Réinvestir les berges - Pauline DUTRAIVE

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DUTRAIVE Pauline

RÉINVESTIR

LES

BERGES:

Par quels dispositifs les concepteurs regagnent-ils les berges citadines? L6V2 Ecole

/ Approches nationale supérieure

théoriques de d’architecture

de

l’architecture Grenoble


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1 Sandra Fiori, Lumières, miroir nocturne des paysages, 2008.

2 Conférence J.A. Andersen, ENSAG, 21.11.13.

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Dictionnaire

du

paysage,

Michel GODRON, 2008.

4 F. Mauriac, Écrits intimes, Du côté de chez Proust, 1947, p. 233.

Introduction «Depuis les années 1980, la crise du secteur métallurgique, la fermeture de lieux de productions ou de transformations industrielles et la délocalisation des activités portuaires ont laissé vacantes de vastes emprises dans plusieurs grandes villes d’Europe comme Bilbao, Nantes, Bordeaux, Londres…1». Ces installations sont devenues des friches industrielles et portuaires au vocabulaire routier : elles sont composées de rampes, de stationnements, de hangars, de routes...Malgré leur position stratégique en cœur de ville, l’espace est rendu mort et inoccupé, les villes ont tourné le dos à leurs «waterfronts»2. Pourtant ces espaces longtemps délaissés suscitent à nouveau l’intérêt depuis quelques années. Nombre de communes se questionnent sur la reconversion de ces espaces pour les mettre en valeur et les reconnecter à la ville. Pour analyser ces lieux, berge et quai sont des notions dont les différences sont à définir. Une berge est «un talus dominant le lit d’un fleuve ou d’une rivière. Les berges des cours d’eau peu artificialisées sont souvent couvertes par une végétation abondante et elles forment alors des paysages attrayants qui ont fortement inspiré les peintres de la fin du XIXe siècle.»3 «Tiré sur la berge, mis à part de la vie, Jacques Rivière mesure d’un œil lucide le danger mortel que va subir sa foi dès qu’il aura été rendu au courant.4» Berge est une notion moins précise que les quais qui sont un «entablement de pierre ou de bois bordant la rive d’un 1


fleuve ou le bord de mer pour faciliter l’accostage des bateaux. Par extension on emploi le même mot pour la rue qui borde un quai1». Au XIXe siècle, à Lyon des murs Perré ont été construits, ils constituent une digue pour protéger la ville des crues soudaines et créent des quais haut et bas. «Je me suis remis à aimer cette ville claire et grande; l’eau vivante entre les quais de pierre d’un gris pâle et doux2». La rive est une notion générale pour qualifier «le bord d’un cours d’eau, selon sa pente, sa végétation.3» Serait-il possible de prolonger la ville sur les berges? Comment les liens entre ville et eau peuvent-ils être rétablis? Comment effacer la frontière entre l’eau et la ville? Quels sont les usages de ces berges? Quels dispositifs les concepteurs utilisent-ils pour lier usagers et berges ? Pour répondre à ces questions et en particulier à la dernière, nous allons notamment analyser les berges de la Garonne à Bordeaux et les aménagements réalisés sur les berges de la Seine à Paris. On y remarque différents types de dispositifs. Dans un premier temps on s’intéressera à ceux à l’échelle de la ville, qui permettent de l’articuler aux berges et réciproquement. On analysera ensuite les installations intrinsèques aux berges qui créent des espaces de loisirs et de promenades. I- Articuler les berges à la ville. Dans une première partie on verra quels dispositifs permettent de reconnecter la ville aux berges. On remarque dans différents projets de reconquêtes des berges que leurs transformations s’opèrent à l’échelle du territoire. En effet ce sont des parties de villes entières qui sont modifiées. Autrefois les quais étaient le moteur économique de la ville. L’objectif, de nos jours, est donc de leur redonner cette importance mais d’une manière différente. Pour cela la ville doit se reconnecter à son front d’eau, en utilisant les dispositifs qui le permettent. De nouveaux dispositifs de circulation permettent en 2

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Dictionnaire

du

paysage,

Michel GODRON, 2008.

