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Si tu vas à Rio Jusqu’au Mondial au Brésil, le 12 juin, « Le Monde » dresse le portrait d’un joueur atypique d’une des 32 sélections. Premier de la liste, l’Anglais Rickie Lambert. P A G E 6

Oxygénation Le Centre de lutte contre le cancer Léon-Bérard de Lyon propose à certains patients un programme original qui associe marche nordique et nutrition. P A G E 6

Alors on danse A 34 ans, Dedson est toujours un des maîtres du hip-hop. Après 2003 et 2007, il tentera de conquérir un troisième titre au festival Juste debout à Bercy, dimanche 2 mars. P A G E 3

L’ogre Zlatan Zlatan Ibrahimovic n’est pas rassasié. Avec 37 réalisations, le géant suédois du PSG est le buteur le plus gourmand d’Europe. Et dimanche 2 mars, lors du « clasico» face à l’OM, l’attaquant aura encore un gros appétit. P A G E S 4 - 5

WILLIAM BEAUCARDET POUR « LE MONDE »

Nazarésurfe sur la vague Lapetite cité portugaise est devenuela nouvelleterre sainte des surfeurs depuis que l’Américain GarrettMcNamara y dompteles plushautes vagues du monde

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l y a longtemps, Nazaré était connue comme un site religieux au Portugal.Au XXe siècle, c’est devenu un lieu de tourisme. Et maintenant, sur les tee-shirts vendus là-bas, on voit McNamara sur la vague», raconte Marco, un chauffeur de taxi lisboète. En domptant il y a trois ans la vague la plus haute jamais mesurée (23 mètres), l’Américain Garrett McNamara a transformé la petite cité balnéaire portugaise de Nazaré en nouvelle terre sainte du « big wave surfing». «Je ne surfe pas pour les records, j’essaie surtout de faire connaître Cahier du « Monde » N˚ 21498 daté Samedi 1ermars 2014 - Ne peut être vendu séparément

l’endroit », explique le nouveau prophète de Nazaré. Cet hiver, riche en tempêtes, le Brésilien Carlos Burle et le Britannique Andrew Cottonontégalementjouéles apôtressurdesmontagnesliquidesapprochant les 30 mètres de haut. Cet afflux de chasseurs de vagues est une aubaine pour les élus locaux qui voient Nazaré devenir attractive, même hors saison touristique. «Ces vagues et ce lieu sont la huitième merveille du monde », décrit son meilleur ambassadeur, Garrett McNamara, qui a reçu la médaille Vasco de Gama. p P A G E 8

Garrett McNamara à Nazaré. FRANCISCO LEONG/AFP


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SPORT & FORME

à vos marques

Vive les vélodromes!

chronique

Paul Smith

P

Couturier

rends garde, Jason Kenny ! Prends garde à tes trois médailles d’or olympique ! La France vient de se doter d’un centre d’entraînement cycliste avec un vélodrome tout neuf où les pistards au maillot tricolore vont pouvoir développer leurs talents. Très sagement, la Fédération française a pris note du succès de la British Cycling à Manchester et décidé de suivre l’exemple. La Fédération espère manifestement que le Vélodrome national de Saint-Quentin-en-Yve-

lines fera pour le cyclisme français ce que le centre technique de Clairefontaine a accompli depuis les années 1990 pour le football hexagonal en formant plusieurs générations de champions. C’est ainsi que va le sport aujourd’hui, développant des méthodes scientifiques pour améliorer les performances et concentrant au même endroit les meilleurs athlètes afin de pouvoir les suivre de près. Pour moi, la simple ouverture d’un nouveau vélodrome est en soi une heureuse nouvelle. Je me souviens de la première fois où, enfant, j’avais pédalé sur une vraie piste, à quel point j’étais à la fois nerveux et excité. On ne m’avait pas vraiment donné d’instructions, mais j’ai fini par arriver à monter tout en haut du bord extérieur de la courbe, et j’en ai éprouvé une sensation merveilleuse. C’était une piste en plein air de 400 mètres, en béton, très différente des pistes couvertes en bois et aux normes olympiques que l’on construit aujourd’hui.

Mes héros, Coppi et Anquetil Avant de pouvoir m’élancer sur ce vélodrome, j’avais dû économiser pour m’acheter un vrai vélo d’entraînement. Pourvu d’un cadre doré, il avait été fabriqué par une petite entreprise de Derby, Mercian, et j’en étais très fier. Au cours des dernières années, j’ai eu l’occasion de dessiner des cadres originaux pour cette entreprise et, l’an prochain à cette même

période, un vélodrome flambant neuf sera inauguré à dix minutes de l’usine où les cadres sont toujours produits à la main. Un jour que j’étais en voyage d’affaires à Milan, je suis allé visiter la piste Vigorelli, ouverte en 1935, qui fut le témoin des exploits de quelques-uns de mes héros, comme Fausto Coppi ou Jacques Anquetil. Ce vélodrome n’a accueilli aucune course depuis des années – il est utilisé, croyez-le ou non, par l’équipe milanaise de football américain –, mais il fait l’objet d’un projet de revitalisation, à l’image de la restauration réussie d’Herne Hill, le vélodrome londonien qui servit pour les Jeux olympiques de 1948. Il est peu probable que ces pistes soient de nouveau utilisées pour des compétitions de haut niveau, mais ce sont des endroits irremplaçables où les tout jeunes peuvent s’initier aux techniques du cyclisme sur piste. Environ un demi-siècle après avoir pédalé pour la dernière fois sur une piste, j’ai eu l’occasion l’année dernière d’effectuer quelques tours sur le vélodrome de Manchester. Cette fois-ci, on me prodigua un certain nombre de conseils. Mais il y avait une autre différence. Sir Chris Hoy, sextuple médaillé d’or olympique, se trouvait dans la grande tribune et m’observait en attendant de commencer sa séance d’entraînement. Ai-je ressenti comme une pression, à votre avis ? p (Traduit de l’anglais par Gilles Berton.)

OMAR MARTINEZ/MEXSPORT

4 338 000 C’est, en euros, le total des primes versées par la Russie à ses 68 athlètes médaillés aux Jeux de Sotchi. A ce classement, les compatriotes de Vladimir Poutine dominent largement le Canada, où les 90 médaillés (hockey et curling ont gonflé les effectifs) se sont partagé 873 500 euros. Avec 410000 euros, les Français arrivent en 11e position. Quant aux 39 Norvégiens, ils n’ont pas vu l’argent de leurs médailles. A l’instar de la Suède, de la Grande-Bretagne et de la Croatie, aucune prime n’était prévue pour leurs exploits.

Agenda Samedi 1er mars

Rugby Toulouse n’a plus droit à l’erreur. Battus sur leur pelouse par Montpellier lors de la 17e journée, les coéquipiers de Clément Poitrenaud (photo) sont sortis du Top 6. Pour espérer disputer la phase finale du Top 14, les hommes de Guy Novès doivent écraser Perpignan. Mais les Catalans ont aussi du répondant. Raffut ! (20 h 30, Canal+ Sport.) (PHOTO : AFP)

Dimanche 2 Basket Le fameux derby de la côte est en NBA aura bien

lieu. Les Bulls de Chicago, emmenés par le Français Joakim Noah, affrontent les Knicks de New York. Un beau duel en perspective entre les deux franchises (19 heures, BeIN Sports 2). Handball Lorsque Montpellier rencontre le PSG, c’est toujours une finale avant l’heure. Les deux ténors du petit ballon vont s’envoyer des missiles pour décrocher leur ticket en quarts de finale de la Coupe de France. Qui, de William Accambray pour le club languedocien ou du Parisien Luc Abalo, aura le dessus? L’affiche fait saliver (20 h 45, Canal+ Sport). Football C’est notre clasico à nous ! Marseille se déplace au Parc des Princes, en match de clôture de la 27e journée de Ligue1. Même si le match n’a pas la saveur d’antan, on s’installera confortablement dans son canapé pour le suivre. Au Vélodrome, le match aller avait tenu ses promesses en termes d’intensité: victoire des Parisiens (2-1). Esprit de revanche? Oh, peuchère… (20 h 45, Canal+.)

Mercredi 5 Football Le match paraît disproportionné entre l’Allema-

A vos arcs, prêts, tirez!

