Fundraizine 52

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#52

Fundraizine

Automne 2017

Le magazine des fundraisers

Legs : une ressource qui n’a pas dit son dernier mot | DOSSIER Protection des données personnelles : la nouvelle donne | L’elevator pitch, pour monter plus haut | DR FUNDRAISING

DÉCRYPTAGE


ÉDITO

10

06

© maselkoo99

28

#SOMMAIRE PHILANTHROPIA est le département dédié de HOPENING pour vos stratégies de développement de ressources privées pour

ACTUS

INNOVATION

04 Agenda 04 L’actu en bref

20 Out of the box Vers le fundraising 10.0 ? 22 Côté recherches Téléphone, SMS et face-to-face

des projets culturels et de préservation

DÉCRYPTAGE

du patrimoine. Parce que les attentes des

06 Reportage Protection des données personnelles 08 Analyse de campagne À la recherche de la bonne « créa » ! 10 Autre regard La philanthropie et la guerre 12 Z oom sur… Éthique : quelle charte ? Quelles limites ?

donateurs et les leviers de leur mobilisation changent, les institutions publiques et culturelles doivent évoluer et adapter leur stratégie fundraising en continu. Avec PHILANTHROPIA, vous faites le choix d’un fundraising ouvert et performant pour rallier vos donateurs à votre cause, et vous bénéficiez d’une expérience de plus de dix ans sur le secteur. www.philanthropia.fr

DOSSIER

gcolin@philanthropia.fr

14 Legs Une ressource qui n’a pas dit son dernier mot

06 64 64 14 53 4, rue Bernard Palissy 92800 Puteaux

Hopening est né du rapprochement des agences Optimus et Excel.

CLINIQUE DU FUNDRAISING 24 Côté pratique Sécuriser votre collaboration avec une startup solidaire 26 Dr Fundraising L’elevator pitch, pour monter plus haut ! 27 D r Digital Collecter sur Facebook ?

PORTRAIT 28 Adrien Joly La mécanique des fluides

Publication trimestrielle éditée par l’Association Française des Fundraisers, association à but non lucratif enregistrée au JO du 15 mai 1996, dont le siège social se trouve 6 rue de Londres, 75009 Paris – Tél. : 01 43 73 34 65 – Site internet : www.fundraisers.fr – E-mail : info@fundraisers.fr – ISSN : 1952-7284 – Directeur de la publication : Xavier Delattre – ­ Rédactrice en chef : Yaële Aferiat – ­ Rédactrices en chef adjointes : Pauline Museux – Lenaig Naudais ­– Secrétariat de rédaction : Pauline Graulle – Comité de rédaction : Yaële Aferiat, Alexandre Ayad, YannPatrick Bazire, Isabelle Colson, Philippe Doazan, Éric Dutertre, Xavier Frison, Arthur Gautier, Pauline Graulle, Marie-Pierre Lamotte, Ségolène Lavernhe, Sophie Le Maire, Marie-Ève Lhuillier, Ingrid Merckx, Pauline Museux, Lenaig Naudais, Alain Pierre, Christine Quentin, Sylvain Reymond, Sophie Rieunier, Francisco Rubio, Claire Schiller-Heuzé et Noémie Wiroth – Dossier : Pauline Graulle – ­ Illustration de une : Richard Paoli, 21x29,7 ­– Direction artistique et réalisation : 21x29,7 Impression et routage : Mailedit.

© Mucem – Louise Manhes

by Hopening

14 22

© SQ_Studio © Andrey Ikryannikov

Mécénat et Fundraising pour les acteurs culture et patrimoine

© CLAIRE TABBAGH

Frilosité et réconfort

L

a philanthropie, une activité réservée à une élite  ? L’hypothèse, soulevée par l’étude américaine Gilded Giving, top-heavy philanthropy in an age of extreme inequality, a été rendue publique en France par Antoine Vaccaro (Cerphi), dans l’une de ses « cartes du tendre » publiées cet été. L’avenir des small et des middle donors est une question capitale pour le fundraising : faut-il arrêter de solliciter les « donateurs lambda » et leur préférer de grandes fortunes, plus immédiatement « rentables » pour les causes défendues par les associations ? Quel serait alors le prix à payer : les associations et fondations ont-elles vraiment intérêt à se mettre dans la main des puissants au risque de sacrifier leur indépendance financière ? Et, plus largement, confisquer le « pouvoir du don » aux classes populaires et moyennes ne pose-t-il pas un vrai problème démocratique ? En attendant, d’autres inquiétudes se posent, de ce côté-ci de l’Atlantique, sur les small et les middle donors. Le dernier baromètre de France Générosités a souligné combien le nombre de donateurs stagnait et combien le profil-type peinait à rajeunir ! Suppression de la réserve parlementaire, baisse des contrats aidés, réforme de l’ISF : nous voilà face à un contexte politique pour le moins défavorable. La pratique des fundraisers pourrait, qui plus est, être chamboulée par l’application du règlement européen sur la protection des données personnelles dès mai 2018 (sur le sujet, lire notre article sur la RGPD, p. 6). Mais attachons-nous à voir le verre à moitié plein. Nous consacrons notre dossier aux legs, un relais de croissance qui a de l’avenir ! Ce numéro d’automne abordera aussi des sujets plus légers : nous partirons à la recherche de la « bonne créa » (p. 8) et nous apprendrons à susciter l’intérêt de nos interlocuteurs en une minute avec l’elevator pitch (p. 26). Bonne lecture ! Le comité de rédaction

L’ASSOCIATION FRANÇAISE DES FUNDRAISERS EST LA RÉFÉRENCE EN MATIÈRE DE FUNDRAISING ET DE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES DES ORGANISATIONS D’INTÉRÊT GÉNÉRAL. CONSULTEZ NOTRE CENTRE DE RESSOURCES EN LIGNE ET REJOIGNEZ NOTRE RÉSEAU : FUNDRAISERS.FR


ÉDITO

10

06

© maselkoo99

28

#SOMMAIRE PHILANTHROPIA est le département dédié de HOPENING pour vos stratégies de développement de ressources privées pour

ACTUS

INNOVATION

04 Agenda 04 L’actu en bref

20 Out of the box Vers le fundraising 10.0 ? 22 Côté recherches Téléphone, SMS et face-to-face

des projets culturels et de préservation

DÉCRYPTAGE

du patrimoine. Parce que les attentes des

06 Reportage Protection des données personnelles 08 Analyse de campagne À la recherche de la bonne « créa » ! 10 Autre regard La philanthropie et la guerre 12 Z oom sur… Éthique : quelle charte ? Quelles limites ?

donateurs et les leviers de leur mobilisation changent, les institutions publiques et culturelles doivent évoluer et adapter leur stratégie fundraising en continu. Avec PHILANTHROPIA, vous faites le choix d’un fundraising ouvert et performant pour rallier vos donateurs à votre cause, et vous bénéficiez d’une expérience de plus de dix ans sur le secteur. www.philanthropia.fr

DOSSIER

gcolin@philanthropia.fr

14 Legs Une ressource qui n’a pas dit son dernier mot

06 64 64 14 53 4, rue Bernard Palissy 92800 Puteaux

Hopening est né du rapprochement des agences Optimus et Excel.

CLINIQUE DU FUNDRAISING 24 Côté pratique Sécuriser votre collaboration avec une startup solidaire 26 Dr Fundraising L’elevator pitch, pour monter plus haut ! 27 D r Digital Collecter sur Facebook ?

PORTRAIT 28 Adrien Joly La mécanique des fluides

Publication trimestrielle éditée par l’Association Française des Fundraisers, association à but non lucratif enregistrée au JO du 15 mai 1996, dont le siège social se trouve 6 rue de Londres, 75009 Paris – Tél. : 01 43 73 34 65 – Site internet : www.fundraisers.fr – E-mail : info@fundraisers.fr – ISSN : 1952-7284 – Directeur de la publication : Xavier Delattre – ­ Rédactrice en chef : Yaële Aferiat – ­ Rédactrices en chef adjointes : Pauline Museux – Lenaig Naudais ­– Secrétariat de rédaction : Pauline Graulle – Comité de rédaction : Yaële Aferiat, Alexandre Ayad, YannPatrick Bazire, Isabelle Colson, Philippe Doazan, Éric Dutertre, Xavier Frison, Arthur Gautier, Pauline Graulle, Marie-Pierre Lamotte, Ségolène Lavernhe, Sophie Le Maire, Marie-Ève Lhuillier, Ingrid Merckx, Pauline Museux, Lenaig Naudais, Alain Pierre, Christine Quentin, Sylvain Reymond, Sophie Rieunier, Francisco Rubio, Claire Schiller-Heuzé et Noémie Wiroth – Dossier : Pauline Graulle – ­ Illustration de une : Richard Paoli, 21x29,7 ­– Direction artistique et réalisation : 21x29,7 Impression et routage : Mailedit.

© Mucem – Louise Manhes

by Hopening

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© SQ_Studio © Andrey Ikryannikov

Mécénat et Fundraising pour les acteurs culture et patrimoine

© CLAIRE TABBAGH

Frilosité et réconfort

L

a philanthropie, une activité réservée à une élite  ? L’hypothèse, soulevée par l’étude américaine Gilded Giving, top-heavy philanthropy in an age of extreme inequality, a été rendue publique en France par Antoine Vaccaro (Cerphi), dans l’une de ses « cartes du tendre » publiées cet été. L’avenir des small et des middle donors est une question capitale pour le fundraising : faut-il arrêter de solliciter les « donateurs lambda » et leur préférer de grandes fortunes, plus immédiatement « rentables » pour les causes défendues par les associations ? Quel serait alors le prix à payer : les associations et fondations ont-elles vraiment intérêt à se mettre dans la main des puissants au risque de sacrifier leur indépendance financière ? Et, plus largement, confisquer le « pouvoir du don » aux classes populaires et moyennes ne pose-t-il pas un vrai problème démocratique ? En attendant, d’autres inquiétudes se posent, de ce côté-ci de l’Atlantique, sur les small et les middle donors. Le dernier baromètre de France Générosités a souligné combien le nombre de donateurs stagnait et combien le profil-type peinait à rajeunir ! Suppression de la réserve parlementaire, baisse des contrats aidés, réforme de l’ISF : nous voilà face à un contexte politique pour le moins défavorable. La pratique des fundraisers pourrait, qui plus est, être chamboulée par l’application du règlement européen sur la protection des données personnelles dès mai 2018 (sur le sujet, lire notre article sur la RGPD, p. 6). Mais attachons-nous à voir le verre à moitié plein. Nous consacrons notre dossier aux legs, un relais de croissance qui a de l’avenir ! Ce numéro d’automne abordera aussi des sujets plus légers : nous partirons à la recherche de la « bonne créa » (p. 8) et nous apprendrons à susciter l’intérêt de nos interlocuteurs en une minute avec l’elevator pitch (p. 26). Bonne lecture ! Le comité de rédaction

L’ASSOCIATION FRANÇAISE DES FUNDRAISERS EST LA RÉFÉRENCE EN MATIÈRE DE FUNDRAISING ET DE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES DES ORGANISATIONS D’INTÉRÊT GÉNÉRAL. CONSULTEZ NOTRE CENTRE DE RESSOURCES EN LIGNE ET REJOIGNEZ NOTRE RÉSEAU : FUNDRAISERS.FR


> 8-9 novembre

8e conférence pour le secteur culturel Paris

> 20 novembre

Conférence • Objectif mécénat Lyon

> 21 novembre

Afterwork • L’Institut Bergonié Bordeaux

> 22-23 novembre

Formation • Les fondamentaux du fundraising, stratégie pour (re)partir sur de bonnes bases ? Strasbourg

RÉSEAUX SOCIAUX

MONDIAL

World Giving Index

Le rapport annuel sur la générosité dans le monde est, chaque automne, très attendu. Pour sa neuvième édition, le World Giving Index 2017 montre une chute de la générosité dans les vingt pays les plus généreux… Mais une hausse sur le continent africain. « Le potentiel de dons dans les pays en voie de développement est en hausse », se félicite le directeur de la Charities Aid Foundation, qui a publié le rapport. « Le monde a une opportunité historique de cultiver sa société civile et, à travers elle, de transformer des millions de vies. Et cette enquête internationale nous donne la chance de parler de la manière dont nous pouvons rendre cela possible », ajoute-t-il.

Les Français hésitent encore à y donner

cafonline.org/about-us/publications/2017-publications/

> 27-28 novembre

> 5 décembre Apéro tapas Toulouse

> 5 décembre

Save the date • 9e conférence pour le secteur confessionnel Paris

> 7-8 décembre

Formation • Les fondamentaux du fundraising, stratégie pour (re)partir sur de bonnes bases ? Toulouse

> 8 décembre

Formation • Maîtriser la fiscalité liée à la philanthropie Paris

> 7-8 mars

Save the date • 13e conférence de fundraising pour l’enseignement supérieur, la recherche et la santé Paris

> 26-27-28 juin

Save the date • 17e séminaire francophone de la collecte de fonds Paris

Pour plus d’informations et adhérer en ligne : fundraisers.fr

Est-il normal de laisser des sites de crowdfunding collecter en faveur d’activités racistes ou immorales ? Après tout, telle est la liberté qu’offre internet… Le magazine Wedemain nous apprend que « chez Ulule, ce sont deux cents projets en moyenne qui sont passés au crible chaque jour. Sectes, projets politiques ou faisant l’apologie du racisme, de la xénophobie ou de la violence sont catégoriquement refusés ». La collecte, miroir de notre humanité…

RSE

La France en pôle position La directrice du pôle développement durable de Procter & Gamble est française et a été interviewée par Les Echos. Non seulement Viriginie Hélias estime que la RSE est bénéfique pour l’entreprise, mais elle prédit aussi que sur ce sujet, « la France va très rapidement prendre la première position, talonnée par l’Angleterre. Le marché français est ultra-demandeur et ultra-prêt. Selon d’intéressantes études, à l’échelle globale, le prix est le premier critère important pour les consommateurs, suivi par la santé. En France, la tendance est inverse : la préoccupation principale est sanitaire, la seconde est économique ».

POLITIQUE

Brainstorming

Yaële Aferiat, directrice de l’AFF, nouvelle influenceuse du président Macron ? On l’espère ! Elle vient en tout cas de publier un texte dans 60 idées pour Emmanuel Macron, ouvrage collectif chapeauté par Pierre Gattaz et Marie Georges. Elle propose, notamment, au nom de l’AFF « d’organiser un Grenelle de la générosité sous la houlette du ministère de la Transition écologique et solidaire, et en coopération avec le ministère des Finances, aujourd’hui seul décisionnaire quant à l’attribution du rescrit fiscal ».

http://bit.ly/2eYrQem

© demaerre

Formation • Les fondamentaux du fundraising, stratégie pour (re)partir sur de bonnes bases ? Lille

200

#ACTUS

Agenda

Comment mieux utiliser les réseaux sociaux pour collecter ? Une étude de Harris Interactive, réalisée pour Communication sans frontières et Facebook, nous éclaire un peu sur cette vaste question. Elle donne des indications sur le rapport qu’entretiennent les internautes et les associations sur les réseaux sociaux. C’est une bonne nouvelle, près d’un tiers des internautes suivent les pages des associations sur Facebook (ce qui ne veut pas dire pour autant qu’ils sont abonnés ou qu’ils utilisent le bouton « like »). Parmi eux, près de la moitié relaient ou retweetent des actualités postées par les associations, devenant ainsi des mini-ambassadeurs de la « marque ». Être présent sur les réseaux sociaux est aussi, selon les Français interrogés, un gage de confiance pour l’association, et d’ailleurs, ils  attendent «en priorité des ONG qu’elles utilisent les réseaux sociaux comme un vecteur de transparence sur leur fonctionnement ». On peut le regretter ou pas, les réseaux sociaux ne s’imposent pas encore comme des médias de collecte. Le baromètre Harris Interactive souligne ainsi que si « 8 % des associations ont déjà fait des appels aux dons via les réseaux sociaux », seulement « 19 % des Français déclarent être en confiance pour faire un don sur les réseaux sociaux ». La pratique du don apparaît même en légère baisse en 2017. Du côté des responsables des ONG qui ont été interrogés pour l’étude, on semble désormais très à l’aise avec Facebook et Twitter. Sur le panel des répondants, les réseaux sociaux sont ainsi le troisième outil de sollicitation utilisé, derrière le mail et le courrier.  Retrouver l’étude sur harris-interactive.fr

FISCALITÉ

Don-ISF : ouf ! L’inquiétude était vive depuis des mois, mais les fondations peuvent souffler. Finalement, le Gouvernement ne touchera pas au dispositif ISF sur les dons. Il supprime, en revanche, la réduction d’ISF concernant les investissements dans les PME. « La réduction d’impôt de 75 % pour les dons sera maintenue avec l’IFI [l’impôt sur la fortune immobilière, qui remplace l’ISF, NDLR] », a ainsi annoncé Bruno Le Maire dans un entretien aux Echos où il détaille ses derniers arbitrages sur la fiscalité du capital. Manifestement, le Gouvernement a compris qu’il paierait cher de s’attaquer ainsi frontalement au développement de la générosité et de la philanthropie… Si les fonds et les fondations peuvent se réjouir de ne pas perdre la dynamique d’augmentation des dons ISF, une question se pose néanmoins quant à l’assiette de cette nouvelle fiscalité. Le Gouvernement a ainsi annoncé qu’il voulait resserrer l’ISF – devenu IFI – aux seuls patrimoines immobiliers, et non plus financiers, excédant 1,3 million d’euros, ce qui réduit mécaniquement le nombre de contribuables assujettis à cet impôt, et de fait, à la réduction fiscale assortie en cas de dons. À regarder de près, donc…


> 8-9 novembre

8e conférence pour le secteur culturel Paris

> 20 novembre

Conférence • Objectif mécénat Lyon

> 21 novembre

Afterwork • L’Institut Bergonié Bordeaux

> 22-23 novembre

Formation • Les fondamentaux du fundraising, stratégie pour (re)partir sur de bonnes bases ? Strasbourg

RÉSEAUX SOCIAUX

MONDIAL

World Giving Index

Le rapport annuel sur la générosité dans le monde est, chaque automne, très attendu. Pour sa neuvième édition, le World Giving Index 2017 montre une chute de la générosité dans les vingt pays les plus généreux… Mais une hausse sur le continent africain. « Le potentiel de dons dans les pays en voie de développement est en hausse », se félicite le directeur de la Charities Aid Foundation, qui a publié le rapport. « Le monde a une opportunité historique de cultiver sa société civile et, à travers elle, de transformer des millions de vies. Et cette enquête internationale nous donne la chance de parler de la manière dont nous pouvons rendre cela possible », ajoute-t-il.

