2008
du
Rencontres internationales
Claude FLANZY
Alain COMBARD
Jean-Jacques BREBAN
e d i t o
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Le vin Rosé attire, intrigue, passionne. Sa position dans l’Univers du vin, ses caractéristiques physio chimiques et organoleptiques lentement mûries de la vigne au chais, ont été déclinées durant la conférence de 2004. Sa personnalité, sa perception, sa consommation, son image dans le Monde ont fait l’objet de témoignages en 2006. Le nouveau document regroupe les réflexions de chercheurs, universitaires, professionnels de filière vigne-vin, sur les conceptions marketing et les stratégies commerciales inhérentes au Rosé. Le triptyque de colloque s’achève mais l’intérêt pour le vin Rosé ne s’altère pas : produit très ancien, il présente toujours une image de modernité en adéquation avec les aspirations de la Société actuelle.
RENCONTRES Internationales du
Avec la participation de :
Sommaire Claude FLANZY
Animation du colloque
P.XX Gilles MASSON
Richesse et diversité des vins Rosés : composition, élaboration et mise en valeur
P.XX Patrick AIGRAIN
Production, consommation, flux du vin Rosé dans le monde
P.XX Jean-Philippe PERROUTY
Données de cadrage sur la consommation du vin rosé dans divers pays
P.XX Aurélie DELUZE
Richesse et diversité des vins Rosés : composition, élaboration et mise en valeur
P.XX
Philippe AURIER
Le vin rosé : contextes de consommation et statut symbolique en France
P.XX Andrew CHAPMAN
Le développement du marché du Blush aux USA, en Grande Bretagne et en Irlande
P.XX Ghislain K. LAFLAMME
Le vin rosé, stratégie d’approche des consommateurs au Québec
P.XX Stéphane HUGON
Etude sur les imaginaires du vin rosé au Brésil
P.XX Jean-Claude RUF
Conclusion générale du colloque
P.XX
RencontreS internationalES du
ROSe
2008 Richesse et diversité des vins Rosés
Composition, élaboration, mise en valeur
gilles masson Directeur du Centre de Recherche et d’Expérimentation sur le Vin Rosé
Je vais vous présenter un travail réalisé par le
Nous avons donc maintenant une banque de
Centre de Recherche et d’Expérimentation sur le
données assez riche, et j’ai décidé de l’aborder
Vin Rosé à VIDAUBAN portant sur la richesse et
aujourd’hui sous 3 angles différents, sous 3
la diversité des Vins Rosés du monde.
paramètres qui nous paraissent pouvoir clas-
Ce travail, qui consiste en une banque de don-
ser les Rosés du monde dans des grands styles,
nées sur les Vins Rosés du monde, ne serait pas
dans des grandes catégories. Je remercie à ce
possible sans la mise à disposition chaque année
niveau de l’exposé Monsieur Michel COUDERC
d’une impressionnante collection de vins par nos
du CIVP, qui m’a aidé à monter cette présenta-
amis de l’Union des Œnologues de France qui,
tion et qui m’a dit : « travaillons sur ces 3 pa-
depuis 2004, nous confient chaque année 700
ramètres : gaz carbonique, couleur et sucre ».
à 800 échantillons de Vins Rosés venant de plus
Ce sont des éléments simples et surtout per-
de 30 pays différents. Nous avons donc, depuis
ceptibles par le consommateur : plaçons nous
5 ans, passé sous notre binoculaire plus de 3000
à son niveau et essayons de raisonner sur des
Vins Rosés des 4 coins du monde. La collection
éléments qui sont à sa disposition.
2008 est en cours d’observation, je vous tiendrai
Nous allons essayer de répartir les Vins Rosés
au courant de ses résultats dans les années à venir.
du monde dans ce tableau et vous verrez que
Avec 3000 échantillons à analyser, on ne peut
quasiment toutes les cases sont occupées. Ce
se permettre de faire des analyses très pointues,
qui veut dire que quasiment tous les styles de
ou très onéreuses. On essaie alors de trouver un
Vins Rosés sont présents sur le marché et dans
bon rapport qualité/prix c’est-à-dire de faire des
le monde.
mesures à la fois pertinentes et qui soient possi-
Nous travaillons sur le gaz carbonique (c’est-
bles en grand nombre. Nous avons bien enten-
à-dire sur les vins tranquilles ou effervescents),
du travaillé sur la couleur qui est un paramètre
sur les teneurs en sucre et sur les couleurs.
fondamental pour les rosés. Nous avons égale-
Concernant les effervescents, faisons une pa-
ment réalisé un grand nombre de mesures œno-
renthèse sur ces Rosés à bulles. Aurélie DELU-
logiques qui sont possibles en série maintenant
ZE du CIVC y reviendra tout à l’heure, mais je
grâce à des méthodes modernes comme l’IRTF (
signale tout de même que la bulle rosée aug-
InfraRouge à Transformées de Fourrier). De plus,
mente assez nettement dans notre collection
nous avons réalisé des observations sur les éti-
puisqu’elle est passée de 7 à 12 % de propor-
quettes, sur les bouchons et sur ce packaging
tion en 5 ans. Donc une progression régulière
qui nous fait beaucoup discuter également.
sur les effervescents rosés de notre collection.
7
n Tableau 1. Ventilation des vins rosés du monde (% par catégorie) issus de la collection 2007 de l’Union de Oenologues de France et étudiée par le Centre du Rosé, en fonction de leur couleur, de leur teneur en sucres et en CO2. Ces effervescents, on peut les distinguer selon
à 16 correspondait à des vins clairs, « a » supé-
des classes de sucre: en effet les vins efferves-
rieur à 24 caractérisait des vins foncés et entre les deux valeurs se situaient des vins moyennement intenses.
cents bruts ont moins de 12 g par litre puis nous trouvons les extra secs, les secs, les demi secs et les doux. Les proportions que nous rencontrons dans chaque catégorie de la collection apparaissent dans le tableau 1. Et vous voyez que la dominante des vins rosés effervescents, sont des vins rosés bruts. Ceci s’explique sans doute, par la forte proportion de vins de champagne dans notre collection. Il n’empêche qu’on trouve beaucoup plus de bruts que d’autres catégories mais il y a malgré tout quelques extra secs, quelques secs et quelques demi secs. Cette collection, n’est pas représentative de la production mondiale de rosé. C’est un échantillon qui nous donne une idée de ce qui peut se passer et qui est surtout intéressant en terme de suivi pour voir dans quelles régions et dans quels pays du monde les choses évoluent ; en aucun cas bien entendu, l’échantillon n’est totalement représentatif de la production. Voilà donc comment sont répartis les vins rosés effervescents en termes de sucre. En terme de couleurs, nous les avons classées en 3 catégories : les clairs, les moyens et les foncés. Tout simplement sur un critère analytique de mesures qu’on appelle « a » qui est un critère colorimétrique mesurant la couleur rouge. Avec nos collègues de l’Institut Coopératif du Vin, on a considéré que : « a » inférieur
La plupart des rosés effervescents sont des rosés clairs : plus des deux tiers, l’autre tiers étant réparti de façon équitable entre les vins moyennement intenses et les vins foncés. Une autre façon de le constater est d’observer la figure 1. Chaque année, grâce à notre nuancier de couleurs, nous positionnons la couleur de tous ces vins, à la fois les vins effervescents et les vins tranquilles. Lorsque, sur ce nuage de points qui est très varié, avec des couleurs extraor-
n Figure 1. Répartition des vins rosés du monde issus des collections 2004 et 2005 sur le nuancier de couleur du Centre du Rosé. : vins rosés tranquilles, : vins rosés effervescents.
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ROSe
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Richesse et diversité des vins Rosés
Composition, élaboration, mise en valeur
dinairement différentes, on va du vin blanc au vin rouge, on constate que le vin rosé est vraiment le trait d’union entre ces deux vins. Sur la figure 2 présentant uniquement des vins rosés effervescents, les Champagnes occupent la totalité de la palette de couleurs. On trouve des Champagnes plus ou moins intenses qui couvrent bien cette gamme. Lorsqu’on s’intéresse aux autres effervescents français, on voit que ces Crémants de Bourgogne, ces Crémants de Loire et ces Crémants d’Alsace sont des vins rosés particulièrement pâles et peut-être parfois plus que les champagnes. Les effervescents étrangers se divisent en deux catégories : nous avons en haut à droite des vins rosés effervescents venant de Suisse et d’Alle-
n Figure 2. Répartition des vins rosés effervescents du monde issus des collections 2004 et 2005 sur le nuancier de couleur du Centre du Rosé. Plusieurs points peuvent être superposés.
magne, alors que les points plus colorés sont ceux qui viennent d’Italie et d’Espagne. Une autre façon de présenter ces résultats est de faire un zoom sur la partie un peu plus claire, avec notre nuancier appelé « Provence » car il présente des couleurs plus claires. Tous les vins sont projetés sur notre nuancier, et toutes les cases sont quasiment occupées. Les effervescents sont plutôt sur la partie haute du graphique et vers des couleurs jaune oranger. On imagine que cela vient du fait qu’il doit être difficile de faire des rosés effervescents de couleur vive, éclatante et franche parce qu’au cours de la deuxième fermentation, qu’elle soit en bouteille ou en cuve close, au cours de la conservation en bouteille, les anthocyanes sont fixées et re-fixées par les écorces de levure ; on perd ce côté rouge, violet éclatant et on arrive sur des nuances un peu plus orangées. On sait la difficulté qu’ont les élaborateurs de vins effervescent à garder une couleur vive et franche pour les rosés. Il y a donc un vrai enjeu technique à étudier pour nous. Pour donner une idée de ce que peuvent donner les trois couleurs extrêmes de Champagne, nous les avons contre typées avec notre gel de bougie et nos colorants qui ont fait la réputation de notre nuancier de couleur ; nous essayons également de mettre un peu de mousse mais ceci est plus difficile. Les couleurs de trois Champagne sont assez différentes : une couleur qu’on qualifie de pèche, une de pomelo et une de groseille (figure 3). Voici donc l’étendue de la gamme dans laquelle la plupart des échantillons sont compris, mais il y a aussi quelques échantillons particulièrement foncés.
9
Par ailleurs l’un des vins est à la fois brut et clair mais on ne peut pas juger ici de sa couleur car il est présenté dans sa célèbre bouteille verte. Une telle bouteille est en vogue en Champagne parce qu’on dit qu’elle a un impact environnemental moins fort que la bouteille blanche qui permet de voir la couleur mais qui, en terme écologique est un peu plus polluante pour son élaboration que la bouteille en verre verte ; et l’on sait que nos amis Champenois sont particulièrement sensibles à ces questions là. On a également des vins un peu plus colorés dans la catégorie des bruts, voici l’exemple de ce Champagne qui lui, laisse voir sa couleur moyennement intense. Vous savez tous que pour la plupart, les champagnes rosés sont obtenus à partir d’un assemblage de vin blanc et de vin rouge et on a découvert combien les champenois étaient attentifs à l’élaboration de leur vin rouge qui représente un atelier particulier sur lequel ils apportent beaucoup d’attention. Le vin rouge n’est pas un simple colorant, il doit aussi apporter du fruité, de la structure et donc il y a toute une réflexion très intéressante à ce niveau. Nous allons maintenant passer en revue quelques autres vins rosés effervescents, après avoir longuement parlé du Champagne. D’autres exemples de vins rosés effervescents bruts et clairs sont proposés: voici un Crémant d’Alsace ou encore ce vin qui nous vient de République Tchèque qui est bien présenté dans une très belle bouteille et dont on nous dit qu’il est élaboré en cuve close par un assemblage de vin blanc et de vin rouge. Dans les autres vins rosés bruts et colorés, on trouve le Cava d’Espagne qui a une couleur as-
n Figure 3. Positionnement des vins rosés de Champagne sur le nuancier de couleur « Provence » et illustration du contre typage de trois couleurs particulièrement différentes : Groseille, pomelo, pêche. sez intense, qui est élaboré par une macération pelliculaire de 12 heures et donc une volonté de faire une couleur relativement intense. Ce vin est fait en méthode traditionnelle. Continuons de balayer notre tableau avec toutes nos catégories de vins rosés. Voici un rosé effervescent Italien, un « vinho Espumente » qui a été élaboré par un assemblage de pinot blanc et de pinot noir, qui a 16 g de sucre par litre, donc un extra sec, et qui est obtenu en méthode « cuve close ». On monte dans la catégorie des sucres et on trouve bon nombre de rosés effervescents venant d’Allemagne. Celui-ci, en particulier qui est issu de vendanges tardives, qui a fait l’objet de passage en fût, ce qui peut expliquer sa couleur légèrement orangée et qui est élaboré par méthode traditionnelle.
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Richesse et diversité des vins Rosés
Composition, élaboration, mise en valeur
n Figure 4. Représentation graphique des principales couleurs de vins rosés français établie sur la base des données du tableau 3.