Les meilleurs archers de la planète ont rendezvous à Nîmes. 400 athlètes de 42 nationalités sont attendus dans la cité gardoise jusqu’au dimanche 2 mars pour les championnats du monde en salle de tir à l’arc. C’est la deuxième fois que la ville accueille cet événement

depuis 2003. Pour les émules de Guillaume Tell, ces Mondiaux constituent la première étape vers les Jeux de Rio en 2016. A l’instar des spécialistes du skicross à Sotchi, les Français ont déjà réussi un triplé olympique avec leurs flèches. C’était aux JO de 1900 et de 1908. p

l ’ h i s t o i r e

Le Barça victime d’un pharmacien Sandrine Morel Madrid, correspondance

S

i le Barça avait su les conséquences de son silence – la démission de son président, l’inculpation du club par la justice espagnole, la nécessité de verser 13 millions d’euros au fisc –, il n’aurait sans doute pas dédaigné la lettre de son socio (supporteuractionnaire) Jordi Cases. Tout le monde en Espagne connaît désormais ce pharmacien catalan qui, à l’automne 2013, a écrit aux dirigeants du club pour leur demander des explications sur le montant du transfert de la star brésilienne Neymar. Mais le grand FC Barcelone ne pouvait pas imaginer jusqu’où irait l’« affaire ». Lorsque, le 3 juillet 2013, la perle de 22 ans arrive au Camp Nou, le club est en fête. Officiellement, le transfert a coûté 57,1 millions d’euros. Mais, dans la presse, on parle aussi de 40millions d’euros versés à la société du père du joueur. Devant le refus du club de donner des explications, Jordi Cases décide de déposer plainte, le 5 décembre, contre le président du Barça, Sandro Rosell, pour « appropriation indue», l’équivalent d’un abus de bien social. La justice se saisit du dossier, convoque les diri-

geants, demande les comptes des trois dernières années, analyse les versements. L’étau se resserre autour du club et de son président. Elu en 2010 à une large majorité, Sandro Rosell accumule les succès : la dette du club est réduite à 230 millions d’euros, le Barça remporte la Ligue des champions en 2011 et deux championnats d’Espagne en 2011 et 2013. Mais il est aussi critiqué pour avoir introduit un sponsor privé, Qatar Airways, sur un maillot jusque-là réservé à la cause de l’Unicef. Il s’est aussi brouillé avec l’ancien président Joan Laporta, le président d’honneur Johan Cruyff et l’ancien entraîneur Pep Guardiola, parti en 2012 au Bayern Munich qui humiliera le club un an plus tard en Ligue des champions.

La « madriditis» aiguë Acculé, Rosell démissionne le 23 janvier. Il invoque l’« injuste et téméraire» plainte déposée contre lui à cause de « l’exaspération et l’envie des adversaires» du Barça. Deux jours plus tard, le nouveau président du Barça, Josep Maria Bartomeu, ancien bras droit de Rosell, admet que l’opération totale du transfert a coûté 86,2millions d’euros. Selon le nouveau président, il s’agissait « d’empêcher que se reproduise le cas di Stefano». Une référence à la vedette

argentine du Real Madrid des années 1950, qui avait d’abord été recrutée par le Barça avant de filer à l’ennemi. Car, entre-temps, une maladie se propage dans les rangs du Barça : la « madriditis» aiguë, théorie de la conspiration qui voudrait que le Real et le gouvernement central aient manigancé toute l’affaire. La justice, elle, continue son travail, et le 20février le juge de l’Audience nationale, Pedro Ruz, décide l’inculpation du club après avoir trouvé des indices d’un possible «délit fiscal». En cachant le montant réel du recrutement, le Barça aurait évité de payer 9,1 millions d’euros d’impôts. Le club clame son innocence, répète qu’il n’a « pas commis de délit fiscal » mais présente tout de même, le 23 février, une déclaration complémentaire d’impôts et paie rubis sur l’ongle 13,5 millions d’euros. Dans un communiqué, il tente une explication: en résumé, le Barça paie « en défense du club » et « au vu d’une possible divergence d’interprétation sur le montant des obligations fiscales dérivées de la contractualisation». Et le vice-président du FC Barcelone, Javier Faus, d’y aller de sa petite déclaration: « Nous avons fait tout ce que nous pouvions pour avoir Neymar. Nous l’avons, bien que cela embête quelqu’un.» p

gne et le Chili. La Nationalmannschaft accueille amicalement les Sud-Américains pour préparer la Coupe du monde au Brésil (20h 40, BeIN Sports 1). Dans le même contexte, un duel européen tout aussi disproportionné entre l’Angleterre et le Danemark. Les Three Lions, emmenés par leur buteur Wayne Rooney, comptent bien échauffer leurs pieds sur les cages danoises (20h 55, BeIN Sports 2). Golf On déchausse les crampons, on sort le club et la casquette. Sous le soleil de Floride, les as de la petite balle blanche vont se disputer le prestigieux Open de Palm Beach Gardens. Grand prince, le lauréat de l’édition 2013, Michael Thompson (photo), remet son titre en jeu. Tiger Woods, Phil Mickelson et Sergio Garcia sont en embuscade pour le lui ravir (21 h 15, Eurosport). (PHOTO : GETTY IMAGES)

Jeudi 6 Tennis Après sa victoire au Tournoi de Rio, Rafael Nadal

continue tranquillement sa tournée américaine. Cette fois, c’est en Californie, au Masters d’Indian Wells, qu’il compte surprendre ses adversaires. Tenant du titre, il fait figure d’homme à abattre pour Novak Djokovic, Roger Federer, Andy Murray et consorts. Une position qui ne déstabilise guère le numéro 1 mondial. Vamos ! (19 h 30, BeIN Sports 2.) Football Test capital pour nos Bleus, qui reçoivent les vicechampions du monde bataves au Stade de France. Heureusement, le match n’est qu’une répétition générale avant la grand-messe du football mondial. Arracher une victoire à domicile face aux Pays-Bas serait de bon augure. Mais rien n’est encore fait (22 h 15, Eurosport).

Vendredi 7 Athlétisme Sortez vos disques, javelots et marteaux. Les

championnats du monde en salle commencent à Sopot, en Pologne. Et l’on est dans les starting-blocks. Le champion du monde du triple saut, Teddy Tamgho, est toujours éloigné du tartan à cause de sa fracture au tibia. De même que notre Sergueï Bubka national, Renaud Lavillenie. Après avoir pulvérisé le record du monde du tsar ukrainien à 6,16m, le perchiste a chuté à 6,21m. Ce qui lui a valu quelques points de suture au talon… et un forfait pour ces Mondiaux (18h 30, Eurosport).


portrait

SPORT & FORME

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Champion de «battle» danse

Dedsonest un maître dans sa discipline: les «combats» de hip-hop. Jusqu’au dimanche 2 mars, il dispute à Bercy le prestigieux tournoi Juste debout

Rosita Boisseau

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l s’installe au soleil sur l’escalier du studio de danse de la cité Véron, à Paris. Pique-nique sur le pouce, « une tortilla faite maison par une copine espagnole », et le plein est fait. Silhouette juvénile, agilité d’acrobate, bonne humeur décontractée, le hiphopeur Dedson, 34 ans, a tout du bon compagnon de travail et de danse. Champion de battle, ces « combats» de danse qui essaiment dans le monde entier, collectionneur de tous les titres prestigieux dont la Battle of the Year, en 2001, en Allemagne, et le Keep on Dancing (KOD), en 2011, en Chine, il possède la gentillesse et la modestie de ceux qui connaissent la vie et la musique. A une semaine de la compétition internationale Juste debout, qu’il a déjà gagnée en 2003 et 2007, Dedson répète un show qu’il doit danser à Doha (Qatar), avant de rappliquer in extremis pour les dernières sélections qui commencent vendredi 28 février au Petit Palais. Près de 600 danseurs en lice pour une sélection serrée de 19 équipes de deux. Si son entraînement habituel est un peu bousculé, pas de quoi stresser cet homme membre depuis 1996 – il avait alors 16 ans – du légendaire collectif hip-hop français Wanted Posse. « Je danse depuis que j’ai 7 ans et j’ai toujours fait très attention à mon corps, explique-t-il sereinement. Je ne l’ai jamais brusqué ou mis dans des situations trop risquées. Je ne me suis jamais blessé et je n’ai pas de fragilité physique particulière. Je suis prêt à faire des compétitions tous les jours ! » Et hop !, le voilà quelques minutes plus tard en train de faire un salto avant, puis arrière, en se jouant des codes des arts martiaux asiatiques. Une semaine avant chaque championnat, Dedson enclenche un programme d’attaque strict. Hygiène de vie d’abord : un maximum de sommeil – au moins huit heures –, trois repas par jour, beaucoup d’eau et pas de sorties en club. « Je veille aussi à minimiser le stress en gérant au mieux les imprévus quels qu’ils soient pour ne pas être parasité.» En studio, Dedson privilégie des entraînements doux pour commencer sa journée. « Je n’ai jamais été violent avec mon corps, je prends le temps de le préparer tranquillement depuis toujours.» Une heure de mise en jambes – il lui fallait quatre heures il y a vingt ans – pour six heures de répétition en moyenne.« Mon échauffementde base, très lent, est plus proche du tai-chi, qui relie chaque mouvement, que du hiphop, raconte-t-il. Je prépare le corps dans son ensemble pour être réactif quoi qu’il arrive et je travaille aussil’endurance.Parallèlement,je travaille avec