Les Français hésitent encore à y donner

cafonline.org/about-us/publications/2017-publications/

> 27-28 novembre

> 5 décembre Apéro tapas Toulouse

> 5 décembre

Save the date • 9e conférence pour le secteur confessionnel Paris

> 7-8 décembre

Formation • Les fondamentaux du fundraising, stratégie pour (re)partir sur de bonnes bases ? Toulouse

> 8 décembre

Formation • Maîtriser la fiscalité liée à la philanthropie Paris

> 7-8 mars

Save the date • 13e conférence de fundraising pour l’enseignement supérieur, la recherche et la santé Paris

> 26-27-28 juin

Save the date • 17e séminaire francophone de la collecte de fonds Paris

Pour plus d’informations et adhérer en ligne : fundraisers.fr

Est-il normal de laisser des sites de crowdfunding collecter en faveur d’activités racistes ou immorales ? Après tout, telle est la liberté qu’offre internet… Le magazine Wedemain nous apprend que « chez Ulule, ce sont deux cents projets en moyenne qui sont passés au crible chaque jour. Sectes, projets politiques ou faisant l’apologie du racisme, de la xénophobie ou de la violence sont catégoriquement refusés ». La collecte, miroir de notre humanité…

RSE

La France en pôle position La directrice du pôle développement durable de Procter & Gamble est française et a été interviewée par Les Echos. Non seulement Viriginie Hélias estime que la RSE est bénéfique pour l’entreprise, mais elle prédit aussi que sur ce sujet, « la France va très rapidement prendre la première position, talonnée par l’Angleterre. Le marché français est ultra-demandeur et ultra-prêt. Selon d’intéressantes études, à l’échelle globale, le prix est le premier critère important pour les consommateurs, suivi par la santé. En France, la tendance est inverse : la préoccupation principale est sanitaire, la seconde est économique ».

POLITIQUE

Brainstorming

Yaële Aferiat, directrice de l’AFF, nouvelle influenceuse du président Macron ? On l’espère ! Elle vient en tout cas de publier un texte dans 60 idées pour Emmanuel Macron, ouvrage collectif chapeauté par Pierre Gattaz et Marie Georges. Elle propose, notamment, au nom de l’AFF « d’organiser un Grenelle de la générosité sous la houlette du ministère de la Transition écologique et solidaire, et en coopération avec le ministère des Finances, aujourd’hui seul décisionnaire quant à l’attribution du rescrit fiscal ».

http://bit.ly/2eYrQem

© demaerre

Formation • Les fondamentaux du fundraising, stratégie pour (re)partir sur de bonnes bases ? Lille

200

#ACTUS

Agenda

Comment mieux utiliser les réseaux sociaux pour collecter ? Une étude de Harris Interactive, réalisée pour Communication sans frontières et Facebook, nous éclaire un peu sur cette vaste question. Elle donne des indications sur le rapport qu’entretiennent les internautes et les associations sur les réseaux sociaux. C’est une bonne nouvelle, près d’un tiers des internautes suivent les pages des associations sur Facebook (ce qui ne veut pas dire pour autant qu’ils sont abonnés ou qu’ils utilisent le bouton « like »). Parmi eux, près de la moitié relaient ou retweetent des actualités postées par les associations, devenant ainsi des mini-ambassadeurs de la « marque ». Être présent sur les réseaux sociaux est aussi, selon les Français interrogés, un gage de confiance pour l’association, et d’ailleurs, ils  attendent «en priorité des ONG qu’elles utilisent les réseaux sociaux comme un vecteur de transparence sur leur fonctionnement ». On peut le regretter ou pas, les réseaux sociaux ne s’imposent pas encore comme des médias de collecte. Le baromètre Harris Interactive souligne ainsi que si « 8 % des associations ont déjà fait des appels aux dons via les réseaux sociaux », seulement « 19 % des Français déclarent être en confiance pour faire un don sur les réseaux sociaux ». La pratique du don apparaît même en légère baisse en 2017. Du côté des responsables des ONG qui ont été interrogés pour l’étude, on semble désormais très à l’aise avec Facebook et Twitter. Sur le panel des répondants, les réseaux sociaux sont ainsi le troisième outil de sollicitation utilisé, derrière le mail et le courrier.  Retrouver l’étude sur harris-interactive.fr

FISCALITÉ

Don-ISF : ouf ! L’inquiétude était vive depuis des mois, mais les fondations peuvent souffler. Finalement, le Gouvernement ne touchera pas au dispositif ISF sur les dons. Il supprime, en revanche, la réduction d’ISF concernant les investissements dans les PME. « La réduction d’impôt de 75 % pour les dons sera maintenue avec l’IFI [l’impôt sur la fortune immobilière, qui remplace l’ISF, NDLR] », a ainsi annoncé Bruno Le Maire dans un entretien aux Echos où il détaille ses derniers arbitrages sur la fiscalité du capital. Manifestement, le Gouvernement a compris qu’il paierait cher de s’attaquer ainsi frontalement au développement de la générosité et de la philanthropie… Si les fonds et les fondations peuvent se réjouir de ne pas perdre la dynamique d’augmentation des dons ISF, une question se pose néanmoins quant à l’assiette de cette nouvelle fiscalité. Le Gouvernement a ainsi annoncé qu’il voulait resserrer l’ISF – devenu IFI – aux seuls patrimoines immobiliers, et non plus financiers, excédant 1,3 million d’euros, ce qui réduit mécaniquement le nombre de contribuables assujettis à cet impôt, et de fait, à la réduction fiscale assortie en cas de dons. À regarder de près, donc…


plus modeste des sous-traitants, est comptable de sa gestion des données personnelles, va se traduire par un changement de culture interne, où de nouvelles compétences seront nécessaires pour répondre aux exigences de la loi.

désormais coresponsables avec leurs clients en matière de données personnelles. Encore faut-il savoir de quoi il retourne. Pour Jeanne Bossi Malafosse, avocate associée, en charge du nouveau département Données personnelles du cabinet Delsol Avocats, « L’esprit du texte, c’est à la fois de faciliter les échanges de données et de renforcer les droits des personnes, à travers la responsabilisation des acteurs ». « Le secteur se professionnalise depuis une vingtaine d’années ; c’est une suite logique et une saine évolution  », estime Farid Tai, juriste pour France générosités. Mais entre des organisations internationales et des associations de quartier, le spectre des publics concernés est large. Le flou autour de certains points du Règlement n’arrange rien. « On ne sait pas encore quel peut être son impact, avance Chris Carnie, fondateur de Factary, une agence de fundraising britannique établie à Barcelone. Ce n’est pas le texte en luimême qui n’est pas clair, c’est son application en pratique pour les fundraisers. » Même sentiment du côté de France générosités : « Le Règlement reste assez flou sur certains passages », estime Farid Tai à la lecture d’un texte avant tout prévu pour encadrer les géants du web Google, Amazon, Facebook et consorts. Dans ce contexte, le secteur du fundraising doit valoriser ses spécificités, parfois très éloignées de celles de la Silicon Valley.

Un règlement aux contours encore flous Le contenu du texte (2) est connu, mais son application pose question, tout comme son impact sur la profession. Quatre enjeux majeurs concernent les fundraisers : le droit à l’oubli numérique de tout individu, pierre angulaire du texte ; la sécurité informatique pour lutter contre le piratage de données personnelles ; la formation des personnels aux nouvelles obligations légales, et enfin, la mise à jour contractuelle entre clients et sous-traitants,

Le fundraising, un secteur à part Un exemple parmi d’autres ? Jusqu’à présent, l’administration française exige une traçabilité totale du donateur, indispensable en cas de contrôle fiscal. Or, le droit à l’oubli porté par le Règlement européen prévoit que le donateur puisse supprimer cette donnée… Chris Carnie s’interroge, lui, sur la frontière au-delà de laquelle une donnée sera considérée comme personnelle. « Les premières relations avec un grand donateur potentiel sont très informelles, explique le

© Andrey Ikryannikov

#DÉCRYPTAGE • REPORTAGE

Le nouveau règlement européen sur la protection des données personnelles, qui entrera en application en mai 2018, chamboule les pratiques des fundraisers. Partagés au sujet de certaines contraintes imposées par la nouvelle loi et sa logique coercitive, les acteurs du secteur saluent son objectif final : mettre de l’ordre dans la jungle de la gestion des données personnelles.

Protection des données personnelles

LA NOUVELLE DONNE Attention, ça va tanguer. Là-bas, au-delà du ciel bleu azur de la bien connue loi informatique et libertés (1), approche un nuage aux contours indéfinis. Il charrie dans ses volutes le tout nouveau Règlement général européen sur la protection des données personnelles (RGPD), qui promet de révolutionner le cadre légal de la gestion de ces données sensibles dès le 25 mai 2018, date de son entrée en application partout en Europe. En France, le bateau des fundraisers ne sait s’il doit redouter un gros grain ou un simple changement de vent. Une certitude, cependant : tout le monde doit se préparer en vue de l’échéance, car rien ne sera jamais plus comme avant. Alors que les obligations des organismes au regard de la loi informatique et libertés s’appuient en grande partie sur les formalités pré-

alables (déclaration, autorisation) et une certaine forme de mansuétude de la Commission nationale Informatique et Libertés (Cnil) en termes de sanctions, le Règlement européen sur la protection des données s’appuie sur une logique de responsabilisation, de transparence… et de sanctions. Cette logique de responsabilité (accountability) où chacun, de la plus grande organisation au

— Le contenu du texte est connu, mais son application pose question, tout comme son impact sur la profession. —

— Le secteur du fundraising doit valoriser ses spécificités, parfois très éloignées de celles de la Silicon Valley. — Britannique. S’il nous tend sa carte de visite ou qu’il évoque ses intérêts philanthropiques, ce n’est pas le moment de lui faire signer un papier nous autorisant à utiliser ses données personnelles ! » D’autres pratiques posent question, comme le scoring, où une donnée personnelle est utilisée pour engager une action marketing – par exemple, un prospect assujetti à l’ISF reçoit un e-mail sur la défiscalisation. « Nous ne sommes pas visés par le Règlement sur ce point, mais nous allons quand même demander à la Cnil si nous pouvons continuer », indique une professionnelle du fundraising. On n’est jamais trop prudent… À cette myriade de cas particuliers s’ajoute la complexité du processus technique de suppression des données. Car «  il faut toujours être capable de rectifier une éventuelle erreur », rappelle Étienne Fauveau, directeur de compte stratégique sur le secteur financier et caritatif pour Canon France Business Services, gestionnaire de bases de données pour une vingtaine d’associations françaises. Effacer définitivement les données capitales d’un client ferait tache… Des sanctions impressionnantes, mais pas de panique ! La hauteur des sanctions prévues par le nouveau Règlement – jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial – interpelle également nombre de fundraisers. « C’est un changement de paradigme, confirme Jeanne Bossi Malafosse, qui a travaillé dix-huit ans pour la Cnil. Mais les organisations continue-

ront à recevoir des avertissements. » Pour Farid Tai, au-delà du risque de sanctions financières en cas de condamnation, il faut bien plus prendre conscience « du risque d’image et de réputation, catastrophique pour une organisation de solidarité ». Et pour tout le secteur.

— « Les fundraisers ont toujours montré qu’ils savaient s’adapter dans un contexte réglementaire en constante évolution. » — Pour éviter d’en arriver là, il est indispensable d’éduquer et de former les personnels. France générosités travaille ainsi à un « plan de progrès » pour se conformer au nouveau Règlement et partager les bonnes pratiques entre les quatre-vingtonze organisations membres du syndicat. Canon Business France Services et l’ensemble des prestataires techniques concernés anticipent le Règlement depuis parfois plus de deux ans et ont déjà mis tous leurs outils et processus en conformité avec le texte. Pour ceux qui n’auraient pas encore pris le problème à bras-le-corps, « il est encore temps de se préparer, rassure Chris Carnie. Les fundraisers sont inventifs et brillants. Ils ont toujours montré qu’ils savaient s’adapter dans un contexte réglementaire en constante évolution ». Ne reste, comme le résume un sous-traitant, qu’à traduire ce Règlement « dans la vraie vie ». X. F.

(1) http://www.cil.cnrs.fr/

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 7


plus modeste des sous-traitants, est comptable de sa gestion des données personnelles, va se traduire par un changement de culture interne, où de nouvelles compétences seront nécessaires pour répondre aux exigences de la loi.

désormais coresponsables avec leurs clients en matière de données personnelles. Encore faut-il savoir de quoi il retourne. Pour Jeanne Bossi Malafosse, avocate associée, en charge du nouveau département Données personnelles du cabinet Delsol Avocats, « L’esprit du texte, c’est à la fois de faciliter les échanges de données et de renforcer les droits des personnes, à travers la responsabilisation des acteurs ». « Le secteur se professionnalise depuis une vingtaine d’années ; c’est une suite logique et une saine évolution  », estime Farid Tai, juriste pour France générosités. Mais entre des organisations internationales et des associations de quartier, le spectre des publics concernés est large. Le flou autour de certains points du Règlement n’arrange rien. « On ne sait pas encore quel peut être son impact, avance Chris Carnie, fondateur de Factary, une agence de fundraising britannique établie à Barcelone. Ce n’est pas le texte en luimême qui n’est pas clair, c’est son application en pratique pour les fundraisers. » Même sentiment du côté de France générosités : « Le Règlement reste assez flou sur certains passages », estime Farid Tai à la lecture d’un texte avant tout prévu pour encadrer les géants du web Google, Amazon, Facebook et consorts. Dans ce contexte, le secteur du fundraising doit valoriser ses spécificités, parfois très éloignées de celles de la Silicon Valley.

Un règlement aux contours encore flous Le contenu du texte (2) est connu, mais son application pose question, tout comme son impact sur la profession. Quatre enjeux majeurs concernent les fundraisers : le droit à l’oubli numérique de tout individu, pierre angulaire du texte ; la sécurité informatique pour lutter contre le piratage de données personnelles ; la formation des personnels aux nouvelles obligations légales, et enfin, la mise à jour contractuelle entre clients et sous-traitants,

Le fundraising, un secteur à part Un exemple parmi d’autres ? Jusqu’à présent, l’administration française exige une traçabilité totale du donateur, indispensable en cas de contrôle fiscal. Or, le droit à l’oubli porté par le Règlement européen prévoit que le donateur puisse supprimer cette donnée… Chris Carnie s’interroge, lui, sur la frontière au-delà de laquelle une donnée sera considérée comme personnelle. « Les premières relations avec un grand donateur potentiel sont très informelles, explique le

© Andrey Ikryannikov

#DÉCRYPTAGE • REPORTAGE

Le nouveau règlement européen sur la protection des données personnelles, qui entrera en application en mai 2018, chamboule les pratiques des fundraisers. Partagés au sujet de certaines contraintes imposées par la nouvelle loi et sa logique coercitive, les acteurs du secteur saluent son objectif final : mettre de l’ordre dans la jungle de la gestion des données personnelles.

Protection des données personnelles

LA NOUVELLE DONNE Attention, ça va tanguer. Là-bas, au-delà du ciel bleu azur de la bien connue loi informatique et libertés (1), approche un nuage aux contours indéfinis. Il charrie dans ses volutes le tout nouveau Règlement général européen sur la protection des données personnelles (RGPD), qui promet de révolutionner le cadre légal de la gestion de ces données sensibles dès le 25 mai 2018, date de son entrée en application partout en Europe. En France, le bateau des fundraisers ne sait s’il doit redouter un gros grain ou un simple changement de vent. Une certitude, cependant : tout le monde doit se préparer en vue de l’échéance, car rien ne sera jamais plus comme avant. Alors que les obligations des organismes au regard de la loi informatique et libertés s’appuient en grande partie sur les formalités pré-

alables (déclaration, autorisation) et une certaine forme de mansuétude de la Commission nationale Informatique et Libertés (Cnil) en termes de sanctions, le Règlement européen sur la protection des données s’appuie sur une logique de responsabilisation, de transparence… et de sanctions. Cette logique de responsabilité (accountability) où chacun, de la plus grande organisation au

— Le contenu du texte est connu, mais son application pose question, tout comme son impact sur la profession. —

— Le secteur du fundraising doit valoriser ses spécificités, parfois très éloignées de celles de la Silicon Valley. — Britannique. S’il nous tend sa carte de visite ou qu’il évoque ses intérêts philanthropiques, ce n’est pas le moment de lui faire signer un papier nous autorisant à utiliser ses données personnelles ! » D’autres pratiques posent question, comme le scoring, où une donnée personnelle est utilisée pour engager une action marketing – par exemple, un prospect assujetti à l’ISF reçoit un e-mail sur la défiscalisation. « Nous ne sommes pas visés par le Règlement sur ce point, mais nous allons quand même demander à la Cnil si nous pouvons continuer », indique une professionnelle du fundraising. On n’est jamais trop prudent… À cette myriade de cas particuliers s’ajoute la complexité du processus technique de suppression des données. Car «  il faut toujours être capable de rectifier une éventuelle erreur », rappelle Étienne Fauveau, directeur de compte stratégique sur le secteur financier et caritatif pour Canon France Business Services, gestionnaire de bases de données pour une vingtaine d’associations françaises. Effacer définitivement les données capitales d’un client ferait tache… Des sanctions impressionnantes, mais pas de panique ! La hauteur des sanctions prévues par le nouveau Règlement – jusqu’à 20 millions d’euros ou 4 % du chiffre d’affaires annuel mondial – interpelle également nombre de fundraisers. « C’est un changement de paradigme, confirme Jeanne Bossi Malafosse, qui a travaillé dix-huit ans pour la Cnil. Mais les organisations continue-

ront à recevoir des avertissements. » Pour Farid Tai, au-delà du risque de sanctions financières en cas de condamnation, il faut bien plus prendre conscience « du risque d’image et de réputation, catastrophique pour une organisation de solidarité ». Et pour tout le secteur.

— « Les fundraisers ont toujours montré qu’ils savaient s’adapter dans un contexte réglementaire en constante évolution. » — Pour éviter d’en arriver là, il est indispensable d’éduquer et de former les personnels. France générosités travaille ainsi à un « plan de progrès » pour se conformer au nouveau Règlement et partager les bonnes pratiques entre les quatre-vingtonze organisations membres du syndicat. Canon Business France Services et l’ensemble des prestataires techniques concernés anticipent le Règlement depuis parfois plus de deux ans et ont déjà mis tous leurs outils et processus en conformité avec le texte. Pour ceux qui n’auraient pas encore pris le problème à bras-le-corps, « il est encore temps de se préparer, rassure Chris Carnie. Les fundraisers sont inventifs et brillants. Ils ont toujours montré qu’ils savaient s’adapter dans un contexte réglementaire en constante évolution ». Ne reste, comme le résume un sous-traitant, qu’à traduire ce Règlement « dans la vraie vie ». X. F.

(1) http://www.cil.cnrs.fr/

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 7


« Travailler l’envie du client pour créer »

Vous aussi, partez à la découverte de la bonne créa ! Reliez chacun des pros à son témoignage, et découvrez ce qui se cache derrière la bonne créa de votre future campagne.

« Il n’y a pas si longtemps, on reconnaissait une créa essentiellement dans le geste créatif destiné à apparaître sur des médias traditionnels. Aujourd’hui, on ne peut pas dissocier la créativité de l’espace dans lequel elle s’exprime. Et ces espaces se sont multipliés. Ainsi retrouvons-nous de la créativité déployée dans des applications mobiles et des mécanismes de digitalisation. Le présupposé de la création passe par la capacité à inventer des dispositifs extrêmement immersifs, très inattendus. La créativité, c’est la capacité à aller chercher notre attention là où on s’y attend le moins et à sortir des codes. Le processus de création est aussi bouleversé : la création n’appartient plus uniquement au directeur artistique et au concepteur-rédacteur, elle est plus collaborative, participative. Des internautes, des socionautes, participent à la création de marques, de campagnes. Enfin, la créativité s’inscrit dans un cadre éthique. La marque est une garantie. Elle apporte la réputation, le savoir-faire, et ne peut pas tromper ses donateurs. À Communication Sans Frontières, on estime que la communication citoyenne nécessite qu’on apporte une valeur ajoutée au point de vue, au comportement, à l’intelligence du donateur. Le critère de valeur ajoutée est essentiel à la « bonne créa ».

