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Musiques
from PalaceScope 89
by PalaceScope
MUSIQUES Notre sélection
INCONTOURNABLE Cascadeur
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Metronomy
On ne présente plus Metronomy. Depuis The English Rivieraen 2011 les Anglais, menés par le prodige Joseph Mount, ont imposé leur pop rétro-futuriste dorée au soleil de Californie, mélangeant rock, pop et électronique, boîtes à rythmes et guitares, dans un même élan hédoniste et mélancolique. Véritable chef d’orchestre et travailleur acharné, multipliant l’écriture pour d’autres (Robyn, Jessie Ware, Diplo et même Marion Cotillard) ou les side-projects (comme Posse, où il invite la crème des jeunes talents), Joseph Mount a trouvé le temps de finaliser Small World, un septième album de pop facile à chantonner, comme le déclare le principal intéressé : «Je me suis souvenu quand, enfant, j’étais assis sur la banquette arrière de la voiture de mes parents et qu’ils jouaient leur musique et que je me disais “c’est horrible”, mais en même temps il y avait toujours une ou deux chansons que j’aimais bien. J’ai pensé que ce serait amusant de faire ce genre d’album avec des titres que les enfants pourraient aimer.» Retrouvant le délicat équilibre entre pop bubblegum et expérimentations soniques qui faisait tout le Il y a dix ans, assidu au piano depuis ses huit ans, Alexandre Longopensait ne jamais réussir dans la charme du groupe à ses débuts, Small World, avec ses paroles sur le sens de la vie et ses neuf titres faciles et décomplexés, musique. Malgré trois albums autoproduits, des collabora- nous réconcilie avec Metronomy, qui tournait légèrement tions à la pelle avec des formations locales, son mélange de en rond ces derniers temps. classique et d’électronique et sa voix haut perchée irrésistiblement troublante, il semblait n’intéresser personne. Mais le destin est capricieux: enfin repéré via le tremplin Vitalic
CQFD des Inrocks en 2008 et signé sur le mythique label Voilà plus de vingt ans Casablanca, TheHuman Octopus, son premier album, collec- déjà que le producteur tion de morceaux tirés de ses anciens disques autopro- dijonnais, fer de lance de la duits, tout en installant l’univers fragile et singulier de vague électroclash qui a Cascadeur, fut l’étincelle nécessaire à un démarrage en secoué les années 2000 avec fanfare. Gagnant des Victoires de la musique en 2015, des titres comme La Rock 01ou Cascadeur a depuis sorti trois albums couronnés de succès, My Friend Dario, s’est imposé signé de la musique pour le cinéma et la télé, chanté l’in- comme un des meilleurs procroyable Collectoren duo avec Christophe et imposé son ducteurs issus de la French personnage scénique : une combinaison de motard sur- touch avec sa disco noire et montée d’un casque blanc frappé d’une étoile rouge, le survoltée et ses lives fulguvisage parfois caché d’un masque comme ceux que portent rants en forme d’overdose de les catcheurs mexicains. Pour Revenant,son quatrième stroboscopes et de décibels. album mûri longuement et patiemment, Cascadeur a Alors qu’il devait fêter l’anniversaire de ses vingt ans de carchangé d’échelle, sorti les orchestrations qui se déploient rière fin 2020 en direct de Bercy avec un best of de sa carrière majestueusement, caressé son goût pour la mélancolie et des tubes qui nous ont transportés sur le dancefloor, ratdans le sens du poil, sorti le grand piano, invité des chœurs trapé par l’épidémie de Covid et les confinements successifs, d’enfants. Mais surtout adopté le français sur la plupart des Vitalic a préféré passer ses nerfs sur Dissidænce. Un double titres, lui qui ne chantait qu’en anglais, offrant une nou- album où il revient aux fondamentaux de ses débuts, et sa velle dimension à sa voix fascinante, aiguë et fragile, qui techno brute, énervée et revêche, parfaite comme bande-son fait penser à celle de François & The Atlas Mountains, des nombreuses raves illégales qui poussent comme des Christophe ou Antony Hegarty. Evoquant des références champignons tous les week-ends. Mélange de turbines éparses, actuelles comme old school, de Bon Iver à Talk Talk électros, de transe sous speed et de balades synthétiques, en passant par James Blake, le frissonnant The Revenant Dissidænce, ses deux volumes et ses 15titres transpirants et marque le retour en beauté de Cascadeur. électriques, est une impeccable machine à danser à laquelle il est difficile de résister.