mon partenaire pour tester de nouvelles combinaisons de pas susceptibles de fonctionner sur n’importe quelle musique.» Pour le Juste debout, avec son acolyte Boubou Soumare, il enchaînera, si tout va bien, trois jours de compétition, jusqu’à la finale dimanche 2 mars à Bercy. Près de 13 000 spectateurs sont attendus pour ce dernier événement organisé dans l’enceinte parisienne avantsa fermeturepourtravaux.Si chaque passage de danse ne dure que trente secondes pour chacun des danseurs du duo, il implique un investissement top chrono maximal pour ne pas rater le coche. « Au-delà de la préparation physique, il faut être prêt mentalement pour se lancer, rappelle Dedson. Le seul changement avec le temps et l’âge c’est que les phases de récupération sont plus longues, mais tout va bien jusqu’à présent.» Dedson est l’un des rares trentenaires à concourir pour le Juste debout. Loin d’avoir peur d’affronter la jeunesse à la pointe des tendances de la mode, il fonce. « S’il continue depuis plus de vingt ans, ce qui n’est pas le cas de tout le monde dans ce métier, c’est qu’il est non seulement un excellent danseur mais aussi quelqu’un qui reste dans le coup !, s’exclame Bruce Ykanji, fondateur et organisateur de Juste debout, qui le connaît depuis qu’il a 13 ans. C’est un danseur intemporel, très aimé et respecté par son milieu, où il a influencé beaucoup de monde. Il se tient aussi toujours au courant des dernières tendances de la mode, ce qui compte beaucoup dans la culture hip-hop.»

« C’est un danseur intemporel, très aimé et respecté par son milieu, où il a influencé beaucoup de monde » Bruce Ykanji

fondateur du Juste debout Surnommé « le chat » à cause de sa danse féline et de sa façon « de passer du sol à la verticale sans qu’on s’en rende compte », dixit Bruce Ykanji, Dedson, expert en breakdance (style acrobatique au sol) depuis l’âge de 15 ans, a su enrichir cette spécialité d’un éventail de danses dites « debout ». Il épate par sa gestuelle sans cesse inventive, terriblementévidente dans sa virtuosité. Fluide, liquide même, son « flow » entrelace les pas les plus complexes et casse-cou dans une même énergie. Sa signature : les glissades sur un genou enavant. Mais, plusglobalement,il pos-

Dedson au festival Juste debout, en mars 2013 à Bercy. DOMSHINE HOMARDPAYETTE

Dates 2002

sède un délié limpide qui auréole son hip-hop d’une beauté chorégraphique haute définition. « J’aime faire évoluer ce que j’apprécie particulièrement dans ma danse », affirme-t-il. Dedson est le nom de scène de Ndedi Ma-Sellu. Sa mère a quitté le Laos pour des raisons politiques dans les années 1970 ; son père, originaire de la Sierra Leone, où il est actuellement professeur d’université,est venufaire ses études à Paris. Dedson, qui a un frère aîné plus âgé de deux ans, se souvient avec acuité et joie de sa prime enfance « dans un petit studio qui donnait sur la tour Eiffel ». Installée en banlieue parisienne, à Noisy-le-Grand (Seine-SaintDenis), la famille se réduit bientôt à la mère et au frère. Le père, créateur du premier dictionnaire anglais-mende (langue de la Sierra Leone), est retourné au pays, où il a survécu à la guerre civile. Un épisode de la vie sur lequel Dedson, père d’un petit garçon de 5 ans, ne s’étend pas. Comme nombre de hip-hopeurs de tous les pays, Ndedi et son frère se convertissent à la danse en regardant les clips à la télé et en imitant les pas des danseurs américains. Ils commencent à chorégraphier de petits shows. « C’est la musique surtout, pop et rock d’abord, qui m’a amené à la danse, glisse Dedson.C’est toujourselle qui me guide dans le mouvement. » Introduit par un ami de son frère dans le tout jeune collectif Wanted Posse, il commence à répéter avec eux et intègre le groupe, qui vient de fêter à la Grande Halle de la Villette ses vingt ans de carrière et de

succès. « Nous sommes des amis avant tout, précise-t-il. Lorsqu’on fait des fêtes, l’ambiance est très familiale. Il y a les enfants des uns et des autres. Nous sommes plus d’une trentaine à constituerles Wanted Posse.Et nous nous sommes tous construits et fait connaître ensemble.» Epaulé par les Wanted, Dedson court les compétitions dans le monde entier. Il a décroché des trophées dans les quatre championnats qui composent le Grand Chelem hip-hop : Battle of the Year (Allemagne), KOD (Chine), Dance Delight (Japon) et Juste debout. « En montant sur le podium de chacune de ces manifestations, j’ai réalisé mes rêves d’enfance », glisse Dedson, qui est aussi régulièrement invité comme juré dans certaines battles. Parallèlement,il participeà des spectacles, des shows télévisés, des comédies musicales. Il donne aussi des cours et aime enseigner. « Sans doute quelque chose que je tiens de mon père », observe-t-il. Intermittent du spectacle, parrainé par des marques comme Lotto, Jordan ou Puma, il se situe dans la catégorie des « danseurs privilégiés qui gagnent bien leur vie ». Mais n’en dit pas plus. S’il gagne le Juste debout – 1 000 euros à la clé –, ce n’est pas pour l’argent mais « pour la visibilité que cela donne ». Dans quelques semaines, à la demande de Thierry Mugler, Dedson va écrire un tableau en solo du show Mugler Follies, actuellement à l’affiche du Théâtre Comédia, à Paris. Une séquence rien qu’à lui qu’il savoure à l’avance. p

Bruce Ykanji organise, dans un gymnase de Champs-sur-Marne (Seineet-Marne), une rencontre d’interprètes hip-hop experts en danses dites «debout». Près de 330danseurs participent à la première édition du Juste debout.

2004

2400passionnés du monde entier au stade Coubertin, à Paris. Le jury prend aussi une couleur internationale avec des spécialistes japonais.

2008

Septième édition du Juste debout au Palais omnisports de Paris-Bercy. La compétition devient la battle de danses « debout » la plus courue de la planète et un tremplin pour les hip-hopeurs.

2013

Des records sont battus. 144interprètes sont sélectionnés parmi 4500 candidats dans quinze pays pendant un an.

2014

Dernière session à Bercy avant les travaux. Le Juste debout attend 13000 spectateurs.


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récit

Zlatan Ibrahimovic célèbre l’un de ses quatre buts en Ligue des champions face à Anderlecht au stade Constant Vanden Stock à Bruxelles, le 23 octobre 2013. JOHN THYS/AFP

Zlatan en dix actes football

Depuis qu’il a débarquéen France,Zlatan Ibrahimovics’est imposé comme l’acteur principal d’un championnatqu’il écrase de son talent. A la veille du clasico contre l’OM, dimanche 2mars, retour surles coups d’éclats du géant suédois, numéro10 du PSG

S Rémi Dupré

Le meilleur buteur en Europe Zlatan Ibrahimovic

PSG. 37 buts en 36 matchs depuis le début de la saison.

Cristiano Ronaldo

Real Madrid. 36 buts en 33 matchs.

Diego Costa

Atletico Madrid. 27 buts en 36 matchs.

Sergio Agüero

Manchester City. 26 buts en 25 matchs.

Lionel Messi

FC Barcelone. 26 buts en 29 matchs.

i j’avais joué en Angleterre, j’aurais tout détruit, comme je l’ai fait partout où je suis passé.»Ce23février,ZlatanIbrahimovic vient de signer son deuxième triplé de la saison en Ligue 1 sur la pelouse de Toulouse (4-2). Alors, quand on demande au géant suédois après le match si lechampionnatdeFrancen’estpasunpeusousdimensionné pour lui, la réponse est à son image, démesurée. Force est de constater que l’attaquant suédois ravage tout sur son passage depuis son arrivée au Paris- Saint-Germain, en juillet2012. A32 ans,ZlatanIbrahimovicréalisesans doute sa meilleure saison. Avant le clasico contre l’Olympique de Marseille, dimanche 2mars, au ParcdesPrinces,oùilferatoutpourfairedenouveau trembler les filets, « Ibra » a déjà inscrit 37 buts en 36 matchs disputés depuis le début de la saison. Une efficacité qui permet au numéro10duPSGd’occuperlapremièreplaceduclassement des meilleurs buteurs européens, devant le Ballon d’or 2013, Cristiano Ronaldo, auteur de 36 réalisations avec le Real Madrid.