« La créa vit dans un univers en 3D » « J’ai plusieurs critères pour définir une bonne création. La création doit prouver qu’elle réalise un pont entre la « marque-personne » et son public. Elle va bien exprimer la personnalité de cette marque et intégrer les insights, les motivations du public au regard de sa proposition. Un autre critère est de dire que la création occupe un territoire entre marque et code : le code au sens des représentations, des usages, des « signes » et maintenant de l’irruption de la data. De plus en plus, une bonne créa est une créa qui répond aux insights mais également au pilotage de la data, c’est-à-dire qui va coller au bon moment à la bonne situation de la cible. C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui dans des univers créatifs qui ne sont plus du tout monolithiques – un brief, une réponse, une créa –, mais dans des systèmes en trois dimensions, sortes de matrices créatives dans lesquelles on va avoir des déclinaisons d’une même idée. Il y a un vrai changement de dimension, un passage à la vision en relief, en matière de création. Le troisième critère concerne l’idée, certains disent la big idea , je préfère la value idea. La création doit porter cette value idea, autrement elle est faible, elle ne fait que mimer, gesticuler. C’est là qu’on peut avoir le sentiment d’esthétique, d’agréable, de confortable, mais où il manque quelque chose : le cœur, l’idée qui va faire donner ou pousser à l’action. Enfin, une bonne créa doit aussi porter des émotions, elle doit pénétrer le cœur de sa cible. Une bonne créa a besoin de parler à l’intime, au plus profond. »

© Eugénie Martinez

« Inscrire la créa dans un cadre éthique »

Pierre Bocquiny, président de Maxyma

© Xosé Bouzas

Bruno David, président de Communication Sans Frontières et directeur de la Communication et du Développement de Secours islamique France.

Marine Arnstam, directrice de la Création de Mediaprism l’agence

« L’idée ne doit jamais être gratuite » « Tout d’abord, il faut souligner la difficulté de produire “une bonne campagne” pour une organisation caritative. Nous devons stimuler la générosité et l’engagement, facteurs comportementaux autrement plus complexes que le désir des consommateurs visé par les campagnes commerciales. Le challenge est d’autant plus difficile que, aucune cause ne ressemblant à une autre, les raisonnements ne se standardisent pas. Et à l’aide d’une campagne, d’un message fort, nous devons rallier une cible très hétérogène, en incluant les donateurs qui sont une cible plutôt âgée, mais aussi des militants et des plus jeunes, sensibles à la modernité des codes. Cette alchimie qui doit produire un lien entre une cause singulière et des individus est soumise au critère d’évaluation le plus exigeant : celui de l’efficacité permanente. En matière de création caritative, l’idée ne doit jamais être gratuite. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être seulement visibles, nous devons parvenir à être assez impactants pour faire changer les mentalités durablement. Notre travail doit aider des associations, des fondations, des instituts de recherche à collecter des dons pour porter et défendre un combat. Une belle création sans fond et sans justesse peut même se révéler contre-productive et désengager certains donateurs. Enfin, une bonne création doit aller au-delà du “coup publicitaire” et participer au mieux au développement de la marque et à des enjeux clés comme le legs et les libéralités ».

« Une bonne créa touche à la fois le cœur et l’esprit et doit nourrir un continuum de dialogue avec le donateur, avec le prospect, et avec le grand public pour faire évoluer la cause. Selon moi, il y a trois niveaux : bien comprendre la cause dont on parle, savoir émouvoir sans manipuler et être dans un rapport juste à l’époque, au temps, pour faire résonner la campagne. Pour réussir, il faut bien entendre où en sont les acteurs, être attentif à chaque mot et travailler l’envie du client. Les outils sont une bonne stratégie d’ensemble : une plateforme de marque claire, un continuum de relations marque-publics avec un historique et une direction, un chapeau global à l’année ou sur deux ou trois ans… autant d‘éléments qui vont irriguer le brief. Cela donne une direction, une dynamique, et cela permet de se situer dans ce que les gens peuvent entendre (l’actualité, le moment de collecte, le message des autres acteurs du secteur…) à un instant T. Il faut aussi être en mesure de s’adapter à des habi­ tudes qui changent vite dans la façon de consommer, d’interagir et de communiquer. Nous devons être en mesure de proposer des innovations comme la DRTV (1), des opérations SMS ou de nouveaux dispositifs. Il y a des interactions à envisager, aujourd’hui, qui nécessitent de repenser le brief et d’échanger toujours plus, de coconstruire avec l’association ou la fondation. » (1) Direct response television marketing.

© Jade Toth

BONNE « CRÉA » ! © Titus Lacoste

#DÉCRYPTAGE • ANALYSE DE CAMPAGNE

À LA RECHERCHE DE LA

Jérôme Barbe, directeur de Création d’Hopening

Propos recueillis par Y.-P. B.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 9


« Travailler l’envie du client pour créer »

Vous aussi, partez à la découverte de la bonne créa ! Reliez chacun des pros à son témoignage, et découvrez ce qui se cache derrière la bonne créa de votre future campagne.

« Il n’y a pas si longtemps, on reconnaissait une créa essentiellement dans le geste créatif destiné à apparaître sur des médias traditionnels. Aujourd’hui, on ne peut pas dissocier la créativité de l’espace dans lequel elle s’exprime. Et ces espaces se sont multipliés. Ainsi retrouvons-nous de la créativité déployée dans des applications mobiles et des mécanismes de digitalisation. Le présupposé de la création passe par la capacité à inventer des dispositifs extrêmement immersifs, très inattendus. La créativité, c’est la capacité à aller chercher notre attention là où on s’y attend le moins et à sortir des codes. Le processus de création est aussi bouleversé : la création n’appartient plus uniquement au directeur artistique et au concepteur-rédacteur, elle est plus collaborative, participative. Des internautes, des socionautes, participent à la création de marques, de campagnes. Enfin, la créativité s’inscrit dans un cadre éthique. La marque est une garantie. Elle apporte la réputation, le savoir-faire, et ne peut pas tromper ses donateurs. À Communication Sans Frontières, on estime que la communication citoyenne nécessite qu’on apporte une valeur ajoutée au point de vue, au comportement, à l’intelligence du donateur. Le critère de valeur ajoutée est essentiel à la « bonne créa ».

« La créa vit dans un univers en 3D » « J’ai plusieurs critères pour définir une bonne création. La création doit prouver qu’elle réalise un pont entre la « marque-personne » et son public. Elle va bien exprimer la personnalité de cette marque et intégrer les insights, les motivations du public au regard de sa proposition. Un autre critère est de dire que la création occupe un territoire entre marque et code : le code au sens des représentations, des usages, des « signes » et maintenant de l’irruption de la data. De plus en plus, une bonne créa est une créa qui répond aux insights mais également au pilotage de la data, c’est-à-dire qui va coller au bon moment à la bonne situation de la cible. C’est pourquoi nous sommes aujourd’hui dans des univers créatifs qui ne sont plus du tout monolithiques – un brief, une réponse, une créa –, mais dans des systèmes en trois dimensions, sortes de matrices créatives dans lesquelles on va avoir des déclinaisons d’une même idée. Il y a un vrai changement de dimension, un passage à la vision en relief, en matière de création. Le troisième critère concerne l’idée, certains disent la big idea , je préfère la value idea. La création doit porter cette value idea, autrement elle est faible, elle ne fait que mimer, gesticuler. C’est là qu’on peut avoir le sentiment d’esthétique, d’agréable, de confortable, mais où il manque quelque chose : le cœur, l’idée qui va faire donner ou pousser à l’action. Enfin, une bonne créa doit aussi porter des émotions, elle doit pénétrer le cœur de sa cible. Une bonne créa a besoin de parler à l’intime, au plus profond. »

© Eugénie Martinez

« Inscrire la créa dans un cadre éthique »

Pierre Bocquiny, président de Maxyma

© Xosé Bouzas

Bruno David, président de Communication Sans Frontières et directeur de la Communication et du Développement de Secours islamique France.

Marine Arnstam, directrice de la Création de Mediaprism l’agence

« L’idée ne doit jamais être gratuite » « Tout d’abord, il faut souligner la difficulté de produire “une bonne campagne” pour une organisation caritative. Nous devons stimuler la générosité et l’engagement, facteurs comportementaux autrement plus complexes que le désir des consommateurs visé par les campagnes commerciales. Le challenge est d’autant plus difficile que, aucune cause ne ressemblant à une autre, les raisonnements ne se standardisent pas. Et à l’aide d’une campagne, d’un message fort, nous devons rallier une cible très hétérogène, en incluant les donateurs qui sont une cible plutôt âgée, mais aussi des militants et des plus jeunes, sensibles à la modernité des codes. Cette alchimie qui doit produire un lien entre une cause singulière et des individus est soumise au critère d’évaluation le plus exigeant : celui de l’efficacité permanente. En matière de création caritative, l’idée ne doit jamais être gratuite. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être seulement visibles, nous devons parvenir à être assez impactants pour faire changer les mentalités durablement. Notre travail doit aider des associations, des fondations, des instituts de recherche à collecter des dons pour porter et défendre un combat. Une belle création sans fond et sans justesse peut même se révéler contre-productive et désengager certains donateurs. Enfin, une bonne création doit aller au-delà du “coup publicitaire” et participer au mieux au développement de la marque et à des enjeux clés comme le legs et les libéralités ».

« Une bonne créa touche à la fois le cœur et l’esprit et doit nourrir un continuum de dialogue avec le donateur, avec le prospect, et avec le grand public pour faire évoluer la cause. Selon moi, il y a trois niveaux : bien comprendre la cause dont on parle, savoir émouvoir sans manipuler et être dans un rapport juste à l’époque, au temps, pour faire résonner la campagne. Pour réussir, il faut bien entendre où en sont les acteurs, être attentif à chaque mot et travailler l’envie du client. Les outils sont une bonne stratégie d’ensemble : une plateforme de marque claire, un continuum de relations marque-publics avec un historique et une direction, un chapeau global à l’année ou sur deux ou trois ans… autant d‘éléments qui vont irriguer le brief. Cela donne une direction, une dynamique, et cela permet de se situer dans ce que les gens peuvent entendre (l’actualité, le moment de collecte, le message des autres acteurs du secteur…) à un instant T. Il faut aussi être en mesure de s’adapter à des habi­ tudes qui changent vite dans la façon de consommer, d’interagir et de communiquer. Nous devons être en mesure de proposer des innovations comme la DRTV (1), des opérations SMS ou de nouveaux dispositifs. Il y a des interactions à envisager, aujourd’hui, qui nécessitent de repenser le brief et d’échanger toujours plus, de coconstruire avec l’association ou la fondation. » (1) Direct response television marketing.

© Jade Toth

BONNE « CRÉA » ! © Titus Lacoste

#DÉCRYPTAGE • ANALYSE DE CAMPAGNE

À LA RECHERCHE DE LA

Jérôme Barbe, directeur de Création d’Hopening

Propos recueillis par Y.-P. B.

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vision du parrainage d’enfants. C’est la guerre du Vietnam qui « produit » Médecins du Monde et son droit d’ingérence, le sauvetage en mer de Chine des boat people qui fuient le communisme et la répression. Le droit d’ingérence est un pas de plus vers un droit à l’aide humanitaire, vers une obligation d’assistance dont la finalité sera la naissance de la « responsabilité de protéger » dont le concept porté par les Nations­unies est inspiré par le Comité international de la Croix-Rouge et plusieurs dizaines d’ONG.

La philanthropie et la guerre

Le visage de Janus

Durant la Première Guerre mondiale : plus de

66

%

des infirmières au service de l’armée française étaient des bénévoles ; plus de

300 000

Belges ont été accueillis par des milliers de familles françaises.

À l’origine des associations C’est la guerre qui donne naissance au Comité­international de la Croix-Rouge dans les années 1850, dont la première convention inter­na­tio­nale affirme que même la guerre a ses limites. C’est encore la guerre, la Première Guerre mondiale, qui, en 1919, incite les sœurs Jebb à fonder Save the Children pour venir en aide aux enfants victimes de la famine dans les pays vaincus. La guerre civile espagnole dans les années 1930 inspire un vaste mouvement mondial de solidarité pour accueillir les réfugiés. En France, pour leur venir en

Pour aller plus loin : à paraître au dernier trimestre 2017, les actes du colloque organisé les 3 et 4 avril au Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux sur le thème « la philanthropie américaine et la Grande Guerre ».

apporter sous la pression morale, sa contribution . Des enfants des écoles aux hospices des nécessiteux, on collecte. Tout : argent, vêtements, nourriture, adoption des enfants orphelins, amour, avec les marraines de guerre, etc. En Grande-Bretagne, jamais on ne reverra de tels chiffres de générosité. On collecte aussi le temps, et le bénévolat fait une entrée en masse. En France, des milliers de familles accueillent plus de 300 000 Belges qui fuient l’avancée des troupes ennemies. Les exemples pourraient être multipliés et appliqués à de nombreux conflits.

© CLAIRE TABBAGH

L

a philanthropie a fait l’objet de nombreuses études tant sur ses origines, sa fiscalité, ses diverses formes, financières ou humaines, que sur ses motivations. Tous les secteurs ont été étudiés  : mécénat artistique, santé, solidarité, religion… À ma connaissance, un secteur semble peu étudié : celui du rapport de la philanthropie, des philanthropes et de la guerre. Or, la mobilisation philanthropique n’est jamais aussi importante que lors des conflits armés nationaux ou internationaux. La mobilisation humaine et financière n’est jamais aussi importante que pendant les cycles de violence. Il y a là un vaste sujet de réflexion, à la fois d’un point de vue philosophique, mais aussi politique et économique. Une interrogation simple, et jamais traitée à ce jour : la philanthropie peut-elle être un facteur déterminant de la victoire d’un pays contre un autre ? Par exemple, les bénévoles sont-ils des supplétifs des armées au combat ? La question mérite d’être posée quand on sait par exemple que sur les 120 000 infirmières au service de l’armée française durant la Première Guerre mondiale, plus de 80 000 étaient des bénévoles. L’armée française aurait-elle pu supporter le poids financiers de 80 000 salariés supplémentaires pendant presque cinq années ? Et il ne s’agit là que de la partie émergée de l’iceberg…

aide, naît le Secours Rouge, aujourd’hui Secours­populaire français. La Seconde Guerre mondiale donne lieu à une mobilisation civile et philanthropique sans précédent : CARE est le symbole de l’ONG américaine créée pour venir en aide aux populations européennes. C’est toujours la guerre qui, à la fin des années 1960, donne naissance à Médecins Sans Frontières, dont la philosophie est une réaction à la neutralité de la Croix-Rouge pendant la Seconde Guerre mondiale, à sa règle du silence absolu et du respect de la souveraineté des États. Pour Médecins Sans Frontières­, le besoin des populations en danger prime sur toute autre règle. C’est peu dire que MSF transforme en quelques décennies le paysage humanitaire – au point que certaines vénérables institutions seront obligées d’aligner leurs actions sur celles de cette toute nouvelle ONG. La guerre de Corée voit naître World Vision et une nouvelle

© CLAIRE TABBAGH

Ci-dessous : médaille d’infirmière de l’Union des femmes de France avec barrette de la Croix-Rouge.

Mobilisation sans précédent La guerre génère aussi les plus grosses mobilisations bénévoles et financières. D’abord, la Première Guerre mondiale transforme le paysage philanthropique national et international. « Nous sommes tous des philanthropes » pourrait être la nouvelle devise. En effet, les besoins sont tels que la philanthropie traditionnelle des grands mécènes ne suffit plus. Chacun – jeune ou vieux, riche ou pauvre, homme ou femme – apporte, ou doit

© CLAIRE TABBAGH

#DÉCRYPTAGE • AUTRE REGARD

Quels sont les liens entre la guerre et la philanthropie ? Une curieuse question, qui est pourtant tout à fait centrale dans la constitution de la générosité telle que nous la connaissons et la pratiquons aujourd’hui. Francisco Rubio, professeur associé à la Webster University de Genève, nous répond.

Alors, quel rôle la philanthropie et les philanthropes jouent-ils dans la guerre ? Sa poursuite ? Son financement ? Le soutien moral d’une nation ? Rapportée à la situation actuelle sur l’arrivée des migrants en Italie, en Grèce ou en Espagne, la question de la relation entre ces deux phénomènes doit plus que jamais être posée. En effet, selon trois ministres de l’intérieur européens, les migrants n’existent que parce que les ONG, nées des guerres précédentes, leur portent secours quand ils tentent de franchir les eaux. Pour les ONG, il faudrait plutôt rechercher la cause de ces migrations dans les guerres et les violences qui ruinent ces pays et il est légitime qu’elles portent assistance avec l’argent de la philanthropie aux femmes, aux enfants, à tous ceux qui se noient en Méditerranée­. Il n’y a pas de philanthropie neutre. La bonne philanthropie serait-elle celle qui rend service aux États ou celle qui porte secours aux plus vulnérables ? Pour ma part, j’ai choisi mon camp philanthropique. Francisco Rubio, professeur associé à la Webster University, à Genève

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 11


vision du parrainage d’enfants. C’est la guerre du Vietnam qui « produit » Médecins du Monde et son droit d’ingérence, le sauvetage en mer de Chine des boat people qui fuient le communisme et la répression. Le droit d’ingérence est un pas de plus vers un droit à l’aide humanitaire, vers une obligation d’assistance dont la finalité sera la naissance de la « responsabilité de protéger » dont le concept porté par les Nations­unies est inspiré par le Comité international de la Croix-Rouge et plusieurs dizaines d’ONG.

La philanthropie et la guerre

Le visage de Janus

Durant la Première Guerre mondiale : plus de

66

%

des infirmières au service de l’armée française étaient des bénévoles ; plus de

300 000

Belges ont été accueillis par des milliers de familles françaises.

À l’origine des associations C’est la guerre qui donne naissance au Comité­international de la Croix-Rouge dans les années 1850, dont la première convention inter­na­tio­nale affirme que même la guerre a ses limites. C’est encore la guerre, la Première Guerre mondiale, qui, en 1919, incite les sœurs Jebb à fonder Save the Children pour venir en aide aux enfants victimes de la famine dans les pays vaincus. La guerre civile espagnole dans les années 1930 inspire un vaste mouvement mondial de solidarité pour accueillir les réfugiés. En France, pour leur venir en

Pour aller plus loin : à paraître au dernier trimestre 2017, les actes du colloque organisé les 3 et 4 avril au Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux sur le thème « la philanthropie américaine et la Grande Guerre ».

apporter sous la pression morale, sa contribution . Des enfants des écoles aux hospices des nécessiteux, on collecte. Tout : argent, vêtements, nourriture, adoption des enfants orphelins, amour, avec les marraines de guerre, etc. En Grande-Bretagne, jamais on ne reverra de tels chiffres de générosité. On collecte aussi le temps, et le bénévolat fait une entrée en masse. En France, des milliers de familles accueillent plus de 300 000 Belges qui fuient l’avancée des troupes ennemies. Les exemples pourraient être multipliés et appliqués à de nombreux conflits.

