2nde Histoire IV - DES EUROPÉENS À L’ÉPOQUE MODERNE - Gérard DELMAS

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HISTOIRE

THÈME 4

NOUVEAUX HORIZONS GÉOGRAPHIQUES ET CULTURELS DES EUROPÉENS À L’ÉPOQUE MODERNE

Chapitre 1 L’élargissement du monde (XVème et XVIème siècles)

Le contournement de l’Afrique par les Portugais

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L’élargissement du monde (XVème et XVIème siècles) Introduction ème ème Dès les Croisades, du XI au XIII siècle, les Européens avaient découvert, par les échanges avec les commerçants Arabo-musulmans, des produits que l’Europe ne produisait pas, notamment la soie et les épices. Ces biens provenaient des pays de l’Asie orientale, Chine, Inde, Japon que les Européens groupaient sous le terme : les Indes. C’est pour contourner l’Islam que les Portugais et les Espagnols se lancent sur les routes ème maritimes au XV siècle, les deux autres puissances océaniques, la France et l’Angleterre, étaient occupées dans la Guerre de Cent ans. Problématique Comment ces découvertes successives ont-elles entraîné un bouleversement dans l’ordre du monde ?

I.

Les Portugais ouvrent la voie 1. Les premières tentatives

En Extrême-Orient et en Asie Deux mouvements sont notables : ème 1) Il y eut, d’abord, des ambassades de moines franciscains au milieu du XIII siècle, pour tenter de dénouer des problèmes géopolitiques liés à la grande extension de l’empire mongol qui menace l’Europe de l’Est (Jean de Plan Carpin, Guillaume de Rubrouck). 2) Marco Polo (1254-1324) ouvre la porte de l’Asie aux marchands vénitiens grâce à la Route de la soie. Polo participe également à l’élan des grandes découvertes grâce à son Livre des merveilles. En Afrique Depuis l’Antiquité, les Européens connaissent l’Afrique du Nord (l’Empire romain s’étendait, au Sud, du détroit de Gibraltar à l’Égypte). Ainsi de nombreux marchands italiens sont installés à Marrakech, Tunis, Alexandrie... Ceuta, au Maroc, est une forteresse portugaise depuis 1415. Mais l’Afrique subsaharienne continentale est inconnue des Européens, alors que les Arabo-musulmans s’y livrent au trafic d’esclaves. Les Européens explorent peu à peu littoral occidental. 2. Henri le Navigateur

La péninsule ibérique à la fin du XV

ème

siècle

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er

Le prince portugais Henri le Navigateur (1394-1460) joue un rôle majeur. Fils de Jean 1 de ème Portugal, il est le financier et le conseiller des expéditions portugaises du XV siècle. Sa priorité est l'exploration des côtes africaines au sud du Maroc à la recherche d’or et du Royaume du prêtre Jean (royaume chrétien légendaire). On doit à Henri le Navigateur l'exploration de Madère en 1418, des Açores entre 1432 et 1457, du Rio de Oro en 1436 et de la côte du Sénégal en 1445.

L'infant Henri le Navigateur

En 1415, il s'installe à Sagres, au sud du Portugal et crée en 1431 l'académie de Sagres, une institution de formation des navigateurs. On y étudie la navigation mais aussi la géographie et l'astronomie. Henri y rassemble un fond important de livres et de cartes afin de faciliter les expéditions. Ses architectes construisent les caravelles, vaisseaux des Grandes Découvertes, capables d’affronter la houle de l’océan. De plus, les marins portugais disposent de la boussole pour se diriger et du sextant pour se situer. La prise de Ceuta en 1415 marque le début de cette expansion. Ceuta est une ville stratégique, au Maroc, à l'entrée du détroit de Gibraltar où aboutissent l'or et les épices. À partir de 1416, une expédition est financée chaque année. À chaque découverte, le capitaine plante un pilier de pierre de deux mètres de hauteur, le padrão, afin de marquer l’avancée portugaise et de faire savoir au suivant que quelqu'un est déjà passé et qu'ils sont sur la bonne route. En 1419, João Gonçalves Zarco, Tristão Vaz Teixeira puis Bartolomeu Perestrelo débarquent à Madère. La colonisation commence et s'intensifie dès 1420 avec l'introduction des céréales, de la canne à sucre et de la vigne. En 1427, Diogo de Silves découvre les Açores. La recherche de ressources est alors autant une motivation que l'esprit de découverte. Étape par étape, les Portugais contournent le continent africain pour atteindre les Indes, sous-continent aux richesses convoitées, avec lequel les contacts commerciaux terrestres ont été rompus depuis que les Turcs ottoman se sont emparés de Constantinople en 1453. En 1434, Gil Eanes dépasse le cap Bojador (actuel Sahara occidental), point le plus méridional connu des Occidentaux. Entre 1441 et 1445, Antão Gonçalves et Nuno Tristão dirigent des expéditions militaires au sud du cap Bojador, atteignent le Sénégal et le Cap-Vert. Diogo Gomes découvre la Guinée en 1450. En 1460, les navires de Pedro de Sintra atteignent la Sierra Leone, c’est aussi l’année de la mort d’Henri le Navigateur. La mission de reconnaissance du contournement de l’Afrique est confiée à Diogo Cão. En 1483, il atteint l'embouchure du Congo. Il débarque ensuite au Gabon, en Angola et atteint l'Afrique du Sud en 1486