Dix, c’est aussi le nombre de buts marqués par Zlatan en Ligue des champions. Dix, comme les actes qui ont marqué le parcours fracassant du colosse (1,96 m) à Paris.

2septembre 2012 En27 secondes, la machine est lancée

18juillet 2012 «Je ne connais pas la Ligue 1 maisla Ligue 1 me connaît»

A Lille, pour le quatrième match du championnat, « Ibra » n’a besoin que de 27 secondes pour ouvrir le score, réaliser son deuxième doublé et offrir sa première victoire de la saison à son nouveau club. Talonnades ingénieuses,déviationsconstructives,précieuseconservation de balle : la machine à « zlataner » est lancée. Plus rien ne l’arrêtera.

L’auditorium du Parc des Princes est plein à craquer. Les premières paroles de la nouvelle recrue suscitent l’hilarité des journalistes: « Je ne connais pas la Ligue 1 mais la Ligue 1 me connaît. » Première star internationale à être tombée dans l’escarcelle des recruteurs du PSG version qatarie, Zlatan Ibrahimovic affiche d’emblée la couleur. Il pose, souriant, aux côtés du président du club Nasser Al-Khelaïfi. Sitôt les présentations terminées, l’attaquant file au Trocadéro pour taquiner le cuir devant des caméras, puis part à la rencontre des supporteurs sur les Champs-Elysées. On s’interroge sur le montant du salaire du Scandinave, transfugeduMilanACcontre20millionsd’euros.Lié au PSG jusqu’en 2016, « Ibra » serait actuellement le deuxième joueur de Ligue 1 le mieux rémunéré(807000eurosnetmensuels)derrière le Monégasque Radamel Falcao (1,2million).

7octobre2012 2minutes pourfaire tairele Vélodrome

Pour son premier clasico au Vélodrome, Zlatan est accueilli par les sifflets de rigueur des supporteurs marseillais. En deux minutes, le colosse au catogan jette le froid sur le stade en inscrivantdeux buts venusd’une autre planète : une reprise du talon droit, puis un coup franc surpuissant décoché à une trentaine de mètres des cages adverses. Au grand dam des fans de l’OM, le canonnier récidivera lors des affrontements entre clubs ennemis des


récit

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Un clasico menacé de dévaluation

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24 février et 6 octobre 2013, portant à six matchs la série d’invincibilité du PSG face à l’Olympique de Marseille.

24novembre 2012 «Même mes enfantsjouent mieuxque vous»

A la mi-temps d’un match lénifiant contre Troyes, le Scandinave tance ses partenaires, coupables à ses yeux de ne mener que par un but à zéro. « Mêmes mes enfants jouent mieux que vous. » De retour sur la pelouse, l’attaquantsigne un doublé,et le PSGl’emporte finalement sur un score qui sied mieux à Monsieur Zlatan : 4-0. Conscient d’avoir heurté ses coéquipiersen vantantlesqualités footballistiques de ses deux fils Maximilian et Vincent, 6 et 4 ans, le natif de Malmö s’excuse platement le lendemain : « Si je suis allé trop loin, j’en suis désolé. »

30janvier 2013 «Moi, Zlatan Ibrahimovic»

« Je voulais que mon livre soit dix fois mieux queceluisurleroi[de Suède]»,expliquesimplement au Monde l’auteur pour éclaircir le succès de son autobiographie Moi, Zlatan Ibrahimovic (éd. Albert Bonniers Förlag, 2011) dans son pays au moment de sa sortie en France. Vendu à 700000 exemplaires en Suède, l’ouvrage est nominéparmiles sixlivresretenuspour leprix August, prestigieuse distinction littéraire au pays de Nobel. Paru dans quinze pays, il dépasse les 200 000 ventes en Italie, où Zlatan a passé sept saisons entre la Juventus Turin, l’Inter Milan et le Milan AC. Filsd’un Bosnienet d’uneCroate, Zlatanrelate son enfance marquée par le divorce rapide de ses parentset l’alcoolismede son père, assistant devant son téléviseur à la guerre civile dans l’ex-Yougoslavie. « Dans le centre de Malmö, on sentait la différence entre les Suédois et les étrangers pour le football. Pour jouer dans l’équipe première, je devais me démarquer et être dix fois meilleur. Car je ne m’appelais ni Anderssonni Svansson.Mon nomest Ibrahimovic », confie-t-il au Monde (daté du 31 janvier 2013). L’occasion de donner sa propre définitionduterme« zlataner», entré dansle diction-

naire suédois : « Je pense que zlataner signifie “dominer”. Dans un sens bénéfique et positif, je l’espère. C’est faire quelque chose d’acrobatique, de différent, d’impossible. Cela peut avoir beaucoup de synonymes. »

2avril 2013 «Ce lâche de Guardiola»

Dans son autobiographie, le joueur fustige celui qui fut son entraîneur lors de son passage raté à Barcelone en 2009-2010, « ce lâche de Guardiola ». Autant dire que le Suédois est très très motivé lors de la venue du Barça au Parc des Princes, en quarts de finale aller de Ligue des champions. Initialement suspendue pour ce choc européen, la star parisienne voit sa sanction allégée grâce à un vice de forme. Auteur d’un but rageur et d’une remise de la tête décisive, « Ibra » permet au PSG d’arracher le nul (2-2) dansson antre.Aumatchretour,l’attaquant croit que son nouveau but va permettre à son club d’éliminer son ancienne formation. Las. L’égalisation de Pedro met un terme aux espoirs d’« Ibra » de soulever la coupe aux grandes oreilles avec Paris.

12mai 2013 «Devi semprerovinare tutto»

Le regard noir, « Ibra » reproche, en italien, à Leonardo de « toujours tout gâcher ». Dans les vestiaires du stade de Gerland, ses coéquipiers célèbrent leur titre de champion de France après leur victoire (1-0) face à l’Olympique lyonnais. Le buteur du PSG est furieux : son directeur sportif l’a empêché de profiter pleinement de l’euphorie collective en ne prévoyant pas d’« escorte» du club pour l’accompagner à un contrôle antidopage après la rencontre. « Je suis resté vingt minutes tout seul, tempête l’attaquant. Je ne pouvais pas sortir. »

19octobre2013 «Mon père me laissait regarder Bruce Lee»

Zlatan attaque sa deuxième saison en France en changeant de sport. D’une impressionnante reprise aérienne du talon, « Ibra » inscrit son plus beau but au Parc des Princes contre Bastia

(4-0). «Il est très bien classé dans la hiérarchie de mes buts », glisse-t-il, narquois, après la rencontre. Ceinture noire de taekwondo à 17 ans, l’attaquant puise dans sa maîtrise de cet art martial pour multiplier les réalisations spectaculaires. «Mon père me laissait regarder Bruce Lee, Jackie Chan, explique-t-il au Monde dans son entretien. J’ai grandi dans cet univers-là, et j’adore donner des coups de pied haut. C’est mon style.»

23octobre2013 «J’en avais la chair de poule»

«Ibra»enfrémitencore.StadeConstant-Vanden-Stocke.Lessupporteursd’Anderlechtréservent une ovation à l’attaquant du PSG. « J’en avais la chair de poule », lâche-t-il à la fin du match. En phase de poules de Ligue des champions, il vient à lui seul de pulvériser le club belge. Quatre buts dont un missile flashé à 115 km/h dans la lucarne du portier Thomas Kaminski. Le malheureux, qui fêtait ce jour-là ses 21 ans, avait imploré la pitié du géant suédoisavantlarencontre:«Jelanceunappel:Ibrahimovic, s’il te plaît, épargne-moi d’un but de classe mondiale.»

