artwork 2003 - 2010

Page 1

PHILIPPE CAILLAUD



L’imagination, disait Baudelaire, est la reine des facultés, et elle est primordiale dans la démarche artistique de Philippe Caillaud. Sans être un travail sur le merveilleux comme celui de Jean-Michel Othoniel, il ne présente malgré tout aucun lien avec la banalité ou le quotidien ; il laisse libre court à une profonde fantaisie tout en légèreté. Philippe Caillaud montre par ses objets, ses installations ou ses dessins que la poésie, si on en doutait encore, n’est pas là où on l’attendait. Les réalités qu’il crée sont improbables, utopiques, intemporelles et tendent vers un absurde plein d’humour. Ses propositions plastiques sont toujours d’une grande simplicité, sans crainte d’être très lisibles et claires, épurées elles relèvent d’une esthétique minimaliste. Tous les maîtres zen vous

le diront : pour atteindre à la simplicité il faut avoir gravi toute la montagne. Il y a des pratiques artistiques qui nécessitent une ascèse. La pratique actuelle de Philippe Caillaud est issue d’une histoire où il y a eu beaucoup de peinture, de dessin, d’analyse et de réflexion, de remises en question, de virages. Mais ce qui fait de Philippe Caillaud un artiste singulier sont les domaines non artistiques qui le touchent et auxquels il revient inlassablement. Les sciences naturelles et surtout ce qui concerne les animaux (  zoologie, entomologie, ornithologie ) qu’il aborde sous l’angle de l’anthropomorphisme, la topographie, l’eschatologie ( en particulier les représentations des différents paradis ), soit des domaines assez étrangers les uns aux autres dont les liens lui paraissent naturels. Paradoxalement et à ses dires, il ne serait pas un lecteur assidu d’ouvrages scientifiques ou mystiques mais il lui arrive de s’abîmer dans les cartes routières. Chose est sûre, il est irrémédiablement un lecteur de romans. Cet artiste du signe de l’air se nourrit d’imaginaire. Pour lui le réel est la matière première que l’on analyse, que l’on découpe et dont on associe les morceaux d’une manière ou d’une autre. Créer consiste souvent à faire du collage, à associer des domaines que l’on n’avait pas pensé accoler jusqu’alors.

L’art actuel se doit de produire toujours de l’inattendu. Au quotidien, Philippe Caillaud est un joueur impénitent. Tout est bon : les mots, les images, les idées. Il est l’inventeur du Design Inutile. Cette démarche consiste à créer des objets totalement fonctionnels pour des usagers qui n’en ont absolument pas besoin et qui ne les utiliseront pas. C’est ainsi que sont apparus les Lépidohomes ou maisons de nuit pour papillons de jour, mais aussi les projets de Bonnets pour cerfs (zoostylisme)ou de Signalétique pour petits oiseaux du jardin (design graphique inutile). Cette démarche singulière nous rappelle que l’artiste est le seul dans notre société à avoir une production qui ne sert à rien et qu’il en jouit. Si l’on en croit Philip Roth dans Opération Shylock, un artiste aurait toujours un regard amusé sur la réalité. Et apparemment Philippe Caillaud n’a pas fini de s’amuser.

Paule Pladi-Chipil Maître de conférence à la Sorbonne, Paris I Auteur de Esthétique de l’anthropomorphisme populaire



«Je ne peux pas comprendre que vous deveniez déraisonnable au point de prendre pour des papillons…ce qui n’est probablement rien de plus que des débris de descentes de lit voltigeant dans le vent de fin d’hiver, ou peut-être des flocons de neige». Jean Dubuffet, lettre à Pierre Bettencourt, mars 1964. Convoquer des «papillons» relève d’une double tradition, réaliste d’un côté comme de l’autre : le collectionneur les aligne, soigneusement étiquetés et nantis de leur nom officiel, dans des boîtes vitrées, tandis que bon nombre de dessinateurs et graveurs classiques en ont donné la représentation la plus fidèle possible. Bien entendu, il n’est pas rare que l’entomologiste ajoute à ses boites quelques livres anciens, et leur nomenclature illustrée : ainsi se nourrit sa passion, qui en vaut bien une autre. Pour ce qui est de Philippe Caillaud, il y a belle lurette qu’il a renoncé à vouloir singer la réalité. Lorsqu’il dessine ou peint – des oiseaux, des fleurs, des villes, des souvenirs et autres prétextes – c’est en ne conservant de