Voilà donc quelques exemples de vins rosés effervescents venant des 4 coins du monde avec des caractéristiques de couleurs et de sucres différentes. Passons maintenant aux vins rosés tranquilles. Dans le tableau 1, on peut voir une classification pour la teneur en sucres un peu plus simple que pour les effervescent avec des vins secs inférieurs à 4 g, des demi secs, des demi doux et des doux. Lorsqu’on fait une analyse statistique de la teneur en sucre des vins rosés français par exemple, on se rend compte qu’il y a 2 catégories : des vins qui ont une teneur en sucre inférieure à 5 g en moyenne et, proviennent plutôt des vignobles méridionaux ; dans les vignobles septentrionaux apparaît une volonté de laisser du sucre résiduel, ce qui permet sans doute de trouver une autre harmonie avec les acidités naturelles de ces vignobles. La moyenne globale des sucres dans les vins tranquilles s’élève à 3,9 g/l. Le vin rosé mondial « type » a 4 g par litre de sucre en moyenne avec une très grande diversité : beaucoup de vins très secs et des vins particulièrement doux. En ce qui concerne les vins secs, la moyenne est de 1,36 g de sucre par litre. C’est très peu, on a des vins relativement secs et deux tiers de ces vins sont à des teneurs inférieures ou égales à 1 g de sucre par litre (donc très loin du coca cola !). En matière de couleur, la moitié des vins tranquilles est jugée claire grâce à cet indice « a » mais il y a plus de vins foncés dans les vins tranquilles que dans les effervescents. Les pays producteurs de vins rosés sont classés par couleur dans le tableau 2, et quand on descend dans le tableau, on a des couleurs de plus en plus intenses. La France occupe une position intermédiaire, elle produit
11
n Tableau 2. Résultats de l’analyse de variance (test des étendues multiples, 95% LSD) pour la couleur rouge (a*) des 1190 vins rosés du monde analysés en 2004 et 2005. des rosés moyennement colorés. Tous les vins qui sont au dessus, proviennent des vignobles septentrionaux (Slovaquie, Allemagne, Suisse, …). Dans le bas du tableau, il y a des vignobles plus méridionaux qui donnent des rosés plus colorés (Chypre, Espagne, Grèce …). Il existe un véritable gradient de couleur au niveau mondial sur les vins rosés. Ceci est sans doute lié à la maturité : plus la maturité est importante et plus on a de couleur. Pour les vins rosés français (tableau 3), les deux régions les plus « pâles » sont la Champagne et la Provence et puis on va monter progressivement en couleur dans des régions comme Bordeaux et le Sud Ouest. Lorsque on répartit la couleur de ces vins rosés français sur une carte de France (figure 4), on s’aperçoit qu’on suit un grand S avec une couleur croissante depuis le Nord Est, la Champagne en passant par le Val de Loire, le Centre, la Vallée du Rhône, le Languedoc, Bordeaux, le Sud Ouest et on remonte vers les Clairets de Bordeaux. La seule région qui échappe à cette progression de couleur, est la Provence où, malgré des cépages et des conditions de maturité à peu près identiques à celles de la Vallée du Rhône et du Languedoc, existe une politique volontariste de couleur pâle en maîtrisant notamment les extractions et les macérations. En associant couleur et teneur en sucre, les grands cas de figures des rosés tranquilles occupent toutes les cases du tableau 1. Des vins rosés de diverses origines sont dispersés un peu partout dans ce tableau en fonction de la couleur et du sucre. Des vins tranquilles, secs et peu colorés : par exemple un Merlot qui vient de Hongrie et correspond à ce cahier des charges. On a bien
PAYS Grande Bretagne Allemagne Suisse Uruguay Slovaquie Serbie Autriche Japon Hongrie Luxembourg Etats-Unis Turquie Maroc France Liban Tunisie Macédoine Canada Nouvelle Zélande Chili Afrique du sud Portugal Bulgarie Australie Italie Chypre Espagne Grèce
Effectif
Moyenne
Groupes homogènes
1 13 20 2 1 1 15 1 8 7 3 2 1 915 3 3 1 2 2 5 6 13 2 9 56 5 78 14
1,77 2,89 3,31 5,16 5,33 5,58 6,37 6,46 6,58 6,79 7,44 8,11 8,46 8,81 9,00 9,25 9,83 10,02 12,05 12,57 12,74 13,41 13,81 15,05 17,02 17,81 20,03 22,30
XXX X X XXX XXXXX XXXXX XX XXXXX XX XX XXX XXXXX XXXXXX XX XXXX XXXXX XXXXXXX XXXXX XXXXXX XXXX XXXX XXX XXXXXX XXX X XXXX XX X
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ROSe
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Richesse et diversité des vins Rosés
Composition, élaboration, mise en valeur
entendu, quelques vins de Provence et notamment de Côtes de Provence bien connus dans ce type de production. Ces vins issus de Grenache, Cinsaut et Syrah sont vinifiés très souvent avec des pressurages directs qui permettent d’obtenir des couleurs aussi peu importantes. La montée en gamme de couleur se retrouve dans les Tavel , vins aux belles couleurs, rubis fraise qui sont obtenues grâce à des maturités particulièrement avancées, grâce également à des macérations pelliculaires souvent d’une nuit favorisant l’extraction de cette couleur plus soutenue. On monte encore en gamme de couleur avec ce vin rosé de Merlot venant du « Pénédes » qui est particulièrement coloré et qui revendique sa couleur intense. Chez les demi sec à la teneur en sucre plus éle-
vée, on va trouver par exemple ce rosé de « Kavaklidere » en Turquie, obtenu avec un cépage « le çalkarasi » qui est jugé peu coloré et qui nécessite une macération pelliculaire de 24 heures pour arriver à une couleur rosée suffisante. Pour continuer notre voyage autour du monde, passons en Australie avec un vin rosé tranquille moyennement coloré et demi sec. Cette Syrah venant d’Australie méridionale a été obtenue par des vendanges de nuit avec une macéra tion pelliculaire de quelques heures. Encore plus foncé, on trouve à nouveau une Syrah en Vin de Pays d’Oc qui affiche 6 g par litre de sucre, ajouté par édulcoration et obtenu avec 70 % de saignée et 30 % de pressurage direct. Encore plus sucré, le fameux Cabernet d’Anjou qui est obtenu à partir de Cabernet Sauvignon et de Cabernet Franc et qui doit présenter un
13
sucre résiduel minimum de 10 g par litre. Un demi doux moyennement coloré, le célèbre Mateus au Portugal obtenu à partir de cépages portugais qui sont vinifiés en blanc et qui titre 15 g de sucre par litre. Toujours au Portugal, nous avons le vin le plus sucré que l’on puisse trouver, qui est le premier Porto rosé ; vinifié comme un Porto Rubis, avec des cépages traditionnels de Porto, il affiche par mutage à l’alcool neutre 100 g par litre de sucre. Concernant le packaging, la bouteille en verre blanc, malgré son empreinte écologique, est toujours au sommet puisque 94 % des rosés sont mis en bouteille en verre blanc et la forme de la bouteille bordelaise est rencontrée dans 70% des cas. Donc la bordelaise blanche est encore la valeur de référence pour les rosés dans le monde. En terme de bouchons, des évolutions ont été notées au cours des dernières années. En effet, le liège est passé de 70% à 50% en 4 ans. C’est donc un repli assez net qu’on sentait et qui est confirmé par des chiffres objectifs montrant cette décroissance du liège au profit des bouchons synthétiques en particulier ; ceux-ci sont passés de 26% à 43% dans notre collection et c’est donc un indicateur intéressant. La capsule à vis, quant à elle, fait son bonhomme de chemin petit à petit. En ce qui concerne les formes de bouteilles, on trouve des innovations intéressantes et variées : cette bouteille trapue par exemple, de Côtes de Provence est très jolie, très esthétique ou encore
cette bouteille en forme de corps humain. Notre fameuse flûte à corset, une bouteille qui a été élaborée sans doute pour son ergonomie, elle s’appelle « hand » et doit sans doute être facile à prendre en main. Voici également ce flacon de parfum qu’on voit de plus en plus, qui se développe et qui nous vient ici de la cave de Fronton. D’autres types de bouteilles traditionnelles également très esthétiques permettent de mettre en valeur le vin rosé. En matière d’étiquettes, l’imagination est fertile : le côté fleuri par exemple sur ce Bordeaux ou encore la personnalisation sous la forme d’un masque pour ce vin du pays d’Oc. Des couleurs aussi que l’on ose sur le vin rosé et que l’on n’ose pas forcement sur le vin rouge comme ce vert un peu « flashy » à la fois sur le bouchon et sur l’étiquette. On note qu’on trouve de plus en plus de bouchons de couleurs : la proportion de bouchons de couleurs roses, vertes ou bleues est en augmentation assez nette. Voici aussi une sérigraphie très élégante avec un choix de bouchage à vis dans ce cas là. J’espère qu’en ayant fait ce petit tour du monde des vins rosés, de façon non exhaustive, j’ai pu vous démontrer la richesse et la diversité qu’on a pu rencontrer et qui est un atout très fort pour la culture et l’identité du vin rosé.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008 Flux du rosé dans le monde
Production, consommation Avec Michel COUDERC, nous avons essayé de trouver des statistiques fiables sur le marché du Rosé. Je commencerai mon exposé en rappelant ce que je dis d’habitude sur les statistiques : elles sont le degré le plus élaboré du mensonge ! Vous allez en avoir une illustration immédiate compte tenu de l’énorme difficulté qu’il y a à récolter des statistiques fiables sur un produit qui n’a pas de définition internationale. Je vais d’abord resituer les vins rosés dans le contexte international. Je vais donc m’attarder sur les 3 types de graphique que vous allez voir en permanence sans commenter tous les chiffres ce qui nous amènerait trop loin. Vous avez donc un graphique ( tableau 1) qui représente l’évolution quinquennale sur les 4 dernières périodes de 5 ans complètes (milieu des
patrick aigrain Viniflhor, OIV
évolution du vignoble mondial (y.c vignes non encore en production)
4,3% 0,7%
16,1%
64,4%
000 800 600 400 200 000 800 600 400 200 000
P r P ro 2 0 0 é v v. 5 2 is io 0 0 6 n 20 07
04
03
20
20
01
02
20
00
20
20
98
19
97
19
19
96
95 19
19
5
0 -0
-0
01
96
0 -9
91
86
5
7910
-9
1000 ha
Tableau 1
58,1%
4,1% 1,4%
18,8%
9 8 8 8 8 8 7 7 7 7 7
5,0% 2,6%
21,6%
69,0%
11,3%
Moy. 5 ans Années
12,7%
99
9,9%
Europe Asie Amérique Afrique Océanie
années 80 jusque milieu de la décennie 2000) ; ceci permet d’avoir des évolutions en tendance. Puis vous avez les 10, 12 dernières années qui sont présentées en courbes ( tableau 1) et enfin les répartitions continentales sous forme de bulles ( tableau 1 ). Vous pouvez constater que l’Europe représentait 69% du vignoble mondial alors que maintenant elle n’en représente plus que 58,1%. Ceci entre la fin de la décennie 80 et 2007. Le devenir mondial qui s’est stabilisé : on a fortement décapitalisé en Europe et dans les pays de l’Hémisphère Sud ; on a commencé à planter et il y a eu un relais par la Chine. On voit dans le graphique du haut ( tableau 2) la part de l’encépagement dans le monde et on constate que tous les pays ne sont pas équivalents. SI l’on avait mis ce graphique en diachronique, nous verrions des pays qui ont augmenté fortement leur part de cépages noirs ces dernières années, notamment l’Afrique du Sud ainsi que la part des cépages internationaux. Les vins rosés comme beaucoup d’autres vins sont des vins qui se présentent au consommateur final avec l’indication du cépage : 4 cépages rouges que sont Cabernet, Pinot, Syrah, Merlot et 2 cépages blancs que sont Chardonay et Sauvignon. Il y a une prépondérance des cépages internationaux dans les vignobles dits du « nouveau monde ». Cependant, la France est la mieux placée (et c’est normal) puisqu’ils viennent en partie de chez nous. Entrant dans le développement récent des principaux vignobles la courbe concernant la Chine est intéressante. En termes statistiques, la Chine (premier producteur et consommateur mondial de raisin de table) possède 270 à 280 mille hectares destinés à la production de raisin de table
15
L’encépagement : part des cépges rouges et internationaux et … dorénavant 480 mille hectares de vignoble au total.. On oublie souvent de parler du vignoble asiatique. Le vignoble Turc représente environ 530 mille hectares, ce qui est relativement important. Le vignoble Iranien de 330 mille hectares est spécialisé dans la production de raisin de table et de raisins secs..
100%
90% 78%
80%
78%
Part de l'encépagement 76%
76%
70%
64%
62%
62%
rouge en 2006
59%
60%
50%
47% 37%
40%
32%
25%
20%
7 1%
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Part des cépages internationaux en 2006 6 5%
62 %
Cépages internationaux : Chardonnay, Sauvignon BL, Merlot, Syrah, Cabernet -sauvignon, Pinot noir
60 %
46 % 40 %
33 % 21 %
Dire cela alors qu’on parle du vin Rosé peut sembler inintéressant mais il n’y a guère qu’en Europe qu’on prédestine les vignobles en fonction de leur destination finale et en plus cela va disparaître de la réglementation communautaire très prochainement. Ainsi, des raisins comme les sultanines, dans beaucoup de pays du monde, peuvent avoir une triple fin : raisin sec, consommé en frais ou vinifié. Donc, les vignobles orientés actuellement raisins de table ou raisins secs peuvent se transférer relativement rapidement sur le marché du vin ; c’est une question d’opportunité de marché. Il faut donc bien intégrer cette réserve de développement pour la production de vin lorsqu’on parle des potentiels de production des pays en présence. La compétitivité est un élément important lorsqu’on parle du Rosé. Nous sommes sur des structures viticoles qui n’ont rien à voir avec nos concurrents de l’hémisphère sud, car nous sommes sur des ateliers viticoles qui sont largement plus faibles que ceux de nos concurrents en terme de taille. Or la viticulture depuis le passage à la machine à vendanger est devenue une culture à coûts fixes. C’est-à-dire que maintenant il n’y a
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79 %
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Les prévisions 2007 et les tendances très récentes sur l’évolution du vignoble (en bleu en décroissance, en vert stable et en jaune en croissance), montrent les tailles respectives de ces vignobles ; les vignobles de l’Asie sont principalement notés dans les productions de raisin de table et de raisin sec.
15 %
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Tableau 2
presque plus de coûts variables : que vous produisiez 25 Hectolitres par Hectare ou 70, 1 heure de machine à vendanger c’est 1 heure de machine à vendanger. Ceci était le principal poste variable de coût donc globalement à présent le seul facteur diviseur de coûts c’est le rendement et l’autre facteur c’est que les coûts fixes sont plus facilement amortissables sur les grandes structures que sur les petites. Production globale de raisin. Les rendements et les productivités des vignobles de raisins de table et de raisins secs sont généralement supérieurs à celles des vignobles de cuve. L’Asie faisant 26 % de la production globale de raisins toutes destinations confondues, la part de l’Europe diminue, notamment parce qu’elle diminue dans le vignoble de cuve mais aussi parce que la producti-
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RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Flux du rosé dans le monde
Production, consommation
vité moyenne des vignobles de cuve est inférieure à celle des vignobles à d’autres destination. Les productions sont tout de même croissantes. Production totale des principaux pays. Le principal producteur de raisin dans le monde à toute destinations confondues c’est l’Italie puisqu’elle fait une production de raisins destinés à la cuve qui est à peu près similaire à la France mais est, en plus, le premier producteur européen de raisin de table. Ensuite vient la France, la Chine, l’Espagne, les USA, ensuite un trou, Turquie, Argentine, Iran, Chili, Inde dont on ne parle jamais, et enfin l’Egypte qui est le premier producteur de raisin de table d’Afrique qui est consommé quasiment entièrement sur place. L’évolution du rendement viticole mondial moyen augmente ; la productivité est un facteur de compétitivité (rendement est un terme qui n’est pas apprécié dans le secteur viticole).
production mondiale de vins (hors jus et moûts)
3,0% 1,6% 16,0%
17,0%
5,0%
4,2%
71,6%
5,1%
300 280 260
266,3
240
0 . 5 c a 2 00 st 6 20 07
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220
86
Raisins secs. Surtout Turquie et les USA. Ce dernier est un producteur très important de raisins secs dans le monde car les américains en mangent beaucoup. Ensuite viennent d’autres pays et l’Iran. Le vin. Clairement, la production de vin est principalement localisée sur le continent européen, largement devant le continent américain même si la part de l’Europe a fortement diminuée. On est passé de 78% en fin de décennie 80 à 68%. Nous avons donc perdu 10 points en 20 ans. La part du continent américain a augmenté modérément et la part de l’Océanie est passée de 1,6 à 4,2% ; la part de l’Asie est passée de 1,5 à 5%. France et Italie puis Espagne sont les premiers producteurs mondiaux ; ensuite viennent les USA, l’Argentine et l’Australie qui connaît des difficultés ces dernières années à cause de la sécheresse. D’ailleurs la gestion des ressources en eau est un vrai problème particulièrement quand on parle de productivité.
67,6%
320
91
1 000 000 Hl
Moy. 5 ans Années
4,3% 18,8%
3,4% 3,1%
78,0%
19
1,5%
Europe Asia America Africa Oceania
La part de la production mondiale destinée au frais. Le premier producteur mondial de « raisin de table » est la Chine suivie de l’Iran, l’Inde, l’Italie, l’Egypte, les USA et le Chili qui est le 1er exportateur mondial globalement de fruits et plus particulièrement de raisin de table.