18février «Qu’“Ibra” marque des buts, çan’est pas étonnant»

Laurent Blanc, l’entraîneur du PSG, est d’humeur badine. Son équipe vient d’écraser le Bayer Leverkusen (4-0), en Allemagne, en match aller des 8es de finale de la Ligue des champions. Et son attaquant suédois n’y est pas pour rien. Auteur d’un doublé et à l’origine des deux autres buts de son équipe, « Ibra » fait taire les critiques qui pensaient qu’il n’était plus aussi décisif dans les joutes européennes à partir des matchs à élimination directe. « Qu’Ibra marque des buts, ça n’est pas étonnant.Il fallaitoser le remettreen question, ironise Laurent Blanc après la rencontre.La meilleure réponse qu’il pouvait donner, c’est sur le terrain aujourd’hui. » Grâce aux neuvième et dixième buts du Suédois en Ligue des champions, le PSG peut attendre tranquillement le match retour, le 12 mars, au Parc des Princes. Et «Ibra » peut réfléchirà d’autresfigures originales pour continuer « à tout détruire». p

ttaques par médias interposés, provocations incendiaires: depuis plus de vingt ans, un antagonisme artificiel et folklorique rythme le clasico, à savoir les affrontements entre le Paris - Saint-Germain et l’Olympique de Marseille. Cette époque pétrie de haines surfaites et de dirigeants chamailleurs semble aujourd’hui révolue. « La domination du PSG est acceptée par l’OM, estime Virgile Caillet, directeur de KantarSport, une agence de marketing. Dorénavant, on est dans une approche très professionnelle. Le PSG ne rentrerait pas dans ce genre de débat. L’OM n’entretient pas la rébellion. Il n’est plus nécessaire pour les deux camps de se lancer des sièges à la figure.» Avant le clasico qui clôturera la 27e journée de championnat, dimanche 2 mars au Parc des Princes, 18 points séparent le leader parisien et la formation phocéenne, qui bataille à la cinquième place. « Les deux équipes ne jouent plus dans la même catégorie», tranche Gilles Dumas, cofondateur de l’agence de marketing Sportlab. Le combat semble inégal sur les plans tant sportif qu’économique. En 2013, le PSG est devenu le 5e club le plus riche d’Europe en réalisant 398 millions d’euros de chiffre d’affaires, contre 104millions pour son rival. « Le clasico devait soit déterminer quel était le club leader dans l’Hexagone, soit préciser quelle était l’équipe française qui rayonnait le plus à l’international. Son intensité dramatique est aujourd’hui atténuée, note Virgile Caillet. La rivalité est davantage culturelle que sportive cette saison. C’est la fierté du maillot qui prévaut.» A quelques jours du clasico, de rares fléchettes ont été décochées par le camp marseillais. « Il n’y a plus de valeurs au PSG. Ils ne parlent plus que d’argent», a déclaré au magazine Surface l’Olympien Florian Thauvin, qui avait quitté Lille (sans y avoir joué une seule minute) en août 2013 pour rallier un OM plus rémunérateur. Avec l’émergence de l’AS Monaco, deuxième de Ligue 1 et présidée par le milliardaire russe Dmitri Rybolovlev, le clasico est-il menacé de dévaluation? « Le PSG est devenu l’équipe de France de la Ligue des champions. Il a quitté la Ligue 1 sans s’en rendre compte, souligne Gilles Dumas. Elle est devenue pour lui une compétition secondaire puisqu’elle est pliée. PSG-OM n’est plus le match le plus important de la saison. Les futurs clasicos seront les rencontres de Paris contre le Bayern et le Barça. Les téléspectateurs attendent avec impatience avril et les quarts de finale de la Ligue des champions.»

« Poids de l’histoire» «Ceci étant, poursuit-il, Monaco manquera toujours d’une dimension populaire. Le duel PSGASM ne peut donc pas supplanter le clasico.» Canal+ a pourtant attiré 2,04millions d’abonnés, soit une part d’audience de 34%, le 9 février, avec PSG-Monaco. Le 6 octobre 2013, la chaîne cryptée avait capté 2,6 millions d’abonnés lors du dernier clasico, remporté (2-1) au Stade-Vélodrome par une formation parisienne réduite à dix. Alors que l’OM ne s’est plus imposé face à son rival historique depuis six rencontres et un succès (3-0), obtenu en novembre2011, les dirigeants de Canal+ considèrent-ils encore la joute Paris-Marseille comme le programme phare de la saison ? « Je crois au poids de l’histoire qui est plus forte que l’actualité, glisse Karim Nedjari, directeur des rédactions sport à Canal+. PSG-OM, cela reste une concurrence entre des hommes, des affaires de vestiaires et de couloirs, le France-Bulgarie 1993, le match Denisot-Tapie. Cette rivalité n’existe pas aujourd’hui entre Paris et Monaco. » Dimanche 2 mars, Canal+ mobilisera 300 journalistes, techniciens et producteurs, et disposera 40 caméras au Parc des Princes. La chaîne espère égaler le seuil des 2,8 millions d’abonnés atteint, le 24 février 2013, lors du dernier clasico de Ligue 1 organisé dans la capitale. Ce soir-là, un certain David Beckham trottinait sous les flocons et sous les couleurs parisiennes pour la première fois. p R. D.


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SPORT & FORME

avis aux amateurs

A Lyon, la longue marche contre le cancer

SI TU VAS À RIO

PRIX « LE MONDE » - FAIS-NOUS RÊVER

Le centre Léon-Bérardpropose un programme originalmêlant sport et nutritionqui bénéficie notammentà des femmes atteintes d’un cancer du sein

Rickie Lambert, le «betteravier» des Three Lions Ancien manutentionnaire, le buteur de Southampton vient de débarquer dans la sélection anglaise à 31ans Rémi Dupré

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Séance de marche nordique dans le parc de Parilly, entre Lyon et Vénissieux, en février. HUGO RIBES POUR « LE MONDE »

Anthony Hernandez

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Lyon, envoyé spécial

vec une cadence soutenue, lesbâtonsde marchenordique se lèvent et s’abattent sur le sol. « Ils veulent se faire remarquer. D’habitude, ils ne vont pas aussi vite », plaisante Janine, 68 ans, retardataire de ce groupe d’une dizaine de marcheurs. Depuis 2010,leCentrede luttecontrelecancerLéonBérard (CLB) de Lyon propose à certains de ses patients – ceux qui ne sont pas atteints d’un cancer métastatique – un programme original, mêlant sport et nutrition. « Cela fait plusieurs années que le CLB développe une approche globale de la prise en charge des patients. Et dans ce cadre, l’activité physique et le suivi diététique ont des effets positifs sur la qualité de vie, la diminution de la fatigue et même des bénéfices en termes de survie, notamment pour les cancers du sein et du côlon », raconte Béatrice Fervers, coordinatrice du projet au sein de l’unité Cancer et environnement. Deux fois par semaine, les volontaires alternent ainsi la marche nordique avec la gymnastique douce. Grâce à ses 178 hectares, le parc de Parilly, en lisière de Lyon et de Vénissieux, est le théâtre idéal pour accueillircessportifsmotivés. «Leprogramme étale sur trois mois les 26 séances de marche. Nous nous sommes rendu compte que la plupart des patients étaient en dessous des recommandations du Programme national nutrition santé », explique le docteurJulien Carretier,partie prenantedel’expérience. Bonnet vissé sur la tête, combinaison adaptée, Serge commence « à sentir » ses mollets à mi-chemin d’un parcours d’environ quatre kilomètres et d’un effort qui doit durer uneheure. Ce jeune septuagénaire est le doyen d’un groupe composé, à son exception, exclusivement de femmes. « Le

tiers des malades reçus par le centre sont atteints d’un cancer du sein. Et la littérature médicale a montré de vrais bénéfices de l’activité physique pour cette catégorie de patientes. Elles sont en outre très en demande de soins de support », raconte Julien Carretier. Du coup, sur les 80 personnes prises en charge annuellement par ce programme, on retrouve près de 80 % de femmes qui souffrent de cette pathologie. Alors que le cancer est souvent associé à la perte de poids, une étude menée, entre 2004 et 2006 au CLB, sur 265 patientes atteintes d’un cancer du sein, a montré

« J’apprécie le partage avec les autres femmes. On se raconte nos expériences, quels que soient l’âge, la condition sociale » Caroline