© CLAIRE TABBAGH

L

a philanthropie a fait l’objet de nombreuses études tant sur ses origines, sa fiscalité, ses diverses formes, financières ou humaines, que sur ses motivations. Tous les secteurs ont été étudiés  : mécénat artistique, santé, solidarité, religion… À ma connaissance, un secteur semble peu étudié : celui du rapport de la philanthropie, des philanthropes et de la guerre. Or, la mobilisation philanthropique n’est jamais aussi importante que lors des conflits armés nationaux ou internationaux. La mobilisation humaine et financière n’est jamais aussi importante que pendant les cycles de violence. Il y a là un vaste sujet de réflexion, à la fois d’un point de vue philosophique, mais aussi politique et économique. Une interrogation simple, et jamais traitée à ce jour : la philanthropie peut-elle être un facteur déterminant de la victoire d’un pays contre un autre ? Par exemple, les bénévoles sont-ils des supplétifs des armées au combat ? La question mérite d’être posée quand on sait par exemple que sur les 120 000 infirmières au service de l’armée française durant la Première Guerre mondiale, plus de 80 000 étaient des bénévoles. L’armée française aurait-elle pu supporter le poids financiers de 80 000 salariés supplémentaires pendant presque cinq années ? Et il ne s’agit là que de la partie émergée de l’iceberg…

aide, naît le Secours Rouge, aujourd’hui Secours­populaire français. La Seconde Guerre mondiale donne lieu à une mobilisation civile et philanthropique sans précédent : CARE est le symbole de l’ONG américaine créée pour venir en aide aux populations européennes. C’est toujours la guerre qui, à la fin des années 1960, donne naissance à Médecins Sans Frontières, dont la philosophie est une réaction à la neutralité de la Croix-Rouge pendant la Seconde Guerre mondiale, à sa règle du silence absolu et du respect de la souveraineté des États. Pour Médecins Sans Frontières­, le besoin des populations en danger prime sur toute autre règle. C’est peu dire que MSF transforme en quelques décennies le paysage humanitaire – au point que certaines vénérables institutions seront obligées d’aligner leurs actions sur celles de cette toute nouvelle ONG. La guerre de Corée voit naître World Vision et une nouvelle

© CLAIRE TABBAGH

Ci-dessous : médaille d’infirmière de l’Union des femmes de France avec barrette de la Croix-Rouge.

Mobilisation sans précédent La guerre génère aussi les plus grosses mobilisations bénévoles et financières. D’abord, la Première Guerre mondiale transforme le paysage philanthropique national et international. « Nous sommes tous des philanthropes » pourrait être la nouvelle devise. En effet, les besoins sont tels que la philanthropie traditionnelle des grands mécènes ne suffit plus. Chacun – jeune ou vieux, riche ou pauvre, homme ou femme – apporte, ou doit

© CLAIRE TABBAGH

#DÉCRYPTAGE • AUTRE REGARD

Quels sont les liens entre la guerre et la philanthropie ? Une curieuse question, qui est pourtant tout à fait centrale dans la constitution de la générosité telle que nous la connaissons et la pratiquons aujourd’hui. Francisco Rubio, professeur associé à la Webster University de Genève, nous répond.

Alors, quel rôle la philanthropie et les philanthropes jouent-ils dans la guerre ? Sa poursuite ? Son financement ? Le soutien moral d’une nation ? Rapportée à la situation actuelle sur l’arrivée des migrants en Italie, en Grèce ou en Espagne, la question de la relation entre ces deux phénomènes doit plus que jamais être posée. En effet, selon trois ministres de l’intérieur européens, les migrants n’existent que parce que les ONG, nées des guerres précédentes, leur portent secours quand ils tentent de franchir les eaux. Pour les ONG, il faudrait plutôt rechercher la cause de ces migrations dans les guerres et les violences qui ruinent ces pays et il est légitime qu’elles portent assistance avec l’argent de la philanthropie aux femmes, aux enfants, à tous ceux qui se noient en Méditerranée­. Il n’y a pas de philanthropie neutre. La bonne philanthropie serait-elle celle qui rend service aux États ou celle qui porte secours aux plus vulnérables ? Pour ma part, j’ai choisi mon camp philanthropique. Francisco Rubio, professeur associé à la Webster University, à Genève

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 11


Institutions culturelles, entreprises et fondations d’entreprise observent des règles strictes pour encadrer les projets de mécénat. Elles supposent une bonne maîtrise, et parfois un surcroît d’éthique individuelle. 350.org, Libérons le Louvre : le 5 mars 2017, des militants pour le désinvestissement des énergies fossiles s’étaient donné rendez-vous au plus grand musée du monde. Ils protestaient contre son soutien par Total. « Total n’a pas sa place dans des galeries qui abritent des œuvres d’un temps multimillénaire », a tweeté le collectif 350.org. En partant, les manifestants se sont défaits de leurs habits noirs devant la Victoire de Samothrace pour illustrer une marée de pétrole grimpant aux pieds de la statue. Leur espoir : obtenir la rupture avec ce mécène gênant comme les art-activists londoniens ayant mis fin au partenariat du Tate Museum avec BP. De quoi relancer un débat ancien sur la provenance des fonds de soutien. « Total est la première entreprise française, et ça n’est pas de l’argent illégal », commente Camille Assouline, responsable du pôle Dé­ ve­ lop­ pement du mécénat et Parrainage d’entreprises à la Philharmonie. En France, la plupart des institutions culturelles reprennent ou s’inspirent de la charte éthique proposée par le ministère de la Culture. « Ce sont des règles régies par la logique de marché et de service public, résume-telle. On n’accepte pas de don d’un parti politique, un syndicat ou une instance religieuse, ni d’entreprise dont on ne sait pas d’où viennent les fonds ou dont les missions sont un peu obscures. On n’ira pas contre une logique de marché et le fait d’accepter un mécénat ne doit pas privilégier quelqu’un au détriment d’un autre. » Si l’on s’en tient à la charte du ministère, les fonds de Total sont acceptables. Mais cette affaire a-t-elle été préjudiciable à l’image du Louvre ? Ce partenariat était-il compatible avec des exigences environnementales ? En outre, est-il toujours possible de vérifier la nature des fonds proposés ? «  Nos entreprises mé-

PUB © Brian A. Jackson

#DÉCRYPTAGE • ZOOM SUR…

Éthique : quelle charte ? Quelles limites ?

cènes, nous les connaissons bien », précise Camille Assouline, qui cite en tête le mécène musical de la Société Générale­, la Fondation Carasso et la Fondation­SNCF, avec qui les professionnels du mécénat entretiennent des relations de proximité. Des process qui se structurent L’existence d’une charte éthique est de plus en plus demandée par les mécènes. « La fondation d’entreprise a professionnalisé le mécénat, poursuit Camille Assouline. Les process se sont structurés, l’avantage étant que l’on sait où l’on va. Les entreprises sans fondation ont le souci de l’éthique, également, et soutiennent des projets dans des secteurs plus variés » Certains­ mécènes arrivent avec leur propre charte éthique. Guillaume de la Broise, directeur du Développement et du Mécénat de la Cité de l’architecture est désormais directeur de la Commu­ni­ca­tion chez

Bouygues immobilier. En changeant de poste, il a également changé de culture et d’environnement professionnel : « L’éthique est au cœur des préoccupations de Bouygues Immobilier, assure-t-il. La plupart des partenaires et entreprises avec lesquels nous travaillons ont aussi une charte éthique, mais la nôtre est d’autant plus élevée que nous appartenons à un groupe coté, Bouygues ! Chaque nouveau collaborateur signe une charte dont les principes sont rappelés lors d’opérations de sensibilisation et de communication interne… » Ils incluent­devoir de réserve, devoir de confidentialité, égalité de traitement vis-à-vis de partenaires et de prestataires. Ils exigent de ne pas favoriser telle entreprise, de ne pas accepter de cadeau ou d’élément pouvant influencer un partenariat, et impliquent de bien différencier mécénat et sponsoring… I. M.

Nous pourrions faire une belle annonce pour nous présenter, mais le mieux reste de se rencontrer ;)

Emilie Locqueville - 06 78 34 87 50 emilie.locqueville@donicite.fr Mathieu Perche - 07 70 15 89 59 mathieu.perche@donicite.fr

www.donicite.fr


Institutions culturelles, entreprises et fondations d’entreprise observent des règles strictes pour encadrer les projets de mécénat. Elles supposent une bonne maîtrise, et parfois un surcroît d’éthique individuelle. 350.org, Libérons le Louvre : le 5 mars 2017, des militants pour le désinvestissement des énergies fossiles s’étaient donné rendez-vous au plus grand musée du monde. Ils protestaient contre son soutien par Total. « Total n’a pas sa place dans des galeries qui abritent des œuvres d’un temps multimillénaire », a tweeté le collectif 350.org. En partant, les manifestants se sont défaits de leurs habits noirs devant la Victoire de Samothrace pour illustrer une marée de pétrole grimpant aux pieds de la statue. Leur espoir : obtenir la rupture avec ce mécène gênant comme les art-activists londoniens ayant mis fin au partenariat du Tate Museum avec BP. De quoi relancer un débat ancien sur la provenance des fonds de soutien. « Total est la première entreprise française, et ça n’est pas de l’argent illégal », commente Camille Assouline, responsable du pôle Dé­ ve­ lop­ pement du mécénat et Parrainage d’entreprises à la Philharmonie. En France, la plupart des institutions culturelles reprennent ou s’inspirent de la charte éthique proposée par le ministère de la Culture. « Ce sont des règles régies par la logique de marché et de service public, résume-telle. On n’accepte pas de don d’un parti politique, un syndicat ou une instance religieuse, ni d’entreprise dont on ne sait pas d’où viennent les fonds ou dont les missions sont un peu obscures. On n’ira pas contre une logique de marché et le fait d’accepter un mécénat ne doit pas privilégier quelqu’un au détriment d’un autre. » Si l’on s’en tient à la charte du ministère, les fonds de Total sont acceptables. Mais cette affaire a-t-elle été préjudiciable à l’image du Louvre ? Ce partenariat était-il compatible avec des exigences environnementales ? En outre, est-il toujours possible de vérifier la nature des fonds proposés ? «  Nos entreprises mé-

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#DÉCRYPTAGE • ZOOM SUR…

Éthique : quelle charte ? Quelles limites ?

cènes, nous les connaissons bien », précise Camille Assouline, qui cite en tête le mécène musical de la Société Générale­, la Fondation Carasso et la Fondation­SNCF, avec qui les professionnels du mécénat entretiennent des relations de proximité. Des process qui se structurent L’existence d’une charte éthique est de plus en plus demandée par les mécènes. « La fondation d’entreprise a professionnalisé le mécénat, poursuit Camille Assouline. Les process se sont structurés, l’avantage étant que l’on sait où l’on va. Les entreprises sans fondation ont le souci de l’éthique, également, et soutiennent des projets dans des secteurs plus variés » Certains­ mécènes arrivent avec leur propre charte éthique. Guillaume de la Broise, directeur du Développement et du Mécénat de la Cité de l’architecture est désormais directeur de la Commu­ni­ca­tion chez

Bouygues immobilier. En changeant de poste, il a également changé de culture et d’environnement professionnel : « L’éthique est au cœur des préoccupations de Bouygues Immobilier, assure-t-il. La plupart des partenaires et entreprises avec lesquels nous travaillons ont aussi une charte éthique, mais la nôtre est d’autant plus élevée que nous appartenons à un groupe coté, Bouygues ! Chaque nouveau collaborateur signe une charte dont les principes sont rappelés lors d’opérations de sensibilisation et de communication interne… » Ils incluent­devoir de réserve, devoir de confidentialité, égalité de traitement vis-à-vis de partenaires et de prestataires. Ils exigent de ne pas favoriser telle entreprise, de ne pas accepter de cadeau ou d’élément pouvant influencer un partenariat, et impliquent de bien différencier mécénat et sponsoring… I. M.

Nous pourrions faire une belle annonce pour nous présenter, mais le mieux reste de se rencontrer ;)

Emilie Locqueville - 06 78 34 87 50 emilie.locqueville@donicite.fr Mathieu Perche - 07 70 15 89 59 mathieu.perche@donicite.fr

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#DOSSIER

Jadis marginale, la ressource legs est de plus en plus privilégiée par les associations et fondations, qui y voient un relais de croissance face à la stagnation des dons. Encore faut-il avoir les coudées franches pour investir en ressources humaines, car la collecte des legs nécessite du temps et une grande disponibilité.

1 milliard

© SQ_Studio

d’euros collectés chaque année en France au titre du legs. Ce montant pourrait doubler dans les années à venir.

LEGS

UNE RESSOURCE QUI N’A PAS DIT SON DERNIER MOT

LA CRISE ÉCONOMIQUE, LE VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION… DÉSESPÉRANT ? DEMANDEZ À UN FUND­ RAISER CHARGÉ DES LEGS : IL Y VERRA AUTANT D’OPPORTUNITÉS À SAISIR. «  Le contexte économique anxiogène n’incite pas certains donateurs à consentir des dons de leur vivant, mais à s’intéresser davantage aux legs », pointe Kristiaan Tokka, directeur Legs, Donations et Assurance-vie à la Fondation d’Auteuil. « Aujourd’hui, les babyboomers atteignent 70 ans ; la pyramide des âges est intéressante pour nous », ajoute Hélène Bongrain-Meng, ex-directrice du Développement à l’Institut Curie, aujourd’hui consultante. « On est dans une véritable dynamique de croissance, il ne faut pas hésiter à investir », conseille Pierre Bocquiny, PDG de l’agence Maxyma, qui estime que, dans les années à venir, le milliard d’euros collecté chaque année en France au titre du legs pourrait doubler. Et pour ceux qui s’inquiéteraient d’aborder une question taboue avec leurs donateurs, Kristiaan Tokka est formel : « Au contraire ! Évoquer la question du devenir de

leurs biens leur procure du soulagement : quand on est âgé, ne pas savoir ce qui sera fait de ses biens après sa mort est une réelle source d’inquiétude ».

Contre les idées reçues A priori, il n’y a aucune raison de ne pas lancer une stratégie legs : un contexte favorable, un public potentiel qui croît, et qui, en théorie, est tout ouïe. « Depuis une dizaine d’années, le secteur travaille beaucoup pour aborder ce sujet délicat. Aujourd’hui, il est nettement plus facile d’en parler », témoigne Kristiaan Tokka. « Les fundraisers sont bien plus à l’aise avec ce sujet : ils ont réussi à créer un flux et non plus seulement des legs sporadiques », abonde Hélène Bongrain-Meng. Mieux : contrairement aux idées reçues, on n’attend en général pas si longtemps que cela pour récolter les fruits d’une bonne stratégie : « On voit des résultats dans les trois à cinq ans, et non pas dans les cinq à dix ans, comme on l’entend trop souvent », indique la consultante.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 15


#DOSSIER

Jadis marginale, la ressource legs est de plus en plus privilégiée par les associations et fondations, qui y voient un relais de croissance face à la stagnation des dons. Encore faut-il avoir les coudées franches pour investir en ressources humaines, car la collecte des legs nécessite du temps et une grande disponibilité.

1 milliard

© SQ_Studio

d’euros collectés chaque année en France au titre du legs. Ce montant pourrait doubler dans les années à venir.

LEGS

UNE RESSOURCE QUI N’A PAS DIT SON DERNIER MOT

LA CRISE ÉCONOMIQUE, LE VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION… DÉSESPÉRANT ? DEMANDEZ À UN FUND­ RAISER CHARGÉ DES LEGS : IL Y VERRA AUTANT D’OPPORTUNITÉS À SAISIR. «  Le contexte économique anxiogène n’incite pas certains donateurs à consentir des dons de leur vivant, mais à s’intéresser davantage aux legs », pointe Kristiaan Tokka, directeur Legs, Donations et Assurance-vie à la Fondation d’Auteuil. « Aujourd’hui, les babyboomers atteignent 70 ans ; la pyramide des âges est intéressante pour nous », ajoute Hélène Bongrain-Meng, ex-directrice du Développement à l’Institut Curie, aujourd’hui consultante. « On est dans une véritable dynamique de croissance, il ne faut pas hésiter à investir », conseille Pierre Bocquiny, PDG de l’agence Maxyma, qui estime que, dans les années à venir, le milliard d’euros collecté chaque année en France au titre du legs pourrait doubler. Et pour ceux qui s’inquiéteraient d’aborder une question taboue avec leurs donateurs, Kristiaan Tokka est formel : « Au contraire ! Évoquer la question du devenir de

leurs biens leur procure du soulagement : quand on est âgé, ne pas savoir ce qui sera fait de ses biens après sa mort est une réelle source d’inquiétude ».

Contre les idées reçues A priori, il n’y a aucune raison de ne pas lancer une stratégie legs : un contexte favorable, un public potentiel qui croît, et qui, en théorie, est tout ouïe. « Depuis une dizaine d’années, le secteur travaille beaucoup pour aborder ce sujet délicat. Aujourd’hui, il est nettement plus facile d’en parler », témoigne Kristiaan Tokka. « Les fundraisers sont bien plus à l’aise avec ce sujet : ils ont réussi à créer un flux et non plus seulement des legs sporadiques », abonde Hélène Bongrain-Meng. Mieux : contrairement aux idées reçues, on n’attend en général pas si longtemps que cela pour récolter les fruits d’une bonne stratégie : « On voit des résultats dans les trois à cinq ans, et non pas dans les cinq à dix ans, comme on l’entend trop souvent », indique la consultante.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 15


Le terrain des legs reste néanmoins labouré de manière insuffisante. Certes, les grandes fondations, comme Pasteur­(qui collecte plus ou moins 50 millions d’euros de legs par an sur les 85 millions d’euros que représente sa collecte globale) ou Auteuil (qui collecte 80 millions d’euros de legs par an – soit presque le triple de ses dons !), et les associations les plus anciennes se taillent pour l’instant la plus grosse part. Aux Petits frères des Pauvres, l’une des premières associations à avoir mis en place un service de relations testateurs, la collecte des legs a dépassé en 2016 celle des dons (29 millions d’euros de legs collectés en 2016 contre 27 millions de dons). « Il faut dire que nous sommes aussi l’une des associations à avoir porté dans le débat public la question de la place des personnes âgées dans la société », souligne Géraldine Delavenne, responsable des Relations testateurs.

Côté petites et moyennes associations, même si le marché commence à être assez concurrentiel, on est très loin du compte. Pas étonnant, pour Hélène Bongrain-Meng : « En général, les fundraisers sont plutôt jeunes, alors forcément, mettre en place une stratégie internet leur semble plus naturel que de tra­ vailler sur le legs ».