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Padrão de Diogo Cão au Cabo da Cruz en Namibie point atteint en 1485

3. De l’Océan Atlantique à l’Océan Indien Bartolomeu Dias est le premier explorateur à relier l'Océan Atlantique et l'Océan Indien par la voie maritime. Né en Algrave, au sud du Portugal en 1450, Bartolomeu Dias participe à sa première expédition à l'âge de 16 ans. En 1487, Bartolomeu Dias conduit une exploration le long des côtes africaines avec deux caravelles et une nef dédiée au transport du ravitaillement, afin de prolonger la durée des traversées au large. L'équipage est confronté à la bascule des vents dominants entre l'hémisphère nord et l'hémisphère sud. La nef, peu rapide, gêne leur progression. Elle est laissée en arrière pour être récupérée 9 mois plus tard. Aux alentours du sud du continent africain, les caravelles sont prises dans une tempête qui les amène à la côte, à hauteur de la baie Saint-Blaise (appelé aujourd'hui baie Mossel), à 370 km à l'est de la pointe de l'Afrique du Sud. Ils y font escale le 3 février 1488, et s'aperçoivent qu'ils sont parvenus dans l'Océan Indien et ont doublé, sans le voir, le Cap de Bonne-Espérance. Bartolomeu Dias veut poursuivre l'exploration, mais son équipage, épuisé, se rebelle. En faisant demi-tour, il reconnaît la pointe et la nomme Cap des tempêtes. Le roi Jean II la rebaptisera Cap de Bonne-Espérance, car il y voit la preuve que cette route maritime mènera les explorateurs portugais aux Indes. Cette découverte est capitale pour les prochains voyages des explorateurs portugais et espagnols. En effet, elle apporte la preuve qu'il existe une route maritime vers les Indes et que le continent africain a bien une fin. Pour la première fois, les cartographes conçoivent les océans comme des espaces reliés. L'horizon du monde s'agrandit.

II.

À la conquête des Indes 1. Vasco da Gama (de Gama en français)

Vasco da Gama est un noble portugais né vers 1469 à Sines, dans l'Alentejo, au sud du Portugal. Il fait des études de sciences de la navigation et devient officier de marine en 1492. er En 1497, le roi Manoel I lui confie le commandement de l'expédition maritime qui, en suivant la route ouverte par Dias en 1487-1488, doit atteindre les Indes. Il quitte Lisbonne le 8 juillet 1497 avec une flotte de quatre navires et un équipage total de 170 hommes. Après un long détour dans l'océan Atlantique sud, il atteint la terre en Afrique le 8 novembre et passe le cap de Bonne Espérance entre les 18 et 22 novembre 1497. Le 25 décembre, la flotte longe une côte que les Portugais baptisent Natal, ce qui signifie Noël en portugais. Au large du Mozambique, ils croisent des navires arabes chargés d'or, de clous de girofle, de poivre et de rubis. Vasco de Gama remonte le canal du Mozambique et fait étape à Malindi (Kenya actuel), où il réussit à obtenir du sultan local un pilote qui connaissait la route des Indes. Celuici amène la flotte à Calicut (aujourd’hui Kozhikode) en vingt-sept jours, le 20 mai 1498.

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Le commerce de cette partie de l'Inde étant contrôlé par les marchands arabes, Gama ne peut ramener que des objets indiens et non des épices en grande quantité. En 1502 Vasco de Gama fait un second voyage aux Indes, vers Cochin, ce qui lui permet de revenir au Portugal en 1503 avec une cargaison de grande valeur. Il prend alors sa retraite. Déjà nommé "amiral de l'Inde", en 1524 il reçoit le titre de vice-roi. Il se rend alors aux Indes mais il y meurt quelque temps après son arrivée.