( tableau 1)
Production de vin hors jus et moût. L’Italie est la France font partie des principaux pays, ils sont au coude à coude, ensuite vient l’Espagne, puis les USA qui produisent régulièrement 20 millions d’Hectolitres de vin ainsi que 7 millions d’hectolitres de moût. De même les Argentins produisent 15 millions d’Hectos de vins et 7 millions d’ hectos de moût. Le mode de régularisation du marché en Europe est de distiller le vin qu’on ne vend pas. Nous sommes donc dans une régularisation ex post alors que sur le continent américain, la régularisation est ex ante : c’est-à-dire qu’on conserve les moûts qu’on ne veut pas transformer en
17
vin car on craint de ne pas les vendre et on les réutilise après dans l’enrichissement. Comme il n’y a pas de système d’intervention publique sur les moûts, les moûts concentrés sont généralement moins concentrés que ceux de chez nous ; quand on les réutilise, cela augmente les volumes. ( Tableau 1) Les dernières prévisions de l’hémisphère sud. Ce sera moins catastrophique en Australie que ce que l’on craignait, la production est un petit peu plus haute c’est-à-dire environ 11, 3 millions d’hectolitres et donc inférieure à leur potentiel réel qui est d’environ 15 millions à cause de la sécheresse. Vous voyez la croissance du Chili, de l’Afrique du sud (notamment ces dernières années). Le paradis sur terre, c’est la Nouvelle Zélande car sa superficie croît, la production croît, la consommation croît et les exportations croissent.
car cela a une grande incidence en matière de compétitivité. En 2002, le graphique ( ) était le premier gros mensonge sur la production de rosé ; donc nous avons tenté de renouveler l’expérience en 2006. Voici une répartition continentale de la production de rosé dans le monde. Globalement, on voit que cette distribution est très déformée en .faveur de l’Europe et du continent américain et notamment nord-américain. Le premier pro-
Les boissons commerciales consommées en France Source : WDT 2003 - Commission for Distilled Spirits
132
143 75
Boissons sans alcool
104 124
241
Boissons alcoolisées
99
26%
29%
31% 15%
Boissons chaudes Boissons lactées
63
La productivité des vignobles de cuve. La comparaison est assez compliquée car il ne faut jamais oublier que le principal réflexe, c’est de prendre la statistique de la production mondiale de vin et de diviser par la superficie. Les résultats ainsi obtenus ne sont pas exacts car si l’on regarde les vignobles Chiliens ou Américains, on se rend compte qu’il n’y a environ que 60% du vignoble qui est destiné à la cuve. En Californie, sur 380 milles hectares de vignes, il y en a 100 milles qui servent à faire des raisins secs et 70 milles à faire des raisins de table ; ce qui veut dire qu’il reste un peu moins de 230 milles hectares de vignoble de cuve. C’est-à-dire que le Languedoc Roussillon par exemple, fait la même taille que le vignoble américain en cuve. Donc lorsqu’on tient compte de ce calcul là, on peut comparer les productivités de vignoble de cuve. En Australie, la différence de productivité (rendement moyen) est nette entre 2002-2004 et 2004-2006. La Nouvelle Zélande est un pays de « l’ancien monde » en matière de productivité. Il y a en moyenne en Australie, 102 hectolitres par hectare et 120 aux Etats-Unis. Quand on a des rendements qui vont de 1 à 2 en moyenne, il faut s’en préoccuper
En 2000 558 litres/an/capita dont .....
En 1986 423 litres/an/capita dont .....
25%
( tableau 2)
ducteur mondial de rosé reste la France avec 6 millions d’hectolitres en 2006 en moyenne répartis entre vins de pays, AOC et vins de table (Le système d’évaluation en France est relativement fiable car on a les agréments sur les indications géographiques des produits) ; le 2ème producteur, est l’Italie. Vient ensuite l’Espagne au coude à coude avec les Etats-Unis. Nous sommes donc dans un marché qui progresse puisque lorsqu’on l’avait évalué en 2002, nous étions à peu près à 20 millions d’hectolitres alors que maintenant nous sommes à 21.5 par défaut car
13%
18% 43%
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Flux du rosé dans le monde
Production, consommation
il nous manque des pays où nous savons qu’il y a une production de rosé (le marché Russe par exemple où nous savons qu’il y a une production mais nous ne savons pas de combien). La part estimée du vin rosé dans les productions nationales de certains pays est assez amusante. En Uruguay, par exemple, plus de la moitié de la production est en rosé, en Tunisie plus de 40% alors qu’en France elle est d’environ 11%.. Boissons consommées. Si le secteur viticole continu à penser qu’il va tout comprendre de l’évolution de la consommation du vin en ne regardant que le vin, il est inutile de continuer… Il faut absolument resituer la consommation de vin dans la consommation de boisson car la première boisson d’accompagnement à table en France, est devenue l’eau en bouteille. Et il faut admettre aussi que le coca-cola est devenu un concurrent direct du vin. En 14 ans, les boissons sans alcool ont largement augmenté sachant que le marché du jus de fruit en France
Consommation mondiale de vins Europe Asie Amérique Afrique Océanie
2,5% 1,6% 20,2%
19,7%
67,3%
69,0%
7,2%
6,6%
Moy. 5ans Années 245 240 235 230 225 220 215 210
P 2 F o r o v 00 5 re . 2 c a 00 st 6 20 07
04
03
20
20
02
01
20
20
00
99
19
20
97
98
19
96
19
95 19
19
5 -0
01
5
0 -0
96
86
91
-9
0
240,6
-9
1 000 000 Hl
2,3%
2,8% 1,9%
73,8%
1,9%
( tableau 3 )
2,6% 20,7%
a été multiplié par 14 en volume. Les boissons alcoolisées quant à elles ont fortement reculé et, en France, la baisse de ces boissons a été uniquement portée par le vin. Dans les pays traditionnellement producteurs et consommateurs de vins, la part de vin dans la ratio d’alcool diminue alors que dans les pays brassicoles c’est le phénomène inverse, la part de vin dans la consommation d’alcool augmente : En Allemagne et dans les pays d’Europe centrale par exemple, leur ratio d’alcool est depuis 50 ans toujours 50% de bière, 20 à 30% de vin et un peu moins en matière de spiritueux. Est-ce qu’on converge vers ce modèle là ? Ce n’est pas du tout sûr, notamment dans les pays « en développement » car le vin est une boisson chère, une boisson importée. Le mode d’internationalisation de la consommation de vin dans le monde, est d’aller faire son vin chez soi et d’aller le transporter auprès des consommateurs alors que les brasseurs, eux, font produire les bières nationales sous licence dans les différents pays de consommation. Le vin dans la ration d’alcool dans les différents pays dans le monde est donc très vague. En Chine par exemple, on consomme 10cl de vin par chinois. Le principal concurrent du vin là bas c’est la bière avec 16% de la ration d’alcool. ( Tableau 2) Consommation mondiale du vin. La bonne nouvelle c’est qu’elle augmente de nouveau depuis une dizaine d’années à un rythme relativement lent : 1.5 à 2 millions d’hectolitres par an. La part de l’Europe diminue mais moins que la part dans la production puisque l’Europe du nord est importatrice. La consommation du vin baisse dans les pays traditionnellement consommateurs mais elle augmente ailleurs et notamment aux USA où on est à environ 27 millions d’hectolitres ainsi qu’en Russie. En définitive, cela reste un marché géographiquement très concentré où 7 pays représentent 60% de la consommation mondiale. Quand on connaît la politique de santé publique, on est à peu près certain du développement du marché
19
Europe Asie Amérique Afrique Océanie
0,9% 2,5% 1,5% 0,6%
94,6%
8,7%
9,5%
3,9%
70,8%
15,4%
2,5% 2,9% 0,6%
85,3% 0,4%
95 85 75
91,4
65 55
( tableau 4)
-L’autre modèle. Ce sont les gens qui vendent le vin et qui le font. Ils sont soumis à « l’asymétrie de l’information » c’est-à-dire qu’ils ont besoin de raisin pour produire le vin mais s’ils n’en produisent pas une partie eux même, ils ne savent pas ce qu’ils achètent. Ils sont donc obligés d’intégrer une partie de leur amont pour savoir la qualité du raisin qu’ils achètent. L’Espagne est un pays du nouveau monde viticole avec cette organisation là. Les performances de l’Espagne à l’exportation sont similaires à celle des Australiens. Nous souffrons donc d’un problème de coordination entre notre amont et notre aval. Nous souffrons aussi d’un problème de localisation de la valeur ajoutée. Globalement, nous sommes arrivés à un stade où si nous n’arrivons pas à rajouter de la valeur ajoutée à l’aval, nous allons nous retrouver en difficulté : en effet, si l’on veut être capable de mobiliser de l’argent en aval, il faut qu’on en gagne en amont, notamment en divisant les coûts de production à l’hectolitre.
04
05 re v. 2 c a 00 st 6 20 07 Fo
Moy. 5 ans Années
P
ro
20
03
20
02
20
01
20
00
20
20
98
99
19
97
19
19
96
95 19
19
5 -0
01
5
0 -0
-9
96
86
-9
0
45 35
91
L’exportation mondiale de vins se développe très vite. L’Europe dans ce domaine perd beaucoup de part de marché. A la fin des années 80, les européens assuraient 95% des exportations mondiales contre 70% maintenant. Ces performances à l’exportation sont très liées au mode d’organisation des filières. ( tableau 4) -La première. Dans un pays traditionnel, les producteurs de raisin élaborent le vin. Ensuite se trouve un négoce, coincé entre une grande distribution qui se concentre et les producteurs de raisin vinificateurs que se soit en direct ou coopératif. Ce négoce qui, dans un système traditionnel, est un négoce de place qui est donc coincé entre une grande distribution et des producteurs qui tirent parti de la valeur de l’indication géographique. Donc, sauf quand on génère une valeur ajoutée globale très importante, il y a une grande difficulté à localiser de la valeur ajoutée à ce maillon là de la filière. Quand on génère assez peu de valeur ajoutée globale, il y a une partie qui va être rapatriée à l’amont dans un pays traditionnel et une partie qui va être captée par l’aval compte tenu de son pouvoir de négociation par la distribution. En plus elle va dans la valeur du patrimoine foncier et c’est donc la caricature même de l’expression : « un agriculteur vit pauvre et meurt riche » parce qu’il paie toute sa vie des emprunts pour la terre et autre et meurt avec un patrimoine foncier important. Par contre ça représente un atout majeur car les actionnaires ne réclament jamais leurs dus. Donc quand le marché va mal, ils sont hyper résistants.
Exportations mondiales de vins
1 000 000 Hl
viti-vinicole dans le monde qui se fera plus par l’augmentation du nombre de consommateurs que par l’accroissement de la consommation d’alcool des individus ( sauf problèmes sociaux que l’on ne peu pas anticiper). En matière de consommation, l’Europe et les Etats-Unis sont sur représentés : 9% de la consommation de vin toutes couleurs. En France par exemple, nous sommes à environ 20%. De plus la France produit 6 millions d’hectolitres de Rosé et en consomme plus de 7 millions car nous sommes aussi un pays importateur net de Rosé. ( tableau 3)
RencontreS internationalES du
ROSe
2008 Données de cadrage sur la consoMmation
du vin rosé dans divers pays Le but de ma présentation aujourd’hui est
sie au mois de septembre qui nous aura pris 2
de donner des estimations de la consomma-
ans et on veut aussi lancer notre omnibus en
tion de vin rosé sur les principaux marchés de
France au mois de septembre.
l’exportation pour les vins français en utilisant une autre mesure que les mesures de pro-
Toutes les enquêtes consommateurs présen-
duction ou les mesures agrégées. Production
tées aujourd’hui sur 13 pays, correspondent ( à
ou consommation, ce sont des données de
part le Brésil que nous avons fait en mars) à des
consommateurs. Ce que vous allez voir dans
données que nous avons collectées en mars et
le contexte de cette présentation se sont des
en avril 2008. La plupart de ces enquêtes sont
données déclaratives c’est-à-dire ce que les
faites par le biais de l’Internet ce qui ne pose
consommateurs disent qu’ils achètent et par-
pas de problèmes dans certains pays puisque
ticulièrement en vins Rosés.
la pénétration d’Internet permet tout a fait de faire ce genre de choses. Tous les échantillons
Jean-Philippe PERROUTY Senior Research Manager, Wine Intelligence
Je pense qu’il y a deux objectifs principaux à
sont en général de 1000 consommateurs,
cette présentation. D’abord donner une quan-
2000 dans le cas de l’Irlande, des Pays Bas, de
tification d’ensemble de la consommation du
la Suède et des Etats-Unis. Toutes ces données
vin Rosé sur les principaux marchés de l’export
sont représentatives des vues, des opinions et
pour le vin et ensuite (décision prise avec Mi-
des comportements déclarés des consomma-
chel Couderc du CIVP) sur le marketing des
teurs réguliers de vin dans ces pays. Régulier
vins rosés, de son prix c’est-à-dire : à combien
veut dire qu’on interroge des consommateurs
est-ce qu’on peut le vendre et quels sont les
qui boivent du vins au moins une fois par mois
problèmes posés par les vin rosés relativement
pour la simple et bonne raison qu’on se méfie
aux vins rouges et aux vins blancs quand on
un peu des attitudes et des opinions déclarées
parle de prix ? Et quand je parle de prix dans
des consommateurs qui boivent du vin 2 ou
ce contexte, ce sont des prix consommateurs
3 fois par an d’autant plus que ces consom-
sur le rayon vins. Qu’est-ce les consommateurs
mateurs peu réguliers représentent une part
sont prêts à payer et qu’est-ce qu’ils sont prêts
extrêmement faible de la consommation.
à ne pas payer ? Le premier objectif de ce travail était de donner Nous sommes une société d’étude de marché
une idée du nombre de consommateurs dans
et de conseils ; nous travaillons uniquement
le monde, de la pénétration du vin rosé sur les
pour la filière vin et nous présentons donc des
principaux marchés de l’export et surtout, une
données d’enquêtes collectées dans les 13
fois que les consommateurs boivent du rosé,
pays qui sont affichées ici (figure ; côté droit).
combien en boivent-ils ? C’est donc la part du
Nous lançons une grosse enquête de consom-
vin rosé par rapport à l’ensemble des vins tran-
mateurs, un omnibus tous les 6 mois en Rus-
quilles bus par ces consommateurs.
21
mécanique de la consommation des vins rosés vue d’ensemble pour les principaux marchés d’éxportation
Rosé wine Intensity of consumption (% of rosÄ wines in the overall still wine repertoire)
Rosé wines consumption patterns across 12 countries 23% 21%
USA UK
19%
NL GER
17%
IRE
SWI BEL
15% CA
13% 11% 9%
NOR
FIN SWE DNK
55%
60%
7% 5% 50%
65%
70%
75%
80%
85%
Rosé wines penetration (% of wine consumers drinking rosé wine) 11
Nous avons posé une question très simple « boi-
pendant, le Brésil déclare qu’ils sont 1/3 à boire
vent-ils du rouge, du blanc ou du rosé ? ». C’est
du vin rosé. Mais la seconde chose importante
donc bien une définition de consommateurs.