2 Larbaud, Barnabooth, 1913, p. 337.

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Dictionnaire

du

paysage,

Michel GODRON, 2008.


premier lieu de relier la ville aux berges. Des dispositifs de transports publics, des dispositifs de promenade et des dispositifs à une échelle plus petite qui permettent de descendre aux quais pour ceux qui disposent d’une partie basse. Le projet de réaménagement des berges de la Garonne, à Bordeaux, réalisé par Michel Corajoud, a réussi à mixer les types de circulation sans dénaturer le site et en le connectant à la ville. L’un des principaux objectifs du projet était le partage de l’espace. Les véhicules (80.000 par jour) monopolisaient les berges et les rendaient difficilement accessibles. C’est pourquoi les berges ont été totalement repensées et re-qualifiées, « on voulait un mouvement de la ville se transvasant sur les quais»1. L’espace est découpé en bandes, parallèles à la Garonne et aux bâtiments, pour créer de nouvelles voies de circulations, ne donnant plus l’avantage à l’automobile. Ces nouvelles voies privilégient la mixité des flux. Du coté de la ville on trouve de larges trottoirs qui bordent les maisons et les immeubles, qui permettent aux piétons de profiter d’un espace ouvert sur l’horizon des berges. Ils

Plan et coupe végétation se mêle à l’urbain, sur les quais de la Garonne

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permettent aussi de mettre à l’aise les promeneurs en facilitant les croisements. Les voies automobiles sont réduites à deux fois deux voies le bruit routier est donc diminué pour les habitants et pour les promeneurs. L’accès aux berges est aussi facilité grâce à la mise en place de larges passages piétons et de feux tricolores. Les voies de circulations automobiles ne forment plus de barrières entre la ville et les berges. Aujourd’hui pour formaliser ce lien entre la ville et les quais on peut voir une transition par la voie automobile, qui fait partie de la ville, et les séquences arborées tout le long du quai qui se mélangent. Parmi les nouvelles voies de transport, on a une ligne de tramway, des «rubans de glisse»2 et piétonnes qui permettent d’avoir des circulations rapides et lentes au sein du même espace, mais celles-ci sont bien délimitées, pour éviter toute confrontation. On permet à toute personne dans la ville de Bordeaux de se relier à ces berges. Le tramway rend possible pour les usagers de se rendre et de repartir facilement du site, et de laisser la voiture aux portes de la ville ou chez soi. On privilégie ainsi les transports en commun et on réduit la pollution en ville. Ces nouvelles voies ne relient pas seulement l’usager aux berges. Elles permettent aussi de relier des quartiers aux fonctions et populations variées sur 4,5 kilomètres de distance. De l’ancien quartier populaire, Saint Michel jusqu’au secteur de Bacalan où se concentrait l’industrie, en passant par le quartier Saint Pierre, des Chartrons et la place des Quinconces (un quartier plus huppé). Les nouvelles voies de circulations permettent ainsi la connexion entre ville et berges et de créer un lien entre les quartiers. Les quais de la Garonne étant au même niveau que la ville, les dispositifs de promenades et de transports publics forment un lien continu entre la ville et les berges, sans contraintes d’accès au bord de l’eau. Dans un deuxième temps, selon le même critère de la gestion des flux nous allons analyser le projet d’aménagement des berges de la Seine, à Paris pour 4

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conférence

Annie

Tardivon, les berges du Rhone, 12-12-2013.


Coupe Quais de la Garonne, gestion des flux

Berge la promenade

Place Le «plateau»

Piste cyclable rapide

Boulevard 2x2 voies , éclairage et stationnement latéral.

Le boulevard automobile

Tramway

Voies de desserte,

L’espace à vivre

livraisons et de stationnements

Larges trottoirs

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Quai de Bordeaux, ligne horizon, en continuité.

Quais de Seine, 2 parties haute et basse

1 Interview Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux. AGORA 2008.

comprendre comment la ville et les usagers se relient aux berges. Il est intéressant de remarquer ici aussi la mixité structurée des types de voies de circulations qui permettent de venir ou de seulement traverser les berges. On a la présence du métro, de la circulation automobile, des voies piétonnes et cyclables. Les voies automobiles ont été très largement réduites puisqu’elles ont été totalement arrêtées sur la rive gauche et ralenties rive droite. On note que les deux rives non pas été traitées de la même manière et le projet de Bordeaux traite différemment ces deux rives également: «la ville nature, face à la ville organisée et dessinée»1. Les aménagements des quais de Seine ont aussi permis de connecter entre eux des grands musées et monuments de la ville tels que : le musé d’Orsay, le musées des Arts Premiers, l’Hôtel des Invalides, l’Assemblée Nationale, la Tour Eiffel... Autrefois les piétons étaient obligés de marcher le long de la voie automobile, large et très fréquentée, sur des trottoirs étroits. Aujourd’hui on peut se balader, déambuler près de l’eau dans un espace délimité pour le piéton