2. Pedro Álvares Cabral Pedro Álvares Cabral est né à Belmonte au Nord du Portugal en 1467. Le 15 février 1500, il est nommé, par le roi Manoel Ier Capitão-mor (littéralement «majorcapitaine», ou «commandant en chef») afin de commander la deuxième expédition succédant à celle de Vasco da Gama. La flotte part le 15 mars 1500 de Lisbonne, comme le voyage est connu, Cabral commande beaucoup plus de vaisseaux. Il suit le chemin de Vasco de Gama, y compris le détournement vers l’ouest pour chercher les vents. Cabral savait qu'il était de son intérêt de s'éloigner des rives africaines afin de profiter des alizés de l'Atlantique sud et d'échapper aux grands calmes du golfe de Guinée, où s'immobilisaient les voiliers. Le 22 avril 1500, treize caravelles arrivent en vue de côtes inconnues, au sud-ouest de l'océan Atlantique. Pedro Álvares Cabral et ses 1200 hommes viennent de découvrir par mégarde ce qui deviendra le Brésil. Comme les autres Européens de son temps, Pedro Álvares Cabral ignore encore que les terres découvertes par Christophe Colomb quelques années plus tôt correspondent à un nouveau continent. C'est donc avec surprise qu'il découvre une vaste et belle terra incognita au niveau de la future ville brésilienne de Salvador. Il la baptise du nom de Santa Cruz (Sainte Croix). Les Indiens du cru lui offrent de magnifiques plumes d'oiseaux et aussi du brésillet, un bois connu au Portugal sous le nom de pau brasil (bois couleur de la braise) et avec lequel on fait une teinture rouge. Ce pau brasil désignera plus tard le pays : Brésil. Pedro Álvares Cabral ne manque pas de renvoyer l'une de ses caravelles à Lisbonne, en y joignant quelques beaux perroquets, pour faire part de sa découverte. Il séjourne une dizaine de jours sur ce qu'il croit être une île et en prend possession au nom de son roi sans en soupçonner l'importance. Après cela, il reprend son voyage vers le cap de Bonne Espérance, au sud de l'Afrique, fait escale sur l'île de Madagascar et arrive comme prévu aux Indes, à Cochin, où il se pourvoit en épices. Bartolomeu Dias qui avait accompagné Vasco de Gama lors de son voyage en Inde en 1497 accompagna aussi Pedro Álvares Cabral en 1500. Quand la flotte continua vers les Indes, le navire de Dias fit naufrage et celui qui avait découvert le passage du Cap de Bonne-Espérance y mourut. Cabral revient à Lisbonne deux ans plus tard avec quatre navires et non plus douze, et le tiers de ses hommes seulement. Mais il ramène aussi de pleines cargaisons d'épices et le souvenir d'une certaine découverte à l'ouest de l'Atlantique sud.

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2. Christophe Colomb et le Nouveau-Monde ème

Les côtes sud de Terre-Neuve sont déjà explorées vers la fin du X siècle par Leif Eriksson (fils d'Erik le Rouge), un Viking originaire d'Islande (Thulé). Selon les récits scandinaves les dernières expéditions vers le Vinland (désignation scandinave de Terre- Neuve) auront lieu au ème XII siècle.

ème

Statue de Leif Ericson (Minnesota, États-Unis)

Dès le début du XV siècle, de nombreux marins européens partent pêcher la morue au large des côtes canadiennes et dans le golfe du Saint Laurent (marins bretons de Paimpol et de Saint Malo, marins normands de Barfleur et Dieppe, marins du Pays basque, navigateurs irlandais et portugais). Ainsi on retrouve leur présence dans la dîme payée au roi de France sur « les Pescheries des terres neufves ». Dès cette époque, cartes et portulans circulent parmi les navigateurs européens. Des îles sont indiquées à l'Ouest de l'Océan Atlantique : île d'Antilia, île de Brasil, île de Bacalao. En 1472, l'explorateur portugais João Vaz Corte-Real se rend sur l'île de Terra Nova do Bacalhau (Terre-Neuve de la morue) sur laquelle les marins-pêcheurs portugais pêchent la morue depuis une longue période.

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Vingt ans plus tard, le vendredi 12 octobre 1492, Christophe Colomb pose le pied sur une île des Bahamas, entre la Floride et Cuba.

Christophe Colomb (en italien Cristoforo Colombo, en espagnol, Cristobal Colón, en anglais Christopher Colombus) est un navigateur italien, né à Gênes en 1451. Il rejoint son frère au Portugal en 1476. Colomb nourrit un projet : découvrir une nouvelle route pour aller aux Indes en passant à l’Ouest par l’Atlantique, Buscar el levante por el poniente (chercher le Levant par le Ponant, l’Est par l’Ouest) alors que les Portugais sont en voie de contourner l’Afrique. Il pense que, comme la terre est ronde, on peut rejoindre l’Asie en traversant l’Atlantique. Pour lui, l’Europe n’est pas si loin que ça de l’Asie (environ 2500 km). Colomb expose son projet à des experts de Jean II (João II), le roi de Portugal. Le projet est rejeté et le roi de Portugal refuse de financer. Colomb passe en Espagne et s’adresse à Isabelle de Castille en 1486. Elle refuse en 1490 en raison des demandes du navigateur ; Colomb voulait être nommé amiral de l'océan ainsi que vice-roi de toutes les terres à découvrir. Le navigateur présente de nouveau sa requête aux rois catholiques d'Espagne Isabelle de Castille et Fernand d’Aragon l’année suivante. Le conseiller du roi Ferdinand montre à la reine les intérêts financiers de l’entreprise. La reine se laisse convaincre par ses arguments, en plus des objectifs d’évangélisation allant de pair avec une telle expédition. Le 3 août 1492, Christophe Colomb quitte Palos (proche de Cadix en Andalousie au sud de l’Espagne) à la tête de trois navires, une nef (caraque) la Santa María et deux caravelles la Pinta et la Niña. L’expédition compte 90 membres d'équipage. Après une escale aux Canaries, l’expédition se lance dans une traversée qui dure plus de deux mois.

Les marins inquiets manquent de se mutiner mais, le 10 octobre 1492, la terre apparaît enfin. Les caravelles débarquent le 12 sur l'île de Guanahami dans les Bahamas actuelles. Christophe Colomb en prend possession au nom des rois catholiques espagnols et la nomme San Salvador. Le navigateur est convaincu de sa position et croit avoir atteint les Indes. C’est pourquoi il baptise les hommes qui peuplent ces îles : les « Indiens ». Les indigènes lui indiquent la présence d'or à Cuba. Il atteint l'île le 28 octobre et la déclare propriété espagnole. Le capitaine de la Pinta déserte pour aller chercher de l’or plus à l’Ouest. En décembre, la Santa Maria fait naufrage et Christophe Colomb se retrouve sur l’île Hispaniola (aujourd’hui Haïti). Il y trouvera de l’or et laissera une quarantaine de personnes dans un fort. Colomb prend la route du retour vers l’Espagne. Il rencontre en chemin la Pinta.

