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E. Comportement de la Lumière sur la Matière

La lumière est un élément immatériel qu’il est possible de visualiser lorsqu’il éclaire une surface matérielle. La vision consiste le premier et le plus important sens pour la détection de la lumière. Lorsque la lumière éclaire un corps, quel qu’il soit, notre œil a la capacité de la percevoir par le simple fait que la lumière va lui envoyer l’image exacte de ce corps.

En architecture, la lumière et la matière sont deux éléments indissociables car

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l’une dépend de l’autre et leur rencontre permet à l’architecture de prendre forme. En effet, le couple lumière/matière peut attirer le regard dans une direction plutôt que dans une autre, de mettre un objet en valeur ou encore transmettre une émotion. Par contre, les ressentis dépendent de la nature de la matière sur laquelle les faisceaux lumineux se réfléchissent et du volume dont elle constitue les limites. Il est évident que la lumière se comporte différemment selon les propriétés des matières et suivant leurs opacités, transparences, translucidités et leur degré de réflexion.

Figure 19 : Résultantes du comportement de la lumière sur la matière

21. Philippe Dagen, ‘ L’artiste Anish Kapoor s’approprie l’ultra-noir’’ le monde arts, 3 mars 2016

Figure 20 : Oeuvre The Earth, 2012, Fibreglass, wood and blue pigment, 86,4 x 94 x 94 ,Anish Kapoorcm. Ph Rémi, Lavalle, galleriacontinua.com 1. L’absorption : En rencontrant une surface opaque, la matière peut absorber de la lumière. Le degré d'absorption qui cause l'apparition de certaines couleurs dépend de l'absorption de la longueur d'onde. La couleur bleu ressortira au cas où la matière, qui a la capacité d'absorber les longueurs d'onde qui produisent les couleurs rouge, jaune et vert, est constituée de pigments. La lumière absorbée produit une autre forme d'énergie qui est la plupart du temps de la chaleur. Ce qui explique que la plupart des longueurs d'onde sont absorbées et la surface devient chaude en présence d'une couleur foncée, se rapprochant du noir. Nous avons eu la chance de découvrir l'œuvre de l'artiste britannique Anish Kapoor lors d'une visite au musée d'art moderne de Naples, le MADRE. C'était une exposition lors de laquelle nous avons vu la que la couleur noire parvient à absorber 99,96% de la lumière suite à une mise en évidence d'un simple carré noir sur le sol, plus précisément, un carré de couleur ultra noir. D'où l'importance de la précision que, face à cette nuance, on a vraiment l'impression de se trouver face à un vide absolu. « C’est si noir que vous ne pouvez presque rien voir. Imaginez un espace si sombre qu’en y

pénétrant, vous perdez toute idée de qui vous êtes, d’où vous êtes

et la conscience du temps. Votre état émotionnel en est affecté et, sous le coup de la désorientation, il faut que vous trouviez à l’intérieur de vous quelque chose d’autre » 21

2. La diffusion :

Nous avons expliqué le phénomène d’absorption de la lumière par la matière. Inversement, la diffusion de la lumière aura une réaction opposée. Au contact d’une matière opaque, juste une partie de la lumière sera

absorbée mais la partie restante sera alors diffusée. C'est-à-dire que la lumière va être réfléchie et va se propager dans toutes les directions. Comme le cas pour les matières à nuance claire, par exemple le blanc, lorsque la lumière rencontre une matière peu absorbante de longueurs d’ondes, c’est la diffusion qui attire souvent notre regard dans une direction plutôt que dans une autre. En fait, la lumière attire l’œil humain qui, par suite, va la diriger dans notre cerveau pour lui révéler, et va lui donner conscience de l’existence de tel ou tel objet. A ce sujet, des élèves ont essayé de comprendre, en réalisant une expérience assez intéressante comment il était possible de changer la perception d’un couloir traversé de manière quotidienne. Pour ce faire, ils ont créé ainsi une nouvelle diffusion de la lumière qui attirait le regard sur les bandes plutôt que sur les murs habituels en déplaçant des bandes de couleur blanche dans d’autres directions que les murs existants. Comme résultat l’espace a été perçu différemment tout en jouant sur lumière et regards.