à retenir en ce qui concerne ce graphique, c’est
Ensuite dans une seconde question, on leur de-
que dans tous les pays d’exportation, plus de la
mandé d’estimer la proportion qu’ils boivent de
moitié souvent les 2/3 voire les ¾ des consom-
rosé, de rouge et de blanc. C’est à nouveau du
mateurs boivent du rosé. C’est-à-dire qu’une fois
déclaratif et c’est pour avoir une idée de la place
au moins dans l’année, ils achètent une bouteille
du rosé par rapport au rouge et au blanc. Pour
de rosé. La seconde question concerne la part du
la pénétration : s’ils répondaient 0% au rosé,
rosé « dans leur estomac »par rapport au rouge
ce sont des non consommateurs de rosé ; s’ils
et au blanc et c’est ce qu’on appelle l’intensité
répondaient quelque chose différent de 0%,
de consommation à savoir ce qu’ils déclarent
c’étaient des consommateurs de rosé. Tous les
être la part du rosé dans leur consommation
consommateurs de vin dans chaque pays, décla-
totale de vin tranquille. Nous avons ici plus de
rent boire de 0,5% à 1% de Rosé. C’est en Suis-
disparités notamment dans les pays où l’intensité
se que la pénétration est la plus forte, et tout en
de la consommation est la plus élevée comme les
bas nous avons le Brésil. Les bréziliens sont des
Pays Bas, le Royaume-Uni et les Etats-Unis (envi-
buveurs de vins importés ; nous n’avons donc pas
ron 20% de leur consommation concerne le vin
regardé la consommation domestique puisque
rosé). Généralement pour les pays scandinaves
nos clients sont essentiellement des entreprises
(Suède, Finlande, Danemark et Norvège) la péné-
exportatrices Nord Américaine, Européennes. On
tration est plus faible que dans les pays continen-
s’est intéressé aux vins importés des pays d’Amé-
taux Européens et Nord Américains, c’est-à-dire
rique du Nord, d’Europe, du Chili et de l’Argen-
que dans ces pays, lorsque les consommateurs
tine. Donc l’échantillon est un peu différent ; ce-
boivent du vin, ils en boivent assez peu.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Données de cadrage sur la consomation du vin rosé dans divers pays
En croisant les deux graphiques nous avons sur
sés. Dans ces pays scandinaves, on a un taux de
un axe horizontal la pénétration : par exemple,
croissance à 2 chiffres notamment en Norvège
nous avons à peu près les ¾ des consommateurs
et en Suède pour les vins rosés.
anglais qui déclarent consommer du rosé ce qui
En ce qui concerne la Suisse la catégorie Ro-
correspond à 1/5 environ des vins tranquilles. Sur
sés est souvent, dans les statistiques, agrégées
ce graphique on se rend compte aussi que dans
avec la catégorie Rouge. Si on regarde les
les pays scandinaves, il y a un gros potentiel de
stocks indigènes c’est-à-dire les stocks domes-
développement de vente de vins rosés : il y a
tiques de vins tranquilles, 7% sont constitués
une pénétration un peu plus faible qu’ailleurs
de rosés en décembre 2007 ; c’est à peu près
c’est-à-dire qu’on peu sûrement recruter de
la part de marché des vins rosés au Royaume-
nouveaux consommateurs pour la catégorie et
Uni et donc cela explique qu’on ait une grosse
surtout, il y a une « part d’estomac » extrême-
pénétration du vin rosé en Suisse.
ment faible dans ces pays si on compare avec les pays traditionnellement buveurs de vins ro-
Le Royaume-Uni et les Pays Bas sont des pays où la consommation de rosé a explosé durant ces 5 dernières années. On parle de taux de croissance annuel compris entre 20 et 40% selon les sources. On observe un lissage de la consommation de rosés tout au long de l’année au Royaume-Uni. Il y a toujours un pic l’été et à la Saint Valentin, mais on a de plus en plus de consommateurs qui boivent du rosé hors des périodes traditionnelles. Le rosé est donc maintenant rentré dans la culture et quand on parle de rosé dans ce pays, ce sont surtout des « blush wine » c’est-à-dire des vins très sucrés et généralement Californiens (environ 50% de la consommation). Entre 2006 et 2007, les données de panel nous dit que la moitié de la croissance du rosé correspondait à des vins Californiens. Et quand on creuse encore un peu, la croissance est essentiellement californienne avec deux marques principales: Galow, Blos-
USA: le prix maximum que les consommateurs USA : le prix maximum que les à consommateurs disent consentir payer pour un vin rosé / blush disent consentir à payer pour un vin rosé moindre queles pour des vins rouge ou blanc Blushest est moindre que pour vins rouge ou blanc What is the maximum price you would pay... Base: US regular wine drinkers who buy named colour $20.00
Average maximum prices
$19.00 $18.00
$17.41 $16.20
$17.00 $16.00 $15.00
$14.06
$13.85
Blush wine (n=1,635)
Rosé wine (n=1,560)
$14.00 $13.00 $12.00 $11.00 $10.00
Red wine (n=1,902) Statistically
White wine (n=1,903) significantly
higher than rosé wine (95% confidence interval)
Source: Wine Intelligence, Vinitrac®
C IV P s tudy, March 2 008, do not
US, March 2008, n=2,021 US regular Royaume-uni : résultats quotesimilaires or us e without C aux IV P états-unis
wine drinkers
a uthoris ation
What is the maximum price you would pay for a... Base: UK regular wine drinkers who drink named colour* Average maximum prices £9.99 £8.99
£8.81
£8.14
£7.99
£7.33
£6.99 £5.99 £4.99 £3.99
Red wine (n=835) Statistically
White wine (n=909)
significantly
RosÄ wine (n=680)
higher than rosé wine (95% confidence interval)
*Note: those who answered "I don't know " are not included in the base C IV P s tudy, March 2 007, do not
Source: Wine Intelligence, Vinitrac®
UK, Marchde 2007, UKaux regular som Hill et le reste : Sutter home et Echo Et C IVmillions quote or usfalls. e without P de consommateurs vinsn=1,033 rosés (40 a uthoris ation
wine drinkers
ce rosé là, c’est du Blush. Mais on a un marché
Etats-Unis et 20 au Royaume-Uni) mais essen-
mature, une grosse pénétration et il va bien fal-
tiellement du Blush Wine plus attractif et plu-
loir leur proposer quelque chose d’autre un jour.
tôt en entrée voire en milieu de gamme. Alors que faire ? Plusieurs stratégies possibles : offrir
Aux Etats-Unis, c’est un peu différent. Les
quelque chose de différent ? Une offre plus
consommateurs sont culturellement de gros
« premium » en Rosé ? Autrement dit, peut on
buveurs de Rosé , de Blush au goût attrayant,
inciter les consommateurs à dépenser un peu
et ceci depuis plus de 20 ans. Mais c’est un pays
plus sur une bouteille de Rosé davantage « qua-
très intéressant dans la mesure où il s’agit d’un
litatif » ?. Alors on a creusé la question du prix
pays d’exportation pour les vins Français en par-
au Royaume-Uni et aux Etats-Unis. La question
ticulier avec potentiellement beaucoup de va-
étant qu’est-ce qui pousse un consommateur à
leur et pas uniquement des volumes.
payer plus cher sa bouteille de vin ?
On sait que la moitié des consommateurs dans
D’abord le contexte : plutôt en famille ou seul,
ces pays là boivent du Rosé, ils représentent 60
hors repas et avec repas et des occasions plus
23
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Données de cadrage sur la consomation du vin rosé dans divers pays formelles, plus sociales, plus améliorées avec
Pour essayer de contrer ce problème, il faut
ou sans nourriture. Et ce dont on s’aperçoit
trouver des moyens d’inciter le consommateur
aux Etats-Unis, c’est qu’en fait la barre des
à dépenser plus. On s’est intéressé à la couleur.
10 dollars est passée quand on a des amis à
Nous avons montré un dégradé de 5 couleurs
la maison et qu’on veut faire plaisir sinon on
de vin rosé et nous avons posé la question
tourne autour des 6 ou 7 dollars. En conclu-
suivante aux consommateurs : à quel prix ils
sion, si on veut développer une offre de Rosé
s’attendraient à voir ce vin sur un rayon de
plus premium, il va falloir pénétrer ces occa-
supermarché. C’est donc un prix attendu (s’ils
sions de consommation plus sociales et plus
s’attendent à un prix de 3 euros, ils ne seront
associées à de la nourriture, plus formelles où
pas contents de le voir affiché à 10 euros par
le rouge tient le haut du pavé aujourd’hui.
exemple). C’est donc un des éléments qui peut
Ensuite on a posé la question suivante : Quel
éventuellement pousser les consommateurs à
est le prix maximum que vous êtes prêt à
dépenser un peu plus (ou moins). Suivant la
payer pour un vin rouge, un vin blanc et pour
tranche de prix qu’ils ont coché, nous avons
les Etats-Unis on a séparé Blush Wine et Rosé
fait une moyenne et le résultat est le suivant :
Wine ? En fait ils veulent payer moins cher le
aux Etats-Unis le prix peut varier de 2 dollars
« pink » que le rouge ou le blanc.
suivant la couleur du vin rosé et au Royaume-
Il va donc être assez difficile d’expliquer au
Uni où il est difficile de dépasser les 5 livres
consommateur pourquoi il devra payer son
pour une bouteille, la couleur peut permettre
Rosé aussi cher que le rouge. En moyenne, le
de passer cette barre « psychologique » en fai-
consommateur anglais est prêt à aller jusqu’à
sant varier le prix d’environ 1 livre sterling.
8 ou 9 livres sterling pour du rouge et pour le rosé environ 1 ou 1,5 livre de moins que le rouge et 1 livre de moins que le blanc.
intensité de la couleur des vins rosés ? q’avons nous demandé ?
Looking at these wines, please tell us how much you would expect their price to be in a supermarket or high street off license?
Da rk ++
Da rk +
Neutral P ink
L ight +
L ight ++
25
Conclusion En conclusion, ces données indiquent que plus de la moitié des consommateurs de vin dans les pays où nous avons enquêté boivent du Rosé, avec certains pays dont le potentiel de développement est très élevé. Il y a des nouveaux consommateurs à recruter et des part de marché à prendre sur le rouge et le blanc notamment les pays Scandinave. Il y a d’autres marchés : les Etats-Unis et le Royaume-Uni qui sont des marchés plus matures où le Rosé est dans les mœurs, historiquement aux Etats-Unis et plus récemment au Royaume-Uni. Il y a quand même une forte pénétration du Rosé car environ 1/5 de ce que l’on boit est constitué de Rosé. Dans ces pays là si on veut vendre du Rosé, il va falloir leur proposer quelque chose de différent. Stratégie de différenciation notamment des Blush qui sont plutôt abordables en terme de prix. Une des pistes possible est de développer une offre premium sur les vins rosés et leur faire découvrir quelque chose de plus évolué, de plus cher. Il va donc falloir pénétrer des espaces de consommation qui ne sont pas traditionnellement associés au Rosé plus formel, plus social. Il va falloir aussi cibler les nouveaux consommateurs car tout le monde ne boira pas cette offre plus premium, notamment au Royaume-Uni où le potentiel est estimé à 13 millions de consommateurs ; ce sont des segments de consommateurs plutôt impliqués qui sont prêt à dépenser un peu plus sur une bouteille de vin. Il y a aussi toute une tranche qui ne va pas acheter car une bonne partie des consommateurs est satisfaite de l’offre des Etats-Unis, du Chili ou du vin Français, peu chère du bas du rayon. Aux Etats-Unis, on estime qu’il y a une potentiel d’environ 30 millions de consommateurs: consommateurs impliqués qui appartiennent généralement à la génération milléniale, et aussi les consommateurs « premium », c’est-à-dire des gens plus attachés aux marques, vivant souvent dans des villes et qui regardent le rapport qualité/prix. Donc cibler les bonnes occasions ou les bons consommateurs, éventuellement par la couleur, mais ce ne sont évidemment pas les seules pistes de développement possible pour une offre Rosé. Je pense notamment aux extensions de marque horizontales et ce ne sera pas une surprise puisque c’est le sujet de la présentation suivante. Il s’agit des champagnes où il y a une innovation majeure : ils sont su surfer sur cette vague Rosé et ceci se traduit par un développement spectaculaire, apparemment, des ventes de Champagne Rosé. Les Champagnes étaient des vins tranquilles bus par des aristocrates et des rois et puis il y a eu un accident au cours du transport : les aristocrates anglais ont adorés le mousseux qui s’est développé dans la bouteille et ils se sont mis à faire des vins pétillants mousseux avec le succès qu’on lui connaît. Le Champagne est devenue la région de France la plus connue dans le monde. Et maintenant il y a donc le Champagne rosé. Ceci montre qu’il n’y a pas que le prix mais aussi l’innovation-produit qui va permettre de profiter de ce que j’ai appelé la « vague Blush ».
RencontreS internationalES du
ROSe
2008 les rosés effervescents Exemple du Champagne Introduction
aurelie deluze Observatoire économique Comité Interprofessionel du Vin de Champagne
Le Champagne participe activement à l’essor des ventes de vins rosés effervescents. La production comme les expéditions de vins de Champagne rosés progressent en effet beaucoup plus vite que la production et les expéditions totales de Champagne. Le développement de ce segment favorise une montée en gamme, permettant une importante valorisation des expéditions particulièrement à l’export, tout en élargissant à la fois la clientèle et les moments de consommation. Cette présentation se veut un état des lieux des ventes de Champagne rosé, avec un aspect à la fois quantitatif et qualitatif. Nous aborderons d’abord à grands traits la production, avant de parler des expéditions puis de faire un point sur le marketing associé à ces vins. Une étude réalisée par le CIVC en 2004 et mise à jour en 2007 permet en effet d’analyser les expéditions de Champagne rosé en France comme à l’export. Cette étude offre notamment des détails sur les ventes de Champagne rosé en grandes et moyennes surfaces en France. A l’export, le détail porte sur une analyse des ventes par flaconnages et par continents, avec un point sur les principaux marchés de consommation de Champagne rosé.
production de champagne rosé
( tableau 1 )
Il faut dire que le Champagne rosé bénéficie d’un positionnement marketing spécifique qui le valorise fortement. Des efforts sur le packaging, un positionnement prix sensiblement plus élevé et une communication adaptée sont à l’origine du succès rencontré par ces vins.
Production La production de Champagne rosé est relativement ancienne. Il y a même eu une époque où elle était la seule production de Champagne existante, puisque les techniques de pressurage n’étaient pas encore suffisamment évoluées pour permettre au jus de ne pas être taché par les peaux de raisins. A l’heure actuelle, il existe deux principales techniques d’élaboration de Champagne rosé, aboutissant à deux produits différents Le Champagne rosé dit de saignée, ou rosé de macération. Il est obtenu par la macération des peaux de raisins dans le vin qui lui donne sa couleur. Le jus coloré est vinifié classiquement comme un vin blanc. Il constitue le vin de base que l’on pourra assembler ensuite avec d’autres vins pour réaliser le Champagne rosé. Cette techni-
27
que est difficile à maîtriser, tant au niveau du goût du vin que de la couleur finale. Le Champagne rosé d’assemblage. On vinifie séparément les vins rouges et les vins de base, de préférence à base de Pinot Noir, mais c’est également possible avec le Pinot Meunier, selon la disponibilité. Cette technique permet de produire de grandes quantités de vin avec une meilleure maîtrise de la qualité et de la couleur. Ce point est particulièrement important concernant la production de Champagne, qui répond à une logique de marque requérant une grande constance année après année. Il n’y a pas de rosé de pressurage direct en Champagne. Tout comme il n’y a pas de marché de rosé en vrac. Le vin de Champagne rosé est exclusivement vendu en flacons de verre, allant du quart de litre à la bouteille, voire même parfois empruntant des flaconnages de plus grandes dimensions. On parlera majoritairement dans cette étude de volumes en bouteilles, qui sont en fait une conversion en équivalent-bouteilles de 75 cl des volumes totaux ( tableau 1) Concernant les volumes produits, le graphique ci-contre montre clairement une croissance forte ces dernières années. Les volumes produits ont été multipliés par 3,8 entre 2000 et 2007, portant le volume total à 30,54 millions d’équivalent-bouteilles produits, soit 230.000 hl.
Les expéditions
Le rôle des opérateurs champenois Les maisons jouent un rôle primordial sur ce marché. Elles rassemblent 81% des volumes expédiés, contre 11% pour les coopératives et 8% pour les vignerons. Leur domination est encore plus nette à l’export, où elles font 92% des volumes. En effet, les maisons exportent plus de la moitié de leur production de rosé. L’explication à cela est le fait que les maisons de Champagne cherchent sans cesse la valorisation de leur production. Cette valorisation passe par trois points : les marchés : l’export est toujours plus
Répartition des volumes de champagne rosé 2006
valorisant que le marché français, les circuits de distribution sur ces marchés : les maisons les plus prestigieuses favorisent les circuits de l’hôtellerie-restauration et les cavistes, les produits à placer sur ces marchés : les cuvées de prestige ainsi que les vins rosés sont mis en avant. Cependant, le développement des ventes de Champagne rosé par les maisons est freiné par un problème d’accès à la matière première ainsi que des contraintes de production fortes. Il est important de souligner qu’en Champagne, la question de l’accès à la matière première est primordiale, la demande de raisin ayant tendance à progresser plus fortement que l’offre. Les opérateurs du Vignoble sont beaucoup moins présents sur ce marché, mais ils sont en progression, et plus particulièrement les coopératives, qui cherchent de plus en plus à valoriser leurs ventes, stratégie qui est favorisée par leur facilité d’accès à la matière première. Les coopératives sont donc actives sur ce marché. Quant aux vignerons, ils sont présents mais leur mentalité est encore bien souvent éloignée de la recherche de valorisation.