Les trois albums à ne pas manquer
Sparks
IMMANQUABLE
On pensait les Sparks oubliés à jamais et Léonie Pernetenglués dans les années 1980, dont ils furent un des plus beaux joyaux, mais c’était sans compter sur le pouvoir du cinéma, et l’étourdissante comédie musicale Annettede Leos Carax, dont ils ont composé la bande-son, pour remettre sur le devant de la scène le duo composé des frères Mael dont l’influence est revendiquée par non moins que Morrissey, Justice, Björk, Franz Ferdinand, New Order ou Indochine. Vétérans d’une pop aventureuse et curieuse, toujours à l’affût des collaborations les plus hasardeuses et des mutations musicales, réputés pour leur douce folie, les Sparks seront sur une scène parisienne, après une longue absence, pour un de leurs concerts surprenants et magiques dont eux seuls ont le secret. SPARKS. Au Casino de Paris, 16 rue de Clichy, Paris IXe, le 19avril.
Gusgus
Collectif d’artistes multidisciplinaires (vidéo, musique, art, orientales et boîtes à rythmes pour modeler de toutes pièces une pop lettrée et poétique, intime et universelle, performance) à géométrie variable né dans les années 90’s, le désormais trio islandais GusGus a depuis resserré son champ d’action à l’utilisation des synthétiseurs et des boîtes à rythmes voués à se mélanger au beau milieu de la piste de danse juste en dessous de la boule à facettes. Avec plus de dix albums au compteur distillant une électro-pop mélancolique et dansante qui fait parfois penser aux Pet Shop Boys qui se seraient frottés à la techno minimale allemande, GusGus a surtout assis sa réputation avec ses concerts épiques et en sueur. Des obligés où le groupe prouve en beauté qu’il y a tout au fond Rhye
de lui un esprit rock & roll mâtiné de disco qui palpite et ne Duo mystérieux surgi de demande qu’à s’exprimer. GUSGUS. A la Gaité Lyrique, nulle part en 2013 avec 3 bis rue Papin, Paris IIIe, le 30avril. Woman, un premier album de soul cotonneuse, où cordes
Owlle symphoniques et artefacts électroniques, jazz et soul s’entre-
Jeune Française originaire de Nice, passée par les Beaux-Arts, avant de céder à l’appel de la mêlaient, porté par une voix androgyne à filer des frissons, Rhye leva rapidement le mysmusique, Owlle s’est en quelques années forgé tère de son anonymat. Derrière ces mélodies imparables, tout une place de choix dans le renouveau de la pop en caresses et chuchotements, se cachaient le chanteur canafrançaise. Travaillant avec les producteurs que dien Mike Milosh et le producteur danois Robin Hannibal, tout le monde s’arrache, comme Myd, Pierrick un tandem qui ne résista pas longtemps aux critiques dithyDevin, Max Baby ou Surkin, en featuring sur des rambiques et aux salles de concerts combles. Désormais mené titres signés Cassius ou Vitalic, en version remix pour en solo par Mike, sa tessiture de voix qui accomplit des merDepeche Mode ou Sia, Owlle a imposé sa variété dansante et veilles, et après quelques égarements musicaux, Rhye a vibrante qui puise avec allégresse dans les 90’s à l’époque où retrouvé avec Home (son quatrième et certainement meilleur Madonna et Cyndi Lauper, dont elle se revendique, impo- disque) tout ce qui faisait la magie de ses débuts, ses rythmiques saient leur féminité remuante et provocante. Avec Folle lascives, ses violons amoureux et ses touches de piano clairsemachine, son troisième album, Owlle remet les compteurs à mées, qui ne sont pas sans rappeler le romantisme pointilleux zéro, troque l’anglais de ses débuts contre son français natal, des disques de Talk Talk, Sade ou Everything But the Girl. tout en déroulant un post-r’n’b sensuel et mouillé, loin de la RHYE.Au Casino de Paris. 16 rue de Clichy, Paris IXe, le 27mars. pop doucement dansante à laquelle elle nous avait habitués. OWLLE. A la Gaîté Lyrique.3 bis rue Papin, Paris IIIe, le 20avril.
Découverte en 2018 avec Crave, un tout premier disque fascinant, rempli de promesses et d’espoirs, Léonie Pernet a placé la barre de l’excellence très haut avec LeCirque de consolation. Un nouvel album, où elle troque le français à la place Les concerts à ne pas rater de l’anglais, poursuit le travail de décloisonnement et de métissage opéré par la productrice qui prend un malin plaisir à mélanger piano et électro, cordes et synthétiseurs, percussions écorchée vive et hédoniste. Un mélange de genres portés par des petits tubes de variété raffinée et ciselée à l’extrême comme Monamour, tu bois tropou Ilpleut des hommes, entre lesquels s’articulent des déchirures pop quasiment liturgique à la manière de LaMort de Pierreque Léonie Pernet viendra défendre sur scène avec la ténacité qui est la sienne. LÉONIE PERNET. Au Trianon. 80 boulevard de Rochechouart, Paris XVIIIe, le 25mars. Rubrique «Musiques» réalisée par PATRICK THÉVENIN