Communication : à bas les pudeurs de gazelle ! Reste que conduire une stratégie legs efficace n’est pas donné à tout le monde. Premier­challenge : trouver la « perle ». Sachant que non seulement le profil des « plus de 80 ans sans enfants » ne court pas les rues et que les testateurs sont loin d’être tous des donateurs, il y a de bonnes chances que le testateur ne soit pas dans votre base. Non, l’histoire du testament oublié dans une table de nuit et qui porte le nom de votre organisation n’est pas qu’un mythe ! Pour corser le tout, il y a aussi la situation où le donateur fidèle arrête brutalement de donner parce qu’il vient de vous inscrire sur son tes­tament… Mais comment le savoir ? Bref, c’est peu dire que le public des legs est difficile à prospecter. D’où la nécessité de communiquer très largement et dans les grands médias si on en a l’occasion. En tout cas, dans les supports de communication de l’association, « Il faut parler des legs en pointillé partout », conseille Hélène Bongrain-Meng. A minima de la communication deux fois par an dans le journal des donateurs, sur son site internet – car les seniors sont souvent aussi des geeks ! –, et évidemment, sur des brochures ad hoc. « Encore un grand nombre de personnes ignorent qu’elles peuvent faire un legs ou attribuer une assurance-vie à une association ou à une fondation », souligne Kristiaan Tokka. « L’idée, c’est de rapprocher la personne

« Le legs, c’est l’aboutissement de toute une vie, c’est un acte moins spontané que le don car il demande parfois beaucoup de réflexion. »

HEC à la pointe

La business school a été la première école française à recruter, en 2013, une personne dédiée à la gestion des legs et autres donations. « Quand je suis arrivée, raconte Marianne Duval, une ancienne de l’Unicef désormais responsable des Legs et des Libéralités à la Fondation HEC, j’ai envoyé la vieille brochure qu’on avait sur les legs à quatre cents donateurs en leur demandant des retours sur la manière dont on pourrait l’améliorer. C’était aussi une façon de les inciter à la lire ». Petit à petit, HEC se met à communiquer un peu partout : mailings envoyés aux anciens, organisation de conférences sur la philanthropie et les successions, prises de contact lors du congrès des notaires… Informer, régulièrement, mais sans faire de forcing, pour faire savoir, par exemple, que pour une personne sans enfants, si la Fondation HEC est légataire

de l’idée de léguer », résume Pierre Bocquiny. Un scoring est recommandé pour les organisations avec une base de données d’au moins dix mille donateurs afin d’envoyer un mailing spécifique. « Je conseille de regarder finement les profils plutôt que de solliciter toute la base indistinctement », souligne Frédéric Grosjean, en charge des legs et du patrimoine immobilier à l’Institut Pasteur. Pour les plus à la page, les data peuvent faire des petits miracles. « On est en train de passer du CRM au XRM pour tracer et animer les parcours des donateurs, indique Pierre Bocquiny. Cet outillage va permettre de repérer très finement les attentes potentielles des donateurs et de proposer une communication personnalisée adaptée ».

Le défi du sur-mesure

Kristiaan Tokka, directeur Legs, Donations et Assurance-vie à la Fondation d’Auteuil.

Car évoquer la question du legs n’est pas la même chose que de demander un don. « Le legs, c’est l’aboutissement de toute une vie, c’est un acte évidemment moins spontané que le don car il demande parfois beaucoup de réflexion. Il faut donc, à la fois, ne pas tarder à se poser la question d’un legs et prendre le temps de bien le rédiger », insiste Kristiaan Tokka. Comment aborder la question délicate de la mort ? L’idée de transmission est une réponse. Souligner que la cause défendue (lutte contre la pauvreté, environnement, etc.) concernera les générations futures. Autant le fundraising doit s’adapter à un monde qui va de plus en plus vite, autant une communication sur les legs relève d’une logique inverse : parce qu’il consiste à laisser une trace – pour l’éternité ? –, ce don ultime a forcément à voir avec l’avenir, avec le temps long. Dès lors, « plus l’organisation est ancienne, plus elle est solide, et plus elle rassure », pointe Hélène Bongrain-Meng. Et ce n’est pas l’Institut Pasteur, qui fête ses 130 ans l’an prochain, qui dira le contraire : « L’idée,

universel, les neveux pourront toucher quand même 45 % de l’héritage quand la fondation prend en charge les droits de mutation. « Tout est lié, c’est pourquoi nous travaillons avec l’équipe de fundraising qui a acquis de nouveaux réflexes : par exemple, nous informer quand elle rencontre un donateur qui n’a pas d’enfants », développe Marianne Duval, qui pointe aussi l’importance de la fidélisation : « De nombreuses études montrent que la majorité des testateurs sont aussi des donateurs. Une stratégie du legs nécessite qu’on entretienne des relations durables et sincères avec les donateurs ». Un travail de fond qui a déjà porté ses fruits. En quatre ans, la Fondation HEC a vu le nombre de testateurs déclarés doubler, et le nombre de prospects legs tripler.

© DR

© SeventyFour

Aux Petits frères des Pauvres, la collecte des legs a dépassé en 2016 celle des dons.

© Besnard/Fondation d'Auteuil

#DOSSIER • LE LEGS

LEGS ET DONATIONS |

« Les testateurs cherchent la cohérence entre ce qui est dit et ce qui est fait. C’est ce qui établit leur confiance. » Géraldine Delavenne, responsable des Relations testateurs aux Petits frères des Pauvres.

c’est de rassurer, d’inscrire ce don ultime dans l’histoire », explique Frédéric Grosjean, qui reconnaît que « les institutions les plus anciennes tirent plus facilement leur épingle du jeu ». À Maxyma, Pierre Bocquiny plaide pour une communication dite de « troisième génération ». C’est qu’en trente ans, les motivations des testateurs ont beaucoup changé : « On est passé du legs “pour faire le bien” au legs “pour défendre une cause”, et aujourd’hui, on observe une troisième mutation : le legs personnel. Le testateur veut léguer d’abord pour devenir le héros de sa propre histoire ». Aux organisations d’inventer le storytelling ! Mais le plus important, dans une stratégie legs, c’est le sur-mesure. « Les testateurs potentiels, âgés, qui cherchent une association à laquelle léguer ne sont pas sensibles qu’au marketing ou à la communication. Très souvent, ils disent avoir été marqués par des actions de terrain qui mettent en lumière les valeurs affichées par Les Petits frères des Pauvres. Ils cherchent donc la cohérence entre ce qui est dit et ce qui est fait. C’est ce qui établit leur confiance », observe Géraldine Delavenne, qui a d’ailleurs pour particularité d’avoir à son actif un diplôme universitaire en… gérontologie. L’accompagnement du testateur sur le long et escarpé chemin du legs est indispensable. « Il est fréquent que des personnes nous contactent juste pour nous poser quelques questions pratiques et qu’on n’en entende plus jamais parler. Mais c’est aussi cela, notre rôle : écouter, répondre aux questions, sans jamais chercher à savoir ce qu’il en adviendra », poursuit Kristiaan Tokka. De l’écriture du testament au suivi rigoureux des dernières volontés du défunt, la voie est en effet semée d’embûches et d’une multitude de détails pratiques à régler.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 17


Le terrain des legs reste néanmoins labouré de manière insuffisante. Certes, les grandes fondations, comme Pasteur­(qui collecte plus ou moins 50 millions d’euros de legs par an sur les 85 millions d’euros que représente sa collecte globale) ou Auteuil (qui collecte 80 millions d’euros de legs par an – soit presque le triple de ses dons !), et les associations les plus anciennes se taillent pour l’instant la plus grosse part. Aux Petits frères des Pauvres, l’une des premières associations à avoir mis en place un service de relations testateurs, la collecte des legs a dépassé en 2016 celle des dons (29 millions d’euros de legs collectés en 2016 contre 27 millions de dons). « Il faut dire que nous sommes aussi l’une des associations à avoir porté dans le débat public la question de la place des personnes âgées dans la société », souligne Géraldine Delavenne, responsable des Relations testateurs.

Côté petites et moyennes associations, même si le marché commence à être assez concurrentiel, on est très loin du compte. Pas étonnant, pour Hélène Bongrain-Meng : « En général, les fundraisers sont plutôt jeunes, alors forcément, mettre en place une stratégie internet leur semble plus naturel que de tra­ vailler sur le legs ».

Communication : à bas les pudeurs de gazelle ! Reste que conduire une stratégie legs efficace n’est pas donné à tout le monde. Premier­challenge : trouver la « perle ». Sachant que non seulement le profil des « plus de 80 ans sans enfants » ne court pas les rues et que les testateurs sont loin d’être tous des donateurs, il y a de bonnes chances que le testateur ne soit pas dans votre base. Non, l’histoire du testament oublié dans une table de nuit et qui porte le nom de votre organisation n’est pas qu’un mythe ! Pour corser le tout, il y a aussi la situation où le donateur fidèle arrête brutalement de donner parce qu’il vient de vous inscrire sur son tes­tament… Mais comment le savoir ? Bref, c’est peu dire que le public des legs est difficile à prospecter. D’où la nécessité de communiquer très largement et dans les grands médias si on en a l’occasion. En tout cas, dans les supports de communication de l’association, « Il faut parler des legs en pointillé partout », conseille Hélène Bongrain-Meng. A minima de la communication deux fois par an dans le journal des donateurs, sur son site internet – car les seniors sont souvent aussi des geeks ! –, et évidemment, sur des brochures ad hoc. « Encore un grand nombre de personnes ignorent qu’elles peuvent faire un legs ou attribuer une assurance-vie à une association ou à une fondation », souligne Kristiaan Tokka. « L’idée, c’est de rapprocher la personne

« Le legs, c’est l’aboutissement de toute une vie, c’est un acte moins spontané que le don car il demande parfois beaucoup de réflexion. »

HEC à la pointe

La business school a été la première école française à recruter, en 2013, une personne dédiée à la gestion des legs et autres donations. « Quand je suis arrivée, raconte Marianne Duval, une ancienne de l’Unicef désormais responsable des Legs et des Libéralités à la Fondation HEC, j’ai envoyé la vieille brochure qu’on avait sur les legs à quatre cents donateurs en leur demandant des retours sur la manière dont on pourrait l’améliorer. C’était aussi une façon de les inciter à la lire ». Petit à petit, HEC se met à communiquer un peu partout : mailings envoyés aux anciens, organisation de conférences sur la philanthropie et les successions, prises de contact lors du congrès des notaires… Informer, régulièrement, mais sans faire de forcing, pour faire savoir, par exemple, que pour une personne sans enfants, si la Fondation HEC est légataire

de l’idée de léguer », résume Pierre Bocquiny. Un scoring est recommandé pour les organisations avec une base de données d’au moins dix mille donateurs afin d’envoyer un mailing spécifique. « Je conseille de regarder finement les profils plutôt que de solliciter toute la base indistinctement », souligne Frédéric Grosjean, en charge des legs et du patrimoine immobilier à l’Institut Pasteur. Pour les plus à la page, les data peuvent faire des petits miracles. « On est en train de passer du CRM au XRM pour tracer et animer les parcours des donateurs, indique Pierre Bocquiny. Cet outillage va permettre de repérer très finement les attentes potentielles des donateurs et de proposer une communication personnalisée adaptée ».

Le défi du sur-mesure

Kristiaan Tokka, directeur Legs, Donations et Assurance-vie à la Fondation d’Auteuil.

Car évoquer la question du legs n’est pas la même chose que de demander un don. « Le legs, c’est l’aboutissement de toute une vie, c’est un acte évidemment moins spontané que le don car il demande parfois beaucoup de réflexion. Il faut donc, à la fois, ne pas tarder à se poser la question d’un legs et prendre le temps de bien le rédiger », insiste Kristiaan Tokka. Comment aborder la question délicate de la mort ? L’idée de transmission est une réponse. Souligner que la cause défendue (lutte contre la pauvreté, environnement, etc.) concernera les générations futures. Autant le fundraising doit s’adapter à un monde qui va de plus en plus vite, autant une communication sur les legs relève d’une logique inverse : parce qu’il consiste à laisser une trace – pour l’éternité ? –, ce don ultime a forcément à voir avec l’avenir, avec le temps long. Dès lors, « plus l’organisation est ancienne, plus elle est solide, et plus elle rassure », pointe Hélène Bongrain-Meng. Et ce n’est pas l’Institut Pasteur, qui fête ses 130 ans l’an prochain, qui dira le contraire : « L’idée,

universel, les neveux pourront toucher quand même 45 % de l’héritage quand la fondation prend en charge les droits de mutation. « Tout est lié, c’est pourquoi nous travaillons avec l’équipe de fundraising qui a acquis de nouveaux réflexes : par exemple, nous informer quand elle rencontre un donateur qui n’a pas d’enfants », développe Marianne Duval, qui pointe aussi l’importance de la fidélisation : « De nombreuses études montrent que la majorité des testateurs sont aussi des donateurs. Une stratégie du legs nécessite qu’on entretienne des relations durables et sincères avec les donateurs ». Un travail de fond qui a déjà porté ses fruits. En quatre ans, la Fondation HEC a vu le nombre de testateurs déclarés doubler, et le nombre de prospects legs tripler.

© DR

© SeventyFour

Aux Petits frères des Pauvres, la collecte des legs a dépassé en 2016 celle des dons.

© Besnard/Fondation d'Auteuil

#DOSSIER • LE LEGS

LEGS ET DONATIONS |

« Les testateurs cherchent la cohérence entre ce qui est dit et ce qui est fait. C’est ce qui établit leur confiance. » Géraldine Delavenne, responsable des Relations testateurs aux Petits frères des Pauvres.

c’est de rassurer, d’inscrire ce don ultime dans l’histoire », explique Frédéric Grosjean, qui reconnaît que « les institutions les plus anciennes tirent plus facilement leur épingle du jeu ». À Maxyma, Pierre Bocquiny plaide pour une communication dite de « troisième génération ». C’est qu’en trente ans, les motivations des testateurs ont beaucoup changé : « On est passé du legs “pour faire le bien” au legs “pour défendre une cause”, et aujourd’hui, on observe une troisième mutation : le legs personnel. Le testateur veut léguer d’abord pour devenir le héros de sa propre histoire ». Aux organisations d’inventer le storytelling ! Mais le plus important, dans une stratégie legs, c’est le sur-mesure. « Les testateurs potentiels, âgés, qui cherchent une association à laquelle léguer ne sont pas sensibles qu’au marketing ou à la communication. Très souvent, ils disent avoir été marqués par des actions de terrain qui mettent en lumière les valeurs affichées par Les Petits frères des Pauvres. Ils cherchent donc la cohérence entre ce qui est dit et ce qui est fait. C’est ce qui établit leur confiance », observe Géraldine Delavenne, qui a d’ailleurs pour particularité d’avoir à son actif un diplôme universitaire en… gérontologie. L’accompagnement du testateur sur le long et escarpé chemin du legs est indispensable. « Il est fréquent que des personnes nous contactent juste pour nous poser quelques questions pratiques et qu’on n’en entende plus jamais parler. Mais c’est aussi cela, notre rôle : écouter, répondre aux questions, sans jamais chercher à savoir ce qu’il en adviendra », poursuit Kristiaan Tokka. De l’écriture du testament au suivi rigoureux des dernières volontés du défunt, la voie est en effet semée d’embûches et d’une multitude de détails pratiques à régler.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 17


#DOSSIER • LE LEGS

« Une magnifique aventure humaine intergénérationnelle », dixit Kristiaan Tokka. Qui peut rapidement se révéler un enfer si on est mal préparé.

La fameuse question de l’organigramme… D’où l’investissement nécessaire en ressources humaines. Le sujet de la rédaction des testaments et de la gestion des patrimoines légués ou donnés est, dans certains cas, suffisamment complexe pour que la Fondation d’Auteuil se soit dotée d’une direction dédiée aux libéralités qui dispose de dix-huit collaborateurs. On trouve dans cette direction des juristes, mais aussi des consultantes sociales qui entretiennent les liens (épistolaires, téléphoniques ou par le biais de visites)

TESTATEURS | Le site de l’Orchestre de Paris constitue l’un des outils privilégiés pour recruter les testateurs.

avec les personnes. L’équipe peut aussi compter sur un petit réseau de responsables locaux pour rendre des visites ou entretenir des relations de proximité. À l’Institut Pasteur, en plus des trois juristes qui règlent les successions, deux personnes au profil de « fundraiser » sont en permanence en charge des relations testateurs pour les renseigner : « On travaille en étroite collaboration avec le service des dons et de la communication et on doit parler d’une seule voix », souligne Frédéric Grosjean. Aux Petits frères des Pauvres, le service des Relations testateurs est composé de cinq personnes et de deux bénévoles entièrement dédiés à la relation avec les personnes ayant décidé de faire un legs. Il est complété d’un service juridique de sept personnes qui traitent les successions avec les notaires. Quant à l’organigramme, il n’y a pas de mauvais choix. Quand Auteuil a choisi une direction dédiée, l’Institut Curie, autre mastodonte du secteur, a choisi de l’intégrer à 100 %. « Je considère que le legs fait partie de la stratégie globale de fundraising, que c’est du marketing relationnel sur un segment particulier », juge Hélène Bongrain-Meng. À Curie, une personne a été nommée à temps partiel u­ni­ quement pour entretenir la relation avec les futurs testateurs : « Il faut quelqu’un d’empathique, ajoute la fundraiser, à l’aise avec les personnes âgées et appréciant de nouer des liens avec elles, mais capable de faire face à l’épreuve que peut représenter leur disparition ». La vie, la mort, le don comme trait d’union. P. G.

L’Orchestre de Paris fait vibrer la corde

historique Saviez-vous que l’Orchestre de Paris avait reçu un legs célèbre ? Celui de Berlioz, qui, à sa mort, a décidé de lui donner ses partitions. Ce n’est donc pas un hasard si la structure s’empare aujourd’hui du sujet. Il faut dire qu’avec un public à 50 ans de moyenne d’âge, fortuné, mais aussi très fidèle, l’Orchestre a quelques atouts. Tout commence en 2011, à une conférence de… l’AFF à laquelle participe Nathalie Coulon, aujourd’hui chef du service Mécénat : « À l’époque, le secteur culturel n’était pas du tout outillé. Alors, j’ai demandé à une agence de nous accompagner. Nous avons fait former certaines personnes de l’équipe, édité une brochure, et puis il y a eu la question de la structure juridique : en tant qu’association, nous n’étions pas exonéré de droits de mutation. C’est pour cela que nous avons créé un fonds de dotation ». Un travail long

(trois années pour changer les statuts et faire mûrir l’idée en interne, aidé notamment par un notaire, membre du CA), qui débouche sur des outils très concrets : « Nous avons axé notre communication sur l’attachement au patrimoine, qui est réel dans le monde de la culture française, souligne Sandrine Braga Alves, la responsable Legs. En tant que premier orchestre de France, nous bénéficions d’une profondeur historique qui nous permet de communiquer sur la solidité et la pérennité de notre projet, ce qui est très important pour les testateurs ». Sur le site internet, sur les programmes, lors des rendez-vous avec les grands donateurs, la graine du legs est semée : « Pour l’instant, on est davantage dans le faire-savoir », souligne Nathalie Coulon, qui sait qu’en fundraising, l’audace paie toujours à la fin.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 19


#DOSSIER • LE LEGS

« Une magnifique aventure humaine intergénérationnelle », dixit Kristiaan Tokka. Qui peut rapidement se révéler un enfer si on est mal préparé.

La fameuse question de l’organigramme… D’où l’investissement nécessaire en ressources humaines. Le sujet de la rédaction des testaments et de la gestion des patrimoines légués ou donnés est, dans certains cas, suffisamment complexe pour que la Fondation d’Auteuil se soit dotée d’une direction dédiée aux libéralités qui dispose de dix-huit collaborateurs. On trouve dans cette direction des juristes, mais aussi des consultantes sociales qui entretiennent les liens (épistolaires, téléphoniques ou par le biais de visites)

TESTATEURS | Le site de l’Orchestre de Paris constitue l’un des outils privilégiés pour recruter les testateurs.

avec les personnes. L’équipe peut aussi compter sur un petit réseau de responsables locaux pour rendre des visites ou entretenir des relations de proximité. À l’Institut Pasteur, en plus des trois juristes qui règlent les successions, deux personnes au profil de « fundraiser » sont en permanence en charge des relations testateurs pour les renseigner : « On travaille en étroite collaboration avec le service des dons et de la communication et on doit parler d’une seule voix », souligne Frédéric Grosjean. Aux Petits frères des Pauvres, le service des Relations testateurs est composé de cinq personnes et de deux bénévoles entièrement dédiés à la relation avec les personnes ayant décidé de faire un legs. Il est complété d’un service juridique de sept personnes qui traitent les successions avec les notaires. Quant à l’organigramme, il n’y a pas de mauvais choix. Quand Auteuil a choisi une direction dédiée, l’Institut Curie, autre mastodonte du secteur, a choisi de l’intégrer à 100 %. « Je considère que le legs fait partie de la stratégie globale de fundraising, que c’est du marketing relationnel sur un segment particulier », juge Hélène Bongrain-Meng. À Curie, une personne a été nommée à temps partiel u­ni­ quement pour entretenir la relation avec les futurs testateurs : « Il faut quelqu’un d’empathique, ajoute la fundraiser, à l’aise avec les personnes âgées et appréciant de nouer des liens avec elles, mais capable de faire face à l’épreuve que peut représenter leur disparition ». La vie, la mort, le don comme trait d’union. P. G.