son motif qu’une silhouette ou une idée, presqu’un concept, tel qu’on puisse bien sûr reconnaître ce dont il s’agit, mais qu’on soit également prêt à accueillir les modifications – de forme, de posture, de couleurs, et finalement de sens – qu’il y apporte. Ce qui sous-entend, sans qu’il soit besoin pour cet artiste de nous assommer de pompeuses théories puisqu’elles se donnent à deviner, immédiatement dans ses œuvres, que le quotidien mérite d’être joyeusement bousculé et transformé : cela ne peut que le rendre enfin supportable. Philippe Caillaud, qui sait beaucoup de belles et de bonnes choses, n’ignore sans doute pas que, lorsqu’il s’agit, comme disait Dubuffet, de «poirer le papillon», il s’inscrit dans une lignée de prédécesseurs plus ou moins augustes, et pas davantage à quel point les avis peuvent varier dès qu’il est question de signaler les qualités de ces lépidoptères plus ou moins colorés. Ainsi a-t-on pu lire dans La femme 100 têtes de Max Ernst (qui a lui-même recueilli dans des collages de 1931 quelques intéressants «papillons pétrifiés») qu’il arrive, en tout cas dans certaines circonstances favorables, que «les papillons se mettent à chanter» ; tandis que Samuel Beckett a pu observer, au cours de ses longues promenades solitaires du côté d’Ussy-sur-Marne, que «la fraternité est étrangère aux papillons» (1). On en déduirait sans peine qu’il est difficile, voire impossible, pour les papillons de chanter en cœur ou à l’unisson : il semble que dans leur monde s’exerce sans trop de frein la

Mars Cartes postales anciennes violettes découpées et épinglées Ø 120 cm 2003



règle du chacun pour soi – ce qui explique l’apparente ivresse, fertile en aléas et en incohérence, de leur vol (2) L’entreprise menée par Philippe Caillaud pour imposer, avec la patience et l’attention requises, un peu d’ordre à leurs parcours erratiques apparaît hautement justifiée : qu’au lieu de continuer à virevolter au petit bonheur la chance, ils (ou plutôt bien sûr leurs substituts) nous donnent enfin le spectacle reposant et harmonieux d’une séduisante spirale, et voila réglée visuellement la vieille question des relations entre la nature et l’art – et de manière d’autant plus magistrale que Caillaud fait, si j’ose dire, d’un seul mouvement trois coups de filets. En premier, il laisse bien entendu la nature à son anarchie, puisqu’il ne propose que des représentations, soigneusement découpées, de ses êtres. Deuxio, la spirale, qui n’est jamais qu’une courbe régulièrement développée jusqu’à une certaine complexité, ravive le geste qui, selon Bergson (- mais peut-on lui faire là-dessus confiance ? – et pourquoi pas ! ), marque le tout début de la démarche artistique. Enfin il ironise doublement à l’égard des collectionneurs ci-dessus évoqués : avouez, leur suggère-t-il, la tristesse des alignements que vous privilégiez dans vos boîtes, et que mes papillons, aussi légers et gracieux que les bestioles que vous épinglez, ont sur elles l’avantage de susciter des dérives mentales autrement stimulantes que vos prétentions scientifiques (3) Il suffirait par exemple de contempler un peu les Piérides de la route aux ailes découpées dans une banale carte

routière pour commencer à rêvasser à quelque randonnée à la campagne, aux papillons qu’on pourrait observer, et en venir à se demander si leur coloration et les marques de leurs ailes seraient, comme selon Caillaud, homologues aux paysages qu’ils animent. Ou bien, il vous reviendrait en mémoire que compter les papillons n’est pas une activité vaine, puisque leur nombre et leur variété constituent un indicateur fiable de l’équilibre d’un écosystème : de la disposition de ces cent vingt-six individus, on déduirait que leur nombre et leur parure ont de quoi rassurer. Constatant la diversité chromatique des cent vingt-deux Cramoisis, on pourrait aussi s’inquiéter sur l’homogénéité de leur espèce, et s’étonner de la très relative obéissance à la forme spiralée – car ils sont nettement moins disciplinés que leurs congénères dans l’alignement de leurs ailes et ils semblent même rebelles à l’ordre qu’introduirait, dans leur collection, le retour périodique de leurs couleurs. Cette fantaisie propre aux Cramoisis, puisque leurs cousins en sont à l’évidence moins pourvus, c’est à leur nature qu’ils la doivent : les rubans de médaille dont ils sont faits leur attribuent très logiquement, outre le chatoiement dont ils sont capables, un souci de la distinction qui les singularise. Par contraste, les Argus bleus s’annoncent autrement dociles, sinon partisans de la stricte répétition du semblable ; ce n’est qu’en les observant de près que l’on constatera que chacun se différencie néanmoins de ses voisins, par de légères nuances de ce bleu qui les