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La réussite de l’expédition entraîne une suite : en septembre 1493, mandaté une nouvelle fois par la reine d'Espagne Isabelle la Catholique, Colomb repart avec une flotte de 17 navires et 1500 hommes dans le but d’installer une colonie. Il découvre les petites Antilles (la Guadeloupe et la Dominique) et Porto Rico. Il explore les côtes de Cuba et de la Jamaïque. Il retrouve le reste de la garnison d'Hispaniola qu'il avait établie lors de son premier séjour. Colomb s’installe plus loin et fonde la colonie d’Isabela. Il confie le gouvernement de la ville à son frère, Barthélémy Colomb. Il découvre que les indigènes de ces îles sont anthropophages et les réduit en esclavage sous ce prétexte. Il rentre en Espagne en 1496. Colomb reprend la mer en direction des « Indes » en 1498. Cinq des huit navires sont redirigés vers Hispaniola pour la ravitailler. Il poursuit son expédition vers l'île de Trinidad. Ferdinand et Isabelle d’Espagne reçoivent des plaintes sur la mauvaise gestion de la colonie. Ils font arrêter Colomb et son frère qui sont ramenés en Espagne pour y être jugés. A l’issue du procès, Christophe Colomb se voit retirer le contrôle sur ses nouvelles terres. Il ème peut néanmoins repartir en 1502 pour son 4 voyage. Il atteint les côtes du continent vers l'actuel Honduras et découvre de l’or en abondance au Panama. Mais il doit affronter les Indigènes et perd quatre de ses navires. Il trouve refuge sur l’île de la Jamaïque. Il est sauvé et décide de rentrer en Espagne en 1504. Le grand navigateur s’éteint à Valladolid le 20 mai 1506, à l’âge de 55 ans, en étant certain d’avoir atteint les Indes. C’est le cartographe italien Amerigo Vespucci (1454-1512) qui donnera son prénom pour désigner le nouveau continent. Cependant, l’Amérique sera longtemps désignée sous le nom d’Indes Occidentales.

Les Anglo-saxons nomment toujours « West Indies » l’archipel caraïbe

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3. La persistance de la route de l’Ouest Christophe Colomb ayant trouvé l’obstacle de l’Amérique sur la route des Indes, les découvreurs cherchent à contourner le continent afin de continuer la route de l’Ouest.

Fernand de Magellan (1480-1521)

Fernão de Magalhães (Fernand de Magellan) naît en 1480, au nord du Portugal, dans une famille de petite noblesse. D’abord page à la cour du Portugal, il s’oriente ensuite vers le domaine des armes. En 1505, il est chargé, en tant qu’officier, de prendre la mer pour l’Inde, probablement dans l’expédition de Francisco Almeida. Cette première expérience maritime et militaire semble avoir fait naître en lui la passion de la navigation et de l’aventure. Mais l’un de ses principaux objectifs consiste à atteindre les îles aux épices (Indonésie). Dès 1506, il participe aux expéditions du navigateur portugais Alfonso de Albuquerque, en Indes orientales. Nommé capitaine en 1510, il prend part à d’autres expéditions militaires aux Indes. Mais en 1512, il entre en conflit avec les autorités et doit rejoindre le Portugal. Il est envoyé au Maroc dès 1513. Durant les conflits auxquels il participe, il est sérieusement blessé au genou. Il est accusé de malversations et perd les faveurs de la cour. Ainsi, le roi refuse d’augmenter sa rente pour tous les services qu’il a rendu au pays. Par ailleurs, Magellan ambitionne de découvrir une nouvelle route des Indes mais son projet est aussi rejeté par le roi de Portugal. Il décide alors de se rendre en Espagne. Abandonnant un pays qui lui semble trop ingrat, Magellan propose ses services au roi d’Espagne, futur Charles Quint, en 1517. Il espère pouvoir ainsi réaliser son rêve d’exploration. D’autant plus qu’il sait comment convaincre le souverain de son utilité. En effet, en 1494, le Portugal et l’Espagne se sont partagés leurs futurs territoires outre-mer lors du traité de Tordesillas. Ainsi, les territoires à l’ouest de l’Atlantique sont attribués à l’Espagne, tandis que ceux de l’Est reviennent au Portugal. Si, pour le compte de l’Espagne, Magellan découvre une route par l’ouest menant aux îles des épices (Indonésie), le pays pourra revendiquer ces terres en toute légitimité. L’idée plaît au jeune roi, surtout que le commerce des épices est un moyen idéal d’enrichir le pays. Malgré les interventions portugaises, Magellan parvient à quitter l’Espagne le 20 septembre 1519, avec cinq navires, la Trinidad, la Concepción, la Victoria, le Santiago, le San Antonio et un équipage de 237 marins. Embarqué sur le navire Trinidad, Magellan prend la mer pour rejoindre l’Amérique et trouver un moyen de traverser le continent vers l’Ouest. Après avoir atteint la côte, il fait escale au Brésil, puis explore l’estuaire du Río de la Plata, dans l’espoir de découvrir un passage vers la mer. Sans succès. Il décide donc de prendre pied au sud de l’Amérique, en Patagonie, durant quelques mois. Fatigués et ayant perdu espoir, certains hommes de l’équipage sont exaspérés par la détermination de leur capitaine. Ils se mutinent mais Magellan parvient à réprimer la révolte rapidement.