Les quais relient des sites et monuments importants

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et les circulations douces. Les quais de la Seine étant aménagés en partie basse, des systèmes de rampes, d’escaliers et des gradins ont été ajoutés pour permettre de rejoindre les quais, pas seulement par des escaliers qui ne permettent pas l’accès aux personnes à mobilité réduite et aux cycles. Transition Quais hauts vers les quais bas.

Les dispositifs de circulations publics ne sont pas les seuls à grande échelle à permettre aux berges d’être réinvesties. En effet, on remarque que dans de nombreux projets un dispositif est traité avec plus d’importance que d’autres. On cherche à insérer un élément «icône» au sein du projet, qui aura une résonance à l’échelle du territoire, nationale ou internationale. En poursuivant l’analyse des berges de la Garonne, on peut citer le dispositif du miroir d’eau. Il s’agit du plus grand du monde. Son fonctionnement est cyclique, à l’image des marées. L’eau est stockée dans un grand bassin de 800m3 sous la dalle en granit, puis ré-injectée jusqu’à ce que la surface du bassin se recouvre d’une couche de deux centimètres d’eau. Les vannes sont alors fermées pour une durée

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Interview Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux. AGORA 2008. 1

d’une demi-heure environ afin que l’eau donne l’effet d’un miroir, dans lequel le Palais de la Bourse et de la Douane se reflètent «réponse à la magnificence du bâtiment»1

wwwmichelcorajoud.net

Ajoutez à cela un système pour former un brouillard composé de minuscules gouttelettes d’eau - cette brume atteint jusqu’à deux mètres de haut. Et c’est aussi seulement dans cet espace qu’aucun arbre n’a été planté, pour mettre en valeur, sans aucun élément perturbateur, les façades XVIIIeme.

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Le dispositif permet de mettre en lien l’histoire de la ville


mais aussi de la Garonne : le miroir d’eau constitue la part de largeur du fleuve qui existait autrefois. La ville et le fleuve sont donc reliés et «aujourd’hui on se rend compte des implications ludiques que représente le miroir d’eau»1, en effet celui-ci est une étendue de jeux pour les enfants comme pour les adultes, où l’on peut se rafraîchir de la chaleur lourde et sèche de Bordeaux. Grâce à ces symboles et fonctions variées, le miroir d’eau attire les usagers, touristes comme habitants, il est devenu l’icône, la référence pour les photographies de la ville. D’autres exemples en Europe nous permettent de montrer l’importance d’un dispositif icône pour la reconquête des berges. A Londres, pour l’aménagement des quais de la Tamise et la revalorisation du quartier industriel de SouthBank, on a misé sur l’installation d’un dispositif à très grande échelle : le London Eye, la plus grande roue d’Europe. L’installation permet de bénéficier depuis les berges d’une vue panoramique sur la ville. Connu dans le monde entier, il incite les visiteurs de Londres à se rendre dans ce quartier et donc participe à sa re-connexion avec la ville. On peut aussi citer l’exemple de Bilbao, où le dispositif architectural à très grande échelle, par le concepteur Franck Gehry, a permis de réinvestir les berges du Nervion. L’image industrielle et polluée des quais a pu être atténué, par la présence d’un musée prestigieux comme le Guggenheim, qui a incité les politiques de la vile a commander l’implantation de nouveaux bâtiments. Le mécanisme a fonctionné car aujourd’hui l’image de la ville a radicalement changé et le lien est recréé. On a pu voir dans l’analyse, que la gestion des flux permet aux usagers des berges, qu’ils soient habitants de la ville, de la région, du pays ou étrangers, qu’ils soient jeunes, âgés, à mobilité réduite ou non,de pouvoir se rendre de la manière la plus facile et confortable possible aux berges. Ainsi la connexion entre les usagers et les berges pourra être rétablie. Ensuite, on remarque qu’un dispositif icône dans le