PAPILLON ELLE DECOR ITALIE Article de Milu Cachat 2005



prédispose sans doute à jouer les enlumineurs de quelques fêtes religieuses. Passant ainsi d’une perception globale de la forme spiralée à la vision rapprochée de ces différences internes à une population, on va de l’unité à la diversité. Et retour. Ce qui ne peut que faire sourire le fantôme d’Emmanuel Kant, qui a eu l’audace d’affirmer que la beauté est symbole de moralité en ce qu’elle nous fournit l’occasion de saisir l’unification du divers, exemplifiée dans l’œuvre d’art. Tel est bien le risque auquel mènent les papillons de Philippe Caillaud : à peine commence-t-on à les voir que l’esprit divague d’un constat à une hypothèse, sans craindre d’avancer des explications pour le moins problématiques, ou des références qui frôlent l’outrecuidance. Ces papillons sont ainsi les discrets générateurs de multiples fictions individuelles, qui mériteront un jours d’être recueillies en un volumineux ouvrage intitulé, pour célébrer son premier responsable : Rêveries de Philippe Caillaud, et portant un sous-titre explicatif, du genre «La grâce sans la pesanteur». Gérard Durozoi Critique d’art Auteur de Raz le bol Warhol et Cie (1)Le Dépeupleur, p.19 (2)Les papillons font à l’évidence partie de la

catégorie, dans une « certaine encyclopédie chinoise » que cite Borges, des animaux « qui s’agitent comme des fous ». (3)Histoire de rappeler que, si l’art n’est pas également capable de venir déséquilibrer le savoir, il ne mérite peut-être pas qu’on s’y attarde.

En 1983, lors d’un voyage en Autriche, j’ai visité le Kunsthistorisches Museum Vienna. J’y suis tombé en fascination devant cet hippopotame égyptien en faïence qui date du Moyen Empire Thébain. Le Musée du Louvre en possède un aussi. Qu’il soit d’Egypte antique ou d’une autre époque n’a pour moi aucun intérêt. C’est le système de représentation qu’il propose qui est fascinant. Cet hippopotame porte le Nil sur lui. Si bien qu’il devient un tout : à la fois hippopotame et Nil. Il porte sur lui la couleur, la flore et la faune du fleuve qui se trouve ainsi incarné, individualisé. C’est une représentation riche : sculpture, couleur et graphisme sont harmonieusement associés. Cette idée est devenue récurrente chez moi. Les papillons, découpés dans des cartes routières ou des cartes postales, portent sur eux les espaces qu’ils survolent. Le système a été développé dans le projet Mandalasat où ce sont des photos prises par sattelite qui sont découpées. Carré de forêt Carte routière découpée et épinglée 15 x 15 cm 2008



TUBES

Tokyo Simulation infographique 2008

Les plans de métro sont les mandalas des temps modernes. Beaucoup de fidèles les contemplent avec fascination et plus ou moins de sérénité, pendant parfois un temps assez long. Ce graphisme mystique de lignes multicolores leur apporte une confiance, une plénitude : il clarifie leur esprit. Il est source de satori car la réponse à leur questionnement leur apparaît subitement. Expression de la vérité, le plan de métro ne ment jamais. Il permet à celui qui s’y voue de trouver sa voie. Il est le chemin vers le nirvana.