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Ayant repris la mer après l’incident, le navigateur atteint enfin un détroit vers l’océan de l’ouest. Il lui donnera son nom. Mais la traversée de ce passage s’avère longue et difficile. Un navire s’échoue, tandis que l’autre se mutine et regagne l’Espagne. Après plus d’un mois, le 28 novembre 1520, l’expédition arrive enfin dans l’océan. Surpris par l’extrême tranquillité de ses eaux, Magellan lui donne le nom de « Pacifique ». Il poursuit sa route, loin d’imaginer l’immensité de l’Océan. Il faut en effet trois long mois pour le franchir et c’est un équipage affamé et à bout de force qui atteint Guam, aux îles Mariannes, le 6 mars 1521. Magellan préfère toutefois ne pas trop s’attarder dans les lieux et reprend la mer. Le 16 mars, il découvre les Philippines, puis l’île de Cebu, où il fait escale. Ayant pris pied parmi les autochtones de cette île, Magellan entreprend de convertir les habitants avec douceur. Après y être parvenu, il accepte de fournir son aide au souverain des lieux. Ce dernier cherche en effet à asseoir sa domination sur l’île de Mactan, non loin de là. Reprenant les armes, Magellan se lance alors dans une bataille de laquelle il est tué. Après la mort de leur capitaine, deux navires s’empressent de reprendre la mer, tandis qu’un troisième est incendié. Tout deux arrivent aux Moluques mais un seul d’entre eux, le Victoria, commandé par Elcano, contourne l’Afrique par le Cap de Bonne-Espérance et regagne l’Espagne avec 18 marins le 6 septembre 1522. Il devient ainsi le premier navire de l’Histoire à avoir accompli une circumnavigation (tour du monde). Bien que Magellan n’ait pu achever son voyage, il en reste le seul instigateur. Outre l’exploit accompli par l’un de ses navires, son périple confirme concrètement que la Terre est bel et bien ronde. Il contribuera également au développement du commerce entre l’Amérique et l’Asie orientale. Les Anglais et Français ne se sentent pas concernés par le traité de Tordesillas et cherchent leur propre route vers les Indes : le passage du Nord-Ouest. Giovanni Caboto (1450-1498), connu en français sous le nom de Jean Cabot et en anglais sous le nom de John Cabot, est un navigateur et explorateur vénitien au service de l’Angleterre. En cherchant un passage au nord du continent américain, il débarque à Terre-Neuve en 1497. er Pour le compte du roi de France François I , l’italien Giovanni da Verrazzano (1485-1528) longe les côtes américaines et découvre en 1524 la baie de New York qu’il nomme Nouvelle Angoulême. Jacques Cartier (1491-1557), navigateur malouin, effectue trois voyages en Amérique du er Nord, lui aussi pour le roi de France François I , il explore l’embouchure de fleuve Saint Laurent en 1534. C’est Jacques Cartier qui est à l’origine de l’installation de la France au Canada.

Cartier à Gaspé, berceau de l’Amérique française

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III.

Les empires coloniaux

1. La naissance des empires coloniaux À la suite de la découverte de la Caraïbe et de l’Amérique centrale par Christophe Colomb en 1492 et du Brésil par Cabral en 1500, Espagnols et Portugais fondent des empires coloniaux dans ème la première moitié du XVI siècle. !

Le partage de l'espace

Portugal et Espagne entrent bientôt en concurrence : les Portugais s'alarment des projets d'exploration (et donc d'exploitation) des Espagnols. En 1494, les deux pays en appellent au pape Alexandre VI, qui arbitre le partage des terres nouvellement découvertes. Le traité de Tordesillas découpe le Nouveau Monde en deux zones, selon une ligne de partage par un méridien nord-sud localisé à 370 lieues (1 770 km) à l'ouest des îles du Cap Vert (46° 37' de longitude ouest). L’Est revient aux Portugais, l'Ouest aux Espagnols. Le Brésil, qui n’est découvert que six ans plus tard est donc dans le domaine des Portugais.

!