67 ans

au contraire une augmentation du poids dans les six à douze mois suivant le traitement. « C’est actuellement un de nos axes de recherches. Est-ce dû à la chimio, à la baisse de l’activité physique causée par la maladie ou à la coïncidence souvent de l’âge de la maladie avec la ménopause? », s’interroge BéatriceFervers.Toujours est-il que la reprise ou la découverte d’une activité physique permet aux patients d’éviter de grossir. « On ne marche pas sur la piste. On fait attention au terrain glissant. » Attentif et jovial, Renaud Meyrand assure l’encadrementsportif.Titulaired’undiplômed’activités physiques adaptées, également moni-

teur de marche nordique, cet homme de 27 ans se félicite de l’évolution des élèves : « C’est un moyen sécurisant de mettre en mouvement des personnes qui, pour des raisons médicales, ne l’étaient plus. Au début, elles sont fatiguées au bout de trente minutes. Très vite, l’heure s’effectue sans souci.» Solidaires, les participants affichent un bon état d’esprit et une motivation à toute épreuve. « Je ne suis pas très douée mais qu’importe. L’essentiel est de bouger les épaules et le haut du corps en marchant, témoigne Caroline, 67 ans. J’apprécie le partage avec les autres femmes. On se raconte spontanément nos expériences, quels que soient l’âge, la condition sociale. On vit une grande camaraderie.» Enthousiaste, cette ancienne chercheuse multiplie depuis les occasions pour se dépenser: « J’ai acheté un stepper et j’essaie le tai-chi.» Janine, 68 ans, qui reconnaît « avoir boosté [son] activité physique», souligne le côté « ludique » et la possibilité de revenir participer au groupe après la fin du programme. Puisque l’activité physique n’est pas encore reconnue dans le cadre de l’hôpital, qu’elle n’est pas remboursée par la Sécurité sociale, le programme connaît des difficultés pour se financer. « La Ligue contre le cancer est notre principal soutien, explique Julien Carretier. Si l’on veut prendre en charge plus de patients, embaucher des professeurs, on doit trouverdes financementsextérieurs. » Motif d’espoir, le troisième plan Cancer, dévoilé par le gouvernement le 4 février, prend en compte pour la première fois le bénéfice de l’activité physique dans le traitement contre la maladie. « Nous espérons pérenniser notre programme mais sommes, malgré ce signe encourageant, encore dans l’expectative», souligne Béatrice Fervers. p Cette initiative concourt au prix « Le Monde » - Fais-nous rêver, qui vise à récompenser un projet d’éducation par le sport. Pour en savoir plus : Apels.org

ou’re living in a shit hole.» («Vous vivez dans un trou de merde.») Rickie Lambert doit encore avoir dans les tympans ce slogan scandé par les supporteurs visiteurs massés dans les tribunes miteuses du stade Spotland de Rochdale. Avec ce club de 4e division anglaise, l’attaquant trapu a fait trembler les filets à vingt-huit reprises lors de la saison 2005-2006, se forgeant une réputation alors qu’il n’était personne. Auparavant, le natif de Fazakerley avait été recalé à l’âge de 15 ans du centre de formation de Liverpool, poussé vers la sortie à Blackpool et relégué sur le banc des remplaçants à Macclesfield Town (D 4). Après ces années de disgrâce, Rickie Lambert est aujourd’hui en passe de grimper dans l’avion qui emmènera l’équipe d’Angleterre au Brésil.

Un « conte de fées » A 31 ans, le massif avant-centre de Southampton honore sa première sélection le 14 août 2013, lors d’un match amical contre l’Ecosse. D’un coup de tête rageur, il inscrit le but victorieux (3-2) seulement 166 secondes après son entrée en jeu. Le sélectionneur, Roy Hodgson, lui maintient sa confiance lors d’une rencontre qualificative au Mondial 2014 contre la Moldavie (4-0). L’ex-fine gâchette des Bristol Rovers (2006-2009), modeste club de 3e division, ne rate pas le coche. Concassant les défenseurs adverses, il délivre deux passes décisives et signe sa deuxième réalisation sous le maillot de l’équipe nationale. Il devrait connaître une nouvelle sélection, le 5 mars, à l’occasion d’un match amical face au Danemark. « Il est comme un jeune garçon avec son nouveau jouet », a déclaré le patron des Three Lions, parlant d’un « conte de fées » pour qualifier son parcours. Roy Hodgson apprécie de longue date ce buteur besogneux et rompu à la galère. Alors qu’il végète à Macclesfield Town (2001-2002), Rickie Lambert est contraint de travailler dans une usine de conditionnement de betteraves, pour 23 euros par jour, afin de compléter le maigre salaire (250 euros) que lui verse son club. « Je vissais des couvercles sur des bocaux, confiait-il au Guardian en 2013. Je travaillais en journée et m’entraînais le soir. » Ce n’est qu’à 27 ans que l’attaquant en surpoids se plie aux contraintes inhérentes au football professionnel. Recruté en 2009 par Southampton, Rickie Lambert enfile les buts et contribue à la remontée express des « Saints », passant de la D3 à la Premier League en trois saisons. A 30 ans, l’exmanutentionnaire découvre l’élite et fait les délices des habitués du Saint Mary’s Stadium en inscrivant quinze buts lors de l’exercice 2012-2013. « Je continue de penser qu’il fait partie des joueurs dont l’Angleterre aura besoin dans les prochaines années», a loué Roy Hodgson à l’automne 2013. Ses coups francs puissants et sa présence athlétique pourraient profiter aux Anglais, qui devront batailler avec l’Uruguay et l’Italie pour s’extraire d’une poule létale. p


à moi de jouer

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A bout de bras Notrereporter rêvait d’atteindre les sommets. En testantl’escalade de blocs dans un gymnase, il a découvertque la voie directen’est jamais la meilleure

David Larousserie

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ègle numéro un : regarder en haut pour ne pas se prendre un grimpeur sur la tête. Règle numéro deux : ne pas tomber bras en arrière, pour ne pas se les tordre ou les casser. « C’est déjà arrivé », prévient Steve Guillou, le jeune cofondateur d’Arkose, un espace sportif consacré à l’escalade sur blocs qui vient d’ouvrir à Montreuil (SeineSaint-Denis) dans un ancien garage. En arrivant au pied de la paroi, j’ai une petite boule au ventre. Je regarde les tapis de 40centimètres d’épaisseur qui recouvrent le sol pour me rassurer. Les fameux blocs sont des parois lisses plus ou moins verticaleset plates, de 4,5 m de haut maximum. Les murs sont recouverts de prises colorées représentant les voies à suivre. Jaune pour débuter, puis vert, bleu, rouge, violet et enfin noir : « mutant». «Va pour le jaune, qui ira mieux avec mon teeshirt rouge », me dis-je. Avant d’appliquer les deux premières règles, petit échauffement des poignets,des coudes,des épauleset ducou.Steve commence: « Les petits triangles indiquent où poser les pieds et les mains. » Ensuite, on se débrouille sans repères. « Les bras ne servent presque à rien. Ce sont les tendons qui tiennent, alors il faut garder les bras tendus le plus souvent possible», ajoute mon guide, joignant le geste à la parole, les fesses dans le vide. Facile mais pas très naturel car le débutant a tendance à se coller à la paroi et à s’agripper aux prises. J’ai d’ailleurs un souvenir douloureux d’une première séance sur voie avec cordes, où mes avant-bras se sont trouvés pétrifiés avant même d’avoir pu montrer leur force. Et dire que le couple d’amis qui veulent maintenant que je les accompagne sur les blocs est le même qui, si l’on ose dire, m’avaient poussé sur ces parois! « Pour avancer, pousser jambe droite, attraper main droite », indique Steve, qui lâche la main gauche pour montrer la belle ligne que forment le point de poussée sur la jambe droite et la prise avec la main droite. A mon tour. Avec les triangles, pas de souci. La belle ligne est, elle, un peu tordue. Les prises, encore neuves, rougissent les doigts. « Des études ont montré que les débutants ont tendance à serrer quatre fois trop fort les prises », explique Steve avec un sourire. Tant pis, je serre quand même. En suivant les indications orales, l’ascension est finalement simple. « Et maintenant ? », demandé-je, les deux mains accrochées à la dernière prise. Règle numérotrois : redescendreun peu avant de sauter. Heureusement, pas besoin de choisir la couleur, on prend tout afin de descendre d’un ou deux mètres avant de sauter pour se vautrer sur le tapis confortable (et se souvenir de la règle

numéro deux tout en espérant que les autres appliquent la règle numéro un). La voie suivante se fait seul, sans modèle. C’est plus laborieux, mais ça passe. En revanche une ascension verte me laisse impuissant au milieu : je saute, tout penaud. « On va grimper sans les mains maintenant, pour s’entraîner», lance Steve Guillou. Mon guide grimpe dans une voieen dièdreen posantles pieds surles prises mais en appuyant les deux mains sur la paroi : un coup à droite, un coup à gauche ; un coup à droite, un coup à gauche… On dirait une danse. « C’est une question d’équilibre », assure-t-il. Ce dernier ayant pour moi mystérieusement disparu à mi-pente, je saute. « Sans les mains maintenant! », ordonne-t-il. Cette fois, c’est en plus aussi une question de confiance dans l’adhérencedes chaussons. C’est à peine mieux. Pour ne pas me dégoûter, Steve m’amène sur le « champignon», un bloc au centre de la salle au-dessus duquel on peut monter avant de redescendre. Comme à Fontainebleau ou sur d’autres lieux en pleine nature qui ont