New York Simulation infographique 2008



LÉPIDOHOMES & DESIGN INUTILE Un jour, tenaillé par le syndrome de Zorro, j’ai voulu résolument réparer une injustice. Dans les jardins il arrive que les oiseaux disposent d’abris en forme de maisons qu’on appelle des nichoirs. Ces mangeurs d’insectes sont donc logés et parfois même, quand la bise vient, nourris. Certains jardins font donc hôtel restaurant pour ces prédateurs emplumés et pour les insectes, en particulier les papillons : rien. Il fallait absolument faire quelque chose. J’ai donc conçu des nichoirs à papillons ; les LÉPIDOHOMES. Lépido de lépidoptères et home comme « home sweet home ». Ainsi sont apparues des maisons de nuit pour papillons de jour et des maisons de jour pour papillons de nuit puisque ce ne sont pas les mêmes types d’insectes, qu’ils n’ont pas les mêmes existences, ni les mêmes morphologies donc forcément pas les mêmes maisons. Ici, il ne s’agit que de Lépidohomes pour papillons de jour, ceux pour papillons de nuits sont encore à l’étude. La conception de ces nichoirs particuliers s’est faite de façon très méthodique. Une étude fonctionnelle a été réalisée suivant les actions des lépidoptères. Les proportions, les mesures et les formes sont ergonomiques. Les matériaux utilisés sont actuels et résistants à tous les temps. Ils ont été testés dans ce sens. Les Lépidohomes sont réalisés en alucobon : matériau contemporain constitué de deux fines couches d’aluminium et d’une âme en mousse. Les couleurs ont été choisies pour leur élégance afin de contenter et séduire

les papillons. La formes et les couleurs font ainsi références à l’architecture urbaine du XVe siècle que l’on trouve représenté dans les fresques des primitifs italiens, en particulier siennois, comme Giotto ou les frères Lorenzetti. J’ai donc en somme travaillé comme un designer. À la différence près que je ne me suis jamais fait d’illusion sur la fonctionnalité de ces maisons. Les papillons ne sont guère des animaux d’intérieur et il y a peu de chance qu’une de ces bestioles s’installe dans ce type d’habitat. Moins de chance encore qu’une chenille grimpe tout le long de la tige de trois mètres, entre sous le Lépidohome par le trou prévu à cet effet, se fixe sur la tige intérieure et effectue sa métamorphose. C’est donc ainsi qu’est apparu le concept de DESIGN INUTILE. Le Design Inutile consiste à travailler rationnellement, comme tout bon designer digne de ce nom, pour créer quelque chose de totalement utopique voir absurde. Il s’agit aussi de travailler beaucoup en ne perdant pas l’objectif de la fonctionnalité sachant bien qu’il n’y a strictement aucune chance pour que ce travail serve à quelque chose. Abriter les papillons est une tentative de participation au développement de la biodiversité, ça part d’un bon sentiment mais, il faut l’avouer, on a certainement vu plus efficace.

Abriter les papillons Jardin du Muséum d’histoire Naturelle de Toulouse 2009



MÉTEMPSYCOSE n. f. (gr. Metempsukhôsis, de métaet empsukhôsis, action d’animer). Réincarnation de l’âme après la mort dans un corps humain, ou dans celui d’un animal ou d’un végétal. Certains peuples ont fait de la métempsychose une croyance fondamentale : les anciens égyptiens, les hindous. C’est le dogme principal du brahmanisme.

Genèse À la fin des années 70, je rendais quotidiennement visite à mes grandsparents qui vivaient dans une rue voisine de la mienne. La rue du Haut-Pas à Dieppe. Ils logeaient dans un appartement au premier ou au second étage : je ne sais plus. Souvent, je voyais ma grand-mère donner à manger aux oiseaux sur le bord de la fenêtre de sa cuisine. Un ensemble pour le moins hétérogène de volatiles avait pris ses habitudes et venaient quémander leur pitance chaque jour. On trouvait côte à côte pigeons, moineaux et bien sûr une mouette ; animal emblématique de la ville, assurant la bande son de la vie dieppoise. C’étaient apparemment les mêmes qui revenaient toujours et ma grand-mère leur

parlait. Elle leur faisait la conversation. Un jour, elle m’expliqua qu’en fait il ne s’agissait pas de n’importe quels oiseaux : ils étaient la réincarnation de personnes de sa famille (et donc de la mienne) qu’elle avait bien connu et qui étaient mortes il y avait plus ou moins longtemps. Évidemment leur apparence avait un peu changé, mais ils étaient pour elle reconnaissables car leurs attitudes primordiales étaient restées les mêmes. Ainsi la tante Léontine était toujours aussi pingre et revêche, l’oncle Marcel avare, l’oncle Fernand généreux et musicien, la tante Alice solide et joyeuse, Marraine mangeait toujours autant etc. etc. Elle reconnaissait ses morts qui lui rendaient visite. Elle leur faisait ses petites offrandes et tous ces oiseaux se retrouvaient prénommés. Métempsycose dieppoise. Donc apparemment, dans ma famille, nos âmes transmigrent dans des oiseaux.