Figure 21 : Installation dans un couloir de l'École d'Architecture de Saint-Etienne, violetteprost.com

3. La réflexion :

Autre que les phénomènes complémentaires d’absorption et de diffusion, la réflexion résulte de la réaction de la lumière projetée sur des surfaces opaques. En renvoyant ou déviant la lumière dans une seule autre direction, sous le même angle d’incidence, la réflexion arrive à se distinguer de la diffusion. D’autre part, les matériaux qui permettent la réflexion sont complètement différents de ceux qui engendrent la diffusion des rayons lumineux. En effet, il est impossible de voir notre reflet, sur une surface opaque blanche, car nous ne distinguons, en réalité, que notre ombre. En revanche, les matériaux réfléchissants permettent de voir notre reflet entièrement. Le plus souvent, ce phénomène se produit sur des surfaces comme certains métaux ou les miroirs. En architecture, la matière miroitante permet la création de l’illusion dans le sens ou un miroir peut aller au-delà de la réalité, la dépasser voire l’exacerber. Notre perception des formes, de leur orientation, de leur taille est, influencée par l’effet de réflexion. Ce dernier transforme l’expérience vécue de l’espace Ce genre d’illusion dans l’architecture suscite des émotions mitigées. Nous pouvons nous sentir désorienté et sans repère.

Figure 22 : Louviers Music School Rehabilitation and Extension, Luc Boegly

Il est primordial de différencier les termes « transparent et translucide » qui portent souvent à confusion. Transparent signifie ce : « qui, se laissant aisément traverser par la lumière, permet de distinguer nettement les objets à travers son épaisseur. » 22, alors que translucide évoque ce : « qui laisse passer la lumière, sans permettre toutefois de distinguer nettement les contours des objets » 23

22.23. Petit Larousse illustré (1997) ,Paris, Larousse

24. Richard Feynman, Lumière et matière Une étrange histoire p32, Paris, inter éditions <sciences>, 1987

4. La transmission : La transmission est un phénomène relié aux matières transparentes. En effet, il faut préciser que les matières transparentes ne laissent seulement pas la lumière passer et se propager au-delà d’elles, mais en réfléchissent bien évidemment une partie. Cependant, la perception de la réflexion dépendra de l’intensité lumineuse et du contraste de lumière entre l’intérieur et l’extérieur. « J’imagine que vous savez tous que la lumière est partiellement réfléchie par une

surface, telle que la surface de l’eau où on voit à la fois, surtout le jour, ce qui se trouve au fond de l’eau sous la surface, et ce qui est

réfléchie par la surface. Le verre se comporte de la même façon : si vous allumez une lampe en plein jour dans une pièce et que vous regardez dehors, vous voyez à la fois les choses qui se trouvent dehors et le reflet de la lampe dans la vitre. » 24. Le physicien richard Feynman nous fournit une explication de la réflexion qui vient de s’ajouter à la transmission de la lumière dans les matières transparentes. Il explique que le contraste entre l’intérieur et l’extérieur fait d’avantage ressortir la réflexion que la transmission. Il en va de même, pour les matières translucides sauf qu’elles ont en plus la particularité de diffuser également la lumière. Cette matière translucide attire vraiment le regard et l’attention dans l’architecture, non seulement parce qu’elle laisse passer la lumière mais aussi parce qu’il est impossible de distinguer clairement ce qui se trouve derrière elle et cela suscite la curiosité.

Figure 23 : Pavilion concu par Jesús Torres García Architects, Pinterest.com

Figure 24 : Raytrace, une installation immersive conçue par Benjamin Hubert, azuremagazine.com 5. La réfraction : La réfraction se produit lorsque la lumière traverse des matières transparentes comme le verre et l’eau, elle entre dans un nouveau milieu qui est différent de l’air, ce qui provoque une déviation de sa trajectoire. Ce phénomène a comme effet la déformation de la perception que l’on a des objets. Par exemple, si on plonge une règle dans l’eau, la partie immergée nous semblera changée de trajectoire.

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