Un inventeur, pervers sans doute, a aussi créé une prise à tractions avec deux doigts seulement donné le nom de blocs à ce type d’escalade (« Sport & forme » du 1er juin 2013). Ce champignonest hallucinant.Je n’arrivemême pas à passer une voie verte ! Certes, le corps a été mis à rude épreuve, obligé à une contorsion pas très naturelle – mais que Steve justifie très bien par les lois de la physique. Il a aussi fallu mettre deux pieds sur une prise en faisant de tout petits mouvements d’un millimètre pour faire de la place. Sur mon toit du monde, j’ai du mal à descendre : pas d’échelle ni d’escalier. Sauter ? Non, « désescalader » (règle numéro trois) sur d’énormes prises noires (mais pas « mutantes»). Cette réussite verte fait sentir, y compris dans les phalanges, la diversité des techniques. Les prises jaunes ressemblent à des poignées de porte.Quand d’autres, à partir de bleu, font douter qu’une main ou un pied puisse y tenir. Il y a aussi des prises « inversées », qui tiennent mieux quand la main est en dessous qu’au-dessus. Encore une loi de la physique, vérifiée y compris à mon modeste niveau. « Il y a aussi les prises arquées », indique Steve en appuyant sur l’une d’elles à s’en tordre les phalanges. Pour varier les plaisirs, un autre exercice consistenon pas à grimper mais à faire des « tra-

versées ». « C’est la seule salle de blocs équipée comme cela en France ! », dit fièrement Steve Guillou.L’idéeest deparcourir une dizaine de mètres en largeur, tout en restant à faible hauteur. Aucun risque de vertige, mais le déplacement reste technique. Les jambes doivent se croiser, les mains aussi, et se dénouer miraculeusement. Sauf dans mon cas. Tapis ! Juste à côté se trouvece qui pourrait être le secret de ces grimpeurs : un pan de mur destiné à se muscler les doigts et les bras – ou à se les torturer. L’idée est de faire des tractions, mais au lieu de la barre habituelle, on pose ses doigts sur des réglettes en bois, pas très larges. Et on monte, une main après l’autre ou deux mains à la fois. A côté des réglettes, il y a aussi des demi-sphèresà prendre à pleine main. Je ne tiens même pas suspendu. Un inventeur, pervers sans doute, a aussi créé une prise à tractions avec deux doigts seulement. Certains pratiquants, à voir leur corps, ont dû y passer souvent. « Une partie du succès des salles de blocs vient du fait que c’est une manière moins répétitive de se muscler que dans des salles spécialisées», fait remarquer Steve. Bref, du fitness d’un nouveau genre. Le gérant de la salle insiste d’ailleurs sur les aspects conviviaux et ludiques de son activité qu’il a cherché à privilégier avec son associé Samy Camarzana. Musiqued’ambiance (aux listes choisiesparles grimpeurs) et bar-resto vont dans ce sens. La convivialité se constate aussi au pied des voies. Les visiteurs s’aident pour trouver la bonne technique ou pour secourir un grimpeur éperdu (c’est mon cas !). Ils commentent leurs exploits ou leurs échecs. « L’esprit est ouvert, pas trop compèt’», se félicite Steve. Certains, voire certaines (environ un quart de filles), sont têtus, réessayant un geste plusieurs fois en s’approchant, millimètre par millimètre, de l’objectif. Pour finir, Steve se dirige vers une autre des quelque 200voies, qui sont renouvelées en partie chaque semaine. « Jusqu’à présent, on a fait du statique. Il y a aussi du dynamique », lan-

JEAN-MANUEL DUVIVIER

ce-t-il. « Statique… mon œil ! », pensé-je en me revoyant les jambes flageolantes sur un appui ou la main tâtonnant vers une prise salvatrice. Mais quand je vois mon guide contracter ses jambes puis se jeter pour attraper une prise et pendouiller dans le vide, je saisis vite ce qu’il voulait dire par « dynamique ». Confiant, j’ai voulu essayer et n’ai même pas réussi à toucher la prise. Alors, la saisir… « Faut y croire », s’amuse Steve. Au moins, cela montre la marge de progression possible. Le lendemain, j’ai des doigts qui pèlent, les mainsrougieset les bras endoloris.Mais uneforte envie d’y retourner. p

pratique équipement

En tee-shirt et chaussons

Eviter les shorts et opter pour un pantalon long ou un pantacourt. Même si certains aiment bien rester torse nu pour montrer leurs abdos, un tee-shirt est recommandé pour éviter les brûlures en cas de chute.

Le plus important et le plus spécifique concerne les chaussons d’escalade. Il est recommandé de prendre une taille plus petite que celle de ses chaussures de ville. Il faut presque avoir mal aux pieds pour bien grimper. Mais pour les débutants, cette torture n’est pas obligatoire.

printemps et l’été, outre Fontainebleau: Ailefroide (Briançon, Hautes-Alpes) et Targassonne (Font-Romeu, Pyrénées-Orientales).

Près de 3 000 murs

Poudre de grimpette

Dans les salles de blocs, la magnésie, cette poudre qui permet d’absorber l’humidité des mains, est à disposition dans des petits sacs. Inutile donc d’avoir son propre pochon dans le dos comme pour les voies sur mur. Des brosses à court ou à long manche sont également mises à disposition pour nettoyer la gomme des chaussons restée sur les prises ou bien la magnésie sur les mains. Contrairement à l’escalade sur voies ou murs, le bloc se pratique sans corde ni baudrier.

Des amortisseurs

Le crash pad, sorte de tapis portatif, recommandé pour l’exercice du bloc en pleine nature, est inutile car le sol est

DR

recouvert de tapis très amortissants. Prévoir aussi une petite bouteille d’eau pour s’hydrater régulièrement et éviter les tendinites. où pratiquer ?

Partout en France

Les salles rivalisent d’ironie pour se baptiser : Blocbuster (Courbevoie), Antrebloc (Villejuif), Block’out (Cergy-Pontoise et Saint-Ouen, et bientôt Evry et Bercy), Hardbloc

(Alfortville), Bloc trotters (près d’Annecy), Roc en stock (Strasbourg), Ablok (Grenoble), What’s up (salles autour de Lille), Altissimo (Avignon, Marseille, Toulouse… mais pas uniquement dédiée aux blocs). A Montreuil, les fondateurs se sont démarqués avec Arkose (Arkose.com), qui est le nom d’un grès connu pour être celui du célèbre Ayers Rock, dans le désert australien. Signalons aussi quelques sites naturels pour le

La Fédération française de la montagne et de l’escalade (www.ffme.fr) recense sur son site les salles avec lesquelles elle s’est associée: 3 000 murs (pas seulement du bloc) seraient installés, et de 40 à 50 se montent chaque année. La licence de la FFME n’est pas obligatoire, mais le nombre d’adhérents a presque doublé en quinze ans (85 000 aujourd’hui). « L’escalade indoor en est le moteur

principal », constate Pierre-Henri Paillasson, directeur technique national à la FFME.

Une activité facile d’accès

Le site d’information Kairn.com, spécialisé dans l’escalade en montagne ou en salle, signale notamment les nouvelles ouvertures et les compétitions dans cette discipline spécifique. « Le bloc est à la mode car il est facile d’accès, détaille Pierre Délas, rédacteur en chef de la section escalade. On peut venir faire sa séance seul, sans avoir besoin d’un compagnon de cordée, ou au contraire partager et jouer avec les potes autour d’un passage à réussir pour trouver la méthode pour y arriver. » pour qui ?

A apprendre dès 4 ans

Les enfants peuvent commencer à grimper sur des parois adaptées à partir de 2 ans. Des cours sont possibles dès 4 ans. Les tarifs des séances varient en fonction des formules d’abonnement, ticket de dix entrées ou abonnement à l’année. Compter environ 10 ¤ par séance.


