Le Soir Lundi 20 juin 2016
LIÈGE 17
Acheter vert et liégeois : irréel
La société Eurogentec investit 5 millions
LIÈGE
SERAING a société de biotechnologie liégeoise Eurogentec a préL senté ce vendredi en grande pompe une nouvelle aile de ses implantations au Sart Tilman. Il s’agit là d’un investissement de quelque cinq millions d’euros pour cette extension de 1.400 m2. Une extension dédiée au développement des procédés de fabrication, au contrôle qualité ainsi qu’à une zone de stockage. Cette bonne nouvelle s’accompagne d’une seconde, liée à la création d’emplois. « Nous sommes passés de 216 employés en 2013 à 245 aujourd’hui. Les profils sont plutôt des scientifiques, des techniciens de laboratoires, mais aussi d’autres profils comme des commerciaux », explique Lieven Janssens, vice-président d’Eurogentec. Pour l’intéressé, ce développement était une nécessité au regard des performances de l’entreprise. « Notre chiffre d’affaires est en hausse de 34 % et le bénéfice opérationnel a triplé en deux ans. D’où la nécessité de cet investissement lancé en février 2015 qui va nous permettre de mener à bien nos nombreux projets de développement et de fabrication de vaccins et de médicaments. » Et de souligner, aux côtés du président japonais Masanoka Sugawara, que les technologies de la biotech « intéressent les sociétés pharma du top 20 mondial ». Parallèlement à cela, Eurogentec espère bien pouvoir annoncer d’ici quelques mois un autre grand projet pour Liège, dans le cadre de l’ambitieux projet de Kaneka, à qui appartient Eurogentec, à savoir le doublement du chiffre d’affaires en cinq ans. « Nous envisageons en effet la construction d’une nouvelle unité de production pour augmenter nos capacités. Cela représenterait un investissement de plusieurs dizaines de millions d’euros et déboucherait sur l’engagement de plus de 40 personnes. » Mais il est encore trop tôt pour crier victoire. Le groupe possède plusieurs sites et Seraing n’est que l’un d’eux. Une étude de faisabilité est en cours pour affiner les montants d’investissement nécessaire. Eurogentec espère que Seraing sera choisi. Rendezvous en 2017. ■ G.G.
Damien Ernst (ULG), spécialiste des questions énergétiques
Damien Ernst (ULg) juge le rachat de Lampiris par Total « très rationnel » pour le géant français. ENTRETIEN e rachat de Total par Lampiris a beaucoup fait jaser.
L
Votre avis comme spécialiste ? C’est très rationnel de la part de Total et ça ne m’étonne pas. À un prix assez élevé en plus, puisque l’on parle de 150 à 200 millions d’euros. Or lorsque Nethys négociait ces derniers temps avec Lampiris, on évoquait une somme tournant autour des 75 millions. Le business-modèle de Lampiris croulait. Pour eux, c’était se faire racheter ou mourir à petit feu. Avant, Lampiris était une structure bon marché et légère en comparaison avec les géants que sont Electrabel ou Engie. Mais aujourd’hui, ce n’est plus le cas, Lampiris n’était plus le moins cher. Vous dites que c’était rationnel de la part de Total. Pourquoi ? Total possède le géant du panneau photovoltaïque Sunpower, ainsi que la compagnie Saft qui fabrique des batteries. Ce qui lui manquait, c’était une compagnie pour installer les batteries et panneaux, tout en fournissant de l’électricité. Le but est de commercialiser et d’intégrer dans le système électrique ces dispositifs « panneaux + batteries ». Cela me fait dire que Total est en passe de réussir sa transition énergétique. Et en plus, 150 millions pour une compagnie qui génère plus de 100 milliards d’euros de chiffre d’affaires, ce n’est rien du tout. Beaucoup de Liégeois ont été touchés par le fait que le petit fournisseur local vert soit racheté par une multinationale… Lampiris a joué sur trois points : les bas prix, belge et vert. Ce côté « vert », c’est une arnaque. Ou un coup de marketing génial, c’est selon. Lampiris n’a jamais été vert. La société a une éolienne en
POINT DE VUE
Transition énergétique
Pour le professeur Ernst, « Lampiris n’a jamais été vert. La société a une éolienne en Wallonie, une seule, et n’a jamais rien fait pour la transition énergétique ». © S.P.