Au total en 2006 ont été expédiées 21,1 millions de bouteilles de Champagne rosé, soit 160.000 hl. L’augmentation de ce volume par rapport à 2004 est de 44%. Au total, ces vins représentent 6,6% du total des vins de Champagne expédiés dans le monde. 52% de ces volumes ont été commercialisés sur le marché français, 48% ont été exportés. L’augmentation de la part des vins exportés par rapport à 2004 est spectaculaire. En effet, en 2004 la France rassemblait 57% des volumes et l’export 43%. C’est donc avant tout l’export qui tire les ventes de Champagne rosé.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
les rosés effervescents exemple du champagne
Le Champagne rosé en France : détail des ventes en GMS Concernant les différents circuits de distribution du Champagne rosé en France, 15% des volumes sont vendus en grandes et moyennes surfaces (GMS), soit 1,7 million de bouteilles. Moins de 1% des volumes sont vendus dans les magasins discounts, supérettes et commerces traditionnels. La faiblesse de ces canaux s’explique par le peu de valorisation qu’ils autorisent. Le reste, soit 84% des volumes, est vendu en hôtellerie-restauration ou chez les cavistes, ou bien encore est acheté directement auprès des producteurs. Le détail de ces circuits valorisants est malheureusement indisponible. ( tableau 2) Au niveau des ventes en grandes et moyennes surfaces, nous pouvons dire que le Champagne rosé rassemble 4% des volumes totaux de Champagne vendus dans ces magasins, pour 5% de la valeur. Ces parts sont en croissance. La bouteille de Champagne rosé est celle qui affiche le prix moyen le plus élevé pour une bouteille de Champagne vendue en GMS (21,61 euros TTC en 2007 contre 17,68 euros pour le prix moyen global du Champagne dans ce circuit). C’est 25% plus cher que le Champagne brut sans année et également légèrement plus cher que le Champagne brut millésimé. ( tableau 3) Les volumes vendus en GMS ont doublé en dix ans, avec des progressions importantes en 2002 (+30%) et 2005 (+24%). Plus qu’un phénomène de mode, il s’agit là d’une véritable tendance de fond. La niche originelle est
devenue petit à petit segment de marché. On observe la même tendance pour les prix, avec une augmentation moyenne de 5% par an qui ne nuit pas aux volumes vendus. Le seuil de prix psychologique de 20 euros TTC la bouteille a été dépassé haut la main dès 2006 sans entraîner de ralentissement des ventes. On ne retrouve pas cette élasticité-prix positive pour tous les segments de marché. Les vins de Champagne bruts millésimés par exemple voient leurs volumes chuter quand leurs prix augmentent trop brutalement. Les marques de maisons représentent 60% des volumes vendus en GMS, contre seulement 10% pour les opérateurs du Vignoble. A noter la part significative des marques de distributeurs qui rassemblent 25% des volumes. Les marques de maisons sont de loin celles qui affichent le prix moyen le plus élevé (22,89 euros TTC la bouteille). Elles sont suivies des marques de coopératives, qui se situent à un niveau intermédiaire de valorisation (18,96 euros TTC). Enfin, sans surprise, les vignerons et marques de distributeurs sont ceux qui valorisent le moins le Champagne rosé, affichant des prix qui dépassent à peine les 15 euros TTC. ( tableau 4) Au début de l’année 2008 la tendance se poursuit, on pourrait même dire qu’elle s’accentue. Au premier trimestre, les volumes de Champagne rosé vendu en grandes et moyennes surfaces ont progressé de 11%, tout comme le prix moyen. Celui-ci atteint désormais 22,64 TTC
29 Ventes de vins de champagnes dans les grandes et moyennes surfaces en france par type de vins
tableau 2
volumes de vin de champagne rosĂŠs en grandes et moyennes surfaces en france
tableau 3
prix de vente des vins de champagne rosĂŠs en hypers et supermarchĂŠs en france
tableau 4
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ROSe
2008
les rosés effervescents exemple du champagne
PRIX DES VINS ROSÉS SUR LE TOTAL DES EXPORTATIONS DE CHAMPAGNE EN VOLUME
tableau 5
PRIX MOYENS DES EXPORTATIONS DE VINS DE CHAMPAGNE ROSÉS
tableau 6
31
la bouteille. Ce constat ne fait que confirmer ce qui a déjà été souligné, à savoir une tendance de fond forte qui s’appuie sur une valorisation élevée. On notera la saisonnalité importante des ventes de Champagne rosé, dont 40% des volumes sont vendus au cours du 4ème trimestre, comme pour l’ensemble du marché du Champagne. Les exportations de Champagne rosé L’évolution des ventes de Champagne rosé à l’export est tout aussi forte, si ce n’est plus, que sur la France. En dix ans, les volumes ont été multipliés par 3,5 et les valeurs pour 4,8. En 2007, le volume total atteignait ainsi 11,22 millions de bouteilles et le chiffre d’affaires hors taxes départ était de 202 millions d’euros (respectivement +12% et +15% par rapport à 2006). (tableau 5) Les volumes de Champagne rosé exportés croissant plus rapidement que l’ensemble des Champagne exportés, le poids des rosés dans le total des exportations a été multiplié par 3 en 10 ans, atteignant 7,4% des volumes en 2007. Le prix moyen hors taxe et départ d’une bouteille de Champagne rosé exportée en 2007 est de 18,02 euros. Il s’agit du prix moyen le plus élevé si l’on excepte les cuvées de prestige. En moyenne, une bouteille de Champagne rosé exportée se vend ainsi 13% plus cher que l’ensemble des vins de Champagne, toutes qualités confondues. Ce prix est tiré par les maisons, plutôt bien suivies par les coopératives. Les vignerons, en revanche, ont tendance à augmenter leurs exportations de vins rosés en volume sans pratiquer de hausses de prix, qui seraient pourtant justifiées par le niveau de la demande. (tableau 6)
RÉPARTITION DES EXPORTATIONS DE VINS DE CHAMPAGNE ROSÉS PAR CONTINENT EN VOLUME en 2007
L’Europe (hors France) est de loin la principale destination de ces vins avec 61% des volumes. Viennent ensuite l’Amérique (Nord et Sud) avec 23% des volumes et l’Asie (13% des volumes). L’Océanie et l’Afrique représentent, comme pour l’ensemble du marché du Champagne, de très petites quantités (2% de parts de marché chacune). C’est le continent américain qui valorise le mieux ces vins avec un prix moyen hors taxes et départ à 18,73 euros contre 16,05 pour le continent asiatique. L’Europe se situe à un niveau intermédiaire avec 18,15 euros.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
les rosés effervescents exemple du champagne
exportations en volume de vins de champagne rosés à destination des principaux pays
Tableau 7
Concernant les flaconnages : 93% des volu-
représentent plus de la moitié des exportations
mes sont exportés en bouteilles de 75 cl. Il y
de Champagne rosé. Ils sont suivis de l’Alle-
a quelques petits flaconnages : 5% des vo-
magne et de l’Italie, deux marchés qui présen-
lumes sont vendus en quarts et demi-bou-
tent des taux de progression très importants :
teilles. Les magnums et formats supérieurs
respectivement +30% et +39%. En fait, rares
ne représentent que 2% des volumes. Au
sont les pays qui voient leurs importations de
niveau des prix, on constate une meilleure
vins de Champagne rosés diminuer. On note-
valorisation sur les quarts et les magnums,
ra tout de même le ralentissement du Japon,
mais les quantités concernés sont limitées.
6ème marché en volume du Champagne mais
Les trois principaux marchés export du Cham-
3ème pour le Champagne rosé, qui enregistre
pagne rosé sont le Royaume-Uni, les Etats-Unis
une baisse de 4% en 2007. Une hypothèse à
et le Japon. Ces trois pays sont les seuls à dé-
cette situation serait l’évolution défavorable du
passer le million de bouteilles. A eux-seuls ils
taux de change. (tableau 7)
33
Champagne rosé et marketing Le succès du Champagne rosé des temps modernes découle plus ou moins d’une orientation décidée par une poignée de maisons qui, il y a 40 ans, ont décidé de démocratiser le Champagne rosé. A l’époque, cette couleur était surtout réservée aux rares cuvées de prestige. L’idée était donc de faire un vin de qualité moins cher que les cuvées de prestige mais plus cher que le brut. C’était aussi une manière d’amener les consommateurs vers le haut de gamme, les cuvées de prestige. Avec le temps, la niche est devenue segment de marché, ouvrant la voie pour les autres opérateurs champenois qui s’y sont engouffrés. Au niveau de la production, on recherche des arômes de fruits rouges qui rencontrent un franc succès en Grande-Bretagne, le principal marché d’exportation du Champagne rosé (près de 30% des volumes exportés). Concernant la concurrence, le Champagne rosé n’est pas sur les mêmes segments de prix que les vins effervescents rosés en général, un peu à l’image de l’ensemble du marché du Champagne. Si le Champagne en général se trouve concurrencé avant tout par les spiritueux en ce qui concerne la consommation, le Champagne rosé quant à lui se trouverait plutôt en concurrence avec une bouteille de parfum 30 mL, par exemple. En effet, les gammes de prix sont proches (35 euros pour une bouteille achetée chez un caviste avec son coffret). Il s’agit là d’achat-cadeau, acte largement favorisé par le marketing et qui est à l’origine d’une part importante des achats de Champagne rosé.
Il s’agit globalement de vins très marquetés, appréciés par les hommes comme par les femmes, en toute occasion un temps soit peu spéciale. On peut le boire à l’apéritif comme au dessert, ou en accompagnement de repas. Ce dernier point est important car le grand public considère généralement que le Champagne n’est pas une boisson d’accompagnement de repas. Ainsi, le Champagne rosé permet d’élargir les moments de consommation. Le produit est souvent présenté dans des bouteilles reconnaissables (blanches avec des formes spéciales) et est associé à des évènements de type St Valentin, fête des mères, etc. La communication s’adresse prioritairement aux femmes, mais c’est un vin qui intéresse également les hommes. On le retrouve fréquemment combiné à d’autres sources de valorisation (millésime, cuvée de prestige).
Conclusion Le vin de Champagne rosé tire l’ensemble des ventes de Champagne vers le haut. En fait, ce n’est ni plus ni moins que le retour au positionnement stratégique d’origine du Champagne, à savoir un produit élitiste, vendu cher, avec une production très technique et un marketing soigné. Par opposition au Champagne en général, dont la consommation s’est peu à peu démocratisée sur ses principaux marchés. Les vins de Champagne rosés ont un très bel avenir, avec la forte croissance tant de la production que de la commercialisation. On notera une très nette recherche de valorisation par les Champagne rosés, devenu un véritable relais de croissance des ventes de Champagne dans le monde, en volume et surtout en valeur.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008 LE VIN ROSÉ
contexte de consommation et statut symbolique en france
philippe aurier Professeur à l’Université Montpellier 2
Dans les enquêtes que nous avons menées auprès des consommateurs, nous avons constaté que plus que le rouge, le Rosé est associé à des valeurs hédonistes c’est-à-dire le simple plaisir de consommer. Quand on regarde les valeurs associées à ces 2 types de produit, le rouge et le rosé, on se rend compte que le rouge est beaucoup plus marqué par la sociabilité ; autrement dit : « j’existe aux yeux des autres et la consommation du produit est un moyen de communiquer ce que je suis ». C’est une valeur extrinsèque : je consomme pour me positionner socialement et on se rend compte aujourd’hui que le vin rouge est très fortement teinté par cette valeur de sociabilité ; c’est aussi, certainement, l’une de ses limites. Le rosé de son côté est
beaucoup plus hédoniste ou plus simplement un produit de simple plaisir, plus « expérientiel » ; en effet, on « le consomme pour le consommer » par rapport au vin rouge qui est un produit que l’on « consomme pour accumuler du savoir, de l’expertise, des choses à dire, à penser ». Ainsi, le vin Rosé a une valeur plus intrinsèque c’est-à-dire qu’au final on le boit pour le simple plaisir de consommer. Autre élément qui ressort des enquêtes auprès des consommateurs, c’est l’idée de couleur . La couleur, du point de vue des représentations mentales des consommateurs, reste le premier critère de structuration du marché
quantités consommées et profils des consommateurs à l’apéritif : rouge, blanc et rosé un statut ambiguentre rouge (repas) et blanc (hors repas) Consommation = contexte x qui x à quel rythme x en quelle quantité % pénétration Nbre moy de 15 ans + prises /an/ conso effectif Vin rouge à l'apéritif Vin blanc à l'apéritif Vin rosé à l'apéritif
14 33 15
176 129 131
Q moy par prise (litres)
Q annuelle/ Fr de 15 + (*)
0,26 0,16 0,19
6.5 6.6 3.8
* valeur brutenon corrigée, ne peut être extrapolée
Source : Viniflhor-Université Montpellier 2
Comparaison des typologies de consommateur au contexte apéritif (base = indice 100 de consommation)
35
Comparaison des typologies de consommateur au contexte apéritif (base = indice 100 de consommation)
rouge
275,0 250,0 225,0 200,0 175,0 150,0 125,0
rosÄ
100,0 75,0 50,0 25,0
BE
PC BE P Ba Ba c c > +2 Ba ca c+2 dr e em s up p lo ou ye vq ua l oc ca s io nn el
n
au
cu
4 75 +
-7
4
65
-6
9
50
-4
4
35
-3
4
25
-2
8
18
15
-1
F
H
0,0
Comparaison des typologies de consommateur au contexte apÄritif (base = indice 100 de consommation) Comparaison des typologies de consommateur au contexte apéritif (base = indice 100 de consommation)
275,0 250,0 225,0 200,0
champagne
175,0 150,0
blanc
125,0 100,0 75,0 50,0 25,0
PC BE P Ba Ba c c > +2 Ba c a c+2 dr e em sup p lo ou ye vq ua l oc ca s io nn el
BE
n cu
au
4 75 +
-7
4
65
-6
9
50
-4
4
35
-3
4
25
-2
8
18
-1
F
15
H
0,0
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ROSe
2008
LE VIN ROSÉ
contexte de consommation et statut symbolique en france
(les gens voient les choses en couleur). Puis on observe que c’est une raison d’élimination qui peut être assez importante lorsque les consommateurs forment leurs « ensembles de considérations » c’est-à-dire lorsqu’ils se disent : « qu’est-ce que je pourrais bien acheter ? Ceci, je l’élimine et cela aussi. Alors que me reste-t-il à la fin ? … ». A ce niveau là, la couleur intervient et notamment plus sur les rosés que sur les blancs ou les rouges. La couleur est un critère plus discriminant pour les rosés.
• Diversité des moments de consommation : boisson du « repas » (par des cibles classiques, d’àge moyen et +) mais aussi du « hors repas » (taux pénétration devant le rouge en « hors repas » ) • Profil consommateur proche du rouge, mais moins discriminant au plan sociologique ( éducation) … • …mais plus que le blanc : reste marqué « homme », « régulier » • Rosé chez les plus jeunes, notamment «hors repas »
Autre élément qui a été largement souligné : nous sommes sur une couleur où l’on a plus de liberté d’expression. Cela veut dire que les codes et les tabous sont beaucoup moins forts sur le segment des rosés que sur celui des rouges. Cela veut dire qu’on peut faire beaucoup plus de choses comme nous l’avons vu dans les précédant exposés mais en même temps, la sanction peut être beaucoup plus facile et brutale : si l’innovation ne plaît pas, la sanction est immédiate alors qu’un rouge pourra, en adoptant les codes standard, plus facilement se protéger du point de vue de son apparence.
