Énergie : prix à la hausse Inquiétude chez les consommateurs ouest-africains avec en arrière-plan le syndrome maghrébin Ouestafnews – 10/01/2011 L’année 2011 a commencé en Afrique de l’ouest par d’importantes hausses des prix des produits énergétiques dans au moins quatre pays de la sous-région, avec parfois des répercussions négatives sur d’autres secteurs, suscitant une grande inquiétude chez les consommateurs. Ghana, Niger, Sénégal et Togo ont tous annoncé en ce début janvier 2011 des hausses des prix de l’électricité ou du carburant ou encore du gaz butane. Cette flambée des prix, qui se produit au moment où l’Afrique du Nord connaît des violents soulèvements, liés aux difficiles conditions de vie des couches sociales défavorisées, n’est pas sans inquiéter certains observateurs. Au Ghana, c’est une hausse de 30 % sur le prix de l’essence et du gasoil et 25% sur celui du gaz qui a été décidé par la National petroleum Agency ( NPA), l’agence nationale des hydrocarbures est effective depuis ce mardi 04 janvier 2011. Cette hausse, notent les observateurs, alors que le pays venait juste de célébrer le 15 décembre 2010 son entrée dans le lot des pays producteurs et exportateur de pétrole. Ces hausses sont « inévitables en raison de la constante montée des prix du brut sur le marché mondial », a expliqué le directeur général de la NPA, Alex Mould cité par l’agence de presse ghanéenne (Gna). En réaction à cette mesure, les transporteurs du pays ont eux aussi d’augmenter leurs tarifs de 18%, suscitant de vives réactions de la part de certaines franges de la société. En plus de la hausse des prix sur le marché mondial, cette hausse s’explique aussi selon la NPA par le prélèvement de taxes pour le paiement de lourdes dettes engagées par la raffinerie de Tema, unique raffinerie du pays et située dans la ville portuaire du même nom, à 25 km de la capitale. Au Togo, voisin c’est le prix de l’électricité qui a enregistré une hausse des prix de 7 à 20%, une augmentation qui « s’explique à la fois par la fin de la politique de subvention, par les tarifs pratiqués par les fournisseurs de la Compagnie énergie électrique du Togo(Ceet), et par les fluctuations des coûts de production », selon des sources officielles. En plus d’être confronté à une très grave crise de l’électricité qui dure depuis des années, le Sénégal connaît aussi une hausse du gaz butane et des carburants, effective depuis le 25 décembre. Une augmentation des prix qui minent le pouvoir d’achat des ménages déjà durement affecté par la hausse des prix des denrées de première nécessité. 1
Les prix des bombonnes de gaz butane de 6 et 2,7 kilogrammes qui représentent l’essentiel de la consommation des ménages sont passés respectivement de 3 465 à 3 965 FCFA et de 1 560 à 1 785 FCFA. Soit des hausses de 500 et 225 FCFA, selon des chiffres publiés par le Comité national des hydrocarbures. Pour ce qui est des carburants, l’essence super est passée de 737 à 770 FCFA le litre, le gasoil de 632 à 665 FCFA le litre. En dehors du renchérissement des prix sur le marché international, ces hausses sont aussi, selon les autorités, dues à un besoin d’alléger la perte fiscale que subit l'État, notamment en ce qui concerne le butane. D’où la levée de la subvention consentie jusqu’ici par le gouvernement sénégalais. Concernant le butane, par exemple, « sur une consommation mensuelle de 1,5 millions de bouteilles de 6 kg et 400 mille bouteilles de 2,7 kg, l'État accuse une perte de recette fiscale de 1,4 milliards de francs Cfa en un mois », a notamment souligné le comité national des hydrocarbures. Ces explications n’ont pas convaincu des associations de défense des consommateurs, dont certains ont manifesté leur colère, notamment dans la banlieue dakaroise, pendant la journée du 8 janvier 2011. Une situation similaire prévaut également au Niger où le litre d’essence est passé de 500 FCFA à 555 FCFA alors que le gasoil passe à 490 FCFA au lieu 465 FCFA, selon des chiffres du ministère de l’Economie et des Finances. Comme au Sénégal, le gouvernement explique cette hausse par le besoin de recouvrer le manque à gagner causé par les subventions. « Depuis 2007, le gouvernement subventionne le prix des hydrocarbures à travers les droits de douane et de taxes pour permettre aux consommateurs de ne pas sentir la hausse de ces produits », a expliqué Mahamane Laouali Dandah, le porte-parole du gouvernement sur Télé Sahel, la télévision nationale du Niger. Selon M. Dandah, l'État nigérien du fait de la subvention a perdu 13 milliards FCFA en renonçant aux droits de douane sur les hydrocarbures. En signe de protestation contre cette hausse du carburant, les syndicats des conducteurs de taxi et transports urbains du Niger ont observé le jeudi 06 janvier 2011 une grève dans la capitale, Niamey. « Nous protestons contre l’augmentation du prix de l’essence et du gasoil dans notre pays, c’est une situation qui nous pénalise car il est très difficile de faire des économies avec ces tarifs », a déclaré à la presse Moussa Boudou, porte-parole des conducteurs de taxis. Avec cette nouvelle flambée des prix et cette cherté du coût de la vie, les analystes craignent que ne se reproduisent le même scénario qu’en 2008, année marquée par de violentes manifestations et même des « émeutes de la faim » dans plusieurs pays africains (dont le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso, le Niger pour ce qui est de l’Afrique de l’ouest). 2
Déjà les premiers signes de tensions sont perceptibles dans certains de ces pays où le front social s’échauffe. Pire encore, hors de la région ouest-africaine, le Maghreb vit depuis des semaines une situation de forte instabilité liée aux difficultés de la vie quotidienne que rencontrent les citoyens, notamment en Tunisie et en Algérie. Dans ces deux pays, les populations se sont révoltées respectivement contre le chômage endémique des jeunes diplômés et contre la vie chère, faisant des dizaines de morts. En Afrique des l’ouest, curieusement, le Bénin semble quant à lui échapper à cette tendance haussière des prix de l'énergie, puisque les autorités ont plutôt annoncé, à compter du 5 janvier 2011 une baisse des prix. L’essence et le gasoil sont vendus respectivement dans les stations services à 515 et 540 francs alors qu’ils étaient à 540 (essence) et 570 (gasoil). Cette baisse s’est aussitôt répercutée sur le marché informel où le litre d’essence est passé de 325 à 300 FCFA. Selon certains observateurs la situation pré-électorale (présidentielle prévue le 27 février 2011) pourrait expliquer la prudence des autorités.
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