et l’équité nécessaires à l’aboutissement de décisions de justice plus conformes et moins contestables. Dans le cadre spécifique du tribunal du travail, la disponibilité des assesseurs est acquise au tribunal où ils apportent leur vision propre dont ils encadrent le juge pendant toute la durée de leur mandat qui est de 2 ans renouvelables (article 242 al 5). On comprend alors que les assesseurs ont voix délibérative : (Cour Suprême, Cameroun, 17 avril 1978 TPOM 490 PAGE 288). La procédure du jugement leur offrant autant de pouvoir que le juge professionnel dont ils ne partagent pourtant pas le siège, ils participent activement à la motivation du jugement et sont de véritables acteurs de

la construction de la jurisprudence, clé de voûte du droit du travail. C’est dire que la place occupée par les assesseurs au sein de la Chambre sociale du tribunal est si déterminante que la composition irrégulière du tribunal peut entraîner l’annulation de la procédure : (Cour Suprême du Bénin, 28 juin 1967 TPOM 234 page 5197). En définitive, le Bénin peut se flatter d’avoir un cadre juridique approprié pour l’institution des assesseurs : loi n° 200137 du 26 novembre 2001 portant organisation judiciaire en République du Bénin, code du travail, arrêté interministériel de 2006 portant nomination des assesseurs employeurs et travailleurs. Pourtant, les chambres sociales des ère tribunaux de 1 Instance continuent de siéger à juge unique, c’est-à-dire sans assesseurs, croyant commode l’abri des dispositions dérogatoires de la loi portant organisation judiciaire en République du Bénin. C’est pourquoi, après l’état du droit sur la question des assesseurs, celle-ci mérite qu’on en fasse un état des lieux (critique) dans un prochain numéro de ce Bulletin. La conviction étant affirmée que la mission des assesseurs s’inscrit dans l’objectif recherché de la fiabilité maximale des jugements et de la minimisation des erreurs judiciaires, il n’est plus concevable que les tribunaux du travail béninois continuent à rester malades de l’absence de leurs assesseurs.

Me Bertin AMOUSSOU Avocat à laCour Spécialiste du droit social

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Justitia n° 1 Mars 2011 Publicité

Equipe de rédaction Luc ASSOGBA Josué AZANDEGBEY Chimène GODONOU

JUSTITIA – CIPB 85, avenue Steinmetz 03 BP 4304 Cotonou - BENIN

Coordination Jean-Claude VAUCHER

Tél. (0229) 21 31 47 67

Conseil juridique Serge PRINCE AGBODJAN, juriste d’entreprise

justitia@cipb.bj

Conseil scientifique Me Joseph DJOGBENOU, Agrégé de facultés de droit CIPB Association N° 2002/2165/MISD/DC/SG/DAI/SAAP

Nous sommes preneurs ! Ce bulletin de « JUSTITIA » est le premier numéro que nous espérons d’une longue série. Il est forcément incomplet et imparfait. Pour l’améliorer à chaque parution, nous sommes preneurs de tous vos conseils, remarques, critiques ou encouragements. « JUSTITIA » est également à votre service, si vous désirez vous exprimer, faire une annonce ou participer à sa conception. Il existe aussi une version électronique que vous pouvez consulter sur www.cipb.bj ou en vous abonnant à info@cipb.bj. La Rédaction.

85, avenue Steinmetz, 03 BP 4304 Cotonou – Bénin 21 31 47 67 info@cipb.bj Pour leur soutien financier, nos remerciements à : BOA Bank of Africa & CFAO MOTORS

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