Le vin rosé : quel statut symbolique ? • plus que le Rouge, le Rosé est associé à des valeurs hédonistes (vs sociabilité), expérientielles (vs cognition), intrinséque (vs extrinséque) : décomplexion, simplicité, plaisir de consommer … pour consommer • la couleur : critère de choix important : première critère de structuration des représentations de la catégorie mentale « vin » raison d’élimination lors de la formation des ensembles de considération (produits considérés comme « acceptables » lors du choix), indicateur de « non qualité » plus de liberté d’expression dans la couleur rosé – blanc / rouge, mais aussi sanction plus facile couleur rosé non porteuse de valeur / rouge ou blanc
D’autre part, la modélisation réalisée sur la valeur que représente les couleurs aux yeux des consommateurs, montre une valeur moins grande pour le rosé que pour le rouge ou le blanc. Je veux dire par là que la part d’utilité portée par la couleur rosée en tant que telle n’est pas forcement plus importante que celle du rouge ou du blanc. Spécificités du Rosé
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Conclusion le statut du rosé est ambigu puisqu’il se situe entre le blanc et le rouge. Il se démarque du rouge en matière de représentation mais, en finale, relativement peu au regard des comportements. Dans les données de panel, le gros consommateur de rosé conserve un profil très standard d’âge moyen et plus, de gros foyer, …un code couleur ambigu, moins de spécialisation par contexte ; ceci est intéressant pour le vin rosé comparativement au rouge ou au blanc. Une valeur plaisir par rapport à la valeur sociabilité fortement associée au rouge. Un produit donc plus simple, sans complexité pour le consommateur par opposition aux « grands vins ». Quand on regarde les « catégorisations cognitives » des consommateurs, on se rend compte que le rosé n’appartient pas aux catégories « grands vins » : c’est-à-dire que lorsque les consommateurs catégorisent selon cette logique de « grands vins », ils ne font pas rentrer les rosés ni les blancs d’ailleurs. C’est un produit d’expérience par opposition à un produit de connaissance. Tout cela est bien sur source d’opportunités. Un marketing très libre en termes de packaging. Des positionnements potentiels plus variés : le rosé a certainement beaucoup de choses a exploiter dans le contexte « repas » et pourquoi pas dans les repas non socialisés qui représentent près de 50% des volumes. C’est donc un produit « simplicité-plaisir ». Par contre, lorsqu’on mesure l’attitude des consommateurs : « Est-ce que j’aime, est-ce que je suis attiré par le produit ? », on constate que le vin arrive comme le premier produit préféré parmi toutes les boissons alcoolisées. Mais il n’est que le 48ème sur 68 dans le palmarès des produits alimentaires. Ainsi, bien que la filière vins soit souvent animée par des gens passionnés par leur produit (par sa richesse, …), nous devons garder à l’esprit que dans le marketing de la consommation « ce plaisir » ne se fait pas tout seul. Il faut donner envie aux gens car, naturellement, beaucoup résistent par rapport au produit vin.
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ROSe
2008 Développement du marché du blush aux usa
en grande bretagne et en irlande
andrew chapman Trinchero Family Estates, Sutter Home Winery
Je suis le Directeur des ventes Europe pour TRINCHERO Family Estates, Sutter Home Winery. Notre histoire commence dans l’aprèsguerre. Sutter Home a été fondée en 1890 par une famille de suissse-allemands. Ils ont tenu la Winery jusqu’à la Prohibition et finalement ont abandonné. En 1947, une famille d’origine italienne qui avait déjà une affaire d’importation de raisins eut l’opportunité de racheter la Sutter Home Winery qui était en total délabrement, pour 7000 dollars. Ensuite, ils ont fait des vins de cépages comme beaucoup de Californiens à l’époque et, avec le développement de la production américaine tout le monde a cherché à rajouter de la valeur, à faire des vins de plus en plus élaborés, des vins de cépage pour gagner un peu plus d’argent. C’est justement en voulant faire un Zinfandel plus renforcé en 1972 qu’accidentellement il y a eu une fermentation bloquée (ils ont tout essayé mais ils n’ont pas réussi à faire redémarrer la fermentation). Ils se sont dit : « tant pis, cette année le Zinfandel Rosé va être un peu sucré mais on va le vendre quand même et on verra… ! ». Donc ils ont essayé de se débarrasser de ce vin et finalement les clients ont commencé à revenir car c’était très bon. Et c’est à partir de là qu’ils sont passés de 47 000 caisses à 9 millions de caisses en 2000 et à un peu plus de 13 millions aujourd’hui. (aux Etats-Unis on compte en caisses).
Qu’est-ce que le White Zinfandel ? C’est un produit à la fermentation bloquée : l’alcool est à 9,5°, une acidité totale à 6,7 et un pH de 3,2. Le sucre résiduel quant à lui est à 34,5g/l ce qui veut dire que le vin est sucré mais par contre il y a un bel équilibre avec une belle acidité. Ce qui donne un produit très fruité (fraise, kiwi). L’histoire a donc vraiment décollé pour eux : ils étaient numéro 1 aux Etats-Unis et ils le sont restés. On a maintenant une croissance internationale avec une entreprise toujours 100% familiale. Une philosophie de qualité abordable, création d’une catégorie qui est restée à la tête des cépages jusqu’en 1989. Maintenant c’est le Chardonnay qui a pris de l’avance. Sutter Home est, de loin, le vin le plus vendu aux Etats-Unis. Si on regarde comment se découpe le marché américain aujourd’hui on s’aperçoit que le White Zefandel ne progresse plus car il y a d’autres cépages qui sont en train de décoller. Par contre si on regarde nos propres affaires , le White Zinfandel reste le plus important de ce que nous faisons soit 46% de notre production totale (environ 5 millions de cartons ou 60 millions de bouteilles). Il y a d’autres raisins que nous avons fermenté comme le Zinfandel, notamment le White Merlot et également un White Cabernet. Mal-
39
gré le fait que le marché soit en régression, nous continuons à progresser car nous avons une bonne acceptation de nos consommateurs selon les tranches d’âge. Nous sommes par exemple n°1 chez les 21/26 ans. Nous avons toujours essayé de rester innovateurs. Nous étions les premiers à introduire le White Zinfandel ainsi que les quarts de bouteille ou encore le bouchon à vis et les « prise-main » qui sont des bouteilles de 25cl en pack de 4. On essaye d’élargir cette gamme de produit « Blush » car on ne peut pas uniquement se reposer sur le White Zinfandel. Et là, nous avons une belle croissance. On fait également du vin sans alcool que je vends aussi en France. Autre produit, le « little pink box », en 3 litres ou en 1 litre ; c’est un petit format qui est un produit très féminin. De plus, on a fait beau-
coup d’efforts pour associer Sutter Home White Zinfandel avec la lutte contre le cancer du sein car l’un des frère TRINCHERO a survécu au cancer. C’est donc quelque chose qui lui tient à cœur (énormément de sponsorisation : propre équipe de cyclisme, beaucoup de dons également). Nous projetons donc une image très féminine. Le White Zinfandel peut se marier avec la cuisine moderne surtout avec la cuisine asiatique (plats très relevés, très épicés) ; souvent les rouges peuvent poser problème car ils peuvent être trop amers ou encore trop acides. On a aussi fait des efforts pour associer Sutter Home à la nourriture : nous avons créé une grande compétition « build a better burger » dont le but est de faire une nouvelle recette de
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Développement du marché du blush aux usa en grande bretagne et en irlande
United Kingdom On-Trade: Volume by Countries
tableau 1
France
4,965
Italy
3,778
Australia
2,893
USA
1,637 1,499
Chile 1,080
South Africa
992
Ge rmany
789
Spain Argentina Ne w Ze aland
373 286
-11%
-2%
-1%
+6% +8%
-1% -14%
+3%
-2% 0% hamburger et le vainqueur gagne 50000 dollars. C’est un grand évènement qui dure depuis une dizaine d’année et qui est même télévisé.
Le marché Britannique. D’après les chiffres de décembre dernier, nous avons en première position l’Australie ensuite la France, les USA et en 4ème position l’Italie. Ce qu’il faut retenir c’est que seul le marché Américain est en progression sur les 4 pays en tête. Dans les Pubs ce sont les marques américaines (Blossom Hill) et Australiennes (Jacob’s creek) les plus consommées. Les marques françaises sont vendues le plus souvent en « HouseWine » avec des étiquettes spécifiques. Pour la couleur, ce qui
est intéressant de voir, c’est le CHR : il est ici de 0,7 (+44%). Les chiffres de mai 2008 montrent eux une progression de 34%. Je rencontrais énormément de résistance quand je voulais introduire le Blush. J’avais alors un importateur, filiale de Rothschild et de Veuve Clicquot, qui ne voulait pas du tout faire de Blush car il trouvait cela trop « cheap » ( bon marché ) et pensait que ça allait endommager leur image. Mais si on revient en arrière, les ventes les plus importantes en Californie étaient des « simples rouges » et de « simples blancs » ; White Zinfandel connaissait une belle croissance mais c’était encore petit par rapport à maintenant. Qu’avons-nous fait ? Nous avons passé des publicités, adaptées le cas échéant au marché Européen, ainsi qu’une campagne relativement féminine. Nous avons développé une relation publique très liée à la mode : sponsorisation du magazine « fashion show » en nous concentrant sur le White Zinfandel pour cette promotion. Le comportement du consommateur britannique reste à peu près la même que celui des EtatsUnis. Ceci veut dire que c’est souvent son premier contact avec le vin. Nous nous sommes aperçus qu’il s’agissait fréquemment de groupes de filles se réunissant chez une amie pour se maquiller, pour s’habiller avant de sortir et qui consommaient le White Zinfandel et poursuivaient cette consommation au Pub. (tableau 1)
41
irish wine market 2007/08 Total +6.5%
L’Irlande C’est un marché qui connaît une croissance intéressante. On a fait une étude de marché et il y a des choses réconfortantes pour la France : sur les échantillons de consommateurs habituels de vin, le plus grand groupe est celui des « experimenters » c’est-à-dire ceux qui ont leur marque mais qui sont prêts à faire des essais ; effectivement, on voit que White Zinfandel chez eux est en 5ème ou 6ème position mais donne des signes de bonne lancée. On leur à posé la question suivante : « quels sont les critères qui influencents vos achats de vin ? ». Effectivement, la première réponse est : « la couleur » rosé, rouge ou blanc. Ensuite viennent les cépages, le pays d’origine, le prix, la marque, ce que l’on va manger, l’offre promotionnelle, les étiquettes et enfin l’allure de la bouteille. On constate donc que la marque n’est pas en tête ; c’est la couleur qui est le facteur déterminant. Ce que je voulais donc vous dire, c’est que je pense que l’important est de rester pertinent, de ne pas trop faire d’introspection dans le sens où l’on doit communiquer avec les consommateurs qui ont souvent du mal à comprendre nos façons de les approcher c’est-à-dire comme des producteurs de vins. Et je pense qu’il faut prendre en compte les conseils de Monsieur AIGRAIN et les approcher en tant que producteurs de boissons car c’est là le choix aujourd’hui : «Est-ce que je vais prendre de l’eau, du coca , un vin blush, un chardonnay ou un rosé de Provence ? ». (tableau 2) (tableau 3)
9 8 7 6
5.1
5
0.4
5.7 0.5
6.2 0.7
6.8 0.9
7.2 1.0
7.6 1.0
4 3 2
4.7
5.2
5.5
5.9
6.2
6.6
Ex. Port +18%
1.2
6.8
Ex/ W/house +4.6%
1 0 2001
8.0
2002
2003
2004
2005
2006
2007
•W ine Market now 8.2 m cases • Jan Feb 2008 +3.0% on 2007 Source: Clearances
Feb 08
tableau 2
ireland total colour split 3.9
4.2
4.7
45.3
43.2
43.5
50.7
52.6
51.8
52 w/e 26 Mar 06 Share
52 w/e 25 Mar 07 Share Red
White
52 w/e 23 Mar 08 Share Rose
tableau 3
RencontreS internationalES du
ROSe
2008 LE VIN ROSÉ
STRATÉGIE D’APPROCHE DES CONSOMMATEURS au québec
Le Canada
• Il n’est pas une unité pratique de comparaison • Ce pays est divisé en 12 juridictions complètement indépendantes l’une de l’autre. • Cette présentation est donc focalisée sur l’expérience de la province de Québec.
Introduction
• Multitude de variétés de types de vins • Régression de la consommation de vin en Europe • Augmentation de la consommation du vin au Canada • Au Québec, le taux de consommation par tête est passé de 12,6 litres en 1998 à environ 19,3 litres en 2007
Ghislain k.-laflamme Président de Sélections Mondiales des Vins Canada, Ambassadeur du vin au Québec
Le monde vitivinicole comporte une multitude de variétés de types de vins. Même si la consommation de vin régresse en Europe, le vin devient de plus en plus une boisson recherchée au Canada. En effet, pour ne prendre que le Québec, le taux de consommation per capita est passé de 12,6 litres en 1998 à environ 19,3 litres en 2007.
Il est très difficile dans le domaine des boissons alcooliques d’utiliser le Canada comme unité de comparaison, car sur ce plan, ce pays est divisé en 12 juridictions complètement indépendantes l’une de l’autre. Si on veut imager la situation, il faut prendre en considération que le territoire du Canada représente une superficie de près de 10 millions de kilomètres carrés, ce qui est grosso modo la superficie de toute l’Europe ! Le Canada compte 33 millions d’habitants alors que l’Europe en a 730 millions. Vous imaginez la dispersion des habitants du Canada sur un tel territoire dont les habitudes peuvent être aussi différentes d’une partie du pays à l’autre que celles du Portugal par rapport à celle de la Russie. Une stratégie unitaire de marketing est vouée à l’échec. La stratégie de marketing qui fonctionne bien dans une province n’est pas transposable à une autre. Il est particulièrement évident que les consommateurs de la province de Québec qui sont en majorité d’origine française et de bons consommateurs de vin ne peuvent réagir aux mêmes stratégies de marketing que les consommateurs des provinces où la consommation de la bière domine et d’autres où la consommation de spiritueux représente l’attrait principal. Je vais donc focaliser mon exposé sur le marché du Québec et prendre comme exemple de marketing réussi celui de la Société des alcools du Québec.
43
Stratégie de marketing à modeler
sir un vin rosé, nous demande donc pourquoi transformer cette valeur marchande sûre qu’est le vin rouge en vin rosé ? Il doit y avoir une raison cachée, pense-t-il ? Quelque chose d’inavouée dans ce type de vin. Est-il l’objet d’un défaut de fabrication, d’un vice caché ? Selon ces mêmes consommateurs sceptiques, ils ne croient pas que les vignerons consacrent leurs meilleurs raisins à cette forme de vin. On va même jusqu’à dire que lorsqu’on est convaincu qu’une récolte ne donnera pas un bon vin rouge, on fait le compromis de la transformer en vin rosé. Selon ce point de vue, ce n’est donc pas du vrai vin !
Chaque représentant de maison de vins dispose d’une stratégie spécifique pour mettre de l’avant son produit. S’il est relativement facile de convaincre le consommateur québécois d’acheter du vin blanc ou du vin rouge, il est plus difficile d’orienter l’acheteur éventuel vers un type de vin moins fréquemment utilisé que ce soit des vins mousseux que ce soit des vins doux naturels ou que ce soit des vins rosés.
Un monde d’apparence et de préjugés
• Selon mon expérience personnelle à la SAQ, le consommateur éprouve des doutes quant à l’intérêt de boire du vin rosé • Les questions qu’on me posait étaient les suivantes: • Pourquoi faire du vin rosé alors qu’on peut faire du vin rouge? • Le vin rouge a plus de valeur que le vin rosé • Pourquoi diminuer cette valeur ? • Quelle est la raison cachée ? Y a-t-il quelque chose d’inavouée: vice-caché
Est-ce que le rosé est du vrai vin ? Comme chacun le sait ce type de vin provient de raisins rouges, qui, si on les laissait évoluer normalement produiraient un vin rouge, car la couleur est dans la peau. Alors, nous demande le consommateur, pourquoi ne pas les laisser évoluer selon leur nature s’ils devaient donner du bon vin rouge ? On connaît l’excellente réputation du vin rouge. Au Québec, en 2006, les vins rouges représentaient 77% des ventes de vin. Le vin rouge est donc un type de vin très recherché. Le consommateur lorsqu’on lui conseille de choi-
• Du point de vue du marketing, il faut tenir compte du point de vue du consommateur éventuel • Les préjugés sont plus forts que la réalité En terme de stratégie de marketing, il faut répondre aux questions que le consommateur de vin peut se poser concernant le vin rosé.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Le vin rosé
stratégie d’approche des consommateurs
Ce point de vue alimente les préjugés populaires et on trouve rarement des consommateurs qui soient prêts à payer une somme importante pour l’achat de ce type de vin. Du point de vue du responsable du marketing, il faut tenir compte du fait que dans la vie courante, les préjugés sont toujours plus forts que la réalité, surtout à notre époque où l’on vit plus que jamais dans un monde d’apparence, un monde de perception.