L’Orchestre de Paris fait vibrer la corde

historique Saviez-vous que l’Orchestre de Paris avait reçu un legs célèbre ? Celui de Berlioz, qui, à sa mort, a décidé de lui donner ses partitions. Ce n’est donc pas un hasard si la structure s’empare aujourd’hui du sujet. Il faut dire qu’avec un public à 50 ans de moyenne d’âge, fortuné, mais aussi très fidèle, l’Orchestre a quelques atouts. Tout commence en 2011, à une conférence de… l’AFF à laquelle participe Nathalie Coulon, aujourd’hui chef du service Mécénat : « À l’époque, le secteur culturel n’était pas du tout outillé. Alors, j’ai demandé à une agence de nous accompagner. Nous avons fait former certaines personnes de l’équipe, édité une brochure, et puis il y a eu la question de la structure juridique : en tant qu’association, nous n’étions pas exonéré de droits de mutation. C’est pour cela que nous avons créé un fonds de dotation ». Un travail long

(trois années pour changer les statuts et faire mûrir l’idée en interne, aidé notamment par un notaire, membre du CA), qui débouche sur des outils très concrets : « Nous avons axé notre communication sur l’attachement au patrimoine, qui est réel dans le monde de la culture française, souligne Sandrine Braga Alves, la responsable Legs. En tant que premier orchestre de France, nous bénéficions d’une profondeur historique qui nous permet de communiquer sur la solidité et la pérennité de notre projet, ce qui est très important pour les testateurs ». Sur le site internet, sur les programmes, lors des rendez-vous avec les grands donateurs, la graine du legs est semée : « Pour l’instant, on est davantage dans le faire-savoir », souligne Nathalie Coulon, qui sait qu’en fundraising, l’audace paie toujours à la fin.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 19


FUNDRAISING 10.0 ? Et si on réussissait un fundraising avec tous les atouts cumulés des différents types de marketing de ces cinquante dernières années ?

Q

u’on le veuille ou non, le fundraising est une affaire éminemment marketing. Aussi est-il bon, de temps à autre, d’observer les évolutions de ce secteur. Et ça tombe bien car Philip Kotler, l’un des papes du marketing, toujours dans les bons coups de l’émergence des grandes tendances consuméristes, a sorti récemment un nouvel ouvrage qui défend l’idée de l’avènement du marketing 4.0 (1). Une nouvelle évolution du marketing qui, au-delà de son aspect « effet de mode », met en lumière une tendance forte qui mérite d’être portée aux yeux de toutes celles et tous ceux qui souhaitent apporter une vision stratégique à leur fundraising.

1.0 + 2.0 + 3.0 + 4.0 = le fundraising 10.0 Ce rapide survol des évolutions du marketing montre bien à quel point nous devons être en permanence à l’écoute du monde et des consommateurs et donateurs pour faire évoluer nos pratiques. C’est particulièrement vrai avec la profonde transformation digitale en cours et qui nous oblige à remettre en question nos pratiques de communication et de fundraising. Mais il serait vain de croire, comme certains voudraient bien nous pouser à le faire, que notre futur ne réside que dans l’adoption des nouvelles formes de fundraising.

Petit survol historique des différentes évolutions du marketing (2)

En fait, au regard de l’évolution du marketing à travers le temps, on se rend compte que chaque nouvelle génération ne remplace pas l’ancienne, mais la complète. Les pratiques se nourrissent les unes des autres. Ce que résume très bien sur son blog le spécialiste des médias sociaux et du marketing digital Frédéric Cavazza (4) : plutôt qu’une dynamique de substitution, nous constatons au quotidien que tout se cumule… les pratiques de marketing 1.0, 2.0, 3.0 ou 4.0 ne sont pas meilleures que les autres si elles sont prises individuellement : elles se complètent. Il faut ainsi envisager une approche totale du marketing où toutes ces pratiques seraient mises en œuvre dans un souci de cohérence et d’intégration. Ce que Frédéric Cavazza nomme avec un zeste de provocation le « marketing 10.0 ». Le grand défi du fundraiser stratégique va donc être d’arriver à intégrer l’ensemble des évolutions marketing passées, émergentes et à venir. Et ce, dans un contexte externe d’accélération de l’apparition de ces évolutions et, pour l’interne, d’organisations qui sont dans leur grande majorité peu agiles et incapables de se projeter dans une véritable réflexion stratégique.  Ph. D.

(1) Marketing 4.0, Le passage au digital, Philip Kotler, Hermawan Kartajaya, Iwan Setiawan, Marc Vandercammen, Éditions De Boeck Supérieur. (2) Ce paragraphe s’appuie sur la newsletter Le Hub, le média de la performance client « Êtes-vous 4.0 ? » – laposte.fr/lehub (3) http://sumption. org/oldsite/obit.html et http://sofii.org/ article/haroldsumption-the-shypioneer. (4) Frédéric Cavazza, Vers un marketing 10.0 ? https://fredcavazza. net/.

Vitamintez votre fundraising ! ➜ Chez Mint,

nous nous appuyons sur un réseau de spécialistes indépendants.

❱❱ Pour nous rejoindre* en tant que partenaire ou client : Christophe Herlédan • 06 08 30 80 14 • cherledan@mint.fr

Agence conseil en fundraising

www.mint.fr

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 21

* déguisement non fourn

relaient les messages. C’est l’émergence d’un marketing plus interactif (brand content, marketing viral) et de la personnalisation des offres de produits. Le marketing 3.0 est un marketing « postcrise 2007-2009 ». Il intègre une évolution des consommateurs : posséder n’est plus une priorité, notamment pour les plus jeunes générations qui privilégient l’usage et la jouissance à court terme. C’est un marketing centré sur l’humain et le partage des valeurs qui trouvent un écho fort chez les consommateurs (consommation collaborative made in France, bio, circuits courts, recyclage, veganisme…). Le marketing 3.0 introduit la notion de « consom’acteur » :

Être à l’écoute et prendre plaisir à travailler ensemble : c’est notre marque de fabrique.

© istockphoto

— Au regard de l’évolution du marketing, chaque nouvelle génération ne remplace pas l’ancienne, mais la complète. —

pour répondre à l’ensemble des questions posées par nos chers clients associatifs,

© istockphoto

Le marketing 1.0 a été inventé au États-Unis dans les années 1960’s [date à laquelle émerge également le concept moderne de fundraising avec la figure emblématique d’Harold Sumption (3)]. C’est le marketing « traditionnel » par excellence : le produit doit apporter une valeur fonctionnelle qui répond à un besoin client préalablement identifié. Ce marketing, dont les médias historiques sont la radio, la presse écrite et la télévision, s’est propagé un peu partout dans le monde dans les décennies qui ont suivi. Il a donné lieu à de nombreux concepts dérivés. Le marketing 2.0 signe l’entrée des marques dans une nécessaire conversation avec leurs clients. Il émerge au début des années 2000 avec le développement du web 2.0, un web interactif où chacun peut s’exprimer et partager. Avec la montée en puissance des blogs, des forums, et des plateformes « sociales », les consommateurs commencent à reprendre du pouvoir sur les marques. Internet leur donne les moyens de comparer les prix et de faire connaître leur avis sur les produits et services. Le discours des marques ne peut plus être unilatéral, mais il doit s’inscrire dans un dialogue avec les clients. L’objectif devient de générer l’engagement des clients, et d’en faire des ambassadeurs qui

© THINKSTOCK ET 21X29,7

#INNOVATION • OUT OF THE BOX

VERS LE

l’acte d’achat devient citoyen et le consommateur n’est plus seulement un acheteur mais un être humain global en quête de sens. Et nous voici donc aujourd’hui à l’orée de ce qui pourrait bien être l’ère du marketing 4.0, celui de l’exploitation des données. Philip Kotler, professeur de stratégie marketing, le présente comme un approfondissement du marketing 3.0 dopé au digital, au mobile et à la connexion permanente. Un marketing centré sur la donnée, le big data, qui intègre les profonds bouleversements que sont en train d’apporter l’intelligence artificielle, les algorithmes prédictifs, le machine learning ou les objets connectés dans la connaissance du comportement et des attentes de chaque consommateur.


FUNDRAISING 10.0 ? Et si on réussissait un fundraising avec tous les atouts cumulés des différents types de marketing de ces cinquante dernières années ?

Q

u’on le veuille ou non, le fundraising est une affaire éminemment marketing. Aussi est-il bon, de temps à autre, d’observer les évolutions de ce secteur. Et ça tombe bien car Philip Kotler, l’un des papes du marketing, toujours dans les bons coups de l’émergence des grandes tendances consuméristes, a sorti récemment un nouvel ouvrage qui défend l’idée de l’avènement du marketing 4.0 (1). Une nouvelle évolution du marketing qui, au-delà de son aspect « effet de mode », met en lumière une tendance forte qui mérite d’être portée aux yeux de toutes celles et tous ceux qui souhaitent apporter une vision stratégique à leur fundraising.

1.0 + 2.0 + 3.0 + 4.0 = le fundraising 10.0 Ce rapide survol des évolutions du marketing montre bien à quel point nous devons être en permanence à l’écoute du monde et des consommateurs et donateurs pour faire évoluer nos pratiques. C’est particulièrement vrai avec la profonde transformation digitale en cours et qui nous oblige à remettre en question nos pratiques de communication et de fundraising. Mais il serait vain de croire, comme certains voudraient bien nous pouser à le faire, que notre futur ne réside que dans l’adoption des nouvelles formes de fundraising.

Petit survol historique des différentes évolutions du marketing (2)

En fait, au regard de l’évolution du marketing à travers le temps, on se rend compte que chaque nouvelle génération ne remplace pas l’ancienne, mais la complète. Les pratiques se nourrissent les unes des autres. Ce que résume très bien sur son blog le spécialiste des médias sociaux et du marketing digital Frédéric Cavazza (4) : plutôt qu’une dynamique de substitution, nous constatons au quotidien que tout se cumule… les pratiques de marketing 1.0, 2.0, 3.0 ou 4.0 ne sont pas meilleures que les autres si elles sont prises individuellement : elles se complètent. Il faut ainsi envisager une approche totale du marketing où toutes ces pratiques seraient mises en œuvre dans un souci de cohérence et d’intégration. Ce que Frédéric Cavazza nomme avec un zeste de provocation le « marketing 10.0 ». Le grand défi du fundraiser stratégique va donc être d’arriver à intégrer l’ensemble des évolutions marketing passées, émergentes et à venir. Et ce, dans un contexte externe d’accélération de l’apparition de ces évolutions et, pour l’interne, d’organisations qui sont dans leur grande majorité peu agiles et incapables de se projeter dans une véritable réflexion stratégique.  Ph. D.

(1) Marketing 4.0, Le passage au digital, Philip Kotler, Hermawan Kartajaya, Iwan Setiawan, Marc Vandercammen, Éditions De Boeck Supérieur. (2) Ce paragraphe s’appuie sur la newsletter Le Hub, le média de la performance client « Êtes-vous 4.0 ? » – laposte.fr/lehub (3) http://sumption. org/oldsite/obit.html et http://sofii.org/ article/haroldsumption-the-shypioneer. (4) Frédéric Cavazza, Vers un marketing 10.0 ? https://fredcavazza. net/.

Vitamintez votre fundraising ! ➜ Chez Mint,

nous nous appuyons sur un réseau de spécialistes indépendants.

❱❱ Pour nous rejoindre* en tant que partenaire ou client : Christophe Herlédan • 06 08 30 80 14 • cherledan@mint.fr

Agence conseil en fundraising

www.mint.fr

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 21

* déguisement non fourn

relaient les messages. C’est l’émergence d’un marketing plus interactif (brand content, marketing viral) et de la personnalisation des offres de produits. Le marketing 3.0 est un marketing « postcrise 2007-2009 ». Il intègre une évolution des consommateurs : posséder n’est plus une priorité, notamment pour les plus jeunes générations qui privilégient l’usage et la jouissance à court terme. C’est un marketing centré sur l’humain et le partage des valeurs qui trouvent un écho fort chez les consommateurs (consommation collaborative made in France, bio, circuits courts, recyclage, veganisme…). Le marketing 3.0 introduit la notion de « consom’acteur » :

Être à l’écoute et prendre plaisir à travailler ensemble : c’est notre marque de fabrique.

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— Au regard de l’évolution du marketing, chaque nouvelle génération ne remplace pas l’ancienne, mais la complète. —

pour répondre à l’ensemble des questions posées par nos chers clients associatifs,

© istockphoto

Le marketing 1.0 a été inventé au États-Unis dans les années 1960’s [date à laquelle émerge également le concept moderne de fundraising avec la figure emblématique d’Harold Sumption (3)]. C’est le marketing « traditionnel » par excellence : le produit doit apporter une valeur fonctionnelle qui répond à un besoin client préalablement identifié. Ce marketing, dont les médias historiques sont la radio, la presse écrite et la télévision, s’est propagé un peu partout dans le monde dans les décennies qui ont suivi. Il a donné lieu à de nombreux concepts dérivés. Le marketing 2.0 signe l’entrée des marques dans une nécessaire conversation avec leurs clients. Il émerge au début des années 2000 avec le développement du web 2.0, un web interactif où chacun peut s’exprimer et partager. Avec la montée en puissance des blogs, des forums, et des plateformes « sociales », les consommateurs commencent à reprendre du pouvoir sur les marques. Internet leur donne les moyens de comparer les prix et de faire connaître leur avis sur les produits et services. Le discours des marques ne peut plus être unilatéral, mais il doit s’inscrire dans un dialogue avec les clients. L’objectif devient de générer l’engagement des clients, et d’en faire des ambassadeurs qui

© THINKSTOCK ET 21X29,7

#INNOVATION • OUT OF THE BOX

VERS LE

l’acte d’achat devient citoyen et le consommateur n’est plus seulement un acheteur mais un être humain global en quête de sens. Et nous voici donc aujourd’hui à l’orée de ce qui pourrait bien être l’ère du marketing 4.0, celui de l’exploitation des données. Philip Kotler, professeur de stratégie marketing, le présente comme un approfondissement du marketing 3.0 dopé au digital, au mobile et à la connexion permanente. Un marketing centré sur la donnée, le big data, qui intègre les profonds bouleversements que sont en train d’apporter l’intelligence artificielle, les algorithmes prédictifs, le machine learning ou les objets connectés dans la connaissance du comportement et des attentes de chaque consommateur.


© maselkoo99

#INNOVATION • CÔTÉ RECHERCHES

Téléphone, SMS et face-to-face . Une sollicitation non adaptée peut être fatale à votre relation donateurs. Un chercheur a mené l’enquête pour en savoir plus.

Des techniques trop intrusives pour les donateurs ? En 2017, Fayrouz Akrim a soutenu sa thèse de doctorat sur l’intrusion perçue des sollicitations de don d’argent par les associations. Ses recherches se sont appuyées sur une question posée par Recherches et Solidarités en 2015 à des donateurs sur leurs préférences en termes d’outils de sollicitation au don. Les résultats étaient sans appel  : 49  % des répondants déclaraient préférer ne pas être sollicités et donner spontanément (voir graphique, page de droite). Un sentiment d’intrusion Si la pratique des fundraisers montre que l’absence de sollicitation est assez inefficace pour créer du don, ces résultats posent tout de même la question de l’utilisation du téléphone et du SMS (1 % des préférences des donateurs). Fayrouz Akrim a donc choisi de se consacrer à l’étude de ces sollicitations, minoritaires mais bien effectives, en se demandant : – quelles sont les sollicitations au don perçues­ comme les plus intrusives par les donateurs ? – quel est le profil des donateurs qui perçoivent ces sollicitations comme des intrusions et qui résistent au don ?

Pour y répondre, deux études ont été réalisées. Une première, qualitative, a été menée auprès de dix-huit donateurs divers en termes d’âges et de statuts (anciens donateurs, occasionnels ou réguliers). Les résultats montrent que seules quatre personnes évoquent spontanément l’intrusion vécue par les demandes de don. Les autres en parlent lorsqu’on leur pose directement la question : huit évoquent notamment les « appels téléphoniques » et « le démarchage à domicile » comme étant les techniques les plus intrusives, et six évoquent le face-to-face. Les personnes se sentent d’autant plus agressées que la demande est formulée par un individu. Toutes les personnes interrogées préfèrent prendre leur décision « à tête reposée », face à un courrier, sans sentiment d’intrusion. Typologie des réactions Une deuxième étude, quantitative, réalisée sur six cent vingt-sept donateurs et « non donateurs » représentatifs de la population française, conduit à la conclusion que plus les individus perçoivent une intrusion dans leur vie privée, plus ils entrent en état de résistance face au don, et plus ils évitent la

sollicitation (en ne décrochant pas le téléphone après avoir reconnu le numéro, ou en changeant de trottoir) et/ou s’opposent à celle-ci (en disant « non » à l’enquêteur de rue ou téléphonique). Les méthodes « intrusives » seraient donc à proscrire pour susciter le don. Cependant, une analyse plus fine des résultats montre que trois groupes coexistent. – Les « compréhensifs » (22 % de l’échantillon, 158 euros en moyenne de don annuel) : ils ne se sentent pas vraiment agressés par ces techniques et perçoivent peu l’intrusion. Ils ne cherchent donc pas à éviter la sollicitation ni à s’y opposer. Ils ont par ailleurs une grande confiance dans les associations. En termes sociodémographiques, ce groupe est très divers. – Les « indépendants » (19 %, 215 euros de don annuel) : ils ont une grande confiance en eux et prennent leur décision en dehors des sollicitations. Ils se sentent agressés par les techniques de collecte comme le téléphone et n’hésitent pas à s’opposer au téléenquêteur. Ce groupe rassemble de nombreux jeunes seniors (50 – 59 ans). – Les « résistants » (58 %, 81 euros de don annuel) : ce segment très résistant aux sollicitations au don est celui qui donne le moins. Les foyers ayant les revenus les plus élevés sont surreprésentés dans ce segment. Ce groupe peut à la fois s’opposer au demandeur et adopter une stratégie d’évitement. Il a besoin d’être rassuré

sur la bonne utilisation des fonds et favorise les associations labellisées « Don en confiance » ; En conclusion, voici les recommandations adressées par l’auteur aux associations. – Travailler sur la communication quant à l’utilisation des fonds : par exemple, faire payer les frais de fonctionnement par les grands donateurs ou les entreprises mécènes, pour pouvoir communiquer sur du « 100 % va à la cause ». Cependant, un bémol majeur subsiste avec cette idée : le risque d’induire une perception erronée de la réalité de fonctionnement de l’organisation. – Réduire les freins au don chez les donateurs les plus sceptiques en utilisant par exemple le microdon, en accentuant le caractère hédonique du don, ou encore en augmentant la participation physique du donateur par la participation à des événements. – Enfin, nombre de donateurs ont connaissance d’une association par le bouche-àoreille, par la proximité géographique ou par les réseaux sociaux, qui sont sources de confiance dans l’association. Fayrouz Akrim recommande donc aux associations d’encourager les donateurs à communiquer sur leurs dons auprès de leurs proches. En d’autres termes, faites de vos donateurs des ambassadeurs. S. R.