Interview Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux. AGORA 2008. 1

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projet créé une communication et fait de la «publicité» aux berges ainsi qu’à la ville. Enfin les berges doivent créer un cheminement en lien avec différents sites de la ville, qui permettent de se rendre, de se promener d’un lieu à un autre, mais pas seulement. II - Des installations propres aux berges

Nous allons voir dans une seconde partie, quels sont les dispositifs internes qui permettent d’aller au delà de la fonction de liaison remarquée dans la première partie. On voit qu’ils s’inscrivent, dans une démarche globale, qui prend en compte les loisirs et l’économie, la nature et le tourisme, la culture et l’événementiel. Tout d’abord, nous allons voir comment le loisir et l’économie sont pris en compte dans les berges de Seine par Francklin Azzi . Le concepteur aménage les 2,5 kilomètres de berges entre le quai d’Orsay et le quai Branly, avec de petites installations de loisirs et de services. Autrefois dédié aux voitures cet espace urbain doit être reconquis car nous l’avons vu dans la partie 1 il est lié à la ville, à ses habitants et au fleuve. On trouve «les Mikado»1 modules de bois répétés qui forment les assises, une

Franklinazzi.com

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scène et un parcours sportif. Les modules se répètent et s’agencent de manière à créer différents espaces, plus ou moins intimes, destinés aux familles, aux amis ou aux amoureux. Ils permettent une unité tout au long des berges, et ainsi elles sont entièrement modifiables et renouvelables. On a aussi la présence


de containers, qui appuient le concept évolutif des berges. Ils proposent de nouveaux espaces de restauration, d’abris, d’ateliers...

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Ce qui permet de créer des emplois et de proposer des services pendant toute la journée et l’année. Ces containers sont des repères tout le long des berges et ils font référence à leurs ancienne fonction économique. Le mur à craie et les jeux géants, permettent à tous de jouer et de marquer leur présence sur les berges. L’usager donne du sens au dispositif. Les quais de Seine sont donc un espace toujours en mouvement, aux activités nombreuses, variées, pour tous les âges, et sans cesse renouvelées. «Ce qui permet à l’espace d’être un vaste ready-made»1. Les usagers peuvent découvrir puis redécouvrir les berges, grâce à ces dispositifs facilement modifiables, sans surcoût. Ensuite grâce au projet des jardins flottants de Jean Christophe Choblet, toujours sur les berges de Seine, nous allons voir la place de la nature et du tourisme. Les jardins flottants sont composés de 5 îles le long des berges. Elles s’installent sur des barges métalliques réalisées sur mesure dans différents chantiers navals de France. Elles évoques les petites îles utilisées auparavant dans les pâturages et rattachées à la rive. Les îles se différencient par leurs univers.

1 Francklin Azzi, Franklinazzi.com

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40 à 90 cm de terre -> 1400m2 de végétation

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Elles créent une promenade en séquences, tout au long de l’année dans la nature et sur l’eau. Cependant ce dispositif semble être la touche artificielle et très coûteuse du projet des berges. Il est en rupture avec les dispositifs de Franklin Azzi dont la préoccupation était la simplicité. Car, les îles pourraient avoir le même effet sur les berges proches de l’eau. Seule l’île aux oiseaux parait intéressante dans sa quasi non accessibilité qui favorise la nidification des oiseaux. On peut se demander si cette île n’aurait pas pu être la seule répétée plusieurs fois sur la Seine à plus petite échelle. Ce qui aurait permis aux oiseaux d’être dans une nature recomposée pour eux, sans la présence humaine ou seulement de professionnels. Ce qui serait en réelle référence aux îles d’autrefois ou seulement le berger emmenait et contrôlait les paturages, sur l’île. Ce qui serait en réelle référence aux îles d’autrefois ou seulement le berger emmenait et contrôlait la présence de ces animaux, sur l’île. Le dispositif, la présence de longues vues qui permettent aux visiteurs de voir les oiseaux et d’entamer une vrai démarche d’intérêt pour eux. Il semble que le dispositif conçu n’est que le début d’une idée, on aurait pu s’aligner avec la vision de Francklin Azzi, une idée simple et un concept fort. Le dispositif aurait été tout autant attractif pour la culture et les yeux de chaque usagers. L’île aux brumes parait anecdotique elle aussi, car même si en été le dispositif est rafraîchissant, en inter-saison et en hiver il peut être désagréable. On peut dire ici que la dimension