Wallonie, une seule, et n’a jamais rien fait pour la transition énergétique. Lampiris achetait son électricité sur les marchés de gros, où l’on ne sait absolument pas d’où provient l’électricité. Et pour ces mégawatts/heure (MWH) achetés sur le marché, la société rachetait des « garanties vertes d’origine ». Ce qui n’a aucun sens puisque l’un n’est en rien lié à l’autre. Comment expliquer dès lors qu’autant de gens s’étonnent à ce point ? C’est en effet un gros paradoxe. Et ces réactions m’ont surpris car effectivement, les
gens pensaient réellement que c’était une compagnie verte. Electrabel et EDF Luminus, qui ont une image nettement moins verte, développent de vrais projets durables. Dans l’éolien, par exemple. Mega, Klinkenberg, Energie 2030… Autant de pistes vers lesquels veulent se diriger les « déçus » du rachat. Klinkenberg joue sur le côté prix. C’est liégeois et c’est un vrai électricien. Les batteries, les panneaux solaires, c’est son domaine et je pense que son business-modèle est bon. Ni Klinkenberg ni Mega n’ont de projet vert. Energie 2030 a un
L’Ilal menacée en devenant hollandaise ? VISÉ La cession de 50 hectares sera signée jeudi eudi prochain, la Belgique et les Pays-Bas vont signer Jun protocole d’accord modifiant la frontière belgo-néerlandaise à Visé. La Belgique va ainsi céder 50 hectares, enclavés aux Pays-Bas, et recevoir en contrepartie 3 hectares. Outre la perte de 47 hectares pour la Belgique, Ecolo s’inquiète du futur de la presqu’île de l’Ilal. Un endroit paisible, à la biodiversité riche Un endroit paisible, riche de biodiversité. © A.D.
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et classé Natura 2000. « Dès l’entame des négociations, nous nous sommes inquiétés du fait que la protection accordée au site de l’Ilal n’avait pas été prise en compte, précise Martial Mullenders, conseiller communal Ecolo à Visé. On nous avait même dit que grâce à la modification de la frontière, le tourisme pourrait se développer à Eijsen. »
Ecolo a donc entrepris de demander des garanties côté belge pour que les Pays-Bas donnent à l’Ilal la même protection. Didier Reynders, ministre des Affaires étrangères, et le conseil communal de Visé s’y étaient engagés. « Sauf que dans le protocole d’accord qui va être signé, les Pays-Bas se réserveraient le droit de modifier le niveau de protection du site, déplore Muriel Gerkens, députée fédérale Ecolo. La partie terrestre obtiendrait la même protection qu’un site Natura 2000. Mais les eaux du site, soit les 2/3 de la zone, passeraient en zone verte de catégorie 3, ce qui permet le développement d’activités de loisirs. » Maintenir tout le site en zone Natura 2000 Et il faut savoir que, côté Pays-Bas, il y a déjà un port de plaisance et Fun Valley, qui allient plaisir de la plage et différentes activités extérieures. « Et
lorsque je l’ai interrogé dernièrement sur le sujet, Didier Reynders n’a pas eu l’air de comprendre que l’eau n’obtiendra pas la même protection. Il faut aussi savoir que ce protocole n’a aucune valeur juridique et que la modification du tracé se fera via un traité qui devrait être signé fin d’année. Dans ce traité, il ne sera pas question de la protection de la nature puisqu’il s’agit d’une compétence régionale. Et si c’est le fédéral qui est compétent pour modifier les frontières du pays, la Région l’est pour modifier les limites communales et wallonnes. Or, on ne lui a même pas demandé son avis. » Ecolo demande donc que soit inscrit, de manière contraignante dans une annexe du traité, le maintien du site dans son entièreté en zone Natura 2000. Et que ce traité soit établi dans le respect des procédures. ■
mérite : avoir installé une éolienne via leur côté coopératif. Mais cela va-t-il marcher ? J’ai des doutes… En fait, les plus gros, qui ont une mauvaise image, sont les plus verts car ce sont ceux qui développent le plus de projets éoliens. Très concrètement, est-ce possible d’avoir un fournisseur d’électricité vert et liégeois ? Mais ça n’a jamais été possible. Donc, je rassure tout le monde, rien n’a changé. Pas contre, on peut acheter liégeois et pas cher, comme avec Klinkenberg. ■
Globalement, la Belgique est-elle sur la voie de la transition énergétique ? « C’est un désastre complet ! Au niveau de l’éolien onshore, il n’y a pas grand-chose, pas de grand parc, à cause des grosses difficultés à obtenir des permis. » « L’éolien offshore, pour moi, c’est trop tôt et trop cher. Cela coûte énormément d’argent en subsides et les technologies ne sont pas encore mûres. Point positif pour Liège : Nethys et la Sriw sont dans l’un des deux consortiums subsidiés. En Wallonie, il y a une immense erreur avec la construction programmée d’une centrale biomasse. On va brûler du bois qui vient du Canada ou d’Afrique du Sud, c’est une ineptie. La Wallonie s’apprête à payer 60 millions d’euros par an durant 20 ans, soit 1,2 milliard pour une centrale au bois. C’est une catastrophe écologique, on va dévaster des forêts entières. » G.G.
Propos recueillis par GASPARD GROSJEAN
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AURELIE DRION 17