Les étapes de la conquête

La conquête portugaise Après Vasco de Gama qui fonde des comptoirs commerciaux au Mozambique (Afrique du sud-est), puis le premier comptoir portugais en Inde, à Cochin, Alfonso de Albuquerque établit la capitale de l'empire portugais à Goa, s'empare en 1511 de Malacca, la première place de commerce de l'océan Indien et atteint les Moluques, l'une des plus grandes zones de production d'épices. En 1500, après la découverte de Cabral, les Portugais commencent à s’établir au Brésil, en Amérique du Sud. La conquête espagnole Les Espagnols s'installent d'abord aux Antilles, dans l'île de Saint-Domingue, puis à Cuba et à Haïti. En 1519, le conquistador Hernán Cortés débarque au Mexique, qu'il conquiert en trois ans. Jouant des rivalités entre les Indiens, il bat les Aztèques. Cependant, la brutalité des troupes espagnoles provoque le soulèvement des autochtones lors de la Noche triste (30 juin-1er juillet 1520). L'empire aztèque est défait peu de temps après. En 1531, un autre conquistador, Francisco Pizarro, quitte Panamá pour conquérir le Pérou, au sud. Deux ans plus tard, il prend la capitale des Incas, Cuzco. Il fonde la ville de Lima (l'actuelle capitale du Pérou). L'empire inca est détruit. Dans les années suivant la conquête du Pérou, les Andes et l'Amérique du Sud sont sillonnés en tous sens. En 1535, Almagro explore le Chili. Les villes de Quito et de Santa Fe (l'actuelle Bogota) sont fondées un peu plus tard.

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2. L'organisation de l'empire espagnol L'administration Sur le plan territorial, l'Amérique espagnole est peu à peu divisée en deux vice-royautés (Nouvelle-Espagne et Pérou), elles-mêmes subdivisées en audiencas ou audiences, sortes de tribunaux dotés de pouvoirs politiques très étendus. Cet ensemble est régi par le Conseil des Indes, organisme fondé en 1524, qui décide des lois devant organiser la vie de l'empire. Les vice-rois et les capitaines généraux qui dirigent les audiences sont tous des Espagnols choisis par le pouvoir central, à Madrid. !

Francisco de Toledo (1515-1582) vice-roi du Pérou

L'exploitation commerciale Les relations commerciales entre la colonie et la métropole s'inscrivent dans le cadre d'un strict mercantilisme : les richesses de l'Amérique appartiennent à l'Espagne. Le nouveau continent n'a pas le droit de commercer avec un autre pays. Les Espagnols recherchent immédiatement des métaux précieux. Ils pillent les trésors des Indiens avant de les envoyer travailler dans les mines d'or (de l'actuelle Colombie) et d'argent (du Mexique et du Pérou) dont ils organisent l'exploitation. L'Amérique produit également des bois précieux, des peaux, du sucre et des plantes inconnues en Europe (cacao, maïs, tabac, ananas, etc.). En échange, elle reçoit de l'Espagne des tissus, des étoffes, du vin, de l'huile, des armes et des munitions. Pour des raisons de sécurité, le trafic se fait en deux convois navals annuels au départ de l'Espagne, l'un pour la Nouvelle-Espagne, l'autre pour le Pérou. Au retour, les deux flottes se réunissent à La Havane avant de rentrer au pays, afin de mieux se protéger des éventuels pirates. Chaque voyage aller-retour dure un an. !

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3. L'empire portugais : une série de comptoirs commerciaux Alors que l'empire espagnol est continental, fondé sur la possession et l'exploitation des terres, l'empire portugais reste essentiellement maritime et littoral, grâce à l'établissement de comptoirs commerciaux. Les Portugais se contentent généralement de passer des accords avec les princes indigènes (et d'envoyer des missionnaires dans les régions alentours). Le cas particulier du Brésil Le Brésil est un pays immense, peu peuplé et difficile à pénétrer. Les Portugais y ème développeront, vers la fin du XVI siècle, des plantations de canne à sucre. Mais l'essor du Brésil en ème tant que colonie de peuplement ne s'affirmera pas avant le XVII siècle. !

Église au Brésil

Le commerce avec les pays d'Asie Maîtres de l'océan Indien, donc de la route des Indes, les Portugais deviennent des intermédiaires obligés dans le commerce entre l'Europe et l'Asie. Vers 1550, ils possèdent une cinquantaine de comptoirs côtiers. Ils achètent soieries, pierres précieuses et surtout des épices, comme le gingembre de Malabar, la cannelle de Ceylan, le clou de girofle des Moluques, les noix muscades des îles de Banda, le poivre de Malabar et de Sumatra. En échange, ils apportent d'Europe des produits manufacturés, des métaux précieux, des armes. !

La faiblesse du Portugal Jusque vers 1560, le Portugal tire de ce commerce d'importants profits qui lui permettent d'investir dans de nombreuses activités : chantiers navals, industrie textile, agriculture, artisanat. Cependant, la principale faiblesse du pays tient à sa petitesse et à l'insuffisance de sa population. La main-d'œuvre manque pour assurer le développement de l'empire. Par ailleurs, la ème concurrence de l'Espagne, puis au XVII siècle, des autres empires naissants (France, Angleterre, Pays-Bas) se fait de plus en plus sentir. Entre 1580 et 1640, l’Union Ibérique est en fait une annexion du Portugal par l’Espagne, les colonies espagnoles et portugaises sont liées jusqu’à ce que le Portugal recouvre son indépendance. !