Métempsycose à Chaumont Chaque tige porte à son sommet un nichoir de 15 x 15 x 20 cm. Les murs des nichoirs sont blanc brillant et le toit noir brillant. Chaque nichoir est le lieu mystérieux où s’opère la métempsycose. L’oiseau entre et sort par l’orifice prévu à cet effet. L’âme entre par le petit orifice situé à l’arrière de la maison. La métempsycose a lieu à l’intérieur dans le plus grand secret. Sur les deux autres murs carrés se trouve la photo agrandie et recadrée de la personne disparue dont l’âme est dans l’oiseau. Disposer la photo sur le nichoir permet aussi à l’oiseau de reconnaître sa maison plus facilement, bien évidemment.

Métempsycose Jardin n° 1 festival internationnal des jardins Chaumont sur Loire 2010



RIVIÈRES DÉRIVÉES

Mon intérêt pour les «lignes particulières» m’a dirigé vers les représentations cartographiques des rivières et des fleuves. Je me suis alors approprié ce type de dessin, cette réalité graphique. Au cours des années 90, mes pérégrinations dans l’univers du dessin m’avait amené à pratiquer le gribouillage intensif, et autres tracés rapides, spontanés et désinvoltes. La première exposition de Cy Twombly au Centre Pompidou en 1988 m’avait profondément marqué. L’association de ces deux types de dessin (gribouillage et topographique)l’un guidant l’autre, est la base de ce travail sur papier. Les rivières se dérivent et leur parcours devient irrationnel. On est en présence d’une pathologie topographique dont d’autres aspects seront étudiés ultérieurement.

Rivière dérivée dessin 100 x 70 cm 2009

Rivière dérivée Dessin 100 x 70 cm 2008



ABÉCÉDAIRE Cet abécédaire est un livre d’artiste. L’idée est de prendre le contrepied de ce qui est proposé dans ce type de livre . Cet ouvrage est usuellement destiné aux enfants qui apprennent à lire. Réaliser un livre qui n’est pas pour les enfants, faire des références à l’histoire de l’art contemporain, illustrer des mots compliqués ou des noms rares, créer des images absurdes détourne le simple et raisonnable abécédaire.

Y : Yves le Monochrome



TRANSMIGRATION Pendant les mois d’octobre et novembre 2009 j’ai entrepris de réaliser un petit livre. J’ai commencé alors à découper des oiseaux dans des magazines de mode. Ce livre s’appelle TRANSMIGRATION. Il traite de réincarnation. L’idée que des mannequins, des top models se trouvent réincarnés en petits oiseaux m’a semblé naturelle... Le jeu ici de découpage, de cadrage se fait de façon très précise. Les lignes et les formes de la photo et de l’oiseau doivent se caler, se correspondre. Il s’agit d’âmes qui se retrouvent dans un

nouveau corps et qui le vivent de façons très différentes les unes des autres. Le livre fait 100 pages (100 belles pages). Une page de titre et une page finale de signature. Reste 98 belles pages occupées chacune par un oiseau. Tout le travail est là, il ne s’agit pas d’avoir deux ou trois bonnes idées, deux ou trois découpages réussis : il en faut 98. L’exigence ne doit pas faiblir, il faut rester créatif et relancer la machine; rester surprenant. Quelqu’un m’a dit «l’avantage c’est qu’on peut en faire beaucoup et choisir les meilleurs». C’est là que je me suis aperçu que je n’en avais jeté que trois. Il faut savoir jouer le jeu.



MÉTEMPSYCOSE Le livre Préambule Comme je l’expose sur mon blog « Le Vol du Variable », mes préoccupations depuis juin 2009 tournent autour de âmes et de la réincarnation. Le jardin que j’ai installé à Chaumont sur Loire dans le cadre du festival des jardins 2010 est sur ce thème, son titre est Métempsycose. Je m’intéresse donc à la transmigration des âmes, au changement de corps après la mort, au passage de l’âme humaine dans un corps animal. Dans l’installation que je fais à Chaumont je parle de la réincarnation de ma famille en passereaux. Quarante

personnes, quarante photos de membres de ma famille décédés sont utilisées. Projet auquel vous êtes convié. J’aimerais que nous fassions un livre ensemble. Métempsycose, le livre. Auriezvous une photo d’une personne proche qui serait disparue ? Pourriez-vous me dire en quelques lignes en quel animal pensezvous qu’elle est réincarnée et pourquoi ? Voilà, ce texte et le scan de cette photo, si vous acceptez de participer et de me les faire parvenir, seront ma base de travail pour élaborer ce livre d’artiste. C’est avec un respect infini que j’aborde ce travail, qui sinon, à mon sens, n’aurait pas lieu d’être. C’est un travail qui implique une relation de confiance particulier et l’image que je vais créer sera soumise à votre approbation.