Plan et coupe des jardins flottants 13


touristique a été privilégiée à la dimension nature. A Bordeaux, sur les quais de la Garonne, également aménagés en séquences, on trouve le jardin des lumières. Planté en ligne comme la culture des champs, «un grand père qui plante avec son cordeau»1. Les plantations de ce jardin se rapprochent des usagers et de la vie de la ville. Les jardiniers ne sont pas de simples exécutants, ils ont un réel rôle dans la culture de ce jardin. En effet ce sont eux, ainsi que les habitants, qui sont appelés «a suggérer les espèces à planter»2. Ensuite les fleurs sont récoltées et vendues, «on veut montrer ce qu’une plante est capable de produire en une année»3. Ici on ne cherche pas à déployer de grands moyens mais à cultiver l’image de la campagne. Pour terminer, les berges grâce aux nouveaux dispositifs sont aussi un lieu de rassemblement, de partage et de culture. Pour les berges de Saône le choix de faire intervenir des artistes, tout au long de la rivière, permet d’égayer la promenade. Les gradins des berges de la Seine par le même concepteur que les jardins flottants, ont une double fonction, relier le quai haut et bas et créer un espace où se déroule de grandes manifestations, où l’on peut juste s’asseoir, et accueillir le public lors de spectacle et de projection de film au dessus de l’eau. Ce dispositif permettra la venue de nouveaux usagers. Avant Paris, Rome propose sur les quais du Tibre la manifestation estivale «Île du Cinéma» qui permet aux visiteurs de voir des films, et de prendre ensuite un verre, de dîner, et de danser, l’aménagement permet de se rassembler et de devenir un lieu de rendez vous. On remarque que les dispositifs intrinsèques aux berges sont dans chaque projet d’une grande diversité de nature et de fonction. Ils doivent permettre aux plus d’usagers possibles de se sentir concernés, tout au long de la journée et de l’année. Dans un même projet d’aménagement des berges, différents concepteurs peuvent être appelés, ce qui permet d’avoir une richesse et une diversité de mise en œuvre. Même si l’objectif commun est 14

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Interview Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux. AGORA 2008. 2

Interview Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux. AGORA 2008. 3

Interview Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux. AGORA 2008.


d’ouvrir les berges au plus grand nombre possible, en faisant participer l’usager, en lui proposant des activités et des services. Chaque concepteur met son imagination à profit pour inventer de nouveaux procédés dans le paysage des berges, chacun plus innovant, extraordinaire, ludique, apaisant, convivial... L’espace des berges doit être ouvert à tous, il doit devenir un espace public en continuité avec la ville.

1 Michel Corajoud, Conférence la Nature en ville, 2009.

Conclusion La transformation aujourd’hui des berges en espaces publics urbains après une longue période de vide et de délaissement, est synonyme de la difficulté qu’ont eu les villes à trouver des solutions pour se reconnecter aux berges. La redécouverte de ces espaces fluviaux est une occasion pour réinvestir les sites à proximité des centres-villes, pour créer une nouvelle dynamique. L’implantation d’activités, de lieux de promenades, et la re-qualification des flux de circulations contribuent à recentrer les villes sur leurs cœurs historiques aux bords des quais et à permettre aux usagers de s’y rendre. On remarque que les grands axes de circulations automobiles sont bannis le long des fleuves, les concepteurs misent sur des dispositifs d’espaces « naturels » en contact avec la ville et l’eau. On a pu voir que lorsque l’espace du fleuve était délaissé, il en était généralement de même pour les quartiers le jouxtant. Les dispositifs d’aménagements visent non seulement à la création d’une nouvelle relation entre l’eau et les berges, mais aussi à la reconquête des quartiers riverains. Le fleuve est un axe fort et structurant. «La seule motivation qui m’intéresse est la ville, lieu spécifique de l’organisation des hommes.»1 Dans tous les projets de réaménagement de berges se manifeste la volonté de prendre en compte les citadins. Les dispositifs intrinsèques aux berges dans le domaine du loisirs, de la culture et de la consommation, tentent de séduire les habitants et 15