Références Fayrouz Akrim, L’intrusion perçue des sollicitations de don d’argent par les associations et son influence sur la résistance : conceptualisation et mesure de l’état de résistance, thèse de doctorat soutenue en 2017 à l’université de Bretagne Sud, sous la direction de Ronan Divard et Marine Le Gall-Ely.

Préférences en termes d’outils de sollicitation au don

Moins de 100 €

1 %

21 % 26 %

1 %

50 % 1 %

De 300  à 500 €

1 %

24 %

31 %

De 500  à 1 000 €

1 %

Plus  de 1 000 €

22 % 28 %

47 %

44 % 2 %

Plutôt par courrier Plutôt par téléphone Plutôt par mail et ne pas être contacté par une association Non-réponse

28 %

1 %

26 %

1 %

1 %

1 %

21 % 27 %

49 %

44 % 1 %

Plutôt par SMS

Ensemble

1 %

Vous préférez donner spontanément

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 23


© maselkoo99

#INNOVATION • CÔTÉ RECHERCHES

Téléphone, SMS et face-to-face . Une sollicitation non adaptée peut être fatale à votre relation donateurs. Un chercheur a mené l’enquête pour en savoir plus.

Des techniques trop intrusives pour les donateurs ? En 2017, Fayrouz Akrim a soutenu sa thèse de doctorat sur l’intrusion perçue des sollicitations de don d’argent par les associations. Ses recherches se sont appuyées sur une question posée par Recherches et Solidarités en 2015 à des donateurs sur leurs préférences en termes d’outils de sollicitation au don. Les résultats étaient sans appel  : 49  % des répondants déclaraient préférer ne pas être sollicités et donner spontanément (voir graphique, page de droite). Un sentiment d’intrusion Si la pratique des fundraisers montre que l’absence de sollicitation est assez inefficace pour créer du don, ces résultats posent tout de même la question de l’utilisation du téléphone et du SMS (1 % des préférences des donateurs). Fayrouz Akrim a donc choisi de se consacrer à l’étude de ces sollicitations, minoritaires mais bien effectives, en se demandant : – quelles sont les sollicitations au don perçues­ comme les plus intrusives par les donateurs ? – quel est le profil des donateurs qui perçoivent ces sollicitations comme des intrusions et qui résistent au don ?

Pour y répondre, deux études ont été réalisées. Une première, qualitative, a été menée auprès de dix-huit donateurs divers en termes d’âges et de statuts (anciens donateurs, occasionnels ou réguliers). Les résultats montrent que seules quatre personnes évoquent spontanément l’intrusion vécue par les demandes de don. Les autres en parlent lorsqu’on leur pose directement la question : huit évoquent notamment les « appels téléphoniques » et « le démarchage à domicile » comme étant les techniques les plus intrusives, et six évoquent le face-to-face. Les personnes se sentent d’autant plus agressées que la demande est formulée par un individu. Toutes les personnes interrogées préfèrent prendre leur décision « à tête reposée », face à un courrier, sans sentiment d’intrusion. Typologie des réactions Une deuxième étude, quantitative, réalisée sur six cent vingt-sept donateurs et « non donateurs » représentatifs de la population française, conduit à la conclusion que plus les individus perçoivent une intrusion dans leur vie privée, plus ils entrent en état de résistance face au don, et plus ils évitent la

sollicitation (en ne décrochant pas le téléphone après avoir reconnu le numéro, ou en changeant de trottoir) et/ou s’opposent à celle-ci (en disant « non » à l’enquêteur de rue ou téléphonique). Les méthodes « intrusives » seraient donc à proscrire pour susciter le don. Cependant, une analyse plus fine des résultats montre que trois groupes coexistent. – Les « compréhensifs » (22 % de l’échantillon, 158 euros en moyenne de don annuel) : ils ne se sentent pas vraiment agressés par ces techniques et perçoivent peu l’intrusion. Ils ne cherchent donc pas à éviter la sollicitation ni à s’y opposer. Ils ont par ailleurs une grande confiance dans les associations. En termes sociodémographiques, ce groupe est très divers. – Les « indépendants » (19 %, 215 euros de don annuel) : ils ont une grande confiance en eux et prennent leur décision en dehors des sollicitations. Ils se sentent agressés par les techniques de collecte comme le téléphone et n’hésitent pas à s’opposer au téléenquêteur. Ce groupe rassemble de nombreux jeunes seniors (50 – 59 ans). – Les « résistants » (58 %, 81 euros de don annuel) : ce segment très résistant aux sollicitations au don est celui qui donne le moins. Les foyers ayant les revenus les plus élevés sont surreprésentés dans ce segment. Ce groupe peut à la fois s’opposer au demandeur et adopter une stratégie d’évitement. Il a besoin d’être rassuré

sur la bonne utilisation des fonds et favorise les associations labellisées « Don en confiance » ; En conclusion, voici les recommandations adressées par l’auteur aux associations. – Travailler sur la communication quant à l’utilisation des fonds : par exemple, faire payer les frais de fonctionnement par les grands donateurs ou les entreprises mécènes, pour pouvoir communiquer sur du « 100 % va à la cause ». Cependant, un bémol majeur subsiste avec cette idée : le risque d’induire une perception erronée de la réalité de fonctionnement de l’organisation. – Réduire les freins au don chez les donateurs les plus sceptiques en utilisant par exemple le microdon, en accentuant le caractère hédonique du don, ou encore en augmentant la participation physique du donateur par la participation à des événements. – Enfin, nombre de donateurs ont connaissance d’une association par le bouche-àoreille, par la proximité géographique ou par les réseaux sociaux, qui sont sources de confiance dans l’association. Fayrouz Akrim recommande donc aux associations d’encourager les donateurs à communiquer sur leurs dons auprès de leurs proches. En d’autres termes, faites de vos donateurs des ambassadeurs. S. R.

Références Fayrouz Akrim, L’intrusion perçue des sollicitations de don d’argent par les associations et son influence sur la résistance : conceptualisation et mesure de l’état de résistance, thèse de doctorat soutenue en 2017 à l’université de Bretagne Sud, sous la direction de Ronan Divard et Marine Le Gall-Ely.

Préférences en termes d’outils de sollicitation au don

Moins de 100 €

1 %

21 % 26 %

1 %

50 % 1 %

De 300  à 500 €

1 %

24 %

31 %

De 500  à 1 000 €

1 %

Plus  de 1 000 €

22 % 28 %

47 %

44 % 2 %

Plutôt par courrier Plutôt par téléphone Plutôt par mail et ne pas être contacté par une association Non-réponse

28 %

1 %

26 %

1 %

1 %

1 %

21 % 27 %

49 %

44 % 1 %

Plutôt par SMS

Ensemble

1 %

Vous préférez donner spontanément

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 23


#CLINIQUE DU FUNDRAISING • CÔTÉ PRATIQUE

Sécuriser votre collaboration avec une startup solidaire :

les 10 points à vérifier Arrondis (en caisse, sur salaire, sur relevé bancaire ou carte bancaire, sur le panier d’achats en e-commerce…), dons sans contact, dons par tweet, régies pub solidaires, pétitions, applications de don, plateformes de don, de peer-to-peer ou de crowdfunding… depuis une dizaine d’années, des solutions nouvelles et innovantes sont apparues et se multiplient grâce à l’explosion du digital. Vous êtes fundraiser en poste ? Alors vous devez être sollicité quasi quotidiennement par ces startups solidaires. Comment s’y retrouver face à la multiplication de ces offres ? Voici les dix points à vérifier pour une collaboration en toute sécurité.

préférable de ne pas s’enfermer avec une seule plateforme.

5. Les données d’utilisateurs/ des donateurs

Au sujet des données des donateurs, de nombreuses questions sont à se poser : à qui appartiennent-elles ? Sont-elles réutilisées et commercialisées par la plateforme ? Sont-elles mutualisées entre plusieurs organisations ? Si oui, dans quel but ? Le prestataire est-il en règle avec la Cnil ? Quelles données récupère-t-on, à quelle fréquence et par quel moyen ?

6. Le reçu fiscal

Là encore, quelques questions essentielles : s’agit-il d’un don ou pas ? Qui émet le reçu fiscal ? Si c’est l’organisation, à quel rythme reçoit-elle les données ? Si c’est le prestataire, pour quel coût et à quel rythme ?

9. La communication et la promotion

Médiatisation, utilisation des bases de contacts… qui fait quoi entre l’organisation et le prestataire ? L’expliciter au préalable vous évitera bien des déceptions.

10. Les dons dédiés

Si les dons sont dédiés, ils doivent être « fléchés » au niveau comptable et, en général, l’organisation doit rendre compte aux donateurs. Cette checklist n’est pas exhaustive mais vous donnera une bonne base pour évaluer les nouvelles opportunités. Ensuite, à vous d’être créatif et persévérant pour que le partenariat soit un succès en fundraising !

Derniers conseils 1. Les conditions générales d’utilisation (CGU)

Peu les lisent. Et pourtant, tout y est ou presque. Quoi que vous signiez et même si elles ne vous ont pas été présentées, il y a forcément des conditions générales d’utilisation. Il est donc impératif de les lire et les valider le cas échéant. Cela vous évitera de mauvaises surprises par la suite dues à une incompréhension.

2. Le positionnement du prestataire

© ILYALIREN

Facilitateur technologique ou sous-traitant, conseil et accompagnement marketing, marque blanche  … connaître le positionnement de votre prestataire vous aidera à mieux comprendre sa tarification et, par la suite, son intervention.

Voir lexique en page de droite.

3. La rémunération du prestataire

Concernant la rémunération, il ne faut rien oublier : frais de mise en place, abonnement, pourcentage du don (capé  ou non), forfait par don (ou grille de forfaits), frais bancaires… Pour rappel, le « don en confiance » proscrit les rémunérations liées au montant des dons (exception faite pour le crowdfunding pour une phase d’expérimentation jusqu’en 2018).

7. Les entreprises tierces

Dans certains cas, comme pour les régies publicitaires solidaires, des entreprises interviennent comme annonceurs en proposant leur publicité. Il faut alors se demander s’il y a une possibilité de gérer des blacklists  . Dans d’autres schémas de partenariat, les apports de propriétaires de supports sont considérés comme du mécénat de compétences et/ou en nature. Ils auront donc droit à un reçu fiscal (exemple d’un site e-commerce qui propose un arrondi sur le panier).

Pour en savoir plus, découvrez la présentation « Financements innovants : comment ne pas en perdre son latin » du 16e Séminaire francophone de la collecte de l’AFF sur fundraisers.fr.

1. Tenez un tableau de suivi de ce type de prestataires, en particulier des dates d’échéance de contrat. 2. Suivez les travaux de la coordination générosités (Admical, AFF, CFF, Don en confiance, France générosités), qui émet de nombreuses recommandations. A. P.

Lexique Blacklist : liste d’adresses ou de personnes qui ont été exclues d’un service ou d’un accès. Une fois sur cette liste noire, l’utilisateur n’aura plus accès au service ou à l’accès en question. Capé :

relatif à un produit financier qui ne peut s’élever au-delà d’une certaine limite fixée par un contrat.

4. Le reversement de la rémunération

Il peut être ponctuel ou périodique.

Clause d’exclusivité :

8. La clause d’exclusivité

Cette clause est fréquente… Bien vérifier qu’elle ne soit pas trop restrictive pour éviter de futurs conflits (oui, c’est déjà arrivé) ! Si possible, il est conseillé de négocier pour y parer. En effet, l’organisation a besoin de tester différents prestataires ou dans le cas de nouveaux prestataires « innovants » dont les succès sont incertains, il est

règle d’un contrat prévoyant qu’une personne ou une société ne fournira pas de marchandises ni ses services à un concurrent. Dans le cas présent, certains prestataires tentent d’interdire à l’organisation de travailler avec d’autres prestataires, ce qui est problématique car les celles-ci ont besoin de tester différentes plateformes.

Marque blanche :

technique commerciale de mise à disposition d’outils, de produits ou/et de services par une entreprise à une autre sans citer la marque ni l’origine du bien transmis. Dans le cas présent, l’utilisateur a recours au service du prestataire comme si c’était l’organisation seule qui le fournissait.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 25


#CLINIQUE DU FUNDRAISING • CÔTÉ PRATIQUE

Sécuriser votre collaboration avec une startup solidaire :

les 10 points à vérifier Arrondis (en caisse, sur salaire, sur relevé bancaire ou carte bancaire, sur le panier d’achats en e-commerce…), dons sans contact, dons par tweet, régies pub solidaires, pétitions, applications de don, plateformes de don, de peer-to-peer ou de crowdfunding… depuis une dizaine d’années, des solutions nouvelles et innovantes sont apparues et se multiplient grâce à l’explosion du digital. Vous êtes fundraiser en poste ? Alors vous devez être sollicité quasi quotidiennement par ces startups solidaires. Comment s’y retrouver face à la multiplication de ces offres ? Voici les dix points à vérifier pour une collaboration en toute sécurité.

préférable de ne pas s’enfermer avec une seule plateforme.

5. Les données d’utilisateurs/ des donateurs

Au sujet des données des donateurs, de nombreuses questions sont à se poser : à qui appartiennent-elles ? Sont-elles réutilisées et commercialisées par la plateforme ? Sont-elles mutualisées entre plusieurs organisations ? Si oui, dans quel but ? Le prestataire est-il en règle avec la Cnil ? Quelles données récupère-t-on, à quelle fréquence et par quel moyen ?

6. Le reçu fiscal

Là encore, quelques questions essentielles : s’agit-il d’un don ou pas ? Qui émet le reçu fiscal ? Si c’est l’organisation, à quel rythme reçoit-elle les données ? Si c’est le prestataire, pour quel coût et à quel rythme ?

9. La communication et la promotion

Médiatisation, utilisation des bases de contacts… qui fait quoi entre l’organisation et le prestataire ? L’expliciter au préalable vous évitera bien des déceptions.

10. Les dons dédiés

Si les dons sont dédiés, ils doivent être « fléchés » au niveau comptable et, en général, l’organisation doit rendre compte aux donateurs. Cette checklist n’est pas exhaustive mais vous donnera une bonne base pour évaluer les nouvelles opportunités. Ensuite, à vous d’être créatif et persévérant pour que le partenariat soit un succès en fundraising !

Derniers conseils 1. Les conditions générales d’utilisation (CGU)

Peu les lisent. Et pourtant, tout y est ou presque. Quoi que vous signiez et même si elles ne vous ont pas été présentées, il y a forcément des conditions générales d’utilisation. Il est donc impératif de les lire et les valider le cas échéant. Cela vous évitera de mauvaises surprises par la suite dues à une incompréhension.

2. Le positionnement du prestataire

© ILYALIREN

Facilitateur technologique ou sous-traitant, conseil et accompagnement marketing, marque blanche  … connaître le positionnement de votre prestataire vous aidera à mieux comprendre sa tarification et, par la suite, son intervention.

Voir lexique en page de droite.

3. La rémunération du prestataire

Concernant la rémunération, il ne faut rien oublier : frais de mise en place, abonnement, pourcentage du don (capé  ou non), forfait par don (ou grille de forfaits), frais bancaires… Pour rappel, le « don en confiance » proscrit les rémunérations liées au montant des dons (exception faite pour le crowdfunding pour une phase d’expérimentation jusqu’en 2018).

7. Les entreprises tierces

Dans certains cas, comme pour les régies publicitaires solidaires, des entreprises interviennent comme annonceurs en proposant leur publicité. Il faut alors se demander s’il y a une possibilité de gérer des blacklists  . Dans d’autres schémas de partenariat, les apports de propriétaires de supports sont considérés comme du mécénat de compétences et/ou en nature. Ils auront donc droit à un reçu fiscal (exemple d’un site e-commerce qui propose un arrondi sur le panier).

Pour en savoir plus, découvrez la présentation « Financements innovants : comment ne pas en perdre son latin » du 16e Séminaire francophone de la collecte de l’AFF sur fundraisers.fr.

1. Tenez un tableau de suivi de ce type de prestataires, en particulier des dates d’échéance de contrat. 2. Suivez les travaux de la coordination générosités (Admical, AFF, CFF, Don en confiance, France générosités), qui émet de nombreuses recommandations. A. P.

Lexique Blacklist : liste d’adresses ou de personnes qui ont été exclues d’un service ou d’un accès. Une fois sur cette liste noire, l’utilisateur n’aura plus accès au service ou à l’accès en question. Capé :

relatif à un produit financier qui ne peut s’élever au-delà d’une certaine limite fixée par un contrat.

4. Le reversement de la rémunération

Il peut être ponctuel ou périodique.

Clause d’exclusivité :

8. La clause d’exclusivité

Cette clause est fréquente… Bien vérifier qu’elle ne soit pas trop restrictive pour éviter de futurs conflits (oui, c’est déjà arrivé) ! Si possible, il est conseillé de négocier pour y parer. En effet, l’organisation a besoin de tester différents prestataires ou dans le cas de nouveaux prestataires « innovants » dont les succès sont incertains, il est

règle d’un contrat prévoyant qu’une personne ou une société ne fournira pas de marchandises ni ses services à un concurrent. Dans le cas présent, certains prestataires tentent d’interdire à l’organisation de travailler avec d’autres prestataires, ce qui est problématique car les celles-ci ont besoin de tester différentes plateformes.

Marque blanche :

technique commerciale de mise à disposition d’outils, de produits ou/et de services par une entreprise à une autre sans citer la marque ni l’origine du bien transmis. Dans le cas présent, l’utilisateur a recours au service du prestataire comme si c’était l’organisation seule qui le fournissait.

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 25


pour monter plus haut !

Collecter sur Facebook ?

Art de communiquer de manière concise, précise et efficace sans jamais être pris au dépourvu, l’elevator pitch consiste à susciter l’intérêt d’un interlocuteur rencontré par hasard et à lui donner envie d’en savoir plus, en soixante secondes montre en main. et ce qu’ils ont à gagner ou à perdre à vous suivre.

2. Que voulez-vous que votre interlocuteur comprenne de votre projet ?

D

écrire, en un temps record, qui vous êtes, ce que vous faites et ce que vous pourriez faire ensemble ne s’improvise pas. C’est pourtant la clé de l’engagement. Sans être une science exacte, la construction d’un elevator pitch suppose d’avoir pris en compte quelques repères méthodologiques. Voici donc comment s’y prendre en six étapes incontournables et trois conseils clés.

1. Adaptez votre discours à vos interlocuteurs Pour éviter d’être pris au dépourvu et de vous dire que vous auriez pu mieux faire, cernez en amont le type d’interlocuteurs auquel vous pouvez être confronté. Efforcez-vous de comprendre qui ils sont et leurs préoccupations et leurs besoins par rapport à votre organisation. Quel parti peuvent-ils tirer d’une collaboration avec vous ? Préparez donc un pitch à tiroirs que vous adapterez aux situations dans lesquelles vous vous trouvez. Membre du CA, donateur potentiel, partenaire possible, bailleur de fonds, demandez-vous quelles sont leurs inquiétudes

Formalisez votre objectif : par exemple, vous voulez que le directeur de la communication d’un grand groupe soit alerté sur la cause que vous défendez, qu’il prenne conscience du travail que vous faites et de ses retombées concrètes, et qu’il comprenne de lui-même en quoi son soutien peut vous aider pour qu’il soit partie prenante dans la réussite de votre action.