Je choisis de te faire parvenir une photo de moi enfant.

Je ne suis pas sûre que la réincarnation concerne une intervention d’une personne passée de vie à trépas. Je crois plutôt que la réincarnation est un phénomène d’incarnation qui a lieu alors qu’une personne est vivante - que c’est une projection de son énergie - et que celle-ci perdure tant que son énergie ne s’est pas éteinte, évaporée et qu’elle ondoie encore. Les principes physiques de l’Univers, la nature du temps, 80% du fonctionnement de notre cerveau et la logique de cause à effet nous échappe - ce que nous ne pouvons même commencer à concevoir, à percevoir, tout cela doit exister malgré notre incompréhension. Et si la nuit, chacun dans son sommeil, avait la possibilité de se dissocier de son corps et de se projeter dans l’univers. Et si parmi toutes les errances nocturnes, il arrivait parfois de traverser le temps et de tenter d’y interagir. La vacuité d’une vie laissant place à l’intention d’une autre. Une visite intersidérale, intemporelle. Ces déplacements ne peuvent être romantiques. Ils ne peuvent être paisibles. Ils sont des expériences périlleuses et violentes qui offrent parfois des moments d’heurts...

Métempsycose...

État de celui qui est projeté dans un rapport particulier dans l’avenir? Ou État de celui qui reconnaît avec familiarité la visite ?

Moi à 10 ans, je crois avoir été un chat. Moi à 50 ans, je me tiens dans mon salon avec moi, enfant, dans la peau d’un chat.



Biographie Philippe Caillaud Né en 1960 à Sainte Adresse (Seine Maritime) Vit à Fontenay-le-Comte (Vendée) Formation Ecole normale supérieure (Cachan) 1980-1984 Diplômes Capet d’Arts Appliqués Maitrise d’esthétique Agrégation d’arts plastiques Expositions 1984 Galerie Montador, Dieppe. 1986 Centre Culturel Italien de Casablanca. 1989 “Artistes à suivre” Magazine Eighty n° 33 1990 – 1991 Exposition itinérante en France organisée par le magazine Eighty, Le Blanc, Lorient, Saintes, Paris, Caen, Nîmes, Lille, Metz. 1992 “Les bleus de l’enfance” Galerie Herold, Bruxelles. “Jouets d’artistes” Galerie Le Cercle Bleu, Metz. Galerie Traje, Besançon.

1993 “Papiers peints”, Galerie Le Carré, Lille.

2010 “Daumankino-thumbcinema”, Londres. “Métempsycose”, jardin n°1, Festival des jardins de Chaumont sur Loire. “Abriter les papillons”, jardin du Muséum d’Histoire Naturelle de Nantes. “Papillonnages”, Caclb Centre d’Art Contemporain du Luxembourg Belge.

1994 Château-Musée de Dieppe. Galerie Art Action, Roubaix. “Holidays in Rochester”, The Gallery Kiad, Rochester.

Publication : Illustration de “Ce que disait l’homme qui n’aimait pas les oiseaux”, Christian Bobin. Ed. Brandes, 1994.

The Herbert Read Gallery Kiad, Canterbury. The Gallery Kiad, Rochester. Le Bateau Feu, Dunkerque. Maison de la Faïence, Desvres. “60 collages”, École d’art de Besançon. “Mail Art”, Galerie Traje, Besançon.

1995 Portes ouvertes des ateliers d’artistes, Conseil Général du Nord. 2001 Maison Billaud. Fontenay-le-Comte. 2005 “La légèreté”, Galerie Pixi, Paris. 2006 Cartavenezia, Venise. “Schmetterlingen” Galerie BBK, Oldenburg. 2007 “Lâchés dans la nature”, Viry Châtillon. 2009 “Abriter les papillons” jardins du Muséum d’Histoire Naturelle de Toulouse.



philippe caillaud

50 rue du dĂŠsert 85200 Fontenay le Comte 02 51 51 08 42 06 88 77 67 56 mail philippe.caillaud@free.fr site philippe.caillaud.free.fr blog levolduvariable.blogspot.com


Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.