d’assurer l’attractivité du projet. L’objectif de rendre les berges accessibles aux citadins se fait par des aménagements d’espaces publics avec des promenades paysagères, des pistes cyclables, des jardins et des parcs à proximité de l’eau, délimités par des quais. Cet espace devient la relation entre la ville et le fleuve. Les programmes tentent de préserver l’identité et la géographie des lieux et à inscrire leurs interventions dans la ville. L’espace public a un rôle essentiel permettant de retisser le lien entre les différents tissus des quartiers de la ville. L’orientation des bâtiments, des places et des autres espaces publics est destinée à ouvrir les quartiers sur l’eau et à créer de nouvelles vues sur le paysages fluvial. Les aménagements jouent sur les contrastes entre la ville minérale et les espaces vert et l’eau. «Comment faire pour vivre ensemble à l’intérieur de la ville,

loin de l’idée de nature ? La nature, dès qu’elle est convoquée en ville, n’est plus la nature mais devient une nature transposée.»1 La volonté de

sauvegarder la mémoire portuaire des villes est présente et se limite à la conservation de quelques vestiges du patrimoine portuaire ou industriel, tels des hangars convertis en dispositifs aux fonctions différentes. La volonté est de conserver les traces des activités passées, mais aussi de réanimer les plans d’eau en développant la navigation de plaisance et le tourisme fluvial. Aujourd’hui, la plupart des projets d’aménagement des berges ont terminé la phase des travaux. On a pu remarquer que les dispositifs pour les aménagements de berges sont conçus pour la plus grande diversité d’usages et d’usagers possible, pour vivre ensemble dans la ville, et pour insérer une nature transposée, «J’ai pensé que la transposition de la forme de la campagne pouvait faire du bien à la ville»2. L’espace met en relation et parfois en tension l’élément végétal, l’élément minéral, et l’élément humain. L’aménagement des berges en cœur de 16

1Michel Corajoud, Conférence la Nature en ville, 2009.

2 Michel Corajoud, Conférence la Nature en ville, 2009.


ville doit donc trouver un équilibre. Jeppe Aagaard Andersen dans sa conférence fais émerger de sa réflexion le trop aménagés des berges. Les dispositifs coûteux, aux références anecdotiques, toujours plus nombreux, ne sont-ils pas en train de faire des berges «des parcs d’attractions» ? Où une politique de rentabilité se met en place?

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Bibliographie Articles de périodiques, revues : NAMIAS, Olivier, «Le tram transforme le paysage urbain», Le moniteur, n°5341, 2006, p-56-59. ESCOLIN, Bertrand, «Espaces publics, les quais jardinés de la Garonne», Le moniteur, n°5445, 2008, p 60-63. PICON, Antoine, « La Seine, l’automobiliste et le grand Paris», D’A, D’Architecture, n°206, 2012, p3339. Articles Numériques: Déplacement sur les quais de bordeaux, 2010 ,http:// www.angers.fr/fileadmin/plugin/tx_dcddownloads/La_ reconquete_des_quais_a_Bordeaux.pdf (consulté le 8-12-12). FIORI, Sandra, Lumière, miroir nocturne des paysages, 2008 Manuscrit auteur, Les 4èmes Journées Européennes de la Recherche Architecturale et Urbaine EURAU’08 : Paysage Culturel, 16-19 Janvier 2008, Madrid, Espagne, Madrid : Espagne (2008), http://doc.cresson. grenoble.archi.fr/opac/doc_num.php?explnum_id=91 (consulté le 10-12-13). Conférence nationale de lancement Nature en ville, http://i.ville.gouv.fr/index.php/sfPropelFileAssoc/ download/file_id/3495, Paris, 29-06-2009 (consulté le 14-12-2013) Livres : BEGUIN, François, Le paysage, Flammarion, 1995. CORAJOUD, Michel, Le paysage c’est l’endroit ou le ciel et la terre se touche, Actes Sud, 2010. ROGER, Alain, Court traité du paysage, Gallimard, 1997. ROZ, Michel, Bleu-Lyon, nouvelle couleur des quais du Rhone, Madaga, 1995. 18


VINCENDEAU, Jean Louis, Petit traité du jardin en ville, Desclée Paris, 1993. Ouvrage collectif : Arc en rêve d’architecture (Francine Fort directrice),Les quais de bordeaux 1999-2009, Confluence Eds, 2009. Conférences: Annie Tardivon, Aménagement quais du Rhône à Lyon, ENSAG, le 12-12-2013. Jeppe Aagaard Andersen , It’s all about water - Cities for people, ENSAG, le 21-12-2013. Interview : Michel Corajoud, sur les quais de la Garonne à Bordeaux, AGORA 2008.

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