Les conséquences de la conquête sur les populations indigènes L'installation des Espagnols en Amérique se traduit par une catastrophe démographique. On estime que la population indienne d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud a été divisée par deux entre le début du XVe siècle et la fin du XVIe siècle (passant de 30 millions à 15 millions environ). On a longtemps pensé que cela avait été dû aux mauvais traitements réservés par les Espagnols aux Indiens. La conquête militaire puis les conditions de travail imposées aux indigènes dans les mines ont en effet provoqué une mortalité importante. Il semblerait cependant que cette catastrophe soit due pour l'essentiel à des facteurs microbiens, les Espagnols ayant apporté avec eux des maladies inconnues des Indiens : la grippe, le typhus, la fièvre jaune, qui ont décimé les populations. Une des conséquences directes en a été le manque de main-d'œuvre. Pour y remédier, les Européens sont allés en Afrique chercher des Noirs qu'ils ont installés de force dans leurs colonies : c'est la traite des esclaves. D'où l'apparition, au Brésil et dans les îles, d'une population de mulâtres (population métissée née de l'union de Noirs et de Blancs), les Indiens devenant minoritaires. !

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LA RÉUNION du XVIème au XVIIIème siècle Introduction Il semble que les Arabes aient été les premiers à découvrir l’archipel des Mascareignes. Ils nomment les trois îles situées à l’Est de Madagascar Diva Morgabin (ou l’île de l’ouest, probablement la Réunion) Diva Arobi (Maurice) et Diva Moraze (Rodrigues). Les premiers européens à apercevoir l’île sont des Portugais. Le pilote Diego Fernandes Pereira la baptise Santa Apollonia le 4 février 1507, jour de Sainte Apolline. Mais c’est en 1520 que l’archipel prend le nom de Mascarenhas, du nom de l’amiral Pedro de Mascarenhas. Plus tard, le nom de Mascarin, Mascarène ou Mascareigne sera attribué à La Réunion. ème Au XVII siècle, les Anglais abordent l’île et l’appellent England forest ou Pearl Island. Le 25 juin 1638, la France prend officiellement possession des Îles Mascareignes. C’est le premier débarquement à Saint Paul. En 1646, 12 mutins de Fort-Dauphin (petit comptoir vers la route des Indes dans le Sud de Madagascar) sont abandonnés à La Réunion pendant 3 ans. Le 7 septembre 1649, on les ramène à Fort Dauphin, mais certains sont fâchés de revenir. Une première carte de l'île est dressée avec les informations de ces mutins.

En décembre 1649, le commandant de Fort-Dauphin à Madagascar, Étienne de Flacourt, séduit par la description de l'île par les mutins, fait à nouveau, prendre, possession de l’île au nom du Roi, et la nomme Île Bourbon. L'île prend alors de l'intérêt. Sur le bateau le Saint-Laurent, Flacourt transporte dans l’île quatre génisses, un taureau et des cochons. L'île Bourbon est toujours inhabitée. Le 10 novembre 1663, le Saint-Charles mouille à la Grotte des Premiers Français à SaintPaul. L'île Bourbon est définitivement occupée par les Français. Deux Français s'y installent, Louis Payen et un collègue, et avec eux dix serviteurs malgaches dont trois femmes. Elle devient colonie à part entière et aussi la première base française de l'océan Indien.

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I.

L’Océan Indien au XVIIIème siècle

L’histoire de l’Océan Indien est marquée par la figure de Joseph-François Dupleix (16971763) qui est gouverneur de Pondichéry et gouverneur général des Établissements Français de l’Inde depuis 1742. Dupleix veut acquérir, pour la France, de vastes territoires en Inde. Profitant de l'anarchie indienne, il veut faire de la Compagnie Française des Indes Orientales, qui n'a été jusque-là que commerçante, une puissance territoriale. Dupleix se propose d’intervenir dans les querelles de princes indigènes et d’établir petit à petit, un système de protectorat qui, appuyé sur une force militaire, assurerait à la France un monopole de trafic et une souveraineté pratique. À cet effet, il entre en relations avec les princes locaux, et adopte un style de splendeur orientale, dans son costume et son cadre de vie. Les Britanniques s’en inquiètent, mais le danger pour leur propre expansion et leur pouvoir en Inde est partiellement évité en raison de la rivalité entre Dupleix et Mahé de la Bourdonnais(1699-1753), gouverneur des Mascareignes: l'île Bourbon et l'île de France (Maurice).

Statue de Joseph-François Dupleix à Pondichéry (Inde)

Dupleix se trouve aux prises avec les difficultés nées de la guerre de succession d’Autriche et doit se transformer en chef de guerre. Il entreprend de ruiner la puissance anglaise sur la côte du Coromandel et s’empare de Madras, avec l’aide de la Marine, improvisée à l’Ile-de-France par la Bourdonnais, mais la mésentente qui règne entre les deux hommes empêche de tirer parti de cette brillante opération. Dupleix est resté seul dans l’Inde à la suite de la destruction de l’escadre par un cyclone, il est assiégé dans Pondichéry par les forces des Anglais. Il les oblige à lever le siège et il est en position de remporter de nouveaux succès quand survient la paix d’Aix La Chapelle en 1748. Dupleix entre ensuite dans des négociations, dont l'objet est la conquête du sud de l’Inde. Il envoie des troupes importantes à l’aide de ses alliés indiens. Les Britanniques, très inquiets, sont engagés du côté de ses rivaux. Le conflit franco-britannique continue en Inde jusqu’en 1754, quand les directeurs de la Compagnie des Indes, sur la foi de rapports mensongers, forcent le gouvernement à envoyer en Inde un commissaire spécial avec l'ordre de remplacer Dupleix et de le renvoyer en France, à la surprise des Indiens de Pondichéry et à la joie des Anglais de Madras. La neutralisation de Dupleix est l'un des facteurs qui a permis ensuite aux Anglais de lancer la guerre de 7 ans (1756/1763) qui leur donne le reste de l'empire colonial français. Les Français ne gardent en Inde que Pondichéry. Le but de Dupleix sera, finalement réalisé, pour l’Angleterre, par la Compagnie anglaise des Indes avec Robert Clive.