Les ennemis du vin blanc, rouge ou rosé Les deux grands adversaires du vin : l’eau et les gouvernements. En Europe, le vin a contre lui deux grands adversaires, peut-être même deux grands ennemis ; l’eau et les gouvernements. On n’ose pas dire assez fortement les bienfaits d’une consommation du vin comme boisson de santé, surtout en France à cause de la Loi Evin et de ses gardes-chiourmes. Il faut avoir à l’esprit la scandaleuse prise de position contre le journal Le Parisien. Par ailleurs, les gouvernements sous la pression de divers groupes sociaux, se sont mis à considérer les boissons alcoolisées comme un ennemi social à contrer ; d’où les multiples mesures prises pour décourager les gens de consommer du vin plutôt que de les inciter à boire de façon raisonnable et prudente. La conséquence principale en Europe est une baisse dramatique de la consommation de vin et cette sous-consommation entraîne un surplus de production et des problèmes économiques régionaux importants.
La dynamique du vin en général au québec
• Le gouvernement n’est pas l’adversaire du vin, loin de là, car c’est lui qui le vend par l’entremise de la Société des alcools du Québec (un bon côté d’être un monopole d’État)
• D’autre part, l’eau n’a jamais été une boisson rare ou dangereuse Au Québec, la dynamique de la consommation est tout à fait inverse. D’une part, le gouvernement n’est pas l’adversaire du vin, loin de là, car c’est lui qui le vend par l’entremise de la Société des alcools du Québec (un bon côté d’être un monopole d’État). D’autre part, l’eau n’a jamais été une boisson rare ou dangereuse. Elle est en surabondance partout et disponible à tout moment. Cependant, les Québécois voyagent et lisent et le goût du vin commence à les toucher sérieusement. La consommation de vin au Québec, par personne de 15 ans et plus est passée de 12,6 litres en 1998 à 17,4, à la fin de 2003 et doit maintenant dépasser 19,3 litres. Toute stratégie de marketing au Québec doit donc tenir compte de cette tendance, de ce désir des québécois de boire du vin. Ils sont sensibles à toute activité de marketing susceptible de les diriger vers un plaisir nouveau.
Le programme Éduc’alcool
• Pour rendre acceptable la consommation du vin,qu’il soit blanc, rouge ou rosé, il est nécessaire de promouvoir un programme social • Éduc’alcool au Québec a cet effet bénéfique pour placer dans un contexte socialement acceptable la publicité sur le vin, car il faut gagner de nouveaux consommateurs • But : contrer la publicité incitative à la surconsommation • Objectif : enseigner le bon usage des boissons contenant de l’alcool afin de profiter au maximum du plaisir du produit • Moyens : par des programmes, montrer aux jeunes à boire ! (comme il faut) Le taux de consommation des Québécois fait l’envie de bien des pays, car les consommateurs de cette province sont les plus responsables au
45
Canada avec des consommations plus fréquentes, mais en moindre quantité à la fois qu’ailleurs au pays. Cela est dû en grande partie à la création du programme Éduc’Alcool mis en place en septembre 1989 et dont j’ai été le premier Président. Ce programme avait pour objectif, et a toujours pour but, de contrer la publicité purement incitative à la surconsommation des produits contenant de l’alcool et d’amener la publicité à un contexte d’éducation du consommateur quant à son mode d’emploi raisonné qui le laisse toujours dans le plaisir sans l’entraîner dans l’excès. La recherche du plaisir plutôt que de l’ivresse amène le consommateur vers la consommation de produits de gamme supérieure.
Stratégie de transition vers le vin
• Quand on n’a jamais bu de vin, on est rebuté par son goût amer, acide, tannique, un peu insolite, pas nécessairement désirable. • Pour passer du jus au vin, il faut une boisson de transition, d’adaptation. • Il faut garder le goût fruité qu’on aime, une certaine sensation sucrée, une acidité bien équilibrée et une couleur agréable. Quand on n’a jamais bu de vin, ou peu, on est rebuté par son goût amer, acide, tannique, un peu insolite, pas nécessairement désirable. Surtout quand les boissons auxquelles on est habitué sont de l’eau, des jus, des eaux gazeuses, des sodas, etc. • Examen des goûts des non buveurs de vin • Constatation des caractéristiques recherches par les consommateurs : fruitées, douceurs, saveurs marquées • Stratégies, présentations du vin rosé sous ces caractéristiques fruitées, douceurs, saveurs marquées • Conséquence : remplacement des habitudes de consommation par l’usage du vin rosé
Pour passer du jus au vin, il faut d’abord une boisson de transition, une boisson d’adaptation, une boisson de changement. Il faut une boisson qui ait quelques traits communs avec celles auxquelles on est habitué ; dans le cas de passage au vin, il faut garder le goût fruité qu’on aime, une certaine sensation sucrée, une acidité bien tempérée, et une couleur agréable qui réjouisse l’œil. Toute la stratégie est là.
Solution : le vin rosé, du vrai vin • Stratégie de marketing selon la SAQ • Réponse aux interrogations des consommateurs • Est-ce du vrai vin ?
Le vin rosé, dans sa conception rencontre ces qualités de transitions que les stratèges en marketing doivent utiliser. Dès qu’on dépasse le préjugé courant que le rosé est un vin rouge manqué, et qu’on se met à analyser objectivement le vin rosé, on se rend rapidement compte qu’on a affaire à une boisson qui a ses qualités propres et qu’il faut la considérer comme telle, au même titre qu’on ne doit pas comparer un porto à un champagne ou un vin doux naturel à un rouge corsé.
La stratégie doit miser sur ces éléments. Ainsi, le nouveau consommateur de vin fruité, un peu sucré, à la belle couleur peut déjà commencer à évoluer à l’intérieur de la même gamme ; il essaie ensuite des rosés moins fruités, des rosés plus secs, des rosés moins colorés, bref des rosés qui vont l’amener doucement vers des vins blancs ou des vins rouges, qui à leur tour vont le porter vers des vins de plus en plus complexes. Cette constatation est basée sur mon expérien-
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Le vin rosé
stratégie d’approche des consommateurs
ce personnelle comme animateur de dégustations pour la Société des alcools du Québec et pour différentes sociétés bachiques auxquelles j’appartiens ou qui requièrent mes services. Je constate que dès que la barrière de l’amertume est franchie, l’amateur évolue rapidement vers des vins plus complexes. Le stratège en marketing doit donc faire ressortir dans son approche cet aspect pour amener au vin ceux qui ne le sont pas et le bassin est immense quand on pense que la consommation per capita du Canada entier n’est que de 13,7 litres, il y a donc tout un nouveau public à apprivoiser qu’il n’en tient au monde du rosé de conquérir.Par ailleurs, encore au-delà du préjugé, il faut se rendre compte que les vins rosés sont de mieux en mieux faits, de plus en plus structurés et qu’ils ont droit à leur vie propre sans doute, mais aussi à leur niche particulière d’appréciation comme catégorie de vins-plaisirs à part entière, donc, du vrai vin ! Le stratège en marketing doit tabler sur ces qualités nouvelles du rosé pour y amener ceux qui le dédaignaient et les garder.
Stratégie de marketing de la Société des alcools du Québec
• La SAQ est un excellent exemple • Sa philosophie : rejoindre le plus de clients potentiels possible sur une base personnelle • Ses moyens : participer avec eux à divers événements sociaux ou caritatifs • Distribuer des feuillets d’information • La SAQ implante sur les lieux d’un festival, d’une foire, ou d’une manifestation populaire des sites où on peut se procurer le vin ciblé, le vin rosé par exemple • Des œuvres caritatives qui touchent la population : campagnes de financement pour venir en aide aux hôpitaux, aux diverses fondations s’occupant de maladies comme le cancer, l’arthrite, les maladies cardiaques, etc. Selon les statistiques de la SAQ, les vins rosés représentaient en 2005, 42,2% des vins d’occa-
(Tableau 1)
Quantité en unité
Quantité en litre
1 573 441
1 337 497
25,3%
1 972 305
1 560 595
28 153 149
25,9%
2 264 357
1 927 563
2003
31 360 307
11,4%
2 607 089
2 128 722
2004
33 982 106
8,4%
2 753 464
2 195 665
2005
37 866 057
11,4%
3 128 120
2 500 847
2006
42 788 644
13,0%
3 767 902
2 825 927
Année financière
Montant ventes brutes
2000
17 845 521
2001
22 354 313
2002
Croissance
47 Les 20 meilleurs vendeurs de 2005-2006 au Québec Rang 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
No article 285767 270272 23465 425496 219840 391565 589606 642876 69542 534768 642504 464602 396572 634592 266502 166 897728 475830 427625 620682
Article White Zinfandel Ernest & Julio Gallo rosé Californie Listel-Gris Grain de Gris vin de pays sables-du-golf-du-lion Bouquet de Provence Billette côtes-de-provence rosé Pétale de Rose côtes-de-provence rosé Château Bellevue La Forêt côtes-du-frontonnais rosé Réserve de la Grange coteaux-du-languedoc rosé Cerasuolo Miglianico montepulciano-d'abruzzo rosé Tempranillo Candidato vino de la tierra de castilla rosé Casal Mendes rosé Portugal Roseline Prestige côtes-de-provence rosé Col de l'Orb st-chinian rosé Domaine de Gournier vin de pays de l'uzège rosé Lamberti Santepietre bardolino -chiaretto rosé Italie Bottero Rosato veneto i.g.t. rosé Italie Cabernet-sauvignon Santa Rita valle del maipo rosé Chili Mateus rosé Portugal Castillo de Liria valencia rosé Espagne Villa Soleil côtes-du-roussillon rosé Château de Nages costières-de-nîmes rosé Carrelot des Amants côtes-du-brulhois rosé
Année financière
Montant ventes brutes
2000
17 845 521
2001
22 354 313
2002
Nb btles 558 799 223 669 199 199 147 293 144 187 120 608 114 968 111 042 96 891 89 881 89 689 89 632 85 484 82 825 80 515 63 778 60 131 52 405 50 685 50 635
Prix 10,95 $ 10,25 $ 11,25 $ 16,80 $ 14,60 $ 9,90 $ 9,95 $ 8,10 $ 8,95 $ 15,05 $ 13,05 $ 11,10 $ 12,95 $ 9,10 $ 12,30 $ 9,75 $ 8,20 $ 11,10 $ 14,45 $ 12,05 $
Quantité en unité
Quantité en litre
1 573 441
1 337 497
25,3%
1 972 305
1 560 595
28 153 149
25,9%
2 264 357
1 927 563
2003
31 360 307
11,4%
2 607 089
2 128 722
2004
33 982 106
8,4%
2 753 464
2 195 665
2005
37 866 057
11,4%
3 128 120
2 500 847
2006
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terrasse de la Commune Š www.old.montreal.qc.ca, le photographe masquÊ
49 Le vin rosé
stratégie d’approche des consommateurs
sion, les portos 25%, les mousseux 24,3%, les champagnes 5,1% et les vins de dessert 3,4%. Par vins d’occasion, la SAQ entend un vin qu’on utilise d’une façon inhabituelle pour souligner un événement, un moment particulier ou pour boire différemment. Le pourcentage de 42 % représenté par le vin rosé dans les vins d’occasion, est un indice majeur qu’il ne suffirait que de programmes de marketing appropriés pour faire passer le rosé du statut de vin d’occasion à celui de vin de consommation courante. Ces statistiques démontrent donc que les vins rosés, avec une part de 42,2% des vins d’occasion, sont de moins en moins des vins d’occasion et de plus en plus des vins d’usage courant.
Elle comprend en plus :
• Une politique de dons et commandites centrée sur les grandes préoccupations actuelles : santé, éducation et culture • Une participation aux grands événements populaires comme les festivals, les foires, les campagnes de financement d’organismes philanthropiques • Un partenariat avec ses fournisseurs • Une participation à de nombreux salons et évé nements régionaux La stratégie de marketing de la Société des alcools du Québec comprend une politique de dons et commandites centrée sur les grandes préoccupations actuelles : la santé, l’éducation et la culture ainsi que sur la participation aux grands événements populaires. Elle s’est ainsi associée durant la dernière année à plus de 400 fêtes, festivals et campagnes de financement d’organismes philanthropiques pour un montant de
près de 5,5 millions de dollars canadiens et les agents promotionnels sont appelés dans bien des cas à collaborer avec la SAQ pour mettre de l’avant leurs produits. Il faut noter que le terme agent promotionnel ou agent de représentation indique du personnel de l’entreprise privée qui sert de promoteur à un producteur. Dans l’optique de maximiser l’impact de ses activités au Québec, la SAQ favorise les partenariats avec ses fournisseurs, dans le respect de la législation et des principes d’une saine gestion. La SAQ est aussi partenaire de nombreux salons et événements régionaux qui visent à promouvoir les vins.
Stratégie de marketing des agents promotionnels
• Information aux chroniqueurs de vins • Alimentation des guides de vin • Contacts avec les confréries bachiques • Visite des hôteliers et des restaurateurs • Collaboration aux programmes de la SAQ • Commandites d’événements sociaux caritatifs • Au Québec, le vin est « in » Comme stratégie de marketing, les agents promotionnels alimentent les chroniqueurs de vin qu’on trouve dans presque tous les journaux, revues et magazines ; des guides nombreux sont publiés préconisant tel ou tel vin et proposant des harmonies avec les mets ; les confréries bachiques se gonflent de membres assoiffés non seulement de vin, mais aussi de connaissances et les agents promotionnels les fréquentent, leur comman-
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
Le vin rosé
stratégie d’approche des consommateurs
ditent du vin et leur donnent des conférences. Ces agents visitent les hôteliers et les restaurateurs dans le même but. De plus, ils collaborent aux divers programmes de la Société des alcools du Québec leur donnant une visibilité plus grande soit dans les magasins de la SAQ, soit dans les publications de la SAQ, soit dans les messages publicitaires de la SAQ. Les interactions agents promotionnels SAQ sont extrêmement fructueuses en terme de progression des ventes de quelque type de vin que ce soit. Ces gents peuvent mettre de l’avant des programmes de promotion du vin rosé, ce qui se fait par ailleurs et ainsi il contribue à accroître la popularité et la consommation du vin rosé.