3. Quel degré d’émotion voulez-vous susciter ? Faites appel aux valeurs et aux sentiments de votre interlocuteur autant qu’à sa compréhension factuelle des choses. Votre objectif est que ce même directeur de la communication soit interpellé par votre approche, qu’il sente que sa contribution peut faire la différence et que vous avez besoin de son expertise et de celle de ses équipes.

4. Qu’attendez-vous concrètement ? Par exemple, vous attendez du directeur de la communication qu’il mette à votre disposition ses équipes créatives, qu’il relaie votre cause sur ses réseaux sociaux et qu’il vous mette en relation avec un prescripteur de sa connaissance : gardez bien en tête cet objectif concret et donnez-vous les moyens de le formuler explicitement.

5. Comment améliorer l’impact de votre pitch ? ●●

Personnalisez le bénéfice de votre action : « Désormais, Sandrine va à l’école tous les jours ».

Utilisez des métaphores : « Les premières graines ont porté leurs fruits mais il reste beaucoup à faire ». ●● Posez des questions : « Est-ce vraiment la vie que nous souhaitons pour ces parents isolés ? ». ●● N’oubliez pas les visuels ou les vidéos pour impliquer votre auditoire si vous êtes dans un contexte de présentation. ●●

6. Et après ?… Une fois conçu et bien rodé, votre elevator pitch peut s’adapter à des publics et à des timings différents. C’est grâce à la pratique, que vous serez performant et efficace, et que vous transmettrez vos idées sans être pris au dépourvu. M.-P. L.

Ce service déjà disponible pour l’ensemble des associations, mais également des parti­ culiers, aux États-Unis permet à tout un chacun de collecter des dons en ligne di­rec­tement sur sa page ou bien d’organiser une collecte peer-to-peer au profit d’une organisation.

3 conseils Écrivez votre pitch pour qu’en situation, les mots viennent naturellement. Soyez souple et adaptable Questionnez votre interlocuteur, intéressez-vous à lui pour entretenir la conversation, et intégrer naturellement le message que vous avez à faire passer.

Entraînez-vous Testez, pratiquez, faites-vous plaisir, et le pitch deviendra une seconde nature.

LES MOTIVATIONS DU RÉSEAU SOCIAL Après l’ouverture, à la fin de l’été, d’une place de marché destinée à concurrencer Leboncoin, Facebook vise deux objectifs avec ce nouveau service : poursuivre sa diversification visant à garder les internautes toujours plus longtemps connectés, mais surtout, les amener à enregistrer leurs coordonnées bancaires sur son système de paiement. Au passage, le réseau social prélèvera 5 % du montant du don, une somme élevée pour la France, qui s’approche des plateformes de crowdfunding. Facebook se justifie en indiquant que 3,5 % seront consacrés

au « contrôle » des organisations et 1,5 % aux frais bancaires. ET POUR NOS ORGANISATIONS ? Cette fonctionnalité fera-t-elle la différence pour déclencher les dons des fans directement sur le réseau social ? Après des débuts difficiles, les campagnes publicitaires sur Facebook sont désormais des dispositifs efficaces pour générer du trafic et recruter de nouveaux donateurs, mais rarement directement après le premier clic. On peut alors s’interroger : les internautes, no­tamment les plus jeunes, préféreront-ils donner directement sur Facebook sans voir le site de l’organisation et ses contenus plus détaillés ? Existe-t-il une opportunité réelle pour des urgences majeures et les associations de premier plan ? Cela sera sans doute plus difficile sans une stratégie et des budgets publicitaires dédiés pour les structures plus petites ou dont les causes sont plus complexes. Dans tous les cas, il y aura un avant et un après, car les community managers relèvent souvent de la communication et n’ont pas d’objectif de collecte directe. Si Facebook devient un dispositif de collecte à part entière, alors un subtil équilibre entre échange et sollicitation va devoir être trouvé dans l’animation des pages. A. A.

— Les campagnes publicitaires sur Facebook sont désormais des dispositifs efficaces pour générer du trafic et recruter de nouveaux donateurs, mais rarement directement après le premier clic. —

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 27

#CLINIQUE DU FUNDRAISING • DR DIGITAL

#CLINIQUE DU FUNDRAISING • DR FUNDRAISING

L’elevator pitch ,

Facebook a annoncé qu’à partir du 25 septembre, son service de fundraising à destination des associations serait testé dans la majorité des pays européens.


pour monter plus haut !

Collecter sur Facebook ?

Art de communiquer de manière concise, précise et efficace sans jamais être pris au dépourvu, l’elevator pitch consiste à susciter l’intérêt d’un interlocuteur rencontré par hasard et à lui donner envie d’en savoir plus, en soixante secondes montre en main. et ce qu’ils ont à gagner ou à perdre à vous suivre.

2. Que voulez-vous que votre interlocuteur comprenne de votre projet ?

D

écrire, en un temps record, qui vous êtes, ce que vous faites et ce que vous pourriez faire ensemble ne s’improvise pas. C’est pourtant la clé de l’engagement. Sans être une science exacte, la construction d’un elevator pitch suppose d’avoir pris en compte quelques repères méthodologiques. Voici donc comment s’y prendre en six étapes incontournables et trois conseils clés.

1. Adaptez votre discours à vos interlocuteurs Pour éviter d’être pris au dépourvu et de vous dire que vous auriez pu mieux faire, cernez en amont le type d’interlocuteurs auquel vous pouvez être confronté. Efforcez-vous de comprendre qui ils sont et leurs préoccupations et leurs besoins par rapport à votre organisation. Quel parti peuvent-ils tirer d’une collaboration avec vous ? Préparez donc un pitch à tiroirs que vous adapterez aux situations dans lesquelles vous vous trouvez. Membre du CA, donateur potentiel, partenaire possible, bailleur de fonds, demandez-vous quelles sont leurs inquiétudes

Formalisez votre objectif : par exemple, vous voulez que le directeur de la communication d’un grand groupe soit alerté sur la cause que vous défendez, qu’il prenne conscience du travail que vous faites et de ses retombées concrètes, et qu’il comprenne de lui-même en quoi son soutien peut vous aider pour qu’il soit partie prenante dans la réussite de votre action.

3. Quel degré d’émotion voulez-vous susciter ? Faites appel aux valeurs et aux sentiments de votre interlocuteur autant qu’à sa compréhension factuelle des choses. Votre objectif est que ce même directeur de la communication soit interpellé par votre approche, qu’il sente que sa contribution peut faire la différence et que vous avez besoin de son expertise et de celle de ses équipes.

4. Qu’attendez-vous concrètement ? Par exemple, vous attendez du directeur de la communication qu’il mette à votre disposition ses équipes créatives, qu’il relaie votre cause sur ses réseaux sociaux et qu’il vous mette en relation avec un prescripteur de sa connaissance : gardez bien en tête cet objectif concret et donnez-vous les moyens de le formuler explicitement.

5. Comment améliorer l’impact de votre pitch ? ●●

Personnalisez le bénéfice de votre action : « Désormais, Sandrine va à l’école tous les jours ».

Utilisez des métaphores : « Les premières graines ont porté leurs fruits mais il reste beaucoup à faire ». ●● Posez des questions : « Est-ce vraiment la vie que nous souhaitons pour ces parents isolés ? ». ●● N’oubliez pas les visuels ou les vidéos pour impliquer votre auditoire si vous êtes dans un contexte de présentation. ●●

6. Et après ?… Une fois conçu et bien rodé, votre elevator pitch peut s’adapter à des publics et à des timings différents. C’est grâce à la pratique, que vous serez performant et efficace, et que vous transmettrez vos idées sans être pris au dépourvu. M.-P. L.

Ce service déjà disponible pour l’ensemble des associations, mais également des parti­ culiers, aux États-Unis permet à tout un chacun de collecter des dons en ligne di­rec­tement sur sa page ou bien d’organiser une collecte peer-to-peer au profit d’une organisation.

3 conseils Écrivez votre pitch pour qu’en situation, les mots viennent naturellement. Soyez souple et adaptable Questionnez votre interlocuteur, intéressez-vous à lui pour entretenir la conversation, et intégrer naturellement le message que vous avez à faire passer.

Entraînez-vous Testez, pratiquez, faites-vous plaisir, et le pitch deviendra une seconde nature.

LES MOTIVATIONS DU RÉSEAU SOCIAL Après l’ouverture, à la fin de l’été, d’une place de marché destinée à concurrencer Leboncoin, Facebook vise deux objectifs avec ce nouveau service : poursuivre sa diversification visant à garder les internautes toujours plus longtemps connectés, mais surtout, les amener à enregistrer leurs coordonnées bancaires sur son système de paiement. Au passage, le réseau social prélèvera 5 % du montant du don, une somme élevée pour la France, qui s’approche des plateformes de crowdfunding. Facebook se justifie en indiquant que 3,5 % seront consacrés

au « contrôle » des organisations et 1,5 % aux frais bancaires. ET POUR NOS ORGANISATIONS ? Cette fonctionnalité fera-t-elle la différence pour déclencher les dons des fans directement sur le réseau social ? Après des débuts difficiles, les campagnes publicitaires sur Facebook sont désormais des dispositifs efficaces pour générer du trafic et recruter de nouveaux donateurs, mais rarement directement après le premier clic. On peut alors s’interroger : les internautes, no­tamment les plus jeunes, préféreront-ils donner directement sur Facebook sans voir le site de l’organisation et ses contenus plus détaillés ? Existe-t-il une opportunité réelle pour des urgences majeures et les associations de premier plan ? Cela sera sans doute plus difficile sans une stratégie et des budgets publicitaires dédiés pour les structures plus petites ou dont les causes sont plus complexes. Dans tous les cas, il y aura un avant et un après, car les community managers relèvent souvent de la communication et n’ont pas d’objectif de collecte directe. Si Facebook devient un dispositif de collecte à part entière, alors un subtil équilibre entre échange et sollicitation va devoir être trouvé dans l’animation des pages. A. A.

— Les campagnes publicitaires sur Facebook sont désormais des dispositifs efficaces pour générer du trafic et recruter de nouveaux donateurs, mais rarement directement après le premier clic. —

Fundraizine # 52 • automne 2017 • 27

#CLINIQUE DU FUNDRAISING • DR DIGITAL

#CLINIQUE DU FUNDRAISING • DR FUNDRAISING

L’elevator pitch ,

Facebook a annoncé qu’à partir du 25 septembre, son service de fundraising à destination des associations serait testé dans la majorité des pays européens.


2002 Après des études d’histoire, IUP des métiers des arts et de la culture.

2003 Après un Erasmus à Brighton, est recruté au musée du Royal Pavilion.

ADRIEN JOLY

2009 Responsable de projet Mécénat au Château de Versailles.

LA MÉCANIQUE DES FLUIDES IL EST TOMBÉ DANS LA CULTURE QUAND IL ÉTAIT PETIT ? LA MÈRE D’ADRIEN JOLY TRAVAILLAIT DANS UN SERVICE CULTUREL, LA FAMILLE DE SON PÈRE ÉTAIT DANS LE THÉÂTRE… « Du coup, je n’idéalisais pas du tout le milieu. Je rêvais même presque de m’en échapper. » Loupé. Après des études d’histoire, emporté par le flot, il finit en IUP des métiers des arts et de la culture ! Dans le bain, mais toujours un peu à contre-courant, avec l’envie de faire et de voir autre chose, Adrien Joly part ensuite en échange Erasmus à Brighton. De petits boulots dans les théâtres locaux à la création d’une société de location de lieux, il finit par rejoindre le Royal Pavilion, ancienne résidence royale. Culture, certes, mais dans « un lieu exotique et rigolo, un peu kitsch, mêlant architecture indienne et décor chinois ». Il y sera en charge de la médiation culturelle et se familiarisera là avec la gestion à la sauce anglo-saxonne de la culture : « Il s’agissait de piloter les services pour les publics, d’inventer des offres… bref, de générer des revenus partout où il était possible de le faire ! ».

Du fleuve au ruisseau Après sept ans au Royaume-Uni, retour au port. Adrien Joly réactive ses contacts en France et rejoint le Château­de Versailles comme responsable de projet Mécénat­et Relations internationales. « C’est vraiment là que j’ai appris le métier, notamment les aspects les plus techniques du mécénat. » Mais après deux ans sur les grands bassins du Château, l’envie naît de redevenir ruisseau, « d’avoir plus de liberté pour imaginer des choses ». Aqueduc en ligne droite pour la cité phocéenne. Deux ans avant l’ouverture du Mucem (Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée), il rejoint l’équipe de préfiguration sur la communication et le mécénat. Deux ans à travailler notamment à l’acceptation locale

2011 Rejoint le projet du Mucem à Marseille comme adjoint à la Communication et au Mécénat.

2014 Devient responsable du Développement des ressources du Mucem.

de ce projet porté par des non-Marseillais. Savoir se déformer, épouser les rivages sans se laisser gagner par la pression. Trouver le juste équilibre entre viscosité et résistance. Se prêter aux ricochets sans trop laisser l’onde se propager…

Amener les mécènes à se jeter à l’eau Après l’inauguration, en juin 2013, Adrien Joly agrège les petits cours d’eau en devenant responsable du Développement des ressources. « Je voulais un véritable département des ressources et des relations extérieures, du mécénat, de la privatisation, des concessions commerciales, des produits dérivés… » Une approche globale et très business, notamment pour développer les flux de mécénat jusque-là largement captés par le projet Marseille­– Capitale européenne de la culture. Une approche dictée aussi par un contexte peu propice au mécénat « de bienfaiteur ». « Le musée est en compétition avec la location de loges à l’OM, par exemple. Pour parler aux entreprises, souvent des primo-mécènes, et les amener à se lancer, il fallait partir de leurs besoins, leur montrer que nous avons envie de contribuer à leur développement. » Des partenariats à l’ouverture de concept stores éphémères, Adrien Joly est désormais à la tête d’une équipe de neuf personnes, pour 2,2 millions de recettes pour l’ensemble du département dont 1,5 million d’euros en mécénat – et autant de visiteurs annuels. Mais il revendique un état d’esprit loin de la turbine en surrégime. « En France, il y a souvent une sorte de fierté à dire qu’on travaille comme un malade. C’est aux antipodes de ma philosophie. Il faut se forcer à être efficace et à déléguer, garder de l’espace pour avoir une “vraie” vie. » Préserver l’équilibre, faire que cela coule de source. N. W.

Fundraizine # 52 • automne 2017

© Mucem – Louise Manhes

#PORTRAIT

Des rivages britanniques de la Manche aux côtes de la Méditerranée, Adrien Joly pratique le mécénat avec efficacité et adaptabilité : approche coulante dans le creusage de son sillon mais pragmatisme dans le rassemblement des affluents. Embarquement pour un voyage en eaux mécénales avec le responsable du Développement des ressources du Mucem.


2002 Après des études d’histoire, IUP des métiers des arts et de la culture.

2003 Après un Erasmus à Brighton, est recruté au musée du Royal Pavilion.

ADRIEN JOLY

2009 Responsable de projet Mécénat au Château de Versailles.

LA MÉCANIQUE DES FLUIDES IL EST TOMBÉ DANS LA CULTURE QUAND IL ÉTAIT PETIT ? LA MÈRE D’ADRIEN JOLY TRAVAILLAIT DANS UN SERVICE CULTUREL, LA FAMILLE DE SON PÈRE ÉTAIT DANS LE THÉÂTRE… « Du coup, je n’idéalisais pas du tout le milieu. Je rêvais même presque de m’en échapper. » Loupé. Après des études d’histoire, emporté par le flot, il finit en IUP des métiers des arts et de la culture ! Dans le bain, mais toujours un peu à contre-courant, avec l’envie de faire et de voir autre chose, Adrien Joly part ensuite en échange Erasmus à Brighton. De petits boulots dans les théâtres locaux à la création d’une société de location de lieux, il finit par rejoindre le Royal Pavilion, ancienne résidence royale. Culture, certes, mais dans « un lieu exotique et rigolo, un peu kitsch, mêlant architecture indienne et décor chinois ». Il y sera en charge de la médiation culturelle et se familiarisera là avec la gestion à la sauce anglo-saxonne de la culture : « Il s’agissait de piloter les services pour les publics, d’inventer des offres… bref, de générer des revenus partout où il était possible de le faire ! ».

Du fleuve au ruisseau Après sept ans au Royaume-Uni, retour au port. Adrien Joly réactive ses contacts en France et rejoint le Château­de Versailles comme responsable de projet Mécénat­et Relations internationales. « C’est vraiment là que j’ai appris le métier, notamment les aspects les plus techniques du mécénat. » Mais après deux ans sur les grands bassins du Château, l’envie naît de redevenir ruisseau, « d’avoir plus de liberté pour imaginer des choses ». Aqueduc en ligne droite pour la cité phocéenne. Deux ans avant l’ouverture du Mucem (Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée), il rejoint l’équipe de préfiguration sur la communication et le mécénat. Deux ans à travailler notamment à l’acceptation locale

2011 Rejoint le projet du Mucem à Marseille comme adjoint à la Communication et au Mécénat.

2014 Devient responsable du Développement des ressources du Mucem.

de ce projet porté par des non-Marseillais. Savoir se déformer, épouser les rivages sans se laisser gagner par la pression. Trouver le juste équilibre entre viscosité et résistance. Se prêter aux ricochets sans trop laisser l’onde se propager…

Amener les mécènes à se jeter à l’eau Après l’inauguration, en juin 2013, Adrien Joly agrège les petits cours d’eau en devenant responsable du Développement des ressources. « Je voulais un véritable département des ressources et des relations extérieures, du mécénat, de la privatisation, des concessions commerciales, des produits dérivés… » Une approche globale et très business, notamment pour développer les flux de mécénat jusque-là largement captés par le projet Marseille­– Capitale européenne de la culture. Une approche dictée aussi par un contexte peu propice au mécénat « de bienfaiteur ». « Le musée est en compétition avec la location de loges à l’OM, par exemple. Pour parler aux entreprises, souvent des primo-mécènes, et les amener à se lancer, il fallait partir de leurs besoins, leur montrer que nous avons envie de contribuer à leur développement. » Des partenariats à l’ouverture de concept stores éphémères, Adrien Joly est désormais à la tête d’une équipe de neuf personnes, pour 2,2 millions de recettes pour l’ensemble du département dont 1,5 million d’euros en mécénat – et autant de visiteurs annuels. Mais il revendique un état d’esprit loin de la turbine en surrégime. « En France, il y a souvent une sorte de fierté à dire qu’on travaille comme un malade. C’est aux antipodes de ma philosophie. Il faut se forcer à être efficace et à déléguer, garder de l’espace pour avoir une “vraie” vie. » Préserver l’équilibre, faire que cela coule de source. N. W.

Fundraizine # 52 • automne 2017

© Mucem – Louise Manhes

#PORTRAIT

Des rivages britanniques de la Manche aux côtes de la Méditerranée, Adrien Joly pratique le mécénat avec efficacité et adaptabilité : approche coulante dans le creusage de son sillon mais pragmatisme dans le rassemblement des affluents. Embarquement pour un voyage en eaux mécénales avec le responsable du Développement des ressources du Mucem.


PLACE DU MARCHÉ

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