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Dupleix passe le reste de sa vie à plaider contre la Compagnie, à laquelle il réclame 13 millions, qu'il avait avancés pour son service. La Compagnie des Indes refuse de reconnaître ses responsabilités. Le gouvernement ne veut rien faire pour un homme qu’il persiste à regarder comme un aventurier ambitieux. Le plus grand des gouverneurs coloniaux français meurt dans l’oubli, l’indigence, la misère et l'humiliation le 10 novembre 1763 à Paris, sans avoir pu se faire rendre justice. Le 4 août 1764, la Compagnie des Indes périclite mais le Royaume de France ne veut pas céder les places qui lui restent dans l’Océan Indien et lui rachète les Mascareignes (pour 7 625 livres) qui deviennent une colonie à part entière.

II.

Bourbon au XVIIIème siècle ème

Au XVIII siècle, l’île Bourbon est gérée par la Compagnie Française des Indes Orientales qui représente le roi de France Louis XV et l’administre en son nom. C’est un système féodal : Bourbon est la propriété du roi de France et la Compagnie des Indes la reçoit en tant que fief. La prise de possession de l’île Bourbon par la France a été effectuée en 1638 mais c’est en 1662 que commence la véritable colonisation qui est le fait de Colbert, alors surintendant de Louis XIV. C’est Colbert qui crée la Compagnie Française des Indes Orientales, la Compagnie se voit définir des objectifs de trois ordres : le commerce et la lutte contre les produits anglais et hollandais, la politique, en contribuant au développement d'une marine nationale et en affirmant la présence française sur les mers du sud, la culture et la religion, en propageant la civilisation française et en évangélisant les païens. La Compagnie est toute puissante sur l’île, elle en assure le peuplement, la mise en valeur économique avec la construction de routes et d’entrepôts (pour faciliter le ravitaillement de ses navires), elle détermine et prélève les impôts, elle veille à la formation intellectuelle et spirituelle des habitants. Le gouverneur de Bourbon tient son autorité du roi et son pouvoir de la Compagnie. En 1753, le gouverneur de Bourbon, Joseph Brénier, est subordonné au gouverneur général des îles de France (Maurice) et de Bourbon qui réside à Port-Louis, ce qui prouve que Bourbon est reléguée au second plan. La population de l’île était de 314 habitants en 1689, 212 hommes libres et 102 esclaves. En 1714 il y avait 1157 habitants 623 hommes libres et 534 esclaves. En 1728, la récolte de café subit des pertes considérables faute d’esclaves dont la majorité vient de Madagascar (58% de la main d’œuvre servile est originaire de la Grande Île en 1735). La Compagnie Française des Indes Orientales, pour couvrir les besoins en bras, se tourne vers la côte orientale de l’Afrique. La Bourdonnais, gouverneur des Mascareignes organise des traites qui sont fournies par les comptoirs portugais du sud de Delgado au Mozambique. Les hommes libres qui étaient 623 en 1714 voient leur population tripler vingt ans plus tard en 1735 : on en compte 1716. La même année, le nombre des esclaves passe de 534 à 6 573, une multiplication par 18 ! Les esclaves représentent 80% d’une population de 8 289 habitants. Pour éviter la constitution de noyaux ethniques dangereux pour les Blancs qui sont minoritaires, les lieux de traite sont diversifiés : Afrique, Inde, Malaisie. En 1770, le nombre de Cafres africains à Bourbon est cinq fois supérieur à celui des Malgaches. Comme les femmes esclaves sont moins nombreuses, les hommes choisissent des compagnes en dehors de leur groupe ethnique. Une des conséquences de cet émiettement est la naissance du Créole comme moyen de communication entre maîtres et esclaves et esclaves entre eux puisqu’ils n’ont pas la même langue maternelle. Le sort des esclaves est régi par un Édit royal de 1723 : le Code Noir qui est le Code Noir antillais de 1685 refondu et adapté aux Mascareignes (code qui nous apparaît aujourd’hui inhumain mais qui devait protéger les esclaves contre les abus d’autorité de leurs maîtres). Au XVIIIe siècle, la société bourbonnaise est quadripartite. En premier, nous trouvons les élites constituées des nobles descendants des officiers de l’armée royale passés au service de la Compagnie des Indes ou appartenant à des familles anoblies par des charges, ils exploitent des terres qui sont, en général, des concessions de la Compagnie des Indes. Les gros propriétaires de terres et d’esclaves, même roturiers (non-nobles), font aussi partie de cette catégorie. En deuxième position, il y a les moyens propriétaires et ceux qui exercent des professions libérales (médecin, chirurgien, marchand). En troisième, ce sont les petits propriétaires et les affranchis. En quatrième, les esclaves. Il faut aussi ajouter quelques prêtres, 13 en 1763.

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