Vente de vins rosés au Québec de 2000 à 2006 Si on regarde le tableau 1, on constate que les ventes de vins rosés en l’an 2000, représentaient au Québec une somme de 17 845 521$CAD pour 1 573 441 bouteilles, alors que pour l’année 2005, les ventes de rosés ont doublé pour atteindre en la somme de 37 866 057$CAD pour un volume de 3 128 120 bouteilles. (Tableau 1) Les vingt meilleurs vendeurs de rosés au Québec en 2005-2006 Examinons maintenant le tableau 2, celui des 20 meilleurs vendeurs de vins rosés au Québec pour l’année 2005-2006. On y trouve 11 rosés de France, 3 d’Italie, 2 du Portugal, 2 d’Espagne, 1 du Chili et 1 de Californie. On remarquera que le premier vendeur provient de la Californie et qu’il s’agit d’un vin qui combine plusieurs atouts : il se veut rosé, mais il se nomme white ; il joue donc sur plusieurs tableaux. La deuxième position est
occupée par le Listel-Gris qui présente des caractéristiques très proches du vin californien par sa couleur et qui s’adresse à des consommateurs déjà plus évolués dans le domaine de la consommation des vins rosés à cause de sa saveur moins sucrée. Des 11 vins de France 3 proviennent de Provence. Dans ce tableau des 20 meilleurs, on remarque également le prix modeste de ces vins qui sont tous sous la barre des 10 euros. Nouvelle réputation des vins rosés Par ailleurs, on observe que les nouveaux arrivages au Québec de vins rosés sont de plus en plus favorablement commentés par les chroniqueurs de vins. Cela incite les consommateurs à mieux percevoir ce type de vin et à leur donner un statut de vin à part entière. Ce sont de moins en moins des vins de transition, ou de piscine ou de terrasse qu’on boit en dilettante pour se détendre quand on n’a rien d’autre à faire mais plutôt des vins qu’on savoure. Le vin rosé passe maintenant à la table On le boit avec des charcuteries certes, mais aussi avec du homard, du saumon, des crevettes, un bon nombre de poissons grillés, certaines viandes blanches ou des mets asiatiques. Un champagne rosé, à prépondérance de pinot noir accompagne très favorablement un magret d’oie braisé au champagne. Au Québec, on peut dire que le vin rosé est « sorti de l’auberge » pour se retrouver sur des tables fines.Les spécialistes de marketing ont donc une palette de couleurs importantes avec laquelle colorer leur promotion. De plus, il s’agit d’un champ fertile où les consommateurs sont faciles à convaincre et à diriger vers des produits qui rencontrent leur aspiration. Source d’inspiration pour le marketing Un communiqué de la Société des alcools du Québec s’exprime ainsi : «La Société des alcools
51
du Québec a affiché des ventes nettes de 2,030 milliards de dollars, une hausse de 116 millions de dollars ou 6,1 % par rapport à l’exercice précédent. Soulignons que le taux de croissance du secteur de la vente au détail au Québec a été de 4,5 % durant cette période. Ces données s’expliquent par la tendance des consommateurs à se procurer davantage de produits de plus grande valeur ainsi que par un rapport qualitéprix amélioré pour plusieurs produits importés, mais aussi par des campagnes promotionnelles bien ciblées ainsi qu’une prestation de service de grande qualité», a commenté le président-directeur général de la Société, Philippe Duval. Les ventes nettes de la majorité des catégories de produits ont enregistré des hausses au cours de l’exercice 2007-2008. La catégorie des vins a accaparé près de 83 % de la croissance globale des ventes nettes consolidées du dernier exercice avec des ventes nettes de près de 1,702 milliard de dollars, affichant ainsi une hausse exception-
nelle de près de 100 millions de dollars ou 6,2 % par rapport à l’exercice précédent.» La Société des alcools du Québec représente un bel exemple de marketing efficace parce qu’elle s’est donnée comme préoccupation constante de maintenir le juste équilibre entre son mandat commercial et son rôle social tout en provoquant une croissance régulière importante du vin. L’engouement des Québécois pour le vin rosé n’a d’égal que leur nouvel engouement pour le vin en général au détriment de la bière, dont les ventes baissent sans cesse et des spiritueux qui en termes statistiques font figure de parent pauvres. Sur 12 provinces et territoires au Canada, le Québec, en pourcentage, est 2ième en terme de consommation de vin, 2ième en consommation de bière, mais 12ième pour la consommation de spiritueux. Le premier rang en vin, en bière, en spiritueux est détenu en pourcentage à tous les postes, par le Yukon qui n’a que 31 000 habitants !
Conclusion Enfin, les statistiques d’augmentation de la consommation du vin au Québec de 12,6 litres à 19,3 litres per capita en 10 ans démontrent le potentiel de persuasion qui se trouve au Québec avant de rejoindre les 25 litres prévisibles d’ici 5 ans. Le rosé en ce sens est un catalyseur certain pour les nouveaux consommateurs. Ce qu’il faut retenir de tout cela est que le marché québécois est en progression.Tout producteur de vins rosés peut y trouver une place importante s’il sait utiliser les motivations de consommation. Le marché n’est pas saturé et il n’est pas nécessaire de déplacer un type de vin pour faire progresser le vin rosé. Il va s’ajouter aux autres types de vins consommés. Aux producteurs de prendre leur place ! Les vins rosés se développent partout dans le monde vitivinicole et les produits qui en résultent sont généralement de bonne qualité et de bonne sapidité. Il y a donc un marché à prendre par ceux qui sont capables de développer une stratégie marketing qui s’adresse au goût des personnes plutôt que de s’adresser vaguement aux masses.
RencontreS internationalES du
ROSe
2008
du vin rosé au bresil Etude sur les imaginaires Les perspectives sur le Brésil L’étude que nous avons faite en janvier dernier jusqu’à mars est une étude sociologique extrêmement qualitative. Après avoir donné succinctement quelques chiffres pour placer ce marché par rapport à ses voisins, je traiterai d’aspects plus qualitatifs de l’ordre du ressenti et des représentations qui sont projetées sur ce produit nouveau pour le marché Brésilien. Nous avons fait des tests de produits notamment des « scénarisassions de moments » pour essayer de comprendre les décalages qu’il pou-
hedi zammouri
vait y avoir entre pratique et représentation. La dégustation de vins était orientée en direction d’hommes majoritairement, de 28 à 53 ans, d’une catégorie socioprofessionnelle relativement supérieure puisque nous avions des ingénieurs, des chefs d’entreprises, des gens qui travaillent dans le marketing du vin, des gérants de restaurants notamment à Copacabana ainsi que des cinéastes, des journalistes ou des professeurs de 2ème cycle. Leur consommation était globalement quotidienne lors des repas et certains avaient déjà bu du vin rosé qu’ils considéraient comme un vin « guilleret» selon leurs mots et qu’ils lient à
l’enfance et à une habitude culturelle notamment pour les personnes Brésiliennes d’origine Italienne ; en effet, il existe certains « métissages », surtout dans le sud, qui ont un impact culturel en terme de consommation. Le vin pour eux dépend du moment, de la compagnie, des plats, des sentiments et de l’heure de la journée. C’est une consommation épisodique qui ne s’inscrit pas forcément dans une tradition mais plutôt sur un contexte qu’on va qualifier de « relationnel ». Les chiffres de l’Union Brésilienne de Viniculture placent la consommation de vin par tête autour de 1,8 l par personne (d’après les chiffres de 2004) alors qu’en Argentine par exemple qui est le pays au plus fort taux de consommation par tête en l’Amérique Latine, ce chiffre est de 28,6 l. Il y a une forte croissance, de l’ordre de 20% au passage de l’an 2000, qui s’est effectué sur tout le Brésil ; ces 2 dernières années, il y a eu une croissance de 5% qui est à relativiser avec l’évolution du pouvoir d’achat des consommateurs Brésiliens. Ce qui implique qu’il faut toujours tenter d’effectuer une analyse non pas seulement nationale mais aussi intra nationale en essayant de distinguer un taux par région ; ainsi, ce taux peut être par exemple de 2,5 l dans le sud grâce à la population italienne et à l’influence culturelle
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notamment sur un produit comme le vin. De janvier à mars 2008, parmi les vins fins, les vins de table, les vins verts, les mousseux, les portos, les malagas, les madères et les xérès, le Brésil a importé 260 000 litres de vins français sachant que pendant les 12 mois de 2007 ont été importés 2 millions 700 milles litres de France contre 18,8 millions du Chili. Dans le classement, la France est donc en 5ème position et le Chili à la première. Quant au mousseux, champagne, Asti et autres, de janvier à mars, ont été importés 114 000l de mousseux français contre 150 000l de mousseux italiens. On voit donc une forte influence européenne avec une concurrence entre France et Italie. De janvier à avril 2008, ont été importés 55 millions de dollars de boissons alcoolisées. Et au sein de ce chiffre, on a 38 millions de dollars d’importation de vins. Il faut replacer ces chiffres en comparaison avec l’année 2007 où le marché brésilien a consacré 275 millions de dollars à l’importation de boissons alcoolisées dont 175 millions au vin. La faible consommation de vin au Brésil pose le vin comme un évènement pour l’instant marginal dans la vie d’un Brésilien. Le vin rosé, plus particulièrement n’appartient pour le moment pas à l’imaginaire du Brésil. Cette virginité de marché
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ROSe
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du vin rosé au bresil Etude sur les imaginaires
peut être à la fois un inconvénient et un avan-
français. Quant aux vins italiens, ils sont soute-
tage. Les consommateurs se déclarent timides
nus par la présence d’une population au sud
envers ces vins rosés ; ils les placent souvent à
du pays dont l’imaginaire concernant le vin et
la place du vin rouge qui est souvent français
l’univers français reste souvent très restreint
dans le discours des enquêté,s et le position-
et est fait de préjugés de ces consommateur
nent dans des circonstances où le vin est d’ha-
brésiliens. Ce sont des images qui sont for-
bitude absent comme l’apéritif ou la boisson
mées par l’expérience propre des interviewés,
festive.
souvent pauvres, et qui ne correspond pas à un imaginaire qu’ils pensent partager avec les
Le vin français est peu consommé dû à des prix
autres brésiliens. Les vins français sont selon
élevés comparés aux revenus brésiliens mais
eux, éloignés des réalités, et cela est dû à leurs
aussi parce que peu de publicité est faite au
valeurs globales. Autant en terme de prix que
niveau du vin français ; de ce fait les person-
d’image.
nes le méconnaissent et finissent par l’acheter
Le vin rosé est pour le moment totalement
pour l’étiquette, simplement pour être d’ori-
occulté par d’autres éléments relatifs au vin.
gine française. Beaucoup de brésiliens savent
Ce que nous avons choisi d’appeler la « fran-
d’instinct que le vin français est spécial et dif-
cité » donc le caractère français du produit, le
férent ; ils le considèrent comme une chose
luxe à cause de son prix et le côté distinctif,
précieuse et rare mais, malheureusement, ils
exceptionnel qui implique une distance entre
considèrent aussi que peu de personnes peu-
le consommateur et ce produit. Néanmoins,
vent réellement expérimenter ce produit. Son
cette consommation est liée à des rituels de
accès en devient donc limité, timide. Ce qui
verbalisation et nous verrons que c’est peut
implique que lorsqu’on boit du vin au Brésil, on
être une entrée intéressante et alternative
boit d’abord un vin chilien ou italien avec une
pour placer le rosé sur ce marché. En effet, les
récente progression des uruguayens bien que
brésiliens ont un complexe d’infériorité devant
la réputation soit plus favorable en terme de
le vin français : ils le surestiment, ils le sacrali-
valeur au vin français. Il y a donc encore ici un
sent réellement pour son prix élevé ainsi que
décalage où les pratiques sont gênées par une
pour le luxe et le raffinement véhiculés par
barrière psychologique qui est : « Je ne saurais
l’image stéréotypée de la France, nivelant ainsi
pas apprécier ». Donc un consommateur qui
les différents vins français sur une échelle ho-
se bride car le vin chilien n’a pas l’image du
mogénéisée. Il y a donc une indéfinition des
vin français. Il est moins cher et moins sophis-
catégories de vins perçues par le consomma-
tiqué et n’a donc pas la « survaleur » des vins
teur. Le vin rosé n’émerge pas des autres. La
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GS 51 RIO DE JANEIRO credit Olivier Venel - Fotolia.com
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du vin rosé au bresil Etude sur les imaginaires
différenciation est encore floue et il en résulte
implique qu’il faut exprimer la justesse de son
un amalgame. En fait l’imaginaire du vin est au
intériorité, qu’il faut essayer de communiquer,
Brésil phagocyté par des éléments très diffé-
de lier les amis souvent par ce medium. C’est
rents de ce qui est intrinsèque au rosé et assez
un vin qui doit faire parler, qui doit permettre
éloigné des tendances sociétaires brésiliennes.
de jauger, qui est un vin de souvenir, qui ren-
Cet imaginaire brésilien de « moment qu’ils as-
voit parfois à des moments fantasmés comme
socient au vin » est l’émergence de moments
l’enfance ou l’italianité ancestrale.
sociaux (mémoire épisodique, souvenirs), de
Le vin rosé est associé au Brésil à une tradition
l’aspect relationnel, expérientiel. Ces rituels
des gestes. Il a un contenu qui est souvent
convoquent un ensemble de « socialités » qui
flou mais cette ritualisation est liée à la spéci-
doivent être propices ; l’opportunité du par-
ficité du produit qui doit correspondre à un
tage de ce produit est moins vu comme une
geste relationnel, liant, horizontal. La frater-
introspection qu’un liant, une façon horizon-
nité que provoque cette ritualisation émane
tale de consommer. Donc le vin n’est pas perçu
de l’idée valeur de partage des sens, du par-
comme un vin territorial mais plutôt évène-
tage des moments et du lieu plus que d’une
mentiel et fraternel.
connaissance théorique et historique. Cette dimension est donc chez le consommateur
Le marqueur du capital culturel lié au vin est
brésilien plutôt interactive et pragmatique
le fait qu’il dépend du moment où il s’agit de
plutôt que qualitative.
démontrer ses capacités sensitives. Pour un brésilien le vin permet de se distinguer. Le vin
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Conclusion Nous allons conclure en donnant un bref panorama de la culture brésilienne en montrant qu’elle valorise la capacité d’un vin à produire plusieurs vins c’est-à-dire les coupages et les assemblages. Malgré le handicap du prix, qui est la question centrale du pouvoir d’achat brésilien, les consommateurs critiquent également le manque de soins avec lequel la France exporte ses vins au Brésil. Ils se réfèrent aux vins de basse qualité, sans aucun contrôle, et surtout à la façon dont le Brésil est traité qu’ils jugent spéciale, particuliere. Les spécificités des vins restent floues et ils s’étonnent d’un mauvais marketing du vin français au Brésil. Ces déclarations sont celles de restaurateurs ou de gens qui travaillent dans le marketing du vin, de journalistes ou autres acteurs que nous nommons spécialistes ou experts. Le vendeur lui-même, souvent ne sait pas ce qu’il vend. Il ne possède pas le vocabulaire spécifique de ce vin ; l’absence d’information galvaude le produit. Or, pour les professionnels, ce produit est surtout lié à une ritualisation qu’ils estiment essentielle. Cette sacralisation et les assemblages constitutifs de la culture brésilienne impliquent une valorisation des vins mélangés, des vins métissés (comme les communautés latines et indiennes dont sont issues ce peuple). Ce métissage des mets et des boissons est, selon nous, un point qui doit être valorisé sur ce marché. En effet, le Brésil, pays festif, implique le besoin d’un vin qui se déguste au présent. Nous insistons sur ce corollaire de socialité, convivialité et relation directe avec tous les constituants d’immédiateté, de présentéisme, de sensualisme qui sont des valeurs que les consommateurs brésiliens raccrochent automatiquement au vin ; ce corollaire se distingue un petit peu d’une expertise qu’on pourrait dire historique ou traditionnelle. Le vin n’a réellement jamais fait parti du quotidien des brésiliens et la franchise avec laquelle nous avons entamé cet exposé est à exploiter selon nous dans les termes d’une proposition plutôt relationnelle, évènementielle et expérientielle qui est liée à la spécificité du vin Rosé restant encore à exploiter.
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2008 Conclusions Jean-Claude RUF
Jean-Claude RUF, délégué de l’Organisation Internationale de la Vigne et du Vin, a assuré la conclusion générale du colloque.La 3ème édition des Rencontres Internationales du Rosé a accueilli plus de 200 participants et s’est achevée par un cocktail et une dégustation de vins Rosés du Monde aimablement mis à disposition par les Œnologues de France.
Gilles Masson Patrick Aigrain Jean-Philippe Perrouty AurĂŠlie Deluze Philippe Aurier Andrew Chapman Ghislain K.Laflamme Stephane Hugon