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SPORT & FORME

reportage

Garrett McNamara surfe une vague de près de 30 mètres à Nazaré, au Portugal, le 28 janvier 2013. TO MANE/BARCROFT MEDIA/ABACAPRESS.COM

Notre vague de Nazaré Depuis que l’Américain GarrettMcNamaray a domptéen 2011 la plus haute vague du monde jamais surfée, l’anciennepetite cité religieuse de la côte portugaise s’est muée en Mecque des chasseurs d’ondes géantes

surf |

Erwan Leduc

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Nazaré (Portugal), envoyé spécial

longer au fond du gouffre, Enfer ou Ciel, qu’importe ? Au fond de l’Inconnu, pour trouver du nouveau ! » Garrett McNamara a pris Charles Baudelaire au mot. Sur les plages du Portugal, le surfeur hawaïen a profité de l’abysse pour se hisser au sommet des plus hautes vagues de la planète, nées du mariage houleux de l’océan Atlantique et d’un immense canyon sous-marin. En trois ans, Nazaré, petite cité balnéaire typique de la côte lusitanienne,au nord de Lisbonne, est devenue le spot favori de ces surfeurs de « gros » en quête de leur Graal, ces vagues géantes dépassant les 20 mètres de haut. Et la Praia doNorte, autrefoisconsidéréecomme unlieu de désolation, s’est muée en une source de vie pour la ville et ses 15 000 habitants depuis qu’un fêlé s’est fendu de l’idée de dompter la bête. En surf comme ailleurs, si ce n’est pas toujours la taille qui compte, c’est elle qui a mis Nazaré sous les feux de la rampe. En 2011, la ville entre dans l’histoire du sport lorsque Garrett McNamara y dévale la plus grande vague du monde jamais surfée, mesurée officiellement à 78 pieds, soit 23 mètres.Un immeublede six étages, chambres de bonnes comprises. En janvier 2013, l’Américain récidive sur un monstre estimé à la hauteur mythique des 100 pieds, près de 30 mètres. Un record potentiel que l’hommese lasse finalement de faire valider par les autorités compétentes, préférant la laisser entrer dans la légende plutôt que s’abîmer dans un livre de comptes. « Je ne surfe pas pour les records, j’essaie surtout de faire connaître l’endroit», raconte l’intéressé, entredeux cuisses de poulet grillé englouties dans un restaurant de Nazaré, le 18 février. « Parce que ces vagues et ce lieu sont la huitième merveille du monde, insiste-t-il. Il y a des vagues géantes en Californie, en Irlande, à Hawaï, mais elles sont toutes loin des côtes. Il n’y a aucun autreendroit au mondeoù on peut en voir d’aussi grosses, ressentir leur puissance d’aussi près, tout en restant à terre… » A 46 ans, le globe-trotteur sait de quoi il parle. Garrett McNamara a écumé toutes les mers du monde pour trouver « la » vague, allant même jusqu’à surfer une onde éphémère créée par la

fonte d’un glacier en Antarctique. Mais, avant 2010, l’hiver à Nazaré n’était pas dans son agenda. « Personne ne connaissait, explique-t-il. Le seul à m’en avoir parlé, c’est Kelly Slater. Il m’avaitdit qu’iladorait y allermais pas pour surfer, seulement pour s’asseoir sur la falaise et profiter du spectacle…» La venue de McNamara doit moins au bouche-à-oreille entre initiés qu’à une volonté politique locale. En 2007, la municipalité de Nazaré se démène pour maintenir son activité économique lors de la saison basse. Le surf apparaît alors comme un moyen de faire d’une faiblesse une force, même si l’idée est loin d’être une évidence. Fière de ses traditions, Nazaré tient son nom d’une légende religieuse datant du XIIe siècle, narrant le sauvetage miraculeux d’un seigneur local par une apparition divine, la construction d’une église qui s’ensuivit, et la découvertedans une grotte d’une statue de la Vierge apportée depuis Nazareth, quatre siècles plus tôt… « Il y a longtemps, Nazaré était connu comme un site religieux au Portugal. Au XXe siècle, c’est devenu un lieu de tourisme. Et maintenant, sur les teeshirts vendus là-bas, on voit McNamara sur la vague », explique Marco, chauffeur de taxi lisboète dont la femme est originaire de la région de Nazaré. « Ces vagues n’avaient jamais intéressé grand monde», se souvient Pedro Pisco, qui a piloté le projet « Praia do Norte » depuis sa création jusqu’en 2013. La mairie opte pour une stratégie ciblée: le casse-cou en chef Garrett McNamara est invitépar la Ville pourtester le spot, avec l’espoir qu’il porte ensuite la bonne parole. Un pari risqué. « Certains pensaient que nous faisions surtout la promotion de Garrett, au lieu de faire celle de la ville », précise Pedro Pisco. « Les deux premières années, les gens m’ont pris pour un fou, se souvient le surfeur. Puis, la troisième année, ils ont vu que je n’étais pas mort, que j’avais une équipe en place, que je travaillais avec les locaux…» Bénie soit la vague, loué soit son prophète, cet Hawaïen qui glisse sur l’eau, au grand bonheur des pèlerins qui affluent de partout. « La semaine dernière, j’ai croisé des gens venus en voiture depuisIsraël »,souritPedroPisco. « Lesgenss’installent par centaines sur la falaise et crient comme dans un stade, confirme le surfeur portugais HugoVau.Le surfest entraindedevenirledeuxième sport au Portugal, derrière le football.»

Au grand bonheur des élus locaux, qui voient leur cité drainer un public de non-surfeurs, attirés par le spectacle. « En été, le tourisme est fondamental pour Nazaré. Le surf nous a permis de devenir attractifs même en hiver », se réjouit le nouveau maire Walter Chicharro, en poste depuis octobre 2013. L’édile se prépare d’ailleurs à traverser l’Atlantique pour participer au New York Times Travel Show. Avec sa nouvelle tête de gondole ? « Oui, Garrett sera avec moi… Mais j’y vais pour faire connaître Nazaré. Les vagues sont juste une manière de vendre notre image », rappelle-t-il. A l’origine de la venue du surfeur américain, la mairie a rapidement laissé la main aux sponsors, et notamment au groupe ZON, géant de la télécommunication et des médias. Le projet « Praia do Norte » devient une marque déposée en 2010, tandis que les records de McNamara assurent la médiatisation de cette nouvelle terre sainte du « big wave surfing ». Cet hiver, particulièrement riche en tempêtes, le Brésilien Carlos Burle ou le Britannique Andrew Cotton ont joué les apôtres, surfant à leur tour des montagnes liquides qui approchent les 30 m de haut.

« Ces vagues et ce lieu sont la huitième merveille du monde » Garrett McNamara

« Ces vagues sont intimidantes, très spéciales et toujours différentes. Elles te défient en permanence », prévient McNamara. Elles sont aussi dangereuses: la BrésilienneMaya Gabeira, qui a failli s’y noyer le 28 octobre 2013 après une chute au cœur du tourbillon, peut en témoigner. Si le site de Nazaré est unique, c’est grâce à l’abysse auprès duquel la cité s’est construite. Véritable trésor pour les scientifiques de l’Institut hydrographique du Portugal (IHP), le canyon sous-marin de Nazaré, profond de 5 km, long de 210 km, a lui aussi profité de la témérité de McNamara, sollicité pour enrichir la carte de sa connaissance du territoire. « Les chercheurs n’avaient jamais eu quelqu’un sur les vagues… Donc je les aide d’abord à savoir

quelle taille elles font réellement, en leur donnant une référence visuelle in situ. Ensuite, ils m’interrogent sur les courants, leur évolution, comment ils se comportent… Pour ça, il n’y a rien de tel que d’avoir quelqu’un dans l’eau. » « Garrett a même reçu la médaille Vasco de Gama pour ses services rendus à la marine portugaise, qui a aussi un programme d’étude du lieu, rigole Pedro Pisco, qui insiste sur la transversalité du projet « Praia do Norte ». Cela va bien au-delà du surf, avec des aspects scientifiques, économiques, environnementaux, mais aussi sociaux, avec des programmes pour les enfants défavorisés ou handicapés. » Le partenariat qui liait le surfeur, la Ville et le sponsor principal ZON vient d’ailleurs d’être renouvelé après trois premières années lors desquelles les objectifs ont été dépassés, selon Walter Chicharro. « Nazaré est sur la carte du surf, et nous avons trouvé la parade à la saison basse», constate le maire, qui, s’il vient de prendre ses fonctions, n’en réfléchit pas moins à la suite, avec des rêves de compétitioninternationale et d’écoles de surf, « pour que le projet existe aussi en été ». « Tout a été très vite… On a commencé par construire le toit, maintenant il faut bâtir le reste de la maison », tempère Pedro Pisco. « Nazaré reste un village de pêcheurs. La mer est notre identité. Les vagues et le canyon en font un endroit un peu mystique… même si moi, personnellement, j’ai peur des vagues », avoue-t-il dans un sourire. Lorsque le capitaine de la marine britannique James Cook a découvert Hawaï en 1779, il a été sidéré par ces hommes qui apprivoisaient la houle. « Dans la vague qu’ils dévalent depuis des siècles avec leurs planches, les Hawaïens ne vont pas chercher la domination ni même la confrontation avec l’élément. Ils recherchent bel et bien la sensation », ainsi que l’écrit Gibus de Soultrait, auteur de plusieurs ouvrages sur la pratique moderne du he’e nalu (« glisser sur la vague » en hawaïen). A l’instar d’un McNamara, Nazaré s’est donc mis en équilibre sur le déséquilibre de ses vagues, pour y trouver une identité et un rapport à la mer renouvelés. Passé la peur, passé la stupeur, si un homme sait s’immiscer entre ses plis, Nazaré peut bien se laisser porter par sa vague géante. p > Sur Lemonde.fr

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